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Le phénomène d'acquisition des anciennes demeures par les étrangers, un processus de mise en tourisme de la médina de Fès?

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par Widad Jodie BAKHELLA
Université Mohammed V  - Master recherche en aménagement, développement local et gestion des territoires 2008
  

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III- La valorisation de l'espace médinal de Fès : prémices de la mise en tourisme

La médina de Fès a bénéficié outre ses potentialités touristiques et sa forte image culturelle, d'un intérêt de sauvegarde et de reconnaissance universelle par la mise en place d'une image de plus en plus valorisante et la recomposition du discours sur son centre ancien par le prisme du patrimoine. A cette démarche patrimoniale vient s'intercaler une mise en valeur touristique. La médina de Fès illustre assez parfaitement un passage de la prise en compte du patrimoine à la touristification et la mise en tourisme de celui-ci.

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1- Sauvegarde et patrimonialisation de la médina de Fès : Une politique qui bat au rythme de la touristification

Fès est une ville historique, fondée en l'an 809, a une population de 150 461 habitants occupant 12 212 maisons dont 9369 maisons traditionnelles à caractère historique. La Médina avec ses deux entités Fès El Bali et Fès Jdid est un lieu d'activité (9600 unités) et en particulier de production artisanale non polluante (1276 ateliers).

Fès a connu à la fin du 19ème siècle, un rythme de dégradation continue marqué par trois phases principales : abandon, surexploitation, mauvaise restauration et occupation inadéquate des lieux, en parallèle avec une dégradation avancée des infrastructures et des équipements socio-éducatifs. Autant de facteurs qui ont favorisé le surpeuplement de la médina qui atteignait au cours des années 1980 plus de 180 000 habitants. Cette surdensification a eu de graves répercussions sur les conditions de vie de la population et sur la qualité du cadre bâti. En effet, sur les 13 385 bâtisses de la médina de Fès (dont 11 601 historiques), l'ADER-Fès35 a relevé globalement, 34% de logements en mauvais état, dont 31% à Fès El Bali et 67% à Fès Jdid. (Cf. Carte 4)

C'est ainsi que la médina de Fès a fait, à partir des années 1980, l'objet d'une attention de plus en plus soutenue. Elle a bénéficié de la mise en place d'une image valorisante de ses tissus anciens par le biais d'acteurs locaux et internationaux. Ainsi, au comble de sa dégradation, la médina de Fès reprend son dynamisme grâce à sa patrimonialisation. Rappelons ici que la « patrimonialisation » correspond au processus par lequel une communauté reconnaît, en tant que patrimoine, des productions de sa culture héritées des générations passées ou produites par les générations actuelles et jugées dignes d'être transmises aux générations futures36.

35 Agence pour la Dédensification et la Réhabilitation de la Médina de Fès.

36 SKOUNTI, 2004, p.149, cité par A-C. KURZAC SOUALI, 2006, p.42.

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Carte 4. Répartition des maisons menaçant ruine dans la médina de Fès.

Source: ADER-Fès, 2000.

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En octobre - novembre 1976, dans l'idée de sauvegarder la médina de Fès, une assemblée générale de l'UNESCO à Nairobi déclare la médina de Fès « Trésor Culturel de l'humanité ». « Mais, c'est une campagne sans précédent, par sa nature, dans l'action de l'UNESCO. C'est la première qui soit entreprise en faveur d'une ville islamique. L'action à mener constitue, par son ampleur, l'exemple d'un des défis majeurs que l'humanité doit relever pour préserver et enrichir son héritage culturel, devant les contraintes que nous impose un processus de modernisation et l'industrialisation accélérées. Ce défi est à la hauteur des capacités et de l'imagination de l'homme. » Par ces termes le Directeur général de l'UNESCO a annoncé en 1980 l'intérêt que porte cette organisation pour la sauvegarde de la médina de Fès. C'est ainsi qu'en 1981, la médina de Fès a été inscrite sur la liste du patrimoine mondial.

Cependant, l'intérêt du gouvernement marocain pour la sauvegarde de la médina de Fès et sa valorisation comme ville vivante dépasse son inscription par l'UNESCO sur la liste du patrimoine mondial. Elle remonte au premier Schéma Directeur d'Urbanisme de Fès préparé en 1975 et qui a été confirmée par la lettre Royale du 21 juillet 1980 concernant la sauvegarde de la ville (Cf. Annexe 2). Les études du schéma directeur se sont concrétisées par le lancement d'une campagne internationale pour la sauvegarde de Fès en 1980 et la mise en place d'un plan visant à améliorer les conditions de vie des habitants tout en préservant leur héritage culturel.

Ainsi, de 1980 à 1985 la "Délégation à la sauvegarde de la ville de Fès" utilisant un compte d'affectation spécial a réalisé les études nécessaires qui ont permis l'élaboration d'une stratégie globale sur différents niveaux d'intervention.

De 1985 à 1989 des opérations expérimentales ont été menées par la Délégation à la Sauvegarde de la Ville de Fès (D.S.V.F) aux niveaux: de l'habitat, des équipements, des activités artisanales, des infrastructures,...etc. La réussite de ces opérations expérimentales a permis de démontrer que la sauvegarde est possible dans sa conception intégrée et grâce à la mobilisation des potentialités locales.

En 1989, le gouvernement marocain crée l'Agence pour la Dédensification et la Réhabilitation de la Médina de Fès (ADER-Fès), une agence d'exécution qui n'est autre que la continuité de

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la Délégation à la Sauvegarde de la Ville de Fès, et dont la mission est la réalisation des programmes de sauvegarde de Fès dans le cadre des prérogatives gouvernementales. Cet objectif place l'agence au coeur d'un processus qui, au-delà de la simple restauration du bâti, vise à adapter le centre historique à son évolution démographique, économique et touristique.

La patrimonialisation de la médina a entraîné un changement de son statut. Elle est devenue un « bien collectif » caractérisé par une nouvelle dimension spatiale liée à son universalité déclarée. En effet, au-delà de l'aspect lié à la protection des bâtiments et des sites inscrits, la patrimonialisation permet d'appréhender la médina de Fès comme « patrimoine-ressource ».

L'image qui se dessine, de nos jours, pour la médina est celle d'un espace patrimonialisé entièrement offert à la consommation ludique et affecté à séduire les touristes. En effet, le rapport tourisme/patrimoine ou patrimonialisation/touristification n'est plus à démontrer. « La relation est maintenant tellement évidente que l'on pourrait presque superposer la carte des hauts lieux touristiques mondiaux avec celle des ensembles patrimoniaux prestigieux37». Ceci rejoint l'hypothèse de O. LAZZAROTTI (2000) à propos du « patrimoine et du tourisme : un couple de la mondialisation », selon laquelle « le tourisme et le patrimoine procèdent d'un même système de valeurs, dont la diffusion mondiale est conforme à un seul et même mouvement de mise en ordre d'un monde ».

Ainsi, l'instrumentalisation institutionnelle du patrimoine en médina dévoile aussi la priorité économique de cette sauvegarde, par la mise en valeur touristique du bâti ancien. L'évolution de la place de la médina de Fès dans le produit touristique marocain est illustrative de cette patrimonialisation qui se matérialise de plus en plus par l'engouement des touristes pour les maisons traditionnelles du centre historique de la ville et l'assimilation de ce patrimoine dans le produit du tourisme culturel.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand