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La place de la Chine dans le commerce international

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par Hope&Fiston MATABARO MASUMBUKO Hope,MATABARO SAFARI,MALOANI MUSAFIRI,BYE
Institut Supérieur Pédagogique de Bukavu - licence en informatique de gestion 2015
  

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I

MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET
UNIVERSITAIRE

INSTITUT SUPERIEUR PEDAGOGIQUE DE BUKAVU

Travail pratique du cours de commerce international

LA PLACE DE LA CHINE DANS LE COMMERCE

INTERNATIONAL

Présenté par :

1. MATABARO MASUMBUKO Hope

2. MATABARO SAFARI

3. MALOANI MUSAFIRI

4. KITUMAINI MIRINDI

5. CIRIMWAMI BUHENDWA

6. BULONZA NDEKO

7. AKILIMALI LUMUKA

8. BARUTI NSIMIRE

9. BYEKA MUSA

10. KULONDWA NDAGANO

Promotion : L2 IG

1

I. INTRODUCTION

La chine est un pays situé dans le continent d'Asie. Elle est aujourd'hui appelée République populaire de Chine car elle regorge l'un tiers de la population mondiale. La République populaire de Chine (RPC) Prononciation du titre dans sa version originale Écouter), couramment appelée Chine et parfois Chine populaire, est un pays d'Asie de l'Est. Avec plus de 1,3 milliard d'habitants, soit environ un sixième de la population mondiale, c'est le pays le plus peuplé du monde2. Elle compte huit agglomérations de plus de dix millions d'habitants, dont la capitale Pékin (Beijing), Shanghai, Canton, Shenzhen et Chongqing, ainsi que plus de trente villes d'au moins deux millions d'habitants. Avec 9 641 144 km2 de superficie3 ou 9 596 961 km2 selon les chiffres de l'ONU, la Chine est également le plus grand pays d'Asie orientale et le troisième ou quatrième plus grand pays du monde par superficie4. La Chine s'étend des côtes de l'océan Pacifique au Pamir et aux Tian Shan, et du désert de Gobi à l'Himalaya et aux confins de la péninsule indochinoise, couvrant 9 677 009 kilomètres carrés.

On estime que la Chine a été la première puissance économique mondiale durant la majeure partie des vingt derniers siècles45,46,47,48. Jusqu'au 18ème siècle et la révolution industrielle, c'est également en Chine qu'on trouvait le niveau de vie le plus élevé de la planète. La Chine, première civilisation à utiliser le papier monnaie, a une longue histoire de relations économiques internationales. On retiendra quelques points de repères utiles :

La dynastie des Yuan a organisé un système de routes et de poste efficaces, contribuant à la modernisation de l'économie chinoise. Au début de l'ère Ming, les flottes de l'amiral Zheng He ont renforcé les liens existant déjà sur la route des épices, entre l'Inde, la côte africaine orientale, l'Indonésie et supposément l'Australie ainsi que les Amériques (avant les Européens, cf. cartes de l'Amiral de cette époque). À la suite d'une période de repli sous les Ming, la dynastie Qing a vu son déficit économique s'accroître avec l'arrivée des colonisateurs occidentaux. Au milieu du xixe siècle, l'économie chinoise a été dans sa plus grande partie asservie au commerce de l'opium pour les intérêts des colonisateurs, précipitant le pays dans un chaos économique et politique.

Le règne de Mao Zedong a été synonyme d'une nouvelle période de quasi-autarcie économique, en dehors de certains échanges avec les pays de la sphère communiste. La croissance de l'économie chinoise s'est encore ralentie en 2015. Ce résultat constitue une deuxième baisse consécutive du taux de croissance de l'économie du pays. En effet, la croissance du produit intérieur brut (PIB) de la Chine est passée de 7,8 % en 2013 à 7,4 % en 2014 et à 6,8 % en 2015. Après avoir enregistré l'une des expansions les plus rapides et les plus formidables de l'histoire, l'économie chinoise amorce une nouvelle dynamique : celle d'une transition vers une croissance moins accélérée peut-être, mais plus durable. Cette transition peut se décliner en différents volets : du passage du rural à l'urbain, de l'investissement à la consommation, des activités de production manufacturière à des activités de plus en plus productrices de services. Ces mutations vont exiger des réformes structurelles importantes. À court terme, cette dynamique devrait permettre de réduire les déséquilibres économiques. À long terme, le privé devra avoir un accès plus important aux secteurs à forte présence étatique afin de favoriser l'innovation et la productivité.

En 2015, la Chine a enregistré les résultats économiques suivants :

? une croissance du PIB réel de 6,8 %, selon les données du FMI; ? une inflation de 1,7 %;

? un taux de chômage de 4,1 %;

? un solde budgétaire déficitaire correspondant à 1 % du PIB.

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Selon les données de la Banque mondiale, en 2014, le PIB 1 de la Chine se situait au 1er rang mondial, devant celui des États-Unis. Nous n'allons pas nous limiter à cette année finale qui risque de nous ralentir dans les pensées. Il nous est difficile de confirmer que la chine est aujourd'hui la première puissance mondiale après les états unis d'Amérique. Ainsi, pour pouvoir déterminer nous allons interroger beaucoup plus l'histoire politico-économique de la chine.

1. DE L'HISTOIRE POLITICO-ECONOMIQUE DE LA CHINE POPULAIRE.

Le Parti communiste chinois définit l'économie de la Chine comme une « économie socialiste de marché », une « forme de socialisme aux caractéristiques chinoises ». De 1978 à 1989, le gouvernement chinois a réformé en profondeur l'économie du pays, la faisant passer d'une économie planifiée de type soviétique à un « socialisme de marché », conservant la structure rigide de contrôle par le Parti communiste chinois, ce qui l'a fait appeler « l'atelier du monde ». Dans ce but, la collectivisation de l'agriculture a laissé place à un système de responsabilisation individuelle des terres. Les cadres locaux ont acquis plus de marge de manoeuvre, des gérants ont été introduits dans les secteurs industriels, permettant l'essor de nombreuses petites entreprises, alors nommées Gétihu. Cette politique a permis d'attirer de nombreux commerçants et investisseurs étrangers. Le contrôle des prix a été relâché, à l'exception notable de produits de première nécessité pour les paysans.

En 1992, l'appellation officielle du système devient « économie de marché socialiste » et le changement d'adjectifs marque le début du changement de nature de classe de l'État. Le secteur public commence à se noyer dans l'océan de l'économie marchande et passe de 73 % de la production industrielle en 1988 à 35 % en 1992. Cela a permis le passage d'une économie planifiée à une économie mixte et la redécouverte des fondements du libéralisme économique, tout en sauvegardant le communisme officiel du régime. Dans ce nouveau système économique, les entreprises publiques ou dan Wei ont du mal à trouver leur place et rencontrent de plus en plus de difficultés. Leurs pertes ont atteint le chiffre record de 102,6 milliards de yuans (12,75 milliards de dollars américains) en 2005, soit une augmentation de 56,7 % en base annuelle, selon les chiffres du Bureau d'État des statistiques (BES). Sur les deux premiers mois de 2006, les pertes des entreprises publiques ou contrôlées par l'État atteignent déjà 26,2 milliards de yuans, soit 3,25 milliards de dollars américain. L'augmentation des coûts de production, un système de fixation des prix inefficace, la surcapacité et d'importantes lacunes d'ordre technologique sont les principales causes de cette situation, selon Jiang Yuan, statisticien au Bureau d'État des statistiques.

Le gouvernement a résolument mis entre parenthèses l'égalité des classes durant cette période, menée par le mot d'ordre de Deng Xiaoping : « Enrichissez-vous ! » L'enrichissement personnel (individualisme) et la consommation (soutenue par des politiques néokeynésiennes dès 1997) sont devenus de nouveaux moteurs économiques, accompagnés par une professionnalisation progressive des techniques de gestion, destinées à améliorer la productivité (division du travail). Le gouvernement a également oeuvré pour attirer des capitaux étrangers, sources cruciales de développement économique : les zones économiques spéciales (ZES), exemptes de taxes, ont été créées à cet effet, étendues peu à peu à tout le littoral. Grâce à l'introduction du libre-échange, on observe qu'un quadruplement du produit intérieur brut (PIB) s'est produit depuis 1978. Les incitations par taxes préférentielles sont également à l'origine d'incitations fiscales à produire en Chine, que ce soit pour l'export ou pour le marché intérieur d'un milliard trois cent millions d'individus. La République populaire de Chine tente d'harmoniser le système de taxes et règlements pratiqués sur les entreprises, aussi bien chinoises qu'étrangères. Ainsi, les taxes préférentielles dont bénéficient les exportateurs dans les zones économiques spéciales et les villes côtières sont l'objet d'une révision. Les exportations chinoises vers les États-Unis représentaient 125 milliards de dollars américains en 2002, tandis que les

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importations américaines atteignaient 19 milliards. Ce déséquilibre est attribué de façon récurrente par les États-Unis à un taux de change jugé défavorable entre le yuan et le dollar américain. En revanche, pour la Chine, une réévaluation du yuan telle que la souhaitent les États-Unis créerait une inflation très importante, elle-même génératrice de tensions sociales internes. Le 21 juillet 2005, la Banque populaire de Chine a annoncé qu'elle mettait en oeuvre un système de fluctuation du yuan dans les limites de 0,3 % par jour par rapport au dollar américain, contre 3 % maximum par rapport à un panier de devises étrangères, dont le yen et l'euro. Rattrapage du retard économique

Représentation graphique des exportations en provenance de Chine dans 28 catégories de couleurs.

On estime que la Chine a été la première puissance économique mondiale durant la majeure partie des vingt derniers siècles45,51,47,48. Jusqu'au xviiie siècle et la révolution industrielle, c'est également en Chine que l'on trouvait le niveau de vie le plus élevé de la planète52. C'est sous la dynastie Qing que le développement économique de la Chine commença à ralentir, alors que les pays occidentaux passaient lentement d'une société à dominante agraire à une société industrielle. En 1820, la Chine comptait pour 33 % du PIB mondial, contre 9 % aujourd'hui53.

En 2010, la Chine est devenue la seconde puissance mondiale : le PIB de la Chine s'est élevé à 5 878,6 milliards de dollars en 2010, contre 5472 milliards au Japon54. Ce développement effréné des activités économiques est davantage dû aux investissements et aux exportations qu'à la consommation intérieure55. Début décembre 2014, le site américain MarketWatch annonce que la Chine devient officiellement la première puissance économique mondiale, sur la base d'un rapport du FMI d'octobre 2014 comparant le produit intérieur brut à parité de pouvoir d'achat. En effet, sur cette base, le PIB chinois, de 17 632 milliards de dollars, devrait dépasser celui de l'Amérique, de 17 416 milliards de dollars56. Le FMI prévoit qu'elle atteindra 27 000 milliards de dollars de PIB en 2019, quand les États-Unis ne seront qu'à 22 000 milliards.

Le développement économique actuel de la Chine est l'un des plus rapides du monde, puisque l'on y enregistre une croissance dont la moyenne, en 25 ans, est de 9,8 % par an. Entre 1980 et 2007, le PIB a été multiplié par 12,757. En 2013, la croissance en Chine a atteint 7,7% 58. La République

populaire de Chine est depuis 2001 membre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC)59. La croissance de la Chine est essentiellement tirée par les exportations. Leur montant a plus que doublé en quatre ans, pour atteindre plus de 1000 milliards de US$ en 2009, ce qui fait de la Chine le premier exportateur mondial. L'essentiel de ce commerce se fait avec l'Union européenne (20,4 %), les États-Unis (17,7 %), Hong Kong (13,4 %) et le Japon (8,1 %). La balance commerciale de la Chine est excédentaire avec un grand nombre de pays. Les points forts des exportations chinoises sont le textile, les tracteurs, les montres et les jouets (85 % du marché mondial), les appareils photographiques et les ordinateurs portables (55 % du marché), les téléviseurs et les machines à laver (30 %), 15 % pour l'acier60.

Shanghai, ville dynamique et moderne.

La présence des entreprises étrangères sur le sol chinois est en grande partie à l'origine de la forte accélération de la croissance des exportations. Elles ont attiré la main-d'oeuvre qualifiée dans les zones côtières où elles se sont implantées. Seulement 41 % des exportations chinoises proviennent d'entreprises intégralement chinoises. Aujourd'hui, 39 % des exportations en provenance de Chine sont réalisées par des entreprises dont le capital est à cent pour cent étranger et 20 % sont le fait de partenariat entre les sociétés étrangères et les sociétés chinoises61. La Chine continentale entretient son attractivité pour les entreprises avec une main-d'oeuvre bon marché et non syndiquée. Cependant le prix de la main-d'oeuvre croît rapidement, en 2010, il a progressé de 24 %.

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De plus, il faut ajouter que le pays possède la plus grande force de travail au monde avec 813.5 millions de travailleurs disponibles62. La non-organisation des ouvriers chinois représente un bénéfice substantiel pour les employeurs, qui y trouvent une flexibilité d'emploi impossible à mettre en oeuvre dans les démocraties libérales. Un autre aspect de l'économie chinoise à relever : les bas prix d'éléments non issus de la force de travail. Cela est dû en partie à l'existence du contrôle des prix et de la garantie des sources d'approvisionnement hérités de la précédente économie de type soviétique : les entreprises d'État continuant à être démantelées et leurs ouvriers renvoyés dans des secteurs de compétitivité accrus, l'effet déflationniste induit continue à mettre la pression sur les prix pratiqués au sein de l'économie.

Les conséquences de cette croissance économique sont nombreuses. Le revenu moyen annuel d'un ouvrier chinois est de mille trois cents dollars américains. Les salaires augmentent régulièrement sur le littoral pacifique. La Chine a accumulé la plus confortable réserve de devises de tous les temps: 2 200 milliards d'euros selon la Banque populaire de Chine.

En 2014, la Chine fonde la Banque asiatique d'investissement pour les infrastructures (AIIB) pour contrebalancer le poids des institutions financières issues du monde occidental (et ce alors que plusieurs pays occidentaux acceptent toutefois d'en devenir membre). Dotée de plusieurs dizaines milliards de dollars, elle a pour but d'asseoir la nouvelle diplomatie économique chinoise afin de financer les besoins massifs en infrastructure en Asie (autoroutes, chemins de fer, télécommunications, etc.), à partir de réseaux financiers convergeant vers la Chine.

2. LES PRODUITS « MADE IN CHINA » DE LA PERIODE 1980-2007

Depuis les années 1980, le monde a connu de profonds bouleversements économiques, technologiques, politiques et sociaux. « Mondialisation », « globalisation », « internationalisation » sont autant de termes qui tentent d'isoler les traits saillants de cette évolution complexe et contradictoire du monde. Selon le FMI, la mondialisation signifie « l'interdépendance de l'économie croissante des pays du monde via le volume et la variété croissants des transactions frontalières en marchandises et en services, de mouvements de capitaux internationaux libres, et de diffusion plus rapide et plus répandue de la technologie ». Près de 300 ans plus tôt, deux illustres économistes, Adam Smith et David Ricardo, prônaient déjà les échanges et la division internationale du travail entre pays susceptibles de générer, selon eux, une situation « gagnant-gagnant » sous certaines conditions. Les deux guerres mondiales ainsi que la bipolarisation de la planète au cours de la Guerre froide du siècle dernier ont considérablement limité le commerce mondial. Cependant, au cours de ces dernières années, deux phénomènes ont été observés dans le contexte de la mondialisation : on a pu constater, d'une part, l'internationalisation de l'activité économique et de la mobilité des facteurs de production dans un monde de plus en plus dépourvu de frontières, à tel point que certains n'hésitent plus à annoncer une prochaine disparition de l'État souverain classique. D'autre part, on a assisté à l'intensification de la croissance économique d'un certain nombre de pays, notamment des pays qualifiés d'« émergents », reconnus comme les moteurs de la prospérité mondiale et qui donnent lieu à une recomposition de la hiérarchie des espaces productifs (Ohmae,1996). En effet, sur le plan international, on assiste depuis les années 1980 à une forte mutation des conditions de production, de compétition et d'interdépendance qui est caractérisée avant tout par le développement d'une nouvelle division internationale du travail. Selon Anil K. Gupta et al. (2008), la mondialisation désigne une nouvelle configuration qui marque une rupture par rapport aux étapes précédentes de l'économie internationale : « ... autrefois la mondialisation pouvait être considérée comme des échanges transfrontaliers de matières premières ou de produits finis - c'est-à-dire de biens situés à chaque

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extrémité de la chaîne de valeur. Au contraire, ... la mondialisation d'aujourd'hui est caractérisée par la dispersion géographique des activités de la chaîne de valeur de la compagnie, avec l'objectif de localiser chaque activité (ou sous-activité) de la manière la plus optimale. Par conséquent, on constate aujourd'hui une importante proportion grandissante d'échanges transfrontaliers qui est composée de marchandises et de services intermédiaires - c'est-à-dire, de composants et de services situés au milieu de la chaîne de valeur » (voir la Figure 1). Suzanne Berger (2006) constate que « dans le monde de la production fragmentaire, les enjeux sont ce qu'ils ont toujours été: bénéfices, pouvoir, sécurité et nouvelles opportunités. Ce qui a changé, c'est qu'il est désormais possible d'atteindre ces objectifs en se positionnant à n'importe quel point de la chaîne de valeur. Il y a vingt ans, les entreprises intégrées dominaient encore. Aujourd'hui, un fabricant de composants, une entreprise de design, une marque sans fabrication, un fabricant sans marque, et bien d'autres combinaisons encore, proposent de nouvelles manières de rester compétitif ».

Ainsi, à la différence de la division internationale du travail classique, la nouvelle division internationale du travail repose essentiellement sur la notion de chaine de valeur (Porter, 1985). Elle se réalise non seulement entre les différentes industries, mais surtout entre les différents produits d'une même industrie et entre les différentes étapes et activités de la chaine de valeur d'un même produit. Autrement dit, dans le contexte actuel de la mondialisation, la définition classique de l'industrie intensive en main d'oeuvre, de l'industrie intensive en capitaux et de celle intensive en savoir n'est plus la seule référence pour appliquer la division internationale du travail. Cette dernière se fait de plus en plus en fonction de la valeur ajoutée générée par les différentes étapes et activités (qui sont soit intensives en main d'oeuvre, en capitaux ou en savoir) de la chaine de valeur d'un même produit. De ce fait, la situation des produits « made in China » doit être examinée sous l'angle de cette nouvelle réalité. Il convient de constater d'abord que, bien que la Chine ait réalisé une percée spectaculaire sur le marché international au cours de ces trente dernières années (voir le Tableau 1 et la Figure 2), les produits « made in China » sont, dans bien des cas, le résultat d'une production organisée globalement, faisant intervenir des éléments réalisés dans différents pays. Pensons par exemple aux 12 millions de portatifs vendus en 2005 par la Chine aux États-Unis : la majorité des pièces clés (écrans, logiciels, cartes son, disques durs, etc.) sont en réalité importées de partout dans le monde pour être assemblées en Chine. La véritable contribution chinoise dans ce cas ne dépasse même pas 30% de la valeur finale du produit transigé. La Chine est aujourd'hui un grand fabricant du

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téléphone mobile dans le monde. Cependant, le processus manufacturier du téléphone mobile dans le monde est complètement désintégré : le design est souvent assumé par les firmes coréennes et japonaises, la production de pièces clés par des multinationales telles que TI et Philips, les normes techniques et les logiciels sont fournis par les firmes américaines comme Qualcomm, la distribution par Bird, alors que seul l'assemblage est réalisé en général en Chine. Il en va de même pour ce nouveau produit technologique américain qu'est l'iPhone qui porte également l'étiquette « made in China ». Exceptés le design et le logiciel, la compagnie Apple s'est contentée en fait de jouer un rôle de chef d'orchestre visant l'intégration des innovations réalisées dans d'autres pays : l'écran du iPhone est japonais, la mémoire flash, coréenne et l'assemblage, chinois2.

Une analyse plus poussée nous permet de constater que la majorité des productions destinées à l'exportation sont des opérations d'assemblage et de réexportations. En fait, depuis le milieu des années 1990, plus de 50% de l'exportation chinoise a été réalisée sous forme de « perfectionnement passif » pour le compte d'entreprises étrangères : 50% en 1995, 55% en 2000, 53% en 20063, alors que les achats nécessaires à l'assemblage ont dépassé 50% des importations de la Chine4. La Figure 3 illustre la place actuelle des produits « made in China » dans la nouvelle division internationale du travail. Cette célèbre « courbe sourire » indique que les pays développés maîtrisent les étapes les plus valorisantes, telles que la conception et la distribution des produits, alors que les produits « made in China » sont essentiellement situés au niveau des opérations d'assemblage à faible valeur ajoutée.

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Il est vrai que la place des produits « made in China » sur cette « courbe sourire » a connu une amélioration constante au cours de ces trente dernières années : la part des produits finis et semi-finis est passée de 46% à 93,6% pour l'ensemble des exportations chinoises et celle des produits de haute technologie, de moins de 1% à 29%5. En fait, la Chine est même officiellement devenue en 2005 le plus important pays exportateur de produits de haute technologie (voir le Tableau 2). Force est de constater, cependant, qu'une forte majorité de ces produits de haute technologie exportés par la Chine sont soit le résultat du travail d'assemblage, soit les produits considérés comme les moins intensifs en savoir dans la chaine de valeur du secteur technologique. Par ailleurs, il s'agit avant tout de la production des multinationales étrangères implantées en Chine : globalement, leur part est passée de 59% en 1996 à 81% en 2000, et a même atteint 91% pour le cas des exportations des équipements électroniques de la Chine (Zhang et ali., 2008). En 2006, la Chine a enregistré un surplus commercial de 41 milliards USD dans ses échanges de produits de haute technologie avec les États-Unis. Cependant, les entreprises à capitaux étrangers en Chine ont contribué pour 90% de ces exportations et 97% des exportations chinoises de produits de haute technologie vers les États-Unis ont été réalisées sous forme de « perfectionnement passif ».

Tableau 2. La Chine mène la barque dans l'exportation de produits de haute technologie

Top 10 des exportateurs de produits de haute technologie - 1996 En million USD 1997

Top 10 des exportateurs de produits de haute technologie - 2005 En million USD 1997

1. États-Unis : 65$

1. Chine : 406$

2. Japon : 53$

2. États-Unis : 284$

3. Allemagne : 31$

3. Japon : 212$

 

4. Royaume-Uni : 24$

4. Allemagne : 183$

5. France : 14$

5. Corée du sud : 167$

6. Pays-Bas : 9$

6. Hong Kong : 157$

7. Italie : 8$

7. Taiwan : 145$

8. Suisse : 8$

8. Singapour : 126$

9. Taiwan : 7$

9. Malaisie : 99$

10. Corée du sud : 7$

10. Royaume-Uni : 95$

Source : Global Insight, Inc., 2007.

En fait, bien que cela puisse paraitre contradictoire, la Chine n'est pas le principal maître des produits « made in China ». À cet égard, il convient de faire une distinction entre les produits des entreprises chinoises (made by China) et ceux des filiales des entreprises étrangères implantées en Chine (made in

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China). En fait, l'ouverture vers l'extérieur est un élément majeur de la réorientation idéologique chinoise depuis 1978. Auparavant, comptant essentiellement sur elle-même, la Chine a décidé de multiplier ses partenaires commerciaux et de créer un climat propice aux affaires. Par le biais des investissements directs étrangers, la Chine recherche avant tout des capitaux, des marchés extérieurs, des technologies et un savoir-faire managérial étranger. Ainsi, les gouvernements chinois locaux se font concurrence pour attirer les investisseurs étrangers en offrant des installations et des ressources à un coût parfois dérisoire. Au cours de ces trente dernières années, la Chine a absorbé plus de 800 milliards USD d'investissements directs étrangers, ce qui la place en deuxième position mondiale, juste derrière les États-Unis. Les investissements directs étrangers ont tout autant permis à la Chine de se développer que d'accéder aux marchés mondiaux. Comme le soulignent Julien Chaisse et Philippe Gugler dans ce cahier, malgré leurs excédents courants, les pays émergents continuent d'importer massivement des capitaux étrangers pour assurer leur croissance. La Chine en est le parangon. En ayant un intérêt pour ce pays comme lieu de transformation et de fabrication à des fins de réexportation, les investissements directs étrangers contribuent aussi grandement à la forte croissance des exportations chinoises. Selon les statistiques du gouvernement chinois, 635 000 entreprises à capitaux étrangers se sont implantées en Chine et 480 des 500 plus grandes compagnies du monde ont réalisé des investissements importants dans ce pays depuis trente ans. Ces entreprises contribuent aujourd'hui à plus de 33,4% de la production industrielle chinoise et à environ 60% des exportations de la Chine (voir la Figure 4). En 2006, parmi les 500 entreprises les plus importantes dans le commerce international de la Chine, 60,8% étaient des entreprises à capitaux étrangers; parmi les 200 plus grandes entreprises exportatrices en Chine, les entreprises à capitaux étrangers représentaient 62,5% (Zhang et ali., 2008).

Le développement des produits « made in China » a été, à bien des égards, très bénéfique pour la Chine où la pauvreté et la pression pour l'emploi sont particulièrement importantes. L'exportation est depuis longtemps un moteur majeur de la croissance économique chinoise, au même titre que l'investissement et la consommation. En fait, elle est responsable de 20% de la croissance économique, contribue à 17% de la recette fiscale de l'État et crée plus de 100 millions d'emplois 7 . Selon le vice-ministre du commerce du gouvernement chinois, Jianguo Wei, il y aurait aujourd'hui entre 30 et 40 millions d'emplois en Chine qui sont directement reliés aux activités de la sous-traitance internationale et 50 à 60 millions de manière indirecte8. Par ailleurs, le travail de sous-

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traitance pour le compte d'entreprises des pays développés a permis à plusieurs entreprises chinoises de réaliser un apprentissage technologique et managérial. Il faut souligner que la participation active de la Chine à la nouvelle division internationale du travail a grandement contribué à l'ouverture du pays, à l'avancement de la réforme et au changement de la mentalité des Chinois (Zou, 2008). Cependant, il convient de préciser que les Chinois ne sont pas les seuls bénéficiaires des produits « made in China ». Au contraire, ils ne retiennent souvent qu'une faible partie des valeurs créées. Bien que la quantité exportée soit importante, la Chine perd en réalité énormément en termes d'échange (voir le Tableau 3), car 90% des « made in China » sont destinés à des marques étrangères. Ainsi, pour acheter un Airbus 380, la Chine doit exporter 800 millions de chemises et une poupée Barbie, produite à 2 USD en Chine, sera vendue en moyenne à 16 USD aux États-Unis. La Chine a exporté en 2005 plus de 60 milliards USD de portatifs. Elle n'a cependant retiré qu'une faible part de 5% de l'ensemble du profit réalisé, une forte majorité du profit étant attribuée aux designers, aux développeurs de logiciels ainsi qu'aux distributeurs occidentaux tels qu'Intel, AMD, Microsoft, etc.

La Chine occupe aujourd'hui une place importante dans l'économie mondiale, cela tient tant à son poids économique relatif qu'aux impacts engendrés par son essor rapide. Toutefois, il est exagéré de la qualifier déjà d' « usine mondiale » au même titre que les quelques empires industriels du passé et du présent (Angleterre, États-Unis, Japon). En fait, la capacité chinoise à alimenter le marché international demeure plutôt limitée. Selon M. Anderson du cabinet Godman, afin de comprendre l'importance de l'industrie manufacturière chinoise sur le marché mondial, il faut mesurer son excédent net par rapport à la capacité manufacturière mondiale. Alors que la part de la production industrielle chinoise est passée de 2,4% à 5% entre 1993 et 2002, celle de ses importations dans le même secteur atteignait 4,6 %. L'excédent net de la Chine dans l'industrie manufacturière a été de l'ordre de 50 milliards USD, soit seulement 0,18% de la capacité de production industrielle mondiale. Cette position chinoise, assez faible par rapport au statut d'une usine mondiale, demeure quasiment inchangée depuis 199710. Ainsi, il convient de reconnaitre que la Chine est présente sur le marché à la fois en tant que producteur, exportateur et consommateur. Si tout le monde redoute aujourd'hui la montée en flèche des exportations chinoises, il faut garder à l'esprit que les importations chinoises augmentent dans les quasi-mêmes proportions. Globalement, la Chine n'occupe pas aujourd'hui une place dominante dans l'industrie manufacturière mondiale. En effet, bien que la Chine soit actuellement le premier producteur d'une centaine de produits dont 80 biens manufacturiers répartis dans plus de 10 secteurs, elle ne réalise que 5% de la production industrielle mondiale, loin derrière

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les États-Unis (20%), le Japon (15%) et l'Allemagne (Lu, 2003). La Chine est particulièrement faible dans les industries liées aux équipements où la valeur ajoutée est beaucoup plus importante (une part de 30% de l'ensemble des industries manufacturières chinoises contre 42% aux États-Unis, 44% au Japon et 46% en Allemagne). Par ailleurs, la Chine n'a actuellement pas le niveau technologique nécessaire pour devenir un centre manufacturier mondial car elle est très dépendante des technologies avancées provenant de l'étranger, et ce, dans la quasi-totalité de ses industries. Par ailleurs, « l'usine mondiale » est une terminologie inventée par le passé afin de désigner les pays considérés comme des empires industriels. L'Angleterre, dans le courant du 19e siècle, méritait tout particulièrement cette appellation. En effet, ne représentant que 2% de la population mondiale, l'Angleterre produisait 53% de la production mondiale de fer et 50% de la production mondiale de charbon ; elle réalisait, entre 1800 et 1870, 53% de la production manufacturière mondiale et 1/3 des exportations de la planète (Hudson, 2001). De même, à compter des années 1880 et ce, pour une longue période, les États-Unis ont été considérés comme « une usine mondiale » et « un centre de gravité économique mondial », résultat de leur domination et de leur leadership dans les industries manufacturières. Par la suite, au cours des années 1970 et 1980, le Japon a, lui aussi, été désigné par certains sous le terme d'« usine mondiale », occupant une place importante dans plusieurs secteurs industriels sur la scène internationale. Cependant, de la désignation de la domination absolue anglaise à la description de l'essor chinois en passant par la démonstration de la puissance des Américains et de l'importance relative des Japonais, le terme d'« usine mondiale » apparaît comme une notion très relative, très imprécise et donc, non scientifique. Aussi, dans le contexte actuel de la mondialisation où aucun pays ne peut se targuer d'être aussi puissant que l'ont été l'Angleterre ou les États-Unis dans leur temps, ainsi qu'en l'absence d'un ensemble de critères susceptibles d'être universellement acceptés, ce terme ne peut servir aujourd'hui que pour souligner l'importance relative d'un pays dans son intégration au marché international et plus particulièrement, pour signaler les bouleversements importants qui se produisent dans le monde du fait du développement économique rapide d'un pays. La croissance rapide des produits « made in China » a grandement contribué au développement du commerce mondial et ce, avec un taux de contribution actuel de 11%11. Pourtant, elle a créé sur son chemin des bouleversements majeurs sur la structure et l'ordre économique mondial et ce, aussi bien au niveau de l'emploi et des prix des produits qu'au niveau de la dynamique de la compétition internationale. Ainsi, bien que la Chine demeure encore davantage un atelier d'assemblage mondial dans la nouvelle division internationale du travail, le « facteur chinois » est aujourd'hui incontestablement devenu un des éléments fondamentaux à considérer par tous dans le développement et la compétition sur le marché international.

3. DU « PRIX CHINOIS » A LA « VALEUR CHINOISE », DEFIS DE LA « REMONTEE EN GAMME » POUR LA CHINE

La montée en flèche des produits « made in China » sur le marché international n'est pas le résultat d'un hasard. A bien des égards, la Chine est un pays, certes en voie de développement, mais atypique, car elle possède en même temps des avantages absolus en matière de coûts, des avantages comparatifs en termes de productivité et même des avantages compétitifs dans plusieurs segments du secteur technologique. En plus d'un bassin de main d'oeuvre gigantesque, bon marché et de plus en plus qualifié (sur l'ensemble des étudiants diplômés chaque année en Chine, 1,2 à 1,35 millions sont des ingénieurs), elle a su développer une productivité manufacturière de plus en plus élevée. En fait, la compétitivité des entreprises chinoises ne se limite plus aujourd'hui uniquement au faible coût de la main d'oeuvre chinoise. Selon une étude réalisée par McKinsey en 2004, dans plusieurs branches manufacturières, la productivité chinoise est déjà plus élevée que celle des pays européens et elle est globalement bien supérieure à celle des autres pays en développement. Douze minutes suffisent à un

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ouvrier chinois pour fabriquer une chemise, alors qu'il faut 22 minutes pour un Indien et 30 minutes pour un Mexicain. Ainsi, un tissu industriel de plus en plus complet et efficace pour faciliter les activités économiques, un réservoir de capital humain rural, peu qualifié mais enclin à travailler pour un salaire bas, une domination de plus en plus forte des entreprises privées chinoises dans les industries, une présence importante des firmes étrangères, une monnaie sous- évaluée et l'existence d'une infrastructure importante et relativement peu coûteuse sont autant de facteurs qui ont contribué à l'ascension des produits « made in China » sur le marché international. Pourtant, il faut souligner le rôle particulier de l'autorité chinoise dans ce développement. En 1978, le gouvernement chinois a entamé une série de réformes économiques à la suite, d'une part d'un changement « idéologique » du Parti communiste chinois qui met désormais le développement économique du pays au coeur de sa mission et, d'autre part, d'une transformation du rôle de l'État chinois qui, d'État producteur, programmeur et protecteur, est devenu avant tout un État promoteur. L'autorité chinoise qui, après avoir accordé tant d'attention aux mouvements politiques, considère désormais que « seul un développement économique permettrait au Parti Communiste de rester au pouvoir ». Selon l'autorité chinoise, ce processus de réformes et la stabilité politique interne sont intimement liés dans le pays. En effet, alors que la stabilité politique assurée par le Parti Communiste chinois était une condition sine qua non pour de telles réformes, le succès de ces réformes et un réel développement économique étaient les conditions pouvant assurer le maintien du Parti Communiste chinois au pouvoir. Quoiqu'il en soit, depuis 1978, la transformation de l'État s'est traduite par une importante mobilisation des ressources afin de créer un environnement propice au développement économique. Sous l'impulsion des gouvernements chinois à différentes échelles, les exportations tout comme les investissements ont constitué un moteur clé de la croissance chinoise. L'obtention d'un taux de croissance élevé est devenue une obsession pour bien des responsables chinois dont la carrière politique en est souvent dépendante. Un régimetotalitaire leur a donné une efficacité d'action contre tous les obstacles à la croissance. Ainsi, pour soutenir les exportations des produits « made in China », les autorités chinoises ont multiplié les incitations fiscales, maintenu de façon artificielle les bas coûts de capitaux et d'infrastructures, subventionné le prix des ressources énergétiques, adopté une attitude laxiste envers les activités polluantes, et se sont contentées pendant longtemps de réglementations très rudimentaires en matière de conditions sociales des travailleurs chinois. Il est clair que la Chine possède aujourd'hui plusieurs atouts incontestables pour continuer sa lancée sur le marché international avec les produits « made in China ». La véritable question est cependant de savoir si la Chine a vraiment intérêt à poursuivre ce mode de développement à tout prix et si elle pourra le réaliser sans heurts. Le modèle de développement chinois est basé sur une forte consommation d'inputs, ou entrants, avec des outputs, ou produits finis et semi-finis, mais dont le succès sur les marchés internationaux repose sur sa compétitivité en matière de prix. De ce fait, l'usine ou l'atelier mondial que la Chine constitue n'est jusqu'aujourd'hui pas tout à fait synonyme d'enrichissement réel du pays. L'avantage absolu de la Chine réside, jusqu'ici, dans son potentiel de main d'oeuvre bon marché, sans cesse renouvelé. Il est par ailleurs à noter que la stratégie stérile de prix bas suivie par les entreprises chinoises s'est faite dans bien des cas au détriment des intérêts des ouvriers. C'est souvent la réduction des salaires et la détérioration des conditions de travail de ces derniers qui ont permis de réaliser une telle compétitivité, car le niveau de bénéfices des entreprises manufacturières chinoises est déjà extrêmement bas (3 à 5% dans la plupart des cas). Selon les statistiques officielles du gouvernement chinois, entre 1990 et 2005, le poids de la masse salariale globale des travailleurs chinois par rapport au PNB a été réduit de 53% à 41,4% et le rapport entre la masse salariale des travailleurs des entreprises industrielles et le montant global du profit de ces entreprises est passé de 2,4 à 0,43. Les nombreux accidents qui se sont produits au cours de ces dernières années dans le secteur minier chinois sont, à cet égard, très illustratifs : avec seulement 35% de la production mondiale de charbon, la Chine a enregistré 80% des accidents mortels. Par ailleurs, le développement

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des produits « made in China » est de plus en plus confronté à des résistances et ce, malgré plusieurs avantages que ces produits représentent (économie pour les consommateurs, amélioration de la compétitivité de certaines entreprises grâce à une délocalisation partielle des activités vers la Chine, etc.) (Su, 2006). Pour soutenir sa croissance et le développement de sa production, la Chine a énormément besoin de ressources. Elle ne compte que 7% de la terre cultivable mondiale, 6% de l'eau potable, 4% des forêts, 2% des réserves pétrolières et 12% des réserves minérales de la planète12. De pays exportateur de pétrole, elle en est aujourd'hui devenue le second importateur (environ 50% de sa consommation est importée). Depuis 2000, la Chine est responsable d'une augmentation de 40% de la demande mondiale de pétrole et, en 2003, d'une augmentation de 60% de la demande mondiale en métaux non ferreux. Avec 5% de la production manufacturière mondiale, la Chine a consommé 20% de la production mondiale d'aluminium, 35% de la production mondiale d'acier et 45% de celle de ciment en 2004. Il en ressort aujourd'hui que la Chine apparaît comme le principal responsable de la hausse des cours des matières premières, et ceci n'est pas sans incidence, puisque, si la Chine continue à croître à ce rythme, l'ensemble des ressources mondiales ne suffira plus13. Jusqu'à maintenant, le charbon reste la plus importante ressource énergétique de la Chine (75%). Toutefois, ce type d'énergie, même s'il est peu cher, est très polluant et les effets de la croissance chinoise sur son environnement se font sentir. La volonté du gouvernement de développer l'utilisation du pétrole et du gaz se heurte aux coûts d'exploitation. De plus, le développement industriel, ne s'intéressant que peu aux retours sur investissement mais plus aux coûts, s'est fait au travers de gaspillages énormes. Pour fabriquer un même produit, la Chine utilise 7 fois plus d'énergie que le Japon et 5 fois plus que l'Europe. Les entreprises chinoises de sidérurgie consomment 40% de ressources énergétiques de plus ; le secteur de l'électricité, 50%. 10 000 yuans de PIB réalisés coûtent à la Chine 5 fois plus d'eau et 3 fois plus d'énergie que pour les pays développés. Il en résulte qu'aujourd'hui, en plus d'être le premier pays émetteur de CO2 dans le monde, la Chine compte 20 des 30 villes les plus polluées de la planète (Banque Mondiale, 2008). Le pays souffre aussi d'une érosion des sols et d'un réel problème de pollution globale : pollution atmosphérique, pollution des eaux, pluies acides, etc. Selon le gouvernement chinois, en 2004, par exemple, la perte économique directe causée par la pollution représentait 3,05% du PIB chinois et une somme équivalente à 8,6% du PIB devrait être déboursée pour réparer les dégâts écologiques. Au niveau de l'emploi, le bouleversement suscité par l'ascension des produits « made in China » est très brutal partout dans le monde et ce, aussi bien dans les pays développés que dans les pays en développement. Ainsi, depuis le milieu des années 1990, la Chine est devenue la principale cible des mesures antidumping : 37 cas en 1994, 53 en 2001, 57 en 2005, 68 en 2006 et 62 en 2007. Entre 1995 et 2006, la Chine a totalisé 19% de l'ensemble des cas d'antidumping initiés par les pays membres de l'Organisation Mondiale du Commerce et ce, loin avant les autres pays visés (voir le Tableau 4). Il est à noter, par ailleurs, que 65% des cas ont été initiés par les pays en développement.

Source : OMC Dans une telle situation, il apparaît clairement que, même si les résultats liés au modèle actuel de la croissance chinoise sont, à plusieurs égards, extraordinaires, ce modèle de développement

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ne semble pas soutenable. Néanmoins, il est compréhensible qu'un pays en transition comme la Chine ait besoin d'une forte croissance. En fait, tant et aussi longtemps que la croissance sera au rendezvous, tous les problèmes et conflits internes resteront relatifs. Cependant, l'obsession pour une croissance forte sur le marché international à tout prix est indéniablement nuisible aux intérêts de tous. La recherche d'une plus grande efficacité économique, sociale, environnementale ainsi que d'un équilibre dans les échanges commerciaux avec les autres pays du monde serait une condition primordiale pour la Chine si elle souhaitait poursuivre son ascension au sein de l'économie internationale. Une « remontée en gamme » de la Chine dans la nouvelle division internationale du travail s'impose : la Chine devrait désormais miser davantage sur le développement de la « Valeur chinoise » (Cai et al., 2008) au lieu de se concentrer uniquement sur le « Prix chinois » (Engardio et al., 2004). Tout indique que ce passage ne pourra se faire sans heurts et que de nombreuses conditions fondamentales s'imposent au préalable à la Chine. Cependant, il serait très hasardeux de conclure à un « effondrement prochain » de la Chine (Chang, 2001) ou à une « crise imminente » dans ce pays (Shirk, 2007). En effet, étant un pays en voie de développement et surtout un pays en transition, ce dont la Chine ne manque pas aujourd'hui sont des « problèmes ». Pourtant, le fort potentiel du marché intérieur de la Chine, la grande compétitivité de plusieurs de ses facteurs de production, le désir profond de mieux vivre de la population chinoise et l'important pouvoir de mobilisation des ressources de son gouvernement sont des éléments majeurs qui relativisent la gravité de la situation. Pour anticiper l'évolution future de la Chine, il faudrait être capable d'analyser la situation de ce pays non seulement horizontalement, c'est-à-dire par rapport à la situation des pays les plus performants dans le monde d'aujourd'hui, mais aussi, et même surtout, verticalement, soit par rapport à son passé récent - parcours réalisé depuis ces trente dernières années. En fait, l'ouverture de la Chine et sa participation à la nouvelle division internationale du travail ont connu une évolution constante durant cette période. Globalement, quatre périodes pourraient être identifiées, lesquelles sont : 1. la période d'expérimentation (1978-1991), qui est caractérisée essentiellement par l'ouverture des régions côtières ; par l'introduction de capitaux internationaux provenant principalement des Chinois d'outre-mer ; par le développement de la sous-traitance internationale essentiellement dans les secteurs de biens de consommation intensifs en main d'oeuvre. 2. la période d'approfondissement (1992-2001), qui est marquée par le grand élan de la réforme et de l'ouverture de la Chine que Deng Xiaoping a donné en 1992, trois ans après l'événement de la Place de Tian An Men : la plupart des régions sont devenues ouvertes, le système du commerce extérieur chinois a fait l'objet d'une réforme importante, les capitaux occidentaux sont entrés massivement dans le pays, la structure de l'exportation chinoise s'est significativement transformée en faveur des produits de haute technologie, etc. 3. la période de l'essor des produits « made in China » (2002-2006), qui a bénéficié des effets de l'adhésion de la Chine à l'OMC en décembre 2001. Plusieurs réformes majeures ont été réalisées pour que la Chine s'adapte aux normes internationales : les produits « made in China » ont pris une place incontournable dans la structure de la nouvelle division internationale du travail. Par ailleurs, la Chine a tenté d'amorcer une stratégie de « remontée en gamme » en faveur de l'innovation et de l'efficacité économique, sociale et environnementale ; des mesures ont été prises pour encourager les entreprises chinoises à investir dans les pays étrangers afin de contrôler l'approvisionnement et la distribution mais également dans le but d'acquérir certains savoirs et de nouvelles technologies. 4. la période du rééquilibrage qui a débuté officiellement en octobre 2007 lors de l'adoption de la résolution du 17e Congrès du Parti communiste chinois qui vise désormais un développement « harmonieux » mais également un développement « bon et rapide » plutôt que « rapide et bon », tel qu'il l'était auparavant 17. Cette période est notamment ponctuée par l'entrée en vigueur de plusieurs lois importantes, telles que la Loi sur le contrat de travail, la Loi sur le régime fiscal des entreprises en Chine, la Loi anti-monopole, la Loi sur la création de l'emploi, etc. Celles-ci forcent les entreprises exportatrices, chinoises comme étrangères, à redéfinir leur positionnement dans la structure de la division

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internationale du travail et à réaliser plus d'innovations technologiques. Bien qu'il soit encore tôt pour évaluer les impacts réels de la nouvelle stratégie de développement adoptée par le gouvernement chinois, il semble que la Chine possède quelques atouts pour poursuivre une « remontée en gamme ». En fait, au cours de ces dernières années, la Chine a multiplié ses efforts pour favoriser le développement des innovations « indigènes ». Depuis 1995, elle est même devenue la championne en termes de croissance annuelle des investissements en R&D (voir la Figure 5). Fruit de la nouvelle politique d'incitation envers les entreprises étrangères de haute technologie, plus de 1000 centres de R&D ont été implantés en Chine par des multinationales occidentales. Selon certains sondages, la Chine est aujourd'hui un des pays les plus attrayants en termes d'installations en R&D (voir la Figure 6).

4. L'EXPANSION ECONOMIQUE DE 2007 A 2015

Cette expansion chinoise a suivi des étapes que nous pouvons retrouver dans ce point ci-dessous :

4.1.Le développement « en vol d'oies sauvages »

Cette théorisation du processus de développement des pays émergents a été présentée par

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l'économiste japonais Kaname Akamatsu dans les années trente. Il met en évidence la dynamique du processus de spécialisation internationale, que le Japon appliquera et qui caractérise le mode de développement des premiers pays d'Asie à décoller : Hong-Kong, Taïwan, la Corée du Sud.

Partant de l'observation de l'industrie textile, Akamatsu décrit un processus dit « en vol d'oies sauvages », c'est-à-dire en vagues successives de vols groupés en forme de V qui consiste dans la séquence suivante :

· exportation initiale de produits bruts contre importation de produits finis ;

· montée en puissance de la production domestique, acquisition de la technologie de production, amélioration des techniques de production et élévation du niveau qualification de la main d'oeuvre, substitution des importations ;

· développement des exportations, augmentation des salaires ;

· montée en gamme dans les secteurs de production de plus en plus sophistiqués alors que le pays dispose désormais d'un avantage comparatif dans ces nouveaux domaines ;

· abandon progressif des anciens domaines de production dont l'avantage comparatif se réduit au profit de nouveaux pays en cours d'industrialisation (par exemple, abandon progressif du textile, puis de la construction navale japonaise et passage à la production à plus forte valeur ajoutée, telles que l'optique, l'électronique ou, aujourd'hui, la robotique).

Ainsi la Chine a mené une politique économique combinant ouverture aux investissements directs étrangers et abaissement progressif des droits de douane. Ceci s'est traduit par une industrialisation et une urbanisation rapides, notamment des zones côtières, faisant passer la population urbaine à près de 50 % de la population totale ; une accélération des échanges extérieurs et une croissance et un enrichissement général importants. La Chine applique clairement le principe de substitution des importations par la maîtrise progressive de technologies initialement importées en s'appuyant sur sa compétitivité-prix. Le secteur du textile a été une fois de plus l'illustration la plus spectaculaire de ce processus de développement.

Actuellement, le ferroviaire, ou même l'aéronautique, est en passe de connaître le même processus de montée en gamme et d'appropriation progressive par « transfert » de la technologie dans un secteur considéré comme souverain. De ce point de vue, il ne fait aucun doute aux acteurs concernés que la Chine sera, d'ici dix à quinze ans, le 3e producteur mondial d'avions aux côtés de Boeing et Airbus.

En revanche, le modèle chinois se distingue du modèle d'Akamatsu quand on prend en compte tant la taille de son marché domestique que ses impératifs géostratégiques :

· la Chine a d'énormes besoins en énergie et en matières premières. Cela va au-delà de l'intégration dans le processus de division internationale du travail ;
· elle entend construire une industrie dite de « souveraineté » - énergie, aéronautique, défense - en étant présente sur toute la chaîne de production et non dans une logique de spécialisation industrielle clairement indentifiable ;

· la politique d'ouverture aux investissements étrangers est ambiguë : limitée et contrainte par les autorités (via notamment l'imposition de constitution des « joint-ventures » pour pénétrer le marché chinois), elle repose encore sur des « zones économiques spéciales » uniquement sous contrôle

étranger et à destination de la réexportation.

4.2. STRATEGIE DE PUISSANCE

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Ce processus de développement a permis depuis le début des années quatre-vingt une intégrations accélérées de la Chine dans le commerce mondial. Dans cette première phase on a assisté à une croissance significative des ratios de mesure du commerce intra-branche. En revanche depuis le début des années 2000 - et comme on le constate pour le Japon ou la Corée on note, d'une part, une progression plus ralentie et, d'autre part, un niveau d'ouverture qui reste largement inférieur aux autres pays (voir le complément B). En cela, la Chine suit bien le modèle asiatique de développement, qui s'oppose de manière de plus en plus radicale au modèle à la française qui se caractérise par une moindre spécialisation verticale et un fort développement des échanges intra-branche.

? Cependant, le résumé courant caractérisant la spécialisation internationale de la Chine - importatrice de matières premières, exportatrice de produits à fort contenu technologique - semble aussi largement biaisé du fait de la structure de ce commerce qui est pour l'essentiel le fait d'entreprises étrangères présentes sur le sol chinois. En réalité, et selon l'OCDE, la contribution de la valeur ajoutée chinoise dans les exportations de produits de l'informatique ne serait que de 4 %(*). Ceci s'explique par le fait que la plupart des entreprises de haute technologie en Chine ne sont en fait que des lignes d'assemblage, le pays bénéficiant encore principalement de son avantage comparatif en matière de coûts salariaux. Il faut donc faire preuve d'une certaine prudence. Il y a des succès spectaculaires (par exemple, dans le domaine de l'espace) mais la montée en gamme est plus lente que ce que les chiffres laissent croire au premier abord. Le processus de rattrapage technologique est en cours, la volonté de progrès est claire mais il semble encore loin d'être abouti dans les secteurs de pointe, ne serait-ce que parce que des facteurs de blocage apparaissent aussi : la réforme agraire reste incomplète en Chine - alors qu'elle fut réalisée dès 1946 au Japon, sous l'impulsion américaine, par un partage généralisé des terres. Le creusement des inégalités villes/campagnes est devenu une préoccupation majeure de l'État. Depuis 2008, le plan de réforme du secteur rural prévoit bien la possibilité d'étendre le droit d'usage de la terre (elle appartient à l'État et est concédée sous forme de bail pour une durée de trente ans depuis la réforme de 1978), en permettant notamment la location et la prise d'hypothèque. Le recensement entrepris fin 2010 fait apparaître que la moitié de la population réside encore en zone rurale - le niveau de productivité y est encore très faible. L'extension urbaine s'est faite au prix de l'accaparement des terres sans juste compensation ;

? le maintien du passeport intérieur (hukou) et la difficulté consécutive de changer de résidence pour les travailleurs migrants et leurs familles font peser le coût de l'éducation et de la santé sur les zones rurales. La réforme du hukou est perçue comme le moyen économique de réduire les écarts de revenus entre ville et campagne - en transférant le coût de l'éducation et de la santé des migrants travailleurs temporaires des villes sur celles-ci et non comme c'est le cas actuellement sur les campagnes (terre d'origine). Mais l'État se heurte au problème de l'extension - déjà rapide - des infrastructures urbaines pour faire face à cet afflux migratoire accéléré. La solution choisie est d'amener la ville à la campagne et notamment le développement du « grand ouest » pour rapprocher les centres urbains des zones rurales les plus défavorisées et accroître le potentiel de revenus annexes pour les paysans. Mais, là encore, le dilemme politique est de taille, car ces transferts d'activité risquent d'accélérer le tarissement des flux de main d'oeuvre à bas coût vers les centres exportateurs et de réduire trop brutalement pour les régions côtières l'avantage compétitif dont elles disposent encore, sans leur laisser le temps de changer de braquet technologique ;

? les SOE (State Owned Entreprises) se taillent encore la part du lion de l'économie du pays (financements publics, prêts bancaires, production).

Les entreprises nées des collectivités locales - communes provinces (TVE, Town and Villages

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Entreprises) - sont souvent nées d'initiatives privées et ont été « récupérées » par les collectivités locales. L'absence de protection et de reconnaissance de l'initiative privée dans un cadre de droit stabilisé réduit l'initiative privée. L'entreprise privée proprement dite reste en fait plus marginale qu'on pourrait le penser et peut rencontrer des difficultés importantes dans son développement (accès au crédit plus difficile, secteurs protégés et réservés aux SOE, concurrence d'autres entités). La forte dépendance de la Chine vis-à-vis de ses clients extérieurs et la difficulté de distinguer entre la réalité du développement proprement endogène dans le domaine industriel et celui qui s'appuie en fait sur le savoir-faire et la technologie comme de l'infrastructure juridique des services extérieurs (voir le rôle important de Hong-Kong), distingue la Chine de ses voisins asiatiques et notamment du Japon ou de la Corée ;

? l'absence d'un système juridique stable et transparent, réglant notamment les rapports publics/privés et protégeant la validité des contrats, crée une grande incertitude pour les investisseurs potentiels. N'importe qui peut être exproprié à n'importe quel moment - l'expérience de Danone est de ce point de vue la plus emblématique, mais des entreprises nationales ont aussi

connu des sorts semblables ;

? les inégalités de revenu se creusent alors que le coût de la vie augmente (nourriture, logement) bien plus rapidement que les revenus moyens. La contagion des mouvements de revendications salariales à la fin de l'année 2010 reflète ce malaise croissant. La formation croissante des étudiants et l'exode rural d'une main d'oeuvre encore sous-qualifiée mais plus exigeante en matière de salaires, pourraient conduire à des problèmes d'ajustement de l'offre et de la demande de travail. Si la hausse des salaires se justifie largement dans un contexte de rattrapage économique nécessaire, elle peut faire craindre une érosion trop rapide de la compétitivité-prix qui jusqu'à présent fondait le développement industriel du pays.

Au total, il est utile, en étudiant la dynamique de la croissance chinoise, de faire référence aux précédents asiatiques tels qu'ils ont été résumés par le modèle d'Akamatsu. Mais si la Corée a, par exemple, exactement dupliqué la stratégie japonaise, portant ses entreprises comme Hyundaï au Samsung au niveau de Toyota ou Sony, la stratégie de la Chine ne se réduit pas à cette transposition. Les réalités politiques et géopolitiques en font un modèle sui generis ; et c'est un modèle qui change parce que les défis auxquels est confronté le pays se modifient, à la fois en interne et à l'international. L'avenir de la Chine ne se réduira pas à la duplication d'expériences antérieures pas plus qu'à l'extrapolation de la dynamique que l'on a observée jusqu'ici.

4.3 LA DOUBLE REORIENTATION DE LA CROISSANCE CHINOISE

Le développement économique de la Chine est en tout cas spectaculaire. Son émergence comme puissance économique aura d'immenses conséquences sur le reste du monde. Elles sont discutées depuis des années aux États-Unis alors que la prise de conscience est plus récente en Europe. Une seule chose est sûre, nous n'en sommes qu'aux débuts. Mais le plus important, c'est que la stratégie chinoise est en train de changer, c'est ce que nous analysons maintenant.

La Chine a été sévèrement frappée par la récession qui a suivi la faillite de Lehmann Brothers en septembre 2008. Il n'y a pas eu découplage, l'effondrement du commerce mondial (30 % entre le début de 2008 et le début de 2009) a frappé la Chine de plein fouet. Officiellement, et a posteriori, la croissance a été ramenée à 8 % ; en réalité le choc a été bien plus violent : fin 2008, début 2009, on observe un recul de la production d'électricité ou d'acier, de la consommation de pétrole, un arrêt des

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migrations des campagnes vers les villes et même un retour des migrants vers les campagnes. Face à ces risques, le gouvernent chinois a précocement mis en oeuvre un plan de relance de très grande ampleur. Des mesures en faveur de la consommation des ménages et des dépenses d'infrastructures massives (du gouvernement central et des collectivités locales) ont été rapidement engagées et financées non pas sur crédits budgétaires mais par une très forte expansion du crédit bancaire (l'encours de crédit a augmenté d'un tiers en 2009, voir le complément A). La réponse de l'activité a été foudroyante dans tous les domaines (construction et travaux publics, consommation des ménages, investissements des entreprises...).

Résultat : la croissance est de l'ordre de 11 % en rythme annuel au premier semestre de 2010, elle est encore proche de 10 % sur un an au 1er trimestre 2011 ;

Les perspectives à court terme pour l'économie chinoise sont donc rassurantes, mais au-delà ? Les documents politiques publiés durant les douze derniers mois, en particulier à l'occasion de la réunion de l'Assemblée nationale populaire en mars 2010 et celle de 2011, permettent de saisir la vision qu'ont les autorités chinoises des défis et dilemmes auxquels elles font face. La première caractéristique de ces discours et documents, c'est, par rapport à un environnement international en crise, d'exprimer un sentiment de fierté quant à la façon dont a été menée la politique économique anticrise : les actions qui ont été menées et leurs résultats sont autant de justifications en faveur de l'organisation économique du pays et de ses choix stratégiques. Mais, par ailleurs, ils établissent un constat sans concession des résultats insuffisants atteints par rapport aux objectifs stratégiques définis en 2004 qui consistaient à « rééquilibrer la croissance économique » en matière de demande intérieure, d'innovation et d'environnement, en particulier. L'occident célèbre fréquemment le succès du plan de relance de 2009 mais on ne trouve pas, à Pékin, d'autosatisfaction excessive, on y voit plutôt la perception d'un environnement économique désormais plus complexe et plus incertain que la Chine aborde avec des marges de manoeuvre réduites. Les objectifs stratégiques poursuivis en matière économique par Pékin sont au nombre de deux, la stabilité sociale et le rattrapage technologique.

L'idée première, c'est naturellement de trouver de nouveaux moteurs de croissance au sein d'une stratégie inchangée puisqu'elle a fait ses preuves !

Le mode de croissance traditionnel conserve des partisans très influents : il faut évidemment compter avec le poids des lobbies exportateurs, celui des industriels, celui des régions côtières. Mais il ne s'agit évidemment pas de laisser les choses aller simplement sur leur lancée : la Chine n'a aucunement l'intention de voir sa place dans la division internationale du travail définie en tout et pour tout par de bas coûts de main d'oeuvre. Le modèle « en vol d'oies sauvages » est une vraie stratégie parce qu'il incorpore un principe de changement permanent, l'évolution vers des productions à plus forte valeur ajoutée, la montée en gamme.

Cette idée correspond manifestement à l'ambition que peut nourrir le pays, elle a clairement le vent en poupe. Il faut donc s'attendre en Occident, très vite, à cette concurrence nouvelle sur les productions que l'on considérait encore, il y a peu de temps, comme l'expression d'avantages comparatifs solidement établis. C'est terminé : comme le Japon et comme la Corée avant elle, la Chine s'apprête à rivaliser avec les pays plus avancés sur les productions à plus haute technologie : trains à grande vitesse, matériel de télécommunications, lanceurs de satellites et, dans un futur peut-être pas très éloigné, l'aéronautique, le nucléaire...

L'enjeu est de taille et présente pour la Chine elle-même de nombreux défis. Car le poids de l'industrie en Chine est extrêmement élevé, ce qui a de nombreuses conséquences défavorables : caractère très cyclique de l'économie, consommation excessive de matières premières, problèmes d'environnement. Mais le poids élevé de l'industrie est aussi la conséquence des biais des politiques économiques menées en Chine :

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+ coût du travail (salaires) trop bas, ce qui dope la compétitivité de l'industrie ;

+ subventionnement des prix de l'énergie ;

+ allocation du crédit vers les grandes entreprises ;

+ absence de pénalisation des coûts environnementaux ;

+ taux d'intérêt trop bas, ce qui subventionne les secteurs capitalistiques.

On voit cependant les débuts en Chine des politiques économiques visant à corriger ces biais :

hausse plus rapide des salaires, réduction des subventions à l'énergie et objectif de réduction

de l'intensité énergétique, efforts pour canaliser davantage de crédit vers les petites

entreprises privées. Le régime de change implique cependant le maintien de taux d'intérêt très

bas par rapport au taux de croissance.

Les conséquences négatives de cette hypertrophie de l'industrie sont connues :

+ variabilité excessive de l'économie chinoise, puisque l'activité industrielle est

structurellement plus cyclique (cf. graphique 46) que l'activité des services ;

+ consommation excessive de matières premières;

+ pollution (eau, air...).

L'hypertrophie de l'industrie chinoise est endogène, elle est liée à divers biais de politique

économique :

+ les salaires sont trop bas par rapport à la productivité (la part des salaires dans le PIB est

extrêmement faible, cf. graphique 50), ce qui accroît la compétitivité-prix de l'industrie et lui

permet de gagner rapidement des parts de marché.

Il est clair que la remontée de la part des revenus des ménages dans le PIB vers un niveau

normal (60 à 70 %) aurait comme effet une perte de parts de marché de la Chine.

La Chine, les États-Unis et l'Allemagne sont les trois principaux importateurs et exportateurs de marchandises.

- En 2013, la Chine est devenue le premier importateur et exportateur mondial de marchandises, ses importations et ses exportations s'élevant au total à 4 159 milliards de dollars EU. Elle a enregistré un excédent commercial de 259 milliards de dollars EU, soit 2,8% de son PIB.

- Les États-Unis viennent en deuxième position, avec des importations et des exportations d'un montant total de 3 909 milliards de dollars EU en 2013. Leur déficit commercial a été de 750 milliards de dollars EU (4,5% du PIB).

- L'Allemagne occupe la troisième place, avec un excédent commercial de 264 milliards de dollars EU en 2013, soit 7,3% de son PIB.

- Le Japon arrive en quatrième position, avec un commerce de marchandises de 1 548 milliards de dollars EU en 2013. Il a enregistré un déficit commercial de 118 milliards de dollars EU, soit 2,4% de son PIB.

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Augmentation de la part du matériel de bureau et de télécommunication dans les exportations

mondiales

- Les exportations mondiales de matériel de bureau et de télécommunication ont augmenté de 4% en 2013. Leur part dans les exportations mondiales totales a légèrement progressé, à 9,6% en 2013 contre 9.3% l'année

précédente. Six des dix principaux exportateurs ont enregistré une augmentation en 2013, allant de 14% (Corée, Rép. de) à 0,5% (Etats-Unis). Quatre exportateurs ont enregistré des taux négatifs: Japon (-15%) ;

- Taipei chinois (-3%), Union européenne (-2%) et Mexique (-1%).

- La part de la Chine dans les exportations mondiales de matériel de télécommunication est passée à 38% en 2013, contre 36% en 2012. Celle de l'UE a reculé, de 26% à 25% pendant la même période.

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Il est clair qu'étant donné la particularité du système politique et économique chinois, les investissements en R&D ne garantissent pas, à eux seuls, le succès de la Chine dans la poursuite de sa stratégie de la « remontée en gamme ». Pour atteindre l'objectif d'être parmi les 20 premiers pays innovateurs en 2020, la Chine devrait restaurer son système de gouvernance corporative, réformer son système d'éducation, améliorer la protection de la propriété intellectuelle, développer l'esprit entrepreneurial orienté vers la technologie, faciliter le transfert des connaissances et technologies avancées des multinationales occidentales vers les entreprises chinoises. De même, la Chine devrait accélérer le développement d'un système de marché juste et efficace et accorder plus d'espace à l'expression et à la créativité des individus. Sur le marché international, la Chine devrait assumer plus de responsabilités en tant que grand joueur afin de favoriser une division internationale du travail « gagnant-gagnant ». Par ailleurs, si en 1978, la Chine n'avait pas d'autre choix que de se lancer dans l'exploitation de ses avantages comparatifs en termes de coûts et de ressources pour conquérir le marché international, le temps est venu pour elle d'intégrer les ressources internationales pour développer son marché intérieur. Voici autant de défis qui conditionnent l'avenir de l'économie chinoise.

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II. CONCLUSION

La Chine est aujourd'hui un pays dont l'économie et l'importance ne peuvent être ignorées. Le développement rapide de la Chine a créé une situation inédite dans le monde et défie quasiment tous les modèles et théories de développement existants. La montée en puissance des produits « made in China » a été pendant longtemps très bénéfique pour le développement de la Chine et s'étend sur le plan économique que politique. Cependant, les changements en cours dans le commerce extérieur chinois sont dictés par le nouvel environnement international, où la demande mondiale se recentre vers les pays en développement, mais aussi par les transformations internes de la Chine et l'évolution de son modèle de développement.

L'augmentation des coûts salariaux depuis le milieu des années 2000 est une tendance durable liée à l'évolution démographique et à la politique gouvernementale en faveur d'un régime de croissance axé sur l'augmentation de la demande intérieure (relèvement des salaires minima et généralisation de la couverture sociale des travailleurs).

L'analyse des quatre composantes du commerce extérieur chinois met en évidence quelques tendances significatives du changement de modèle. Les échanges de processing ralentissent et se dégagent du bas de gamme technologique ; les échanges des entreprises à capitaux étrangers révèlent leur intégration accrue dans le tissu économique et productif chinois ; les entreprises privées chinoises émergent comme des acteurs puissants, même si elles accusent encore en moyenne un retard technologique.

Dans ce contexte, les thèmes des discussions commerciales entre la Chine et ses grands partenaires se déplacent de la politique de change et de la concurrence des exportations chinoises, vers les questions de règlementation de la concurrence sur le marché intérieur et les conditions d'accès des entreprises étrangères à ce marché

Les effets négatifs retentissants de la stratégie de développement des produits « made in China » adoptée depuis 1978 deviennent aujourd'hui, dans une certaine mesure, un frein au développement de la Chine et même à celui de plusieurs autres pays. À cet égard, les problèmes que la Chine rencontre aujourd'hui sont d'ordre économique, social, environnemental, et, en réalité, également politique. Depuis 2007, le gouvernement chinois a adopté une nouvelle stratégie économique qui vise un développement plus efficace, plus social et plus écologique. Bien qu'il soit encore tôt pour évaluer les impacts réels, elle semble amorcer une nouvelle phase du développement chinois.

Ainsi, en 2013, la Chine est devenue la première puissance commerciale du monde. La progression des échanges extérieurs du pays continue à être plus rapide que celle du commerce international, mais ses ressorts sont différents de ceux qui prévalaient avant la crise globale. La participation de l'économie chinoise aux chaînes mondiales de production, à travers les activités de processing, n'est plus le moteur principal de ses performances commerciales. Le nouveau moteur des échanges réside dans le commerce ordinaire émanant d'une offre fondée principalement sur les intrants locaux, et d'une demande intérieure chinoise.

En 2014, la Chine est la deuxième puissance économique mondiale. Elle est également l'un des cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies, le premier exportateur mondial et elle dispose de l'arme nucléaire, de la plus grande armée du monde et du deuxième plus grand budget militaire. Gouvernée par le Parti communiste chinois, la Chine a adopté une « économie socialiste de marché » où capitalisme et contrôle politique autoritaire se côtoient en une formule spécifique.

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III. BIBLIOGRAPHIE

1. Françoise Lemoine & Deniz Ünal, « Mutation du commerce chinois » CEPII, PARIS, 2015

2. Organisation Mondiale de Commerce, « Statistiques du commerce international 2014 » 154, rue de Lausanne CH 1211 Genève 21 Suisse, 2014 ;

3. « Calendrier des programmes de commerce international Avril 2015 à mars 2016 » Ontario, 2015 ;

4. Patrick Artus, Jacques Mistral et Valérie Plagnol, « L'émergence de la Chine : impact économique et implications de politique économique » Paris, 2011 ;

5. Jacques el Alami, « HISTOIRE TERMES »2016 ;

6. Organisation Mondiale de Commerce, « Statistiques du commerce international 2015 » 154, rue de Lausanne CH 1211 Genève 21 Suisse, 2014 ;

7. ZHAN SU « participation de la chine a la nouvelle division internationale du travail : défis et perspectives » volume 67, no. 1, Suisse, 2009 ;

IV. Table de matière

I. INTRODUCTION 1

1. DE L'HISTOIRE POLITICO-ECONOMIQUE DE LA CHINE POPULAIRE. 2

2. LES PRODUITS « MADE IN CHINA », RESULTATS DE LA NOUVELLE DIVISION INTERNATIONALE DU

TRAVAIL 4

3. DU « PRIX CHINOIS » A LA « VALEUR CHINOISE », DEFIS DE LA « REMONTEE EN GAMME » POUR

LA CHINE 10

4. L'EXPANSION ECONOMIQUE DE 2007 A 2015 14

4.1. Le développement « en vol d'oies sauvages » 14

4.2. STRATEGIE DE PUISSANCE 15

4.3 LA DOUBLE REORIENTATION DE LA CROISSANCE CHINOISE 17

II. CONCLUSION 22

III. BIBLIOGRAPHIE 23

IV. Table de matière 23






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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984