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L'habitat informel dans les villes d'Afrique subsaharienne francophone à  travers l'exemple de Niamey (Niger )

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par Hamadou ISSAKA
Université de Pau et des pays de l'Adour - Master 2 de géographie 2007
  

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8.2.2 Des constats aux suggestions

Pour l'instant, la décentralisation n'a apporté aucune solution pour le problème du logement en général et l'habitat informel en particulier. Ce nouveau contexte risque d'être plus propice au squattage du fait de la conjugaison de plusieurs facteurs favorables.

8.2.2.1 Les constats d'une gestion mafieuse du foncier

Les lotissements intempestifs dans le seul but d'avoir de l'argent pour régler des dettes (à l'image de l'opération gouvernementale de parcelles contre arriérés de salaire ou des lotissements opérés par la CUN pour payer ses agents) sont autant des facteurs qui ont contribué à réduire de façon drastique la disponibilité en terre à Niamey. A titre d'exemple, pour apurer les prestations de GANO SERVICE (entreprise privée liée à la CUN par un contrat de nettoyage et de balayage des rues) qui s'élèvent à 18 000 000 F CFA pour l'année 2003, la CUN n'a trouvé mieux que de lui octroyer des parcelles. Il en est de même de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale qui a acquis 118 parcelles dans le lotissement Nord-Est Sary Koubou en contrepartie des 3 080 000 F CFA que lui doit la CUN au titre des cotisations de ses agents. Cette prédation a été systématisée à partir de 1990. Ces agissements excessifs ont entraîné une croissance spatiale spectaculaire avec la production de 52 469 parcelles de 1990 à 2000 contre 51 341 pour la période allant de 1946 à 1990. C'est dire qu'en dix ans, la CUN a produit autant de parcelles que les cinquante années précédentes faisant de Niamey l'une des villes les plus étalées d'Afrique subsaharienne comparativement à sa population31. Lotir est une occasion de s'enrichir et de faire profiter ses proches au point que tout Préfet/Président tient à avoir le plus tôt possible au moins un lotissement à son actif. C'est ainsi qu'en quatre ans 8 lotissements ont été effectués par les quatre Préfets/Présidents de la CUN (2000-2004). Ce sont les lotissements Zam Koira Nord-Est, Sary Koubou, Nord-Est Niamey 2000, zone d'équipement, les extension Nord Faisceau II et Banizoumbou II, Tchangarey, extension Koira Tégui II, extension Talladjé II (SEYBOU I. 2005). La conséquence de ces lotissements irraisonnés c'est l'amenuisement du capital foncier de Niamey. La compétition pour l'accès à la parcelle risque d'être plus âpre au cours des prochaines années ce qui conduira inévitablement les populations à développer de nouvelles stratégies pour se loger.

8.2.2.2 Des suggestions pour un habitat pour tous

Pour faire face au problème de logement d'une manière généralement et à celui de l'habitat
informel en particulier, il nous semble important d'envisager des pistes à court et moyen

31 N'djamena (Tchad) avec plus d'un million d'habitants s'étend sur 7 120 ha ; il en est de même pour la ville de Dakar au Sénégal qui avec plus d'un million d'habitants occupe une superficie de 8 250 ha. Wikipédia.org [2007]

termes. Ces pistes sont des suggestions globales et spécifiques. Pour les premières il s'agira à court terme de :

- Interdire tout nouveau lotissement à Niamey pendant au moins 5 ans, le temps que les lotissements antérieurs puissent être effectivement mis en valeur. Au bout de cette période, toutes les parcelles non mises en valeur doivent retourner à la propriété privée de la collectivité conformément aux textes. Par ailleurs, toutes les paillotes situées dans les interstices de la ville doivent être déguerpies. Les autorités doivent contenir l'habitat informel dans des proportions des secteurs limités comme à Ouagadougou au Burkina Faso (carte n°5). - Adopter une véritable politique de l'habitat à travers la création d'une banque de l'habitat et l'encouragement de la création des cités à travers une garantie de l'Etat ou des collectivités auprès des banques. Dans cette nouvelle politique, les urbanistes, les architectes et les dirigeants doivent être plus réalistes en se convaincant du fait la ville doit être conçue en tenant compte des réalités socioéconomiques des citadins. Il ne sert à rien d'édicter des normes technicistes que personne ne respecte. La ville doit refléter la réalité locale. C'est pourquoi, au lieu d'interdire systématiquement la paillote dans les textes et être incapable d'empêcher sa propagation dans tous les paysages de la ville, il serait plus réaliste de permettre à ceux qui n'ont pas assez de ressources de bâtir des cases. Celles-ci ont l'avantage d'avoir le bas en banco et seul le toit est en chaume et donc moins exposé au risque d'incendie. Mais la case doit être vue et acceptée comme une étape transitoire pour beaucoup avant d'arriver à la maison en banco, puis en dur si les conditions économiques le permettaient. Niamey est une ville pauvre et l'habitat des pauvres doit être respecté : c'est une question de bon sens vu qu'on ne peut pas expulser les pauvres de la ville, ni leur offrir un logement répondant aux normes urbaines.

- Faciliter l'accès à la parcelle pour les démunis. Cela est possible à travers une vente de parcelle à prix modéré32 (comme dans les opérations de recasement) pour permettre la mixité sociale ou du moins géographique des citadins et éviter le sentiment de rejet et de frustration qu'occasionne la relégation. Il est démontré qu'à Niamey le statut foncier détermine dans une large mesure la nature de l'habitat. En outre, comme dans tous les lotissements, il a été convenu entre les autorités et l'association islamique que sur 100 parcelles produites, une soit réservée à la construction d'une mosquée, il serait plus intéressant que 32 autres soient mises à la disposition des pauvres même si elles n'auront pas la même dimension que les autres.

32 Dans les opérations de restructuration par exemple, l'acquéreur paie 1/3 du prix officiel pour obtenir l'acte de cession. Il est possible de ramener ce montant à 1/4 pour permettre à un grand nombre de citadins d'avoir une parcelle.

Carte n°5 a : Niamey (2006) Carte n°5 : Ouaga
·ougou (1993\

ource : http://www.mgm.fr/PUB/Mappemoncle/M196/Prat.pdf, simplifie par ISSAKA H. (Mai 2007)

Espace bad Espace non bad

Zone d'habitat spontane Zone bois6e

mmiVillage urbain Zone marecageuse

Zone lotie avant 1990 Zone lotie aptis 1990 Zone administrative

=I Zone industrielle

pZone commerciale

Zone militaire Aeroport

Cours et retenue d'eau lie

Route principale

Carte n°5 : Occupation de l'espace a Niamey (Niger et a Ouagadougou (Burkina-Faso)

A moyen terme :

- les différents textes doivent être adaptés aux réalités locales ce qui ne suppose pas un refus de la modernité. Mais, les textes doivent tenir compte des réalités socioéconomiques du pays. Tous les documents d'urbanisme doivent être popularisés.

- L'Etat doit acquérir toutes les zones inondables (bras morts du fleuve, rivières) pour les mettre à la disposition de ceux qui voudraient y pratiquer le jardinage. C'est une manière d'éviter leur occupation par les squatters et une prévision contre les inondations. Ces genres d'espace qui ont été déjà occupées doivent être déguerpis. Mais avant, les squatters doivent bénéficier d'un espace favorable où l'eau et l'électricité seront mises à leur portée. Des parcelles leur seront cédées à un prix tenant compte de leur moyen et l'argent devrait servir à aménager leur site. Ceux qui seraient incapables de payer l'argent pourront être engagés dans les opérations d'aménagement pour rembourser ce qu'ils doivent. Pour éviter toute transaction de ces parcelles, elles resteront la propriété de l'Etat, les occupants n'ayant qu'un permis d'habiter, ils pourront y rester autant d'années mais ne pourront en aucune manière vendre ces terrains ou les louer à des tiers. Un déménagement entraîne un retour du terrain à la propriété effective de la collectivité qui sera seule habilitée à l'octroyer à quelqu'un d'autre de même statut que le précédent.

- La SONUCI vue de la mauvaise gestion qui la caractérise (cf. annexes II et III) doit être dissoute et remplacée par une Agence autonome de production et de gestion immobilière. Cette agence aura pour mission : les études techniques pour la construction des zones d'habitat, l'établissement des plans de lotissement et leur réalisation ainsi que la gestion d'immeubles qu'elle aura à construire, et qui seront destinés à la location simple ou à la location vente. Elle doit bénéficier d'une subvention de l'Etat mais sera astreinte au paiement d'impôt sur son chiffre d'affaire comme toute société commerciale33. Ses cadres doivent être des fonctionnaires détachés de leur structure d'origine mais qui continueront d'être payés par l'Etat. Pour les quartiers spontanés actuels, elle procédera à leur restructuration en percevant une taxe d'aménagement foncier par ménage d'un montant de 60 000 F CFA. Auparavant, elle doit dresser un état des lieux pour dresser la liste des propriétaires. A l'image de la Société Nationale de Gestion Immobilière du Bénin, elle doit établir un plan de lotissement rationnel dans lequel seront prévus les emplacements des infrastructures nécessaires. Les lots seront subdivisés en parcelles numérotées de taille variable. L'établissement des voies de circulation et des réserves foncières ampute l'espace disponible d'une superficie dont le

33 N'BESSA B. OKOU C. TOSSA J. et al (1989) Formation de l'espace urbain et intervention de l'Etat : le paradoxe béninois. Pp 77-88, In : La péri-urbanisation dans les pays tropicaux. Espaces tropicaux n°1, Bordeaux, 1989, 384 p. VENNETIER P. (sous la dir.)

rapport à la surface totale constitue un coefficient de réduction applicable à toutes les parcelles qui seront redistribuées (par exemple 5% ou 10%). Elle travaillera sous forme de Forum hybride où se retrouveront pour la production des parcelles par exemple, outre les représentants des collectivités territoriales, ceux des propriétaires coutumiers ainsi que les délégués des candidats aux immeubles (bâti ou non) dont la liste est préalablement portée à la connaissance de tous pour éviter toute usurpation de titre et que les textes sur l'attribution des parcelles soient respectés notamment la mise en valeur effective de la première parcelle. Celui qui a une parcelle ne pourra prétendre à une seconde qu'à condition qu'il n'y ait aucun candidat à une première parcelle.

- L'Agence doit introduire un système de référencement de l'habitat existant à l'aide d'un système d'information foncière (S.I.F) afin de limiter l'accès au foncier aux privilégiés dont certaines disposent de plusieurs dizaines de parcelles à Niamey alors que d'autres citadins courent toujours derrière une hypothétique parcelle. Ce S.I.F permettra au-delà de la limitation des parcelles aux spéculateurs, de permettre aux services des impôts de recouvrer la taxe foncière. La mauvaise distribution de parcelles qui se pratique actuellement est inacceptable. On ne saurait en effet comprendre que dans une ville de 674 950 habitants en 2004, 93 700 parcelles aient été produites soit en moyenne une parcelle pour 7 habitants. Or, rares sont les concessions abritant les ménages mono familiales : c'est dire que l'essentiel des parcelles est concentrée entre les mains de quelques individus. C'est pourquoi, le respect des textes doit être une priorité notamment le respect du délai de 5 ans prévu entre les lotissements et la vérification de l'effectivité de l'occupation des anciens lotissements avant d'entreprendre un nouveau lotissement.

A long terme

Il s'agira de créer des centres urbains secondaires pour décongestionner Niamey à l'instar de certaines villes d'Afrique subsaharienne francophone comme Ouagadougou, Cotonou, etc.,. Cela est possible à travers le développement du réseau routier et l'orientation des compagnies de transport sur les différents axes afin de permettre à tous ceux qui ont leurs activités à Niamey de pouvoir les mener sans contrainte majeur notamment au niveau du coût du transport et de la disponibilité des véhicules en temps opportun. Déjà la Société des Transports Urbains de Niamey et Halem Transport (une compagnie privée) desservent les localités situées à des dizaines de kilomètres de la ville au prix de la course de taxi entre certains quartiers de la ville (300 à 400 F CFA). Dans cette perspective, le développement des villes satellites s'avère une solution, et qui finira par s'imposer étant entendu que bientôt Niamey ne disposera plus d'espace pour lotir. La commune de Liboré qui a refusé d'être la

sixième commune de Niamey, située à une vingtaine de kilomètre serait indiquée. Il en est de même de la ville de Kollo (chef lieu de département et situé à une trentaine de kilomètre de Niamey). Plus tard, des communes comme Kouré, Torodi, Say, Karma, etc. situées toutes à moins de 70 km de Niamey pourraient prendre le relais.

Les suggestions spécifiques concernent les acteurs actuels de l'habitat informel. La résolution du problème de squattage passe par l'application de mesures strictes allant dans le sens d'une vraie justice sociale. Pour ce faire, il convient d'agir du côté de tous les acteurs impliqués dans le phénomène.

Les acteurs officiels (techniciens et dirigeants politiques)

Avant de créer la nouvelle agence dont nous avons fait cas, il faudrait faire un état de lieu de la situation actuelle afin de situer les responsabilités dans la gestion calamiteuse du foncier urbain à Niamey, mauvaise gestion qui explique en partie le développement de l'habitat informel. Les populations commencent à agir dans le sens de respecter les lois notamment à travers les mobilisations pour empêcher les morcellements des cours d'école. Pour éviter de telles pratiques, il faudrait mettre à la disposition de la justice tous ceux qui sont impliqués dans les malversations foncières (déclassements irréguliers, distribution gratuite de parcelles aux parents et connaissances, détournement des fonds de la vente de parcelles, etc.).

Les propriétaires coutumiers

La situation que vivent les propriétaires coutumiers constitue un drame pour eux-mêmes mais surtout pour leurs descendants. N'ayant pour la plupart que l'agriculture comme activité principale, l'expropriation de leurs champs les placent dans la situation de sans emploi à vie. La vente des parcelles reçues en guise de dédommagement n'est pas une source durable de revenu. Pour permettre aux propriétaires coutumiers et à leurs héritiers de vivre en profitant de l'expropriation de leurs biens fonciers, l'Etat devrait faire en sorte que dans le cadre d'un programme général de l'habitat, l'Agence immobilière ou la banque de l'habitat puisse aider les propriétaires coutumiers. Cette aide consiste à financer la construction d'immeubles de plusieurs niveaux sur au moins 15 des 25% des parcelles qu'ils reçoivent en guise de dédommagement. La construction doit se faire avec l'intervention d'un huissier et un échéancier doit être établi pour permettre à l'Organisme de recouvrer ses droits et permettre au propriétaire et à ses héritiers de disposer effectivement des immeubles. Durant cette période de recouvrement des frais, 40% du montant de la location doivent revenir au propriétaire coutumier afin de subvenir aux besoins de sa famille. Cette procédure constituera certainement un moyen d'éviter les lotissements clandestins qui seront sans intérêt pour les propriétaires coutumiers.

Les squatters

Il est indéniable que c'est la paupérisation liée au manque ou à la faiblesse de revenu qui explique en partie l'habitat informel à Niamey. Or, aucune forme officielle d'aide au logement n'existe à Niamey. Le système social traditionnel qui consiste à héberger des proches ne constitue pas la solution à l'accès au logement d'où le recours à l'habitat informel. Cependant, cet habitat informel n'est pas le seul fait des petites gens. Certaines personnes construisent uniquement pour la location. Pour limiter la proportion de l'habitat informel, il faut recenser tous les squatters afin d'avoir une liste nominative et fiable des ménages. Sur cette liste, il sera précisé le statut d'occupation du squatter (locataire, logés gratuitement ou propriétaires) afin qu'aucun ménage ne puisse bénéficier de plus d'une parcelle au moment de la régularisation et aucun propriétaire externe, disposant déjà d'une parcelle en zone lotie ne pourra bénéficier d'une parcelle en cas de régularisation. Il faut à tout prix éviter le scénario de la régularisation de Boukoki où certains squatters ayant bénéficié des parcelles au prix recasement c'est-à-dire 165 000 F CFA au lieu de 615 000 F CFA (le prix officiel), ont vite vendu leurs parcelles et sont partis s'installer dans le quartier informel de Koira-Tédji. Ceux qui tenteront de tricher doivent être poursuivis en justice.

Le réel problème qui se pose est celui d'un aménagement foncier à Niamey comme le souligne Belko Maïga (G.)34, « les causes des échecs des opérations d'aménagement foncier sont à rechercher dans la violation des règles d'appropriation des terrains ; le refus de l'obligation des règles de prospects ; le manque de transparence dans la gestion des opérations ; le développement d'une spéculation foncière administrative nourricière de la spéculation privée. Le manque de justice dans les procédures d'allocation et de cession de terrain, l'utilisation des ressources provenant de l'aménagement foncier pour les besoins de fonctionnement, la confusion dans les procédures d'allocation et les escroqueries foncières (attribution d'un même terrain à plusieurs personnes). La vente par anticipation des parcelles d'un aménagement foncier non réalisé ».

34 Belko Maïga (G.), Les Professionnels de l'aménagement foncier, étude du cas du Niger, In Aménagement foncier urbain et gouvernance locale en Afrique sub-saharienne. Enjeux et opportunités après la conférence Habitat II. Rapport du colloque régional des professionnels africains. Ouagadougou Burkina Faso du 20 au 23 avril 1999.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand