La francophonie et la médiation dans la crise ivoirienne de 2002 à 2010.( Télécharger le fichier original )par Sika Gautier ADOMON Université Jean Moulin Lyon 3 - Master 2 2014 |
PARAGRAPHE II : LA MEDIATION, UN ENJEU DE PUISSANCE ET D'INFLUENCECe paragraphe va traiter de l'intervention multiple, source de conflit (A) et l'influence de l'ancienne métropole dans la médiation (B). A) Une intervention multiple, source de conflitLa crise en Côte d'Ivoire a vu la mobilisation de plusieurs organisations pour la résoudre. D'abord les Nations Unies(ONU), en application de la Charte de l'Organisation qui lui confère la légitimité nécessaire pour intervenir dans des situations de crises et conflits. Ensuite, les organisations régionales, l'Union Africaine (UA) et la Communauté des états de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). Et enfin, l'Organisation Internationale de la Francophonie (OIF) sans oublier les représentants des pays et autres institutions qui composaient tous les organes et mécanismes de suivi des accords. Tous ces tiers intervenaient à des degrés divers dans la médiation ivoirienne. Loin d'être un avantage, « la multiplication des acteurs peut être de nature à paralyser la résolution de la crise, voire de l'attiser, dans la mesure où chacune des entités a des approches différentes pour le règlement du conflit, et intervient avec ses propres méthodes »125(*). C'est ainsi, que la crise a connu 4 médiations entreprises successivement par le Togo, la France, le Ghana puis l'Afrique du Sud avec autant de signatures de divers accords politiques, notamment ceux de Lomé, de Linas Marcoussis, d'Accra I, II et III, de Pretoria I et II, sans grand succès. Il est évident que la multiplicité et la diversité des initiatives de médiation dans un même conflit posent la question cruciale de leur coordination ou harmonisation. En outre, cette situation est aussi source de compétition parfois entre les médiateurs. Elle peut donc constituer un enjeu du conflit et entrainer des rivalités néfastes et improductives pour la paix. En effet, des questions de leadership, de positionnement et parfois même de règlements de comptes, sont apparus au beau milieu des négociations, lors de la crise en Côte d'Ivoire. Dans sa thèse, madame BALDE Hassatou, relate un peu les rivalités que peut engendrer une médiation. Dès l'éclatement de la crise, la CEDEAO a désigné un groupe de contact dirigé par Feu le président togolais Gnassingbé Eyadema pour entamer les négociations. Ce groupe a pu obtenir le 17 octobre la signature du cessez-le-feu, « et le 30 octobre débutèrent à Lomé les premières négociations directes entre les deux protagonistes ivoiriens. Toutefois, le choix de G. Eyadema et ses premiers succès n'étaient pas du goût de tout le monde, en particulier du président sénégalais. En effet, A. Wade, en sa qualité de président en exercice de la CEDEAO, n'avait guère apprécié d'être écarté du Groupe de contact. Soupçonnant un éventuel sabotage de sa part, toutes les parties impliquées dans la crise ivoirienne adoptèrent une déclaration qui appuyait les efforts du médiateur togolais. Six jours après cette déclaration, le 18 décembre, le président Wade, toujours en sa qualité du président en exercice de la CEDEAO, organisa un sommet extraordinaire des chefs d'État et de gouvernement à Dakar pour discuter de la crise ivoirienne126(*)». Réunion à laquelle, la majorité des chefs d'État de la sous-région refusèrent d'y participer. Autre constat de la médiation dans la crise ivoirienne. Elle était assurée par des chefs d'état. Au nombre de ces médiateurs, nous pouvons énumérer ; au nom de la CEDEAO (Jhon Kufor, Eyadema, Wade, Blaise) ou de l'UA (Thabo Mbeki, Obasanjo, Sassou), et des initiatives des présidents Maliens (Toumani Touré) et Gabonais (Feu Oumar Bongo). Le problème est que Ces Chefs d'états utilisent la médiation pour renforcer leur influence au niveau du continent et de l'Organisation. Enfin, comme nous pouvons le constater, la crise ivoirienne, à travers les différentes interventions extérieures, a montré les limites des interventions multiples, eu égard au problème de leadership.Le Chef de l'Etat a décidé d'engager directement les négociations avec les rebelles en 2007, appelé dialogue inter-ivoirien d'où fut conclu l'accord politique de Ouagadougou. * 125Hassatou BALDE, « La coordination entre l'ONU et les Organisations régionales africaines dans la gestion de la Paix », janvier 2005, Thèse pour l'obtention du grade de docteur de l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne en Droit international public et Européen, T. 1, p. 509 * 126idem |
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