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La dilution des marques renommées

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par Marion Pinson
CEIPI - M2 droit européen et international de la propriété intellectuelle 2012
  

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1) La possibilité de ne prouver qu'un risque de dilution

La Cour exige la preuve d'une modification du comportement économique du consommateur ou un risque sérieux qu'elle se produise. Elle affirme ainsi clairement que le titulaire de la marque antérieure n'est pas tenu de démontrer une atteinte effective et actuelle à sa marque et peut se contenter « d'établir l'existence d'éléments permettant de conclure à un risque sérieux qu'une telle atteinte se produise dans le futur ».130(*) Il est intéressant de noter que le droit américain introduit la même solution, d'ailleurs très controversée, lors de sa réforme anti-dilution de 2006131(*).La possibilité de ne prouver qu'un risque de préjudice, même si elle n'est pas envisagée par la directive, nous sembleparfaitement cohérente.

Cette solution est, d'une part, en accord avec le régime de protection contre le préjudice de dilution. On sait en effet que cette protection permet notamment au titulaire d'une marque renommée communautaire de s'opposer à l'enregistrement du signe litigieux132(*). On voit alors mal comment ce dernier pourrait prouver une modification actuelle du comportement économique du consommateur alors que le signe litigieux n'a pas encore été utilisé sur le marché et est donc resté inconnu des consommateurs. Cette solution logique est d'ailleurs prévue par l'article 8.5° du RMC133(*).

Cette solution est, d'autre part et surtout, en accord avec la nature même du préjudice. La dilution est en effetun préjudice qui, la plupart du temps, n'est pas actuel. Comme l'expliquait M. Jaton, elle « se présente le plus souvent à l'état de simple menace quand l'affaire vient en justice, car le phénomène n'évolue que très lentement jusqu'à son stade final. Il s'agit donc d'évaluer un risque, de faire un pronostic »134(*). La particularité du phénomène de dilution nécessitait donc que soit acceptée la démonstration d'un seul risque de préjudice.

Pourtant, l'assouplissement de cette condition ne résout le problèmequ'en surface. La Cour de justice exige en effet la preuve d'un risque sérieux, laissant entendre que les juges s'attendent à obtenir des éléments empiriques prouvant la probabilité, et non pas la seule possibilité, d'une modification du comportement économique du consommateur. Sur le principe, on ne peut qu'approuver ce refus d'indemniser un dommage purement hypothétique. On pressent pourtant que cette solution, en pratique, conduit à une impasse.

En effet,rapporter la preuve d'un risque sérieux reste une tâche toujours aussi difficile. Car ce qui entraînela dilution n'est pas le seul emploi en cause lors du litige mais bien la réitération de ce genre d'emploi. Evaluer un risque de dilution relève ainsi d'un exercice purement spéculatif. « Sans doute, dans certains cas, la marque ne s'affaiblira pas, notamment si l'acte reste isolé. Mais nul ne saurait le prévoir. Au contraire, il y a tout lieu de considérer que, si une seule reproduction est tolérée, les hésitants se libèreront bien vite de leurs scrupules, après quoi la désignation apparaîtra, identique ou analogue, sur toutes sortes de produits, du rouge à lèvres à la pelle mécanique »135(*). À en lire cette analyse de M. Jaton, il semblerait que le risque de préjudice soit par définition purement théorique.Cette causalité hypothétiquequ'il existe entre l'usurpation de la marque renommée et la constatation d'un préjudice est bien ce qui rend la preuve de la dilution si embarrassante.

Certes, les juges communautaires avaient déjà pu préciserqu'un risque futur de préjudice pouvait être établi « notamment sur la base de déductions logiques résultant d'une analyse des probabilités et en prenant en compte les pratiques habituelles dans le secteur commercial pertinent ainsi que toute autre circonstance de l'espèce »136(*). Celane facilite pas pour autant l'apport de la preuve en ce sens qu'une analyse des probabilités reste un exercice spéculatif. En effet, comment évaluer la probabilité de la multiplication d'un signe ?

La possibilité de ne prouver qu'un risque de préjudice, si elle a le mérite de la cohérence, reste ainsiillusoire. C'est sûrement pour cette raison que les juges font preuve d'une grande indulgence confinant, une fois encore, au laxisme.

* 130CJCE, 27 nov. 2008, Intel Corporation Inc., op. cit., pt. 38.

* 131 The Trademark Dilution Revision Act of 2006 (H.R. 683), Section 2(c)(1) : « (...) it provides injunctive relief on proof that another person has used a mark or trade name in commerce that is likely to cause dilution by blurring or tarnishment of the famous mark ».

* 132 Article 8.5° du RMC et article 4.4° a) de la directive du 21 décembre 1988.

* 133 par l'emploi du conditionnel « porterait préjudice ».

* 134 M. JATON, op. cit., p. 50.

* 135 M. JATON, op. cit., p. 50.

* 136TPICE, 16 avril 2008, T-181/05, Citigroup et Citibank/OHMI c/ CITI, Rec. II-669, pt. 78.

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