WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Le Front Farabundo Marti de Libération Nationale au Salvador: 1980- 2009

( Télécharger le fichier original )
par Kacou Elom Jean-Michel ADOBOE
Université de Lomé Togo - Maà®trise en histoire contemporaine 2010
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

2.3. La participation de la population

Comme nous l'avons souligné précédemment, la réussite d'une révolution conduite par une guérilla dépend aussi d'une adhésion du peuple c'est-à-dire que d'une certaine manière que les couches sociales adhèrent à l'idée révolutionnaire et y participent selon leurs possibilités.

Dans leurs grandes majorités les guérillas révolutionnaires en Amérique latine ont eu en leur sein des militants provenant de catégories peu touchées par la politique traditionnelle. Etant donné le contexte défavorable au Salvador : pour une grande partie de la population qui doit faire face à de nombreuses difficultés économiques, sociales et même politiques pendant qu'une minorité vit dans l'opulence et jouit de tous les droits et richesses ; militer au sein du mouvement révolutionnaire et donc au sein du FMLN est la seule façon pour les couches sociales défavorisées d'aider ce mouvement à réaliser son objectif pour le bien de tous. Ainsi les organisations révolutionnaires en Amérique latine et particulièrement au Salvador recrutaient la majorité de leurs militants parmi les jeunes, les femmes, les paysans, les anciens militaires ou des déserteurs et parfois même des intellectuels.

En effet en ce qui concerne les jeunes (des adolescents et enfants surtout), il faut noter que l'idéalisme, l'enthousiasme et parfois l'inconscience les rendent plus sensibles à l'action de libération. Adolescents, parfois enfants de onze à douze ans, ils sont mûrs pour le combat que pour l'action politique (Gandolfi 1989 : 44). Presque dans toutes les guerres de libération, ils furent mobilisés pour le combat, où ils ont payé un lourd tribut à la cause, portant un fusil parfois plus grand qu'eux, constamment sur la brèche dans les embuscades, participant aux attentats, souvent après quelques journées à peine de présence dans des camps d'entraînement. Cette participation de jeunes et d'enfants (Cf. photo n°4) dans la guerre civile eut des effets négatifs même dans la période de l'après-guerre

Photo n°4 : un jeune enfant combattant du FMLN

Source : Erdozain et Barth (1982 : 35).

Evidemment du fait des exclusions sociales, de la pauvreté et de la circulation des armes dans le pays, on assiste au Salvador, le développement de bandes ou gangs armés (les Maras), à l'accroissement des crimes perpétrés par des jeunes hommes, au développement de la violence sociale sous toutes ses formes.

Pour la femme aussi, l'action est une autre libération. Elle se sent alors l'égale de l'homme dans des pays où elle a souvent été habituée à être sa subordonnée, voire son esclave, à ne pas participer à la vie communautaire, à être exclue, en tant que femme, des bureaux de vote et des manifestations de la vie civique.

Au Salvador, les femmes ne sont pas restées en marge de la guerre civile qui oppose depuis 1981 le FMLN et les gouvernements démocrate-chrétien et d'extrême-droite puissamment soutenus par les Etats-Unis. Cette guerre a fait irruption dans la vie des femmes, les a précipitées hors des cuisines pour participer activement au projet révolutionnaire de la guérilla malgré le fait que beaucoup se sont contentées de subir, non sans héroïsme, la violence, la terreur et la misère supplémentaires produites par la guerre. C'est ce qui nous montre clairement Jules Falquet dans l'un de ses articles sur la question66(*). Selon lui, la participation des femmes à la vie du pays, aux luttes sociales du pays puis à la guerre civile révolutionnaire, a été très importante. Loin de faire une analyse voire une étude approfondie de la participation des femmes, nous allons juste aller à l'essentiel c'est-à-dire montrer pourquoi cette adhésion des femmes au projet révolutionnaire ? Et quelle a été leur rôle ?

Si la guérilla du FMLN a pu s'enorgueillir de compter parmi ses quelques douze mille combattants un tiers de femmes- un pourcentage élevé pour les guérillas latino-américaines- c'est que les femmes étaient, depuis avant la guerre et malgré un système patriarcal écrasant, fort actives dans la vie du pays (Falquet 1997 : 2).

Face au contexte politique et social qui prévalait vers la fin des années 1960 et le début des années 1970, les femmes eurent une grande participation dans la vie politique du pays en dénonçant les abus et les dérives du pouvoir en place. Ce qui a motivé que beaucoup voire que certaines s'intéressèrent à la lutte révolutionnaire s'explique par le fait qu'elles ont fait leurs pas à partir des années 1960 et 1970 aux activités de la théologie de la libération (réunions de lecture critique de la réalité sociale appuyées sur la Bible, les sessions d'alphabétisation, la formation des coopératives etc.). Ceci leur a permis, légitimement aux yeux des hommes, de mettre le nez hors du foyer.

Ainsi donc, les femmes ont même été parmi les premiers pionniers à réaliser les organisations populaires qui opteront pour la lutte armée révolutionnaire. C'est dans ce sillage que la première formation de lutte armée révolutionnaire issue de la scission du PCS en 1970 et, qui va basculer dans le camp de la guérilla, était notablement porté par des femmes. Des femmes se distingueront dans la lutte armée clandestine et parviendront même au sommet de la hiérarchie militaire au sein de la guérilla, ceci parfois causant des démêlés. C'est le cas par exemple de la dirigeante principale du syndicat des enseignants (ANDES 21) qui fut une femme : Mélida Anaya Montes, bien que la direction du syndicat fut largement masculine. C'est l'une des premières organisatrices, clandestine, de la lutte armée révolutionnaire, où elle devient la Comandante Ana María, dirigeante en second. Sa détermination, son prestige et sa clairvoyance en font, avec le dirigeant ouvrier Caetano Carpio (ancien secrétaire général du Parti communiste salvadorien et fondateur de la guérilla sous le nom de commandant Marcial) un des principaux piliers de la lutte révolutionnaire pendant plus de dix ans (Falquet 1997 : 2-3).

Malheureusement celle-ci fut assassinée sous ordre de Marcial, à cause probablement des différents idéologiques qu'ils existaient entre-eux, et surtout qu'il craignait semble t-il qu'elle ne lui ravisse la direction de la Révolution. Poussées à embrasser l'idéal révolutionnaire pour diverses raisons67(*), les femmes eurent une participation significative au sein de la guérilla. Voila ce que nous en dit Falquet (1997 : 3): « Mais comme généralement d'autres membres de la famille sont du côté des compas guérilleros, elles donnent volontiers un coup de main - la force de l'habitude : nourrir ces jeunes gens, laver leurs vêtements, voire pour les plus jeunes et les plus dégourdies, prendre en charge les communications radios, apprendre quelques rudiments d'infirmerie... et pour les plus exceptionnelles, non sans difficultés, prendre un fusil pour venger leurs morts et pour lutter pour un meilleur futur pour les enfants du Salvador. ». Ainsi donc certaines étaient cuisinières, d'autres infirmières, d'autres chargées de l'éducation des enfants orphelins, une infime minorité était combattante en première ligne et moins nombreuses étaient les gradées qui emmenaient leurs compagnons au combat. Ces femmes ont donc joué un rôle d'exemple déterminant et ont puissamment lutté pour favoriser la participation des femmes. Pour souligner les raisons de cette participation féminine, certaines à l'instar de Puyo et Taracena pensent que mis à part que cette participation était nécessaire pour accroître l'effectif des guérilleros ; elle était aussi nécessaire pour s'affirmer dans la vie politique et réclamer une certaine émancipation : « si cette participation s'explique surtout par le manque réel de combattants, elle renvoit aussi au souci d'une égalité de genre au sein des groupes guérilleros. » (Puyo et Taracena 2007 : 13).

Il faut aussi mentionner que le paysannat n'était pas en marge des mobilisations populaires pour soutenir la guérilla. Les paysans sont bien entendus l'élément le plus nombreux pour diverses raisons : parce que la guérilla étant essentiellement rurale, ils constituent un élément de recrutement naturel, parce qu'aussi une des revendications essentielles des MLN68(*) porte sur des reformes profondes de la société, dont la reforme agraire est en général l'élément central (Gandolfi 1989 : 46-47). Quand on voit la composition du FMLN il est n'est pas fortuit de voir qu'elle recrute en son sein de nombreux paysans étant donné qu'on a même souligné que la guérilla se réorganise dans les milieux ruraux et quand il s'agit d'une guérilla urbaine le nombre de participant est limité ou du moins se recrutent dans les milieux universitaires. Il faut quand même souligner que dans le cas salvadorien, il y a quand même dans les milieux urbains quelques foyers qui ont adhéré à la révolution témoignant ainsi de l'importance réelle de l'élément urbain dans la lutte de libération. C'est le cas du Parti révolutionnaire des travailleurs centraméricains, qui a rejoint plus tard la composition du FMLN ; des Ligues populaires ouvrières du Salvador etc.

Une place doit être aussi réservée aux anciens militaires déserteurs et qui, passés dans la résistance ou dans un mouvement de libération nationale, sont des recrues de choix par leur formation, leur entraînement et par la possibilité qu'ils ont d'être utilisés pour l'encadrement d'autres militants (Gandolfi 1989 : 47). Ainsi certains soldats adhérant au projet révolutionnaire de la guérilla au Salvador, ont dû pour certaines raisons la rejoindre et combattre avec elle pour atteindre leur objectif.

Enfin il faut noter la participation estudiantine, des universitaires et des milieux religieux aux diverses organisations révolutionnaires de libération en Amérique latine. Les membres des mouvements de libération sont souvent recrutés dans les universités, voire dans les lycées. Ce sont des milieux du savoir et ce sont là où les futurs révolutionnaires ont été animés de doctrines révolutionnaires dont le marxisme. C'est la raison pour laquelle ces établissements sont si fréquemment fermés par les autorités.

Au Salvador, le mouvement Résistance nationale rassemble surtout des intellectuels, des étudiants, des membres de la petite bourgeoisie (Gandolfi 1989 : 49).

Quant au clergé il a souvent fourni, également par idéalisme, de nombreux éléments aux mouvements latino-américains. Au Nicaragua par exemple, les principaux fondateurs du FSLN ou du « groupe des douze » sont d'anciens séminaristes ou étudiants souvent réfugiés au Costa Rica ; au Salvador l'engagement de l'Eglise et du clergé notamment des jésuites pour l'amélioration des conditions de vie et leur soutien à la guérilla témoignent de ce fait.

Face aux différentes actions de la guérilla, la réaction du gouvernement salvadorien ne se fit pas attendre.

* 66 Falquet J. (1997) : « Les Salvadoriennes et la guerre civile révolutionnaire » in Clio. Histoire, femmes et sociétés n°5, pp. 1-10.

* 67Pour avoir des informations approfondies sur ces raisons, voir Falquet J. (1997) : « Les Salvadoriennes et la guerre civile révolutionnaire » in Clio. Histoire, femmes et sociétés n°5, pp. 1-10.

* 68 Mouvement de libération nationale. Pour en savoir beaucoup plus sur la nature et les buts de ces mouvements, cf. Gandolfi (1989).

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard