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Enseignant. E. S. et animateur. E. S face à  la socialisation genrée des jeunes

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par Noémie Lequet
Université Bordeaux 2 Segalen - Master sociologie : ingénierie et intervention sociales 2012
  

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PARTIE 3 - ENJEUX OPERATIONNELS ET SCIENTIFIQUES

« La seule manière de sortir de la violence consisterait à prendre conscience des mécanismes de répulsion, d'exclusion, de haine ou encore de mépris afin de les réduire à néant grâce à une éducation de l'enfant relayée par tous. »

Françoise Héritier

I- Enjeux pour le commanditaire : l'offre de formation

L'ensemble des professionnel.le.s entretenu.e.s apparaît donc comme très peu sensibilisé aux effets de leurs actions (même passives et inconscientes) sur l'entretien et la reproduction des stéréotypes de genre chez les jeunes qu'ils.elles côtoient au quotidien. Dans la perspective d'une formation courte que pourrait proposer la mairie de Bordeaux afin de luter contre le sexisme et l'homophobie, il faut alors se demander comment leur permettre de prendre conscience de cette responsabilité et de leur offrir les moyens de modifier leurs pratiques dans ce sens.

Il ne s'agit pas ici de remettre en cause complètement la socialisation genrée et la différenciation entre garçons et filles, mais d'en comprendre les conséquences pour l'un et l'autre sexe afin d'atténuer les stéréotypes et les inégalités.

1- Evaluation des participants à « Cet autre que moi »

Sept des vingt professionnel.le.s rencontré.e.s pour cette étude ont pu participer à la formation à l'outil « Cet autre que moi », organisée par la mairie de Bordeaux en fin d'année 2011. Cette formation se déroule sur trois séances d'une journée chacune. L'outil présenté est à la fois un DVD comportant quatre courts métrages mettant en scène des adolescent.e.s (des collégien.ne.s) dans diverses situations concernant la vie sexuelle et affective, et une méthode d'utilisation de ces supports vidéo avec les jeunes. En effet, l'accent est mis sur la discussion, sur l'expression des différents points de vue des adolescent.e.s, sans l'intervention d'une éventuelle autorité porteuse et garante d'une vérité. L'animateur.e ( le.la professionnel.le formé.e), en organisateur du débat, questionne les jeunes pour les encourager à s'exprimer, mais ne doit pas se positionner en juge.

En formant ces professionnel.le.s, le but est à la fois qu'ils.elles puissent mettre en place l'outil sur leur structure ou leur quartier, mais qu'ils.elles puissent également intervenir lors de l'animation du support sur d'autres quartiers ou structure de la ville de Bordeaux, afin de permettre aux jeunes d'échanger et de réfléchir sur leurs représentations.

Les entretiens menés pour cette recherche ont tous eu lieu après que la chercheure ait participé, en tant qu'assistante d'éducation dans un lycée professionnel de l'agglomération

bordelaise, au même groupe de formation que les interviewé.e.s. Ils.elles livrent donc ici leur avis sur la formation à une co-membre de la communauté éducative plus qu'à une étudiante en sociologie.

Pour deux des professionnel.le.s interrogé.e.s, cette formation et cet outil leur ont apporté une réflexion, un échange avec d'autres professionnel.le.s, chose qu'ils.elles attendaient. Il faut noter que ces deux professionnelles sont l'assistante sociale et l'infirmière scolaire, qui ont un statut un peu particulier à ce niveau-là à l'intérieur de l'école.

« (Question) : Est-ce que tu y trouves ce que tu attends à ce colloque ou à la formation ? - (Elle) : Oui, quand même, parce que ça fait réfléchir. [...] Mais ce qui est intéressant dans ces formations, c'est que tu n'es pas tout seul dans ton coin à essayer de régler tes petits problèmes. On est dans une autre réflexion. Ça nous donne une autre dimension. Non, c'est super intéressant, surtout quand on est dans son petit environnement. Moi, je suis soute seule professionnelle. [...] Ça m'aide à comprendre certaines réactions des élèves, et puis la façon de l'aborder. » (B1, infirmière scolaire)

« Je me rends compte avec cette formation que la mixité peut être vraiment très importante, à part justement si elle bloque, moi c'est ce qui m'inquiète. Nous, on a toujours travaillé avec les garçons d'un côté et les filles de l'autre. Et je me rends compte que ça manque qu'il y ait cet échange. [...] Je pense que, quelque part, j'étais dans la non-mixité. Je me cachais en me disant que ça leur permettait de parler, que la parole se libère d'avantage. Mais en même temps, c'était peut être un moyen d'être moins en difficulté. [...] Ça faisait plusieurs années que je recherchais vraiment un autre outil. C'était important pour moi. » (B3, assistante sociale)

Pour deux autres, la formation leur a apporté quelque chose, mais pas concernant le genre ou la mixité. En effet, c'est par la méthode de discussion avec les adolescents que ces deux animatrices ont été convaincues. Toute deux précisent justement qu'elles cherchaient un outil pour le débat, sans jugement.

« Moi, j'ai trouvé ça super, ça m'a fait du bien de savoir que l'on pouvait avoir des débats comme ça, depuis le temps que... Moi, je crois en ça. Et quand tu ne peux pas le faire, c'était plutôt la frustration qu'autre chose. C'est plutôt dans la discussion que je trouve que l'on construit. Donc là, on a des outils. C'est une bonne formation. Ça manque un peu d'entrainement évidemment, mais ce n'est que quand on se jettera à l'eau qu'on y arrivera... » (B6, animatrice)

« Et du coup, on nous avait présenté l'outil "Cet autre que moi". Ce qui

m'a plu, direct, dans cet outil, c'est ce côté... Parce que moi, dans le monde du travail social, je souffre de cette idée selon laquelle l'adulte détient l'autorité, la vérité. [...] Ça, c'est quelque chose qui a fait tilt tout de suite dans ma tête. Et donc, c'est vraiment ça que je venais chercher dans l'outil "Cet autre que moi". J'aurais des tas de gens à y envoyer ! » (B7, animatrice)

Enfin, trois des sept personnes interrogées sur la formation « Cet autre que moi », n'y ont pas trouvé ce qu'ils.elles étaient venu.e.s y chercher. Pour deux d'entres eux.elles, la formation ne les aide pas assez à comprendre les questions et les problèmes que pose le genre aujourd'hui et à adapter leurs pratiques sur le terrain. Le troisième professionnel, en tant qu'enseignant, ne se sent pas concerné.

« Ça n'a répondu à aucune de mes questions. La difficulté quand on travaille la question de genre... Pour moi, la question de genre, c'est la place de l'homme et de la femme dans la société et ce n'est pas la même chose que les discriminations liées à la sexualité, que le féminisme... Voilà, dans nos société à l'heure actuelle, les femmes ont un rôle qui n'est pas le même que ce qu'il a été par le passé, que ce qu'il sera dans le futur. Et c'est ça, la question de genre. Quelle est la place de l'homme aujourd'hui ? Comment est-ce qu'il peut reprendre un rôle dans la cellule familiale ? Quel est ce rôle ? Voilà, c'est toutes ces questions là. Moi, ce que j'ai ressenti à la formation... Il y a aussi plein de choses à dire sur ce que les gens vivent à titre personnel en tant qu'homme et en tant que femme dans cette société. Et d'abord, il faut balayer ça, pour ensuite travailler les représentations que l'on a, et ensuite travailler la question de genre. C'est assez compliqué. Même là, j'essaie de la définir, et je n'y arrive pas. Est-ce qu'on autorise un garçon à jouer à la dinette ? Voilà, c'est vraiment ça la question de genre pour moi. Et du coup, on n'a pas parlé de la question de genre, on a parlé de la place de la femme compliquée dans la société, de la place prédominante de l'homme dans la société. Alors, certes, on a travaillé des choses, à titre personnel ce n'est pas inintéressant, mais ça n'a pas été assez loin pour, moi, m'aider à travailler quelles sont les représentations de la société aujourd'hui vis-à-vis de l'homme et de la femme, et dieu sait qu'elles ont bougées. Et ça, j'ai l'impression qu'on n'a pas réussit à le travailler. Et pourtant, c'est ce qu'il faut qu'on arrive à travailler avec les jeunes. » (B2, éducateur spécialisé)

« Moi, je préfère que l'on travaille sur des cas pratiques. Qu'est-ce qu'on pourrait dire, comment on pourrait répondre face à cette situation là ? Moi voilà, je préfère qu'on nous forme sur vraiment des cas pratiques. Moi je ne m'y retrouve pas, non, dans la formation. » (B4, éducatrice spécialisée)

« Par principe, dès qu'il y a des formations, j'y vais, dans la mesure je peux. Moi, c'est donc déjà une démarche intellectuelle en premier.

Après, oui, le contenu... [...] - (Question) : Et t'en es satisfait de ce contenu ? - (Lui) : Est-ce que je vais m'en servir au quotidien dans mon activité d'enseignement, non, parce que les supports, ce sont des situations de l'extérieur, et moi je gère du collège. Ça me concerne moins, en tant qu'enseignant. » (B5, professeur en Segpa)

Finalement, les avis sur la formation à l'outil « Cet autre que moi » sont mitigés. Ce qu'il est important de noter, c'est que la plupart des professionnel.le.s ayant suivi cette formation développent une demande par rapport à d'éventuelles autres formations sur le genre. En d'autres termes, les déçus et les non satisfaits le sont plutôt parce qu'ils avaient de nombreuses attentes. Les professionnel.le.s satisfaits sont d'autant plus curieux d'en apprendre plus.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry