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Stratégie d'élimination du trachome comme problème de santé publique dans une zone d'incertitude: cas du district de santé de Kolofata au Cameroun


par Patrick Gérard TOUKO SIANI
Université Catholique d'Afrique Centrale - Executive MBA Management Stratégique 2021
  

Disponible en mode multipage

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Promotion Jean-Paul II Année académique : 2020/2021

UNIVERSITÉ CATHOLIQUE D'AFRIQUE CENTRALE

INSTITUT CATHOLIQUE DE YAOUNDÉ

FORMATION CONTINUE

Executive MBA Management Stratégique

STRATÉGIE D'ÉLIMINATION DU TRACHOME

COMME PROBLÈME DE SANTÉ PUBLIQUE

DANS UNE ZONE D'INCERTITUDE :

CAS DU DISTRICT DE SANTÉ DE KOLOFATA

AU CAMEROUN

Présenté et soutenu publiquement par
M. TOUKO SIANI Patrick Gérard

Médecin de Santé Publique

Sous la direction de

Pr Pierre Jonathan BIKANDA

Pour l'obtention du

Executive MBA Management Stratégique

SOMMAIRE

Pages

SOMMAIRE i

DÉDICACES ii

REMERCIEMENTS iii

RÉSUMÉ iv

SIGLES ET ABRÉVIATIONS v

INTRODUCTION 1

CHAPITRE 1 : LE TRACHOME : UNE MALADIE TROPICALE NÉGLIGÉE 2

CHAPITRE 2 : LE TRACHOME : UN PROBLÈME DE SANTÉ PUBLIQUE 14

CHAPITRE 3 : DÉVELOPPEMENT THÉORIQUE ET APPROCHE ANALYTIQUE ... 26

CHAPITRE 4 : DÉCISIONS ET ACTIONS STRATÉGIQUES . 38

CONCLUSION . 50

BIBLIOGRAPHIE vi

TABLE DES MATIÈRES viii

DÉDICACES

- À la mémoire de NDIAH NZEUTCHUI TOUKO Gérard, Primus inter pares, à plus d'un titre ;

- À ma Famille ;

- Au Cameroun, mon berceau par mes ancêtres.

REMERCIEMENTS

Au Seigneur Dieu Tout Puissant,

Au Directeur de la Formation Continue et toute son équipe, Au corps enseignant de la Formation Continue,

À la Promotion Jean Paul II du Executive MBA Management Stratégique, avec qui je partage cette pensée du Pape Jean Paul II : « C'est par le travail que l'Homme doit se procurer le pain quotidien et contribuer au progrès continuel des sciences et de la technique, et surtout à l'élévation constante, culturelle et morale, de la société dans laquelle il vit en communauté avec ses frères », Laborem exercens, 1981.

Aux membres du jury qui nous feront l'honneur d'apprécier ce modeste travail.

RÉSUMÉ

Le trachome est considéré comme un problème de santé publique au Cameroun. Le Plan National d'Élimination du Trachome a pour objectif principal l'élimination du trachome comme cause de cécité dans tous les DS endémiques du Cameroun.

Concernant le DS de Kolofata, le processus d'élimination du trachome fait face à un certain nombre de contraintes notamment l'insécurité et les risques humains, le déplacement des populations, et le défaut dans l'accès aux soins de santé.

L'analyse de ces éléments fait ressortir trois problèmes principaux : l'apparition de nouveaux cas de la maladie dans le DS, la présence d'un nouveau foyer de la maladie dans le camp des déplacés de Mora, et le retard par rapport à l'agenda d'élimination du trachome au Cameroun.

Les décisions stratégiques sont la cartographie du DS de Kolofata et du camp des déplacés de Mora, la planification des activités de traitement de masse et de chirurgie du TT, et l'actualisation de l'agenda d'élimination. La stratégie CHANCE de l'OMS sera développée.

L'amélioration du cadre de vie dans une communauté concourt à faire reculer la prévalence du trachome actif, et ainsi à parfaire la vue des générations futures.

Mots clés : Trachome - Élimination - Santé publique - Kolofata - Cameroun.

ABSTRACT

Trachoma is considered as a public health problem in Cameroon. The National Trachoma Elimination Plan main objective is the elimination of trachoma as a cause of blindness in all endemic HD in Cameroon.

Regarding the Kolofata HD, the process of trachoma elimination faces a number of constraints including insecurity and human risks, displacement of populations, and lack of access to health care.

The analysis of these elements brings out three main problems: the appearance of new cases of the disease in the HD, the presence of a new focus of the disease in the camp for displaced persons of Mora, and the delay in relation to the Cameroon's trachoma elimination agenda.

The strategic decisions are mapping the Kolofata HD and Mora IDP camp, planning mass treatment and TT surgery activities, and updating the elimination agenda. The WHO SAFE strategy will be developed.

Improving the living environment in a community helps reduce the prevalence of active trachoma, and thus improves the eyesight of future generations.

Keywords : Trachoma - Elimination - Public health - Kolofata - Cameroon.

SIGLES ET ABRÉVIATIONS

- CHANCE : CHirurgie, Antibiothérapie, Nettoyage du visage, Changement de

l'Environnement

- COVID - 19 : Corona Virus Disease 2019

- DS : District de Santé

- HBM : Health Belief Model

- HKI : Helen Keller International

- ITI : Initiative Internationale contre le Trachome

- OMS : Organisation Mondiale de la Santé

- ONG : Organisation Non Gouvernementale

- OSF : Ophtalmo Sans Frontières

- PNET : Plan National d'Élimination du Trachome

- PNLCé : Programme National de Lutte contre la Cécité

- RCA : République Centrafricaine

- TF : Trachome Folliculaire

- TT : Trichiasis Trachomateux

- WASH : eau, assainissement et hygiène

INTRODUCTION

Le trachome résulte de l'infection de l'oeil par une bactérie appelée Chlamydia trachomatis. Cette infection se transmet de personne à personne, le plus souvent d'un enfant à un autre ou d'un enfant à sa mère, dans un contexte de pénurie d'eau, de promiscuité, d'absence d'hygiène individuelle et collective. L'absence - ou la non utilisation - des latrines et la mauvaise gestion des déchets domestiques et animaux rendent propice la prolifération des mouches qui sont des vecteurs passifs de la maladie.

Le trachome est considéré comme un problème de santé publique au Cameroun. Des enquêtes de prévalence menées dans les régions de l'Extrême-Nord et du Nord ont permis de confirmer l'endémicité de la maladie. Cette confirmation a suscité la prise de conscience des acteurs de santé aux niveaux national et international, et a conduit à l'élaboration du Plan National d'Élimination du Trachome au Cameroun. Ce plan a pour objectif principal l'élimination du trachome comme cause de cécité dans les régions endémiques du Cameroun.

La revue de la littérature sur le trachome au Cameroun montre que celle ci s'est longuement appesantie sur l'estimation des prévalences, la prise en charge des cas, les mesures de riposte et de prévention de la maladie, sans toutefois véritablement innover dans la perspective d'analyse. Trois principales approches se dégagent des publications effectuées sur le trachome au Cameroun : une approche épidémiologique à travers les différentes enquêtes qui ont été mises en oeuvre sur le terrain, une approche curative qui se traduit par les activités de chirurgie du TT et de distribution de masse des médicaments, et une approche promotionnelle qui renseigne sur les activités de nettoyage du visage et de changement de l'environnement.

L'objectif de la présente étude est de proposer une démarche nouvelle dans l'atteinte des objectifs d'élimination du trachome comme problème de santé publique au Cameroun, ceci dans une zone d'incertitude, qui sera représentée par le DS de Kolofata. La mise en forme de cette démarche passera par la description du contexte d'action et l'identification des principaux acteurs et enjeux. L'analyse stratégique de la situation permettra d'adopter un arbre décisionnel ainsi que des actions envisageables par rapport au problème posé.

Le développement d'une telle approche devrait contribuer à apporter des éléments de réponse à la question de recherche, et offrir de nouvelles perspectives et des clés de compréhension à la problématique de l'élimination du trachome comme problème de santé publique au Cameroun.

CHAPITRE 1 : LE TRACHOME, UNE MALADIE TROPICALE NÉGLIGÉE I- CONTEXTE DE LA MALADIE

Le trachome est l'une des principales causes de cécité évitable dans le monde. Il fait partie du groupe des Maladies dites Tropicales Négligées (MTN) qui concerne près d'un milliard de personnes dans le monde. La caractéristique de ces maladies est de toucher les populations pauvres d'une part et d'autre part d'être négligées par les responsables politiques, les chercheurs et la communauté internationale.

Le trachome est une affection oculaire contagieuse. Les symptômes commencent par une légère démangeaison et une irritation des yeux et des paupières. Ils peuvent évoluer jusqu'à entrainer une vision floue et des douleurs oculaires. Les antibiotiques permettent le traitement à un stade prématuré de la maladie. À un niveau plus avancé, une intervention chirurgicale est nécessaire. L'accès à l'eau propre et la présence des conditions sanitaires adéquates sont essentiels pour prévenir la maladie.

L'infection débute souvent durant l'enfance, et devient chronique par la suite, notamment en cas d'infestations multiples, et si aucune action médicale et des mesures d'amélioration de l'hygiène individuelle et collective ne sont pas entreprises. Le trachome provoque à la longue un retournement de la paupière vers l'intérieur et les cils viennent frotter sur le globe oculaire, causant des ulcérations au niveau de la surface de l'oeil et finalement des cicatrices. Ces cicatrices entrainent une cécité irréversible, généralement à un âge compris entre 30 et 40 ans. On retrouve ainsi des adultes qui rendus à la fleur de l'âge sont dorénavant réduits à leur plus simple expression et incapables de subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille.

D'après les estimations de l'OMS, le trachome constitue la première cause de cécité d'origine infectieuse. La cécité due au trachome est évitable, mais une fois installée elle devient définitive. L'accent doit donc être mis sur sa prévention. Le diagnostic précoce des cas, associé à un traitement approprié empêchent l'évolution vers les stades irréversibles.

Grâce à la stratégie CHANCE, l'OMS et ses partenaires visaient l'élimination du trachome comme cause de cécité dans le monde d'ici 2020. GET2020 représente un élément d'une stratégie beaucoup plus large connue sous le nom de «Vision 2020 : le droit à la vue », qui avait pour objectif l'élimination de toute forme de cécité évitable en 2020.

1. Aspects cliniques et épidémiologiques du trachome

Dans les zones où le trachome est endémique, la forme évolutive de la maladie est fréquente chez les enfants d'âge préscolaire, avec des taux de prévalence qui peuvent atteindre 60 à 90%. L'infection est moins répandue à mesure que l'âge augmente.

La maladie est généralement contractée lors d'une proximité étroite avec une personne souffrant de la forme évolutive, et la famille est le principal environnement de la transmission. Le système immunitaire peut vaincre un épisode infectieux isolé, mais dans les communautés d'endémie, les sujets se réinfectent fréquemment.

Après des années d'infections répétées, l'intérieur de la paupière peut se couvrir de tissus cicatriciels (cicatrices conjonctivales) au point que son bord se retourne vers l'intérieur et que les cils frottent contre la cornée (trichiasis), ce qui provoque une douleur constante et une intolérance à la lumière. Ces altérations oculaires peuvent provoquer l'apparition de cicatrices sur la cornée. Faute de traitement, cette affection conduit à la formation d'opacités irréversibles puis à l'apparition de déficiences visuelles et de la cécité ; ceci se situe généralement dans l'intervalle d'âges compris entre 30 et 40 ans.

Il existe 5 stades cliniques d'évolution du trachome selon la classification simplifiée de l'OMS :

- Stade 1 : inflammation trachomateuse folliculaire (TF). Présence d'au moins 5 follicules sur la conjonctive de la paupière supérieure (conjonctive tarsale). Les follicules sont des protubérances blanches, grises ou jaunes, plus pâles que la conjonctive voisine.

- Stade 2 : inflammation trachomateuse intense (TI). La conjonctive de la paupière supérieure est rouge, rugueuse, épaissie. Les vaisseaux sanguins, habituellement visibles, sont masqués par une infiltration inflammatoire diffuse ou par des follicules.

- Stade 3 : cicatrice trachomateuse (TS). Les follicules disparaissent progressivement, laissant place à des cicatrices : lignes, bandes ou plages blanches sur la conjonctive de la paupière supérieure.

- Stade 4 : trichiasis trachomateux (TT). Les cicatrices multiples entraînent une rétraction de la paupière (entropion) ; les cils dévient vers l'intérieur de l'oeil, frottent contre la cornée, provoquent des ulcérations et une inflammation chronique.

- Stade 5 : opacité cornéenne (CO). La cornée devient progressivement opaque, entrainant une baisse de l'acuité visuelle ou une cécité.

L'âge auquel ces problèmes surviennent dépend de plusieurs facteurs dont l'intensité de la transmission locale. Dans les communautés de forte endémie, ils peuvent apparaître dès l'enfance, mais leur développement entre 30 et 40 ans est plus typique.

Ces déficiences visuelles (y compris la cécité) aggravent les difficultés des individus et de leur famille, qui figurent déjà parmi les plus pauvres. Les femmes sont jusqu'à 4 fois plus touchées que les hommes, probablement parce qu'elles sont davantage en contact avec les enfants infectés.

Les facteurs de risques environnementaux qui ont une incidence sur la transmission de la maladie sont le manque d'hygiène, le surpeuplement des habitations et la promiscuité, le manque d'eau, le manque de latrines et de moyens d'assainissement.

Le trachome est endémique dans un grand nombre des régions parmi les plus pauvres et les plus rurales de 41 pays d'Afrique, d'Amérique centrale, d'Amérique du Sud, d'Asie, d'Australie et du Moyen-Orient. Il est responsable de déficiences visuelles et de cécité chez près de 2 millions de personnes. Cela représente près de 1,4% de la totalité des cas de cécité dans le monde.

Dans l'ensemble, l'Afrique reste le continent le plus touché et celui où les efforts de lutte sont les plus intensifs. En 2016, dans les 26 pays de la région africaine de l'OMS où l'on sait que le trachome est un problème de santé publique, plus de 247.000 cas de trichiasis ont été opérés. Ce qui signifie que 95 % des interventions dans le monde ont eu lieu dans cette région. En outre, 83 millions de personnes ont été traitées par antibiotique en 2016, ce qui représente 97 % du total mondial des cas de trachome traités.

Au 1er juillet 2017, 10 pays (Cambodge, Chine, Ghana, Maroc, Mexique, Myanmar, Oman, République d'Iran, République démocratique populaire du Laos et Viet Nam), avaient déclaré avoir atteint les objectifs de l'élimination du trachome en tant que problème de santé publique, ce qui représente une étape majeure dans la campagne menée pour éliminer cette maladie.

L'insuffisance de développement économique est un facteur favorisant la survenue des déficiences visuelles. C'est pourquoi, les programmes de prévention et de soins oculaires ne

L'élimination du trachome en tant que problème de santé publique se définit comme suit : la prévalence du TT inférieure à 0,2% des adultes âgés de plus de 15 ans (soit moins de 2 cas pour 1.000 habitants), et la prévalence de l'infection trachomateuse folliculaire inférieure à 5% chez les enfants âgés de 1 à 9 ans.

L'élimination du trachome comme problème de santé publique dans un pays est la résultante de la soumission et de la validation d'un dossier d'élimination auprès des instances de l'OMS. Le dossier d'élimination du trachome est un ensemble de document qui renseigne sur les progrès accomplis par le pays vers l'atteinte des cibles d'élimination de la maladie. Le dossier doit comporter les informations requises dans le modèle établi par l'OMS.

2. Répercussions sociale et économique du trachome

L'analyse de la distribution mondiale des déficiences visuelles rapporte une prévalence plus élevée dans les pays en voie de développement. Les cécités évitables les plus fréquentes dans ces pays sont la cataracte et le trachome.

Si certains enfants souffrant du trachome actif se plaignent de douleurs oculaires, de sécheresse ou de sensation de sable dans les yeux, la plupart d'entre eux n'imagine pas souvent être infectée. Dans la majorité des cas, le trachome actif est méconnu et n'est pas traité. Par contre, le TT est une affection grave qu'il est impossible d'ignorer.

Le TT est habituellement reconnu des populations. Il existe habituellement dans la langue locale de la région d'endémicité un vocable pour le désigner. En général dans la communauté, bien des croyances traditionnelles sont invoquées pour expliquer pourquoi les populations souffrent du TT. Mais le rapprochement n'est pas toujours fait entre ce problème des yeux qui semble pourtant peu grave chez l'enfant, et toute l'horreur du TT et de la cécité chez l'adulte.

La prévalence du trachome reflète différentes caractéristiques (accès à l'eau, habitat, éducation, hygiène...) essentielles au développement humain. Une prévalence élevée révèle immanquablement les conditions de vie particulièrement difficiles d'une communauté. De ce point de vue, la prévalence du trachome apparaît comme un indicateur très spécifique du développement humain.

devraient pas seulement s'intéresser à l'élimination de la cécité évitable, mais aussi à un développement économique concomitant. Le coût de la réhabilitation et des soins apportés aux déficients visuels est le plus apparent. Mais les coûts indirects résultant des pertes de productivité sont moins apparents mais tout aussi importants.

Le trachome sévit dans les communautés défavorisées où les conditions de vie sont précaires. La fréquence du trachome chez les enfants apparait inversement liée à la scolarisation. Les pays où le trachome actif est le plus fréquent sont ceux où le taux de scolarisation des enfants sont les plus bas et où peu d'adultes savent lire et/ou écrire.

La personne déficiente visuelle et sa famille font face à d'importantes contraintes sociales. Directement et indirectement les déficiences visuelles interfèrent avec diverses activités quotidiennes. Chez les adultes les possibilités d'emploi d'un déficient visuel sont très limitées, leur participation à un grand nombre d'activité est sérieusement entravée. À cela s'ajoute une perte du statut social et d'estime de soi. Ces implications physiques et psychosociales des déficiences visuelles diminuent la qualité de vie des aveugles et de leurs familles.

Pour les investisseurs, l'élimination du trachome pourrait représenter une opportunité dotée de retours sur investissement considérables. Préserver la vue d'une personne atteinte de TT nécessite une simple opération chirurgicale de la paupière qui peut être pratiquée dans un centre de santé local. Les activités des programmes comprenant la distribution d'antibiotiques, l'éducation, l'accès à l'eau et à l'assainissement ont un impact positif allant bien au-delà d'objectifs ultimes « propres au trachome ». Certains qualifient l'élimination du trachome « d'initiative offrant le meilleur rapport qualité-prix » en termes de développement.

3. Politiques de prévention et de lutte contre le trachome

La stratégie CHANCE adoptée par l'OMS en 1993 comprend 4 volets:

· CH : la chirurgie pour traiter le stade cécitant de la maladie. L'acte chirurgical permet de rectifier et de corriger les cils palpébraux rétrovertis des patients souffrant de TT.

· A : les antibiotiques sont utilisés dans le traitement du trachome actif. Ils permettent également de réduire le réservoir de virus dans la communauté. Dans le cadre d'une administration massive, ils sont donnés par le fabricant au programme national par l'intermédiaire de l'Initiative Internationale contre le Trachome (ITI).

· N : le nettoyage du visage. Un visage sale est fortement associé à la transmission du trachome actif. En effet, les enfants dont les visages sont sales sont davantage susceptibles de transmettre le trachome s'ils ont une infection active, ou d'être contaminés s'ils ne sont pas infectés. Les sécrétions oculaires et nasales attirent les mouches qui cherchent à se poser sur les yeux, et qui peuvent transmettre l'infection à d'autres personnes. En se frottant les yeux avec des serviettes, des draps ou le foulard de la mère, on risque également de transmettre le trachome. Une des priorités des programmes de lutte contre le trachome consiste à communiquer l'idée qu'il faut prendre pour habitude de toujours garder propre le visage de l'enfant.

· CE : le changement de l'environnement. Le trachome persiste dans des environnements où le surpeuplement côtoie la pauvreté, le manque d'infrastructures de base pour l'approvisionnement en eau, l'assainissement et l'élimination des déchets. Cette maladie continuera à se répandre dans de tels endroits, et y reviendra même après un traitement à base d'antibiotiques, si de telles conditions ne changent pas. Ce volet revêt un caractère impératif dans toute lutte soutenue contre le trachome et, nécessite la collaboration d'autres secteurs comme l'éducation, l'eau, l'habitat, l'environnement, le développement rural.

En 1996, l'OMS a lancé l'alliance pour l'élimination mondiale du trachome d'ici 2020. Il s'agit d'un partenariat qui soutient la mise en oeuvre de la stratégie CHANCE et le renforcement des capacités nationales à travers l'évaluation épidémiologique, le suivi, la surveillance de la maladie, l'évaluation des projets menés et la mobilisation de ressources. La plupart des pays endémiques ont convenu d'accélérer la mise en oeuvre de cette stratégie afin d'atteindre leurs objectifs respectifs en matière d'élimination d'ici 2020.

L'élaboration d'un plan d'action contre le trachome est le résultat d'une recommandation de la réunion de l'Alliance de l'OMS pour l'élimination mondiale du trachome cécitant d'ici l'an 2020 (GET 2020) qui s'est tenue à Genève en 2011. Celle-ci reconnaissait la nécessité pour les pays de tracer leur voie vers l'élimination du trachome. Pour atteindre l'objectif du GET 2020, une planification adaptée au contexte et une réflexion stratégique sont nécessaires.

Le véritable défi pour mener une lutte continue et soutenue contre le trachome est d'ouvrir les yeux aux populations pour qu'elles puissent apprécier le lien entre une bonne hygiène, un bon assainissement et de meilleures conditions de vie pour les enfants ; ceci afin que leurs soit épargnée la terrible épreuve du TT à l'âge adulte.

II- PROBLÉMATIQUE PRATIQUE DU TRACHOME AU CAMEROUN

La problématique est la présentation d'un problème qui soulève une interrogation qu'il faut résoudre. De façon pratique, elle représente la question à laquelle l'auteur d'une dissertation doit répondre par une argumentation étayée.

1. Observations relatives à la lutte contre le trachome au Cameroun

Au Cameroun, trois régions (l'Extrême-Nord, le Nord et l'Adamaoua) présentent des similitudes sur le plan géographique et culturel. Ce sont des zones à climat chaud et sec avec une faible pluviométrie. L'hygiène individuelle et celle de l'environnement y sont précaires et une forte influence des habitudes culturelles dans ces zones entretiennent le cercle vicieux d'insalubrité qui prédispose au trachome.

Les premières données sur la prévalence du trachome au Cameroun proviennent de l'enquête épidémiologique réalisée dans le DS de Kolofata en 2006 par OSF. La prévalence du trachome actif rapportée était de 31,5% et celle du TT était de 3,5%.

Avec l'appui de USAID et de HKI, des enquêtes à grande échelle ont été réalisées. La première en 2010 dans 27 DS de la région de l'Extrême-Nord, où 13 DS avaient des prévalences de trachome actif chez les enfants de 1 à 9 ans supérieures à 10%, 4 DS étaient situées entre 5 et 9,9%. La deuxième enquête a été mise en oeuvre dans 15 DS de la région du Nord en 2011 où 3 DS (Poli, Rey Bouba, Tcholiré) avaient des prévalences de trachome actif supérieures à 10%. La troisième enquête a porté sur les 8 DS de la région de l'Adamaoua ; le trachome s'y est révélé être non endémique.

Au total à l'issue de ces enquêtes, 6.546.265 personnes étaient à risque de trachome au Cameroun, soit le tiers de la population nationale. Il en ressort également qu'il y aurait 23.387 personnes âgées d'au moins 15 ans atteintes du TT, et 1.276 personnes de 15 ans et plus aveugles du fait du trachome, soit une prévalence globale de la cécité de 0,02 %.

Cette forte prévalence du trachome actif a donc conduit le Cameroun et ses partenaires internationaux (USAID/ITI/HKI, Pfizer, Sightsavers, UNICEF) à mettre en oeuvre des traitements et des activités de prévention dans tous les DS endémiques, ceci par la mise en oeuvre en 2012 du Plan National d'Élimination du Trachome (PNET).

La vision globale du PNET est de faire du Cameroun un pays où le trachome n'est plus une cause de cécité, et où les couches sociales les plus vulnérables vivent dans un environnement sain, aspirant ainsi à la prospérité. Le but du PNET était d'éliminer le trachome comme cause de cécité dans les régions endémiques du Cameroun d'ici à l'an 2020. Les objectifs spécifiques du PNET était de deux ordres : réduire la prévalence du TF à moins de 5%, et réduire la prévalence du TT à moins de 0,2%, ceci dans tous les DS endémiques.

En rapport à l'atteinte des objectifs du PNET, un ensemble d'actions a été mis en oeuvre notamment :

· l'organisation dès 2011 des traitements de masse à l'azythromicine dans les DS endémiques ;

· la mise en oeuvre dès 2014 des enquêtes d'impact dans les DS ayant été traités ;

· l'arrêt en 2016 des activités de distribution de masse des médicaments à la suite de l'atteinte des seuils d'élimination lors des enquêtes d'impact ;

· le démarrage des activités de chirurgie du TT dans les 2 régions endémiques ;

· le lancement des activités de promotion de l'hygiène individuelle et de l'environnement à travers le nettoyage du visage et l'assainissement du milieu.

Parallèlement à ces activités, les 5 DS présentant des discordances lors des enquêtes de base (TF < 5%, TT > 0,2%) ont bénéficié à partir de 2016 d'une enquête pour la recherche spécifique des cas de TT (enquête TT only). Il s'agissait des DS suivants : Touboro, Mada, Meiganga, Garoua 1 et Karhay. Les dernières enquêtes TT only ont eu lieu dans 2 DS (Garoua 1 et Karhay) au courant de l'année 2019.

Dans la région de l'Est, le Cameroun est frontalier avec la RCA, où en 2018 des DS étaient endémiques au trachome. Le trachome étant une maladie contagieuse, et du fait de la porosité de la frontière dans cette partie du pays, une enquête sur le trachome a été mise en oeuvre dans la région de l'Est Cameroun en décembre 2018. Celle-ci a concerné les 6 DS de cette région qui sont frontaliers avec ceux de la RCA, ainsi que les camps de réfugiés qui s'y trouvaient.

Les résultats de cette enquête rapportaient une prévalence du TF chez les enfants de 1-9 inférieure au seuil recommandé par l'OMS (5%) pour la planification des traitements de masse. De même, la prévalence du TT chez les adultes de 15 ans et plus obtenue dans 3 unités d'évaluation était inférieure au seuil de 0.2% recommandé pour l'organisation des campagnes de chirurgie de masse. Par ailleurs, la prévalence de TT de 0.28% obtenue dans les camps des

Une réflexion est en cours sur la définition d'un plan d'action afin que les cas résiduels (ou incidents) de TT soient pris en charge par le système de santé. Ceci passe par le diagnostic des

réfugiés de Gadobadzere, Lolo, Mbile, Timangolo et N'Garissongo impliquait l'organisation d'une campagne de prise en charge chirurgicale des cas de TT dans ces camps. Les données d'une unité d'évaluation n'avaient pas été approuvées par Tropical Data du fait du remplacement inadéquat de 8 grappes dans cette unité d'évaluation pour des raisons d'insécurité et d'inaccessibilité. Une enquête complémentaire a été organisée pour déterminer la prévalence dans les 8 grappes qui avaient été remplacées.

Le Cameroun ayant atteint les critères d'arrêt de traitement de masse et d'élimination de la maladie, des activités de surveillance de la maladie ont été mises en oeuvre. C'est ainsi qu'au courant de l'année 2019 une enquête de surveillance du trachome s'est déroulée dans les 21 DS précédemment endémiques. Il résultait de cette enquête que 2 DS étaient encore endémiques dans la région de l'Extrême-Nord. Il s'agissait de Goulfey et Makari, avec des prévalences respectives de TF à 6,91% et 10,0%. Des activités de distribution de masse d'antibiotiques se sont déroulées dans ces 2 DS au courant des années 2020 et 2021 ; celles ci devraient aboutir à l'atteinte des seuils d'élimination dans ces 2 DS.

La partie méridionale du Cameroun compte 7 régions. La pluviométrie y est forte, et l'hygiène individuelle et collective semble davantage maitrisée, par rapport aux 3 régions septentrionales. Les informations cliniques disponibles ne rapportent pas des cas de trachome. Pour pouvoir affirmer l'élimination du trachome dans tout le pays, il faudra démontrer la non résurgence de la maladie dans les DS précédemment endémiques, et la non existence de la maladie dans les 7 autres régions. Pour ce faire, une enquête documentaire devra être organisée dans ces régions. Celle-ci va consister en une revue des registres de consultations et de soins dans les centres de soins oculaires.

Dans le cadre de la définition d'une stratégie de transition post élimination, un groupe de travail sur le trachome, constitué des experts de la lutte contre le trachome a été mis sur pied. Les objectifs de ce groupe de travail sont en rapport avec le suivi et l'évaluation des différentes activités de lutte contre le trachome, la proposition d'une approche pour la mobilisation du financement des activités, et la rédaction du document narratif sur les progrès accomplis par le pays vers l'atteinte des cibles d'élimination de la maladie.

cas, l'existence des structures sanitaires et des intrants pour la prise en charge des cas, et le maintien d'une ressource humaine compétente dans les DS précédemment endémiques.

Rendu à ce stade, les challenges majeurs pour l'atteinte de l'objectif d'élimination du trachome comme problème de santé publique au Cameroun sont les suivants :

- Chirurgie du TT : arriérés des cas, prise en charge des cas, TT post opératoires, cas incidents, maintien d'une ressource humaine compétente.

- DS Kolofata : cartographie, épidémiologie (incidence, prévalence) de la maladie, insécurité, risques humains, déplacement des populations.

- Enquête documentaire dans les 7 régions méridionales.

Au Cameroun, la lutte contre le trachome et les autres causes de cécité est assurée par le Ministère de la Santé Publique à travers le Programme National de Lutte contre la Cécité.

La cécité due au trachome est évitable, mais une fois installée elle devient définitive. La cécité est une déficience visuelle totale. Le terme cécité vient du latin caecitas « perte de la vue ». On qualifie une personne atteinte de cécité de personne aveugle.

Le Programme National de Lutte contre la Cécité (PNLCé)

Le PNLCé a été créé le 08 janvier 2003 par décision du Ministre de la Santé Publique. Il s'agit d'un programme prioritaire du Ministère de la Santé Publique visant à réduire la prévalence de la cécité et de la malvoyance. La gestion du PNLCé est assurée au niveau national par le Comité National de Lutte contre la Cécité (CNLC) et le Groupe Technique Central Cécité (GTC-C), et au niveau régional par les unités décentralisées.

Le CNLC a pour mission la définition des grandes orientations et des objectifs généraux de la lutte contre la cécité, ainsi que la mobilisation des ressources nécessaires. À ce titre le CNLC est notamment chargé de :

- élaborer et mettre en oeuvre la politique nationale de lutte contre la cécité ;

- apprécier la cohérence de l'ensemble des interventions des différents partenaires ;

- adopter les plans d'action annuels de lutte contre la cécité et les budgets y afférents ;

- mobiliser les ressources nécessaires aux activités de lutte contre la cécité ;

- coordonner et surveiller la mise en oeuvre des différentes activités du PNLCé.

Les frais de fonctionnement du CNLC et de ses organes sont supportés par le budget du Ministère de la Santé Publique et éventuellement les contributions des partenaires. Le coordonnateur du GTC-C assure le secrétariat du CNLC. Les procédures internes de fonctionnement du CNLC sont fixées par décision du Ministre de la Santé Publique.

Le GTC-C est l'organe exécutif du CNLC. A ce titre il assure :

- la coordination et la gestion du PNLCé sur le territoire national en collaboration avec

les administrations, les communautés, les partenaires nationaux et internationaux ;

- la collecte, l'exploitation et la diffusion des informations sur la cécité ;

- la préparation du plan d'action annuel budgétisé des activités de lutte contre la cécité ;

- la préparation des réunions, la rédaction et la diffusion des procès verbaux ;

- la planification et la mise en oeuvre des stratégies et activités arrêtées par le CNLC ;

- la gestion des fonds mis à la disposition du PNLCé par l'État, les partenaires

nationaux et internationaux ;

- la coordination des activités de recherche et de formation.

Il est en outre chargé :

- d'assurer le suivi-évaluation de la mise en oeuvre du PNLCé ;

- d'assurer la gestion du personnel mis à la disposition du Programme ; - de tenir la comptabilité de ses opérations ;

- de rendre semestriellement compte au CNLC de toutes ses activités ; - d'instruire tout dossier confié à lui par le CNLC.

Le GTC-C est dirigé par un Coordonnateur National assisté de deux Coordonnateurs Adjoints.

L'organisation et le fonctionnement du GTC-C sont fixés par un texte particulier du Ministre de la Santé Publique.

2. Identification du problème

Un problème, dans son acceptation la plus courante, est une situation dans laquelle un obstacle empêche de progresser, d'avancer ou de réaliser ce que l'on voulait faire. Un problème nait ainsi lorsqu'il y a une différence entre l'état des choses actuel et celui souhaité, ou lorsqu'il y a anormalité. In fine, un problème représente une difficulté qu'il faut résoudre pour obtenir un résultat, une situation instable ou dangereuse exigeant une décision.

Comment surmonter les contraintes présentes dans le DS de Kolofata, afin d'atteindre l'objectif d'élimination du trachome comme problème de santé publique au Cameroun ?

Sous l'angle de la santé publique, BAUMANN et GAO définissent le problème comme un « écart entre un état de santé physique, mental, social constaté, observé, exprimé et un état de santé considéré comme souhaitable, défini par des références médicales élaborées par des experts, le législateur, et/ou des normes sociales élaborées par des équipes, la société, etc ».

Un problème de santé publique apparait donc, pour une communauté ou un groupe de personnes, comme la différence critique entre l'état de santé réel, mesuré par des indicateurs et l'état de santé recommandé par des normes.

Le Cameroun a atteint les seuils d'élimination du trachome dans les 21 DS initialement endémiques. Le DS de Kolofata présente des particularités qui s'écartent de la norme, et empêchent la soumission / validation du dossier d'élimination de la maladie :

- Il n'a pas participé aux enquêtes de base de 2010 dans la région de l'Extrême-Nord.

- Il n'a pas bénéficié d'une enquête d'impact réalisée par le PNLCé ;

- Il n'a pas été éligible pour l'enquête de surveillance de 2018 ;

- Les activités de la stratégie CHANCE n'y sont pas mises en oeuvre depuis 2013 ;

- Les dernières prévalences du trachome n'y sont pas en accord avec les seuils

d'élimination définis par l'OMS.

Cet écart de la norme est favorisé par les éléments tels que l'inaccessibilité aux soins préventifs et curatifs due à l'enclavement du milieu, la situation sécuritaire très précaire (présence de la secte terroriste Boko Haram), le déplacement des populations. Ce contexte favorise l'apparition de nouveaux cas de la maladie, et rend difficile le contrôle de celle ci. Cette situation pourrait être à l'origine d'importantes modifications dans le plan d'élimination du trachome au Cameroun.

Il s'agira ici de trouver la bonne stratégie afin de contourner cette zone d'incertitude. Une zone d'incertitude désigne un espace de pouvoir que maitrise un acteur stratégique, et qui fait l'objet d'enjeux, ou donne naissance aux stratégies des jeux d'acteurs. À ce niveau, DUHAMEL aperçoit la stratégie comme la manière d'atteindre le but fixé, la série ordonnée dans le temps des réponses aux questions du type : comment s'y prendre ?

3. Question de recherche

CHAPITRE 2 : LE TRACHOME, UN PROBLÈME DE SANTÉ PUBLIQUE À KOLOFATA

I- ÉTUDE DE CAS : LE TRACHOME DANS LE DS DE KOLOFATA 1- Présentation du DS de Kolofata

Le DS de Kolofata est situé dans l'arrondissement de Kolofafa, département du Mayo Sava, région de l'Extrême- Nord. L'arrondissement de Kolofata est limité :

- Au Nord et à l'Ouest par la République Fédérale du Nigeria et la Commune de Mora ; - Au Sud par la Commune de Mozogo dans le Mayo Tsanaga ;

- A l'Est par la Commune de Mora.

La population totale du DS de Kolofata est de 77.857 habitants, suivant les résultats du 3ème Recensement Général de la Population et de l'Habitat au Cameroun (2005). Elle est composée de 39.414 hommes (soit 50,62%) contre 38.443 femmes (soit 49,38%).

La population de Kolofata essentiellement rurale, vit de l'agriculture, l'élevage, le commerce et l'artisanat. Le climat y est de type soudano sahélien avec une longue saison sèche de 7 à 9 mois, et une courte saison de pluies de 3 à 4 mois allant de mai à juin, et de septembre à octobre.

Situation géographique de Kolofata

Démographiquement, le DS est caractérisé par un niveau économique bas. Environ 95% de la population adulte est illettrée. Trois quarts de la population adhèrent à l'Islam, le reste au christianisme et à l'animisme. Il y a plusieurs langues et traditions ethniques indigènes. Les groupes prédominants sont les Kanuris, les Mandaras, les Gemergous, les Potokos, les Mafas, les Mukteles, les Arabes Choas, et les Fulbes.

Géographiquement, le DS comprend une pleine sableuse avec un bord montagneux au sud. Une minorité des villages est approvisionnée en eau courante ; la plupart dépend des puits à ciel ouvert, des forages, des cours d'eau qui sèchent rapidement à la fin de la saison pluvieuse.

Le DS compte sept formations sanitaires, dont un hôpital de district, deux centres de santé intégrés confessionnels, et quatre centres de santé publics.

Le DS se définit comme l'unité géographique opérationnelle pour l'offre des services de santé de base aux populations. En théorie des organisations, la notion de DS correspond à une forme d'organisation du travail appelée départementalisation par output. Laquelle organisation est basée sur le type de produit ou de service fournit par l'organisation. Dans le cas du DS, le produit ou le service fournit est constitué par les soins proposés.

2- Épidémiologie du trachome dans le DS de Kolofata

Depuis la fin des années 90, le trachome apparait comme un problème de santé et de développement social dans le DS de Kolofata. La conjonctivite trachomateuse, et le trichiasis sont des motifs fréquents de consultation. La pauvreté, le manque d'eau, l'abondance des mouches, l'insuffisance d'hygiène et d'assainissement, l'analphabétisation, et le climat chaud et sec ont été identifiés comme des facteurs contribuant à l'hyper endémicité de cette maladie.

Le Ministère de la Santé Publique à travers le Service de Santé de District de Kolofata, et en collaboration avec l'ONG Ophtalmo Sans Frontières, le Laboratoire Théa en France, et l'Hôpital Quinze-Vingt à Paris, a défini un plan de lutte contre le trachome dans ce DS. La stratégie CHANCE définie par l'OMS a été adoptée pour la lutte. Après les préparatifs aboutis en 2005, un programme intensif de sensibilisation des populations a démarré en 2006 dans les villages et auprès des autorités. Des affiches, des dépliants et d'autres matériels éducatifs ont été créés et mis à la disposition des différents acteurs. Des séances d'information et de sensibilisation ont été tenues avec les directeurs et les maitres des écoles publiques, et ensuite avec les élèves de toutes les écoles publiques de la zone. La formation du personnel médical, infirmier et communautaire a commencé et a continué en cascade.

L'étude épidémiologique menée dans le DS de Kolofata dans la Province de l'Extrême- Nord en décembre 2006 visait à estimer les prévalences du trachome folliculaire et du trachome inflammatoire chez les enfants de 1 à 9 ans, de l'entropion trichiasis et des opacités

cornéennes imputables au trachome chez les femmes de plus de 14 ans. Le codage simplifié du trachome proposé par l'OMS a été utilisé pour recueillir les données.

Il s'est agi de la première enquête de prévalence sur le trachome réalisée au Cameroun. Il ressort de celle ci que chez les enfants de 1 à 9 ans la prévalence du TF était estimée à 21%, et celle du trachome inflammatoire intense (TF/TI) à 5,2%. Chez les femmes de plus de 14 ans, la prévalence du TT était estimée à 3,4%, et celle des opacités cornéennes imputables au trachome à 1,4%. La prévalence de la cécité imputable au trachome était alors de 0,9%.

Une revue de la littérature relative à cette étude montrait que le trachome était aussi prévalent dans certains DS des pays voisins. Le faciès épidémiologique mis en évidence dans cette enquête était celui d'une endémie trachomateuse à fort potentiel cécitant ; les prévalences du TT et celle des opacités cornéennes imputables au trachome étaient élevées.

Des campagnes de traitement de masse ont été menées à 3 reprises, en 2008, 2009 et 2010. La population entière du DS a été ciblée, et la stratégie d'administration avec des gouttes d'Azyter (azithromycine) matin et soir pendant 3 jours a été adoptée. Des études de prévalence réalisées avant chaque campagne de distribution ont montré que la prévalence a chuté de 31,5% en 2008 à 6,3% en 2009 et à 3,1% en 2010. Chaque personne dans le ménage a reçu 2 doses d'Azyter 1,5% dans chaque oeil, 2 fois par jour pendant 3 jours, pendant 3 années consécutives. Après les trois campagnes de traitement, les activités de sensibilisation se sont poursuivies, l'approvisionnement en points d'eau dans les villages a été renforcé.

Évolution de la prévalence du trachome actif
dans le DS de Kolofata

35,00%

31,50%

26,00%

6,30%

30,00%

25,00%

20,00%

15,00%

10,00%

5,00%

0,00%

3,10%

janv.-06 janv.-07 janv.-08 janv.-09 janv.-10

En janvier 2013, une enquête de prévalence du trachome a été menée dans 41 villages du DS. Une légère augmentation de la prévalence à 5,2% a été trouvée, par rapport au taux de 3,1% en 2010, et 4 villages avaient un taux au-delà de 10%. Au vu de ces résultats, il a été décidé de mener une quatrième campagne de traitement de masse dans les zones les plus touchées, c'est-à-dire celles qui avaient une prévalence de TF supérieure ou égale à 5%.

L'objectif de cette campagne de traitement antibiotique de masse était de traiter 19.555 personnes (15,3% de la population) dans 18 villages, matin et soir pendant 3 jours. Les résultats rapportaient que sur 19.555 personnes attendues, 19.112 (98%) avaient été traitées.

Au vu de ce qui précède, lors de la campagne de 2013, il ressort que seule une minorité de la population du DS (14,93%) a bénéficié du traitement antibiotique de masse. Il s'agissait uniquement des populations résidentes dans les villages qui avaient un taux de prévalence supérieure ou égale à 5%. Tout le DS n'a pas été traité lors de cette activité.

3- Description des acteurs et enjeux dans la lutte contre le trachome

Les acteurs sont des éléments qui agissent dans un espace géographique. La théorie de l'acteur stratégique a été élaborée par CROZIER et FRIEDBERG. Elle stipule qu'il n'est pas possible de considérer que le jeu des acteurs n'est déterminé que par la cohérence du système ou par les contraintes environnementales. On doit chercher en priorité à comprendre comment se construisent les actions collectives à partir des comportements et d'intérêts individuels parfois contradictoires entre eux.

Concrètement, l'acteur devra toujours s'abriter entre deux grands objectifs : d'une part, un objectif d'autonomie, c'est-à-dire une tendance à se soustraire au pouvoir d'autrui ; d'autre part, un objectif d'action qui le pousse à développer ses propres ressources pour pouvoir guider la conduite des autres acteurs. Dans les deux cas, cela revient pour l'acteur à accroitre sa marge de liberté afin de ne pas être soumis au bon vouloir d'autrui. Le but de l'acteur stratégique devient donc de conquérir des marges de liberté, indépendamment des motivations profondes de son action.

Un enjeu est ce « ce qui est en jeu », quelque chose que l'on risque dans une compétition, une activité, ou une situation vis-à-vis d'un aléa. C'est donc ce que l'on peut gagner ou perdre en menant une action (ou en ne la menant pas). L'analyse des besoins dans un territoire, de ses atouts et de ses limites, aboutit à la définition des actions à mener, c'est-à-dire des enjeux.

La description des acteurs et enjeux dans le cadre de l'élimination du trachome dans le DS de Kolofata va consister en un passage en revue des éléments suivants : la présence de la secte terroriste Boko Haram, les populations déplacées internes / réfugiées, les comités de vigilance, les forces de défense et sécurité, les acteurs humanitaires, l'approvisionnement en eau, l'hygiène et l'assainissement, la pandémie à COVID-19. C'est à partir de la description des acteurs et enjeux que va être définie la stratégie, de laquelle va découler le plan d'action.

La situation d'insécurité persistante dans la région du Bassin du Lac Tchad, notamment au niveau des frontières des pays et à l'intérieur de chaque État, occasionne d'importants déplacements forcés de populations civiles tant à l'intérieur du même pays qu'à l'extérieur. Ceci est à l'origine de la présence des personnes déplacées internes et des réfugiés de part et d'autre des frontières. Au Cameroun, ces déplacements sont majoritairement concentrés dans la région de l'Extrême-Nord.

Depuis 2014, la région de l'Extrême-Nord du Cameroun est fortement touchée par le conflit Boko Haram en cours au Nigeria, pays frontalier au nôtre. Initialement connue comme terre d'accueil pour les refugiés nigérians qui s'étaient installés dans les zones frontalières, la région est progressivement devenue le siège d'une forte insécurité, dont les effets se font sentir sur l'ensemble des populations notamment celles des localités frontalières.

Avec la mise en place de la force multinationale, Boko Haram s'est davantage engagé dans une guerre asymétrique, et commet de nombreux attentats et attaques contre les populations civiles, ainsi que des enlèvements et diverses formes d'incursions. Ceci contribue à déstabiliser la région de l'Extrême-Nord, conduisant à des déplacements massifs des populations. En dépit de l'affaiblissement de Boko Haram au Cameroun ces derniers mois, la situation humanitaire ne s'améliore pas véritablement dans la région de l'Extrême-Nord. La commune de Kolofata dans le département du Mayo Sava est l'une des communes les plus touchées depuis le début de la crise.

L'arrondissement de Kolofata fait régulièrement les frais des attaques de Boko Haram. Cette localité située à quelques kilomètres de la frontière avec le Nigéria, est - avec le temps - devenue une zone militaire. Les attaques contre les villages ou les positions de l'armée camerounaise sont très fréquentes ; ceux qui les perpètrent sont souvent difficiles à différencier des civils. Les demandeurs d'asile qui trouvent refuge dans cette zone inhospitalière sont traités avec suspicion. Les humanitaires doivent constamment solliciter l'appui des autorités civiles et militaires pour pouvoir mener à bien leurs activités.

En 2018, on comptait plus de 12.500 réfugiés nigérians et déplacés internes qui vivaient à Kolofata, ceci dans des conditions précaires avec un accès limité aux services de base du fait de l'insécurité qui règne dans la zone et aux opérations militaires en cours. Ces personnes, parfois privées de toute assistance, ont des besoins urgents en nourriture, eau, abris et santé.

L'arrondissement de Mora compte des populations déplacées dans les localités de Mémé et Igawa-Mémé. La localité de Mémé située à 21 kilomètres de Mora compte six camps de déplacés pour plus de 2.000 âmes, des populations venues d'environ 30 villages de la région. Au lieu dit Igawa-Mémé, deux camps des déplacés partagent des sites voisins. Ici, le quotidien est tout aussi difficile et les histoires pratiquement similaires. 93% de la population s'est déplacée en raison du conflit lié à Boko Haram, tandis que 6,6% des déplacements ont été provoqués par des inondations, la sécheresse et autres facteurs climatiques, et 0,4% par d'autres raisons non spécifiées.

Le camp de déplacés d'Igawa-Mémé abrite deux sites équidistants de 500 mètres. Les populations déplacées internes y logent dans des abris de fortune, faits de vieilles bâches et de paille. Chaque abri accueille 4 à 6 personnes, tous sexes et âgés confondus. Les besoins immédiats exprimés se résument en nattes, bâches, canaris, couvertures, ustensiles de cuisine, eau et aliments. La grande majorité de la population est composée d'enfants et de femmes. Ils viennent principalement des villages Sanda-Wadjiri, Bia, Kalniwa et Kolofata. "Nous vivons dans la pure résilience depuis que nous sommes ici en 2015. Les conditions de vie sont rudes. On n'a pas d'eau, pas de denrées alimentaires, pas de matériels de couchage et nous habitons dans ces maisons en matériaux provisoires. Ici même, nous ne sommes pas à l'abri de Boko Haram", raconte une dame rencontrée sur place. Il est à noter qu'il n'y a ni latrines ni points d'eau sur le site de recasement temporaire des refugiés. Les représentants des réfugiés ont exprime leur souhait d'être transférés à Minawao, ou même à Banki.

Les membres des comités de vigilance sont le plus souvent recrutés dans les communautés locales ; ils partagent généralement la même identité ethnique ou politique, les mêmes intérêts collectifs, et leurs perceptions des menaces sont similaires. Ils agissent comme des milices locales, et jouissent généralement d'une grande légitimité en raison de leurs racines communautaires. Ils peuvent identifier, pister et combattre les insurgés assez efficacement grâce à leur familiarité avec les langues, la géographie et la culture locales. Ils sont supervisés avec succès par les autorités de l'État - et les acteurs internationaux -, et ils accompagnent ceux-ci dans le renforcement de la légitimité de l'État au sein des communautés locales.

Ils sont ainsi de nombreux jeunes à s'être réunis en comités de vigilance, encouragés par le Gouvernement. Ces volontaires se retrouvent en première ligne face aux kamikazes et aux raids djihadistes. Les comités de vigilance renseignent les forces de défense et servent d'éclaireurs ou de guides. Ils affrontent parfois directement les mouvements terroristes et contribuent à protéger les communautés, notamment contre les attentats suicides. Ils peuvent reconnaitre les djihadistes, et surtout le visage de certains cadres locaux de Boko Haram traqués. En échange, ils reçoivent de l'armée des médailles, des vivres et d'autres formes de récompenses et gratifications.

Pour l'approvisionnement en eau potable des populations, la localité de Kolofata dispose de plusieurs systèmes d'approvisionnement. Un réseau d'adduction d'eau desservant les populations à travers les branchements particuliers et les bornes fontaines est présent. Celui ci n'est pas toujours fonctionnel. On recense 8 forages équipés de pompes à motricité humaine. Des puits traditionnels et des Mayos (cours d'eau temporaires) sont également utilisés. Compte tenu de l'insuffisance des infrastructures fonctionnelles, les populations ont recours aux vendeurs d'eau ambulants pour satisfaire leurs besoins. À titre indicatif, un bidon de 20 litres est vendu à 100 F CFA.

Pour ce qui est de l'hygiène et l'assainissement, la défécation à l'air libre est pratiquée par la plupart des groupes vulnérables. Au site des refugiés, seulement 4 latrines sont disponibles soit un ratio de plus de 150 personnes par latrine. Selon les propos recueillis, les 4 latrines existantes sont utilisées exclusivement par les femmes. Le reste pratique la défécation à l'air libre dans les espaces environnants. La défécation à l'air libre désigne l'action de déféquer hors des habitations (ou hors des toilettes publiques), par exemple dans les champs, les forêts, les buissons, les lacs, les montagnes, ....

La pandémie de la COVID-19 a eu un impact considérable sur les programmes d'élimination du trachome. Le 1er avril 2020, afin de réduire le risque de transmission du COVID-19, l'OMS a recommandé que la distribution de masse de médicaments, les initiatives de détection des cas actifs de complications du trachome et les enquêtes épidémiologiques soient reportées jusqu'à nouvel ordre. Cet avis a été renouvelé dans un guide publié le 5 mai 2020. Cette pandémie a favorisé la promotion du lavage régulier des mains, le respect de la distanciation physique, le port des masques de protection du visage, l'usage des gels hydro alcooliques, la limitation des contacts et des déplacements humains.

II- DIFFICULTÉS POSÉES PAR LE CAS

La pratique du management stratégique constitue un véritable défi. Il faut en effet être capable d'appréhender les problèmes et difficultés auxquels les organisations sont confrontées dans leur développement à long terme, tout en s'inscrivant dans leur fonctionnement quotidien et dans leur réalité effective.

1- Au vu des observations faites > Insécurité et risques humains

Pour une personne ou une collectivité, l'insécurité désigne l'inquiétude qui résulte du manque de sécurité et de l'éventualité d'un danger réel, imminent ou imaginé. Dans notre contexte, elle représente l'ensemble des menaces physiques, morales, économiques, sociales, politiques environnementales et / ou culturelles rencontrées dans la vie quotidienne, et qui font que la sureté physique et la tranquillité ne soient plus assurées.

Dans le cadre du DS de Kolofata, l'insécurité réduit considérablement la mobilité des acteurs sur le terrain. Les réfugiés et déplacés internes dans le contexte de Boko Haram sont victimes de la restriction des mouvements surtout lors de la perte des documents d'état civil. Les populations affectées sont dépouillées de leurs biens du fait des pillages des bétails et récoltes, de la destruction de leurs maisons par les incendies criminels, des abus et autres formes d'exploitations des femmes et des enfants. La présence des populations déplacées modifie les équilibres ethniques, religieux et de genre dans les localités d'accueil, et elle est susceptible de générer des conflits sociaux.

Les populations réfugiées ou déplacées internes présentent des risques humains liés à l'insécurité, la perte des moyens de subsistance, l'accès limité à l'alimentation, la réduction de l'accès aux services de santé de base, l'insuffisance de l'aide humanitaire, la fermeture des écoles, la restriction des mouvements et la migration saisonnière.

> Déplacement des populations

Les différents incidents perpétrés par les combattants de Boko Haram dans le département du Mayo Sava ont provoqué le déplacement des populations de cette zone frontalière avec le Nigéria vers Mora, Djoundé et Mémé. En mai 2019, on recensait 13.476 personnes déplacées internes de l'arrondissement de Kolofata pour celui de Mora ; on note une forte proportion des enfants de moins de 5 ans au sein de ces populations déplacées internes.

Une personne déplacée interne est une personne qui a été forcée ou contrainte à fuir ou à quitter son foyer ou son lieu de résidence habituel, notamment en raison d'un conflit armé, d'une situation de violence généralisée, de violations des droits de l'homme ou de catastrophes naturelles ou provoquées par l'homme ou pour en éviter les effets, et qui n'a pas franchi les frontières internationalement reconnues d'un État.

Un réfugié est une personne ressortissante d'un pays autre que celui où elle se trouve, et qui est venue dans ce dernier pour chercher refuge d'une situation à laquelle elle était confrontée dans son pays d'origine.

Ces différents acteurs se retrouvent dans une zone d'incertitude ; il s'agit d'une zone au sein de laquelle l'acteur rend son comportement incertain, imprévisible et indéterminé. Ce concept met l'accent sur deux notions liées : l'autonomie et le pouvoir. À ce niveau, les attitudes des différents acteurs sont dictées par la recherche de leurs intérêts au moindre risque. Il faut cerner les contraintes auxquelles les acteurs ont à faire face pour comprendre les enjeux. Napoléon décrit cela comme « le courage de l'improviste qui, en dépit des événements les plus soudains, laisse néanmoins la liberté d'esprit, de jugement et de décision ».

> Défaut dans l'accès aux soins de santé

L'accès aux soins de santé implique que soit réuni un ensemble de critères sociaux favorables à la santé de tous, notamment la disponibilité de services de santé, des conditions de travail sans risque, des logements appropriés et des aliments nutritifs, ceci dans un système de santé solide et efficace. Le système de santé désigne l'ensemble des organisations, des institutions, des ressources et des personnes dont l'objectif principal est d'améliorer la santé.

Le mauvais état d'un système de santé est l'un des principaux obstacles à l'accès aux soins de santé essentiels. C'est le cas dans le DS de Kolofata où les différents programmes de santé n'arrivent pas toujours à mener à bien leurs activités. Du fait de l'insécurité et des risques humains, les partenaires sont souvent réticents à déployer les différentes ressources (matérielles ou humaines) ou accompagner les prestataires de soins sur le terrain.

L'absence de services d'assainissement et d'hygiène de base, y compris l'absence de choix éclairés en matière de santé constitue une violation des droits humains à l'eau et à l'assainissement, ainsi que des droits à la santé, au travail, à un niveau de vie adéquat, à la non-discrimination, à la protection, à l'information, à l'équité et à la dignité humaine.

2- Par rapport à la question de recherche

La question de recherche de notre travail est : comment surmonter les contraintes présentes dans le DS de Kolofata, afin d'atteindre l'objectif d'élimination du trachome comme problème de santé publique au Cameroun ?

Au vu des difficultés posées par le cas, il ressort 3 problèmes principaux : > Apparition de nouveaux cas de la maladie dans le DS

Le trachome est la principale cause de cécité infectieuse. Cette pathologie se transmet de personne à personne, le plus souvent d'un enfant à un autre ou d'un enfant à sa mère, dans un contexte de pénurie d'eau, de promiscuité et d'absence d'hygiène individuelle et collective. L'absence (ou la non utilisation) des latrines et la mauvaise gestion des déchets domestiques et animaux rendent propice la prolifération des mouches qui sont des vecteurs passifs de la maladie.

Le DS de Kolofata tel que décrit dans les paragraphes précédents, présente un contexte de promiscuité et d'insalubrité qui prédispose à la survenue de nouveaux cas de la maladie. De plus la présence de la secte terroriste Boko Haram limite grandement les interventions des différents acteurs et partenaires de la lutte contre le trachome. Les aspects CH et A de la stratégie CHANCE n'y sont pas mis en oeuvre depuis 2014 ; la dernière distribution de masse d'antibiotiques (en 2013) n'a concerné que 14,93% de la population du DS. Quant aux aspects N et CE, ils ne sont pas documentés.

On retrouve à Kolofata la présence de populations nigérianes, réfugiées du fait de cette secte terroriste. Ces populations proviennent d'une région du Nigéria (Borno State) qui en 2019 était encore suspectée endémique au trachome (trachoma atlas). Le trachome étant une maladie contagieuse, la possibilité d'apparition de nouveaux cas de la maladie est à envisager.

> Présence d'un foyer secondaire de la maladie dans les camps des déplacés

Les camps des déplacés de Mora abritent des populations venant du DS de Kolofata. Or ce DS n'a pas atteint les standards de l'OMS pour ce qui est de l'élimination du trachome comme problème de santé publique. Une autre partie de la population de ces camps de déplacés vient de l'État de Borno au Nigéria, zone de ce pays qui en en 2019 était encore suspectée pour être endémique au trachome.

De plus, dans ces camps de déplacés l'hygiène individuelle et celle de l'environnement y sont précaires et une forte influence des habitudes culturelles dans ces zones entretiennent le cercle vicieux d'impureté et de pestilence qui motive l'apparition des cas de trachome.

Au vu de la présence de ces différents facteurs favorisants le trachome, la possibilité d'apparition d'un foyer secondaire de la maladie dans les camps de déplacés de Mora n'est pas à exclure.

Le foyer de la maladie désigne le lieu où elle sévit avec une prévalence élevée, et où elle rayonne et se communique. Le foyer secondaire est en rapport ici avec la flambée des cas de trachome dans un espace géographique jusque là indemne. Cela peut passer inaperçu, et n'être reconnu qu'au décours d'une enquête.

> Retard par rapport à l'agenda d'élimination du trachome au Cameroun.

Le Plan National d'Élimination du Trachome au Cameroun a pour vision de faire du Cameroun un endroit où le trachome ne sera plus une cause de cécité, et où les couches sociales les plus vulnérables pourront vivre dans un environnement sain, aspirant ainsi à la prospérité. L'objectif de ce plan est d'éliminer le trachome cécitant comme problème de santé publique au Cameroun.

La certification de l'élimination du trachome comme problème de santé publique dans un pays est la résultante de la soumission et de la validation d'un dossier d'élimination auprès des instances de l'OMS. Ceci ne peut être fait s'il existe encore un DS où les seuils d'élimination (TF < 5%, TT < 0,2%) et les critères d'élimination (enquête de base, CHANCE, enquêtes d'impact et surveillance, transition) n'ont pas été atteints.

Aujourd'hui, le PNLCé ne dispose pas de données actualisées sur la prévalence du trachome dans le DS de Kolofata. Depuis l'année 2014 aucune intervention en rapport avec la stratégie CHANCE n'y a été mise en oeuvre, et ce DS se retrouve dans une des régions endémiques à la maladie. Une endémie désigne une infection présente au sein d'une population (ou une région) donnée, et dont l'incidence doit être surveillée et faire l'objet de prévisions.

Dans l'attente de l'estimation de la prévalence du trachome dans ce DS, avec éventuellement la mise en oeuvre de la stratégie d'élimination de la maladie, l'objectif du Plan National d'Élimination du Trachome au Cameroun pourra être revu, le chronogramme redéfini, et la date de soumission du dossier d'élimination reprécisée.

CHAPITRE 3 : DÉVELOPPEMENT THÉORIQUE ET APPROCHE ANALYTIQUE I- CHAMP DISCIPLINAIRE ET THÉORIE CONVOQUÉE

D'après ORSONI, le management stratégique est l'art d'employer les méthodes, les modèles, les théories, en un mot les armes qui peuvent aider les dirigeants lorsqu'ils effectuent des choix dans le cadre d'une politique générale.

Une théorie représente un modèle ou un cadre de travail développé pour la compréhension de la nature et de l'humain. Elle apparait également comme un ensemble organisé d'idées, de notions et de concepts abstraits appliqué à un domaine particulier. Dans le domaine des sciences, la théorie est une construction intellectuelle, hypothétique et synthétique, organisée en système et vérifiée par un protocole expérimental.

Une théorie du changement est une vision explicitement documentée (et donc évaluable) de la façon dont on pense que le changement doit se produire dans le cadre d'un programme, d'une organisation, d'un État, etc. Il s'agit d'un cadre conceptuel qui a été développé pour aider à déterminer quel changement social peut être entraîné par les programmes et pourquoi. La théorie du changement va expliquer comment les activités sont censées produire un ensemble de résultats qui contribuent à la réalisation des impacts finaux prévus.

La démarche de changement peut se décliner comme suit: dans une première phase appelée phase de diagnostic, il convient de s'interroger sur les raisons du changement. Dans la seconde phase, si le problème a pu être défini et les causes identifiées, il est essentiel de définir les objectifs à atteindre. Vers quoi veut-on aller ? Comment définir une situation qui, après changement serait plus acceptable ? Pour atteindre ces objectifs, il convient tout d'abord d'identifier les solutions possibles et de les évaluer sous différents aspects (pertinence, faisabilité, coût, bénéfices escomptés...), en tenant compte des attitudes individuelles ou de groupe face aux actions projetées.

Des outils vont être utilisés pour mener cette analyse du positionnement des différents acteurs de l'organisation. Ensuite, la matrice d'analyse va être élaborée. Celle-ci sera suivie par la formulation et la mise en oeuvre des options stratégiques les plus pertinentes et les plus intéressantes pour l'atteinte les objectifs. Enfin, cette mise en oeuvre devra bénéficier d'une évaluation et des ajustements nécessaires, en fonction des opportunités et menaces existantes sur le terrain.

1- Présentation de la théorie : Health Belief Model

Le Health Belief Model (HBM) ou modèle des croyances relatives à la santé est un modèle psychologique qui tente d'expliquer et de prédire les comportements liés à la santé tout en se concentrant sur les attitudes et les croyances des individus. Il a été développé dans les années 1950 par un groupe de chercheurs et de praticiens en psychologie sociale dans les services américains de santé publique. Ceux ci cherchaient à comprendre les causes de l'échec et du manque de participation du grand public aux programmes de prévention de la tuberculose.

Depuis lors, le HBM a été adapté pour explorer une variété de comportements de santé à long et court terme. Le modèle de croyances relatives à la santé suggère que les croyances des gens sur les problèmes de santé, les avantages perçus de l'action, les obstacles à l'action, et l'auto efficacité expliquent l'engagement (ou le manque d'engagement) dans le comportement de promotion de la santé.

Depuis plus de 30 ans, le modèle des croyances relatives à la santé est l'approche psychosociale la plus utilisée pour expliquer les comportements de santé. Il est utilisé par des médecins, les professionnels de santé publique, les promoteurs de bonne pratique en santé, pour concevoir et évaluer des actions en éducation et communication pour la santé. Il permet de mieux comprendre l'incapacité des personnes à adopter des stratégies de prévention de la maladie ou des tests de dépistage pour la détection précoce de la maladie.

Le HBM suggère que la croyance d'une personne dans la menace personnelle d'une maladie, conjuguée à la conviction d'une personne en l'efficacité du comportement ou de l'action recommandée pour la santé, permettra de prédire la probabilité qu'elle adopte ce comportement.

Le HBM découle de la théorie psychologique et comportementale selon laquelle les deux composantes du comportement lié à la santé sont les suivantes:

- le désir d'éviter la maladie ou, au contraire, de guérir s'il est déjà malade ;

- la conviction qu'une action sanitaire spécifique préviendra ou guérira la maladie.

Il y a six constructions du HBM : les quatre premières ont été développées en tant que principes initiaux, et les deux dernières ont été ajoutées au fur et à mesure de l'évolution de la recherche.

Ces différentes constructions sont :

- la vulnérabilité perçue ;

- la gravité perçue ;

- les avantages perçus ;

- les obstacles perçus ;

- l'indice à l'action ;

- l'auto efficacité.

Vulnérabilité perçue : évaluation subjective du risque de développer un problème de santé. Les personnes se percevant comme vulnérables à un problème de santé particulier se livrent à des comportements permettant de réduire le risque de développer ce problème de santé. Les personnes ayant une vulnérabilité perçue faible peuvent nier qu'ils ont un risque de contracter une maladie particulière. D'autres peuvent reconnaitre la possibilité de développer la maladie, mais en pensant que c'est toutefois peu probable. Les personnes qui croient qu'ils ont un faible risque de développer une maladie sont plus susceptibles de se livrer à des comportements malsains ou risqués. Les personnes qui perçoivent un risque élevé d'être personnellement touchées par un problème de santé particulier sont plus susceptibles d'adopter des comportements pour réduire le risque de développer la condition.

Gravité perçue : évaluation subjective de la gravité d'un problème de santé et ses conséquences potentielles. Les individus qui perçoivent un problème de santé comme sérieux sont plus susceptibles d'adopter des comportements de prévention afin d'éviter qu'il ne se produise. La gravité perçue englobe les croyances sur la maladie elle-même (par exemple, si elle met la vie en danger ou peut entrainer une invalidité ou une douleur), ainsi que des impacts plus larges sur le fonctionnement dans le travail et les rôles sociaux. Par exemple, un individu peut percevoir le COVID-19 comme non médicalement grave, mais s'il y a des conséquences financières importantes à la suite d'une absence au travail de plusieurs jours, il pourrait maintenant la percevoir comme étant une maladie plus sérieuse.

La combinaison de la vulnérabilité perçue et de la gravité perçue est désignée par l'expression menace perçue. Le HBM prédit que plus la menace perçue conduit à une plus forte probabilité d'engagement dans des comportements favorisant la santé.

Avantages perçus : les comportements en lien avec la santé sont aussi influencés par les avantages perçus d'une prise d'action. En effet, ceux-ci se réfèrent à l'évaluation qu'un individu se fait de la valeur (ou de l'efficacité) à se livrer à un comportement de promotion de santé pour réduire le risque de maladie. Si une personne estime qu'une action permettra de réduire la sensibilité ou de diminuer sa gravité d'un problème de santé, alors elle sera susceptible de se livrer à ce comportement, indépendamment des faits objectifs de l'efficacité de cette action. Par exemple, les individus qui pensent que porter un masque prévient de la contamination au COVID-19 sont plus susceptibles d'en porter que les autres.

Obstacles perçus : évaluation qu'un individu se fait des obstacles concernant le changement de comportement. Même si une personne perçoit un état de santé comme une menace et estime qu'une action spécifique permettrait de réduire efficacement la menace, les obstacles peuvent empêcher l'engagement dans le comportement. En d'autres termes, les avantages perçus doivent l'emporter sur les obstacles perçus pour que le changement de comportement se produise. Les obstacles perçus peuvent être en rapport avec la gêne perçue, le danger et / ou l'inconfort (par exemple, la douleur, les troubles émotifs) impliqués dans l'engagement dans le comportement. Par exemple, la croyance que le vaccin contre le COVID-19 pourrait provoquer des troubles de la circulation sanguine et un arrêt cardiaque (vaccin efficace et peu sûr) peuvent constituer des obstacles pour effectuer le vaccin contre le COVID-19.

Indice à l'action (cue to action) : c'est le stimulus nécessaire pour que le processus décisionnel accepte l'action recommandée pour la santé. Il s'agit ici du signal (ou déclencheur) nécessaire pour amorcer l'engagement dans des comportements liés à la santé. Ces signaux peuvent être internes (douleurs thoraciques, respiration sifflante, etc.) ou externes (conseils d'autrui, maladie d'un membre de la famille, article de journal, etc.). Par exemple, le fait d'avoir un proche qui a souffert du COVID-19 ou qui en est décédé va nous amener à être plus prompt à mettre en pratique les mesures barrières à la circulation du virus.

Auto-efficacité : il s'agit du niveau de confiance d'une personne dans sa capacité à adopter avec succès un comportement pour produire les résultats désirés. Cette construction a été ajoutée au HBM en 1988, pour mieux expliquer les différences individuelles dans les comportements de santé. Par exemple, dans la lutte contre le COVID-19, si l'État vous demande de rester à la maison et de limiter autant que possible vos déplacements, tout en compensant le manque à gagner lié à cette inactivité, vous serez plus engagé à mettre en pratique les prescriptions du Gouvernement.

2- Contribution de la théorie à la résolution du problème identifié

Concepts

Définition

Applications

Vulnérabilité

Il n'agit que s'il pense être en situation de risque et s'il se sent concerné par la maladie.

1. Facteurs favorisants la maladie sont présents : Manque d'hygiène, absence d'eau courante, promiscuité.

2. Maladie présente dans DS voisins

3. Pas de traitement de masse depuis des années

4. Risque infectieux réel

Gravité du

problème

Un individu n'agit en matière de santé que s'il considère que le

problème est d'une gravité
suffisante et certaine.

1. TF enfant ? TT adulte ? cécité

2. Cécité = perte du lien social, rejet par la communauté, fardeau pour la famille, perte de l'emploi, incapacité à générer des revenus

Bénéfices de

l'action à
entreprendre

Les aspects positifs potentiels

d'une action de santé spécifique, s'ils sont supérieurs aux bénéfices

escomptés, peuvent fonctionner
comme des bénéfices par rapport à l'action à entreprendre.

1. Prise en charge chirurgicale du TT

2. Traitement antibiotique du TF

3. Promotion de la vue

4. Contribution à l'élimination de la maladie

5. Amélioration de la qualité de vie

Perception des obstacles

Les aspects négatifs potentiels

d'une action de santé spécifique et la perception des coûts de l'action, s'ils sont supérieurs aux bénéfices

escomptés, peuvent fonctionner
comme des obstacles par rapport à l'action à entreprendre.

1. Absence de motivation pour les
chirurgiens du TT pour la prise en charge des cas incidents

2. Non suivi des activités N et CE par les secteurs apparentés

3. Risques humains

Croyance en

sa propre
efficacité

Un individu a plus de probabilité d'adopter une action de prévention s'il se croit capable de réaliser le comportement souhaité.

1. Gratuité de la chirurgie du TT

2. Gratuité du traitement antibiotique

3. Implication des structures apparentées pour la promotion des activités N et CE

II- ANALYSE STRATÉGIQUE

L'analyse stratégique consiste à identifier tous les éléments qui ont une influence sur la réalisation d'un projet. L'efficacité de cette analyse va faire appel à un diagnostic interne (appréciation des compétences, du savoir-faire, et des limites qui sont propres au projet) et un diagnostic externe (appréciation des opportunités qui s'offrent au projet et isolement des menaces qui ont des répercutions plus ou moins fortes sur l'activité du projet).

L'analyse stratégique s'inscrit dans la volonté de comprendre l'environnement et la nature de l'organisation. Elle permet de synthétiser les axes de réflexion et de prendre les meilleures décisions pour le bon suivi du projet. Elle combine les notions d'analyse et de stratégie.

De l'avis de CROZIER et FRIEDBERG, la stratégie est un ensemble cohérent de comportement qu'un acteur adopte en vue de préserver ses intérêts. La stratégie est orientée par les enjeux et zones d'incertitudes contrôlés par l'acteur social. De ce fait, toute stratégie est rationnelle aux yeux de l'acteur social qui l'utilise.

Le but de la stratégie sera donc - d'après KARLOF - d'associer des ressources dans des schémas d'action intégrés, en vue d'obtenir des avantages concurrentiels bien marqués et d'atteindre des buts déterminés.

L'objet de la stratégie est de répondre à deux questions : que voulons-nous que notre projet devienne ? Et comment devons-nous procéder pour y parvenir ?

1. Analyse de la question de l'élimination du trachome dans le DS de Kolofata

Le management stratégique repose sur une double démarche : une analyse des ressources et compétences de l'entreprise permettant de dégager ses forces et faiblesses, et une analyse de l'environnement de l'entreprise pour mettre en lumière les opportunités à saisir et les menaces à éviter.

L'analyse des forces, faiblesses, opportunités et menaces (FFOM) est un outil d'analyse stratégique qui vise à préciser les objectifs du projet, et à identifier les facteurs internes et externes favorables et défavorables à la réalisation de ces objectifs.

La question centrale de notre projet est : Comment surmonter les contraintes présentes dans le DS de Kolofata, afin d'atteindre l'objectif d'élimination du trachome comme problème de santé publique au Cameroun ?

Forces : les forces sont des ressources possédées et / ou compétences détenues par le programme ou le projet, et qui lui confère une certaine longueur d'avance (avantage).

- Modèle de protocole d'enquête disponible : le PNLCé dispose d'un modèle standard de protocole d'enquête sur le trachome ; celui du DS de Kolofata pourra y être calqué.

- File active importante d'enquêteurs certifiés et expérimentés : la disponibilité et l'implication de tous ces enquêteurs permettra de réduire la durée du séjour des équipes sur le terrain.

- Présence de formateurs locaux certifiés : ceux-ci vont mettre leur compétence à disposition des enquêteurs lors de la formation / recyclage des enquêteurs.

- Disponibilité des partenaires techniques et financiers, notamment Accelerate : le projet Accelerate est présent dans 10 pays africains dont le Cameroun. Ce projet contribue à l'accélération de l'élimination du trachome et appuie la chirurgie du TT dans plusieurs DS, ainsi que le renforcement des capacités.

- Existence d'un protocole d'entente entre le Ministère de la Santé Publique et International Trachoma Initiative : pour soutenir la distribution du Zithromax® (Azithromycine) dans le cadre de la lutte contre le trachome. Ce partenaire fournit gracieusement cet antibiotique, afin de mettre en oeuvre la distribution de masse relative à la stratégie CHANCE de l'OMS.

- Disponibilité de formateurs nationaux sur la chirurgie du TT : le Cameroun dispose de formateurs locaux internationalement certifiés. Ceux-ci vont mettre leurs connaissance et expérience à disposition lors de la formation / recyclage des chirurgiens.

- Création d'un groupe de travail sur le dossier d'élimination du trachome au Cameroun : afin de suivre et évaluer les différentes activités de lutte contre le trachome, proposer une approche pour la mobilisation du financement des activités, et assurer la rédaction du document narratif sur les progrès accomplis par le pays vers l'atteinte des cibles d'élimination de la maladie.

Faiblesses : les faiblesses représentent un manque au regard d'un, voire plusieurs facteurs clés de succès.

- Absence d'informations démographiques actualisées sur le DS : les données disponibles sont celles du 3ème Recensement Général de la Population et de l'Habitat au Cameroun (2005).

- Commande de la Tétracycline par le partenaire : retard dans le suivi de l'autorisation d'importation et la demande d'exonération des droits de douane.

- Non planification précise de l'agenda d'élimination : la prévalence du trachome dans le DS n'est pas encore connue, ainsi que le nombre de tours de traitement qu'il faudra. Les enquêtes d'impact et de surveillance figurent parmi les éléments clés de l'agenda d'élimination. Or ces enquêtes surviennent à l'issue de la bonne mise en oeuvre des campagnes de distribution de masse d'antibiotique ; de ce fait elles ne peuvent pour l'instant pas être planifiées à une date précise dans l'agenda d'élimination.

Opportunités : l'environnement du programme / projet peut présenter certaines zones de potentiel à développer. Il convient de les identifier.

- Résidence de la majorité des enquêteurs dans la région de l'Extrême-Nord : ceci facilite leur rassemblement à Maroua, et rend plus aisé leur déploiement sur le terrain.

- Engagement de la tutelle (Ministre de la Santé Publique, Délégation Régionale de la Santé Publique de l'Extrême-Nord) : autorisation administrative, lettres d'information aux autres administrations, mobilisation de la logistique, mise à disposition des enquêteurs, accompagnement sur le terrain.

- Présence et disponibilité des comités de vigilance : Ils ont l'avantage de jouir d'une plus grande légitimité en raison de leurs racines communautaires. Ils peuvent identifier, anticiper et combattre les actions des insurgés plus efficacement grâce à leur familiarité avec la langue, la géographie et la culture locales.

- Présence des forces de défense et de sécurité : leur présence sur le terrain concourt à rassurer les différents acteurs humanitaires dans la mise en oeuvre et le développement de leurs activités.

- Encampement : facilite la segmentation et les mouvements des équipes d'enquêteurs sur le terrain.

- Présence d'acteurs humanitaires sur le terrain : l'échange (dialogue constant) avec les acteurs humanitaires présents sur le terrain devrait permettre d'apprendre quelle stratégie ils utilisent pour mener à bien leurs activités sur le terrain.

- Pandémie à COVID-19 : elle a entrainé une vaste campagne de sensibilisation sur l'hygiène corporelle et le lavage des mains notamment. Des points d'eau ont été créés dans toutes les communes. Cette promotion de l'hygiène individuelle et collective pourrait être une opportunité à saisir dans la lutte contre le trachome.

Menaces : les menaces sont des éléments externes au programme / projet, mais qui peuvent avoir un impact négatif sur les activités à mener.

- Retard à la validation définitive du protocole de l'enquête par Tropical Data : du fait d'une importante charge de travail, Tropical Data peut prendre plus de temps que prévu pour valider le protocole de l'enquête.

- Conflit d'agenda entre les activités relatives à l'enquête et d'autres activités dans la région : les enregistreurs ne sont pas exclusivement réservés pour les activités de lutte contre le trachome. Ils interviennent dans d'autres programmes et projets dont les activités pourraient se dérouler au moment de l'enquête (conflit d'agenda). Idem pour les mobilisateurs communautaires.

- Retard dans la livraison des antibiotiques : les modifications de l'équilibre mondial pourraient entrainer des perturbations dans le domaine des transports et échanges internationaux. La livraison du Zithromax® pourrait ainsi être retardée.

- Changements climatiques : les activités relatives au trachome sont généralement mises en oeuvre en saison sèche. Du fait des changements climatiques, il sera difficile de déterminer avec exactitude quel mois de l'année correspond à cette saison.

- Nomadisme des populations dans les camps des réfugiés : en fonction des périodes d'accalmie ou de recrudescence des conflits, on enregistre des départs ou des nouvelles arrivées. De plus, l'estimation des intrants faite au moment de la planification pourra s'avérer insuffisante (arrivée importante de nouvelles populations) ou exagérée (départ important).

- Absence d'une motivation régulière pour le maintien de la ressource humaine dans le DS : l'absence de motivation pourrait entrainer la non disponibilité et la démotivation du personnel formé dans la prise en charge des cas incidents de TT.

- Non suivi des activités N et CE par les secteurs apparentés : le lien entre l'hygiène, l'assainissement et de meilleures conditions de vie pour les enfants a été démontré dans la prévention du TT chez l'adulte. Ceci ne saurait être le cas si les activités de N et CE ne sont pas entreprises par les secteurs apparentés.

- Risque humain : le risque humain n'est pas négligeable dans le DS de Kolofata. Ceci pourrait limiter l'engagement des partenaires, des superviseurs et des enquêteurs.

- Pandémie à COVID-19 : modification de l'agenda et de l'équilibre mondial, fermeture des frontières, limitation des déplacements des populations, réduction des rassemblements humains.

2. Diagnostic stratégique

L'analyse de la question de l'élimination du trachome comme problème de santé publique dans le DS de Kolofata a reposé sur la mise en lumière des différentes forces, faiblesses, opportunités et menace relatives à ce projet. La matrice d'analyse va ressortir dans un tableau croisé les interactions entre ces différents éléments.

L'objet du diagnostic stratégique sera, au-delà de l'analyse stratégique, de formuler et mettre en oeuvre les options stratégiques les plus pertinentes pour atteindre l'objectif sus cité.

D'après CHANDLER, la stratégie correspond à la détermination d'objectifs à long terme et l'adoption d'actions ainsi que l'allocation de ressources nécessaires pour mener à bien ces actions et atteindre ces objectifs.

Matrice d'analyse

 

Forces

Faiblesses

-Modèle protocole enquête -Enquêteurs expérimentés -Formateurs locaux -Partenaires techniques -Protocole d'entente -Groupe de travail

-Infos démographiques -Difficultés dans suivi de la commande de Tétracycline

-Non planification précise
agenda d'élimination

Opportunités

-Rédaction protocole

-Collaboration étroite avec

-Résidence enquêteurs

enquête

comités vigilance, forces de

-Engagement tutelle

-Formation enquêteurs à

défense et de sécurité,

-Comités de vigilance

Maroua

acteurs humanitaires

-Forces de défense

-Réalisation enquête

- Sollicitation des différentes

-Encampement

-Commande antibiotiques

administrations pour import

-Acteurs humanitaires

-Appui dans la disponibilité

aisé de Tétracycline

-COVID-19

des points d'eau

 

Menaces

-Soumission avancée du

-Collaboration / implication

-Retard validation protocole

protocole

différents secteurs en charge

-Conflit agenda

-Sollicitation anticipée de la

de l'approvisionnement en

-Retard livraison

tutelle pour la convocation

eau

antibiotiques

des enquêteurs

 

-Nomadisme populations

-Commande antibiotiques

 

-Absence motivation

adressée dans les délais

 

-Non suivi N et CE secteurs

-Plaidoyer pour motivation

 

apparentés

des chirurgiens

 

-Risques humains

-Réduction durée enquête

 

-COVID-19

-Gestes barrières

 

Forces / opportunités : il s'agit ici de s'interroger sur les options à disposition pour tirer le plus grand parti des opportunités offertes.

Les options possibles ici sont :

- La rédaction du protocole de l'enquête : ceci sera facilité par le fait que le PNLCé dispose d'un modèle standard de protocole d'enquête sur le trachome.

- La formation des enquêteurs à Maroua : la plupart des enquêteurs réside dans la région de l'Extrême-Nord, et le Cameroun dispose de formateurs locaux certifiés et expérimentés.

- La collecte des données : le Cameroun dispose d'une file active d'enquêteurs ayant déjà participé à au moins une enquête sur le trachome. Leur expérience sera un atout pour le bon déroulement de la collecte des données sur le terrain (rapide, enregistrement correcte des données, moins de jours sur le terrain). La présence des comités de vigilance et le concours des forces de défense et de sécurité vont renforcer l'aspect sécuritaire. Grâce à l'encampement, les déplacements des enquêteurs seront limités et mieux contrôlés.

- La commande d'antibiotiques : l'existence d'un protocole d'entente entre le Ministère de la Santé Publique et International Trachoma Initiative permet au Cameroun de commander et de recevoir gracieusement du Zithromax® (Azithromycine).

- Appui dans la disponibilité des points d'eau : pour faciliter le lavage des mains et le nettoyage du visage.

Forces / Menaces : une question stratégique : comment les atouts devront être déployés afin de contourner la menace identifiée ?

Les options possibles ici sont :

- Soumission en avance du protocole de l'enquête : les administrateurs de la plate forme Tropical Data mettent parfois plus de temps que prévu pour la validation du protocole. Soumettre le protocole le plus tôt possible contribuera à éviter cet éventuel contre temps.

- Sollicitation anticipée de la tutelle pour la convocation des enquêteurs : des correspondances adressées à la hiérarchie devront être acheminées dans de brefs délais, afin que des mesures soient prises pour rendre disponible les enquêteurs.

- Commande antibiotiques adressée dans les délais : la commande des antibiotiques devra être transmise dès que possible au fournisseur, afin que l'approvisionnement soit fait à date.

- Plaidoyer pour motivation des chirurgiens : un plaidoyer pourra être adressé aux partenaires techniques afin qu'ils incluent dans leur budget la motivation des chirurgiens.

- Réduction durée enquête : pour limiter les risques humains, la durée de l'enquête sera la plus courte possible. Ceci sera facilité par le grand nombre et la forte expérience des enquêteurs.

- Application des mesures barrières au COVID-19 : la limitation des contacts humains et le lavage régulier des mains vont contribuer à limiter la contamination au trachome.

Faiblesses / opportunités : les opportunités sont là, mais les atouts ne sont pas disponibles. La question à se poser ici est de savoir si les différentes faiblesses peuvent être levées ou non afin d'exploiter le potentiel.

L'option possible ici est :

- Collaboration étroite avec comités vigilance, forces de défense et de sécurité, acteurs humanitaires : cette collaboration permettra d'avoir d'avantages d'informations sur les différentes caractéristiques de la population ainsi que la géographie des points d'eau.

- Sollicitation des différentes administrations : afin qu'elles interviennent plus en amont dans le processus d'importation et d'exonération des droits de douane, pour ce qui concerne notamment la Tétracycline.

Faiblesses / Menaces : situation potentiellement dangereuse. Évaluez le risque pour savoir s'il est nécessaire d'organiser l'action et dans l'affirmative, définir comment procéder.

L'option possible ici est :

- La collaboration et l'implication des différents secteurs en charge de l'approvisionnement en eau contribueront à un meilleur suivi des activités N et CE par les secteurs apparentés.

CHAPITRE 4 : DÉCISIONS ET ACTIONS STRATÉGIQUES

L'atteinte des seuils d'élimination du trachome comme problème de santé publique dans le DS de Kolofata revêt quelques difficultés. L'inaccessibilité aux soins préventifs et curatifs, la situation sécuritaire très précaire, et le déplacement des populations, favorisent l'apparition de nouveaux cas de la maladie et le difficile contrôle de celle-ci. Cette situation ne facilite pas l'atteinte des seuils d'élimination de la maladie dans le DS, avec pour conséquence le probable retard dans l'agenda d'élimination du trachome au Cameroun (zone d'incertitudes).

Selon KOENING, le management stratégique consiste à mobiliser, à combiner et à engager des ressources à des fins d'efficience, d'efficacité et de réduction de l'incertitude.

À ce niveau, MARTINET perçoit la stratégie comme un choix de critères de décisions dites « stratégiques » parce qu'elles visent à orienter de façon déterminante et pour le long terme les activités et structures de l'organisation.

Il va s'agir ici de définir des axes stratégiques et d'énumérer les actions envisageables pour surmonter les problèmes liés au trachome dans le DS de Kolofata, afin d'atteindre l'objectif d'élimination du trachome comme problème de santé publique au Cameroun.

I- DÉCISIONS STRATÉGIQUES

Le processus stratégique se décline en trois points : ce que l'on veut faire (objectifs stratégiques), ce que l'on sait faire (diagnostic stratégique), et comment on veut le faire (décisions stratégiques).

La décision stratégique est planifiée en plusieurs étapes :

· L'identification du problème : identifier et analyser le problème (recherche d'informations en amont afin de bien comprendre la situation).

· La recherche de solutions : identifier les possibilités de solutions qui permettront de résoudre le problème.

· Le choix d'une solution : choisir une solution, après examen et évaluation des différentes possibilités.

· La mise en oeuvre de la solution choisie : appliquer concrètement la solution choisie en fonction du contexte.

· Le contrôle de l'efficacité : les solutions appliquées font l'objet d'un contrôle afin de vérifier si les résultats obtenus sont conformes à ceux prévus dès le départ.

1. MISE À JOUR DE LA CARTOGRAPHIE DU TRACHOME DES DS KOLOFATA ET CAMP DÉPLACÉS MORA

La dernière enquête réalisée sur le trachome dans le DS Kolofata remonte à 2013 (réalisée par OSF et la Fondation Théa). La prévalence du TF était de 5,2%. Toute action relative à l'atteinte des seuils d'élimination dans le DS passe par la mise à jour de la cartographie.

La cartographie du trachome dans un DS apparait comme une représentation concise et efficace des éléments suivants :

· la prévalence du TF chez les enfants de 1 à 9 ans ;

· la prévalence du TT chez les plus de 15 ans ;

· les facteurs de risque de transmission du trachome actif ;

· les activités de nettoyage du visage et de changement de l'environnement.

Ceci pour permettre une compréhension rapide et pertinente de l'épidémiologie du trachome dans ledit DS, afin de favoriser la prise de décisions stratégiques et aiguiller des interventions de santé publique.

Les prévalences du TF et du TT seront déterminées à travers des enquêtes de prévalence de la maladie. Celles-ci seront mises en oeuvre dans le DS de Kolofata et dans le camp des déplacés de Mora.

Lors de la descente sur le terrain, les équipes d'enquêteurs renseigneront - sur une fiche d'enquête préalablement établie- les éléments relatifs aux facteurs de risque et aux activités de nettoyage du visage et de changement de l'environnement.

2. PLANIFICATION DES ACTIVITÉS DE LA STRATÉGIE CHANCE

À l'issue de la cartographie réalisée, les prévalences du TF et du TT dans le DS seront connues.

L'objectif de la planification de la chirurgie des cas de TT est d'obtenir une prévalence de moins d'un cas de TT pour 2.000 habitants (0,2%). Tous les DS ayant un taux de TT estimé supérieur à un cas pour 2.000 habitants doivent disposer de plans actifs pour réduire la prévalence du TT par des services chirurgicaux et autres, indépendamment du fait que le DS ait aussi besoin d'interventions A-N-CE ou non. Dans les DS où le TT est inférieur à 0,2%, mais le trachome évolutif supérieur à 5%, des mécanismes efficaces doivent être mis en place pour permettre à toute personne présentant un TT de recevoir des services.

La planification pour l'élimination du TT nécessite de disposer des données épidémiologiques de qualité satisfaisante. L'objectif de cette planification étant d'évaluer le nombre de cas de TT en attente dans le DS. Pour cela, quatre éléments d'information différents seront nécessaires : la population générale du district, la prévalence du TT dans le groupe d'âge de 15 ans et plus, la proportion de la population de 15 ans et plus dans la population générale, et le nombre de personnes opérées du TT ou bénéficiant d'une autre prise en charge depuis la dernière enquête.

Nombre des cas de TT en attente = (population × prévalence du TT × % population = 15 ans) - nombre de personnes bénéficiant d'une prise en charge du TT depuis la dernière enquête.

Depuis l'année 2014, aucune intervention contre le trachome n'a eu lieu dans le DS, d'où le nombre de personnes bénéficiant d'une prise en charge du TT depuis la dernière enquête est nul.

Le seuil de prévalence correspondant à l'élimination est le nombre d'interventions, chirurgicales ou autres, nécessaires pour que la prévalence du TT soit inférieure à 0,2% dans la population totale. Soit : Nombre de cas de TT en attente - nombre admissible de personnes présentant un TT. Nombre admissible avec TT = population totale × 0,002.

L'objectif de la planification des activités de traitement de masse d'antibiotiques est d'obtenir une prévalence de moins de 5 cas de TF pour 100 habitants (5%). L'OMS recommande à cet effet 1 tour de traitement si la prévalence du TF est comprise entre 5 et 9,9%, 3 tours si la prévalence est comprise entre 10-30%, et 5 tours si la prévalence est supérieure à 30%.

Le but ultime d'intervention pour la distribution de masse d'antibiotiques sera le nombre total de personnes à traiter dans le DS afin d'atteindre l'objectif d'élimination (prévalence TF inférieure à 5%). L'objectif annuel d'intervention sera le nombre annuel de personnes devant recevoir un traitement, en fonction de la prévalence du TF dans le DS (1 an, 3 ans, ou 5 ans).

Pour planifier des interventions de nettoyage du visage et de changement de l'environnement, les données sur la couverture en eau et assainissement et la situation actuelle de l'éducation à l'hygiène seront collectées. Par la suite, il faudra identifier les organismes actifs qui interviennent dans les domaines N et CE au niveau du DS, analyser le type d'activités N et CE en cours dans le DS et comment les coordonner pour une efficacité maximale, et enfin apprécier comment incorporer certains aspects du N et CE dans les activités de promotion de la santé communautaire.

3. ACTUALISATION DE L'AGENDA D'ÉLIMINATION

Le dossier d'élimination du trachome est un ensemble de document qui renseigne sur les progrès accomplis par le pays vers l'atteinte des cibles d'élimination de la maladie. Le dossier doit comporter les informations requises dans le modèle établi par l'OMS.

Il y a plusieurs étapes à franchir avant de soumettre un dossier aux instances compétentes. La réalisation des enquêtes de base pour définir et adopter des interventions de santé publique ; la mise en oeuvre de la stratégie CHANCE, en fonction des prévalences obtenues lors des enquêtes de base ; l'effectuation des enquêtes d'impact, suivies des enquêtes de surveillance afin de confirmer l'atteinte des seuils d'élimination de la maladie. Par la suite, la phase de transition où le système de santé doit être capable de prendre en charge les cas incidents de trachome. Il s'agit du passage de l'approche santé publique (centrée sur la population générale) à l'approche clinique (centrée sur l'individu).

L'intégration de ces différentes activités dans un chronogramme précis et bien établi constitue l'agenda d'élimination du trachome.

L'actualisation de l'agenda d'élimination suppose la prise en compte des différents éléments qui peuvent influencer la bonne mise en oeuvre dudit agenda, la définition et l'adoption de mesures correctrices y relatives, et la projection d'un nouvel agencement des activités, en regard des modifications apportées.

II- ACTIONS ENVISAGEABLES

Les actions envisageables désignent ce qui peut être envisagé, qui est concevable et réalisable, dans le but d'atteindre un objectif stratégique. Ces actions, opérationnelles, doivent s'inscrire dans la vision stratégique qui a été définie. Elles n'en sont absolument pas indépendantes ; elles en sont l'expression même.

Il sera donc question ici d'adapter son chemin (et non sa destination) en fonction des obstacles que l'on va rencontrer. À ce niveau, une double conciliation s'impose : entre le stratégique et l'opérationnel, d'une part ; entre les choix stratégiques et ceux ayant trait à l'organisation, d'autre part. On retrouve ainsi quelques unes des principales composantes de toute action stratégique : se garder des surprises, tout en créant la surprise chez l'adversaire. Il s'agit notamment d'après SUN TSE d'« attaquer l'ennemi où il n'est pas préparé, en surgissant lorsqu'il ne vous attend point ».

1. CARTOGRAPHIE DES DS KOLOFATA ET CAMP DÉPLACÉS MORA

> Rédaction et validation du protocole de l'enquête

Une enquête est une opération qui consiste à rechercher, recueillir et rassembler une information, pour l'analyser afin de répondre à une ou plusieurs questions spécifiées à l'avance. L'enquête relève du domaine de l'épidémiologie si l'objet concerne la santé d'une population (sujets malades et sujets indemnes de la maladie).

L'organisation générale d'une enquête épidémiologique est consignée dans le protocole. Celui-ci décrit les différentes phases du déroulement d'une enquête à savoir : l'identification du problème et la documentation, la formulation des objectifs et de l'hypothèse de recherche, la mise en place d'une stratégie (type d'enquête, groupes à explorer, sélection et formation des enquêteurs, nature et qualité des données à recueillir, méthodes de recueil), la description du déroulement de l'activité sur le terrain, l'informatisation et la méthode d'analyse des données, les aspects éthiques et administratifs, les calendrier et budget prévisionnels, la production, la diffusion et la validation des résultats.

Le protocole une fois rédigé va être soumis à la validation de Tropical Data. Cette soumission devra être faite dans un délai raisonnable pour palier un éventuel retard dans la validation. Tropical Data est une initiative dirigée par l'OMS, qui vise à accompagner les programmes nationaux dans la lutte contre le trachome. Cet accompagnement qui se fait de la planification de l'enquête à la validation des résultats a l'avantage d'assurer que les enquêtes soient menées à l'aide d'une méthodologie approuvée par l'OMS, que les résultats soient de la plus haute qualité, et que les ministères de la santé soient pleinement propriétaires de leurs données.

L'équipe porteuse de l'initiative Tropical Data est un consortium de partenaires scientifiques, technologiques et de mise en oeuvre qui a fait du Global Trachoma Mapping Project (le plus grand exercice de cartographie des maladies jamais entrepris) un succès. L'OMS établit des normes, assure une surveillance scientifique et protège les intérêts des pays. ITI fournit le service de gestion des données de base. RTI International développe et fournit la technologie derrière le service et soutient la formation internationale des formateurs.

> Sélection et formation des enquêteurs

Un enquêteur est une personne qui s'enquiert de quelque chose, qui fait des investigations, qui est chargée de mener une enquête.

Dans le cadre de la lutte contre le trachome, l'objectif du programme de formation des enquêteurs est de rendre ceux-ci capables :

- de sélectionner un échantillon statistiquement non biaisé de personnes en vue d'un entretien et d'un examen ;

- de mener avec succès les entretiens dans les foyers, notamment la collecte de données sur l'eau et l'assainissement ;

- d'examiner les enfants et les adultes pour détecter un trachome à l'aide du système de codage simplifié du trachome de l'OMS ;

- d'enregistrer de manière électronique tous les résultats afin que des données épurées et exactes soient générées pour un usage national.

Au vu des ces objectifs, la sélection des enquêteurs va concerner deux types de profil :

- les examinateurs ou codeurs du trachome : chargés d'examiner les enfants et les

adultes pour détecter un trachome à l'aide du système de codage simplifié de l'OMS ; - les enregistreurs ou opérateurs de saisie : responsables d'enregistrer de manière

électronique tous les résultats afin que des données épurées et exactes soient générées.

Pour davantage d'efficience, la sélection portera sur les enquêteurs ayant déjà participé avec succès à au moins une enquête sur le trachome. Une liste de ceux-ci est disponible au PNLCé. Les enquêteurs seront regroupés en binômes d'examinateur et d'enregistreur.

Les modules de formation sont consignés dans le document mis à disposition par Tropical Data, intitulé « Système de formation aux enquêtes sur la prévalence du trachome ». La formation va durer 5 jours (3 jours de théorie, et 2 jours de pratique dans la communauté). Elle sera assurée par des formateurs certifiés par Tropical Data.

La formation aura lieu à Maroua, et des représentants des comités de vigilance pourront participer à cette activité. Les échanges pourront porter sur le déploiement des équipes sur le terrain, les attitudes et pratiques à encourager ou à proscrire, les villages (communautés) à éviter, le langage à utiliser lors de l'entretien dans les ménages,...

> Déroulement de l'enquête / Collecte des données

L'enquête descriptive transversale va se dérouler dans deux unités d'évaluation (Kolofata, Camp des déplacés de Mora). Elle va porter sur un échantillon extrait par sondage et représentatif de la population étudiée.

Dans le cadre de la lutte contre le trachome, l'objectif de l'enquête est :

· d'estimer la prévalence du TF chez les enfants de 1 à 9 ans, ainsi que celle du TT chez les plus de 15 ans ;

· de relever les facteurs de risque de transmission du trachome actif ;

· d'apprécier les activités de nettoyage du visage et de changement de l'environnement ;

· de faire des recommandations pour la planification des futures activités.

En fonction du nombre d'enquêteurs disponibles, la collecte des données pour les deux unités d'évaluation pourra se dérouler simultanément, ou successivement. Il faudra utiliser le maximum d'équipes d'enquêteurs disponibles, motivés et répondant aux critères de sélection. La finalité étant de réduire au maximum la durée du séjour sur le terrain, le contexte sécuritaire étant toujours précaire dans cette zone. Le principe ici est que les risques humains diminuent proportionnellement avec le temps passé sur le terrain de la collecte des données.

La collecte des données est primordiale dans toute enquête épidémiologique ; elle permet de récolter les informations qui seront analysées pour confirmer (ou non) des hypothèses de départ, et répondre à une problématique.

L'équipe d'enquêteurs est habituellement constituée d'un codeur, d'un opérateur de saisie et d'un guide communautaire. Pour cette enquête, les membres des comités de vigilance seront mis à contribution comme guides communautaires. Ils ont l'avantage de jouir d'une plus grande légitimité en raison de leurs racines communautaires ; ils partagent généralement la même identité ethnique ou politique, les mêmes intérêts collectifs et leurs perceptions des menaces sont similaires. Ils peuvent identifier, anticiper et combattre les actions des insurgés plus efficacement grâce à leur familiarité avec la langue, la géographie et la culture locales.

Pour un meilleur déploiement des équipes sur le terrain, il faudra assurer un dialogue constant entre les équipes d'enquêteurs, les acteurs humanitaires et les forces armées du Cameroun, ainsi que la Force Multinationale. Ce dialogue est au coeur du travail de la Coordination Civilo-Militaire qui de par son mandat, a pour mission de sensibiliser les forces armées aux principes humanitaires d'impartialité, de neutralité et d'indépendance opérationnelle.

Pour que tout ceci soit autorisée et diligenté, il sera nécessaire d'améliorer les connaissances des autorités administratives et traditionnelles mais aussi des humanitaires sur les vision, but, et objectif de l'action à mener. Intervenant dans des zones où l'armée intervient contre Boko Haram, il est essentiel que les différents acteurs puissent opérer dans le même espace sans se mettre en danger, ni exposer les populations que l'on assiste. Il s'agit de la stratégie de coexistence, qui consiste en ce que les militaires et acteurs humanitaires n'engagent pas d'opérations communes, mais entretiennent des relations suffisamment étroites pour travailler dans la même zone en se gênant le moins possible.

2. PLANIFICATION DES ACTIVITÉS DE TRAITEMENT DE MASSE / CHIRURGIE DES CAS DE TT

La planification stratégique des décisions consiste à définir celles-ci à l'avance et à planifier leur mise en oeuvre dans le temps.

> Commande d'antibiotiques

À l'issue de l'enquête réalisée, la prévalence du trachome sera connue dans les deux unités d'évaluation. La prise en charge communautaire du trachome repose sur la distribution de masse des médicaments à toute la population. Deux antibiotiques sont utilisés : la Tétracycline pommade et le Zithromax® (comprimés, suspension). La Tétracycline est donnée aux sujets de moins de 6 mois, le Zithromax® en suspension sert à traiter les enfants de 6 à 83 mois (moins de 7 ans). Tandis que le Zithromax® comprimé est donné aux sujets de 7 ans et plus. Le but recherché étant de traiter toute la population des DS endémiques.

La planification du traitement est fonction de la prévalence du TF, on peut réaliser 1 tour de traitement (TF : 5-9,9%), 3 tours (TF : 10-29,9%), ou 5 tours (TF = 30%).

La commande d'antibiotiques est fonction du nombre de tours de traitement prévu. Les Laboratoires Pfizer Inc. à travers l'International Trachoma Initiative (ITI) collaborent avec le Ministère de la Santé Publique dans les efforts d'élimination du trachome cécitant. Ce partenaire fournit gracieusement du Zithromax® depuis 2011, afin de mettre en oeuvre la distribution de masse de l'antibiotique relative à la stratégie CHANCE de l'OMS.

> Formation / recyclage des chirurgiens

Les participants aux sessions de formation des chirurgiens du TT devront répondre aux critères suivants : être Infirmier Diplômé d'État en service dans l'un des DS concernés, avoir une expérience documentée en chirurgie, parler la langue locale des zones ciblées pour la campagne afin de faciliter la communication avec les patients et améliorer la prise en charge.

La formation sera dirigée par les formateurs du niveau central qui ont participé à la formation pour les formateurs de chirurgien du TT.

Les infirmiers sélectionnés devront passer un test d'acuité visuelle dans les services ophtalmologiques de la région de l'Extrême-Nord, avant le début de la formation. Ceux n'ayant pas un résultat satisfaisant lors dudit test seront remplacés.

La session de formation sera organisée en quatre étapes :

- Une étape théorique (durée : 3 jours) qui va porter sur les généralités sur le trachome et la stratégie CHANCE, les techniques d'identification et de diagnostic des cas, les options thérapeutiques (épilation, chirurgie), les conseils et messages à passer avant, pendant et après le traitement, les aspects éthiques et professionnels, la gestion des approvisionnements et des déchets.

- Une étape pratique sur mannequin (durée : 3 jours), pour permettre aux apprenants de mettre en pratique sur des mannequins les notions théoriques apprises. Ces mannequins vont présenter des cartouches de paupières amovibles.

- Une étape pratique sur cas réels (durée : 10 jours), pour permettre aux apprenants d'exercer sur des cas réels (yeux humains). Certains camps de chirurgie seront mis à contribution pour faciliter cette phase quoi va conduire au processus de certification.

- L'étape de certification du chirurgien, conformément aux critères de certification de l'OMS contenus dans le manuel.

Le recyclage des chirurgiens sera organisé au début de chaque campagne de chirurgie. En fonction de l'objectif ultime d'intervention à atteindre pour l'élimination du trachome dans le DS, un nombre de campagne va être planifié (2 campagnes par année).

> Campagne de distribution d'antibiotique / Chirurgie du TT

Les antibiotiques destinés au traitement de masse sont centralisés au PNLCé, et transmis dans les délégations régionales, puis dans les DS concernés pour distribution.

Dans les communautés la mobilisation sociale sera faite par les crieurs des villages. Une réunion de sensibilisation sera organisée avec les représentants de la communauté. Les distributeurs communautaires vont faire le porte à porte, parcourir les églises / mosquées, utiliser les matériels d'IEC (information, éducation, communication), pour distribuer le traitement aux populations. Les membres des comités de vigilance mis à contribution comme guides communautaires lors de la collecte des données pourront être utilisés pour remplir cette tache. La prise en charge financière est assurée par le partenaire financier.

En prélude aux campagnes de chirurgie du TT, des activités de dépistage vont être menées dans le but de recenser le maximum de cas de TT à opérer. Les cas dépistés seront consignés dans un registre conçu à cet effet ; ces cas vont être confirmés par les équipes de chirurgien directement pendant la campagne (pour éviter que les cas confirmés ne soient perdus). Les informations relatives aux patients seront les suivantes : nom, village, aire de santé, téléphone, paupière malade.

Différents canaux (leaders religieux, marchés, radios communautaires...) seront utilisés pour livrer des messages visant à susciter l'intérêt de la communauté, et renforcer la participation de celle-ci. La communication portera notamment sur les conséquences de la non prise en charge de la maladie, l'agenda des campagnes de chirurgie, l'hygiène corporelle et communautaire, la nécessité d'un changement d'environnement, la transition.

La chirurgie du TT va être organisée selon trois stratégies :

- Site fixe : les malades se rendent dans la formation sanitaire à une période bien déterminée pour bénéficier des services de chirurgie.

- Camps de chirurgie : des camps de chirurgie seront installés dans des zones spécifiques du DS, et les malades seront orientés vers ces lieux.

- Équipes mobiles : il s'agit d'équipes qui vont se déplacer d'une aire de santé à l'autre pour des activités de chirurgie, après que la liste des malades ait été établie.

Notons que le choix d'une stratégie sera fonction du contexte qui va prévaloir au moment de l'implémentation de la campagne. Dans les buts d'évaluer la qualité de l'acte chirurgical posé, et d'apprécier la satisfaction des malades opérés, un suivi systématique des patients sera effectué suivant les recommandations de l'OMS.

3. ACTUALISATION DE L'AGENDA D'ÉLIMINATION

À l'issue des enquêtes sur le trachome dans le DS de Kolofata et le camp des déplacés de Mora, la prévalence de la maladie sera connue. La stratégie CHANCE de l'OMS va être mise en pratique dans le but de ramener les prévalences du TT et du TF en dessous des seuils requis pour l'élimination de la maladie.

Des enquêtes d'impact et plus tard de surveillance vont être réalisées pour apprécier l'effet de cette stratégie CHANCE sur l'épidémiologie de la maladie. Les résultats de ces enquêtes permettront de prendre les décisions à tous les niveaux de gestion du système de santé tant au niveau national, qu'international.

> Enquête d'impact

L'étude de l'impact d'une action ou d'une activité permet de comprendre, de mesurer et d'évaluer ses effets. L'analyse d'impact est un processus qui consiste à identifier les éventuelles conséquences d'un changement, ou à évaluer quels éléments doivent être modifiés afin d'effectuer un changement.

Dans le cadre de la lutte contre le trachome, l'enquête d'impact aura comme objectif d'estimer les prévalences du TF et du TT après la mise en oeuvre de la stratégie CHANCE, et évaluer l'importance relative des facteurs de risque connus de la transmission du trachome actif. Cette enquête sera réalisée à la fin de la distribution (au moins 6 mois après la dernière distribution) de masse des antibiotiques dans le DS.

Les enquêtes d'impact réalisées au Cameroun entre 2014 et 2017 ont rapporté que tous les DS endémiques (21 DS) avaient atteint les seuils d'élimination de la maladie. La bonne mise en oeuvre de la stratégie CHANCE apparait comme une pratique de choix dans la lutte contre le trachome. Son implémentation dans le DS de Kolofata devrait permettre d'obtenir, à l'issue de l'enquête d'impact, des prévalences en dessous des seuils requis pour l'élimination de la maladie. La période de surveillance de la maladie pourra ainsi débuter.

> Enquête de surveillance

Une endémie désigne une infection ou une maladie présente au sein d'une population ou une région donnée, et dont l'incidence doit être surveillée et faire l'objet de prévisions.

La surveillance consiste à recueillir, analyser et interpréter systématiquement des données sur la situation sanitaire, et à communiquer en temps opportun les informations ainsi obtenues aux décideurs et aux autres instances concernées pour la prise de décisions.

L'OMS recommande d'organiser des enquêtes de surveillance dans tous les DS ayant atteint les critères d'arrêt de traitement en vue de confirmer que la transmission du trachome a été interrompue, et qu'aucune réémergence n'est intervenue depuis l'arrêt des traitements.

Une procédure en 2 étapes est suivie pour établir si les seuils de prévalence correspondant à l'élimination du TT et du TF ont été atteints dans un DS. D'abord, après une période de mise en oeuvre des interventions contre le trachome, et 6 mois au moins après la dernière tournée prévue d'administration massive d'antibiotiques, une étude d'impact doit être menée. Si le seuil de prévalence correspondant à l'élimination du TF est atteint, le DS entame une période de 2 ans de surveillance prévalidation pendant laquelle il ne faut pas mener d'antibiothérapie. À la fin de cette période, une enquête de surveillance prévalidation doit être menée.

Un pays remplit les critères de validation lorsqu'il est démontré, moyennant des enquêtes de surveillance prévalidation correctement menées, que les prévalences ont été ramenées en deçà des seuils d'élimination dans tous les DS endémiques. Il faudra parallèlement tenir compte de la chronologie des interventions et des activités de surveillance dans les DS voisins.

> Maintien d'une ressource humaine efficace / Transition

L'objectif principal de cette action sera d'assurer la prise en charge des cas incidents ou d'éventuels TT post opératoires (diagnostic des cas, disponibilité des médicaments, disponibilité des chirurgiens) dans le DS.

Lorsque le seuil d'élimination de la maladie est atteint à l'issue des enquêtes d'impact et de surveillance, le processus de transition est engagé. Il s'agit du passage de l'approche santé publique (centrée sur la communauté) à l'approche clinique (centrée sur l'individu). La transition représente l'ultime étape avant la validation du dossier d'élimination. À ce niveau, la recherche active des cas et les campagnes ne sont plus nécessaires. Le système de santé doit être capable de prendre en charge les cas incidents de la maladie. Pour ce faire, des ressources humaines (formées, disponibles, motivées) et matérielles sont nécessaires. Le Ministère de la Santé Publique et ses Partenaires devront réfléchir à une politique de motivation pour assurer le maintien efficace de la ressource humaine dans le DS.

La transition s'applique aux quatre volets de la stratégie CHANCE.

La transition concernant la chirurgie du trichiasis (CH) voudrait dire que l'on va passer de la prestation lors des campagnes aux services cliniques de routine dans les formations sanitaires. Pour y parvenir, au niveau du DS il faudra identifier et orienter les patients, avoir une liste du personnel chirurgien, identifier les sites opératoires, faire l'inventaire du matériel, améliorer les compétences. Les chirurgiens formés lors de la planification des activités de chirurgie dans le DS vont être davantage mis à contribution dans la mise en oeuvre de cette action.

La transition relative au traitement antibiotique de masse (A) se traduit par la disponibilité des médicaments pour la prise en charge des éventuels cas (le personnel de santé doit pouvoir reconnaitre tout cas de trachome folliculaire). Un système de surveillance post endémique devra être mis en place, et l'azithromycine devra être dans le même circuit que les autres médicaments génériques essentiels.

La réussite de la transition pour les volets nettoyage du visage (N) et changement de l'environnement (CE) passe par la synergie des secteurs apparentés tels que l'éducation, l'approvisionnement en eau, l'habitat, le développement rural, les collectivités territoriales décentralisées. Un comité intersectoriel pourra être mis sur pied pour faire des doléances aux partenaires lors des différentes plates formes, et faire une éducation à la santé dans les écoles sur la pratique du lavage des mains et du visage.

CONCLUSION

La stratégie d'élimination du trachome comme problème de santé publique au Cameroun, à travers le DS de Kolofata, a constitué le thème principal de notre travail. La description du contexte d'action a renseigné sur l'épidémiologie et les facteurs favorisants la maladie, ainsi que l'accès aux soins de santé dans le DS. L'identification des principaux acteurs et enjeux a mis en lumière l'insécurité et les risques humains, le déplacement des populations, et la nécessité d'une cartographie.

Au vu de la question de recherche, trois problèmes ont été identifiés : l'apparition de nouveaux cas de la maladie dans le DS, la présence d'un nouveau foyer de la maladie dans le camp des déplacés de Mora, et le retard par rapport à l'agenda d'élimination. L'analyse stratégique de la situation a permis d'adopter un arbre décisionnel ainsi que des décisions stratégiques par rapport au problème posé. Ces décisions sont la cartographie du DS de Kolofata et du camp des déplacés de Mora, la planification des activités de traitement de masse et de chirurgie du TT, et l'actualisation de l'agenda d'élimination.

Pour la bonne mise en oeuvre de la cartographie, il faudra un protocole d'enquête validé, la formation des enquêteurs à Maroua, la réalisation de l'enquête avec le concours des comités de vigilance et des forces de défense et de sécurité. La stratégie CHANCE de l'OMS devra être appliquée, suivie par des enquêtes d'impact et de surveillance. De même qu'une réflexion devra être développée pour le maintien efficace de la ressource humaine dans le DS.

Le Programme National et les Partenaires devront être vigilants pour ne pas retomber dans l'endémicité si les nouveaux cas ne sont pas pris en charge, et surtout si les activités N et CE ne sont pas entreprises avec les secteurs apparentés.

Le véritable défi pour mener une lutte continue et pérenne contre le trachome est d'éduquer les populations pour qu'elles prennent la mesure du lien qui existe entre une hygiène adéquate, un bon assainissement et des conditions acceptables de vie pour les enfants, afin que ceux-ci soient épargnés de la terrible épreuve du TT à l'âge adulte. En effet, l'amélioration du standing de vie dans une communauté concourt à faire reculer la prévalence du trachome actif, et ainsi à parfaire la vue des générations à venir.

Le plaidoyer pour un accès sûr et sécurisé aux soins de santé, ainsi que pour le respect des principes qui régissent l'action humanitaire est essentiel à la réponse de l'ensemble de la communauté humanitaire au Cameroun, où les besoins urgents en santé publique sont réels.

BIBLIOGRAPHIE

A. OUVRAGES

1. BAUMANN, M., GAO, M. (1999), Diagnostic de santé d'une population et action humanitaire : un guide pratique, Santé publique, Vandoeuvre-lès-Nancy, France, Société française de santé publique, vol. 11, no 1, mars 1999, p. 63-75.

2. CHANDLER, A. (1962), Strategy and Structure : Chapters in the History of American Industrial Enterprise, Cambridge, MIT Press, p. 13.

3. CROZIER, M. et FRIEDBERG, E. (1977), L'acteur et le système, Paris, Le Seuil, 506 pages.

4. DUHAMEL, H. (1986), Stratégie et direction de l'entreprise, CLET, (p. 28).

5. FOBASSO, T. (2015), L'analyse stratégique de Michel CROZIER et Erhard FRIEDBERG, Overblog.

6. KALDAOUSSA, J. (2019), Périlleuse résilience au Camp des déplacés internes de Mémé, Fadjiri Magazine, N°005.

7. KARLOF, B. (1990), La Stratégie des Affaires, Les Presses du Management, (p. 26).

8. KOENING, G. (1991), Management stratégique, Nathan, (p. 5).

9. MARTINET, A-C. (1983), Stratégie, Vuibert-Gestion.

10. MARCHESNAY, M. (2004), Management stratégique, Éditions de l'ADREG.

11. ORSONI, J. (1990), Management stratégique, Vuibert, Collections « Entreprises », 1990, 186 p.

12. SPITEZKI, H. (1995), La stratégie d'entreprise : compétitivité et mobilité, Paris : Economica, DL 1995, 316p.

B. ARTICLES ET DOCUMENTS

13. Central Emergency Response Fund. (2019), Cameroun : Région de l'Extrême-Nord, Rapport sur les Déplacements Round 18.

14. Coalition Internationale pour la Lutte contre le Trachome. (2015), Plan d'action contre le trachome : Guide de planification pour l'élimination nationale du trachome cécitant, juillet 2015.

15. OPHTALMO SANS FRONTIÈRES. (2013), Rapport de la lutte contre le trachome dans le district de santé de Kolofata, Édition 2013.

16. Organisation Internationale des Migrants. (2018), Cameroun : Région de l'Extrême-Nord, Rapport sur les Déplacements Round 14.

17. Plan National d'Élimination du Trachome au Cameroun. (2012).

18. UNICEF. (2017), Rapport d'évaluation des besoins humanitaires à Kolofata, Édition Mai 2017.

C. WEBOGRAPHIE

19. Alliance OMS pour GET2020. (2016), Élimination du trachome : accélérer les actions pour atteindre les objectifs de 2020, disponible sur http://www.trachomacoalition.org/2016-roadmap/french.html

20. Cours Gratuit. Support de cours en management du changement, disponible sur https://www.cours-gratuit.com/cours-management-du-changement/support-de-cours-en-management-du-changement, 2020.

21. EVAL. (2020), Théorie du changement, disponible sur https://www.eval.fr/theorie-du-changement/

22. LEFÈBRE, A. (2021), L'analyse stratégique : définition et utilité, disponible sur https://www.leblogdudirigeant.com/analyse-strategique.

23. MAXICOURS. (2020), Les décisions stratégiques et l'offre des organisations, disponible sur https://www.maxicours.com/se/cours/les-decisions-strategiques-et-l-offre-des-organisations/

24. ORGANISATION MONDIALE DE LA SANTÉ. (2020), Trachome, disponible sur https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/trachoma.

25. SABBAR, B. (2016), Le management stratégique et le management opérationnel,

disponible sur https://sabbar.fr/management/le-management-strategique-et-le-
management-operationnel/

26. WIKIPEDIA. Health Belief Model, disponible sur
https://fr.wikipedia.org/wiki/Health_belief_model, 2020.

TABLE DES MATIÈRES

THÉMATIQUES

PAGES

SOMMAIRE .

DÉDICACES

REMERCIEMENTS

RÉSUMÉ

SIGLES ET ABRÉVIATIONS

ii

i

iii

iv

v

INTRODUCTION

1

CHAPITRE 1 : LE TRACHOME : UNE MALADIE TROPICALE NÉGLIGÉE

2

I- CONTEXTE DE LA MALADIE

1- Aspects cliniques et épidémiologiques du trachome ..

2- Répercussions sociale et économique du trachome ..

3- Politiques de prévention et de lutte contre le trachome

3

5

6

II- PROBLÉMATIQUE PRATIQUE DU TRACHOME AU CAMEROUN

1- Observations relatives à la lutte contre le trachome au Cameroun

2- Identification du problème .

3- Question de recherche

8

12

13

CHAPITRE 2 : LE TRACHOME : UN PROBLÈME DE SANTÉ PUBLIQUE DANS
LE DS DE KOLOFATA

14

I- ÉTUDE DU CAS DU TRACHOME DANS CE DS

1- Présentation du DS de Kolofata .

2- Épidémiologie du trachome dans le DS de Kolofata .

3- Description des acteurs et enjeux dans la lutte contre le trachome

14

16

18

II- DIFFICULTÉS POSÉES PAR LE CAS

1- Au vu des observations faites .

2- Par rapport à la question de recherche

22

24

CHAPITRE 3 : DÉVELOPPEMENT THÉORIQUE ET APPROCHE ANALYTIQUE

26

I- CHAMP DISCIPLINAIRE ET THÉORIE CONVOQUÉE

 

1- Présentation de la théorie du Health Belief Model

 
 

27

2- Contribution du HBM à la résolution du problème identifié

 
 

30

II- ANALYSE STRATÉGIQUE

 

1- Analyse de la question de l'élimination du trachome dans le DS de Kolofata ......

 
 

31

2- Diagnostic stratégique

 
 

35

CHAPITRE 4 : DÉCISIONS ET ACTIONS STRATÉGIQUES

38

I- DÉCISIONS STRATÉGIQUES

 

1- Mise à jour de la cartographie du trachome

 
 

39

2- Planification des activités « CH » et « A »

 
 

39

3- Actualisation de l'agenda d'élimination

 
 
 

41

II- ACTIONS ENVISAGEABLES

 

1- MISE À JOUR DE LA CARTOGRAPHIE DU TRACHOME

 

> Rédaction et validation du protocole de l'enquête

41

 

> Sélection et formation des enquêteurs ..

42

> Déroulement de l'enquête / Collecte de données . ..

43

2- PLANIFICATION DES ACTIVITÉS « CH » ET « A »

 

> Commande d'antibiotiques .

45

> Formation / Recyclage des chirurgiens ..

45

> Campagne de distribution d'antibiotique / Chirurgie du TT

46

3- ACTUALISATION DE L'AGENDA D'ÉLIMINATION

 

> Enquête d'impact ..

47

> Enquête de surveillance

48

> Maintien d'une ressource humaine efficace / Transition .

49

CONCLUSION

50

BIBLIOGRAPHIE

vi

TABLE DES MATIÈRES .

viii






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