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L'habitat informel dans les villes d'Afrique subsaharienne francophone à  travers l'exemple de Niamey (Niger )

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par Hamadou ISSAKA
Université de Pau et des pays de l'Adour - Master 2 de géographie 2007
  

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7.4 Habitats informels, cités sensibles et ghettos : éléments de comparaison

Il serait difficile de faire une comparaison entre l'habitat informel de Niamey, les cités sensibles françaises et les ghettos américains compte tenu de l'évolution sociopolitique et économique des pays. Cependant, des éléments communs d'appréciation existent. La politique de zonage qui de fait entraîne une séparation entre les catégories socioprofessionnelles ou du moins entre les riches et la classe moyenne et pauvre est un phénomène qui existe même dans les grandes démocraties. Ce processus aboutit à une séparation entre les différentes catégories et conduit à la relégation. Il en est ainsi des EtatsUnis d'Amérique par exemple où selon STEBE J.M (2002), il a été développé une politique de zonage dans le but de séparer les populations aisées des pauvres, et qui a fini par aboutir à l'exclusion raciale. Toutefois, en citant SCHELLING, STEBE note que les populations peuvent constituer involontairement des ghettos dans le seul souci de rapprochement entre individus partageant certaines affinités. Aussi, l'agrégation spatiale d'individus partageant certaines valeurs (ethnie, région, etc.) conduit-elle ipso facto à la naissance d'un ghetto sans jamais qu'il n'aie existé dans l'esprit des habitants d'en créer. Cette conception du ghetto est remarquable à Niamey au niveau du secteur informel du Golf où la séparation entre les communautés est très marquée. En dehors des éleveurs et des non éleveurs dont la répartition géographique est nette à travers le secteur, les trois communautés dominantes ont chacune un chef de communauté. Il existe ainsi, un chef Zarma, un chef Haoussa et un chef Peul. Ces

trois chefs sont en fait des sous-chefs car le chef de quartier est celui du quartier Banifandou qui est celui reconnu par la Communauté Urbaine de Niamey. Les autres servent d'intermédiaires entre leurs communautés et ce chef de quartier qui est censé les défendre au niveau de l'administration. De ce point de vue, le secteur de Golf peut être considéré comme un ghetto car il remplit les critères énumérés par STEBE pour en être qualifié. Il est en effet, sous la tutelle d'une autorité extérieure, il est géographiquement délimité et regroupe des communautés partageant une même identité culturelle. C'est également une microsociété constituée d'un ensemble diversifié économiquement, socialement et professionnellement. En outre, c'est un espace déconsidéré par l'image humiliante que la puissance dominatrice et même certains habitants de la ville répandent à son sujet.

Selon le même auteur, on ne peut pas comparer les ghettos américains aux quartiers défavorisés des périphéries des villes françaises dont la précarité est le seul critère commun pour les occupants. Cette situation est la même que celle qui prévaut à Niamey où les squatters appartiennent à des communautés et à des cultures différentes. Ils se sont retrouvés dans des espaces où la faiblesse du niveau de vie semble être le seul élément commun. Cependant, contrairement aux ghettos américains, l'habitat informel de Niamey constitue non pas l'étape nécessaire dans le processus d'insertion mais plutôt une phase ultime d'insertion dans la vie citadine. Les chefs de ménage ne sont pas des néo-citadins contrairement à une assertion largement répandue. En effet, la durée moyenne de séjour des chefs de ménage dépasse la décennie. Ils sont en effet, 68,3% à vivre à Niamey depuis au moins 15 ans et 77,2% des squatters résident à Niamey depuis au moins 10 ans (ISSAKA H. 2004).

Le resserrement communautaire dont parle STEBE s'organise au niveau des villages urbains comme Goudel, Gamkallé, Saga, etc. Après avoir passé des années dans ces villages où la vie ressemble à celle de la campagne, les ruraux nouent des alliances avec les habitants de ces villages et finiront par faire des économies avec lesquelles ils finiront par acheter un lopin de terre auprès des propriétaires coutumiers. Derechef, les ghettos américains sont situés au coeur des villes et peuplés d'ouvriers alors qu'à Niamey, dans les quartiers centraux comme Maourey, Banizoumbou, Kalley etc., on ne trouve principalement que les Niameyzés (originaires de Niamey) qui considèrent les habitants des périphéries (qu'ils soient en zone lotie ou informelle) comme des Kawi-izés (campagnards) ou Tché-kanda (étrangers). Mais depuis le début de l'année 2000, le centre est en train d'être acheté par ceux qui sont appelés les nouveaux riches qui sont en train de construire des buildings à la place des maisons en banco transformant le centre ville en un véritable centre d'affaires et culturel avec les banques, les instituts privés, etc.

Pour faire simple, nous allons nous baser sur les cinq critères établis par WACQUANT L. cité par STEBE (2002) afin de comparer les trois types d'habitat qui évoluent dans des conditions sociopolitiques et économiques pour le moins inégales :

- la taille, c'est un élément de comparaison qui fait des ghettos américains une spécificité : le ghetto du West Side à Chicago comptait 300 000 habitants alors que la Cité de 4000 à La Courneuve, l'une des plus importantes cités sensibles françaises n'accueillait que 14 500 personnes réparties dans 3 600 logements. A Niamey, la ceinture verte est la plus grande concentration de paillotes dans la ville sur une bande de près de 250 à 700 m de large sur 8 km de long et abrite près de 30 000 habitants soit environ 4% de la population totale de Niamey en 2005.

- L'homogénéité ethnique ou raciale des mal logés constitue le deuxième critère de comparaison. Sur ce plan, une certaine exclusivité de la population noire s'observe dans les ghettos américains. Par contre en France les banlieues défavorisées se caractérisent par leur hétérogénéité avec par exemple plus de 80 nationalités à Sarcelles dans la banlieue parisienne (STEBE 2002). C'est presque le même phénomène à Niamey où les squatters sont de plusieurs ethnies et nationalités. Quasiment toutes les ethnies du Niger sont représentées avec bien entendu des proportions liées à la proximité de Niamey.

- La crise économique a frappé distinctement la population américaine et les Noirs ont été le plus victimes en se retrouvant majoritairement au chômage et sans protection sociale. Comme aux Etats-Unis, aucune forme de protection sociale officielle n'existe au Niger contrairement à la France où le système de couverture sociale et les minima sociaux constituent pour les ménages des garanties de ressource.

- L'abandon des territoires urbains ghettoïsés a été planifié aux Etats-Unis précipitant ces espaces dans la décadence. A Niamey, il n'existe aucun bâtiment collectif pour les démunis et seul le quartier informel de Talladjé a bénéficié d'une restructuration avec le concours des partenaires extérieurs.

- Enfin, la violence semble être la première image qu'on retient des ghettos américains avec parfois des scènes de fusillades entre gangs rivaux. Dans les banlieues françaises, ce sont plutôt des vols ou des rixes entre voisins qui s'observent. A Niamey, l'habitat informel constitue un espace où règne un calme troublé des fois par des bandits de la ville qui s'y réfugient après des forfaits.

Les mal logés du Nord comme ceux du Sud semblent partager des signes communs. Ils sont tous des exclus, des marginaux, victimes d'une relégation dont le facteur économique

constitue de nos jours l'élément déterminant. Par ailleurs, des efforts sont faits pour certains plus que pour d'autres. En France par exemple, le système social semble plus favorable qu'au Niger où les squatters ne bénéficient au mieux que d'un système social coutumier qui est loin d'être une réponse à la détresse que vivent les plus démunis dans un pays où le SMIC est à 18 500 F CFA30 soit moins de 30 €. Le problème de Niamey est d'autant plus préoccupant que la paupérisation des couches populaires ne fait que s'accentuer, la vie devient de plus en plus chère, les sécheresses répétitives avec les flux des ruraux qu'elles drainent vers Niamey. Or, l'un des problèmes majeurs auquel les autorités communales doivent faire face est bien celui de l'espace car l'extension de la ville n'est plus possible dans certaines directions (le nord et le sud-est par exemple), cette raréfaction d'espace entraînera le renchérissement du prix des parcelles et inévitablement la constitution de nouveaux habitats informels.

30 Gillard P. (2003)

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams