WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Prise de décision intuitive dans un environnement virtuel.

( Télécharger le fichier original )
par Mickael ESKINAZI
Université Catholique de Paris - Psychologie 2016
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

2.2.3 Intuition sociale et apprentissage implicite

Dans les parties précédentes, nous avons montréque le principe de l'intuition est présent dans de nombreux processus nécessaires à notre vie quotidienne. En effet, cette capacitéest présente dans la communication, dans la résolution de problème, dans la prise de décision, dans le jugement et même dans la perception (Bar, 2007 et Bar, 2009). Cette possibilitéattribuée à l'Homme, aurait donc un rôle majeur dans notre existence et serait même indispensable à la vie sociale (Liebermann, 2000; Frith et Libermann, 2009; Friston, 2015).

Les thèses actuelles présentent l'intuition comme une capaciténon-consciente, rapide, et holistique, basée sur une capacitéstatistique naturelle, et un apprentissage implicite menant vers une autonomisation de la fonction (Kahneman, 2003; Liebermann, 2000). Par conséquent, nous pourrions penser qu'une personne experte dans un domaine, c'est à dire une personne possédant des réflexes rapides et automatisés à propos d'un domaine, aurait naturellement plus d'intuition qu'un novice dans ce même domaine.

Toutefois, deux points de vue s'opposent sur la question du lien entre intuition et expertise. Selon Kahneman (2011), être expert dans un domaine ne réduirait pas les biais de jugements. Avoir des années de pratique en

40 2 L'intuition : une fonction essentielle à l'Homme?

psychologie ou en médecine ne permettrait pas de réduire les erreurs de diagnostique (Camerer et Johnson, 1991). En finance non plus, l'expertise n'est pas le gage d'une meilleure prédiction des stocks, elle tendrait seulement àaccroitre la confiance dans son jugement (Zaleskiewicz, 2011).

D'un autre côté, les expériences menées sur les joueurs d'échec montrent que le niveau d'expertise incrimine fortement sur la capacitéde jeu, sur la rapiditéet la mémorisation immédiate (Chase et Simon, 1973). Lors d'une expérience oùle but est de reproduire un échiquier de mémoire après une unique présentation de 5 secondes, les experts ont plus de facilitéque les novices à reproduire l'ordre du jeu, mais seulement si les pièces sont disposés selon un ordre cohérent avec les règles du jeu. Dans le cas oùles pièces auraient étédisposées aléatoirement, la performance de mémorisation serait la même d'un groupe à l'autre (Chase et Simon, 1973). Dans une étude similaire plus récente, des joueurs d'échec experts, au contraire des novices, sont capables de juger inconsciemment si une partie est échec ou non d'après la présentation d'une amorce masquée (donc perçue non-consciemment) censée influencer positivement leur décision. Les joueurs experts auraient donc développéune forme de réflexe basésur une mémoire composée de milliers de combinaisons différentes. Cette capacitéde reconnaissance immédiate serait d'ailleurs accentuée par le fait que dans l'expérience citée, le roi est menacédirectement, donc lors d'une situation alarmante pour un joueur d'échec. D'autre part l'effet du masquage ne semble pas avoir d'effet sur les joueurs experts si les combinaisons masqués n'ont pas de sens (Kiesel, Kunde, Pohl, Berner et Hoffmann, 2009). Cette mémorisation est bien plus qu'un simple stockage d'information, elle est une véritable construction mentale qui se jouerait non-consciemment. La décision se jouerait alors à un niveau non-conscient, et ce, en fonction que le masque corrèle avec les données mémorisées du joueur d'échec ou non. Nous pourrions alors faire l'hypothèse qu'il y aurait une mise ou non en harmonie entre ce qui se trouve à l'extérieur (le masque) et ce qui se trouve à l'intérieur (données mémorisées), et ce serait cette congruence ou non-congruence qui déterminera la réaction appropriée. Il aurait étéintéressant de coupler cette expérience avec des mesures physiologiques, dans le but de détecter ou non des marqueurs somatiques.

L'intuition se trouverait donc à la lisière de ces deux mondes et permettraient le lien, la communication entre ces deux sources d'informations. Il se pourrait d'ailleurs qu'elle soit le lien lui-même.

L'apprentissage implicite qui se définit comme : l'acquisition de connaissances de façon non-consciente et
en l'absence d'une connaissance explicite à propos de ce qui est requis. L'apprentissage implicite est un processus

primaire fondamental, qui est à l'origine des comportements adaptifs des organismes complexes (Reber, 1993
citépar Lieberman, 2000 p. 4). L'apprentissage implicite serait donc l'internalisation non-consciente de règles et la capacitéde les utiliser en réponse à un problème, sans pouvoir toutefois expliquer logiquement la loi utilisée.

Pour illustrer notre propos, Liebermann (2000) cite l'expérience de Lewicki (1986), dans laquelle les participants devaient juger de la personnalitéde personnes représentées sur des photos. Lewicki créa une subtile corrélation entre la longueur des cheveux et un trait de personnalité. Pendant l'expérimentation, les participants utilisèrent significativement cette information de covariance pour juger de la personnalitédes personnes présentées. Or, lorsque les expérimentateurs leur demandaient sur quoi ils basèrent leur jugement, les participants répondaient généralement sur les yeux, mais à aucun moment ils n'avaient vu le lien qui unissait ce trait de caractère à la longueur des cheveux. Nous pourrions dire, qu'ils ont utiliséune loi malgréeux et donc, que l'apprentissage implicite ici, est une forme d'influence. Toutefois, nous pourrions nuancer ce propos, en proposant qu'il existe chez l'Homme une fonction

2.3 L'intuition à la lumière de la neuro-imagerie 41

non-consciente capable de reconnaître des patterns, des schémas, des liens, des analogies entre toutes choses. Ce serait finalement, l'associativitéqui serait ici derrière le phénomène de l'apprentissage implicite. C'est à dire la reconnaissance implicite d'un lien entre des objets (perceptifs ou idéels) et grâce à cela, une capacitéde catégoriser le monde selon des classes toutes liées entre elles. Ne serait-ce pas d'ailleurs la capacitéde créer des liens, du sens donc, qu'on appellerait intelligence? Toutefois, la capacitéde créer des liens fait aussi partie des instincts que l'on retrouve chez les animaux ((biche)//forme/odeur/mouvement du lion = danger = fuir), pourtant cette création de liens semble rigide et sélective (instincts) au contraire de celle de l'homme qui, conscientisée, peut se permettre de créer des liens entre le Camembert et Jésus comme Dali sut le faire en 1961 quand on l'interrogea sur les montres molles lors d'une interview (INA, 1961) :

~ Les montres molles sont comme du fromage, et surtout comme le camembert quand il est tout à fait à point, c'est à dire qui a la tendance de commencer à dégouliner. Et alors, mais quel rapport entre le fromage et le mysticisme? Alors Dal'ý a répondu une chose sublime, il a dit : Parce que Jésus, c'est du fromage '. Alors làil y a eu un certain malaise de la part des jésuites, mais comme je suis très jésuitique moi-même, je savais déjàque cette chose c'était saint Augustin qui l'avait dite avant Dal'ý. Et alors je leur ai citéun psaume de la Bible dans lequel on parle de Jésus en le comparant à une montagne. C'est très long et ça commence en disant : montus, quamdatus, montus termentatus, montus... , enfin. C'est une série de montagnes toutes lesquelles ont les attributs et les vertus caractérisées et ammoniacales du fromage. Et rien d'autre que saint Augustin, il dit, il écrit textuellement que ce passage il faut l'interpréter que Jésus ce n'est pas une montagne de fromage mais c'est des montagnes, des montagnes et des montagnes de fromage. Et naturellement si c'était Dal'ý tout seul qui aurait dit que Jésus c'était du fromage, mais si c'est saint Augustin, alors tout le monde est forcéde dire que quand même, c'est pas aussi fou ni aussi paranoïaque que ça. ~

Nous remarquerons que cette analogie n'est possible que grâce à l'abstraction du langage et à la déliaison effective qui peut exister entre représentations d'objets et représentations de mots (Freud, 1891), ce que les animaux ne sont pas capables de réaliser, d'oùune absence de choix dans leurs instincts. L'intuition suppose le choix et la liberté, tandis que l'instinct suppose l'acte et la rigidité.

L'intuition dépendrait donc des structures cérébrales impliquées dans l'apprentissage implicite, dans l'antici-pation, dans l'inférence émotionnelle/comportementale d'autrui et de soi-même, dans l'élaboration des marqueurs somatiques ainsi que dans les structures impliquées dans la prise de décision.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard