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Platon, l'Egypte et la question de l'à¢me

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par Frédéric Mathieu
Université Montpellier III - Paul Valéry - Master I de philosophie 2013
  

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II. La tripartition de l'âme

... Je veux te faire connaître le vrai dans ton esprit En sorte que tu fasses le juste devant toi...

Papyrus Chester Beatty IV, vers 1200 avant J.-C.

Introduction

La théorie des « fonctions tripartites indo-européennes » thématisées par G. Dumézil s'avère, de manière générale, un outil censément précieux pour l'analyse que nous pouvons donner de la littérature antique. La triade précapitoline formée de Jupiter, Mars et Quirinus341, rend ainsi compte de cette tripartition au sein de la religion romaine archaïque. Pour ce qui nous intéresse, elle irrigue également et ostensiblement la pensée grecque. Elle transparaît, comme l'ont montré les études de J.-P. Vernant, dans le mythe de l'Âge d'or et du déclin des races relaté par Hésiode342. Déclin des races représentantes chacune d'une fonction spécifique qui trouve son pendant chez Platon dans la dégradation des régimes politiques343 L'épisode de Pâris et de la pomme de Discorde la manifeste

341 G. Dumézil, La religion romaine archaïque, Paris, Payot, 2000.

342 Hésiode, Les Travaux et les jours, v. 109-201, VIIIe siècle avant J.-C. J.-P. Vernant propose de ce récit une interprétation trifonctionnelle dans son chapitre intitulé « Le mythe hésiodique des races. Essai d'analyse structurale », dans Mythe et pensée chez les Grecs, Paris, Maspero, 1965, p. 13-79. Il reprend par là-même une intuition que Dumézil exprimait déjà en 1941 dans un premier ouvrage consacré à la triade précapitoline : « Il semble bien que, tout comme le mythe indien correspondant, le mythe des Races, dans Hésiode, associe à chacun des Âges, ou plutôt des trois couples d'Âges, à travers lesquels l'humanité ne se renouvelle que pour se dégrader, une conception fonctionnelle (religion, guerre, labeur) des variétés de l'espèce » (G. Dumézil, Jupiter, Mars, Quirinus. Essai sur la conception indo-européenne de la société et sur les origines de Rome, Paris, Gallimard, La montagne Sainte-Geneviève, 1941, p. 208-215). Pour compléter ces analyses, nous renverrons notre lecteur à l'article d'A. Ballabriga, « L'Invention du mythe des races en Grèce archaïque », article en ligne dans Revue de l'histoire des religions (RHR), n°3, Paris, 1998.

343 Le fait est que Platon s'appuie explicitement sur le mythe hésiodique pour fonder en nature (les races sont associées à des métaux) le régime triparti préconisé pour la Kallipolis au troisième Livre de la République (Platon, République, L. III, 414b-415e). Tripartition que répercute (et favorise) celle des principes de l'âme, conformément au paradigme « macrogrammatique », reproduisant leur harmonie et, plus encore, leur hiérarchie. Platon se sert ainsi de la jurisprudence des cinq races hésiodiques comme d'une légitimation mythique, comme d'un « noble mensonge » conférant une dimension sacrée à la disparité des conditions sociales réservées aux différentes instances de la cité (gardiens, auxiliaires, producteurs). Pour ce qui a trait à

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encore plus ostensiblement. Le mythe, rapporté par Homère, met en scène le prince d'Ilion sommé de décider laquelle, d'Héra, d'Athéna ou d'Aphrodite, est la plus désirable des déesses3' . Élisant Aphrodite, Pâris élit l'amour ; renonce ainsi, en déboutant les deux autres déesses, aux deux fonctions qui leur sont associées : respectivement, la royauté et la victoire guerrière. Pâris aura Hélène ; la guerre de Troie aura bien lieu. H n'y a guère lieu de s'étonner du fait que l'on retrouve des résurgences de cette tripartition dans les dialogues platoniciens. Qu'il soit question de l'âme, comme dans le Phèdre 345' ou même de la cité bien gouvernée -- de la kallipolis évoquée dans la République 346-, la division trifonctionnelle paraît trouver un accueil favorable dans l'oeuvre de Platon. Plus surprenant ceci que ce motif irrigue avec une récurrence toute spécifique les passages égyptiens. L'Égypte n'est jamais loin lorsque Platon parle de tripartition. Et cependant, quoi de moins égyptiens que la tripartition ? Le schème était-il pas censé ne s'appliquer qu'aux civilisations indo-européennes ? Qu'a-t-elle à voir avec l'Égypte ?

Ne brûlons pas d'étapes. Accordons-nous, avant que d'aborder cette épineuse question, quelques instants pour mieux comprendre de quoi il retourne. Un mot d'abord sur la tripartition. Le thème, en soi, est loin d'être inédit. Sa thématisation est en revanche bien plus récente. Georges Dumézil, philologue et comparatiste, devait y consacrer la plus grande partie de son oeuvre347. Il mit en lumière, dès les années 1930, l'existence d'un tropisme indo-européen, se traduisant autant dans l'organisation sociale que dans les structures narratives et dans la religion, aux panthéons de peuples aussi variés que les Arméniens, les Celtes, les Indo-iranienns, les populations baltes, germaniques, slaves ou latines, et bien évidemment présent au coeur du bassin méditerranéeen. L'auteur de Mythes et épopée appelle « trifonctionnalité », « tripartition » ou « idéologie trifonctionnelle » cette conception apparemment commune à ces populations indo-européennes, qui les amène à segmenter spontanément leur différents systèmes -- mythologique, social, politique, etc. --, en trois groupes fonctionnels. Précisément, le premier groupe se définit par la fonction royale ou régalienne ; le deuxième groupe, par la fonction guerrière ; vient en dernier ressort la fonction de production. La fonction régalienne est investie d'une dimension sacrée qui la dédouble, selon la figure du roi-prêtre qui ne sera pas sans nous rappeler celle

la dégradation des systèmes politiques, chaque système politique étant corrélatif d'une forme d'âme humaine (idem. op. cit. L. VIII, 546d-547c), celle-ci s'inscrit dans la vision cyclique de l'histoire, frayant depuis l'âge d'or jusqu'à l'avènement de la tyrannie, laquelle marque l'extrême limite de l'entropie et annonce le passage à une nouvelle « Grande Année ». Comme l'âme se régénère pour se réincarner (palingénésie), le cyde recommence et dans son aube, renouvelle la Kallipolis, soit l'Athènes archaïque mentionnée par Critias. La fondation de l'Académie s'inscrit peut-être dans cette optique, se donnant pour projet de former les élites à l'avènement de cette cité qui, dès alors, n'a plus rien d'utopique.

344 Homère, Iliade, XXIV, 26-30.

345 Platon, Phèdre, 245c sq.

346 Platon, République, L. IV, 436a-445a.

347 G. Dumézil, Mythe et Épopée, 3 vol., Paris, Gallimard, 1995.

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du roi-philosophe, un thème platonicien. Ces trois classes s'articulent selon une hiérarchie portant la fonction régalienne aux nues. Suit la fonction guerrière, puis la fonction de production. Pour faire image, cette division se laisse apercevoir dans les trois ordres de l'Ancien Régime : « ceux qui prient » (oratores), « ceux qui combattent » (bellatores), « ceux qui travaillent » (laboratores)348. Le tournant révolutionnaire et la dissolution consécutive des ordres en 1789 est l'événement qui par ailleurs, pour Dumézil, met fin à l'efficace de ce modèle explicatif

Problématique

Que la tripartition se retrouve chez les Grecs, dont acte349 Il s'agit après tout, aux dires de Dumézil, d'un schème indo-européen. On pourrait alors objecter à notre démarche qu'il serait inutile d'en rechercher des traces dans la pensée d'Égypte qui elle, n'y serait pas sensible. Remarque légitime et fort embarrassante. A tout le moins, de prima facie ; mais qu'il y ait lieu de nuancer pour au moins deux raisons. Posons, en premier lieu, que l'inadéquation du paradigme triparti semble en effet être une réalité pour la plus longue période de l'histoire égyptienne. Or, il s'agit, au préalable, de bien cerner de quelle Égypte il est question. L'Égypte de Platon est une Égypte héllénisée350, fortement imprégnée de culture grecque. Philippe Derchain, dans son étude sur Les impondérables de l'hellénisation 351, a suffisamment montré combien l'univers culturel égyptien de cette époque avait été profondément bouleversé et influencé au fil des siècles de fréquentation avec les Grecs. L'Égypte dont nous entendons traiter à de ce fait subi une puissante influence indo-européenne, notamment à la suite de la politique philhellène des pharaons saïtes et des dominations perses de 525 à 404 avant J.-C. 11 n'est guère surprenant, dans de telles conditions, d'y retrouver des tropes « occidentaux ». Il se pourrait, en second lieu, que la tripartition présente dans les textes égyptiens (et en particulier les plus anciens, antérieurs à ces influences) n'ait aucun lien, aucun rapport avec l'idéologie trifonctionnelle indo-européennes. A supposer que Platon se soit forgé l'idée d'une tripartition de l'âme en contact avec des documents égyptiens (ce qui reste à démontrer), deux possibilités s'offrent dès lors à nous, entre lesquelles nous ne pouvons pas trancher : soit la tripartition de l'âme est bien dès l'origine une doctrine égyptienne indépendante du schème global de la tripartition ; soit il s'agit d'une acculturation

348 Typologie empruntée à la théorie des ordines formulée par Adalbéron de Laon au coeur du XIe siècle (cf. Carmen ad Rotbertum regem. Poème au roi Robert), revisitée par Gérard de Cambrai (cf. Les trois ordres ou l'imaginaire du féodalisme) à travers le prisme de la Cité de Dieu de saint Augustin.

349 De nombreuses autres instanciations du schème de la tripartition sociale ont été colligées par Y. Atsuhiko dans « Survivances de la tripartition fonctionnelle en Grèce », publié dans la Revue de l'histoire des religions, RHR 3, tome 166 n°1, 1964, p. 21-38.

350 Cf. supra, Chapitre I : Le voyage de Platon.

351 Ph. Derchain, Les impondérables de l'hellénisation, Turnhout, Brepols, Monographies Reine Elisabeth, 2000.

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de la tripartition générique des Grecs que l'Égypte aurait appliquée à l'âme, en sorte que Platon puisse ensuite se l'approprier sous cette modalité à la faveur de son voyage.

Méthode et corpus

Pour peu que l'on s'y penche, le thème de la tripartition se dote dans les dialogues d'une dimension à la fois politique et spirituelle. 11 s'agit moins, en vérité, de dimensions que de niveaux, de stratification. Car l'âme de la cité reflète l'âme de l'individu constitutif de cette cité. Ainsi, l'ordonnancement des trois principes en l'âme influe sur celle des trois principes en la cité. L'homme gouverné par sa raison trouvera sa place dans une cité administrée par la classe dépositaire du principe rationnel. Réciproquement, la cité gouvernée par la raison engendrera par ses institutions d'autres individus dont l'âme est dominée par le logistikon. Le régime politique est donc pleinement comptable du caractère de l'homme de la polis ; et l'homme de la polis, des lois qui le voient naître. Que l'homme soit dominé par son désir, son appétit de richesse, et la cité sera ploutocratique. Qu'il s'abandonne à ses passions, qu'il se laisse dévorer par elles, et c'est la même manière de tyrannie qui sévit en son âme qui s'imposera à la cité. Ainsi du reste. C'est assez dire que la tripartition est un schème transversal, et qu'elle s'applique non pas de manière incidente, mais bien plutôt déterminante, autant à l'âme qu'à la cité. Le tout qu'est la cité répercute l'âme de la partie. La partie qu'est l'individu doit sa conduite morale au tout qu'est la cité. La figure est fractale. Holographique.

11 s'agira, dans ce chapitre, d'examiner les passages égyptiens pour escompter comprendre comment s'y articulent ces deux aspects -- individuel et collectif, de l'idéologie trifonctionnelle. Ces occurrences seront mises en regard avec le corpus égyptien des textes funéraires et des enseignements. Une telle démarche, conforme à la méthode que nous nous sommes fixée, devrait permettre d'apercevoir s'il y a des rapprochements possibles entre les deux corpus. Ces rapprochements, s'ils existaient, nous procureraient un argument de poids à reverser au dossier de « l'Égypte pour disposer à Platon ». Sans rien en divulguer pour le moment, nous pourrons constater que la tripartition dans l'âme trouve des antécédents troublant dans les textes égyptiens. Et qu'il y a peut-être davantage qu'un procédé de rhétorique à rechercher dans l'assignation par Platon d'une tripartition politique à l'Égypte saïte, de même qu'à l'Atlantide et à l'Athènes passée, c'est-à-dire avenir. 11 y aura lieu de resserrer le champ de notre enquête au quatre dialogues essentiels en la matière que sont le Gorgias, le Phèdre, la République et le Critias. Est-ce à Égypte qu'il nous faille attribuer les premières origines de la tripartition ? Une telle question peut sembler abyssale ; aussi ne saurions-nous que dégager quelques pistes de réponse. Nous ne récoltons que des indices ; et les indices ne suffisent pas à faire des

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preuves. L'esprit doit s'éveiller à la critique. Flaubert, qui, lui, en savait quelque chose, ne disait-il pas de la bêtise qu'elle consiste à vouloir conclure ?

A) La piste grecque

Nous avons suggéré que le Gorgias pourrait avoir été écrit durant ou au retour des grandes pérégrinations de Platon ; en d'autres termes, de son séjour d'Égypte. 11 ne serait pas déraisonnable de penser qu'il ait laissé par conséquent percer des influences de doctrine égyptienne. Le jugement eschatologique décrit à la fin du dialogue pourrait en être un témoignage flagrant. Mais le Gorgias fait également valoir un motif qui reparaîtra de manière récurrente dans la production ultérieure de Platon. Ce motif est celui de la tripartition.

Tripartition selon Platon

a. Le Gorgias

Platon fait en effet état dès le Gorgias d'une partition de l'âme. Faute de s'appesantir sur ce qui deviendra la partie rationnelle (logistikon) et la partie irascible (thumos), il décrit la partie concupiscible (épithumetikon) de cette âme à la fois tyrannique, excessive et insatiable :

Et il est possible que réellement nous soyons morts, comme je l'ai entendu dire à un savant homme [probablement Philolaos], qui prétendait que notre vie actuelle est une mort, que notre corps est un tombeau et que cette partie de l'âme où résident les passions est de nature à changer de sentiment et à passer d'une extrémité à l'autre. Cette même partie de l'âme, un spirituel auteur de mythes, un Sicilien, je crois, ou un Italien, jouant sur les mots, l'a appelée tonneau352, à cause de sa docilité et de sa crédulité ; il a appelé de même les insensés non initiés et cette partie de leur âme où sont les passions, partie déréglée, incapable de rien garder, il l'a assimilée à un tonneau percé, à cause de sa nature insatiable 353

352 La rigueur exigerait que l'on parlât de vases plutôt que de tonneaux. Le mot Ili oç, « pitos » renvoie à une sorte de cruche naguère utilisée comme symbole de beauté et de passion (cf. J. Bertrand, Vocabulaire grec : Du mot à la pensée, Paris, Ellipses, 2008). Un vice de traduction serait à l'origine du glissement sémantique, ayant conduit à attribuer aux Grecs une invention gauloise (selon la Guerre des Gaules de Jules César). Même contresens dans l'imaginaire populaire concernant l'habitat écologique de Diogène de Sinope.

353 Platon, Gorgias, 492b.

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Outre l'existence d'une partie de l'âme responsable du désir, Platon suggère dans ce passage deux éléments qui peuvent retenir notre attention. En premier lieu, l'auteur fait cas de la possibilité d'une vie après la mort. H dit rapporter par ouï-dire cette conception qu'il tient d'un « savant homme ». On peut penser qu'il s'agit de Philolaos, un pythagoricien de ses amis. Routh mentionne ainsi un passage de Théodoret354, où cette pensée lui est attribuée. Sextus, en revanche, l'attribue à Héraclite d'Éphèse355 tout comme Clément d'Alexandrie356, la rapportant aussi à Pythagore. Rien n'interdit cependant de songer qu'il pourrait également s'agir d'un officiant rencontré en Égypte. L'existence sublimée après la mort ; mieux : le corps terrestre perçu comme un tombeau sont autant d'éléments qui se retrouvent, mutatis mutandis, dans les sagesses égyptiennes.

Précisément, en affirmant que cette vie est une mort ; en dissociant l'âme (le contenu) du corps (le tombeau), Platon envisage ensuite implicitement la possibilité d'une existence de l'âme séparée de son corps. Or, nous savons que les Égyptiens anciens avaient grand soin de distinguer le corps physique -- le djet, ou sab, appelé à être momifié après la mort sous peine de devenir khat, dépouille déliquescente --, du bâ, improprement rendu par « âme » (psychê). Le constitue l'hypostase de l'âme en tant que séparée du corps. Il est ce principe spirituel représenté sous la forme d'un oiseau (ibis ou faucon) à tête humaine qui n'apparaît pour prendre son envol qu'après la mort. Manière de double éthéré du défunt, le bâ, désormais affranchi du corps, peut circuler auprès des immortels comme auprès des mortels afm d'intercéder en leur faveur ou en leur défaveur357. Toutefois, et à la différence de chez Platon, bien qu'affranchi « substantiellement parlant » de sa prison de chaire, le bâ, pour demeurer -- « avoir demeure » --, doit néanmoins disposer de ce corps sublimé, du djet, comme d'un vestige lui assurant et sa péréxistence, et son identité ; comme d'un intermédiaire -- une « porte » -- entre le monde des morts (des immortels) et celui des vivants. Le djet est ainsi au défunt que les statues hiératiques ou effigies sont aux dieux égyptiens. C'est à ce djet (ou à ces effigies) que les offrandes sont consacrées. Le djet, en son tombeau, est la retraite du bâ : « Tu montes, tu descends [...], tu glisses, comme ton coeur le désire, tu sors de ton tombeau chaque matin, tu y rentres chaque soir », lit-on dans le Livre des morts 358. Le djet et le bâ, l'enveloppe charnelle et le principe divin, pour ressortir à deux réalités ou substances différentes, n'en sont pas moins indissolublement liés. Outre sa capacité à adopter chacune des « formes » du créateur (les dieux, les animaux, les éléments) avec lequel il fusionne de nouveau -- « formes » du créateur qui sont l'équivalent analogique des noms

354 Théodoret de Cyr, Thérapeutique des maladies helléniques, LXXXIII, 941.

355 Sextus Empiricus, Adversus Mathematicos. Contre les savants, L. III : Contre les géomètres, 24.

356 Clément d'Alexandrie, Stromates, L. III, V.

357 Cf. J. Assmann, Mort et au-delà dans l'Égypte ancienne, Paris, Champollion, Éditions du Rocher, 2003, p. 142-169.

358 Livre des morts, chap. LXXXII-XCII, CXCI, trad. P. Barguet.

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de Dieu » dans la théologie chrétienne --, cette propriété du bel à regagner son djet à la tombée du soir pourrait au demeurant avoir été l'un des éléments à l'origine du contresens commis par les voyageurs Grecs qui voyaient dans les Égyptiens les premiers adeptes de la métempsycose.

Cette différenciation de l'âme et du cadavre était, en tout état de cause, un élément fondamental de la métaphysique pharaonique. Bien plus ancien peut-être que celle qui allait être faite en Grèce par le truchement des poètes homériques359 Une distinction qui se retrouverait encore au fondement du « chamanisme grec » et (par imprégnation ?) dans les croyances orphiques360 et dans l'anthropologie métaphysique des courants pythagoricien. Une distinction que Platon ne laissait pas de commenter et qui, par conséquent, ne manquait pas de sources.

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