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Amnisties et prescriptions penales en droit international des droits de l'homme


par Seth Jireh OUMBA BAZOLA
Université Catholique d'Afrique Centrale - Master 2021
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITE CATHOLIQUE D'AFRIQUE CENTRALE

INSTITUT CATHOLIQUE DE YAOUNDE

FACULTE DE SCIENCES SOCIALES ET DE GESTION

Académie de la Paix et des droits de l'homme en Afrique centrale

 
 

MASTER DROITS DE L'HOMME ET ACTION HUMANITAIRE

AMNISTIES ET PRESCRIPTIONS PENALES EN DROIT
INTERNATIONAL DES DROITS DE L'HOMME

Mémoire présenté et soutenu

Par

OUMBA BAZOLA Seth Jireh

Master 1 en Droits de l'homme et action humanitaire

Sous la direction de :

Docteur TCHIBINDA KOKA Gay Vertu

Chargé de cours à l'université catholique d'Afrique centrale

Sous la supervision de

Professeur BOUKONGOU Jean Didier

Professeur titulaire en droit international à l'Université Catholique d'Afrique Centrale

Année académique : 2020- 2021

2

Remerciements

Je souhaite avant tout exprimer ma reconnaissance au Docteur TCHIBINDA Gay Vertu. Sans son écoute, son accompagnement et la finesse de ses critiques, je ne serais peut-être pas parvenu à la réalisation et à l'achèvement de ce mémoire. Merci de m'avoir soutenu jusqu'au bout.

Je remercie également le Professeur BOUKONGOU Jean Didier, directeur de l'APDHAC pour la formation et les conseils.

Je suis très reconnaissant des divers apports de l'Université catholique d'Afrique centrale, de l'APDHAC et de tous les enseignants qui ont su nous guider depuis la première année de master jusqu'à la rédaction de nos mémoires, je pense aux Docteurs Maurice ONANA, Thibaut BATA, Wilfried PATHE et Carlos MUKAM.

Enfin, je tiens à remercier particulièrement mes parents Marcel et Thérèse OUMBA ; Parfait et Derboise OUMBA et la famille MOUKOKO pour leur soutien sans faille à toutes mes entreprises. Je garde au fond de mon coeur leurs précieux encouragements.

Une pensée particulière à mes frères Brhell et Dorile OUMBA, sans oublier mes neveux chéris que sont Isabel, Parfelie et Paghis OUMBA.

3

Sigle et abréviation

DIDH Droit international des droits de l'homme

DI Droit international

DIP Droit international pénal

DH Droits de l'homme

DUDH Déclaration Universelle des droits de l'homme

CG Convention de Genève

CADHP Cour africaine des droits de l'homme et des peuples

CEDH Cour européenne des droits de l'homme

CADH Cour américaine des droits de l'homme

CANI Conflit armé non international

CAI Conflit armé international

CIDH Convention interaméricaine des droits de l'homme

CJVRR Commission Justice, Vérité, Réconciliation et Réparation

CP Code pénal

CPP Code de procédure pénale

C. Civ Code civil

GC Guerre civile

NU Nations Unies

ONU Organisation des Nations Unies

PIDCP Pacte internationale relatif aux droits civils et politiques

PIDESC Pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels

RCA République Centrafricaine

4

ROC République Démocratique du Congo

TPY : Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie

CPI : Cour pénal international

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RESUME

Les amnisties et les prescriptions pénales sont des institutions de clémence qui ont pour origine le droit interne. Fondées sur des principes sociaux, moraux et constitutionnels, leur manifestation ou application dépend du législateur qui, pour une bonne application et un respect des principes démocratiques a besoin du consentement du peuple. Toutefois, ces pratiques sont considérées en DIDH comme des pratiques incitant l'impunité des responsables des violations des droits de l'homme. C'est dans cette perspective que le DIDH, reconnaissant les amnisties sous certaines conditions, rejette les prescriptions pénales pour promouvoir le principe de l'imprescriptibilité des crimes. En effet, s'agissant des amnisties, la condition de son application en droit interne depuis les conventions de Genève et leurs Protocole (1 et 2) est que les Etats doivent vérifier que les infractions qui sont amnistiée ne sont pas des crimes internationaux comme le crime de guerre, le crime contre l'humanité et le génocide. Un autre crime a également un caractère international depuis la Convention de la Haye, c'est le crime de torture. Dès lors que cette condition est remplie, l'amnistie peut s'appliquer. S'agissant des prescriptions pénales, le DIDH interdit formellement cette pratique et pense qu'aucune autre alternative ne peut être prise pour son application car, favorisant l'imprescriptibilité des peines dont la Convention internationale a été mise en place en 1968. Toutefois, des fondements et de la reconnaissance des amnisties et des prescriptions, découle des conséquences ou impacts juridique sur les victimes des droits de l'homme, sur les auteurs mais également sur la société. De tous ces impacts, le DIDH ne retient que ceux relatifs aux violations des droits de l'homme et plus particulièrement des présumés auteurs et des victimes qui, dans un premier temps subissent des affres, mais après ne sont pas réparé. En effet, les présumés auteurs après le bénéfice de clémence, sont libre et ne sortent aucunement responsables des violations, ce qui n'est pas pour le DIDH normal. Pour les victimes enfin, ces derniers ne reçoivent pas de réparations et voient parfois leurs plaintes rejette faute de temps, pour les raisons d'oubli de la société. C'est dans cette perspective que le DIDH a mis en place des mécanismes extrajudiciaire comme le Justice Transitionnelle et les mécanismes juridictionnels comme les Tribunaux pénaux, à l'instar de la CPI.

Mots clés : - Crimes internationaux- Cour pénale internationale- Droit international des droits de l'homme- Reconnaissance- Rejet- Imprescriptibilité- Justice Transitionnelle.

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ABSTRACT

Amnesties and penal prescriptions are leniency institutions that originate in domestic law. Founded on social, moral and constitutional principles, their manifestation or application depends on the legislator who, for a good application and respect for democratic principles, needs the consent of the people. However, these practices are considered in IHRL as practices inciting impunity for those responsible for human rights violations. It is in this perspective that the DIDH, recognizing amnesties under certain conditions, rejects penal prescriptions to promote the principle of the imprescriptibility of crimes. Indeed, with regard to amnesties, the condition for its application in domestic law since the Geneva Conventions and their Protocols (1 and 2) is that States must verify that the offenses which are amnestied are not international crimes such as war crimes, crimes against humanity and genocide. Another crime also has an international character since the Hague Convention, and that is the crime of torture. As long as this condition is met, the amnesty can apply. With regard to penal prescriptions, the IHRL formally prohibits this practice and believes that no other alternative can be taken for its application because, favoring the imprescriptibility of penalties for which the International Convention was put in place in 1968. However, some foundations and recognition of amnesties and prescriptions, derives from the consequences or legal impacts on the victims of human rights, on the perpetrators but also on society.

Of all these impacts, the IHRL only retains those relating to human rights violations and more particularly the alleged perpetrators and victims who initially suffer horrors, but are not repaired later. Indeed, the alleged perpetrators after the benefit of leniency, are free and do not take any responsibility for the violations, which is not for the normal IHRL. Finally, for the victims, the latter do not receive reparations and sometimes see their complaints rejected for lack of time, for reasons of oblivion by society. It is in this perspective that the IHRL has set up extra-judicial mechanisms such as Transitional Justice and jurisdictional mechanisms such as Criminal Courts, like the IPC.

Key words :- International Crimes- International Penal Court- International human rights law-Recognition- Rejection- Imprescriptibility- Transitional Justice.

SOMMAIRE

7

INTRODUCRION .

PREMIERE PARTIE : FONDEMENTS ET IMPACTS JURIDIQUES EN DROIT

INTERNATIONAL DES DROITS DE L'HOMME
CHAPITRE I : FONDEMENTS JURIDIQUES DES AMNISTIES ET DES PRESCRIPTIONS

PENALES

SECTION I : Les fondements et la manifestation des amnisties et des prescriptions pénales

SECTION II : La reconnaissance internationale des amnisties et des prescriptions pénales :

entre codification (acceptation) et difficultés d'application .
CHAPITRE II : IMPACTS JURIDIQUES DES AMNISTIES ET DES PRESCRIPTIONS SECTION I : Les impacts sur les victimes : entre violation et garanti des droits des victimes

des violations des DH

Section II : Les impacts sur les présumés auteurs de crimes et la société

DEUXIEME PARTIE : LES MECANISMES DE PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES APRES LA MISE EN OEUVRE DES AMNISTIES ET DES

PRESCRIPTIONS PENALES .
CHAPITRE III : LES MECANISMES JURIDICTIONNELS ET EXTRA-

JURIDICTIONNELS

SECTION I : Les mécanismes juridictionnels .

SECTION II : Les mécanismes extrajudiciaires de protection des droits des victimes : la justice

transitionnelle
CHAPITRE IV : APPROCHE ET SOLUTIONS DANS L'ADMINISTRATION ET LA GARANTIE DES DROITS DES VICTIMES ET DES PRESUMES AUTEURS DES CRIMES

EN AFRIQUE ..

SECTION I : Solutions relatives à l'administration des amnisties et des prescriptions .

SECTION II : Solutions de garanti des droits des victimes et des présumés auteurs des crimes. CONCLUSION GENERALE :

BIBLIOGRAPHIE

ANNEXES

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION

8

Dans le but de rendre la vie en société plus agréable, les êtres humains ont érigé un certain nombre de règles, regroupé en une discipline appelée « droit ». Ces normes ont pour objectif de règlementer leur vie en délimitant les frontières entre le permis et l'interdit. La violation de ces règles entraine dans cette perspective des sanctions et ce, en fonction des Etats, des textes et des infractions commises. Toutefois, le principe de sanctionner les violations des différentes lois peut faire l'objet des dérogations, avec l'application des mesures de clémence comme les amnisties et les prescriptions pénales.

En effet, il est important de préciser que l'amnistie et la prescription pénale qui font l'objet de notre étude, sont des mesures qui s'appliquent originellement au niveau national en vertu d'une loi votée. Ces deux mesures d'atténuation ont pour finalité d'oublier les fautes commises dans le but de faciliter l'instauration de la paix et de favoriser l'unité nationale. Mais si l'amnistie et la prescription pénale permettent d'oublier les fautes au nom de la recherche de la paix et de la consolidation de l'unité nationale, celles-ci ne remet-elles pas en cause la question de la lutte contre l'impunité, chère au droit international ? En d'autres termes l'amnistie et la prescription pénale sont-elles compatible avec le droit international des droits de l'homme ?

C'est cette idée générale qui gouverne notre travail de recherche, qu'il convient de présenter dans un contexte précis.

9

I- LE CADRE THEORIQUE

A- CONTEXTE DE LA RECHERCHE

La présente réflexion est menée suivant le contexte juridique (1) et politique (2).

1- Le contexte juridique

Depuis la deuxième guerre mondiale, le monde a été marqué par plusieurs autres conflits armés tant nationaux qu'internationaux, mais ayant tous un caractère international au vu de l'ampleur des crimes commis. Depuis l'humanité s'est engagée dans le respect de la dignité humaine et la lutte contre l'impunité. A cet effet, des mécanismes juridiques ont été mis en place au niveau international. Parmi ces mécanismes, il y a des textes et des institutions, auxquels s'ajoute la jurisprudence. Relativement aux textes, il peut être cité la Charte des Nations Unies1, la Déclaration universelle des droits de l'homme2, les pactes internationaux de 1966, le Statut de Rome dont la finalité principale est de protéger la dignité humaine et de lutter contre l'impunité mais aussi des textes régionaux. En effet, la convention européenne sur l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité et les crimes de guerre consacre le principe de la prescription lorsqu'elle interdit en son article premier, les Etats membre de recourir à la prescription3. Cette position marque une évolution du droit pénal international pour qui, la prescription n'est plus un principe, mais plutôt l'imprescriptibilité des crimes internationaux. L'amnistie pour sa part, a connu peu d'évolution sur le plan du DIP puisque ce dernier fait toujours l'objet de contradictions au niveau international. Depuis le traité d'Osnabrück du 24 octobre 1648 qui prévoit en son article 2 « [q]u'il y ait de part et d'autre un oubli et une amnistie perpétuelle de tout ce qui a été fait depuis le commencement de ces troubles en quelque lieu ou en quelque manière que les hostilités aient été exercées par l'une ou l'autre partie », jusqu'à nos jours, les textes internationaux donnent la possibilité d'appliquer des amnisties, comme c'est le cas avec le Pacte additionnel II à la convention de Genève de 1949.

Quant aux institutions, leur paysage est tout aussi riche. Nous notons des institutions de la Charte de l'ONU et celles relevant des traités qui visent aussi la protection de l'homme. Nous

1 Encore appelé Charte de San Franscico, signée à San Francisco le 26 juin 1945 et entrée en vigueur le 24 octobre 1945

2 Adopté à Paris le 10 décembre 1948

3 Convention européenne de lutte contre l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre, art premier : « Tout Etat contractant s'engage à prendre les mesures nécessaires afin que la prescription soit inapplicable à la poursuite des infractions... »

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sommes également passé des juridictions pénales ad hoc, telles que le Tribunal Militaire de Nuremberg et de Tokyo, le Tribunal pénal international pour Rwanda, le Tribunal pénal international de l'ex Yougoslavie ... à une juridiction permanente appelée Cour pénale internationale4, témoignant de la volonté de la communauté internationale à lutter contre les crimes odieux. Ce passage des tribunaux ad hoc à un tribunal international a permis de rendre universelle la consécration des amnisties et des prescriptions pénales, tout en interdisant leur application pour des crimes à caractère international. En effet, si le Tribunal de Nuremberg et le TPY ont pour principe l'imprescriptibilité des crimes, la pratique de la prescription et des amnisties continuait à exister sous d'autres cieux, d'où l'importance de la mise en place de la CPI.

En dehors des mécanismes internationaux, les Etats sont encouragés à développer une culture de protection des droits de l'homme et de lutte contre l'impunité en insérant dans leur législation des dispositions y afférentes. Mais malgré cette multitude de mécanismes juridiques tant internes qu'internationaux, les Etats arrivent à mettre en place des lois d'amnistie et de prescription pénale afin que certains auteurs des crimes graves soient pardonnés au nom de la paix ou de l'unité nationale. Ce qui aujourd'hui soulève le problème de la pertinence des institutions de clémence dans la protection des droits de l'homme, surtout à l'heure où l'humanité s'engage dans la lutte contre l'impunité.

2- Contexte socio-politique

Le continent africain fait depuis plusieurs années face à une instabilité politique qui crée des tensions au sein des communautés. Ces tensions communautaires engendrent les maux tels que le terrorisme, les soulèvements au sein des populations et le tribalisme. Ce fut le cas au Rwanda en 1994, et plus récemment en Côte d'Ivoire en 2010, au Mali et en République Centrafricaine en 2012, pour ne citer que ces exemples. Pendant ces conflits, on dénombre plusieurs crimes de génocides, des crimes contre l'humanité et des crimes de guerres, conformément aux statuts des juridictions internationales comme la Cour pénale internationale. On note également des actes de viols, de destructions de biens civils et les exécutions sommaires. Ces actes témoignent d'une violation du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'Homme plus précisément.

Les instabilités politiques qui sont pour la plupart des temps dues à la mauvaise gouvernance et à la durée des présidents au pouvoir, ont une répercussion sur la vie sociale dont les

4 Créée le 17 Juillet 1998 et ayant son siège à La Haye (Pays- Bas)

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conséquences sont la pauvreté et le manque d'éducation des jeunes, ce qui favorise la montée des violences et des crimes internationaux. Après la commission de ces crimes, il est toutefois important pour les gouvernants de mettre en place des mesures permettant de remettre la paix et la sécurité, comme les amnisties et les prescriptions pénales.

Afin de rendre cette réflexion faisable, il convient de circonscrire l'objet de notre recherche.

B- DELIMITATION DE L'ETUDE

Pour mieux cerner l'objet de notre étude, il importe d'en planter les bornes spatiales (A), matérielles (B) et temporelles (C).

1- Délimitation spatiale

La protection des droits de l'homme étant une affaire de tous, tant sur le plan interne qu'international, pour les organisations non gouvernementales que pour des organisations gouvernementales, c'est pourquoi la présente étude va s'attarder sur les pratiques d'amnisties et de prescriptions pénales dans l'ensemble des systèmes juridiques internationaux, plus précisément dans les systèmes régionaux qui les reconnaissent le plus, et les pays l'ayant fait recours après de graves crises sécuritaires. C'est le cas des systèmes interaméricain, européen et africain. Et des pays sorti de graves crises comme, la RDC, de la Siéra Leone, du Mali, de la Centrafrique, de la Cote d'Ivoire et de l'Afrique du Sud. Ce choix se justifie par le fait que les questions d'amnistie et de prescription pénale pour de graves violations de droits de l'homme ont été largement touchées la communauté internationale et ont eu des répercussions sur la sensibilité de tous.

2- Délimitation temporelle

S'agissant de la délimitation temporelle, ce travail de recherche couvrira la période allant de 1945 à 2020. Dans cet intervalle de temps, l'on a noté une réelle volonté de l'humanité à sanctionner les crimes graves. 1945 représente l'année où ont été mis en place les tribunaux de Nuremberg et de Tokyo pour juger les crimes commis pendant la seconde guerre mondiale. Il est important de préciser que c'est durant cette guerre mondiale que les premiers crimes internationaux ont été perpétrés de façon considérable. Après ces tribunaux, plusieurs tribunaux pénaux spéciaux (notamment le tribunal pénal international pour l'ex Yougoslavie ; le tribunal pénal international pour le Rwanda) ont été mis en place afin de sanctionner les exactions graves commises dans ces pays. Depuis 1998, l'on a créé une Cour pénale internationale, une juridiction pénale permanente dont l'acte constitutif est entré en vigueur en 2002, qui se charge

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de juger les crimes graves commis de nos jours. Pas plus tard que le 7 Février 2013, un tribunal spécial a été mis en place au Sénégal pour juger l'ancien président Tchadien, Issen HABRE. Quant à l'année 2020, celle-ci marque tout simplement la fin de nos recherches.

3- Délimitation matérielle

Pour mieux mener notre étude portant sur les « Amnisties et les prescriptions pénales en droit international des droits de l'homme », il est nécessaire de convoquer les matières comme : le droit civil, le droit processuel, le droit international des droits de l'homme, le droit international pénal , le droit international humanitaire et, la sociologie juridique.

* Le droit civil qui traite des droits dans une grande partie des droits de la personne nous sera très important dans cette étude car, il nous permettra d'aborder de manière générale les droits des victimes et plus particulièrement la réparation devant le juge civil.

* Par ailleurs, le droit international des droits de l'homme qui, « est une branche du droit international public qui garantit la protection des droits de l'homme au moyen d'instruments internationaux invocables devant le juge interne et devant les instances internationales »5, promeut et protège par ses multiples conventions, les droits de l'homme. C'est ainsi qu'il sera invoquées. En effet, ces conventions internationales de protection permettront de définir l'encadrement juridique des amnisties et prescriptions pénales tant au niveau international qu'africain.

* Aussi, le droit international pénal dont le but est de règlementer la responsabilité de chaque individu auteur d'un enfreint des normes ou d'une violation grave des droits de l'homme ayant un caractère international, nous a permis de distinguer à travers la qualification, les crimes graves des autres crimes. Il nous a également permis de situer les juridictions compétentes de connaitre les questions de crimes internationaux.

*En outre, nous ferons appel au droit international humanitaire qui se définit comme un ensemble de règles humanitaires d'origine conventionnelles ou coutumières qui pour des raisons humanitaires cherchent à limiter les effets des conflits armés. Il protège les personnes qui ne participent pas ou plus au combat et restreint les moyens et méthode de guerre. Cette matière est fondamentale pour nous car, elle met un accent particulier sur les victimes des violations des droits de l'homme pendant les conflits.

5 Définition extrait du cours de droit international des droits de l'homme du Master droits de l'homme et action humanitaire

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* Enfin, nous nous ferons appel à la sociologie juridique qui, nous permettra de mesurer les impacts des amnisties et des prescriptions pénales sur les victimes.

Après avoir délimité le sujet, il apparait avec évidence que les disciplines évoquées plus haut prennent en compte les notions d'amnistie et de prescription pénale lorsqu'il s'agit de la protection des droits de l'homme. Puisque, la première encadre les amnisties et les prescriptions pénales, alors que les deux autres sanctionnent et protègent les auteurs et victimes des crimes.

Pour une bonne compréhension du sujet, il est nécessaire de définir les concepts qui le constituent.

C- DEFINITION DES CONCEPTS

La bonne compréhension de notre sujet passe obligatoirement par la définition des concepts. Définir revient à formuler un discours qui donne la signification d'un mot, un concept ou une expression. Il est donc important de définir les concepts pour savoir de quoi on parle. C'est dans ce sens qu'Emile DURKHEIM va dire que « le savant doit d'abord définir ce dont il parle afin que l'on sache et qu'il sache de quoi il parle »6. Aussi, sera-t-il question de donner un sens aux concepts «amnisties » et « prescriptions pénales».

1- Amnisties

L'expression « amnisties » tire son origine du mot grecque « amnesta » qui signifie « oubli »7. Utilisée en droit pénal, l'amnistie est généralement définie comme une mesure exceptionnelle prise dans le cadre d'une loi, dans le but d'annuler les poursuites ou les peines prononcées.

Cette mesure est définie en droit camerounais par l'article 73 (1) du Code pénal, comme une mesure qui « efface la condamnation et met fin à toute peine principale et accessoire et a toute mesure de sureté, à l'exception de l'internement dans une maison de santé et de la fermeture de l'établissement »8.

Pietro VERRI, en définissant l'amnistie met l'accent sur les conflits armés et pense que c'est une « mesure de clémence que les autorités au pouvoir sont invitées, par le droit des conflits armés, à accorder de la manière la plus large possible, à la cessation des hostilités d'un conflit

6 E.DURKHEIM, « Règles de la méthode sociologique », Paris, PUF, 1894

7 A.O'SHEA, «amnesty for crime in international law and practice», The Hague ,London : Kluwer Law International, P.5,2002;

8 Loi n2016/007 du 12 Juillet 2016, portant code pénal du Cameroun.

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armé non international aux personnes qui auront pris part au conflit ou qui auront été détenues ou internées pour des motifs en relation avec le conflit armé. »9.

Emprunté au droit pénal, l'amnistie n'a pas une définition juridique au niveau international. Toutefois, il importe d'affirmer que cet ordre juridique, en parlant de l'amnistie, ajoute quelques éléments. « Mais elle désigne généralement un acte officiel relevant du pouvoir législatif ou exécutif qui empêche, pour l'avenir ou de manière rétroactive, d'enquêter sur une personne, un groupe ou une catégorie de personnes pour certaines infractions ou d'engager des poursuites pénales contre elles, et qui annule toutes les sanctions prises à leur encontre »10. Des définitions qui précèdent, il convient de dire que les amnisties sont des mesures qui mettent fin à des poursuites pénales et, qui annulent également les condamnations déjà prononcées, sans effet rétroactif. Qu'en est-il des prescriptions pénales ?

2- Prescriptions pénales

Comme les amnisties, la notion de prescriptions pénales tire également son fondement du droit pénal, dans la mesure où avant son apparition au niveau international ce concept était déjà appliqué par des législations nationales. En effet, du Latin « Preaescriptio », la prescription est un moyen d'extinction d'un droit ou des possibilités de poursuite qui ne sont plus recevable, à cause de l'expiration d'un temps11 bien précis.

Quant à la prescription pénale, elle est définie par M. DELMAS-MARTY comme « le mode d'extinction de l'action en justice et/ou de l'exécution d'une condamnation pénale à la suite de l'écoulement d'un certain délai fixé par la loi », il « est perçue, avant tout, comme une mesure d'intérêt social - dans un souci d'apaisement de la société et de garantie de la

9 P. VERRI, « dictionnaire du droit international des conflits armés », Genève, CICR Comité Internationale de la Croix -Rouge, 2009.

10 Voir CICR, Commentaire des Protocoles additionnels du 8 juin 1977 aux Conventions de Genève du 12 août 1949, 1987, par. 4617 ; Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l'homme, Les instruments de l'État de droit dans les sociétés sortant d'un conflit - Amnisties, 2009 ; Anne-Marie La Rosa et Carolin Wuerzner, « Groupes armés, sanctions et mise en oeuvre du droit international humanitaire », Revue internationale de la Croix-Rouge, vol. 90, Sélection française 2008, p. 179-194 ; Laura M. Olson, « Réveiller le dragon qui dort ? Question de justice transitionnelle : répression pénale ou amnistie ? », Revue internationale de la Croix-Rouge, vol. 88, Sélection française 2006, p. 125-146 ; Simon M. Meisenberg, « Legality of amnesties in international humanitarian law: The Lomé Amnesty Decision of the Special Court for Sierra Leone » (Légalité des amnisties en droit international humanitaire. La décision du Tribunal spécial pour la Sierra Leone sur les amnisties de Lomé), International Review of the Red Cross, vol. 86, n° 856, décembre 2004, p. 837-851 ; et Yasmin Naqvi, « Amnesty for war crimes: Defining the limits of international recognition » (Amnistie des crimes de guerre : définir les limites de la reconnaissance internationale), International Review of the Red Cross, vol. 85, n° 851, septembre 2003, p. 583-625.

11 www.Toupictionnaire.com

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sécurité juridique12 - et non comme un droit individuel »13. « Après l'écoulement d'un certain temps, l'action ou l'exécution de la peine cesserait d'être utile »14.

La loi pénale camerounaise de 2016, traitant des prescriptions pénales, en son article 67 indique que « La peine principale non subit, ainsi que les peines accessoires et les mesures de sureté qui l'accompagnent, ne peuvent plus être exécutées après l'expiration des délais (...) déterminés à compter du jugement ou de l'arrêt définitif ». Ceci indique que passé les délais prévus par la loi, l'action publique doit prendre fin.

Au regard de ce qui précède, nous pouvons dire que les amnisties et les prescriptions pénales sont deux institutions de droit pénal utilisé par le droit international des droits de l'homme pour protéger les individus auteurs de graves crimes, dans le but d'apporter une paix, sans compromettre les droits des victimes.

D- INTERET DE L'ETUDE

A propos de l'intérêt du sujet, François Depeltaeu écrivait : « Le choix d'un sujet est un acte purement objectif. Il va de soi que ce choix se fasse en fonction de l'expérience passée et de la personnalité du chercheur »15. Ainsi, notre sujet peut être perçu sous un double intérêt. D'abord scientifique (A), ensuite sociale (B).

12 Voir, par ex., M. DELMAS-MARTY, Le flou du droit, collection « Les voies du droit », Paris, PUF,

1986 (nouv. édition en 2004, collection « Quadrige »), p. 81. Selon l'auteur, « le temps qui passe dénoue parfois querelles et conflits, apaise les tracas, les tensions, la souffrance même, d'un moment.

Oubli de la colère et du ressentiment, il peut être aussi oubli des preuves - usure du temps sur la mémoire des témoins, la qualité des écrits et "pièces à conviction" diverses. La sagesse du droit est de le reconnaître par tout un jeu de règles techniques. Le temps qui passe efface parfois le droit qui se dessaisit lui-même lorsque le temps passé a entraîné l'oubli (...) ».

13 Voir, à titre d'exemple, les jurisprudences belges (Conseil d' Etat belge, avis D.P., chambre 1963- 1964, n°861/1, p.2, cité par P. de MERTENS, L'imprescriptibilité des crimes de guerre et contre l'humanité : étude de droit international et de droit pénal comparé, Bruxelles, Ed. De l'Université de Bruxelles, 1974, p. 39 : « la prescription n'est pas une faveur que la loi accorde aux condamnés mais une mesure d'intérêt social qui n'ouvre pas de droits acquis »), française (Cour de Cassation française, Chambre crim., 26 janvier 1984, arrêt Barbie, Bull. Crim., 34 : « le droit à l'acquisition de la prescription ne saurait constituer un droit de l'homme ou une liberté fondamentale ») ou portugaise (Tribunal constitutionnel portugais, 2ème Section, arrêt 483/2002, procès n°565/2001, selon lequel la prescription n'est pas un droit subjectif, Cf. http://w3b.tribunalconstitucional).

14 Hélène Ruiz Fabri, Gabriele Della Morte, Elisabeth Lambert Abdelgawad, Kathia Martin-

Chenut, in « INSTITUTIONS DE CLÉMENCE (AMNISTIE, GRÂCE, PRESCRIPTION) EN DROIT INTERNATIONAL ET DROIT CONSTITUTIONNEL COMPARÉ ». Archives de politiques criminelles ; P.149

15 François DEPELTEAU, La démarche d'une recherche en sciences humaines. De la question de départ à la communication des résultats, Méthodes en sciences humaines, Québec, Les Presses de l'Université Laval, 2000 p.100

1- 16

Intérêt scientifique

Notre étude intervient au moment où plusieurs travaux et réflexions ont été produits sur les questions d'amnistie et de prescription pénales en DI, et plus particulièrement en DIDH dans le contexte africain. Des auteurs comme Javier CIURLIZZA16, Javier CIURLIZZA17 et bien d'autres ont démontré dans leurs travaux un réel intérêt en ce qui concerne les avantages et les inconvénients des mesures de clémence que sont l'amnistie et la prescription pénale pour les crimes internationaux. La valeur ajoutée de notre étude consiste à apporter une contribution dans le débat scientifique sur l'influence des mesures de clémence en DIDH. Il s'agit de voir dans quelle mesure les mesures de clémences apportent un changement après un conflit armé dans les pays africains. Sur le plan scientifique, cette étude se situe dans le cadre des dispositions internationales relatives au DIH et au DIP. Il permet de montrer l'encadrement conventionnel et jurisprudentiel de l'amnistie et de la prescription pénale des crimes. Le droit africain qui a très souvent évoqués séparément ces deux concepts, notre étude a envisagée de les joindre afin de mener une réflexion d'ensemble et nourrir la compréhension scientifique sur ces éléments.

La particularité de notre étude réside dans le fait qu'elle développe de manière jointe les questions d'amnistie et de prescription pénale dans le contexte purement africain. Un autre aspect de notre intérêt scientifique est que notre travail a permis d'offrir aux chercheurs une liste des pays africains ou les mesures de clémences ont eu une influence considérable après des conflits, conflit qui quelquefois a engendré des débats au sein des populations. Enfin, notre étude a permis de montrer les textes sur lesquels les différents pays s'appuient pour mettre en place ces mesures. Elle pourra également servir à des fins de recherche. Mais aussi, elle servira comme un support d'application pour les instances publiques, organismes nationaux et internationaux de défense des droits de l'homme.

Qu'en est-il de l'intérêt social ?

2- Intérêt social

L'intérêt social de notre étude est manifeste dans la mesure où l'application des mesures d'amnistie et de prescription pénale est bénéfique pour la population. En effet, l'amnistie et la prescription pénale sont à la base deux mesures sociales dont le but est de restaurer la paix.

16 J. CIURLIZZA, « Pérou : la défaite juridique de l'amnistie et l'agenda politique en suspens », Mouvements 2008/1 (n° 53).

17 Javier CIURLIZZA Amnistie des crimes de guerre : définir les limites de la reconnaissance internationale, Revue internationale de la Croix-Rouge.

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Chère à la cohésion nationale, la paix est un élément qui favorise le développement de la société et des individus. La population visée dans ces institutions de clémences sont d'abord celles qui ont participé directement aux conflits afin de les apaiser, il est donc important de considérer les présumer auteur et les victimes des différentes violations. Pour atteindre cette fin qui est la paix, il faut que les populations qui, sont un élément fondamental dans l'application des mesures de clémence, adhèrent au projet, par le biais de leurs représentants. Cette contribution permet aussi de faire prendre connaissance de l'existence d'une multitude de conventions internationales et surtout régionales relatif aux conditions d'application des institutions de clémence à la sortie d'un conflit armé ayant occasionné de graves crimes internationaux.

Aussi, cette étude a un intérêt économique puisque, indissociable à la paix, le développement de l'économie est la conséquence d'une stabilité sociale et d'une paix durable. Enfin, cette étude constitue notre contribution à la promotion des Droits de l'homme et plus particulièrement de leur protection à travers le DIDH en Afrique.

E- REVUE DE LITTERATURE

Elaborer la problématique des amnisties et des prescriptions pénales en droit international des droits de l'homme nécessite de faire un état des lieux. En effet, ces questions ont suscité la réaction de plusieurs chercheurs. Ainsi, afin de cerner les contours du thème abordé dans ce travail, nous avons consulté certains auteurs dont les points de vue nous ont été d'un grand apport, parlant des amnisties d'une part, et des prescriptions pénales en droit international des droits de l'homme de l'autre.

Entre la seconde guerre mondiale et 2008, il a été enregistré environ 420 processus d'amnistie dans le monde, selon Mallinder L. Toutefois, cette question fait toujours débat entre les défenseurs des droits de l'homme, les spécialistes de résolution des conflits, de la justice transitionnelle. Le fondement du débat résulte du fait de la finalité des amnisties pour les crimes internationaux et de leur impact.

Partant, il est important de souligner que de nombreux auteurs se sont penché sur la reconnaissance par le droit international des droits de l'homme des biens faits, de la bonne pratique des amnisties (objet de notre analyse), au vu de ses conséquences. C'est le cas de Yasmin NAQVI18 qui justifie l'amnistie et pense qu'il est bien vrai que les auteurs des crimes ne doivent pas restés impunis. Cependant, il n'en demeure pas moins que certains qu'il qualifie

18 Amnistie des crimes de guerre : définir les limites de la reconnaissance internationale, Revue internationale de la Croix-Rouge, 30-09-2003.

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de « moins responsables » pourraient bénéficier de l'amnistie. En effet il estime que l'amnistie trouve tout son sens lorsque celle-ci vise à faciliter l'instauration d'une paix durable, stimule le processus de réconciliation et évite de nouvelles violences. La particularité de cet article par rapport à notre travail est qu'il montre de manière concrète l'importance pour le droit international, d'accepter la pratique des amnisties. Ainsi, cet article nous permettra de bien comprendre les biens faits qui résultent de la mise en place des amnisties après un conflit occasionnant des crimes.

Au-delà de cet article, il est important de se référer à l'ouvrage de William BOLE : intitulé « pardon en politique internationale : un autre chemin vers la paix »19. Dans cet ouvrage, l'auteur propose à travers un exemple concret qui est celui de l'Afrique du Sud, une conception du pardon qui permette d'en faire un puissant instrument au service de la résolution des conflits et de la paix. L'apport de cet ouvrage dans notre thématique est l'appréhension des impacts que peuvent apporter l'amnistie sur la société, au sortir d'une crise, notamment les sociétés africaines qui font l'objet de notre étude. Cependant, plusieurs auteurs dénoncent le fait que l'amnistie soit un instrument de recherche de paix reconnu par le droit international car comme le pense Warren BUFORD et Hugo VAN DER MERWE, « si nous ne parvenons pas à affronter ce qui est arrivé, c'est un peu comme si nous affirmions que ces gens-là ne comptent pas »20. A travers cette pensée, ces auteurs nous font comprendre qu'aborder la question de l'amnistie et le droit international revient également à réparer les injustices causés lors des conflits. Or, la pratique d'amnistie ne prend pas en considération les droits des victimes et permet l'impunité. Cette posture contradictoire est bénéfique dans notre thématique dans la mesure où la pensée des auteurs met un accent sur la réparation au plan internationale, et donc une reconnaissance des droits des victimes, mais aussi la responsabilité pénale internationale de chaque individu.

En ce qui concerne les prescriptions pénales, elles sont vues par certains auteurs comme une mesure de justice sociale. Ainsi comme le pense M. B. Bouloc, dans le manuel de

M. Stefani, Levasseur et Bouloc « du point de vu de la justice pure, la prescription de l'action publique se justifie parfaitement »21. La prescription est pour ces auteurs une mesure sociale introduite pour les intérêts de la société. Cette pensée est importante pour notre thématique car,

19 W. BOLE, « pardon en politique internationale : un autre chemin vers la paix », Paris : Nouveaux Horizons, 2007.

20 W. BUFORD et H. VAN DER MERWE, « Les réparations en Afrique australe », Cahiers d'études africaines 2004/1 (n° 173-174), p. 263-322.

21 Les auteurs citent : Garraud, Vidal et Magnol, Donnedieu de Vabres, Bouzat et Pinatel, Stefani, Levasseur et Bouloc, Pradel, Varinard, et notent qu'elle est approuvée par Mme Rassat.

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elle nous permet de mieux comprendre l'acceptation de la prescription pénale au niveau national, avant de se projeter au niveau international ou il est proscrit par des conventions internationales.

Au regard de ce qui précède, il sied de dire que les pensées des différents auteurs vont nous guider dans la rédaction de ce travail. Elles nous permettront de montrer que l'amnistie est une mesure acceptée par le droit internationale des droits de l'homme, avec un certain nombre de conditions. Aussi, nous comprenons à travers ces auteurs, l'importance des amnisties au vue de l'impact qu'elles ont dans des sociétés sorties de crises. Enfin, les prescriptions pénales, quoi qu'étant des mesures prohibé par le droit international, trouvent leur place en droit interne vue leur intérêt.

Toutefois, il sied de reconnaitre que nos recherches se démarquent des précédents travaux dans la mesure où elles nous ont permis de faire une synthèse de conséquences relatives à l'application des amnisties et des prescriptions pénales sur le continent africain.

F- PROBLEMATIQUE

Une problématique est une perspective théorique que l'on décide d'adopter pour traiter le problème posé par la question de départ. Les amnisties et les prescriptions pénales qui sont deux mesures interdites d'application par certains textes internationaux du fait que ce sont des mesures d'impunité qui violent les droits des victimes et, par la même occasion violent les principes du droit international pénal mais aussi du droit international humanitaire, mais aussi le droit international pénal à travers le principe de responsabilité des individus en cas d'infraction. Toutefois, il est important d'affirmer que les amnisties et les prescriptions pénales n'ont pas seulement un côté négatif car ils ont aussi une influence positive dans la mesure où ce sont deux institutions qui favorisent la mise en place d'une paix durable, d'une réconciliation nationale. Ainsi, nous pouvons nous poser la question de savoir : la pratique des amnisties et de prescriptions pénales met-elle en péril les droits des victimes ? Quel est l'impact des amnisties et des prescriptions pénales sur l'ensemble de la societé?

G- HYPOTHESE

Relativement à la problématique sus évoquée, nous émettons l'hypothèse selon laquelle l'application des amnisties et des prescriptions pénales est à l'encontre des règles mises en place par le droit international puisque, violant les droits des victimes et le principe de la responsabilité des individus.

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II- CADRE METHODOLOGIQUE

Etant donné que tout travail scientifique désireux d'être d'une bonne facture ne peut réussir que grâce à l'utilisation d'une ou des méthodes bien déterminées. La méthode demeure ainsi une procédure inhérente à toute démarche scientifique.

A- La méthode juridique

Selon Jean-Louis BERGEL, elle consiste à analyser les textes juridiques et de dégager leur interprétation22. Pour Charles EISMENMANN, cette méthode a deux composantes : la dogmatique qui consiste à analyser les textes et les conditions de leur édiction,23et la casuistique. Cette approche a facilité la compréhension des principaux textes étudiés tels que la Charte des Nations Unies, les deux pactes relatifs aux droits de l'homme et leurs protocoles, les Conventions sur l'imprescriptibilité des crimes, la Convention européenne des droits de l'homme, la Convention interaméricaine des droits de l'homme, la Charte africaine des droits de l'homme, et les décisions des différentes juridictions internationales ou régionales.

En plus de la dogmatique, il y a l'interprétation casuistique24 qui a permis de confronter les différentes lois d'amnisties des pays africains ayant connu des conflits.

B- La méthode sociologique

Cette approche consistera à appréhender les faits qui doivent être considérés, au-delà des textes, comme des indices permettant de voir le degré et comment les institutions de clémence impactent le droit international des droits de l'homme dans le contexte. Cette méthode nous permet aussi de vérifier la position du droit international des droits de l'homme vis-à-vis de l'amnistie et de la prescription pénale concernant les crimes les plus graves.

C- Les techniques de recherche

L'analyse documentaire a consisté à la recherche et analyse des différents travaux réalisés sur les questions d'amnistie et de prescription pénale. A cet effet, nous ne nous somme pas simplement limité aux conventions qui parlent de ces questions, mais nous nous sommes étendues sur tous les autres travaux disponible à notre portée, tel est le cas des décisions des juridictions pénales internationales et régionales, qui nous ont permis de mieux aborder ce

22 Cf. BERGEL, Jean-Louis, « Méthodes du droit : Théorie générale du droit », 2ème édition, Paris : Dalloz, 1989, p.7.

23 Cf., EISENMANN Charles, « Cours de droit administratif », cité par NACH MBACK Charles, Démocratisation et décentralisation, « genèse et dynamiques comparées des processus de décentralisation en Afrique subsaharienne », Paris, Karthala - PDM, 2003, p.45

24 Ibid.

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thème, de mieux comprendre la problématique liée à l'amnistie et à la prescription pénale en droit international des droits de l'homme. Cette recherche documentaire s'est principalement fait dans les bibliothèques et sur internet, notamment dans les sites de la CPI, de l'ONU et de plusieurs autres institutions.

D- ARTICULATION ET JUSTIFICATION DU PLAN

Les comportements criminels sont dans toutes sociétés condamné mais aussi séparés selon la gravité des faits. C'est ainsi qu'en droit international des Droits de l'Homme, il est important de distinguer les violations simples des droits de l'homme des violations graves touchant la sensibilité de la société internationale. Dans la perspective de développer une culture de paix et de justice, il importe d'analyser les fondements et l'impact juridique des amnisties et des prescriptions pénales (Première partie), avant de montrer les mécanismes de protection des droits des victimes après la mise en oeuvre des amnisties et des prescriptions pénales (Deuxième partie).

PREMIERE PARTIE : FONDEMENTS ET IMPACTS

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JURIDIQUES DES AMNISTIES ET DES PRESCRIPTIONS

PENALES EN DROIT INTERNATIONAL DES DROITS DE

L'HOMME

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Comme l'indique fort justement Gabriele Della Morte, l'arrière-plan fondamental de l'étude des institutions de clémence est le rapport entre droits de l'homme et souveraineté de l'Etat. Le constat vaut autant sous l'angle du droit international que sous celui du droit interne, parce que, dans les deux ordres, le développement des droits de l'homme vient accroître ou asseoir la soumission de l'Etat au droit25.

Plusieurs éléments de réflexion sont autour de ces institutions de clémence. C'est alors qu'ils sont associés à certains mots comme le temps, le droit, l'oubli, la mémoire, la justice et réconciliation. Ces éléments sont pour les juristes, attachés aux institutions de clémence pour qui sans eux ces derniers n'auront aucune raison d'exister. Cependant, évoluant dans un contexte juridique complexe, caractérisé par plusieurs textes, il est difficile de cerner concrètement ces institutions qui sont tantôt reconnu, parfois rejeté tant en droit interne qu'en droit international. Ainsi, Dans le but d'apaiser les tensions sociales et de permettre à tous les individus de bénéficier de nouvelles opportunités de vivre en communauté malgré la commission de certaines infractions, il a été mis en place les mesures d'amnisties et de prescriptions pénales dont les fondements (CHAPITRE 1) et les impacts juridiques (CHAPITRE 2) sont reconnu en Droit international des droits de l'homme.

25 Gabriele DELLA MORTE, Docteur en droit en co-tutelle avec l'Université de Paris 1, Assegnista di ricerca' à l'Université la Cattolica de Milan.

CHAPITRE 1 : FONDEMENTS JURIDIQUES DES AMNISTIES ET DES

PRESCRIPTIONS PENALES

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Aborder les fondements juridiques des amnisties et des prescriptions pénales nous demande de parler en premier lieux des fondements et de la manifestation des amnisties et des prescriptions pénales (Section 1), avant de parler de la reconnaissance internationale de ces deux institutions de clémence qui malgré leur acceptation, sont en bute à plusieurs difficultés d'application (Section 2).

SECTION I : Les fondements et la manifestation des amnisties et des prescriptions pénales

Les fondements (Paragraphe 1) et la manifestation (Paragraphe 2) des amnisties et es prescriptions pénales sont des éléments sur lesquels les Etats se basent pour mettre en oeuvre ces institutions qui, ne font pas dans certaines mesures l'unanimité au sein des populations fraichement sortis d'un conflit.

Paragraphe I : les fondements des amnisties et des prescriptions pénales

Les fondements des amnisties (A) et celles des prescriptions pénales (B) nous permettrons de mieux comprendre la question en droit pénal interne avant sa réappropriation par le droit international.

A- Les fondements des amnisties

L'amnistie constitue un moyen utilisé pour amorcer le rétablissement de l'ordre social dans les pays qui traversent des crises militaro-politiques, et son application soulève jusqu'à nos jours des débats, sur la question de son rapport avec la justice, alors même qu'elle est considérée comme une institution d'impunité26. Par ailleurs, ce but visé par les amnisties ne peut être atteint que lorsque ceux-ci ont pour fondement, la réconciliation sociale et les textes fondamentaux que sont la Constitution et les Conventions internationales des DH.

En effet, défini comme le moyen permettant de mettre en accord des personnes opposées sur certains points de vu, la réconciliation prend un aspect général lorsqu'il faut parler en terme de réconciliation nationale car, dans cette perspective elle aide les sociétés traumatisées par la

26 Fleury Fulgence BANALE, AMNISTIE ET DROITS DES VICTIMES EN REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE, L'Harmattan, 2019.

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violence à faire face à leur passé27 de façon critique, afin de sortir de leurs crises profondes et d'éviter que de tels faits se reproduisent dans un proche avenir. C'est dans ce registre que les lois d'amnisties tirent leur fondement.

Après un conflit armé qui a occasionné des violations des droits de l'homme, il est nécessaire pour tout Etat, pour accéder à une réconciliation nationale durable, d'exposer le passé et ne pas hésiter de déterminer la responsabilité de chacun dans les différentes violations qui ont conduit le pays dans le chaos. D'où le besoin de la recherche de la vérité. La réconciliation est donc le socle sur lequel se base l'amnistie, mais aussi les autres fondements des amnisties.

Par ailleurs, si le terme Amnistie28 est parfois utiliser par des Constitutions pour marquer son fondement, l'expression « remise générale de peine et interruption générale ou partielle de procédures pénales pendantes » l'est davantage29. Plusieurs Constitutions européennes soulignent les compétences du législateur en matière des amnisties et, posent les conditions et les modes d'intervention. Ceci s'explique par le fait que caractère délictueux des faits leur avait été conféré par la loi30, il est logique d'admettre que l'amnistie ne peut être décidée que par le législateur31. C'est ce que prévoit l'article 34 alinéa 5 de la Constitution française. L'article 73 alinéa 3 de la Constitution roumaine prévoit que l'amnistie, au même titre que la grâce collective, est accordée par la loi organique. Le législateur organique dispose d'un pouvoir discrétionnaire sous réserve du respect du principe d'égalité. Le fondement constitutionnel des amnisties permet donc de mettre en place les organes compétents à la mise en exercice des amnisties, mais aussi de tracer les limites de leurs compétences.

Pour ce qui est enfin des fondements conventionnels relatifs aux DH, Il existe un nombre significatif d'accords conclus dans le cadre d'un processus de paix mais qui s'articulent selon des lignes directrices diversifiées32. Par exemple, à côté des accords qui admettent classiquement l'amnistie en l'excluant seulement pour certains cas/crimes (selon un paradigme

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28 Article 49 de la Constitution du Mecklembourg Poméranie : « Une amnistie exige une loi ».

29 Article 52 de la Constitution du Bade-Wurtemberg : « Une remise générale de peine et d'interruption générale de procédures pénales ne peuvent être prononcées que par la loi ».

30 Tel est le sens du principe de la légalité des délits et des peines.

31 Dans la décision 98-408 DC du 22 janvier 1999, le Conseil constitutionnel y a même vu une « compétence relevant des conditions essentielles d'exercice de la souveraineté nationale ».

32 Une base de documentation est fournie par la Peace Agreements Digital Collection de la bibliothèque du United States Institute for Peace, au site www.usip.org/library/pa.html, visité le 10 octobre 2020.

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du type règle/exception33), il en existe qui se concentrent plutôt sur des appels, souvent généralistes, à la nécessité d'éradiquer la culture de l'impunité34. En ce qui concerne les dispositions non pas régionales mais à caractère générale, on peut parler de l'article 6.5 du Protocole Additionnel II aux conventions de Genève comme fondement des amnisties : « A la cessation des hostilités, les autorités au pouvoir s'efforceront d'accorder la plus large amnistie possible aux personnes qui auront pris part au conflit armé ou qui auront été privées de liberté pour des motifs en relation avec le conflit armé, qu'elles soient internées ou détenues ». Un article sur lequel se fonde l'accord de Lomé du 7 juillet 1999 sur le Peace agreement between the Government of Sierra Leone and Revolutionary United Front of Sierra Leone.

B- Les fondements des prescriptions pénales

La doctrine pénale française a dégagée plusieurs fondements à la prescription des peines qui, sont pour la plus part des fondements liés à l'étape de la poursuite des présumés auteurs

33 Dans ce cadre, il n'est pas toujours évident de distinguer la règle de l'exception. Pour en donner deux exemples, v. l'Accord de Linas-Marcoussis du 24 janvier 2003 (concernant la Côte d'Ivoire), d'une part, et l'Annexe `A' de l'Accord de cessez-le-feu de la République démocratique du Congo du 10 juillet 1999, de l'autre.

En ce qui concerne l'Accord de Linas-Marcoussis, l'article 3.i prévoit que : « Le gouvernement de réconciliation nationale prendra les mesures nécessaires pour la libération et l'amnistie de tous les militaires détenus pour atteinte à la sûreté de l'Etat et fera bénéficier de la même mesure les soldats exilés. ». Alors que le chapitre VI de l'Annexe, dédié au Programme du Gouvernement de réconciliation, établie que (§ 3) : « Sur le rapport de la Commission internationale d'enquête, le gouvernement de réconciliation nationale déterminera ce qui doit être porté devant la justice pour faire cesser l'impunité.

Condamnant particulièrement les actions des escadrons de la mort et de leurs commanditaires ainsi que les auteurs d'exécutions sommaires sur l'ensemble du territoire, la Table Ronde estime que les auteurs et complices de ces activités devront être traduits devant la justice pénale internationale ».

Quant à l'Annexe `A' de l'Accord de cessez-le-feu de la République démocratique du Congo du 10 juillet 1999, le Chapitre 9 consacré au désarmement des groupes armés prévoit, au § 1, que: «The Joint Military Commission with the assistance of the UN/OAU shall work out mechanisms for the tracking, disarming, cantoning and documenting of all armed groups in the DRC [...] (a). handing over to the UN International Tribunal and national courts, mass killers and perpetrators of crimes against humanity; and (b) handling of other war criminals». Alors que le § 2 établit que : «The Parties together with the UN and other countries with security concerns, shall create conditions conducive to the attainment of the objective set out in 9.1 above, which conditions may include the granting of amnesty and political asylum, except for genocidaires. The Parties shall also encourage inter-community dialogue».

34 C'est par exemple le cas de l'Arusha Peace and Reconciliation Agreement for Burundi du 28 Août 2000. L'article 6 du Protocol I on the Principles and measures relating to genocide, war crimes and other crimes against humanity, inclut, parmi les Political principles and measures : «(1) Combating the impunity of crimes ; (2) Prevention, suppression and eradication of acts of genocide, war crimes and other crimes against humanity, as well as violations of human rights, including those which are gender-based; (3) Implementation of a vast awareness and educational programme for national peace, unity and reconciliation; (4) Establishment of a national observatory for the prevention and eradication of genocide, war crimes and other crimes against humanity; (5) Promotion of regional cooperation to establish a regional observatory for the prevention and eradication of genocide, war crimes and other crimes against humanity. (6) Promotion of a national inter-ethnic resistance front to combat genocide, war crimes and other crimes against humanity, as well as generalization and collective attribution of guilt. (7) Erection of a national monument in memory of all victims of genocide, war crimes and other crimes against humanity, bearing the words "NEVER AGAIN"; (8) Institution of a national day of remembrance for victims of genocide, war crimes and other crimes against humanity, and taking of measures that would facilitate the identification of mass graves and ensure a dignified burial for the victims».

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des infractions. Deux fondements gouvernent ainsi la prescription des poursuites pénales, à savoir le fondement moral (1) et le fondement social (2).

1- Le fondement moral

Les fondements moraux des prescriptions pénales peuvent être considérés comme les plus anciens. Pour ce courant, le temps accorde un pardon moral aux auteurs des infractions qu'il faudrait oublier et ne pas prononcer les sanctions. Cette conception est considérée par J. PRADEL comme du « romantisme juridique »35 montrant que l'auteur d'une infraction serait déjà condamné par son angoisse à l'idée de penser que son acte lui vaudra une sanction. Ainsi, en attendant une punition légale, le fautif est déjà sanctionné, ce qui serait inutile de la sanctionner une nouvelle fois.

Cette théorie peut se justifier par plusieurs éléments. D'abord, le fait de commettre une infraction pousserait le fautif à se mettre en marge de la société, donc de vivre une vie solitaire afin d'échapper à la sanction légale et par conséquent ne plus commettre d'infraction. Ensuite, toujours dans la logique de la crainte d'être sanctionné, un remord va se créer sur l'individu et, le délai de prescription pénal serait un autre moyen de « sanction pénale indirecte »36. Aussi, la période d'angoisse subit par le délinquant lui permettrait de retenir une leçon sur le respect de la vie sociale, ce qui le pousserait à se remettre sur le droit chemin. De ces arguments, il ressort que la prescription pénale est une arme efficace qui permettrait au droit pénal de résoudre les difficultés liées à l'application des peines. Ce qui réjouit certains criminologues et pénalistes qui se sont plutôt rangé de ce côté37.

Le pardon moral qui gouverne cette conception voudrait donc que la loi fixe un délai de prescription de la peine, adapté à chaque infraction selon sa gravité.

Ces fondements sont toutefois remis en cause et critiqués par d'autres auteurs qui pensent que la prescription pénale est un frein pour le droit pénal et la société en général. En effet, des auteurs comme Garraud ou Prins, rejettent cette conception et demandent « comment le simple écoulement du temps pourrait parvenir à l'amendement du délinquant alors que la peine ne peut

35 J.PRADEL, Procédure Pénale, Cujas, 15ème ed., 2010, N°236, p.184 mais aussi R.MERLE et A.VITU, op. cit., N°50, p.66.

36 M-L.RASSAT, Procédure Pénale, PUF, 2ème ed., 1995, p.469

37 Voir A.MIHMAN, op. cit., N°257, p.289

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pas toujours atteindre ce but »38. Le droit pénal moderne, à travers sa doctrine, rejette également cette conception qu'elle qualifie de trop idéaliste du temps qui passe39.

Face à la réalité d'aujourd'hui, nous pouvons comprendre dans quelle mesure cette conception, bien que moralement satisfaisante, ne peut être mis en place. Déjà, l'idée de penser que la prescription pénale peut être un rédempteur pour le délinquant, nous emmène à parler après d'un repentir actif ce qui n'est pas équivoque quel que soit l'époque. En effet, pour pouvoir se repentir d'un fait infractionnel il faut premièrement en être conscient et avoir agi volontairement. Ainsi, la rédemption à un comportement criminel ou délinquant ne vaudrait que pour une infraction intentionnelle. Bien qu'un certain sentiment de culpabilité puisse naitre d'une infraction non intentionnelle, le fait que ce type d'infractions relève d'une imprudence ou d'une faute qualifiée ne traduit pas la volonté d'un comportement particulièrement déviant pouvant s'amender par l'angoisse de la répression. La sanction pénale ici aura plutôt pour fonction de mettre en avant les responsabilités du délinquant et non pas contrarier une volonté d'atteinte aux valeurs sociales de la société40.

Aussi, pour se repentir, il faut être conscient d'avoir commis une infraction. Dès lors, les personnes ayant commis des infractions de manière involontaire pourront se repentir puisque conscient de n'avoir commis aucun acte délictueux. Leurs fautes ayant créée une infraction pénale mais ils n'en savent rien. L'expiration des délais de prescription dans cette perspective ne punit pas d'une manière quelconque le fautif.

Enfin, tout semble à comprendre que ces conceptions ne prennent pas en considération le problème du récidive. Pour le Professeur Rassat, « l'absence de poursuites des premières infractions d'un individu a pu le renforcer dans un sentiment d'impunité et l'inciter, au contraire, à en commettre de nouvelles »41. Pour éviter que l'angoisse soit un élément guérisseur du délinquant, Madame Rassat ajoute que « l'absence de poursuite a empêché d'appliquer tout de suite à l'intéressé les mesures qui auraient été propres à le détourner de la délinquance »42. Ainsi, faire écouler le temps est un obstacle à la rédemption du délinquant puisqu'il empèche les autorités d'intervenir afin de lui venir en aide. Pour le Professeur Pradel, chaque délinquant réagissant individuellement face à la possibilité de poursuites, il est impossible d'établir une

38 A.MIHMAN, ibid.

39 Voir J.PRADEL, op. cit., p.184 ; R.MERLE et A.VITU, op. cit., p.66 et 67 ; M-L.RASSAT, op. cit., p.469.

40 V. FOURMY, « Désordre de la prescription de l'action publique », Mémoire de master en droit pénal et science pénale. Faculté de droit, Université Paris II Panthéon -Assas. 2011.

41 M-L.RASSAT, op. cit., N°290, p.468

42 M-L.RASSAT, ibid

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théorie sur l'expiation aussi générale « le temps n'étant pas le même pour tous43. Par ailleurs, il ajoute que la prescription profite aussi bien aux petits délinquants, lesquels sont les plus susceptibles de rentrer dans la norme, qu'aux grands malfaiteurs, ancrés dans un comportement déviant et nettement moins susceptibles de repentir44.

Les théories moralistes de la prescription pénale apparaissent comme des formes de réflexions considérées aujourd'hui comme dépassé. Si certains peuvent aujourd'hui accepter que les infractions soient parfois oubliées, il est de plus en plus difficile de concevoir cet oubli sur la base du remord et du repentir du délinquant. Ainsi, d'autres conceptions comme l'utilité sociale à la répression ont vu le jour et semble adéquat à la prescription.

2- Le fondement social

Plus actuel que les fondements moraux, les fondements sociaux ont tout de même un lien avec les premiers. En effet, les fondements sociaux de la prescription ont pour but de consolider la paix acquise avec le temps. Il est pour cette conception, pas normal de poursuivre des délinquants après un temps écoulé alors que les faits qui leurs sont reprochés ont perdu de traces dans la société. Ainsi, pour cette conception sociale, c'est l'impact social de l'infraction qui doit être visé. Dès lors qu'il cesse avec le temps, il ne convient plus de demander justice.

Le droit pénal dont la fonction est de sanctionner les troubles sociaux par une infraction, son but est celui de mettre en place une paix sociale. Toutefois, si par le temps, l'impact d'une infraction n'est plus visible, les effets de celle-ci sont oubliés, il ne serait pas nécessaire de recourir aux sanctions pénales puisque la paix et la sécurité sociale ont été restaurées d'elles même. Comme le dit le Professeur Bouloc, « au bout d'un certain temps, mieux vaut oublier l'infraction qu'en raviver le souvenir »45. Si le temps a pour vertu de permettre à la société d'oublier l'infraction il serait alors inopportun de déclencher l'action publique tardivement car le déclenchement des poursuites aurait pour effet de rappeler à la société le trouble qu'elle a subi et ainsi « mettre en péril l'équilibre retrouvé46. Les poursuites tardives dans cette perspective perdent leur rôle fondamental qui est de veiller sur la paix et la sécurité sociale. Ainsi, le Professeur Rassat affirme que « qu'il est inopportun de manifester aussi

43 J.PRADEL, op. cit., p.184

44 J. PRADEL, ibid. « la prescription est pernicieuse (...) Elle nuit à la protection de la société en profitant aussi bien aux grands malfaiteurs qu'aux petits délinquants alors que le temps ne saurait atténuer les dangers des premiers. »

45 B.BOULOC, Procédure Pénale, Dalloz, Coll. Précis, 22ème ed, 2010, N°203, p.173.

46 A.MIHMAN, op. cit., N°257, p.288

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spectaculairement l'inefficacité d'un système pénal qui met des années avant de se saisir des délinquants »47. La prescription serait ici un moyen de pardon permettant de mettre en place une paix sociale. Le législateur met en place un délai pour la restauration de la paix et de la sécurité sociale en fonction des infractions, tout en se basant sur la classification de celles-ci.

Les fondements sociaux, comme les fondements moraux ont également fait l'objet des critiques. D'abord, comment affirmer que l'impact de l'infraction s'atténue avec le temps et donc l'application de la prescription est possible alors même que la poursuite pénale n'a pas pour seul rôle de sanctionner, mais aussi de prévenir l'avenir ? Comme pour les conceptions moralistes, l'acquisition de la prescription, résultant en l'impunité de l'auteur d'une infraction, n'assure pas son intention de ne plus récidiver dans son anti socialité. La paix sociale n'est dans cette perspective pas assurée par l'absence de poursuites. La prescription semble donc ici encore profiter aux délinquants de toute espèce sans pour autant les inciter à rentrer dans la norme. Aussi, si l'opinion publique ne souffre plus de l'infraction, il n'en demeure pas moins qu'une atteinte lui a été portée et qu'ainsi il est nécessaire d'y apporter une réponse.

Par ailleurs, le pardon qui est certes un élément fondamental pour l'instauration de la paix et de la sécurité, n'est pas généralisé à tous les troubles car certains ne finissent pas. Chaque crime ne s'équivaut pas et cette affirmation est aussi valable pour les délits. Ainsi un génocide n'équivaut pas en termes de gravité un vol à main armée48 alors que ces deux infractions sont des crimes. Il ressort aujourd'hui que notre législation prend en compte ces différences de gravité entre infractions. Les crimes contre l'humanité dont le génocide fait partie, sont imprescriptibles49 alors que le vol aggravé donné en exemple se prescrit selon la règle de l'article 7 du Code de procédure pénale par dix années révolues.

Paragraphe II : La manifestation des amnisties et des prescriptions pénales A- Les manifestations des amnisties

Fondées sur la ratification des conventions internationales relatives au DIDH et au DIH comme les CG, le PIDCP mais également sur les constitutions de différend Etats, la manifestation des amnisties ou la procédure de leur mise en place est clairement défini. En effet, suivant le cas particulier de la RCA qui a récemment mis en place une amnistie des crimes,

47 M-L.RASSAT, op. cit., N°290, p.468.

48 Article 311-8 CP français

49 Article 213-5 CP français.

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la constitution de ce pays précise que c'est à l'Assemblée Nationale d'adopter les lois d'amnisties, avant leur promulgation par le chef de l'Etat.

En effet, l'article 41 de la Constitution centrafricaine du 13 mars 2016 dispose que : « lorsque les circonstances l'exigent, le Président de la République peut soumettre au referendum, après avis du Conseil des Ministres, celui du Bureau de l'Assemblée Nationale, celui du bureau de Sénat et celui de Sénat et celui du Président de la Cour Constitutionnelle, tout projet de loi ou, avant sa promulgation, toute loi déjà votée par le Parlement ».

Cette disposition de la Constitution centrafricaine est une affirmation que la volonté du peuple est nécessaire pour toute manifestation de l'amnistie. Aussi, nous pouvons comprendre que seule le Parlement a le plein pouvoir pour la mise en marche des amnisties puisque représentant le peuple de manière souveraine.

Cependant, on distingue plusieurs types d'amnisties dont les amnisties générales et les amnisties réelle. Les premiers s'appliquent sur tous les présumés auteurs d'infractions et des crimes commis sur un territoire et, n'est valable que pour le pays ou les faits se sont produits et qui promulgué la loi d'amnistie. L'amnistie générale exonère de vastes catégories d'auteurs de violation des DH50. Les amnisties réelles par contre, concernent des faits précis définis par le législateur. Ainsi, les personnes ayant été emprisonnées pour des faits amnistiés sont automatiquement libérées peu importe leurs condamnations. Une illustration de l'amnistie réelle est faite par le législateur Congolais en 2005 lorsqu'il dit : « Il est accordé une amnistie pour les faits de guerre, infraction politique et d'opinion à tous les Congolais résidents au pays ou à l'étranger, inculpé, poursuivis ou condamnés par une décision de la justice51. ».

D'autres types d'amnisties peuvent être cités comme les amnisties conditionnelles, les amnisties personnelles ou encore les amnisties mixtes. Toutefois, toutes ces amnisties se manifestent de la même façon, selon qu'elles dépouillent « rétroactivement certains faits de leurs caractère infractionnel. ». Gacon (S) et Citron écrivaient sur ce point : « l'amnistie est un processus juridique surprenant par l'effet radical qu'il impose : On oublie tout, rien ne s'est passé52. ».

50 Garth, (M.), et al. « Amnisties with universal juridiction », in international Law Forum, 2000, vol. 2, n2, p.76.

51 Loi congolaise N 05-023 du 19 décembre 2005 portant amnistie des faits de guerre, d'infractions politiques et d'opinion.

52 Gacon, (S) et al., « Amnistie- Les commentaires de la mémoire officielle », in Oublier nos crimes :L'amnésie nationale, une spécificité française ? p.100.

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B- Les manifestations des prescriptions pénales

Toutes les peines sont prescriptibles, excepté ceux qui sont abominables et touchent à la sensibilité internationale. Elles se prescrivent à la date de la condamnation définitive. Les délais de prescriptions des peines dépendent de la législation de chaque Etat. Ainsi, en droit français, les délais ont été modifiés par une Loi de 2017 portant réforme de la prescription en matière pénale. Le délais des peines est toujours de vingt ans pour les crimes sauf pour les crimes d'eugénisme, de clonage reproductif, de disparition forcée, de terrorisme, de trafic de stupéfiants, ou les crimes relatifs à la prolifération d'armes de destruction massive, qui se prescrivent par trente années révolues à compter de la date à laquelle la décision de condamnation est devenue définitive53. Les délits de droit commun est de six (6) ans, et enfin les contraventions qui se prescrivent par trois (3) ans54.

Tout comme la législation française, le droit positif camerounais prévoit également une prescription des peines. Nous comptons selon la loi pénale de 2016, vingt (20) ans pour les crimes, 5 ans pour les contraventions connexes et 2 ans pour les autres contraventions.

Par ailleurs en ce qui concerne l'interruption des prescriptions pénales, il résulte de tout acte d'exécution prévu par la loi55, tel qu'une saisie pour l'amende ou une arrestation pour un emprisonnement56 et a pour effet de faire courir à nouveau l'entier délai.

En ce qui concerne enfin la suspension de la prescription, « La prescription est suspendue toutes les fois qu'un obstacle de droit ou de fait, hors celui résultant de la volonté du condamne, empêche l'exécution de la peine57. ». ne fait qu'arrêter l'écoulement du délai, qui recommence à courir après l'événement suspensif. Cet événement suspensif est un obstacle de droit à l'exécution de la peine, qui présente les caractères de la force majeure, non une simple difficulté d'exécution comme une évasion. Il s'agit par, exemple, du sursis à l'exécution de la peine, de la détention de la personne à l'étranger58 ou encore de l'exercice par le condamné d'un appel59.

53 Xavier PIN, Droit pénal général, 2019.

54 (C. pén., art. 133-2).

55 Crim. 24 juill. 1957, Bull. crim. no 573.

56 L'opposition à un jugement par défaut est également interruptive, V. Crim. 20 mai 2003, Bull. crim. no 100.

57 CP du Cameroun, art 67.2

58 Crim. 5 oct. 1993, Bull. crim. no 275.

59 Crim. 23 déc. 1957, Bull. crim. no 865.

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SECTION II : La reconnaissance internationale des amnisties et des prescriptions pénales : entre codification (acceptation) et difficultés d'application

La reconnaissance des amnisties et des prescriptions pénales en DIDH est marquée par une acceptation ou non de ces pratiques (Paragraphe 1) et une difficulté d'application (Paragraphe 2).

Paragraphe I : Acceptation formelle des amnisties et le refus d'application des prescriptions pénales

L'acceptation formelle des amnisties en Droit international est animée par des conventions et les pratiques internationales qui favorisent cela (A), contrairement aux prescriptions pénales dont l'existence est reconnue mais que l'application est formellement interdite pour certains crimes (B).

A- Affirmation conventionnelle des amnisties

L'amnistie des crimes est une pratique qui existait depuis plusieurs années dans les différentes législations nationales, avant d'émerger en DI. En effet, sur le plan international, l'amnistie trouve ses premières affirmations conventionnelles avec le DIH qui, de manière précise fait référence à l'amnistie, lorsque dans l'article 6.5 du Protocole additionnel II aux Conventions de Genève du 12 août 1949 relatif aux conflits armées non internationaux (CANI), il est affirmé par le DIH une possibilité d'accorder des amnisties. Cet article dispose que : « A la cessation des hostilités, les autorités au pouvoir s'efforceront d'accorder la plus large amnistie possible aux personnes qui auront pris part au conflit armé ou qui auront été privées de liberté pour des motifs en relation avec le conflit armé, qu'elles soient internées ou détenues »60.Cet article est pour les commentaires de la commission, un encouragement au « geste de réconciliation qui contribue à rétablir le cours normal de la vie dans un peuple qui a été divisé »61.

60 IL s'agit du Protocole II relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux, adopté le 8 juin 1977 par la Conférence Diplomatique sur la réaffirmation et le développement du droit international humanitaire applicable dans les conflits armés (Entrée en vigueur: le 7 décembre 1978, conformément aux dispositions de l'article 23).

61 Il s'agit du Commentaire des articles et des Protocoles additionnels aux Conventions de Genève du 12 août 1949 téléchargeable sur le site de Comité international de la Croix-Rouge ( http://www.icrc.org/dih.nsf/). La citation est tirée du § 4618 du Commentaire mais le § 4617 est également digne d'attention : « [l]'amnistie relève de la compétence des autorités. Il s'agit d'un acte du pouvoir législatif qui efface un fait punissable, arrête les poursuites, anéantit les condamnations [29]. Juridiquement, il est fait une distinction entre l'amnistie et la grâce, qui, accordée par le chef de l'Etat, supprime l'exécution de la peine, mais laisse subsister les effets de la condamnation.

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Cette mesure est prise par la convention, dans le but de la recherche de la paix et de la sécurité des pays récemment sorti des conflits armés. L'article qui parait si clair, est accompagné d'un commentaire qui vient à nouveau le rendre plus claire. Selon ce dernier « [l]'objet de cet alinéa est d'encourager un geste de réconciliation qui contribue à rétablir le cours normal de la vie dans un peuple qui a été divisé »62.

Cependant, en ce qui concerne les conflits armés internationaux (CAT), les dispositions affirmant la pratique des amnisties prêtent à confusion. En effet, l'article commun 51/52/131/148 aux conventions de Genève affirme : « Aucune (Haute) Partie contractante ne pourra s'exonérer elle-même, ni exonérer une autre partie contractante, des responsabilités encourues par elle-même ou par une autre partie contractante des infractions prévues à l'article précédent. ». Le manque de précision des dispositions sur les amnisties des CAT pousse la doctrine à commenter les dispositions de cet article commun. Pour P. d'ARGENT qui affirme le caractère confus de cet article, il pense que souvent « on l'interprète comme interdisant aux Etats de renoncer entre eux à l'obligation de réparer qui découle de la commission des crimes de guerre. Il est sans doute plus correct de considérer qu'elle signifie que l'accusé ne peut pas se déduire d'un accord interétatique de renonciation à la réparation le fait qu'il ne pourrait plus être puni. En outre, cet article signifie aussi que les Etats ne peuvent pas, par convention internationale, s'accorder des amnisties relatives à des crimes de guerre. Mais la disposition ne limite en ce cas les amnisties convenues par traité. Elle n'empêche pas les amnisties internes »63.

Apres le DIH, plusieurs autres traités en rapport avec le DIDH ont reconnu l'existence des amnisties au niveau international. Ces traités ont un caractère international, mais parfois universel comme, c'est le cas du PIDCP. En effet, l'article 4 du Pacte, en reconnaissance aux amnisties, dispose : « 1. Dans le cas où un danger public exceptionnel menace l'existence de la nation et est proclamé par un acte officiel, les États Parties au présent Pacte peuvent prendre, dans la stricte mesure où la situation l'exige, des mesures dérogeant aux obligations prévues dans le présent Pacte, sous réserve que ces mesures ne soient pas incompatibles avec les autres obligations que leur impose le droit international et qu'elles n'entraînent pas une discrimination fondée uniquement sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion ou

62 Il s'agit du Commentaire des articles et des Protocoles additionnels aux Conventions de Genève du 12 août 1949 téléchargeable sur le site de Comité international de la Croix-Rouge ( http://www.icrc.org/dih.nsf/).

63 Argent P, Les réparations de guerre en droit international public. La responsabilité internationale des Etats à l'épreuve de la guerre, Bruxelles, Bruylant, p.769

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l'origine sociale. 2. La disposition précédente n'autorise aucune dérogation aux articles 6, 7, 8 (par. 1 et 2), 11, 15, 16 et 18. 3. Les États Parties au présent Pacte qui usent du droit de dérogation doivent, par l'entremise du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, signaler aussitôt aux autres États Parties les dispositions auxquelles ils ont dérogé ainsi que les motifs qui ont provoqué cette dérogation. Une nouvelle communication sera faite par la mêe entremise, à la date à laquelle ils ont mis fin à ces dérogations. ».

On peut également indiquer avec les directives de Belfast sur l'amnistie et la responsabilité que « Les Etats n'enfreindront pas nécessairement leurs obligations si, en raison de l'exercice du pouvoir discrétionnaire de poursuite, ils ne poursuivent pas tous les auteurs ou instances de ces crimes. (...) des amnisties conçues avec soin combinées avec stratégies de poursuite sélectives peuvent être en phase avec les obligations internationales d'un Etat et promouvoir les objectifs légitimes d'un Etat à répondre aux actes criminels généralisés. »64

Enfin, plusieurs autres institutions affirment reconnaitre l'existence ou la pratique des amnisties au niveau international. C'est le cas avec l'Accord de Lomé du 7 juillet 1999 qui garantit l'amnistie à FODAY Sankho, en son article IX, mais aussi du conseil de sécurité dans ses résolutions 1996/71 et 1996/73, l'Assemblée générale de l'ONU, la CEDH qui sont favorable ou accepte la pratique des amnisties sur le plan international65.

De ce qui suit, nous pouvons dire que le DI à travers ses multiples conventions sur la protection des individus et l'encadrement des CA, reconnait une existence internationale des amnisties quoique, les différentes dispositions sont souvent prêtées à confusion.

B- Le refus conventionnel d'application des prescriptions pénales

La prescription des crimes est en DIDH reconnu mais pas accepté pour les infractions les plus graves touchants à la sensibilité internationale. En effet, si le DI ne se prononce particulièrement pas en défaveur de la prescription des infractions moins grave, il n'en est pas le cas avec les crimes internationaux qui ont fait l'objet d'une convention internationale appelé : Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité, adopté le 26 novembre 1968.

Cette convention qui interdit formellement la prescription des peines, énumère dans son article Premier les crimes internationaux, tout en affirmant leur imprescriptibilité. Ainsi, il est

64 Les directives de Belfast sur l'amnistie et la responsabilité.

65 Pratique relative à la règle 159 de l'étude du CICR sur le DIH coutummier, à lire sur : https://ihl-databases.icrc.org/customary-ihl/eng/dovs/v2_rul_rule159 (en anglais. Consulté le 12 juillet 2020).

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écrit que : « Les crimes suivants sont imprescriptibles, quelle que soit la date à laquelle ils ont été commis : a ) Les crimes de guerre, tels qu'ils sont définis dans le Statut du Tribunal militaire international de Nuremberg du 8 août 1945 et confirmés par les résolutions 3 (I) et 95 (I) de l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies, en date des 13 février 1946 et 11 décembre 1946, notamment les "infractions graves" énumérées dans les Conventions de Genève du 12 août 1949 pour la protection des victimes de la guerre; b ) Les crimes contre l'humanité, qu'ils soient commis en temps de guerre ou en temps de paix, tels qu'ils sont définis dans le Statut du Tribunal militaire international de Nuremberg du 8 août 1945 et confirmés par les résolutions 3 (I) et 95 (I) de l'Assemblée générale l'Organisation des Nations, en date des 13 février 1946 et 11 décembre 1946, l'éviction par une attaque armée ou l'occupation et les actes inhumains découlant de la politique d' apartheid , ainsi que le crime de génocide, tel qu'il est défini dans la Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide, même si ces actes ne constituent pas une violation du droit interne du pays où ils ont été commis.66 ».

Cette convention montre la volonté des Nation-Unies de mettre fin à tout processus d'impunité et de favoriser des mécanismes permettant de mettre en place une justice internationale qui prenne en considération les droits des individus notamment à la réparation et à la recherche de la vérité. A la suite de la convention des Nations-Unies, l'Europe s'est aussi engagé dans la même lutte, en en mettant en place une Convention européenne sur l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre en 1974, soit quatre (4) ans après l'entrée en vigueur de la convention des NU.

Tout comme la convention des NU, la convention européenne affirme en son article Premier que « Tout Etat contractant s'engage à prendre les mesures nécessaires afin que la prescription soit inapplicable à la poursuite des infractions suivantes et à l'exécution des peines prononcées... ». Cet article interdit non seulement l'application de la prescription, mais plus encore, il oblige les Etats à ne pas appliquer une politique favorisant l'impunité.

L'article 2 ajoute : « 1) Dans chaque Etat contractant, la présente Convention s'applique aux infractions commises après son entrée en vigueur à l'égard de cet Etat. 2) Elle s'applique également aux infractions commises avant cette entrée en vigueur dans les cas où le délai de prescription n'est pas encore venu à expiration à cette date ». On constate ici une affirmation

66 Convention des Nations-Unies sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et de crimes contre l'humanité de 1968.

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de la rétroactivité de cette convention sur les prescriptions avant son entrée en vigueur et dont les délais ne sont pas encore à expiration.

Paragraphe II : Les difficultés d'application des deux institutions

Les difficultés d'application des amnisties et des prescriptions pénales se manifestent par leur incompatibilité avec les DIP et le DIH (A), avec les principes de l'ONU (B) et enfin avec la monté du principe de l'imprescriptibilité des crimes internationaux (C).

A- L'incompatibilité de des amnisties avec le Droit international pénal et le Droit international humanitaire

L'incompatibilité des amnisties avec le DIP et le DIH est autant conventionnelle que jurisprudentielle.

En effet, relativement au DIP, on assiste depuis plusieurs années à la création de Tribunaux pénal tant ad hoc que universelles, dont le but est de lutter contre l'impunité dans le monde. L'amnistie qui est une forme d'encouragement de l'impunité est donc incompatible aux exigences du DIP. Dans une décision du 13 mars 2004, les juges du Tribunal spécial pour la Sierra Leone ont affirmé l'incompatibilité des amnisties avec les obligations et les conventions internationales en ces termes : « Even if the opinions held that Sierra Leone may not have breached customary law in granting an manesty, this court is entitled in the exercise of its discretionary power, to attribute little or a weight to the grant of such amnesty which is contary to the obligations in certain treaties and conversations the purpose of which is to protct humanity.».

Aussi, l'incompatibilité des amnisties avec le DIP résulte du fait que le DIP prône la responsabilité de chaque individu devant ses manquements. Le préambule de la CPI rappelle que « qu'il est du devoir de chaque Etat de soumettre à sa juridiction criminelle les responsables des crimes internationaux ». Cette position de la CPI bien que non précise sur le cas particulier de l'amnistie, puisque ayant un caractère extrajudiciaire, montre que la pratique des amnisties est contraire aux obligations internationales des Etats qui doivent livrer à la juridiction internationale, les responsables des crimes internationaux.

L'amnistie des crimes internationaux n'est pas envisageable en DIP. Cet argument est soutenu par plusieurs auteurs comme Maison (R) qui ne voit pas le bien fondé des amnisties en DI. C'est pourquoi elle écrit : « Un Etat ne peut pardonner un crime, tel qu'un crime de Droit international, que d'autres Etats sont amenés à garder en mémoire et à poursuivre ».

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C'est dans ce sens que la Cour interaméricaine des droits de l'homme va déclarer dans l'affaire Velasquez-Rodriguez, que « Les Etats doivent prévenir toute violations des droits reconnus par les conventions et enquêter au sujet de toute violation et la punir67 ».

L'obligation de répression qui est considéré comme un des principes du DIP est incompatible avec l'amnistie. En effet, suivant l'article 25 du Statut de Rome parlant de la responsabilité individuelle, il est affirmé que « 1. La Cour est compétente à l'égard des personnes physiques en vertu du présent Statut. 2. Quiconque commet un crime relevant de la compétence de la Cour est individuellement responsable et peut être puni conformément au présent Statut. 3. Aux termes du présent Statut, une personne est pénalement responsable et peut être punie pour un crime relevant de la compétence de la Cour si : a) Elle commet un tel crime, que ce soit individuellement, conjointement avec une autre personne ou par l'intermédiaire d'une autre personne, que cette autre personne soit ou non pénalement responsable; b) Elle ordonne, sollicite ou encourage la commission d'un tel crime, dès lors qu'il y a commission ou tentative de commission de ce crime;... ». Les amnisties sont donc dans cette perspective incompatible au DIP.

Relativement à l'incompatibilité avec le DIH, celle-ci se fonde sur les violations ou les interprétations erronées des conventions internationales. En effet, au regard des articles art. 49, 50, 129 et 146, des quatre conventions de Genève de 1949, les Etats doivent sanctionner pénalement les auteurs des crimes dans les CAI, ou ceux qui ont donné l'ordre de les commettre Ils doivent rechercher les personnes soupçonnées d'avoir commis, ou donné l'ordre de commettre, de telles infractions et les déférer, quelle que soit leur nationalité, à leurs propres tribunaux, ou les extrader. Ils doivent également prendre les mesures nécessaires pour faire cesser toutes les autres infractions aux Conventions.

Quant à la mauvaise interprétation des conventions internationales par les Etats, il faut reconnaitre que les Etats se basent sur l'article 6.5 du PA II des CG pour appliquer les amnisties, alors même que cet article ne concerne que les CANI. Les différentes violations du DIH observées doivent nécessairement faire l'objet d'enquêtes et de poursuites judiciaire de la part des autorités. Toutefois, le DIH coutumier applicable tant dans les CAI que dans les CANI impose aux États d'enquêter sur tous les crimes de guerre qui auraient été commis par leurs ressortissants ou leurs forces armées, ou sur leur territoire, et, le cas échéant, de poursuivre les

67 Cour interaméricaine des droits de l'homme, Affaire Velasquez Rodriguez, Arret du 29 juillet 1988, série C, n4, §172.

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suspects. Ils doivent également enquêter sur les autres crimes de guerre relevant de leur compétence et, le cas échéant, poursuivre les suspects68.

Les incompatibilités des amnisties avec le DIP et le DIH sont donc liées à la responsabilité internationale des individus et aux violations des conventions de DIH. Qu'en est-il des incompatibilités avec les principes des NU ?

B- Incompatibilité avec les principes de l'Organisation des Nations Unies

Les Nations-Unies ont condamné par leurs principes et politique, l'impunité des crimes graves touchant à la sensibilité internationale. L'ONU affirme que les amnisties, les prescriptions pénales et toute autre forme d'impunité sont incompatible à sa politique. Les Etats doivent selon elle veiller à ce que: a) les auteurs d'atteintes graves aux droits de l'homme et au droit humanitaire soient traduits en justice69; et b) les victimes aient droit à un recours utile, y compris à réparation70.

Les Nations-Unies dans sa politique, obligent les différends Etats à mettre en place les des mécanismes d'enquête et de réparation des violations des droit de l'homme. Les amnisties et les prescriptions pénales sont prohibées. C'est ainsi que l'un des Principes fondamentaux et directives concernant le droit à un recours et à réparation des victimes de violations flagrantes du droit international des droits de l'homme et de violations graves du droit international

68 Voir la Règle 158 de l'étude du CICR sur le DIH coutumier, op. cit., note 1.

69 Par exemple, les Principes de la coopération internationale en ce qui concerne le dépistage, l'arrestation, l'extradition et le châtiment des individus coupables de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité prévoient que les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité «doivent faire l'objet d'une enquête, et les individus contre lesquels il existe des preuves établissant qu'ils ont commis de tels crimes doivent être ... traduits en justice et, s'ils sont reconnus coupables, châtiés» (résolution 3074 (XXVIII) de l'Assemblée générale). Les Principes relatifs à la prévention efficace des exécutions extrajudiciaires, arbitraires et sommaires et aux moyens d'enquêter efficacement sur ces exécutions prévoient: «En aucun cas ... une amnistie générale ne pourra exempter de poursuites toute personne présumée impliquée dans des exécutions extrajudiciaires, arbitraires ou sommaires» (résolution 1989/65, annexe, Principe 19, du Conseil économique et social). La Déclaration sur la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées prévoit que «[l]es auteurs et les auteurs présumés [d'actes de disparitions forcées] ne peuvent bénéficier d'aucune loi d'amnistie spéciale ni d'autres mesures analogues qui auraient pour effet de les exonérer de toute poursuite ou sanction pénale» (résolution 47/133, art. 18, de l'Assemblée générale), alors que la Déclaration sur l'élimination de la violence à l'égard des femmes, de 1993, prévoit que les États devraient «agir avec la diligence voulue pour prévenir les actes de violence à l'égard des femmes, enquêter sur ces actes et les punir conformément à la législation nationale, qu'ils soient perpétrés par l'État ou par des personnes privées» (résolution 48/104, art. 4 c), de l'Assemblée générale). La Déclaration et le Programme d'action de Vienne, adoptés en 1993 par la Conférence mondiale sur les droits de l'homme, affirme que «[l]es États devraient abroger les lois qui assurent, en fait, l'impunité aux personnes responsables de violations graves des droits de l'homme telles que les actes de torture, et ils devraient poursuivre les auteurs de ces violations, asseyant ainsi la légalité sur des bases solides» (A/CONF.157/24 (partie I), chap. III, par. 60).

70 Par exemple, la Déclaration universelle des droits de l'homme proclame: «Toute personne a droit à un recours effectif devant les juridictions nationales compétentes contre les actes violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus par la Constitution ou par la loi» (art. 8).

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humanitaire, adoptés par l'Assemblée générale en 200571, réaffirme cette obligation lorsqu'il dit : « En cas de violations flagrantes du droit international des droits de l'homme et de violations graves du droit international humanitaire qui constituent des crimes de droit international [par exemple des «crimes de guerre»], les États ont l'obligation d'enquêter et, s'il existe des éléments de preuve suffisants, le devoir de traduire en justice la personne présumée responsable et de punir la personne déclarée coupable de ces violations ». Cette affirmation est une volonté manifeste des NU pour mettre fin aux pratiques d'amnisties et de prescription pénale pour les crimes internationaux.

Aussi, l'Ensemble de principes actualisé pour la protection et la promotion des droits de l'homme par la lutte contre l'impunité, dont la Commission des droits de l'homme a pris acte avec satisfaction en 2005, affirme essentiellement la même norme dans son Principe 1972, comme quoi « Les États doivent mener rapidement des enquêtes approfondies, indépendantes et impartiales sur les violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire et prendre des mesures adéquates à l'égard de leurs auteurs, notamment dans le domaine de la justice pénale, pour que les responsables de crimes graves selon le droit international soient poursuivis, jugés et condamnés à des peines appropriées ».

Parlant spécifiquement du cadre des amnisties et des prescriptions pénales, le principe 24 vient donner des limites d'applications aux Etats, si ceux-ci mettaient quand même les impunités en oeuvre. Pour ce principe, « Y compris lorsqu'elles sont destinées à créer des conditions propices à un accord de paix ou à favoriser la réconciliation nationale, l'amnistie et les autres mesures de clémence doivent être contenues dans les limites suivantes:

a) Les auteurs de crimes de droit international graves ne peuvent bénéficier de telles mesures tant que l'État n'a pas satisfait aux obligations visées au Principe 19 ou qu'ils n'ont pas été poursuivis par un tribunal - international, internationalisé ou national - compétent hors de l'État en question... ».

Enfin, plusieurs autres principes comme le principe 31 ou 32 nous permettent de comprendre que la politique des Nations-Unies est incompatible aux institutions prônant l'impunité. Cette affirmation d'incompatibilité entre les amnisties, les prescriptions pénales et la politique de

71 Résolution 60/147, annexe, de l'Assemblée générale.

72 Résolution 2005/81 sur l'impunité, par. 20.

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l'ONU est dans une certaine mesure la conséquence de la monté de la notion d'imprescriptibilité des crimes au rang de principe en DIP.

C- La montée de l'imprescriptibilité comme principe

Les raisons techniques et pratiques justifiants la prescription en droit internes ont fait face à plusieurs obstacles lors de l'élaboration du Statut de Rome. Les opposants à l'imprescriptibilité soutenaient que « evidence disappears over time and that this could affect the right of the accused to a fair trial73 ». Il s'est avéré que cet argument relève purement du droit interne, mais que la Cour européenne a reconnue notamment lors de l'affaire Stubbings et autres c/ RU, la Cour a énoncé, dans un obiter dictum repris par sa jurisprudence ultérieure, que « les délais de prescription dans les affaires d'atteinte à l'intégrité de la personne sont un trait commun aux systèmes juridiques des Etats contractants. Ces délais ont plusieurs finalités importantes, à savoir garantir la sécurité juridique en fixant un terme aux actions, mettre les défendeurs potentiels à l'abri de plaintes tardives peut-être difficiles à contrer, et empêcher l'injustice qui pourrait se produire si les tribunaux étaient appelés à se prononcer sur des événements survenus loin dans le passé à partir d'éléments de preuve auxquels on ne pourrait plus ajouter foi et qui seraient incomplets en raison du temps écoulé »74.

Dans les années 64-65, dans la peur que les crimes perpétrés par les Nazis soient prescrits au regard des règles de 20 ans de prescriptions présent dans différentes législations, les acteurs de la scène internationale commencent à réfléchir sur un concept permettant de contrer la prescription des crimes. C'est ainsi qu'on aboutit par précipitation, à des mesures visant à allonger les délais de prescription ou poser le principe de l'imprescriptibilité pour de tels crimes75. Apres la naissance de l'idée de l'imprescriptibilité, sa mise en place à été plutôt difficile pour son adaptation à tous les crimes internationaux.

Cette naissance historique particulière, qui explique en partie l'échec des deux conventions élaborées au sein respectivement des Nations Unies et du Conseil de l'Europe, la seconde en réaction à la première, n'est pas sans rejaillir aujourd'hui encore sur l'état du droit positif. La Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité du 26

73 Guide on Article 6 of the European Convention on Human Rights, aout 2020.

74 Stubbings et autres c/ RU, 22 octobre 1996, Rec. 1996-IV, § 51.

75 P. de MERTENS, ouvrage 1974, p.71 : « (...) le débat relatif à la prescription s'est noué, à l'origine, en Yougoslavie comme dans les autres pays autour des seuls crimes nazis (...) ».

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novembre 1968, adoptée par 58 voix contre 7 et 36 abstentions, et en vigueur depuis le 11 novembre 1970, fut considérée à l'époque comme un « fiasco »76.

Toutefois, depuis la création de la CPI, la convention de 1968 sur l'imprescriptibilité des crimes qui, était jusque-là rejeté par certains Etats, a eu une autre tournure puisque désormais consolidé par une juridiction internationale. En effet, l'article 29 du Statut de Rome reconnait que « Les crimes relevant de la compétence de la Cour ne se prescrivent pas ». Cette reconnaissance fait passer l'imprescriptibilité au rang des principes fondamentaux du DIP. L'imprescriptibilité pour certains crimes internationaux est désormais acquise sur la scène internationale. L'adoption de la rédaction actuelle de l'article 29, la plus favorable à l'imprescriptibilité parmi les différentes options maintenues jusqu'à la conférence finale de juin-juillet 1998, relève presque du miracle.

Enfin, dans son application, l'imprescriptibilité à fait face à la question de la rétroactivité pour les crimes commis avant l'entrée en vigueur des différentes conventions. L'article 1er de la Convention des Nations Unies avait prévu son application aux crimes commis avant son entrée en vigueur, ce qui a été fortement critiqué77. Selon T. Todorov, « (...) en étendant la loi de `maintenant' à `autrefois' comme dans les crimes imprescriptibles, (...) on contribue à amalgamer droit et morale, le juste et le bien. Or, la distinction entre les deux est à la base même des démocraties libérales modernes. A la différence des théocraties comme des Etats totalitaires, la démocratie ne prétend pas être un Etat vertueux, elle ne définit pas le souverain tout en obligeant tous les citoyens d'y aspirer »78. La rétroactivité représente donc un problème, au regard du PIDCP (art 15), de la CEDH (art 7)... Ainsi, selon l'un des « Principes de Bruxelles contre l'impunité et pour la justice internationale », issus du Colloque tenu à Bruxelles du 11 au 13 mars 2002272, « le caractère criminel des faits en cause doit être apprécié au regard du droit interne ou du droit international. Il n'est dès lors pas contraire aux principes de légalité et de non-rétroactivité des lois pénales de poursuivre les auteurs de faits réputés criminels au regard du seul droit international au moment où ils sont commis (...) »79. Dans l'affaire Coëme et autres c/Belgique, la Cour a ajouté que « les délais de

76 P. MERTENS, Op. cit., p. 165. R. H. MILLER, « The convention on the non-applicability of statutory limitations to war Crimes and crimes against humanity », AJIL, vol.65, 1971, pp. 476 et s.

77 L'applicabilité de cette convention est considérée comme portant atteinte au principe de non-rétroactivité contenu aux articles 7 CEDH et 15 du PIDCP : V. C. DEN WYNGAERT et J. DUGARD, « Non-applicability of limitations », in The

Rome Statute of the International criminal Court, A Commentary, Oxford, Oxford University Press, 2002, p. 874

78 V. T. TODOROV, « Les limites de la justice », in A. CASSESE et M. DELMAS-MARTY, Crimes internationaux et juridictions internationales, Paris, PUF, 2002, p. 44.

79 Principe n° 6 relatif à la légalité et à la non-rétroactivité des normes pénales.

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prescription, qui sont un trait commun aux systèmes juridiques des Etats contractants, ont plusieurs finalités, parmi lesquelles garantir la sécurité juridique en fixant un terme aux actions et empêcher une atteinte aux droits de la défense qui pourraient être compromis si les tribunaux étaient appelés à se prononcer sur le fondement d'éléments de preuve qui seraient incomplets en raison du temps écoulé ».

CHAPITRE II : IMPACTS JURIDIQUES DES AMNISTIES ET DES PRESCRIPTIONS PENALES

Les impacts juridiques des amnisties et des prescriptions pénales sont non seulement sur les victimes (SECTION 1) mais aussi sur les présumés auteurs et dans la société (SECTION 2).

SECTION I : Les impacts sur les victimes : entre violation et garanti des droits des victimes des violations des Droits de l'homme.

Les amnisties et les prescriptions pénales, des pratiques qui violent les droits des victimes (Paragraphe 1) et qui s'opposent sur les droits des victimes à la réparation (Paragraphe 2).

Paragraphe I : Amnisties et prescriptions pénales, deux pratiques violant les droits des victimes.

Le droit au procès équitable (A) et à une assistance judiciaire (B) sont deux droits violés par les amnisties et les prescriptions pénales.

A- Le droit à un procès équitable

Le droit à un procès équitable est définit dans le Pacte comme le droit de « [t]oute personne (...) à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial (...) qui décidera soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil. »80.

Selon la CIDH, dans l'affaire de Barrios Altos, les lois d'amnistie empêchent les victimes d'être entendues par un juge81 et violent, par conséquent, le droit à un procès équitable.

La pratique des amnisties sont dans cette perspective contraire aux droits des victimes à un procès équitable puisque après la mise en oeuvre de celles-ci, les victimes ne peuvent plus prétendre saisir la justice afin de revendiquer leurs droits violés. C'est dans ce contexte que la validité de la loi d'amnistie en Afrique du Sud a fait l'objet d'une contestation en 1996, devant

80 PIDCP, art 14 (1)

81 Affaire des Barrios Altos v Pérou, Arrêt du 14 mars 2001, Série C No. 75, §41- 42.

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la Cape Provincial Division de la Cour Suprême et simultanément devant la Cour Constitutionnelle.

En effet, dans les premier cas, l'Azanian People's Organisation (AZAPO) demanda une interdiction du comité d'amnistie, déclarant que l'Act violait les dispositions de la Constitution garantissant à toute personne le droit « to have justiciable disputes settled by a court »82.

Dans l'affaire, devant la Cour constitutionnelle, AZAPO and others v. The President of the Republic of South Africa, la constitutionnalité de la Section 20 (7) de l'Act, concernant les effets de l'amnistie, fut contestée77 et il fut argumenté qu'en accordant l'amnistie aux auteurs de crimes contre l'humanité l'Etat violait ses obligations en droit international83, notamment l'obligation faite aux Etats de garantir la justice équitable pour tous les citoyens victimes des violations, conformément au PIDCP.

S'agissant de la prescription pénale, et partant sur la base des obligations des Etats de rendre les procès équitables, il faut souligner que l'enclenchement des mécanismes de prescriptions pénales ne permet pas aux autorités de poursuivre ni de condamner les auteurs de différentes infractions une fois que les délais de prescription sont épuisés. Ceci est donc une violation des droits des victimes qui ne peuvent pas demander justice pour les violations dont ils ont été l'objet.

Enfin, le délai de prescription qui est une période donnée aux différentes victimes de saisir la justice pour réclamer leurs droits est un moyen de dissuader certains justiciables de saisir cette justice, notamment dans le contexte africain. En effet, le temps de rassembler les preuves et tous les éléments permettant d'actionner le mécanisme judiciaire, le délai peut dans certains cas passer. C'est les cas des crimes qui sont dans certains pays comme le Cameroun, selon la Loi pénale de 201684, article 67.1. a, prévoit une prescription de 20 ans pour les crimes.

Les amnisties et les prescriptions pénales sont des institutions de violation des droits des victimes à un procès équitable, ce qui est dans le même sens une violation des droits de l'homme et des obligations des Etats qui décident de les mettre en oeuvre sur les infractions touchant à la sensibilité internationale.

82 Section 22 de la Constitution Interim 1993.

83 Résumé de l'affaire AZAPO v. President of the Republic of South Africa, publié sur le site officiel de la CVR.

84 Loi n 2016/007 du 12 juillet 2016, art 67. 1. a : « La peine principale non subie, ainsi que les peines accessoires et les mesures de sureté qui l'accompagnent, ne peuvent plus être exécutées après l'expiration des délais ci-après déterminés à compter de la date du jugement ou de l'arrêt devenu définitif : a) pour crime : 20 ans ... »

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B- Le droit à une assistance juridique et judiciaire

Le doit à une assistance judiciaire est un droit dont toutes les victimes des violations des droits de l'homme doivent bénéficier. En effet, aux fins des principes et lignes directrices des NU su l'accès à la justice, le terme « assistance juridique s'entend des conseils, de l'aide et de la représentation juridiques en faveur de toute personne détenue, arrêtées, ou emprisonnées, soupçonné d'une infraction pénale, et des victimes et témoins devant la justice pénale, qui sont fourni gratuitement à toute personne indigente ou lorsque l'intérêt de la justice l'exige. L'expression assistance juridique recouvre en outre les notions d'éducation au droit, d'accès à l'information juridique et d'autres services fournis à toute personne à la faveur des mécanismes alternatifs de règlement de conflits et de justice réparatrice 85».

Les NU reconnaissent un droit de l'assistance juridique lorsque dans le principe premier, il affirme que c'est un élément fondamental pour une administration efficace de la justice pénale. Ce principe constitue également un fondement pour d'autres droits droit comme celui du procès équitable et garanti l'équité fondamental et la confiance du public dans la justice pénale86.

Dans le contexte des amnisties et des prescriptions pénales, notamment dans le cadre des CA, les victimes ont pour la plus part de temps perdu tous leurs biens et ne peuvent par conséquent pas avoir les moyens pour saisir la justice et surtout bénéficier d'un conseil juridique. L'un des exemples les plus concrets est celui de la GC en Sierra Leone ou même en AS, plusieurs familles victimes de la crise se sont retrouvées avec une impossibilité de saisir la justice faute de moyen. Les institutions de clémence ne favorisent pas cependant ces individus à bénéficier de l'égalité de justice, conformément aux textes de la DUDH. Le refus d'accorder aux différentes victimes une assistance juridique gratuite est de ce fait une violation de leurs droits car pour l'ONU, c'est de l'obligation des Etats d'accorder cela. C'est ainsi qu'il est affirmé dans Les principes et lignes directrices des NU sur l'accès à l'assistance juridique dans le système de justice pénale que « Les Etats doivent considérer qu'il est de leur devoir et obligation de fournir une assistance juridique. A cette fin, ils doivent... garantir la mise en place d'un système d'assistance juridique complet, qui soit accessible, efficace, pérenne et

85 Principes et lignes directrices des NU sur l'accès à l'assistance juridique dans le système de justice pénale.

86 L'expression justice pénale est employée ici dans le sens des lignes directrices en matière de justice dans les affaires impliquant les enfants victimes et témoins d'actes criminels (résolution 2005/20 du conseil économique et social, annexe).

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crédible. Les Etats doivent allouer les ressources humaines et financières nécessaires au système d'assistance juridique. ».

L'absence d'un procès équitable et le refus d'accompagner juridiquement les victimes après la mise en place des amnisties et des prescriptions pénales est selon les NU et les différentes conventions relatives aux droits des victimes, de graves violations des droits de ces derniers qui, ne veulent que réclamer les réparations sur les violations dont ils ont fait l'objet.

Paragraphe II : Deux mesures opposées quant à la règle de réparation

La réparation a pour but la promotion de la justice et la tentative de remédier aux préjudices subis par les victimes. Cette réparation doit être effective, rapide et efficace. Si on observe une tentative de réparation dans la mise en place des amnisties (A), cela n'en est pas le cas avec les prescriptions pénales, d'où leur mise en cause au niveau international au profit de l'imprescriptibilité (B).

A- Les amnisties et le droit des victimes à la réparation

« Tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer », nous rappelle l'article 1382 du C. Civ français. Cet article met en oeuvre la responsabilité individuelle de chacun devant ses faits. Une responsabilité qui est précisé à l'article 138387.

Apres la commission des crimes, les individus sont face à leurs responsabilités tant pénales que civiles. La réparation faisant partie intégrante de la responsabilité civile, il importe aux responsables de réparer d'une manière ou d'une autre leurs dommages afin que les victimes entrent en possession de leurs droits. Sur le plan international ou plus précisément dans le cadre africain des droits de l'homme, la CADHP énonce que les mesures de réparation doivent, selon les circonstances particulières de chaque affaire, inclure la restitution, l'indemnisation, la réadaptation de la victime et les mesures propres de garantir la non répétition des violations, compte tenu des circonstances de chaque affaire. C'est dans cette optique que dans l'affaire Sébastien Germain AJAVON c. République du Bénin, la Cour a affirmé que « la réparation doit, autant que possible, effacer toutes les conséquences de l'acte illicite et rétablir l'état qui aurait vraisemblablement existé si ledit acte n'avait pas été commis »88.

87 C. Civ, art 1383, « Chacun est responsable du dommage qu'il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence ».

88 Affaire Sébastien Germain AJAVON c. République du Bénin, Arrêt du 28 novembre 2019

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Cette décision de la Cour nous permet de mettre en lumière deux catégories de réparation, à savoir la réparation matérielle qui comprend l'indemnisation et la restitution, et la réparation morale représenté par la satisfaction.

L'indemnisation, présentée comme le plus courant des réparations du fait qu'elle est plus facile à mettre en oeuvre, intervient lorsque le dommage est médiat. Dans le cadre des violations des droits de l'homme, les victimes réclament dans la plupart de temps une indemnisation puisque ayant perdu tous leurs biens, aussi leurs facultés physique et parfois morale. C'est dire que toute violation, physique ou morale peut faire l'objet d'une indemnisation. Enfin, l'indemnisation couvre l'ensemble du préjudice et, prend effet non pas à la date de la survenance de la violation, mais à la date de la fixation de l'indemnité.

La restitution quant à elle, c'est la remise en état dans la situation antérieure comme si le dommage n'était pas survenu, afin « d'effacer toutes les conséquences de l'acte illicite et rétablir l'état qui aurait vraisemblablement existé, si ledit acte n'avait pas été commis » (CPJI, 1928, Usine de Chorzow). C'est la meilleure réparation envisageable ; malheureusement, il est le plus souvent illusoire de croire que la remise en l'état soit possible89, la CDI prévoit d'ailleurs que la restitution ne doit pas imposer une charge hors de proportion avec le dommage90.

Enfin, s'agissant de la satisfaction, c'est une réparation morale qui peut être invoquée en même temps que l'indemnisation. Elle parait souvent sous forme de la reconnaissance publique par les bourreaux ou même l'Etat, sur les violations des droits de l'homme dont ils ont été responsables. Cela peut donc être des excuses solennelles lorsqu'il s'agit d'un conflit entre Etat comme dans l'affaire du Rainbow warrior où la France a présenté des excuses à la Nouvelle-Zélande ou, mais aussi d'un Etat avec un individu étranger. La satisfaction a aussi été l'une des solutions adoptées dans l'affaire des « Personnels diplomatique et consulaire des États-Unis à Téhéran » (CIJ, 1980) : « la Cour tient que les violations successives et continues par l'Iran des obligations qui lui incombent (...) engagent la responsabilité de l'Iran à l'égard des États-Unis. Une conséquence évidente de cette constatation est que l'État iranien a l'obligation de réparer le préjudice ainsi causé aux États-Unis ». Cette illustration de la CIJ s'applique également aux violations des droits des individus à cause du laxisme de l'Etat qui a laissé perpétrer les différentes violations des droits des individus sur son territoire.

89 Catherine Roche, L'éssentiel du Droit international public, 10e édition, 2019-2020, p102.

90 Voir l'arrêt usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay, CIJ, 2010.

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Les réparations sont donc des éléments indissociables à l'amnistie. Elles permettent la mise en oeuvre de cette dernière, dans le respect des de ses conditions d'application et les droits des individus tels que prévu par les différends textes internationaux relatifs aux DIDH et au DIH.

B- Les prescriptions pénales en but à la règle du droit imprescriptible à la réparation

La prescription pénale en DIDH fait obstacle au droit de réparation des victimes, d'où l'affirmation d'une violation de plus des droits de ses victimes qui ne peuvent malheureusement entrer dans leurs droits. Pour éviter ces violations, le DIDH a mis en place le droit imprescriptible à la réparation qui, a des composantes (1), et est le corollaire de l'imprescriptibilité des poursuites (2).

1- Les composantes du droit imprescriptible à réparation

Affirmé par les travaux de la sous commissions des droits de l'homme et les organes régionaux de protection des droits de l'homme, les composantes du droit imprescriptible à la réparation sont : le droit à la vérité et le recours effectif de la réparation.

Le concept « droit de savoir des victimes » est inscrit dans le rapport final de M. Louis Joinet de 199791. Il est affirmé que « Indépendamment de toute action en justice, les victimes, ainsi que leurs familles et leurs proches, ont le droit imprescriptible de connaître la vérité sur les circonstances dans lesquelles ont été commises les violations et, en cas de décès ou de disparition, sur le sort qui a été réservé à la victime ». Sous cet angle, ce droit est une partie du droit à la réparation notamment le droit à la réhabilitation. En 2005, la commission des droits de l'homme met en place une résolution pour une réaffirmation de ce droit. Il est ainsi écrit que « Dans les cas de violations flagrantes des droits de l'homme et de violations graves du droit international humanitaire, il importe d'étudier la relation entre le droit à la vérité et le droit à l'accès à la justice, le droit à un recours utile et à réparation et d'autres droits de l'homme pertinents92 ».

91 L'administration de la justice et les droits de l'homme des détenus », « Question de l'impunité des auteurs des violations des droits de l'homme (civils et politiques) », Rapport final de M. Louis JOINET, Commission des Droits de l'Homme, Sous-Commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités, E/CN.4/Sub.2/1997/20/Rev.1, 2 octobre 1997, rapport final en application de la décision 1996/119, § 31 : Annexe 2 : Ensemble de principes pour la protection et la promotion des droits de l'homme par la lutte contre l'impunité : Principe 3.

92 « Le droit à la vérité », Résolution de la Commission des droits de l'homme 2005/66, 20.04.2005, qui demande, au point 6, au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme « de préparer une étude sur le droit à la vérité, comprenant notamment des informations sur les fondements, la portée et le contenu de ce droit en vertu du droit international, ainsi que des renseignements sur les meilleures pratiques et des recommandations en vue de l'application effective de ce droit (...) ».

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Dans les systèmes régionaux des droits de l'homme, le droit à la vérité s'est également vu reconnaitre, notamment par le système interaméricain des droits de l'homme qui, à travers les décisions de la CADH qui à considérer en 1997 dans l'affaire Castillo Páez que le concept du droit à la vérité venait de la doctrine et de la jurisprudence, influençant ainsi les DH et qu'il impose aux autorités étatique d'enquêter sur les faits ayant produit des violations de la CADH93.

Le droit à la vérité est très important pour les victimes, mais pas que. En effet, il est aussi utile pour une éducation de la société. Ainsi, les nouvelles générations en connaissance des causes, des violations et des conséquences qui ont découlées de ces violations, une prévention pour la lutte contre ces actions sera imminente. Enfin, pour pouvoir prendre une autre envole et oublier les traumatismes et les différentes violations, il faut avoir lu ou connu l'histoire, comme nous l'affirme Louis Joinet94.

2- Le droit imprescriptible à la réparation, un corollaire de l'imprescriptibilité des poursuites

Theo Van Boven écrit dans un rapport: « (...) l'application de la prescription prive souvent les victimes de violations graves des droits de l'homme de la réparation qui leur est due. Il faudrait que, par principe, les demandes de réparation de ces victimes ne soient soumises à aucune prescription. A cet égard, on devrait tenir compte du lien qui existe entre les violations flagrantes des Droits de l'Homme et les crimes les plus graves pour lesquels, selon un avis juridique autorisé, la prescription ne peut s'appliquer »95. Ce rapport montre que la réparation des victimes ne doit être soumise à aucune prescription puisque étant un doit pour les victimes. La prescription des réparations est encore envisageable pour les infractions qui ne relèvent pas de crimes internationaux. Toutefois, lorsque nous sommes en face des violations de DIH ou de DIDH, l'application de la prescription des réparations n'est plus envisageable, suivant le principe de l'imprescriptibilité des poursuites.

Si en droit interne il est difficile de concilier les prescriptions aux obligations des Etats de punir les auteurs de graves crimes internationaux, il est cependant possible en droit international que l'engagement de la responsabilité pénale individuelle de l'auteur de l'acte est considéré comme un élément essentiel du droit à réparation des victimes ; on pourrait même arguer du caractère

93 V. l'affaire Castillo Páez, du 3 novembre 1997, Série C n° 34, §§ 86 et 90.

94 In « Rapport sur la question de l'impunité des auteurs des violations des droits de l'homme (civils et politiques) », Doc.E/CN.4/Sub.2/1997/20/Rev.1), §50

95 Rapport final de T. VAN BOVEN, E/CN.4/Sub.2/1993/8, 2 juillet 1993.

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coutumier de cette obligation96. L'Etat engage sa responsabilité internationale, spécialement devant les Cours régionales de droits de l'homme, pour non-respect de cette obligation. Il convient donc de conclure que, pour certaines violations, le droit imprescriptible des victimes à réparation a pour corollaire l'imprescriptibilité des poursuites et des peines contre les auteurs de telles infractions97

Section II : Les impacts sur les présumés auteurs de crimes et la société

Les impacts des amnisties et des prescriptions pénales sur les présumés auteurs, les auteurs et la société feront l'objet dans cette section, d'une analyse minutieuse.

Paragraphe I : Sur les présumés auteurs de crimes

Les présumés auteurs des violations des droits de l'homme dans le contexte des CA se retrouvent dans un bon nombre de cas amnistiés ou bénéficient des prescriptions pénales qui, ont des effets non négligeables soit sur leurs condamnation soit sur la suite de leur vie dans la société. C'est pourquoi nous retenons l'effacement de la peine pour l'amnistie et l'oublie de l'acte délictueux au bout d'un temps déterminé par la loi pour les prescriptions pénales.

L'effacement de la peine concerne plus les amnisties que les prescriptions pénales. En effet, nous nous trouvons dans 3 cas distincts. D'abord, lorsque les poursuites contre le présumé auteur des violations n'ont pas encore été déclenché, la mise en oeuvre de l'amnistie vient arrêter la possibilité des poursuites.

Dans le deuxième cas, c'est lorsque les poursuites sont en cours et que la décision du juge est attendu pour rendre justice. Dans cette perspective, le prévenu amnistié bénéficiera d'un non-lieu de la part de la juridiction en charge de l'affaire. Ce qui est considéré comme une décision de relaxe.

Enfin, si le délinquant avait déjà été condamné pour son acte, la décision d'amnistie vient mettre fin à la condamnation et, les faits pour lesquels il a été condamné ne figureront pas dans son casier judiciaire. Aux termes de l'article 133-9 du CP français, « l'amnistie efface les condamnations prononcées. Elle entraine, sans qu'elle puisse donner lieu à la restitution, la remise de toutes les peines. Elle rétablie l'auteur ou le complice de l'infraction dans le bénéfice

96 R. MAISON, La responsabilité individuelle pour crime d'Etat en droit international public, Bruxelles, Bruylant/Université de Bruxelles, 2004. Cf aussi E. LAMBERT-ABDELGAWAD, « Existe-t-il une spécificité de la réparation pour crimes internationaux ? », in Les règles fondamentales de l'ordre juridique international, Journées franco-allemandes de la SFDI, Paris, Pedone, 2005, à paraître.

97 Hélène RUIZ FABRI, Recherche sur les institutions de clémence en Europe (Amnistie, Grace, Prescription).

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du suris qui avait pu lui être accordé lors d'une condamnation antérieure. ». Le Conseil constitutionnel français dans une décision ajoute « qu'il est de l'essence même d'une mesure d'amnistie d'enlever pour l'avenir tout caractère délictueux à certains faits pénalement répréhensibles, en interdisant toute poursuite à leur égard ou en effaçant les condamnations qui les ont frappées ; que la dérogation ainsi apportée au principe de la séparation des pouvoirs trouve son fondement dans les dispositions de l'article 34 de la Constitution qui font figurer au nombre des matières qui relèvent de la loi la fixation des règles concernant l'amnistie »98. Ici, le juge constitutionnel réaffirme l'idée de d'effacer toute peine et poursuite après le vote de la loi d'amnistie.

L'effacement de la peine par la mesure d'amnistie ne donne pas droit à une rétroactivité. En effet, après une condamnation, le délinquant plusieurs avantages, notamment professionnel. Mais, après la loi d'amnistie qui éteint sa condamnation, l'auteur des violations n'est plus en droit de réclamer une réintégration professionnelle. Cet argument est illustré par le CC français en 1988, dans sa décision n 88-244 DC du 20 juillet 1988, lorsqu'il affirme que : « l'amnistie ne comporte pas normalement la remise en état de la situation de ses bénéficiaires ».

En ce qui concerne enfin l'oublie de l'acte délictueux, il concerne les prescriptions pénales car pour ces mesures les peines ne s'effacent pas, mais sont juste oublié. Ainsi, si le présumé auteur commet à nouveau de tels actes, il sera considéré comme récidiviste du fait que son casier judiciaire aura toujours la mentions inculpé pendant une certaine période.

Paragraphe II : Impacts des Amnisties et prescriptions pénales sur la société

Les impacts des amnisties et des prescriptions sur la société sont fondé sur un développement économique et social (B), mais avant et surtout une restauration de la paix (A).

A- La Restauration de la paix

La restauration de la paix est l'un des bénéfices les plus importants que tire la société, des amnisties et des prescriptions pénales. En effet, on peut comprendre la restauration de la paix comme la remise en état stable, l'état d'avant-guerre, la société sur tous les plans.

L'amnistie et la prescription pénale sont deux pratiques qui permettent à la société de bénéficier de cet idéal. La société marquée par des divisions, et le besoin de vengeance des uns sur les

98 Décision 89-258 du 8 juillet 1989, Loi portant amnistie.

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autres fragilise tous les secteurs de la vie et, est incompatible à une vie d'ensemble dans le respect des lois du gouvernement.

Le fait d'effacer ou d'oublier certains crimes, cela permet de stabiliser le pays. Durant la période de la Justice transitionnelle en Afrique du Sud, les dirigeants de la transition ont fait comprendre à la population lors des consultations pour la recherche de la vérité que le droit à la paix est l'un des droits les plus précieux que l'on peut obtenir uniquement si on oubliait les violations des droits du passé, on amnistiait les différents acteurs puisque nécessaire pour la reconstruction du pays, et surtout pour le vivre ensemble.

Au-delà, cette paix est cause de développement notamment dans le domaine économique et social. Quid de ce développement.

Le Développement économique et social

Le développement économique et social est considéré comme la mutation dans les domaines scientifique, sanitaire, social, technologique et démographique que nous pouvons constater sur un lieu donné. A la sortie d'une crise ou ont été perpétrés les crimes les plus graves, il est nécessaire de mettre en place des dispositions favorisant ce développement socio-économique. Ainsi, l'amnistie et la prescription pénale sont deux pratiques permettant à atteindre cette finalité.

Les pratiques d'amnistie et de prescription pénale, comme des institutions qui se fondent sur la réconciliation nationale et la paix durable permettent un développement industriel et un développement par les coopérations.

Le développement industriel nécessite la paix et la stabilité nationale. Les amnisties et les prescriptions pénales en oeuvrant sur ces idéaux aident à l'implantation des industries qui elles relèvent l'économie et le social des habitant. Un exemple peut être pris avec l'Afrique du sud qui, pendant plusieurs années à connue des tensions liées à l'Apartheid. A la fin des tensions, des lois d'amnistie et de prescriptions des peines avaient été prises. La conséquence après la prise de ces lois est que ce pays est devenu l'un des plus prospères économiquement et se place de nos jours parmi les pays émergent. La stabilité du pays a permis une industrialisation et le développement des plusieurs secteurs primaires qui a développé le pays.

Enfin, les amnisties et les prescriptions pénales toujours dans l'optique de favoriser la stabilité durable, permet un développement économique et social par la coopération internationale. La coopération internationale est encouragée par l'article 2 du PIDESC en ces

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termes : « Chacun des États Parties au présent Pacte s'engage à agir, tant par son effort propre que par l'assistance et la coopération internationales, notamment sur les plans économique et technique, au maximum de ses ressources disponibles, en vue d'assurer progressivement le plein exercice des droits reconnus dans le présent Pacte par tous les moyens appropriés, y compris en particulier l'adoption de mesures législatives. ».

La coopération internationale favorise ainsi la prise en compte des projets économiques par des bailleurs de fond, les prêts par les différentes banques et autres institutions financières internationales. L'exemple le plus palpable en Afrique est celui de la Côte-d'Ivoire qui, depuis plusieurs années après le conflit de 2010 voit la coopération internationale développer son économie touristique. On peut parler également du plan social mis en place par la cation de ce pays avec l'UE qui permet de construire des écoles et des hôpitaux dans les zones les plus reculées du pays, ce qui change ou du moins développe le niveau de vie social dans ces contré. Avec des enfants qui s'instruisent, des femmes qui accouchent dans des bonnes conditions et des maladies qui peuvent enfin être soignées, ce qui permet de remarquer une hausse importante de l'espérance de vie.

Les amnisties et les prescriptions pénales ont de ce fait un impact considérable sur le développement économique et social de tous les pays détruits par la guerre ou des violences ayant divisées la population.

CONCLUSION

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Si les dispositions prévues dans les codes pénaux nationaux règlent dans les détails la discipline des « institutions de clémence » que sont l'amnistie, et la prescription, elles doivent nécessairement être évaluées à la lumière des principes constitutionnels et internationaux en la matière.99

En effet, la pratique des amnisties et des prescriptions pénales qui, remonte à des siècles avant même la mise en place d'une société internationale est toujours présente dans les différents Etats, malgré les tentatives d'exclusion par le DIDH. Ces tentatives qui ont pour but d'empêcher l'impunité ne trouvent pas l'acceptation de tous les Etats, ce qui a pour conséquence une certaine acceptation de ces institutions de clémence en DIDH, bien qu'avec des conditions.

Si le DIDH veut à tout prix bannir les institutions de clémence, ce n'est pas toujours à cause de leur nature mais plutôt de la pratique qui sont fait de ces institutions par les Etat car, on constate de plus en plus que ce sont des institutions qui permettent aux acteurs étatiques de se protéger contre les éventuelles poursuites sur les violations des droits de l'homme dont ils peuvent être à l'origine. Les fondements social et moral des amnisties et des prescriptions pénales, le but visé dans leur manifestation qui est la réconciliation nationale et la paix durable sont des éléments qui nous ont permis de comprendre leur impact sur la société de manière générale, mais plus particulièrement les auteurs des infractions et les victimes.

Dès lors, quels peuvent être les mécanismes mis en place par le DIDH pour protéger les victimes ?

99 Hélène Ruiz Fabri

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DEUXIEME PARTIE : LES MECANISMES DE PROTECTION

 
 

DES DROITS DES VICTIMES APRES LA MISE EN OEUVRE DES AMNISTIES ET DES PRESCRIPTIONS PENALES.

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La problématique liée aux Droits des victimes est vaste et difficile à cerner car, n'étant pas limité dans le temps ou même restreint à une surface donnée, par ailleurs ne peut donc faire l'objet de solutions biens précises. Cependant, trouver des éléments plus ou moins satisfaisants pour la protection des droits des victimes importe une analyse de différents cas et une connaissance des textes.

Si les victimes ont longtemps été à l'écart dans les décisions notamment pénales aux niveaux national et international, elles sont depuis nombreuses faire entendre leurs voix pour la protection de leurs propres droits, bien que cela est encore rejeté par les instances, comme l'explique une victime : « Quand mon fils âgé de 16 ans a été tué par un conducteur ivre, je n'ai pas été autorisée à faire de déclaration d'impact sur la victime ni à présenter au juge les répercussions du décès de mon enfant sur notre famille. Mais le défendeur a pu faire défiler toute une série de témoins en sa faveur »100

Les Nations Unies étant l'organisation mondiale des peuples et des Etats, fait des droits de l'homme un objectif et un ultime principe. A ce titre, les mécanismes de protection de ces droits sont le coeur de son système et doivent constituer pour les victimes et leurs défenseurs, en désespoir de cause, la seule voie de recours pour obtenir l'interpellation de leurs oppresseurs et la cessation de la répression qui les vise. Et seul le règlement judiciaire, de l'avis du professeur Emmanuel DECAUX, traduit l'inspiration profonde du « principe de la justice101 » qui, pour être véritablement équitable, implique, de l'avis du rapporteur spécial Cherif BASSIOUNI, « le droit des victimes à un recours, leur droit d'accès direct aux instances judiciaires, leur droit à réparation102 ». C'est dans ce sens que l'appareil juridictionnel, mais aussi extra-judiciaire peut nous permettre de lutter contre l'impunité des amnisties et des prescriptions pénales, ce qui va contribuer à la protection des droits des victimes (CHAPITRE 1). Toutefois, les solutions relatives à la protection des DH étant évolutives, d'autres solutions peuvent être examinées (CHAPITRE 2).

100 DIXIEME CONGRES DES NATIONS UNIES POUR LA PREVENTION DU CRIME ET LE TRAITEMENT DES DELINQUANTS, Témoignage rapporté par le Département de l'information de l'ONU.

101 DECAUX (Emmanuel), Justice et Droits de l'homme, in Pédone, 2019, 186p.

102 Conseil Economique et Social, Droits civils et politique et, notamment : indépendance du pouvoir judiciaire, administration de la justice, impunité. Le droit à restitution, indemnisation et réadaptation des victimes de violations flagrantes des droits de l'homme et des libertés fondamentales, Rapport final du Rapporteur spécial Cherif BASSIOUNI, présent en application de la Résolution 1999/33 de la Commission, E/CN.4/2000/62, 18 janvier 2000 ( http://www.kuleuven.ac.be/jat/chap2-p85-92-10decok_files/images002.gif), pp 85-92.

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CHAPITRE III : LES MECANISMES JURIDICTIONNELS ET EXTRA-JURIDICTIONNELS DE PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES.

Plusieurs mécanismes interviennent pour permettre à la société de lutter contre l'impunité et les violations graves de droit international des droits de l'homme. C'est dans cette perspective que nous allons étudier tour à tour les mécanismes juridictionnels (SECTION 1) et les mécanismes extra juridictionnels (SECTION 2) de garanti des droits.

SECTION I : Les mécanismes juridictionnels

Les mécanismes juridictionnels qui seront abordés dans cette partie sont ceux qui opèrent en droit interne (Paragraphe 1) et en droit international (2).

Paragraphe I : les juridictions nationales

Dans les juridictions nationales, nous nous attarderons sur le juge pénal à travers ses compétences (A), et sur le contentieux devant ce juge si particulier (B).

A- La compétence du juge pénal

Le juge pénal a plusieurs compétences, parmi lesquelles nous pouvons citer la compétence matérielle, la compétence territoriale et la compétence personnelle.

S'agissant de la compétence matérielle et suivant le droit français, c'est le juge d'instruction qui est compétent en matière de crimes. Pour l'instruction des affaires relevant des juridictions pénales, il a le pouvoir de procéder par tous les moyens légaux à la prise d'informations qu'il juge nécessaire pour la manifestation de la vérité103. Toujours dans le cadre de ses compétence matérielle, le JI peut délivrer des mandats de comparution, d'amener ou d'arrêt, comme l'indique les articles 122 et suivant du CPP104; d'ordonner le placement d'une personne mise en

103 Ces moyens sont souvent les auditions des temoins ou des parties civiles, d'interrogatoires de personnes mises en examen, de confrontations, de perquisitions, de saisies, de transports sur les lieux, de reconstitutions, d'expertises confiées à des tiers, d'interceptions de communications. La recherche de la manifestation de la vérité doit se faire conformément à la loi et, en tout état de cause, avec loyauté et sans porter atteinte aux droits de la défense.

104 Le juge d'instruction peut, selon les cas, décerner mandat de recherche, de comparution, d'amener ou d'arrêt. Le juge des libertés et de la détention peut décerner mandat de dépôt.

Le mandat de recherche peut être décerné à l'égard d'une personne à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction. Il ne peut être décerné à l'égard d'une personne ayant fait l'objet d'un réquisitoire nominatif, d'un témoin assisté ou d'une personne mise en examen. Il est l'ordre donné à la force publique de rechercher la personne à l'encontre de laquelle il est décerné et de la placer en garde à vue.

Le mandat de comparution, d'amener ou d'arrêt peut être décerné à l'égard d'une personne à l'égard de laquelle il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elle ait pu participer, comme auteur ou complice, à la commission d'une infraction, y compris si cette personne est témoin assisté ou mise en examen. Le mandat de comparution a pour objet de mettre en demeure la personne à l'encontre de laquelle il est décerné de se présenter devant le juge à la date et à l'heure indiquées par ce mandat.

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examen sous contrôle judiciaire et d'en fixer les obligations (articles 137-2 et 138 et suivant du CPP) ; de saisir le Juge des Libertés et de la Détention (JLD) d'une demande de placement de la personne mise en examen sous mandat de dépôt, d'une demande de prolongation de sa détention ou d'examen d'une demande de mise en liberté; d'ordonner la mise en liberté d'une personne placée en détention provisoire; de saisir la chambre de l'instruction (juridiction d'appel en matière d'instruction) d'une demande aux fins d'annulation d'un acte qui lui paraîtrait frappé de nullité; d'apprécier, lorsque la procédure lui paraît terminée, si les charges réunies par l'information sont suffisantes pour entraîner la saisine d'une juridiction de jugement (articles 175 et suivant du CPP); de prononcer contre la partie civile, en cas d'ordonnance de non-lieu ou de refus d'informer, une amende civile pour constitution abusive ou dilatoire.

S'agissant ensuite de la compétence territoriale, il sied de noter que la compétence territoriale du juge pénal est le fait que ce dernier ne peut connaitre que des affaires ou infractions qui ont été commis dans les limites territoriale de sa juridiction. Ainsi lorsqu'un crime a eu lieu au Congo, c'est le juge pénal congolais qui est habilité à connaitre de l'affaire et non le juge béninois, même si le présumé criminel est de nationalité béninoise, ceci en vertu du principe de territorialité de la peine. Ainsi, Au regard des dispositions du CPP105, le JI territorialement est compétent pour instruire les infractions qui ont été commises:

1°dans son ressort;

2°en dehors de son ressort si l'une des personnes soupçonnées d'y avoir participé :

... a) y réside ;

... b) y a été arrêtée même pour une autre cause ;

... c) y est détenue même pour une autre cause.

Toutefois, ce principe connait des aménagements, notamment avec les accords d'extradition. Le JI pourra également être compétent sur un ressort plus étendu, pour des infractions commises à l'étranger, des infractions en matière économiques et financière ou encore en matière de terrorisme106.

Le mandat d'amener est l'ordre donné à la force publique de conduire immédiatement devant lui la personne à l'encontre de laquelle il est décerné.

Le mandat d'arrêt est l'ordre donné à la force publique de rechercher la personne à l'encontre de laquelle il est décerné et de la conduire devant lui après l'avoir, le cas échéant, conduite à la maison d'arrêt indiquée sur le mandat, où elle sera reçue et détenue.

105 Artcle 52 du CPP français.

106 Site du Ministère de la justice française, visité le 10/10/2020.

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B- Le contentieux devant le juge pénal

En parlant du contentieux devant le juge pénal, nous parlerons exclusivement de la place de la victime dans le procès pénal. En effet, La victime a été durant de longues décennies la grande absente du procès pénal, au profit d'un duel « Parquet-délinquant » et ce depuis que l'Etat s'est arrogé le monopole de la poursuite publique, aux alentours du XIVe siècle107. Toutefois, depuis une vingtaine d'années, on assiste à une véritable révolution législative pour reconnaitre effectivement les droits des victimes dans le procès pénal. Aujourd'hui la victime intervient dans le procès pénal comme une troisième partie, aux côtés du ministère public et de la partie défenderesse. Elle peut ainsi par exemple faire des demandes d'actes au stade de l'instruction et même avant cela dispose de la faculté de mettre en mouvement l'action publique. En conséquence, elle exerce un véritable poids face au Ministère Public, puisqu'elle peut aller à l'encontre de la volonté de ce dernier. On peut s'interroger ainsi sur la vraie place qu'occupe la victime dans le procès pénal. De cette interrogation, deux courants s'opposent. En effet, une partie de la doctrine et des praticiens est favorable à une place restreinte de la victime dans le procès, alors qu'à l'inverse une autre partie dénonce des avancées jugées « timides » ou encore « insuffisantes » en la matière. « Parmi, les « opposants » à un rôle actif de la victime dans le procès pénal, certains auteurs vont jusqu'à affirmer que la victime ne doit pas intervenir du tout dans ce procès, et qu'elle doit en être purement et simplement exclue. Selon eux, une immixtion de la victime dans la sphère pénale correspond ni plus ni moins à un retour à la vengeance privée, à « un archaïsme néfaste » pour notre système judiciaire, la victime s'apparentant alors à « un acteur sauvage » »selon les termes de Daniel Soulez-Larivière.

Pour Jean Granier dénonçais la montée de la présence de la victime depuis 1958 lorsqu'il affirmait « la constitution de partie civile [déshumaniserait] la victime pour en faire un animal juridique »108. De façon un peu plus nuancée, Xavier PIN estime que cette privatisation du procès pénal conduit à un « brouillage des [ses] finalités du procès pénal et au recul du caractère impératif de ses règles »109. Toujours dans le même sens, si le préjudice subi par la victime n'est évidemment pas remis en cause, on estime que ce dernier peut être et même doit être réparé par le biais d'une action en réparation engagée devant les tribunaux civils.

107 Jean Pierre ALLINNE, les victimes des oubliées de l'Histoire du Droit ? In OEuvre de justice et Victimes (volume 1), extrait des sessions de formation du site de l'ENM.

108 J GRANIER, la partie civile au procès pénal, in RSC 1958, p. 11.

109 Xavier PIN, la privatisation du procès pénal, in RSC et de droit pénal comparé 2002, n°2, p. 245-261.

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A cet égard, Marie-Laure RASSAT, dans un Rapport relatif à la présomption d'innocence remis au Garde des Sceaux en 1996, justifiait cette exclusion par le manque d'objectivité de la victime. Selon elle, l'indemnisation allouée à cette dernière dépendant de la culpabilité de l'auteur présumé, elle a nécessairement « intérêt à charger, en mentant au besoin, la personne poursuivie ».

Cependant, d'autres auteurs pensent le contraire, c'est le cas de Robert Cario qui soutient au contraire que la place conférée aujourd'hui à la victime reste encore insuffisante, alors que l'Etat paraît dépassé par la quantité de procédures engagées''0. En outre, selon lui, « les victimes ne recherchent pas seulement, dans l'oeuvre de justice, la sanction de l'infracteur, ni l'indemnisation pécuniaire du préjudice subi. Elles réclament surtout que la vérité soit affirmée dans sa complexité et, davantage encore, que leurs droits à la reconnaissance, à l'accompagnement et à la réparation globale des traumatismes subis soient effectivement garantis »'''.

Et il apparaît en effet a priori en tous cas, difficile d'exclure totalement la victime du procès pénal. S'il appartient effectivement aux représentants de l'Etat, à savoir le Ministère Public de poursuivre le trouble causé par l'infraction, la victime n'a-t-elle pas une légitimité à intervenir dans ce procès alors qu'elle a, elle aussi, subi le trouble causé, et ce autrement que par le seul biais d'une indemnisation purement financière ? Les professionnels de l'aide aux victimes expliquent à cet égard l'importance du procès pénal pour la victime, dans son processus de reconstruction et de « réinsertion » dans la société, suite au traumatisme subi par l'infraction. Dans le même sens, le procès est jugé nécessaire dans la mesure où il va permettre de trouver sa place transitoire de victime. En effet, il rétablit les individus comme sujet de la loi, alors que l'infraction avait placé l'agresseur et l'agressé hors la loi.''2

Ces mêmes professionnels vont encore plus loin, puisqu'ils insistent en outre sur la nécessité d'un procès où la victime serait bien traitée, afin d'éviter ce qu'ils appellent une « sur victimisation » ou une « victimisation secondaire »''3. Ainsi, comme le souligne Liliane DALIGAND dans son Rapport sur la bientraitance des victimes, « la reconnaissance de leur

110 Robert CARIO, « victimes d'infractions », article précité »

111 Robert CARIO, in OEuvre de justice et Victimes (volume 1), introduction, extrait des sessions de formation du site de l'ENM.

112 Liliane DALIGAND, extrait de la deuxième concertation interrégionale menée par le Secrétariat d'Etat aux droits des victimes, CA Versailles, 4 avril 2005, la victime et le procès pénal ; JAC n°54.

113 La bientraitance des victimes, Liliane DALIGAND, Rapport remis au Garde des Sceaux en mars 2002, p.6

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statut au cours des procédures, en particulier pénales, (...) concourt à leur apaisement et à leur reconstruction psychique par la réparation symbolique ».

Enfin, d'autres auteurs (Robert CARIO, Denis SALAS...) mettent aussi en lumière les avantages de ce qu'ils appellent la justice restauratrice.

Paragraphe II : Les juridictions internationales

Au regard du manque de volonté des autorités des différents Etats qui appliquent les amnisties et les prescriptions pénales, de garantir les droits des victimes notamment en poursuivant les présumés auteurs des violations des H, les victimes se tournent vers les Tribunaux régionaux des droits de l'homme (A) et parfois saisissent la CPI (B).

A- Les Cours régionales des droits e l'homme

Parler des Cours régionaux dans la protection des droits de l'homme notamment des droits des victimes notamment dans le cadre des amnisties et des prescriptions pénales, importe d'évoquer le système américain des droits de l'homme, le cadre européen, mais aussi celui de la Cour africaine.

Dans le contexte américain, la CIDH interdit de manière formelle les amnisties et les prescriptions pénales dans le but de protéger les victimes contre toute forme d'injustice à leur encontre. En effet, su basant sur le respect de la CIA, la cour s'est indignée à plusieurs reprises sur les pratiques d'impunité. C'est ainsi que dans l'affaire Barrios Altos114, la Cour déclare l'incompatibilité de certains procédés avec les obligations de poursuite et de punir mentionnées dans la Convention115.

Par ailleurs, dans le système européen, la question est plus de savoir si les victimes des violations internationales des droits de l'homme ont droit à la réparation individuelle ? La Cour

114 Series C, No. 87, Case of Barrios Altos vs. Peru, Jugement du 30 novembre 2001. Mais v. aussi l'affaire The Last Temptation of Christ où les juges notent comment: «[...] the general obligation of the State, established in Article 2 of the Convention, includes the adoption of measures to suppress laws and practices of any kind that imply a violation of the guarantees established in the Convention, and also the adoption of laws and the implementation of practices leading to the effective observance of the said guarantees» (Series C No. 73, The Last Temptation of Christ Case (Olmedo Bustos et al.), Jugement du 5 février 2001, § 85).

115 «Amnesty Laws No. 26479 and No. 26492 are incompatible with the American Convention on Human Rights and, consequently, lack legal effect». Et encore: «the State of Peru should investigate the facts to determine the identity of those responsible for the human rights violations referred to in this judgment, and also publish the results of this investigation and punish those responsible». Series C, No. 87, Case of Barrios Altos vs. Peru, Jugement du 30 novembre 2001, § 4 et § 5. 90 Présentée par la Commission au sens des articles 67 de la Convention et 58 du Règlement de procédure. 91 Series C No. 83, Case of Barrios Altos vs. Peru. Interpretation of the Judgment on the Merits. (Art. 67 American Convention on Human Rights). Judgment of September 3, 2001.

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ne se prononce véritablement pas sur ce sujet, mais il est important de constater que la protection de toutes les formes des droits de l'homme et une priorité pour la Cour, ainsi les différents droits des victimes sont protégés par des textes comme la Convention européenne. Les prescriptions et les amnisties n'étant pas des mesures assurant les droits des victimes, ne sont pas acceptés, relativement à la Convention européenne contre l'imprescriptibilité des peines.

La CEDH est également protectrice des droits de l'homme dans la mesure où elle s'appuie sur l'article 34 de la Convention, qui affirme que « la Cour peut être saisie d'une requête par une personne physique, toute organisation non gouvernementale ou tout groupe de particuliers qui se prétend victime d'une violation (...) des droits reconnus dans la convention ou ses protocoles ». Ainsi, la protection des victimes dans cette perspective se manifeste par le mode de saisine de la Cour, qui est ouvert à tous.

La protection de la victime passe également par des garanties procédurales. En effet, à l'observation de l'Affaire Kaya contre la Turquie, du 19 février 1998, la protection de la victime a impliqué pour le juge que les agents de l'Etat aient l'obligation de rendre compte de l'usage de la force meurtrière : leurs actes devant être soumis à des enquêtes publiques et indépendantes, ce qui protège les victimes. La protection procédurale des droits des victimes est en quelque sorte aussi reconnu par l'article 3 de la convention et par la meme occasion par la Cour, notamment dans plusieurs affaires comme celles de Labita contre Italie, 6 avril 2000, § 131 ; Dikme contre Turquie, 11juillet 2000, § 101, etc.).

En ce qui concerne enfin le système régional africain, nous pouvons dire que la CADHP est comme les autres Cours régionales, contre les impunités et les violations des droits des victimes. Dès lors, en se basant sur les principes de la Charte et des autres conventions internationales de protection des droits de l'homme, la CADHP refuse toute mesure violant les droits des victimes. C'est le cas des amnisties et des prescriptions pénales. C'est dans cette logique de protection des victimes que le Tribunal Spécial pour la Sierra Leone, seulement 4 mois après l'entrée en vigueur de la Cour, a dénoncé sous le respect de cette dernière, les pratiques d'amnistie dans l'affaire Procureur contre Monina Fofana.

B- La protection des droits des victimes par la CPI

Relativement au Statut de la CPI qui pose la question de l'imprescriptibilité des crimes, il sied de noter que cette institution est une véritable arme pour la protection des droits des victimes. En effet, l'obligation de poursuite présente dans le préambule du Statut de Rome permet de protéger les victimes d'éventuelles violations.

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Suivant la question des amnisties en RCA, le Procureur avait en 2007 décidé d'ouvrir une enquête contre les présumés coupables de viols et d'autres crimes internationaux, malgré que ceux-ci avaient été amnistié par des lois nationales. Ce qui a permis aux victimes de s'exprimer et de faire connaitre les atrocités dont elles ont été victime.

L'ouverture des enquêtes par le Procureur a entrainé en 2008 le dépôt d'une requête devant la Chambre préliminaire III, des mandats d'arrêt internationaux contre les présumés coupable. C'est le cas de J-P BEMBA GOMBO116. Dans cette affaire de BEMBE, les victimes ont été protégées car leurs droits étaient mis en avant. La CPI a permis aux victimes d'exercer leur droit à un procès équitable et de faire savoir que leurs souffrances devant une juridiction impartiale.

« Affirmant que les crimes les plus graves qui touchent l'ensemble de la communaut6 internationale ne sauraient rester impunis et que leur répression doit être effectivement assurée par des mesures prises dans le cadre national et par le renforcement de la coopération internationale », la CPI met en place toutes les dispositions permettant à ce que les victimes entrent dans leurs droits et que les auteurs présumés des violations soient mis aux arrêts. C'est le sens même de l'imprescriptibilité des crimes dont parle l'article 29 en indiquant que « Les crimes relevant de la comp6tence de la Cour ne se prescrivent pas ».

Enfin, la CPI entant que juridiction peut être considéré comme un rempart dissuasif contre les violations des droits de l'homme et de Droits international humanitaire. Elle est très souvent lente et lourde dans ses jugements et peut parfois se voir refuser un procès équitable aux victimes, du fait que ces derniers peuvent mourir après de longues périodes sans réparation des violations subits.

SECTION II : Les mécanismes extrajudiciaires de protection des droits des victimes : la justice transitionnelle.

La Justice Transitionnelle désigne un ensemble de mesures judiciaires et non judiciaires permettant de remédier au lourd héritage des abus des droits humains dans les sociétés qui sortent d'un conflit armé ou d'un régime autoritaire. Pour son application, elle obéit à des conditions et produit des effets (Paragraphe 1). Sa manifestation nous sera démontrée par l'expérience centrafricaine de cette Justice (Paragraphe 2).

116 CPI, Communiqué de presse du 21 mars 2016, La Chambre de première instance III de la CPI déclare J-P BEMBA coupable de crime de guerre et de crime contre l'humanité, ICC-CPI-20160321-PR1200.

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Paragraphe I : Conditions et effets de la mise en oeuvre de la justice transitionnelle

Les conditions et les effets de la justice transitionnelle nous permettent d'énumérer d'une part les conditions de la mise en oeuvre de la JT (A) avant de montrer les effets que cette justice peut engendrer (B).

A- Les conditions de la mise en oeuvre de la Justice Transitionnelle

Avant de parler des conditions de la mise en oeuvre des amnisties, il est important de parler des conditions de leur adoption. En effet, toute loi d'amnistie pour être admise, doit être l'émanation de la volonté du peuple. C'est au peuple que revient le choix de mettre en place une loi d'amnistie qui sera valable sur le plan interne et international. La légitimité de l'amnistie réside dans cette perspective d'une consultation qui doit inclure tant que possible toutes les composantes sociales, y compris les minorités. Ces consultations peuvent pour avoir l'avis du plus grand nombre de personne, peuvent se présenter sous forme de réunions.

En ce qui concerne les conditions liées à la mise en oeuvre, il est important de les énumérer, suivant les directives de Belfast117 qui affirme que « Tout auteur de crimes peut être tenu de remplir des conditions précises avant d'obtenir une amnistie (...). Les conditions préalables à l'attribution d'une amnistie peuvent inclure :

a) La soumission de demandes individuelles

b) La reddition et la participation aux programmes de désarmement, démobilisation et réintégration

c) La participation au processus de justice transitionnelle ou réparatrice

d) La divulgation totale de l'implication personnelle aux infractions, avec des sanctions pour faux témoignage

e) La révélation d'informations sur l'implication de parties tierces dans les infractions

f) Le témoignage (public ou privé) dans une commission de vérité, une enquête publique ou tout autre processus de rétablissement de la vérité

g) Le témoignage lors d'un procès des personnes qui n'ont pas bénéficié de l'amnistie ou qui n'y sont pas admissibles

h) La restitution des biens acquis de manière illicite

i) La contribution matérielle et/ou symbolique aux réparations ».

117 Directives de Belfast sur l'amnistie et la responsabilité, p.15-18

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Aussi, d'autres conditions peuvent être ajouté pour ne pas assister aux lois d'amnistie abusives ou violant encore d'autre droits fondamentaux. C'est le cas de la condition empêchant les amnisties de violer les droits des victimes à la vérité et aux réparations.

Pour les NU, évaluer toute amnistie, demande de se poser un certain nombre de question :

« La mesure légale (proposée) est-elle une amnistie ? A-t-elle pour effet juridique d'empêcher le déclenchement de l'action publique, de l'action civile ou de l'une de l'autre à la fois ?

L'amnistie (proposée) exclut-elle complètement et clairement de sa portée tous les types de comportement qui, en DI et selon la politique des NU, devraient faire l'objet d'une enquête effective et, si les éléments de preuve le justifient, de poursuites pénales et de réparations ?

L'utilisation d'un projet d'amnistie en tant que mesure de désarmement modifie-t-elle les conclusions de l'analyse juridique de cette mesure ?

Une amnistie (proposée) qui, pour une raison ou une autre, serait illicite, peut-elle être légitimée si elle est entérinée par un processus démocratique »118 ?

Les conditions de la mise en oeuvre étant évoquée, qu'en est-il des effets de cette mise en oeuvre ?

B- Effets de la mise en oeuvre de la Justice Transitionnelle

Considéré par plusieurs comme un malheur pour la justice car parfois violant les droits des victimes, la Justice Transitionnelle est considéré par Pierre HAZAN comme « une rare source d'espoir pour l'humanité »119. En effet, le but premier de la JT est de réconcilier les individus, ce qui en fait le premier et peut être même le meilleur effet. Pour l'auteur de Juger la guerre, juger l'histoire, si « le crime contre l'humanité délie les hommes, la justice transitionnelle entend accomplir le trajet inverse, celui qui mène à la refondation d'une communauté politique ».

Ensuite, la JT a un effet de remise de paix durable. En effet, découlant d'un traité, la Justice transitionnelle est l'objet de la volonté générale de toutes les parties présentes au conflit, d'arrêter les hostilités et de trouver enfin un moyen d'assoir une paix. C'est donc la participation

118 Nations Unies, Les instruments de l'état de droit dans les sociétés sortant d'un conflit, Genève 2009, pp 3741.

119 P.hazan, cité par Alexandre Laignel-Lavastine in Les effets de la justice transitionnelle.

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de toutes les parties qui rend la paix durable. La paix qui est cause de la prospérité économique et sociale des Etats.

Un autre effet, la mise en oeuvre de la Justice Transitionnelle permet aux victimes de pouvoir se prononcer sur les différentes violations dont elles étaient victimes. Elle permet de connaitre la vérité, comme cela a été le cas avec la JT en Afrique du Sud qui, a permis de mettre en lumière toute la vérité. Ceci permettant au peuple Sud-africain de comprendre la situation, mais aussi et surtout de retracer l'histoire notamment avec les générations futures.

Au-delà de ces effets, nous pouvons donner avec Mark Freeman120 les buts à atteindre des différents amnisties, ainsi nous comptons : l'encouragement des combattants et auteurs des violations des droits de l'homme à rendre les armes et à se désarmer, persuader les dirigeants autoritaires à céder le pouvoir, instaurer la confiance entre les belligérants, faciliter les accords de paix, libérer les prisonniers politiques, encourager le retour des exilés, inciter les auteurs des crimes à participer au programme de vérité ou de réconciliation.

Paragraphe II : L'expérience centrafricaine de la justice transitionnelle

Dans le souci de remettre en place la stabilité et la réconciliation nationale, les différentes parties de la crise centrafricaines ce sont mises d'accord dans l'accord de Khartoum, d'élaborer ou de recourir à un certain nombre de mécanismes. C'est le cas de la Commission Justice Vérité, Réparation et Réconciliation, mais aussi du fond de soutien des victimes.

A- La Commission Justice, Vérité, Réconciliation et Réparation

La CJVRR a été mise en place en RCA pour venir en aide aux victimes des violations et à la société meurtrie par les atrocités pendant la période de l'instabilité. Elle met en lumière la vérité et permet d'accorder des réparations afin de trouver une réconciliation nationale. Elle est donc importante et a fait ses oeuvres lors de la période des amnisties en RCA. Sa valeur est reconnue par le DIDH. C'est ainsi que la Commission Interaméricaine des Droits de l'homme affirme dans un rapport de 1999 que « La valeur des commissions vérité réside dans le fait qu'elles sont créés, non pas avec le postulat qu'il n'y aura pas de procès, mais afin de constituer un pas vers la connaissance de la vérité et, en fin de compte, pour que la primauté de la justice soit garantie121 ».

120 Mark Freeman, Necessary Evils : Amnesties and Search for Justice (Cambridge University).

121 Commission Interaméricaine des Droits de l'homme, Rapport n.136/99, Affaire 10.488, Ignacio Ellacuria et al. (Salvador), 22 décembre 1999, paragraphes 229-230. Traduction non officielle.

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Toutes les victimes des différends conflits ont le même sentiment de rechercher des réparations sur les violations subi. Ces réparations ne peuvent passer que si les autorités mettent en place des mécanismes permettant à faire triompher la vérité. La vérité qui est un droit pour les victimes est aussi importante pour le droit de mémoire car, la vérité dont il s'agit n'est pas seulement pour les victimes, mais aussi pour leurs descendants et plus généralement pour la société entière.

Dans l'Ensemble des principes actualisés contre l'impunité, les Principes 4, 2 et 5 précisent : « Indépendamment de toute action en justice, les victimes, ainsi que leurs familles et leurs proches, ont le droit imprescriptible de connaitre la vérité sur les circonstances dans lesquelles ont étés commises les violations et, en cas de décès ou de disparition, le sort qui a été réservé à la victime.» ;

« Les victimes et leurs représentants devraient être habilités à rechercher et à obtenir des informations sur les causes qui ont conduit à leur victimisation et sur les causes et conditions propres aux violations flagrantes du Droit international des droits de l'homme et aux violations graves du Droit international humanitaire, et avoir le droit d'apprendre la vérité sur ces violations » ;

« Chaque peuple a le droit inaliénable de connaitre la vérité sur les événements passés relatif à la perpétration de crimes odieux , ainsi que sur les circonstances et les raisons qui ont conduit, par la violation massive ou systématique des droits de l'homme, à la perpétration de ces crimes. L'exercice plein et effectif du droit à la vérité constitue une protection essentielle contre le renouvellement des violations » ;

« Il appartient aux Etats de prendre les mesures appropriées, y compris les mesures destinées à assurer l'indépendance et le fonctionnement efficace de la justice, pour rendre effectif le droit de savoir. Au titre des mesures destinées à garantir ce droit, les procédures non judiciaires peuvent être menées en complément de l »action des autorités judiciaires. Les sociétés qui ont connu des crimes odieux à grande échelle ou systématiques peuvent avoir intérêt notamment à ce qu'une commission de vérité ou une commission d'enquête soit créée pour établir les circonstances entourant ces violations afin de faire jaillir la vérité et d'empêcher la disparition d'éléments de preuve.».

Apres plusieurs années, on constate que la CJVRR a été effective, mais n'a pas atteint tous ses objectifs puisque d'abord restée un grand moment consultatif, avant de se lancer dans son but de réparation. Ce manquement a entrainé une disparition de certaines preuves, de certains

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témoins et victimes qui sont finalement morts pour cause de non-assistance. Ce qui pose le problème du fond de soutient des victimes qui, est un élément fondamental pour la mise en place effective d'une Commission vérité.

B- Le fond de soutien des victimes

Le fond de soutien aux victimes est une initiative qui permet aux victimes de bénéficier d'une assistance psychologique, médicale et même parfois matérielle au regard des violations dont ils étaient victimes. Dans le cadre particulier de la RCA, un fond de soutien aux victimes a été créé par la CPI. Ce fond avait pour but de fournir une aide voire réparé dans une certaine mesure les préjudices subis par les victimes et leurs familles. C'est dans cette perspective d'accompagnement que le Directeur du Conseil du fond au profit des victimes avait déclaré qu'il « est conscient des profondes souffrances des victimes du conflit dans la situation en République centrafricaine, en particulier les victimes de violence sexuelles et sexistes, et prend soigneusement note des nombreuses preuves de la souffrance des victimes dans le contexte de l'affaire Bemba. Indépendamment de l'issue judiciaire, les victimes dans l'affaire Bemba sont, par définition, des victimes de la situation en RCA. Le fond au profit des victimes souhaite affirmer aux victimes ayant subis un préjudice dans la situation en RCA : Vous n'êtes pas oubliées. Les préjudices que vous avez subis sont reconnus et appellent de tout urgence une réponse significative ».

Il faut reconnaitre par-là que la CPI de manière formelle, puisque mettant en place une institution pour accompagner les victimes des violations des droits de l'homme, reconnait qu'il faut accompagner les victimes puisque les amnisties et les prescriptions pénales ne permettent pas toujours de les assister.

Apres la mise en place de la justice transitionnelle, les victimes dans la plupart des cas, ayant perdu tous leurs biens et ayant été traumatisés, ne réclament que du soutien et de l'accompagnement. C'est ainsi que certains ont été interrogés et ont pu affirmer « Quand nous sommes allés à la CPI, la Cour nous a garanti de faire quelque chose, là il n'y a rien, on va tous mourir, qu'est-ce que la Cour peut faire pour nous ? Seule notre avocat nous aide. Depuis tout ce temps la CPI ne fait que regarder, elle ne fait que tourner en rond. Je voudrais qu'on me donne de l'argent pour vendre, pour m'occuper de mes enfants, pour me soigner, ou avoir une maison à moi pour que j'y habite avec mes enfants... 122». Ce témoignage montre à

122 FIDH - Les points de vu des victimes de violences sexuelles en matière de réparation dans l'affaire Bemba devant la CPI en novembre 2017.

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suffisance la nécessité du fond de soutien aux victimes après de graves violations des Droits de l'homme.

Le fond de soutien aux victimes est une forme de réparation des violations des droits des individus. Et dans le contexte centrafricain, il est le fruit de l'accord de Khartoum dont les différentes parties se sont accordé « à prendre des mesures idoines, y compris la mise en place d'un fond fiduciaire, pour garantir la réhabilitation et la réparation due aux victimes ».

Le fond des victimes qui est pour un grand nombre de temps une initiative des institutions internationales, telle est le cas de la CPI actuellement, est très souvent difficilement appliqué comme il se doit, pour la simple raison qu'il ne touche pas toutes les victimes. Une collaboration de l'Etat en reconstruction et un engagement des bourreaux (souvent riches) serait nécessaire pour la réalisation effective de ce droit. Mieux, il faudrait que les Etats, de manière indépendante mettent en place des mécanismes soutenant la justice transitionnelle, permettant aux victimes d'être accompagnée.

Les conditions et le mécanisme sont deux éléments qui nous ont permis de comprendre la garantie extrajudiciaire de la justice transitionnelle, bien que celle-ci soit souvent en bute à des difficultés d'application. Toutefois, que peuvent être des solutions efficaces permettant une bonne garantie des droits des victimes et même des présumés auteurs des infractions ?

CHAPITRE IV : APPROCHE ET SOLUTIONS DANS L'ADMINISTRATION ET LA GARANTIE DES DROITS DES VICTIMES ET DES PRESUMES AUTEURS DES CRIMES

En matière des droits de l'homme, il est important que le droit innove en prenant en compte les recommandations des différentes parties. Ainsi dans le cadre des amnisties et des prescriptions pénales, des solutions pour la lutte contre l'impunité doivent être mises en place dans l'administration de ces mesures (SECTION1). Ces solutions permettront la bonne garantie, des droits des différentes parties (SECTION 2).

SECTION I : Solutions relatives à l'administration des amnisties et des prescriptions

Des solutions internes pour chaque Etat (Paragraphe 1) et des mécanismes conventionnels (Paragraphe 2) sont les éléments pourront aider à l'administration des amnisties et des prescriptions pénales.

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Paragraphe I : Les solutions internes

Les solutions internes sur lesquelles peuvent miser les différents Etats sont : l'interdiction des autoamnisties (A) et l'imprescriptibilité des crimes violant les droits des individus (B).

Interdiction des autoamnisties

Loi voté par le parlement qui permet aux dirigeants d'effacer toute les responsabilités qui leur incombent sur les violations des droits dans le passé, l'auto amnistie ou l'amnistie personnelle est une pratique de l'amnistie qui viole les droits des victimes et qui favorisent les individus au pouvoir.

Interdire cette pratique qui met à mal le droit d'amnistier notamment dans les pays africains, est une garantie pour les DH car, ne respectant pas les conditions requises pour les amnisties, les autos amnisties n'ont pour but que d'effacer la responsabilité pénale de certains dirigeants, alors même que ces derniers doivent comparaitre devant les juridictions pénales nationales et internationales.

Aussi, bien que l'amnistie vise la réconciliation, le fait d'accorder des amnisties à des dirigeants ayant commis des violations des droits de l'homme, pour que ces derniers laissent le pouvoir est un crime car cela permet à ces personnes de ne pas répondre de leurs actes devant la justice.

L'exemple dans cette perspective peut être celui de la Gambie qui, pour que le président YAYA Jamet quitte le pouvoir, il a fallu une négociation et la mise en place d'une amnistie pour que son successeur prenne le pouvoir. Cette attitude est en violation avec les droits de l'homme, les conventions internationales et même la juridiction pénale internationale qu'est la CPI qui, affirme que « Affirmant que les crimes les plus graves qui touchent l'ensemble de la communauté internationale ne sauraient rester impunis et que leur répression doit être effectivement assurée par des mesures prises dans le cadre national et par le renforcement de la coopération internationale »123.

A- Interdiction de prescription des crimes violant les droits des individus

En droit interne les prescriptions pénales ne doivent pas être interdites au regard de tous les avantages qu'elles peuvent procurer aux présumé auteurs des droits de l'homme, mais aussi aux victimes qui parfois ont des difficultés à faire des recours devant les juridictions.

123 Préambule du Statut de Rome.

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Par ailleurs, ce qu'il est nécessaire pour la prescription en droit interne, c'est un encadrement lui permettant de mieux respecter les différents des individus, qu'ils soient victimes ou auteurs. Cependant, en ce qui concerne les violations les plus graves, dont l'oublie est impossible, il est question de maintenir l'imprescriptibilité de ces violations au rang de principe afin que ne soient pas perpétré les crimes les plus graves.

Si la société internationale est souriante des vies des individus, une interdiction des prescriptions est imminente sous la condition que cette interdiction ne soit applicable que lorsque la violation des droits de l'homme est constaté par une juridiction interne ou même parfois une autorité juridictionnelle indépendante du pays dans lequel les violations se sont produites.

L'interdiction de la prescription doit dans cette perspective être non seulement nationale avec la mise en place des lois spécifique en la matière, mais aussi internationales à travers les conventions internationales de lutte contre l'impunité.

Paragraphe II : Les solutions conventionnelles pour la lutte contre l'impunité et le respect des droits des victimes.

Les solutions conventionnelles permettent de vulgariser les sanctions à l'égard des Etats qui violent la convention de 1968 et pratiquent encore les prescriptions pénales pour les crimes (A), et le renforcement des textes conventionnels contre les amnisties des crimes internationaux (B).

A- La vulgarisation et la sanction des Etats violant la convention de 1968 sur l'imprescriptibilité des crimes

Relativement à la vulgarisation des sanctions à l'encontre des Etats ne respectant pas leurs engagements, il sied de noter que pour les conventions internationales, Chacune des quatre Conventions de Genève qui traitent des conflits armés internationaux fait de certaines violations des infractions graves et exige des Hautes Parties contractantes qu'elles prennent «toute mesure législative nécessaire pour fixer les sanctions pénales adéquates à appliquer aux personnes ayant commis, ou donné l'ordre de commettre, l'une ou l'autre des infractions graves» énumérées dans la Convention. En outre, chaque Partie contractante «aura l'obligation de rechercher les personnes prévenues d'avoir commis, ou d'avoir ordonné de commettre, l'une ou l'autre de ces infractions graves, et elle devra les déférer à ses propres tribunaux, quelle que soit leur nationalité. Elle pourra aussi, si elle le préfère, et selon les conditions prévues par

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sa propre législation, les remettre pour jugement à une autre Partie contractante intéressée à la poursuite, pour autant que cette Partie contractante ait retenu contre lesdites personnes des charges suffisantes»124.

Le non-respect des obligations des différents Etats sur l(amnistie ou la prescription pénale notamment la convention de 1968 sur l'imprescriptibilité des crimes, devrait entrainer des sanctions à l'encontre de Etats qui font encore de l'impunité des violations touchant la sensibilité internationale, des pratiques normales. C'est dans cette perspective que la Haute Cour de justice du Kenya a affirmé, dans le respect des conventions internationales que « Ni le gouvernement de transition ni aucune autre partie n'a le pouvoir de demander la réconciliation nationale et en conséquence, d'accorder une mesure d'amnistie ou de grâce à l'égard des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité »125.

Une législation internationale et des sanctions pratiques, notamment économiques, s'imposent donc pour tout Etat violant ses obligations et continuant à admettre l'impunité des crimes dans sa législation.

B- Le renforcement des textes internationaux encadrant les pratiques d'amnisties

Plusieurs textes internationaux existent pour interdire formellement la pratique des prescriptions pénales. Par contre, s'agissant des amnisties le Droit international des droit de l'homme n'est pas claire car, à côté des conventions qui admettent les amnisties, se trouvent celles qui condamnent l'impunité sans faire directement allusion aux amnisties.

Le Protocol additionnel II aux conventions de Genève qui, admet partiellement en son article 6.5 les pratiques des amnisties, est soutenu par la politique des Nation-Unies qui privilégient la réconciliation nationale à l'interdiction formelle des amnisties.

Il est de ce fait nécessaire de renforcer les textes internationaux pratiques et spécifiques contre certaines pratiques des amnisties, comme c'est le cas avec les prescriptions pénales qui ont une convention internationale particulière.

L'interprétation du Protocol II ne permet pas aux Etats de respecter comme il se doit cette institution car, combien même lorsque la Commission des droits de l'homme des Nations unies à donner un commentaire à cet article, on observe toujours des pratiques déviantes. C'est le cas

124 Protocole additionnel I aux CG.

125 Haute Cour centrale d'Addis-Abeba, Affaire Col Mengistu Haile Mariam et autre, 23 mai 1995. (Traduction officielle). (Il est toutefois établi que les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité ne peuvent faire l'objet d'amnistie ni de prescription).

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en RDC ou encore récemment en RCA ou une amnistie a été mise en place après les troubles opposants les forces Seleka aux forces Antibalaka.

SECTION II : SOLUTIONS DE GARANTI DES DROITS DES VICTIMES ET DES

PRESUMES AUTEURS DES CRIMES

Les solutions de garanti des droits des victimes et des présumés auteurs des violations ne peut être possible que si les solutions des victimes (Paragraphe 1) sont étudiée avant d'aborder celles relatives aux présumés auteurs (Paragraphe 2).

Paragraphe I : Sur les victimes

Les solutions relatives aux victimes consistent l'assistance, l'accompagnement et la recherche de la vérité (A), et l'encouragement des pratiques de prescription au profit des victimes (B).

A- Assistance aux victimes et accompagnement pour la recherche de la vérité.

L'assistance aux victimes et leur accompagnement dans la recherche de la vérité est un droit que les victimes doivent bénéficier, et une obligation pour les Etats et la société internationale.

En effet, l'assistance des victimes suppose que toutes les victimes dépourvu des moyens pour mettre en marche une action devant les Tribunaux doivent être pris en charge afin que leurs requêtes aboutissent. De manière générale, les victimes des conflits sont des personnes ayant perdu tous leurs biens et certains leurs facultés physiques et parfois mentales. Une assistance de la part des gouvernants permettra de leur donner la possibilité de rentrer dans leurs droits et de pouvoirs réclamer les réparations relatives aux dommages qu'ils ont subis.

L'assistance suppose également la mise en place des informations adéquate qui permettra aux victimes de comprendre la procédure car, le doit n'est pas souvent compris par toutes les victimes, surtout si nous somme dans le contexte des individus ressortissants des contrés lointain.

Enfin, s'agissant de l'accompagnement pour la recherche de la vérité, il est important de dire que dans cette phase, les autorités nationales et internationales ont déjà mis en place des mécanismes pour assister les victimes, il faut maintenant que ces mécanismes soient appuyés par des juridictions et autres mesures indépendantes relatives à la protection des droits de l'homme.

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Tout compte fait, dans une société démocratique, lorsque les victimes ont une assistance, ils sont de plus en plus motivé pour saisir les juridictions sans attendre l'écoulement de certains délais.

B- Prescription comme pratique incitant la victime à saisir la justice

Règle qui sanctionne l'expiration d'un délai, la prescription est aussi une règle qui contraint à agir dans un certain délai et qui, à ce titre, incite la victime à se déterminer sans tarder sur l'exercice effectif de ses droits126.

Le premier droit de la victime est en effet celui de déposer plainte et l'exercice de ce droit, dans un délai prescrit par la loi, interrompt la prescription. Il faut certes, en l'état actuel du droit, que ce soit une plainte avec constitution de partie civile, mais une plainte simple pourrait bientôt avoir un effet interruptif si le législateur français retenait, sur ce point, la proposition parlementaire adoptée le 10 mars 2016127. Ainsi, la victime qui, au fur et à mesure des réformes depuis une quinzaine d'années, devient un véritable acteur de la procédure pénale, dispose désormais d'antidotes réels contre une inertie éventuelle des autorités de poursuites ou d'instruction qui, par l'effet de la prescription, pourrait la priver d'un jugement.

La victime peut donc agir, mais elle doit le faire dans un certain délai. Ce délai court généralement du jour de l'infraction sous réserve d'exceptions justifiées par les circonstances de l'infraction ou la situation de la victime. Ainsi, selon la jurisprudence, lorsque l'infraction n'a pu être connue, compte tenu de son caractère occulte ou des manoeuvres de son auteur pour la cacher, le point de départ est reporté au jour où l'infraction est apparue et a pu être constatée dans des conditions permettant la mise en mouvement de l'action publique.

Enfin, la prescription peut être une règle que la victime peut s'approprier. En effet, concernant les personnes vulnérables par exemple, M. Marc Robert, procureur général près la cour d'appel de Versailles, souligne que le report du point de départ de la prescription à l'initiative de la victime, « à une date indéterminée », rend l'action publique « en quelque sorte prisonnière du comportement ou de la stratégie de la victime »128.

Or, ce délai ne doit pas devenir la chose des parties mais doit rester le garant de l'impartialité de la loi. Comme tel, il impose à la victime de choisir de déposer plainte ou non avant une

126 Jean-Pierre Choquet, « La prescription de l'action publique : une atteinte aux droits des victimes ? », dans Les Cahiers de la justice, 2016/4 (4), p. 639-647.

127 Loi 2016-483 du 20 avr. 2016 relative à la déontologie, droits et obligations des fonctionnaires, art. 27.

128 Rapport parlementaire de MM. Tourret et Fenech, no2778, p. 62.

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échéance qui ne lui appartient pas. C'est donc une contrainte, mais ce peut être aussi une opportunité.

Cette intervention extérieure de la loi peut en effet protéger la victime contre des hésitations ou incertitudes récurrentes à déposer plainte, notamment pour des infractions de nature sexuelle, tant la décision, en cette matière, peut être difficile à prendre. Le dépôt de plainte oblige en effet la victime à se déposséder de son récit pour le soumettre à l'évaluation d'un policier ou d'un juge, et le risque de cette évaluation peut être angoissant et paralysant, tant il ouvre sur l'inconnu.

L'échéance qu'impose le délai de prescription peut donc aider la victime à faire un choix qu'elle a intérêt à faire le plus rapidement possible pour sortir d'une situation de pur fait dans laquelle elle a été dominée et accéder à un statut qui lui confère de droit d'intervenir activement dans la procédure pour faire reconnaître la culpabilité de l'auteur de l'infraction et demander l'indemnisation de son préjudice. La victime a d'autant plus intérêt à réduire le délai entre les faits et le dépôt de plainte que, pour elle aussi, le temps qui passe risque d'altérer les éléments de preuve et de conduire à une décision d'acquittement ou de relaxe « au bénéfice du doute », toujours cruellement ressentie.

Paragraphe II : Sur les présumés auteurs

Les solutions relatives aux auteurs sont celles qui permettront un allongement ou une extension des délais de prescription en droit interne et leur application en DI (A), mais également la création des conditions permettant une distance entre les présumés auteurs des crimes et les victimes (B).

A- Allongement des délais de prescriptions

En matière pénale, la prescription est un mode général d'extinction du droit de poursuivre et du droit d'exécuter une peine. Relativement aux poursuites, un délai est fixé selon les législations, pour que les victimes saisissent le juge afin de rentrer dans leurs droits. Ainsi, en matière criminelle nous avons 20 ans au Cameroun et en France, avec une dérogation de 10 ans pour la France. Cependant, les crimes internationaux ne sont pas pris en compte dans ces délais car subissant le principe de l'imprescriptibilité des crimes internationaux.

Cependant, la législation française a beaucoup évoluée dans la mesure où elle n'aligne pas les crimes de guerre dans le cadre des crimes imprescriptibles. Les crimes de guerre, leur régime de prescription n'a pas été aligné sur l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité. Ils

deviennent en revanche imprescriptibles lorsqu'ils sont justement connexes aux crimes contre l'humanité129.

Le droit international devrait prendre en compte non seulement les droits des victimes comme c'est le cas actuellement, mais également prendre en considération les droits des présumés auteurs des crimes internationaux. En effet, l'idée de mettre sur pied des délais de 40 voire 50 ans si les victimes ne se manifestent pas pour que les présumés auteurs ne soient plus poursuivi. Car, tout comme en droit interne, les crimes peuvent aussi être oubliés avec le temps dans la société internationale.

B- Séparation des auteurs amnistiés des victimes

La séparation entre les victimes et leurs bourreaux est une mesure qui permettra d'éviter un certain nombre d'incidents.

En effet, les crimes peuvent être effacés, les crimes peuvent être oubliés par la société et la réconciliation nationale peut être présente. Cependant dans les pensées des victimes ayants perdu des êtres chers ou ayant été rendu handicap a cause des violations, la mémoire subsiste, les souvenirs restent.

C'est pour cette raison qu'il faut éviter de mettre dans les mêmes villes ou quartiers les deux parties car, une idée de vengeance peut toujours traverser la pensée des victimes, c'est ainsi qu'une nouvelle crise peut naitre à nouveau.

Aussi, les violations étant une question du passé et faisant partie désormais de l'histoire du pays, il se peut que la descendance des différentes parties se remettent en conflit si surtout il existe un déséquilibre dans le partage des richesses dans le pays.

Les gouvernants devraient désormais mettre en place une démocratie durable avec des institutions fortes et durables.

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129 CECILE RIDE, « réforme de la prescription pénale, allongement des délais de prescription et traitement particulier des infractions occultes et dissimulées ».

CONCLUSION

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Les solutions données dans cette deuxième partie pour le but de garantir les Droits de l'Homme de manière générale et ceux des victimes de graves violations en particulier ne peuvent être appliquée qu'avec la volonté des diffèrent acteurs tant sur la scène national qu'international car, elles dépendent d'eux. Sur le plan national, nous observons trois parties dont chacune devrait faire sa part de choses. D'abord l'Etat qui, doit impérativement mette en place des mécanismes permettant la bonne administration de la justice à travers une séparation des pouvoirs, ce qui engendre une politique démocratique, ce qui permettra aux victimes de bien saisir les autorités compétentes pour dénoncer les violations et demander réparations. S'agissant des victimes, ces derniers doivent faire des efforts pour saisir les juridictions compétentes sans avoir du retard, ceci, afin que les preuves sur des supposés violations des Droits de l'homme ne disparaissent pas. Elles doivent aussi oeuvrer pour la reconstruction de la Nation, en privilégiant la paix et la réconciliation nationale. Enfin, en ce qui concerne les présumés auteurs des violations des Droits de l'homme, il est important pour eux également d'oeuvrer pour la reconstruction nationale et, celle-ci ne peut être possible qui s'ils se rendaient aux autorités compétentes afin d'établir la vérité.

S'agissant enfin du contexte international, les Etats souverains, les organisations internationales et l'ONU doivent mettre en place en tout accord, les dispositions contraignantes qui permettent de lutter efficacement contre les impunités même en droit national. Egalement élaborer des conventions qui sanctionnent économiquement les Etat qui violent les dispositions des conventions de lutte contre l'impunité.

CONCLUSION GENERALE

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L'étude des amnisties et des prescriptions pénales nous ont permis de comprendre que ce sont deux institutions de clémences utilisées par le droit interne à la base, avant d'etre récupéré par le droit international, plus précisément le Droit international des droits de l'homme, à travers ses différentes branches que sont le DIH pour ce qui est de la question des victimes, et le DIP pour la répression.

De leur étude au niveau national, ce sont des pratiques courantes qui existent depuis plusieurs siècles et dont la réception est plutôt acceptée avec beaucoup de succès. En effet, avec pour but la recherche de la paix durable, la justice, la vérité et la réconciliation nationale, les amnisties et les prescriptions pénales ont des fondements purement sociaux, moraux et surtout institutionnelles, qui encadre leur manifestation. Quant à la manifestation, il importe de relever qu'elle dépend de la politique menée par la législation interne, et l'ampleur des événements. Ainsi les amnistie, bien que prévues par les textes, elles sont prises après une consultation du peuple qui peut être sous forme de referendum ou un vote de ses représentants au parlement. Les prescriptions pénales par contre n'ont point besoin d'une consultation du peuple puisque comme les amnisties, elles sont prévues par la loi mais leur application peut être à l'égard d'un seul individu ou d'un groupe restreint.

Au vu de cette manifestation, le DIDH a jugé bon de récupérer ces institutions dans son système juridique et de les reconnaitre. Toutefois, cette reconnaissance reste mitigée entre acceptation et refus, en considération des droits des victimes. En effet, si les amnisties sont acceptées (avec des conditions) les prescriptions pénales sont à leur tour rejeté au profit du principe de l'imprescriptibilité. Ce conditionnement et ce refus d'acceptation montre une volonté de lutter contre les pratiques d'impunité. C'est alors que nous pouvons affirmer que « L'analyse des différentes institutions de clémence du point de vue du droit international confirme que notre époque, au moins dans le discours ambiant, supporte mal l'impunité, en tout cas pour les crimes les plus graves. On peut y voir une progression des droits de l'homme en même temps qu'une progression des préoccupations pour l'humain mais un tel constat ne saurait être vu comme optimiste dans la mesure où ces progressions se font en corrélation,

mais non en proportion, de l'ampleur des atteintes que subissent les humains et des violations que subissent leurs droits, mais aussi de la connaissance que l'on en a. »130.

Le rejet des institutions de clémence par le DIDH s'explique surtout par l'impact que ces institutions produisent sur la scène nationale, voire internationale car, quand il s'agit des crimes internationaux comme les crimes de guerre, les crimes contre l'humanité ou les génocides, amnistier ou prescrire les peines c'est laisser impuni les auteurs de violations en leur ôtant toute responsabilité, mais surtout violer les droits des victimes qui veulent rentrer dans leurs droits, que sont : la connaissance de la vérité, la réparations et voir des criminels payer pour leurs actes. C'est dans cette perspective que le DIDH a prévu des mécanismes des droits des victimes non seulement prévus pour les Etats, mais aussi pour la société internationale. C'est mécanismes sont tantôt extra juridictionnels, comme il en est les cas de la Justice Transitionnelle qui permet de mettre en lumière la vérité, réparer les dommages causé et réconcilier la population pour une paix durable. A côté des mécanismes extra-juridictionnels existent des mécanismes juridictionnels qui ont pour but la répression et la recherche de la réparation sans oublier la possibilité d'incarcérer les auteurs des violations des droits de l'homme. Toutefois, le DIDH étant un droit évolutif, plusieurs autres solutions peuvent être avancée pour soutenir les solutions déjà pris par les mécanismes institués, afin de rendre plus efficace le DIDH.

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130 Gabriele DELLA MORTE

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B- Revues

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l Revue Juridique de l'Ouest, N°15, 2002, 374p.

V- DOCUMENTS

A. Textes internationaux

l Déclaration Universelle des droits de l'Homme du 10 décembre 1948

l Directives de Belfast sur l'amnistie et la responsabilité, 1998.

l Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966.

l Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966.

l Protocole facultatif se rapportant au Pacte international, en vigueur le 23 mars 1976.

l Protocole II relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux, adopté le 8 juin 1977, en vigueur le 7 décembre 1978.

l Convention des Nations unies sur l'imprescriptibilité des crimes de 1968.

l Convention européenne des droits de l'homme, en vigueur depuis le 3 septembre 1953.

l Convention interaméricaine pour la prévention et la répression de la torture, de 1984.

l

86

Déclaration des principes fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la criminalité et aux victimes d'abus de pouvoir. Adopté par l'Assemblée générale dans sa résolution 40/34 du 29 novembre 1985.

l Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, de Juin 1981.

l Statut de la Cour pénal international, en vigueur depuis le 1° Juillet 2002.

l Accord de Lomé Du 7 juillet 1999, sur l'imprescriptibilité des crimes en SIERRA-LEONE.

l l'Arusha Peace and Reconciliation Agreement for Burundi du 28 Août 2000.

l Statut du Tribunal pénal pour le Rwanda, de novembre 1994.

l Statut du Tribunal Spécial pour la Sierra Leone, de 2002.

l Statut du Tribunal international pour l'ex Yougoslavie, de 1993.

B. Textes nationaux

l La Constitution Camerounaise du 18 janvier 1996.

l La Constitution Congolaise (RDC) du 18 février 2006.

l Le Code pénal de la République du Cameroun, de 2016.

l LOI n° 64-1326 du 26 décembre 1964 tendant à constater l'imprescriptibilité des Crimes contre l'humanité en France.

l Loi centrafricaine N°97.002 du 15 mars 1997 portant amnistie générale des infractions liées à la mutinerie et des détournements de deniers publics.

l Loi Centrafricaine N°08.020 du 13 octobre 2008 portant libération et remise à l'endroit des personnalités, des militaires, des éléments et responsables civiles des groupes rebelles.

l Code pénal français de 1994.

C. Jurisprudence

l Affaire ONG des Droits de l'Homme du Zimbabwe contre Etat du Zimbabwe

l Affaire Almonicacid Arellano contre Chili, (La Cour interaméricaine), 11 juillet 2005.

l Affaire Col Mengistu Haile Mariam et autre, Haute Cour centrale d'Addis-Abeba, (sur la conformité des amnisties des crimes de guerre), 23 mai 1995.

l Commission Interaméricaine des Droits de l'homme, Rapport n.136/99, Affaire 10.488, Ignacio Ellacuria et al. (Salvador), 22 décembre 1999, paragraphes 229-230.

l Serie C, No. 87, Case of Barrios Altos vs. Peru, Jugement du 30 novembre 2001.

l Affaire The Last Temptation of Christ (Olmedo Bustos et al.), Jugement du 5 février 2001.

l l'affaire Castillo Páez, du 3 novembre 1997, Série C n° 34, §§ 86 et 90

l Arrêt usines de pâte à papier sur le fleuve Uruguay, (Argentine c/ Uruguay), CIJ, Jugement du 20 avril 2010.

l

87

Affaire Sébastien Germain AJAVON c. République du Bénin, Cour africaine des droits de l'Homme et des peuple, Arrêt du 28 novembre 2019, relative à la Réparation.

l Affaire AZAPO v. President of the Republic of South Africa, Case Number: CCT17/96, 1996.

l Affaire Velasquez Rodriguez, Arret du 29 juillet 1988, série C, n4, §172. D. Rapport, communications et avis

l CICR, L'amnistie au regard du droit international humanitaire : objectif et champ d'application, Genève, service consultatif du CICR, 1997,

l International Crisis Group, république centrafricaine : débloquer le dialogue politique inclusif, Briefing Afrique de Crisis Group N°55, 9 décembre 2008.

l OBSERVATOIRE PHAROS. « Victimes, impunité, justice et réconciliation : Mission de veille, d'étude et de réflexion prospective sur la reconstruction et les enjeux de justice ».

Octobre 2018. Consulté : https://www.observatoire pharos.com/wp-
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l Rapport de M. Louis Jooinet, Rapporteur spécial de la Sous-Commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et de la protection des minorités, Etude sur la législation d'amnistie et sur son rôle dans la protection et la promotion des droits de l'homme (E/CN.4/Sub.2/1985/16/Rev.1,par.5).

l Haut-Commissariat aux NationsUnies pour les Droits de l'Homme, Les instruments de l'Etat de droit dans les Etats sortant d'un conflit, Nations Unies, 2009. 53p.

l Rapport final de T. VAN BOVEN, E/CN.4/Sub.2/1993/8, 2 juillet 1993.

ANNEXES

88

ANNEXE 1 : Statut du Tribunal spécial pour la Sierra Leone

ANNEXE 2 : Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité.

ANNEXE 3 : Convention européenne sur l'imprescriptibilité des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre.

89

ANNEXE 1 : Statut du Tribunal spécial pour la Sierra Leone

Le 9 août 2000, le Président de la République de Sierra Leone a adressé au Président du Conseil de sécurité une lettre lui demandant « de bien vouloir entamer les démarches nécessaires afin que l'Organisation des Nations Unies statue sur la création d'un tribunal spécial pour la Sierra Leone [et] de traduire en justice les membres du Revolutionary United Front (RFU) et leurs complices pour les crimes qu'ils [avaient] commis contre le peuple sierra-léonais et pour avoir pris en otage des Casques bleus de l'ONU ». Une proposition de cadre sur la création, la compétence et le fonctionnement du tribunal spécial (S/2000/786) figurait en pièce jointe.

Le 14 août 2000, à la suite de consultations sur le sujet, le Conseil de sécurité a adopté la résolution 1315 (2000), dans laquelle il a demandé au Secrétaire général de négocier un accord avec le Gouvernement sierra-léonais en vue de créer un tribunal spécial indépendant. Le Conseil recommandait que la compétence ratione materiae du tribunal spécial comprenne notamment les crimes contre l'humanité, les crimes de guerre et autres violations graves du droit international humanitaire, ainsi que les crimes au regard des règles pertinentes du droit sierra - léonais commis sur le territoire de la Sierra Leone. Il recommandait en outre que le tribunal spécial ait compétence ratione personae pour juger ceux qui portaient la responsabilité la plus lourde des crimes visés ci-dessus, notamment les dirigeants qui, en commettant de tels crimes, avaient compromis l'établissement et la mise en oeuvre du processus de paix en Sierra Leone.

Le 4 octobre 2000, le Secrétaire général a présenté, conformément à la résolution 1315 (2000), un rapport au Conseil de sécurité (S/2000/915) qui exposait la nature et la spécificité du « Tribunal spécial » projeté, sa compétence et sa structure administrative et traitait de questions telles que l'exécution des peines dans des États tiers, la possibilité d'installer le siège du Tribunal spécial ailleurs, les dispositions pratiques pour le fonctionnement du Tribunal spécial et les mécanismes de financement. En annexe du rapport figuraient un projet d'« Accord entre l'Organisation des Nations Unies et le Gouvernement sierra-léonais sur la création d'un Tribunal spécial pour la Sierra Leone » et une pièce jointe présentant un projet de statut du Tribunal spécial.

Le 22 décembre 2000, à la suite de l'examen du rapport par le Conseil de sécurité, le Président du Conseil a envoyé une lettre au Secrétaire général dans laquelle figuraient des propositions d'amendement des projets d'accord et de statut présentées par les membres du Conseil,

90

concernant la compétence ratione personae, le financement et la structure du Tribunal spécial (S/2000/1234).

À la suite de négociations bilatérales, l'Accord entre l'Organisation des

Nations Unies et le Gouvernement sierra-léonais sur la création d'un Tribunal spécial pour la Sierra Leone, accompagné du Statut du Tribunal en annexe, a été signé à Freetown le 16 janvier 2002. Conformément à son article 21, l'Accord est entré en vigueur le 12 avril 2002, après sa ratification par la Sierra Leone.

ANNEXE 2 : Convention sur l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité

Adoptée et ouverte à la signature, à la ratification et à l'adhésion par l'Assemblée
générale dans sa résolution

2391 (XXIII) du 26 novembre 1968

Entrée en vigueur : le 11 novembre 1970, conformément aux dispositions de l'article

VIII

Préambule

Les Etats parties à la présente Convention,

Rappelant les résolutions 3 (I) et 170 (II) de l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies, en date des 13 février 1946 et 31 octobre 1947, portant sur l'extradition et le châtiment des criminels de guerre, et la résolution 95 (I) du 11 décembre 1946, confirmant les principes de droit international reconnus par le Statut du Tribunal militaire international de Nuremberg et par le jugement de ce tribunal, ainsi que les résolutions 2184 (XXI) du 12 décembre 1966 et 2202 (XXI) du 16 décembre 1966, par lesquelles l'Assemblée générale a expressément condamné en tant que crimes contre l'humanité, d'une part, la violation des droits économiques et politiques des populations autochtones et, d'autre part, la politique d' apartheid ,

Rappelant les résolutions 1074 D (XXXIX) et 1158 (XLI) du Conseil économique et social de l'Organisation des Nations Unies, en date des 28 juillet 1965 et 5 août 1966, concernant le châtiment des criminels de guerre et des individus coupables de crimes contre l'humanité,

91

Constatant que dans aucune des déclarations solennelles, actes et conventions visant la poursuite et la répression des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité il n'a été prévu de limitation dans le temps,

Considérant que les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité comptent au nombre des crimes de droit international les plus graves,

Convaincus que la répression effective des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité est un élément important de la prévention de ces crimes, de la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales, propre à encourager la confiance, à stimuler la coopération entre les peuples et à favoriser la paix et la sécurité internationales,

Constatant que l'application aux crimes de guerre et aux crimes contre l'humanité des règles de droit interne relatives à la prescription des crimes ordinaires inquiète profondément l'opinion publique mondiale car elle empêche que les personnes responsables de ces crimes soient poursuivies et châtiées,

Reconnaissant qu'il est nécessaire et opportun d'affirmer en droit international, au moyen de la présente Convention, le principe de l'imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité et d'en assurer l'application universelle,

Sont convenus de ce qui suit :

Article premier

Les crimes suivants sont imprescriptibles, quelle que soit la date à laquelle ils ont été commis :

a) Les crimes de guerre, tels qu'ils sont définis dans le Statut du Tribunal militaire international de Nuremberg du 8 août 1945 et confirmés par les résolutions 3 (I) et 95 (I) de l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies, en date des 13 février 1946 et 11 décembre 1946, notamment les "infractions graves" énumérées dans les Conventions de Genève du 12 août 1949 pour la protection des victimes de la guerre;

b ) Les crimes contre l'humanité, qu'ils soient commis en temps de guerre ou en temps de paix, tels qu'ils sont définis dans le Statut du Tribunal militaire international de Nuremberg du 8 août 1945 et confirmés par les résolutions 3 (I) et 95 (I) de l'Assemblée générale l'Organisation des Nations, en date des 13 février 1946 et 11 décembre 1946, l'éviction par une attaque armée ou l'occupation et les actes inhumains découlant de la politique d' apartheid , ainsi que le crime de

92

génocide, tel qu'il est défini dans la Convention de 1948 pour la prévention et la répression du crime de génocide, même si ces actes ne constituent pas une violation du droit interne du pays où ils ont été commis.

Article II

Si l'un quelconque des crimes mentionnés à l'article premier est commis, les dispositions de la présente Convention s'appliqueront aux représentants de l'autorité de l'Etat et aux particuliers qui y participeraient en tant qu'auteurs ou en tant que complices, ou qui se rendraient coupables d'incitation directe à la perpétration de l'un quelconque de ces crimes, ou qui participeraient à une entente en vue de le commettre, quel que soit son degré d'exécution, ainsi qu'aux représentants de l'autorité de l'Etat qui toléreraient sa perpétration.

Article III

Les Etats parties à la présente Convention s'engagent à adopter toutes les mesures internes, d'ordre législatif ou autre, qui seraient nécessaire en vue de permettre l'extradition, conformément au droit international, des personnes visées par l'article II de la présente Convention.

Article IV

Les Etats parties à la présente Convention s'engagent à prendre, conformément à leurs procédures constitutionnelles, toutes mesures législatives ou autres qui seraient nécessaires pour assurer l'imprescriptibilité des crimes visés aux articles premier et II de la présente Convention, tant en ce qui concerne les poursuites qu'en ce qui concerne la peine; là où une prescription existerait en la matière, en vertu de la loi ou autrement, elle sera abolie.

Article V

La présente Convention sera jusqu'au 31 décembre 1969 ouverte à la signature de tout Etat Membre de l'Organisation des Nations Unies ou membre de l'une quelconque de ses institutions spécialisées ou membre de l'Agence internationale de l'énergie atomique, de tout Etat partie au Statut de la Cour internationale de Justice, ainsi que de tout autre Etat invité par l'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies à devenir partie à la présente Convention.

Article VI

La présente Convention est sujette à ratification et les instruments de ratification seront déposés auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

93

Article VII

La présente Convention sera ouverte à l'adhésion de tout Etat visé à l'article V. Les instruments d'adhésion seront déposés auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

Article VIII

1. La présente Convention entrera en vigueur le quatre-vingt-dixième jour qui suivra la date du dépôt auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies du dixième instrument de ratification ou d'adhésion.

2. Pour chacun des Etats qui ratifieront la présente Convention ou y adhéreront après le dépôt du dixième instrument de ratification ou d'adhésion, ladite Convention entrera en vigueur le quatre-vingt-dixième jour après la date du dépôt par cet Etat de son instrument de ratification ou d'adhésion.

Article IX

1. Après l'expiration d'une période de dix ans à partir de la date à laquelle la présente Convention entrera en vigueur, une demande de révision de la Convention peut être formulée, en tout temps, par toute Partie contractante, par voie de notification écrite adressée au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

2. L'Assemblée générale de l'Organisation des Nations Unies statuera sur les mesures à prendre, le cas échéant, au sujet de cette demande.

Article X

1. La présente Convention sera déposée auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.

2. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies fera tenir une copie certifiée conforme à la présente Convention à tous les Etats visés à l'article V.

3. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies informera tous les Etats visés à l'article V :

a) Des signatures apposées à la présente Convention et des instruments de ratification et d'adhésion déposés conformément aux articles V, VI et VII;

b) De la date à laquelle la présente Convention entrera en vigueur conformément à l'article VIII;

94

c) Des communications reçues conformément à l'article IX. Article XI

La présente Convention, dont les textes anglais, chinois, espagnol, français et russe font également foi, portera la date du 26 novembre 1968.

En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé la présente Convention.

ANNEXE 3 : Convention européenne sur l'imprescriptibilité des crimes contre
l'humanité et des crimes de guerre

Strasbourg, 25.I.1974

Les Etat membres du Conseil de l'Europe, signataires de la présente Convention,

Considérant la nécessité de sauvegarder la dignité humaine en temps de guerre comme en temps de paix;

Constatant que les crimes contre l'humanité et les violations les plus graves des lois et coutumes de la guerre constituent une atteinte sérieuse à cette dignité;

Soucieux d'éviter en conséquence que la répression de ces crimes soit entravée par la prescription de la poursuite et de l'exécution des peines;

Considérant l'intérêt essentiel de promouvoir dans ce domaine une politique pénale commune, le but du Conseil de l'Europe étant de réaliser une union plus étroite entre ses membres, Sont convenus de ce qui suit:

Article 1

Tout Etat contractant s'engage à prendre les mesures nécessaires afin que la prescription soit inapplicable à la poursuite des infractions suivantes et à l'exécution des peines prononcées pour de telles infractions, pour autant qu'elles sont punissables dans sa législation nationale:

95

1 les crimes contre l'humanité prévus par la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, adoptée le 9 décembre 1948 par l'Assemblée générale des Nations Unies;

2 a. les infractions prévues aux articles 50 de la Convention de Genève de 1949 pour l'amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces armées en campagne, 51 de la Convention de Genève de 1949 pour l'amélioration du sort des blessés, des malades et des naufragés des forces armées sur mer, 130 de la Convention de Genève de 1949 relative au traitement des prisonniers de guerre et 147 de la Convention de Genève de 1949 relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre,

b. toutes violations analogues des lois de la guerre en vigueur lors de l'entrée en application de la présente Convention et des coutumes de la guerre existant à ce moment, qui ne sont pas déjà prévues par les dispositions susvisées des Conventions de Genève, lorsque l'infraction considérée en l'espèce revêt une particulière gravité, soit en raison de ses éléments matériels et intentionnels, soit en raison de l'étendue de ses conséquences prévisibles;

3 toutes autres infractions aux lois et coutumes du droit international tel qu'il sera établi à l'avenir, considérées par l'Etat contractant intéressé, aux termes d'une déclaration faite conformément à l'article 6, comme étant de nature analogue à celles prévues aux paragraphes 1 ou 2 du présent article.

Article 2

1 Dans chaque Etat contractant, la présente Convention s'applique aux infractions commises après son entrée en vigueur à l'égard de cet Etat.

2 Elle s'applique également aux infractions commises avant cette entrée en vigueur dans les cas où le délai de prescription n'est pas encore venu à expiration à cette date.

Article 3

1 La présente Convention est ouverte à la signature des Etat membres du Conseil de l'Europe. Elle sera ratifiée ou acceptée. Les instruments de ratification ou d'acceptation seront déposés près le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.

2 La Convention entrera en vigueur trois mois après la date du dépôt du troisième instrument de ratification ou d'acceptation.

96

3 Elle entrera en vigueur à l'égard de tout Etat signataire qui la ratifiera ou l'acceptera ultérieurement, trois mois après la date du dépôt de son instrument de ratification ou d'acceptation.

Article 4

1 Après l'entrée en vigueur de la présente Convention, le Comité des Ministres du Conseil de l'Europe pourra inviter tout Etat non membre du Conseil de l'Europe à adhérer à la présente Convention. La résolution concernant cette invitation devra recevoir l'accord unanime des membres du Conseil ayant ratifié la Convention.

2 L'adhésion s'effectuera par le dépôt, près le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, d'un instrument d'adhésion qui prendra effet trois mois après la date de son dépôt. Article 5

1 Tout Etat peut, au moment de la signature ou au moment du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'adhésion, désigner le ou les territoires auxquels s'applique la présente Convention.

2 Tout Etat peut, au moment du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'adhésion ou à tout autre moment par la suite, étendre l'application de la présente Convention, par déclaration adressée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, à tout autre territoire désigné dans la déclaration et dont il assure les relations internationales ou pour lequel il est habilité à stipuler.

3 Toute déclaration faite en vertu du paragraphe précédent pourra être retirée, en ce qui concerne tout territoire désigné dans cette déclaration, aux conditions prévues à l'article 7 de la présente Convention.

Article 6

1 Tout Etat contractant peut, à tout moment, par déclaration adressée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, étendre l'application de la présente Convention aux infractions prévues à l'article 1, paragraphe 3, de la présente Convention.

2 Toute déclaration faite en vertu du paragraphe précédent pourra être retirée aux conditions prévues à l'article 7 de la présente Convention.

Article 7

1 La présente Convention demeurera en vigueur sans limitation de durée.

97

2 Tout Etat contractant pourra, en ce qui le concerne, dénoncer la présente Convention en adressant une notification au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.

3 La dénonciation prendra effet six mois après la date de la réception de la notification par le Secrétaire Général.

Article 8

Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe notifiera aux Etats membres du Conseil et à tout Etat ayant adhéré à la présente Convention:

a) toute signature;

b) le dépôt de tout instrument de ratification, d'acceptation ou d'adhésion;

c) toute date d'entrée en vigueur de la présente Convention conformément à son article 3;

d) toute déclaration reçue en application des articles 5 ou 6;

e) e toute notification reçue en application des dispositions de l'article 7 et la date à laquelle la dénonciation prendra effet.

En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé la présente Convention. Fait à Strasbourg, le 25 janvier 1974, en français et en anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives du Conseil de l'Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe en communiquera copie certifiée conforme à chacun des Etats signataires et adhérents.

98

TABLE DES MATIERES

SOMMAIRE

INTRODUCTION

I- CONTEXTE DE L'ETUDE

II- DELIMITATION DU SUJET

A- Délimitation matérielle

B- Délimitation temporelle

III- DEFINITION DES CONCEPTS .

A- Amnistie

B- Prescription pénale

IV- INTERET DU SUJET ..

A- Intérêt scientifique

B- Intérêt social .

V- REVUE LITTERAIRE

VI- PROBLEMATIQUE

VII- HYPOTHESE

VIII- CADRE METHODOLOGIQUE

A- Les Méthodes d'analyses adoptées ..

B- Techniques de recherche .

IX- ARTICULATION ET JUSTIFICATION DU PLAN
PREMIERE PARTIE : FONDEMENTS ET IMPACTS JURIDIQUES EN DROIT

INTERNATIONAL DES DROITS DE L'HOMME
CHAPITRE I : FONDEMENTS JURIDIQUES DES AMNISTIES ET DES PRESCRIPTIONS

PENALES

SECTION I : Les fondements et la manifestation des amnisties et des prescriptions pénales

Paragraphe I : les fondements des amnisties et des prescriptions pénales

A- Les fondements des amnisties .

1- La réconciliation .

2- La recherche de la vérité .

B- Les fondements des prescriptions pénales

1- Le fondement moral

2- Le fondement social ..

Paragraphe II : La manifestation des amnisties et des prescriptions pénales

A-

99

Les manifestations des amnisties ..

B- Les manifestations des prescriptions pénales ..
SECTION II : La reconnaissance internationale des amnisties et des prescriptions pénales :

entre codification (acceptation) et difficultés d'application

Paragraphe I : Acceptation formelle et non formelle

A- Affirmation conventionnelle des amnisties

B- Affirmation non formelle des prescriptions pénales

Paragraphe II : Les difficultés d'application des deux institutions

A- L'incompatibilité avec le DIP et le DIH

B- Incompatibilité avec les principes de l'ONU

C- La montée de l'imprescriptibilité comme principe
CHAPITRE II : IMPACTS JURIDIQUES DES AMNISTIES ET DES PRESCRIPTIONS SECTION I : Les impacts sur les victimes : entre violation et garanti des droits des victimes

des violations des DH

Paragraphe I : Amnisties et prescriptions pénales, deux pratiques violant les droits des victimes

A- Le droit à un procès équitable

B- Le droit à une assistance judiciaire

Paragraphe II : Deux garanti des droits des victimes, par la réparation

A- La réparation matérielle

B- La réparation morale .

Section II : Les impacts sur les présumés auteurs de crimes et la société

Paragraphe I : Sur les présumés auteurs de crimes

Paragraphe II : Impacts des Amnisties et prescriptions pénales sur la société .

A- La Restauration de la paix

B- Le Développement économique et social .

CONCLUSION PARTIELLE ..
DEUXIEME PARTIE : LES MECANISMES DE PROTECTION DES DROITS DES VICTIMES APRES LA MISE EN OEUVRE DES AMNISTIES ET DES

PRESCRIPTIONS PENALES .

CHAPITRE III : LES MECANISMES JURIDICTIONNELS ET EXTRA-

JURIDICTIONNELS

SECTION I : Les mécanismes juridictionnels .

Paragraphe I : les juridictions nationales .

A- La compétence du juge pénal

100

B- Le contentieux devant le juge pénal ..

Paragraphe II : Les juridictions internationales .

A- Les Cours régionales des droits e l'homme

B- La protection des victimes par la CPI
SECTION II : Les mécanismes extrajudiciaires de protection des droits des victimes : la justice

transitionnelle

Paragraphe I : Conditions et effets de la mise en oeuvre de la justice transitionnelle

A- Les conditions de la mise en oeuvre de la Justice Transitionnelle

B- Effets de la mise en oeuvre de la Justice Transitionnelle

Paragraphe II : L'expérience centrafricaine de la justice transitionnelle .

A- Le CJVRR

B- Le fond de soutien des victimes
CHAPITRE IV : APPROCHE ET SOLUTIONS DANS L'ADMINISTRATION ET LA GARANTIE DES DROITS DES VICTIMES ET DES PRESUMES AUTEURS DES CRIMES

SECTION I : Solutions relatives à l'administration des amnisties et des prescriptions

Paragraphe I : Les solutions internes .

A- Réformes institutionnelles

B- Interdiction de prescription des crimes violant les droits des individus

Paragraphe II : Les solutions conventionnelles

A- La vulgarisation et la sanction des Etats violant la convention de 1968 sur

l'imprescriptibilité des crimes ..

B- Le renforcement des textes internationaux encadrant les pratiques d'amnisties

SECTION II : Solutions de garanti des droits des victimes et des présumés auteurs des crimes

Paragraphe I : Sur les victimes

A- Assistance aux victimes

B- Accompagnement pour la recherche de la vérité

Paragraphe II : Sur les présumés auteurs

A- Allongement des délais de prescriptions

B- Eloignement des auteurs amnistié des victimes

CONCLUSION PARTIELLE

CONCLUSION GENERALE ..

BIBLIOGRAPHIE

ANNEXES






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"Nous devons apprendre à vivre ensemble comme des frères sinon nous allons mourir tous ensemble comme des idiots"   Martin Luther King