CORNERSTONE CHRISTIAN UNIVERSITY
FACULTÉ DE DROIT
Études des principaux déterminants du non
enregistrements des actes de naissance en Haïti : Cas de la
juridiction de Miragoâne de 1990 à 2000
Mémoire de sortie pour l'obtention du
diplôme de maitrise en Sciences Juridiques
Présenté par : Benoit
CLÉMENT
Sous la direction du Professeur NOËL
Samy
Haïti, juillet 2021
Introduction
Selon les Nations-Unies, l'enregistrement de l'état civil
est consignation continue, permanent, obligatoire et universel des faits
d'état civil et de leurs caractéristiques (naissances vivantes,
morts foetales, mariages, divorces et décès) (ONU, 2001). Pour
chacun de ces événements, les autorités étatiques
établissent un type document y relatif dénommé : acte
de l'état civil. L'officier de l'état civil est l'autorité
désignée par la loi pour recevoir, conserver les actes de
l'état civil et délivrer les copies ou extrait auxquels elles
confèrent l'authenticité. Il exerce sa fonction au nom et pour le
compte de l'Etat (Gabriel Marty, 1980). En tant qu'autorité publique
chargée de représenter l'Etat, il est soumis à un
régime particulier organisé par le Code Civil. Les fonctions de
l'officier de l'état civil occupent dès lors une place importante
tant dans le droit public qu'en droit privé. Cette originalité
se déduit notamment de la polysémie de l'expression d'état
civil qui, pris dans son sens le plus large, désigne la
considération juridique de la personne dans la société en
l'individualisant grâce à l'application des règles
relatives à la nationalité ainsi que celles propres à
l'état et la capacité des personnes (Bosse-Platière, Actes
de l'état civil, 2010). Une seconde acception, plus étroite,
renvoie l'état civil à la notion de famille, telle qu'elle
résulte du mariage et de la filiation. Dans son sens plus commun enfin,
l'état civil entend comme le service public auquel il incombe de dresser
les actes instrumentaires retraçant les différents
événements intéressant l'état d'une personne et de
les conserver dans les registres en vue de leur exploitation. Le rôle
premier de l'état civil consiste donc à enregistrer les actes
constatant les événements marquant l'état d'une personne.
L'enregistrement à l'état civil qui est donc une
nécessité a une double finalité.
D'un côté pour l'individu, il détient une
valeur essentielle. Primo, du point de vue sociologique, l'être social
manifeste le besoin primaire d'exister et d'être intégré
dans le groupe auquel il s'identifie culturellement. Jean-Jacques Rousseau a
été le premier à formuler cette nouvelle conception de
l'homme reposant sur le postulat qu'il ne peut exister sans les autres
(Rousseau, 1989). Il rejoint ainsi Aristote en affirmant que la societe nait
des faiblesses de l'individu. La societe contribue cependant de manière
essentielle à l'affirmation de l'homme au sens de Tzvetan Todorov, et
que chacun de nous a donc besoin des autres, besoin d'être
considéré (Todorov, 1995). C'est Hegel qui lui-même a
dénombré trois facteurs essentiels à la
détermination de l'identité subjective de l'homme. Outre l'estime
sociale et l'amour, le droit permet de rattacher les personnes à une
collectivité, à un territoire et surtout à une histoire.
Donc il n'y a pas d'Etat sans individu, l'un et l'autre étant
indissociables. La relation entre ces deux entités contribue à
favoriser, en terme de droit, un traitement abstrait de l'homme qui, dans la
Déclaration des droits nait enfant et meurt célibataire (Hegel,
1963). Le droit naturel présuppose en effet l'appréhension de
l'individu comme être suprême qui tend à la satisfaction
d'un intérêt national par la détermination de ses sujets de
droit.
Secundo, sur le plan de la jouissance de droit, il permet
à l'individu de faire valoir les droits liés à sa
condition, comme les différents événements de la vie tel
que la naissance, l'adoption, le mariage ou encore le divorce.
Considérant l'acte de naissance, par exemple, il représente le
premier document par lequel l'Etat assume qu'il reconnaît une personne
comme son ressortissant. À travers cet acte, les autorités
nationales compétentes établissent la personnalité
juridique de l'enfant en lui garantissant le bénéfice d'un
ensemble de prérogatives fondamentales attachées à tout
individu, comme le droit à une identité, un nom et un
prénom, une date de naissance, un sexe (ou à la rigueur une
identité sexuelle), des parents, une nationalité, une
personnalité juridique et un héritage (Mathieu, 2020 ).
L'enregistrement à l'état civil a également
une finalité collective. D'un côté, il permet à
l'Etat de connaitre la situation des personnes vivant sur son territoire. En
effet, en tout être humain, il y a non seulement un être individuel
mais aussi un être social pris en considération par le groupe et
à ce titre, traité comme un sujet de droit (Fenouillet, 2012).
Grâce à cette qualité de sujet de droit, l'homme est
doté de nombreuses prérogatives et de droits subjectifs dont il
peut se prévaloir. A en croire cette définition, l'être
humain serait avant tout un citoyen. Or, Terré et Fernouillet l'ont si
bien dit, si l'homme peut s'affirmer comme citoyen c'est uniquement s'il
s'affirme, d'abord en tant qu'homme en tant que tel, dans son
universalité afin de mieux fonder sa situation en tant que citoyen
particulier. En ce sens également, Michel Virally soulignait que
l'individu humain n'est pas nécessairement un sujet de droit. Il le
devient et il ne bénéficie de cette qualité que si elle
lui est attribuée par le droit positif, lequel peut en subordonner
l'attribution aux conditions qu'il définit lui-même (Virally,
1960). L'état civil contribue donc à l'organisation sociale en
conciliant tout à la fois reconnaissance de la vie humaine et
institution de police. Placé sous l'autorité d'un officier, le
service public de l'état civil demeure donc l'apanage du pouvoir
central. Par son biais, l'Etat peut avoir une parfaite maitrise des personnes
qui sont placées sous son autorité.
De l'autre côté, l'enregistrement est une
nécessité pour tout État démocratique. Il constitue
non seulement un outil juridique essentiel de protection des droits de la
personne mais aussi représente une source de données essentielles
pour établir des statistiques démographiques fiables,
étant le moyen le plus efficace permettant à l'État
d'enregistrer de manière continue et exhaustive des naissances et des
décès (UNICEF, l'enregistrement à la naissance: un droit
pour commencer, 2002). Toutefois, l'étendue du champ d'action de
l'état civil ne se limite pas qu'aux droits humains. Tout gouvernement a
beaucoup à gagner avec un système d'état civil fiable.
Ceci est en grande partie dû au fait qu'il permet de tenir des
statistiques à jour sur sa population s'il est bien géré.
Ces statistiques permettent plusieurs choses à un État. Pour
commencer, elles rendent possible la surveillance de plusieurs facteurs et
données comme la santé de la population grâce à la
fréquence des déclarations de décès par exemple.
Elles permettent ainsi de connaître le taux de mortalité, ou
encore le taux de divorces au sein du pays. L'état civil permet surtout
d'établir des estimations du nombre d'habitants (ONU, Principles and
Recommendations for a Vital Statistics System, 2014). Et l'estimation et la
surveillance des données démographiques ont en
réalité un attrait principal : elles garantissent de bonnes
capacités de planification à un État, quel que soit le
domaine : éducatif, social, ou sanitaire par exemple (Légibase,
2016). Pour l'éducation un État peut prévoir le nombre
d'élèves à scolariser dans certaines zones. L'aspect
social des statistiques se retrouve dans la capacité de l'État
à planifier la construction de logements supplémentaires par
exemple. Concernant la santé, le taux de mortalité est un bon
indicateur des besoins du territoire en termes de fournitures médicales
et de denrées alimentaires. En outre, parce que le gouvernement est
informé, il peut savoir quelles zones cibler en particulier pour
certaines politiques, quels territoires prioriser par rapport à
d'autres. Les décisions prises par le gouvernement sont donc
éclairées car basées sur la situation réelle. Les
statistiques tenues grâce à l'état civil permettent enfin
de mesurer précisément certains indices comme le niveau de vie,
l'espérance de vie et la mortalité infantile. Le cas
échéant, tout ceci permet aux ONG de préparer au mieux des
actions humanitaires parce qu'elles auront un meilleur aperçu de la
situation du pays (Dumont, 8 juillet 2015).
L'adoption des Objectifs de Développement Durable (ODD)
par l'Assemblée générale des Nations Unies en septembre
2015 a hissé l'enregistrement des naissances au rang de priorité
en matière de développement international. L'ODD 16 comprend une
cible qui vise spécialement à garantir une identité
juridique à tous, notamment grâce à l'enregistrement des
naissances, d'ici à 2030 (cible 16.9). Elle est complétée
par la cible 17.9, qui appelle à soutenir le renforcement des
capacités statistiques nécessaires à la mise en place de
systèmes solides d'enregistrement des faits d'état civil. Ces
systèmes produisent des statistiques cruciales, notamment en
matière d'enregistrement des naissances, qui sont indispensables pour
réaliser un développement humain et économique durable. En
conformité avec les ODD, l'UNICEF entend tenir la promesse de
l'enregistrement universel des naissances et garantir une identité
juridique à chaque enfant d'ici à 2030 (UNICEF, L'enregistrement
des naissances pour chaque enfant d'ici à 2030 : Où en
sommes-nous ?, 2017). Dans une perspective plus large, l'enregistrement des
naissances, composante du système d'enregistrement des faits
d'état civil, permet de favoriser une bonne planification, et surtout la
planification des services à fournir à certaines
catégories de la population (enfants, adultes, vieillards) et
l'évaluation des politiques publiques. Un bon système
d'enregistrement, par exemple, permet à l'État de planifier le
nombre d'écoles à fournir à une région ou la
quantité de centres de santé à construire pour garantir de
soins de santé suffisants à la population. Les retombées
au profit de certains groupes spéciaux dû à un
enregistrement de naissances peuvent se révéler fructueuses.
Si l'enregistrement à l'état civil notamment des
naissances révèle de si grande importance dans le
développement socio-économique d'un pays tant pour l'Etat en tant
que institution régulatrice que pour l'individu pris isolement, la
réalité des chiffres exprimant le nombre de personnes
enregistrées à l'état civil au niveau des Etats notamment
en Haïti prouve qu'il y a un manque assez considérable dans ce
domaine. Les rapports de nombreuses institutions intervenant dans ce domaine
prouvent que de nombreuses personnes ne soient pas enregistrées dans le
système d'état civil de leur pays.
Si dans les pays développés ou émergents,
l'enregistrement des faits d'état civil est ancré dans les moeurs
et pourrait ne pas constituer en quelque sorte un problème majeur pour
les gouvernants, dans les pays sous-développés, la situation est
tout autre. Prenons le cas d'Haïti, selon les résultats de
l'Enquête Mortalité, Morbidité, et Utilisation des Services
réalisés en 2017 par l'Institut haïtien de statistique et
d'informatique (IHSI), environ 15 % d'enfants haïtiens ne sont pas
enregistrés par les services d'état civil et environ 25%
d'entre-eux ne disposent aucun certificat de naissance (EMMUS-VI, 2017).
Derrière ce chiffre apparemment élevé peut
se cacher une diversité de situations. En effet, toujours d'après
cette même enquête, même si 85% des enfants de moins de 5 ans
sont déclarés, seuls 77% ont leur acte de naissance. Il pourrait
témoigner également que l'enregistrement des naissances n'est pas
systématique à travers les différentes juridictions du
pays dont celle de Miragoâne n'est pas exempt. C'est donc dans cette
perspective qu'il nous parait légitime de livrer nos réflexions
et propositions sur ce problème d'importance de la vie nationale dont on
ne doute pas que plus d'un ont déjà exploré. Pour avoir
une meilleure compréhension de cette réalité nous
formulons ainsi notre sujet : Etudes des principaux déterminants du
non enregistrements des actes de naissance en Haïti : Cas de la
juridiction de Miragoâne de 1990 à 2000
À travers cette étude, il sera question de
diagnostiquer les obstacles qui empêchent l'enregistrement
systématique et fiable des actes de naissance dans certaines
juridictions du pays. S'intéressant particulièrement aux bureaux
de l'état civil, à travers cette recherche notre regard converge
plus spécifiquement sur la qualité de travail
exécuté dans les dits bureaux. Notre étude repose sur une
double approche. Le volet théorique repose sur une recherche
documentaire. Ce qui nous a permis d'une part de consulter les
différents documents existant dans le domaine de l'état civil, de
l'autre, faire une analyse minutieuse du contenu de ces documents. Le volet
empirique a consisté à aller sur le terrain en vue de comprendre
la perception du personnel de l'état civil en particulier les officiers.
Cette observation se fait par l'utilisation d'un guide d'entretien
destiné aux officiers de l'état civil.
Notre travail a un plan binaire, c'est-à-dire il se divise
en deux (2) grandes parties. Chaque partie se subdivise elle-même en deux
(2) chapitres identifiés et ordonnés de façon
méthodique. La première partie tient compte de tous les aspects
théoriques, alors que la deuxième présente l'aspect
empirique de la recherche.
Le premier chapitre présente le cadre théorique, la
méthodologie et la question de recherche. Il s'attarde aussi sur les
principaux objectifs poursuivis dans le cadre de ce travail. Il définit
certains concepts généraux utilisés dans le domaine de
l'état civil. Il fait également la recension des écrits ou
est passé en revue la position de certains auteurs et à travers
laquelle nous dégageons des points de convergences et de divergences.
Précise enfin les choix méthodologiques fondamentaux et les
stratégies utilisées pour l'élaboration du contenu de la
recherche.
Le deuxième chapitre est consacré à faire
une présentation de la fonction de l'officier de l'état civil en
Haïti. Il passe en revue le rôle et la responsabilité qui lui
est assignés ainsi que les sanctions à encourir en cas de non
respect des principes établis. Ce chapitre fait état
également de la nature juridique de l'acte de naissance. Il souligne les
principaux éléments de son contenu et précise sa
portée réelle dans la vie de son détenteur.
Dans la deuxième partie, le premier chapitre traite et
analyse les données de l'enquête issues d'une série
d'entrevues réalisées auprès des responsables des bureaux
de l'état civil. Un guide d'entretien est utilisé à cette
fin. Les données de l'enquête sont présentées et
analysées.
Quant au dernier chapitre, il consiste à présenter
quelques pistes à envisager en vue d'amélioration du
phénomène de non enregistrement des actes de naissances en
Haïti. Cette partie prend en compte non seulement les aspects financiers
et administratifs mais aussi les aspects techniques et légaux.
Première partie
Cadre théorique et institutionnel de
l'état civil
Il est évident aujourd'hui que l'état civil
revêt une importance cruciale dans le développement d'un pays.
C'est l'avis de plusieurs experts du domaine de l'état civil dont
Aimé Gérard Yameogo. Ce dernier, dans son rapport pour le
Ministère de l'administration territoriale et de la
décentralisation (MITAD) de Burkina Faso, présente l'état
civil de façon générale ; ses fonctions, ses acteurs
ainsi que les différents documents qui le constituent. Il définit
l'état civil comme étant un service important dont les
prestations touchent divers domaines et intéressent toutes les couches
sociales de la population sans distinction de nationalité, de sexe et de
religion et ce, depuis la naissance de l'individu jusqu'à son
décès. Il lui confie deux fonctions : l'une administrative
et l'autre statistique. Pour Aimé Gérard donc il convient de
reconnaître au regard de toutes ses fonctions que l'état civil
joue un rôle très important dans la vie du citoyen. En effet,
l'acte de naissance, le premier acte de l'état civil est
considéré comme l'acte fondamental de la preuve du commencement
de la personnalité. C'est autour de lui que se construiront toute la vie
juridique de l'individu et tous les autres actes de l'état civil dont la
nationalité, attribut de l'exercice de la citoyenneté. La
déclaration donc des naissances étant une obligation
légale, son respect par le citoyen est une expression de sa
citoyenneté. Ainsi de l'étude réalisée par L'UNICEF
en 2002, on retient que l'enregistrement à la naissance est un droit
fondamental mais aussi la clé et le point de départ d'autres
droits tels le droit à l'éducation, aux soins de santé,
à la participation et à la protection. Cette étude
explique les raisons qui font que chaque année, plus de 50 millions de
naissances ne sont pas enregistrées. Elle insiste sur l'importance
cruciale de l'enregistrement de tous les évènements à
l'état civil, examine les obstacles à un enregistrement universel
et met en lumière quelques actions, sensibilisations, changements dans
la législation, allocations de ressources et constitution de
capacités qui devront être prises pour garantir l'enregistrement
de tous les enfants. Face à la quête permanente de
l'enregistrement pour tous, tout le mérite est de comprendre les hauts
et les bas du système afin d'envisager des solutions favorables à
un enregistrement qualitatif et quantitatif. Pour parvenir à
l'enregistrement de tous les enfants compétence exclusive est
donnée à l'officier de l'état civil. Au vu de ses
attributions, ce dernier tant à l'identification des citoyens qu'a
l'individualisation des personnes. Le 14 juin 1983, dans un arrêt rendu
par la première chambre civile de la cour de Cassation française
a affirmé que les actes de l'état civil sont les écrits
dans lesquels l'autorité publique constate, de manière
authentique, les principaux événements dont dépend
l'état des personnes.
Si pour Quivy R. et Campenhoudt L. tout travail de recherche doit
s'inscrit dans un continium et peut être situé dans ou par rapport
à des courants de pensées qui le précèdent et
l'influencent, il est donc normal qu'un chercheur prenne connaissance des
travaux antérieurs qui portent sur des objets comparables et qu'il soit
explicite sur ce qui rapproche et sur ce qui distingue son travail de ces
courants de pensées. C'est dans cette perspective que nous avons
choisi de présenter tout ce qui sert de cadre théorique en
vue d'analyser de façon systématique tout ce qui constitue
l'essence du phénomène du non enregistrement tant au niveau
international que national (Chapitre 1). S'il nous parait normal de
reconnaitre que l'enregistrement des naissances est fondamentalement essentiel
pour la reconnaissance des droit des personnes tant pour l'Etat que pour
l'individu, il est tout aussi naturel de reconnaitre que l'officier de
l'état civil est un acteur incontournable en droit de personne et de la
famille au vue de l'importance et de nombreuses compétences qui lui sont
conférées par la loi afin d'officialiser les principaux faits et
actes ayant une incidence sur la condition personnelle et familiale de
l'individu. Si la naissance constitue un événement naturel dont
la survivance s'impose à l'officier de l'état civil,
l'enregistrement de l'acte de naissance implique une vigilance
particulière de la part de l'officier de l'état civil. A
coté de son rôle moteur dans la question de la jouissance de
droit, cet acte obéit à des règles particulières
dans son fond et dans sa forme (Chapitre 2).
Chapitre I. Cadre théorique et
méthodologique de la recherche
Dans ce chapitre, nous tachons de définir très
précisément la problématique de notre travail, laquelle
constitue l'élément central de notre recherche. Il se subdivise
en deux sections. Dans la première, nous avons spécificité
le problème de notre recherche et accentué sur les notions
générales ayant rapport à notre sujet de recherche. La
deuxième fait état des connaissances théoriques de
plusieurs auteurs qui ont écrits sur les faits d'état civil en
Haïti et dans le monde puis aborde également l'approche
méthodologique qui a servi de fil conducteur à cette étude
tout en précisant les techniques et instruments de collecte des
données.
Section 1 : Problématique et concepts
appropriés
1- Problématique
Le phénomène du non enregistrement de l'état
civil en son essence semble être un fléau mondial. D'après
certains observateurs, il aboutit au même résultat tant dans les
pays sous-développés que dans les états en
développement. Toutefois, il pourrait avoir un accent plus
prononcé dans les pays dits pauvres.
Les Etats et les organisations internationales ont fait de ce
phénomène une préoccupation. De nombreuses actions en
témoignent. En 1946, le Fonds International de Secours à
l'Enfance (en anglais United Nations International Children's Emergency
Fund, UNICEF) fut crée. Cette institution qui est
consacrée à l'amélioration et à la promotion de la
condition des enfants, en 1953, est devenue un organe permanent
du système des Nations Unies. (Vie-Publique, 2020).
Pour sa part, l'UNICEF intervient directement dans la question de
l'état civil. Un peu partout dans le monde, elle accompagne et
développe les systèmes de collecte des données
(Regard-Femmes, 2017). En Haïti, cette institution des Nations-Unies
travaille de concert avec le Ministère de la Justice et de la
Sécurité Publique pour relever le taux d'enregistrement des
naissances, l'un des plus bas de la région de l'Amérique latine
et les Caraïbes (Reliefweb, 2021).
Le 20 novembre 1959, l'Assemblée
générale de l'ONU approuve à l'unanimité
une déclaration des droits de l'enfant. Ce document dans ses
dispositions fait injonction aux Etats de faire de la question de
l'enregistrement un droit humain fondamental. L'Etat a pour obligation de
mettre tout en oeuvre de le faire connaitre à tous mais également
de l'appliquer.
Agissant ainsi, le but de l'ONU serait de faire en sorte que les
systèmes d'état civil du monde entier soient fonctionnels. C'est
encore loin d'être le cas aujourd'hui, parce que les résultats et
les progrès enregistrés semblent encore insuffisants. Une preuve
c'est que les taux de complétude et de couverture de l'enregistrement
des faits d'état civil demeurent encore en-deçà de 40 %
dans la majorité des États membres (ONU, 2003).
Selon les dernières estimations de l'UNICEF, 237 millions
d'enfants de moins de 5 ans dans le monde ne détiennent pas actuellement
d'acte de naissance (UNICEF, 2017). Par ailleurs, cette institution tente
d'expliquer à travers le même document, d'une part, pourquoi
l'enfant doit être enregistré. D'autre part, comment se fait-il
que chaque année, plus de 50 millions de naissances ne sont pas
enregistrées ? D'après les données récentes
de l'UNICEF sur le continent africain, l'enregistrement à la naissance
des enfants de moins de 5 ans en Afrique est de 52 pour cent. Pourtant en Asie
du Sud, deux enfants sur trois ne sont pas déclarés à la
naissance et n'ont donc aucune trace officielle de leur nom, de leur famille ou
de leur date et lieu de naissance. Selon les statistiques sanitaires
mondiales de 2012, les deux pays les plus peuplés du monde (la
Chine et l'Inde, qui totalisent à elles deux 2,5 milliards d'habitants)
ne disposent pas de systèmes d'enregistrement des faits d'état
civil fonctionnels. Leurs statistiques de mortalité sont donc issues
d'enregistrement par échantillons.
Haïti, pour sa part, situé l'Amérique central
notamment dans le bassin de la Caraïbes, Haïti est un pays des
Grandes Antilles, qui occupe le tiers occidental de l'île d'Hispaniola.
Elle partage cette grande île, la plus peuplée des Antilles, avec
la République dominicaine. C'est le seul pays francophone
indépendant des Caraïbes. Il est également le seul pays de
la région caribéenne où la démographie est la plus
élevée avec une population de 11 591 279 habitants (2019). Son
taux de croissance démographique est de l'ordre de 1,52 % par an. En
effet, selon les statistiques produites par la Banque Mondiale en 2015,
l'Indice Synthétique de Fécondité (ISF) du pays est de 3
enfants/femme (Banque Mondiale, 2019). La situation démographique
semble inquiétante pour plus d'un. Eu égard à la question
de l'enregistrement des naissances, les autorités étatiques,
semblent accorder davantage attention à la protection des enfants, cette
frange de la population sur laquelle repose l'avenir du pays. Le cadre
juridique et institutionnel du système de l'état civil semble
bien établi. Il est constitué non seulement un d'outils
juridiques tant internationaux que nationaux de protection des droits de la
personne mais aussi et surtout des instituions et d'acteurs impliquant dans le
domaine.
Eu égard aux instruments internationaux, maintes
tentatives ont été entreprises par les différents
gouvernements notamment durant les trois dernières décennies
(1989-2019) pour contrer ce phénomène. Citons à titre
d'illustration : le Pacte international relatif aux droits civils et
politiques du 16 décembre 1966, ratifié par Haïti le 23
novembre 1990 ; La Convention relative aux droits de l'enfant (novembre
1989), ratifiée par Haïti le 30 août 1994. L'approbation de
ces instruments juridiques voudrait dire que l'Etat haïtien reconnait les
droits qui s'en sont contenus, accepte de les respecter et s'engage à
les faire connaître.
Il est à souligner qu'au regard de l'article 276-2 de la
Constitution de 1987 amendée en 2011, Haïti a fait choix d'un
système moniste à primauté du droit international. On
entend par là que le point de départ est que le droit
international et le droit interne font partie originellement d'un seul ordre
juridique, d'un seul phonème global, il n'y a pas de séparation
nette et entière entre l'ordre juridique international et interne. Pour
cela, les traités internationaux signés et ratifiés sont
directement applicables dans l'ordre juridique interne. Ainsi, les
traités internationaux signés et ratifiés sont directement
applicables dans l'ordre juridique interne. L'article se lit : Les
Traités ou Accords Internationaux, une fois sanctionnés et
ratifiés dans les formes prévues par la Constitution, font partie
de la législation du pays et abrogent toutes les lois qui leur sont
contraires.
A l'interne, les cadres juridiques pour l'enregistrement et la
documentation des personnes semblent traduit une certaine volonté des
gouvernements en vue d'enregistrer et de déterminer les personnes. Ce
qui peut être assimilé à une approche basée sur le
respect des droits des personnes et l'exercice de la pleine
citoyenneté. A côté de la Constitution en vigueur qui
intègre les conventions internationales et reconnaît
l'identité comme un droit de l'homme inhérent à la
personne qui doit être garanti par l'État. Au fil du temps, de
nouveaux décrets et arrêtés sont apparus. L'objectif serait
de faciliter l'accès à l'enregistrement des naissances et aux
documents en vertu de la loi, conformément aux tendances mondiales
définies dans les conventions et traités internationaux.
Entre 1995 à 2019, un décret et trois
arrêtés ont établi chacun un délai légal de
5 années pour l'enregistrement en temps voulu des personnes
physiques dépourvues d'acte de naissance pour faire régulariser
son état civil. En vertu de ces arrêtés, tous les
enregistrements de naissance qui ont lieu pendant la durée prévue
sont exemptés des frais de procédures. Ces décisions
juridiques (décrets et arrêtes) ont-elles atteint leur
objectif ?
Sur le plan institutionnel, actuellement, sur toute
l'étendue du territoire national, environ 200 bureaux d'état
civil fonctionnant sous la juridiction de moins de 20 tribunaux civils, moins
de 10 inspecteurs et moins de 20 contrôleurs. Trois institutions
étatiques interviennent dans la gestion du système de
l'état civil en Haïti. Ce sont le Ministère de la Justice et
de la Sécurité Publique qui, à travers le service
d'inspection et de contrôle de l'état civil de la Direction des
Affaires Judiciaires, détient la responsabilité de recrutement,
de nomination, de contrôle, de supervision des officiers de l'état
civil dans la réalisation de leurs fonctions. Sur la base de ces
prérogatives, il est clair que l'état civil haïtien fait
partie intégrante du Ministère de la Justice et de la
Sécurité publique qui assure la gestion des ressources
financières, humaines et financières allouées à ses
différentes activités. Le Ministère des Affaires
Etrangères intervient dans le cadre de l'état civil pour les
haïtiens vivant à l'étranger, en participant à
l'enregistrement des évènements par l'entremise des missions
diplomatiques ou consulaires. A cet effet, il est ouvert auprès de
chaque mission diplomatique ou consulaire un bureau qui s'occupe du service
d'état civil. Le Ministère de la Culture via les Archives
Nationales d'Haïti (ANH), de leur côté, constituent depuis le
décret du 20 mars 1986, une structure déconcentrée du
Ministère de la Culture et de la Communication (Moniteu#26, 1986). Avant
cette date, elles étaient sous la tutelle du Ministère de la
Justice. Fondées le 20 août 1860 sous le gouvernement du
président Fabre Nicolas Geffrard, les Archives Nationales sont une des
plus anciennes institutions d'Haïti. Elle est une des seules
à avoir célébré son tri-cinquantenaire d'existence
continue en Amérique latine. Elles ont pour mission de stocker,
protéger et conserver le double des registres de l'état civil
haïtien, en particulier, et le patrimoine écrit de la
république de manière générale. Le reposoir des
registres de l'Etat civil, elles sont habilitées à fournir, sur
demande, un extrait aux requérants nationaux. Il est à noter que
cet extrait est l'un des rares documents officiels acceptés par les
instances, tant nationales qu'internationales, pour les inscriptions à
l'Université ou pour entreprendre les démarches relatives aux
voyages vers les pays étrangers (Rousseau, 1991).
En dépit de tout sur les plans juridiques et
institutionnels, la question de l'état civil notamment l'enregistrement
des naissances reste d'une grande complexité. Nombreux sont les gens qui
ont reconnu que la question du non enregistrement constitue un grand
défi pour notre société. Le système haïtien
semble ne pas parvenir à enregistrer la totalité des naissances
d'une année, ni a fournir sans difficulté copie de l'acte
à ceux ou celles qui en ont besoin. Les rapports des institutions tant
nationales qu'internationales et les déclarations des
autorités étatiques sur cet état de fait sont
légions. Selon un rapport d'enquête de plusieurs organisations
internationales comme l'Organisation des Etats Américains (OEA), le
Programme des Nations-Unies pour le Développement (PNUD) et la Banque
Inter Américaine pour le Développement (BID), publié en
2009, montre que 40% des Haïtiens ne sont pas inscrits sur les registres
de l'état civil ou l'ont été irrégulièrement
et ne disposent donc pas d'acte de naissance valable (PNUD, 1999). Il faut
mentionner que d'énormes progrès se réalisent dans
l'intervalle. Des avancées considérables sont donc faites en
termes de progrès vers la réduction du taux des personnes non
enregistrées. Selon les statiques de l'UNICEF, en février 2020,
le taux d'enregistrement à l'état civil des enfants de moins de 5
ans, est de 85 pour cent. Il est vrai que la situation d'enregistrement
s'améliore de manière spectaculaire. Pas de quoi se
réjouir pour autant car, même avec ce score, cela
n'empêche qu'Haïti reste l'un des pays du continent
américain ayant les plus bas taux d'enfants
enregistrés à l'État civil (UNICEF, 2020).
Par ailleurs, la déclaration de monsieur Bertrand Wilfrid,
actuel directeur des Archives Nationales, établit clairement
l'évidence que le pays est confronté à des
problèmes cruciaux relatifs à l'enregistrement de ses
ressortissants. Selon le directeur, le quart de la population n'est
enregistré nulle part et n'existe pas pour l'Etat (Nouvelliste, 2021).
Pourquoi donc une situation ?
Ces chiffres témoignent en quelque sorte le niveau de
gravité de la situation de non enregistrement des naissances dans le
pays. À côté de cela, certains pensent que la situation est
encore pire. En ce sens, ils avancent deux raisons majeurs. D'une part, de
nombreux actes de naissance émis par les officiers d'état civil
sont en effet, pour les autorités étrangères dont celles
de France, entachés d'irrégularités, falsifiés,
facilement falsifiables, non répertoriés, non enregistrés,
ou enregistrés suivant des procédures irrégulières
(Bertin et Drogue, 2010). D'autre part, l'acte de naissance original qui
serait, selon la loi haïtienne, un papier a valeur authentique, n'est pas
toujours considéré comme un document fiable par les
autorités haïtiennes. Par conséquent, cet acte de naissance
dont la possession est exigée par la loi ne permet pas d'effectuer
certaines démarches de la vie courante, telle que l'obtention d'un
livret de passeport par exemple. Le document officiel qui revêt une
véritable force probante est l'extrait des archives, car il est
censé offrir de meilleures garanties d'authenticité (France,
2012).
Cela dit, qu'une personne pourrait toujours avoir son acte de
naissance alors que cet acte n'est enregistré nulle part. Plusieurs
interrogations peuvent être suscitées par cette situation. Quelle
est la valeur réelle de cet acte de naissance ? Quelles sont les
obstacles à l'enregistrement de l'acte ?
Suivant les dispositions de l'article 45 du code civil
haïtien, chaque année, entre le 1er janvier et le 10
février, l'officier de l'état civil est tenu de transférer
les registres aux Parquets de la juridiction du ressort du bureau de
l'état civil de sa juridiction. Cette disposition du code n'est-elle pas
connue ou suivie par les officiers de l'état civil ?
Faute de statistique, nous ne pouvons pas dire avec justesse le
nombre exact de compatriotes haïtiens se trouvant dans cette situation.
Toutefois, cette situation préoccupe une bonne partie de la population
qui sont victimes soient direct ou indirectement. La population vivant dans la
juridiction de Miragoâne pourrait être, sans doute, fait partie des
nombreuses personnes du pays dont leurs actes de naissance ne seraient pas
régulièrement répertoriés au bureau des Archives
Nationale. C'est par ce souci, par cette préoccupation au regard de
l'importance de l'enregistrement que le sujet : Etudes des principaux
déterminants du non enregistrements des actes de naissance en
Haïti. Cas de la juridiction de Miragoâne de 1990 à 2000 a
été choisi.
Sur le plan pratique, le choix d'un tel sujet fait
également l'objet de notre vécu quotidien. Le
phénomène de non enregistrement des actes de naissance est une
réalité profonde, tenace et présente. En qualité de
fonctionnaire attaché au service du Ministère de la Justice et de
la Sécurité Publique (MJSP), posté à un bureau
d'état civil, à longueur de semaine une pléiade
d'individus, en majorité des jeunes de moins de vingt (20) ans,
défile au bureau en vue de trouver des renseignements sur les
procédures à engager à propos de leurs actes de naissance
qui ne sont pas enregistrés aux bureaux des Archives Nationales. C'est
fort de ce constat, qu'il nous parait légitime de livrer nos
réflexions et propositions sur ce problème d'importance de la vie
nationale dont on ne doute pas que plus d'un ont déjà, à
un certain niveau, exploré.
Dans les différentes approches adoptées par les
institutions internationales surtout l'UNICEF, elles considèrent le
phénomène de non enregistrement comme le fait pour un individu,
en particulier un enfant, de ne jamais été déclaré,
c'est-a- dire enregistrer à un niveau quelconque de l'état. Notre
préoccupation ne se situe pas à ce niveau. Dans le cadre de cette
recherche, nous cherchons à comprendre le phénomène du non
enregistrement à un niveau plus particulier. Nous tâchons
à comprendre comment et pourquoi certains individu en Haïti aient
leurs actes de naissance quand ils se rendent aux bureaux des Archives pour
trouver un extrait, la réponse est parfois négative.
Question formulées
Convenant que notre expérience de praticien au sein d'un
bureau de l'état civil a influencé en partie le choix de notre
sujet de recherche, nous optons pour une approche consistant en l'examen des
conditions de fonctionnement des bureaux de l'état civil dans la
juridiction de Miragoâne sur une vingtaine d'années environ.
Analyser l'univers de travail des officiers dans le système
d'état civil haïtien, sous l'angle de l'encadrement qui les
concerne.
Question de départ
Devant l'ensemble de questionnements que pourrait susciter le
sujet, nous adoptons une question de recherche principale. La question centrale
de notre recherche se formule ainsi: Qu'est-ce qui pourrait expliquer qu'une
personne ait son acte de naissance, au delà du délai fixé
par la loi pour qu'il soit transmis au bureau des Archives Nationales, ne le
trouve pas consigné dans les registres du dit bureau?
Questions secondaires
Pour en arriver à répondre à ces
interrogations, nous formulons les sous-questions suivantes qui vont guider
notre recherche :
1. Qu'est-ce que les recherches antérieures nous
apprennent sur les différentes dimensions de la question de
l'enregistrement des actes de naissance ?
2. A quel niveau de l'appareil étatique se situe le
problème du non enregistrement des actes de naissance ?
3. Qu'est-ce qui doit-être fait pour enrayer ce
problème ?
Hypothèse scientifique du travail
Plusieurs définitions ont été
proposées autour du concept hypothèse. Dans le cadre de notre
travail nous retenons celle de Grawitz Madeleine pour sa simplicité.
Une hypothèse, d'après Grawitz M.,
c'est une proposition de réponse à une question
posée. Ce sont donc des thèses préalables que le
chercheur émet en fonction des observations empiriques qu'il a faites.
En tant que tel, elle appelle à la vérification à travers
expérimentation et analyse. (Grawitz, 2001)
Ainsi définit l'hypothèse, par souci de
méthode, nous hiérarchisons nos hypothèses en
l'hypothèse générale et les hypothèses secondaires.
Il importe maintenant de donner réponse à nos questions de
départ.
Hypothèse
générale
Les considérations théoriques qui ont
été retenues et analysées conduisent à la
formulation de l'hypothèse générale suivante :
Le non enregistrement de certains actes de naissance, qui est
légalement une faute, dans la juridiction de Miragoâne est due au
fait que les bureaux de l'état civil ne disposent pas de personnel
et de matériels suffisants et adéquats devant faciliter
l'enregistrement des dits actes.
Cette hypothèse générale, comme son nom
l'indique, est assez globalisante. Pour cela, elle demande donc à
être spécifiée et opérationnalisée à
travers des hypothèses sous-jacentes ou secondaires.
Hypothèses secondaires
Ø Les officiers de l'état civil exercent leur
fonction en marge des exigences des lois régissant la matière.
Ø Certaines lois relatives à l'état civil
sont inadaptées.
Objectifs du travail de recherche
Pour vérifier ces hypothèses, les objectifs qui
suivent ont été formulés.
Objectif général
Ce travail a pour ambition de fournir des éléments
d'analyse et de propositions susceptibles de contribuer à offrir des
pistes de solutions pour un meilleur enregistrement des actes de naissance
rédigés dans les bureaux de l'état civil en Haïti,
particulièrement dans la juridiction de Miragoâne. Il se veut une
analyse non seulement de diverses littératures scientifiques, de
documents issus d'organisations internationales et des chercheurs dans le
domaine, mais aussi celle des pratiques réelles des acteurs intervenant
directement dans les bureaux de l'état civil. C'est dans cette optique
qu'en plus de l'analyse documentaire, des enquêtes de terrain ont
été menées dans le cadre d'une étude exploratoire,
aux fins d'aboutir à des propositions pouvant contribuer à
l'amélioration du phénomène de non enregistrement en
Haïti. A cet effet, deux objectifs spécifiques seront poursuivis.
Il s'agit de :
Objectifs spécifiques
Ø Identifier les principaux facteurs responsables du
phénomène de non enregistrement des actes de naissance.
Ø Formuler des propositions pour contrer ce
phénomène
2. Clarification de certains concepts
La définition des concepts utilisés dans le cadre
de ce travail permet de mieux comprendre l'importance de l'enregistrement dans
le système de l'état civil, ainsi que les exigences liées
à la construction de la connaissance. Il est donc important de bien
cerner chacun de ces concepts formant ce diptyque aux fins d'attribuer une
définition à même de convaincre que leur liaison peut
être bénéfique à bien des égards à
l'humanité et de prouver à quel point le tandem «
état civil - enregistrement » peut être d'un apport
considérable à la protection de l'enfant et au
développement durable. Pour la compréhension de ce travail, et
afin d'éviter toute confusion nous tenons à clarifier certains
concepts polysémiques relatifs à l'état civil ce qui aide
à structurer l'approche théorique et méthodologique de
cette recherche. Ainsi convient-il d'apporter des précisions sur :
Etat civil, enregistrement, enfant, dépôt légal,
expédition, extrait, filiation formulaire, registre
Etat civil
Selon lexique des termes juridiques (Guillien et Vincent,
juin 2001), l'état civil est défini comme suit :
a) "Situation de la personne en droit privé
spécialement dans les rapports familiaux, telle que résulte des
éléments pris en considération par le droit en vue de lui
accorder des prérogatives juridiques".
b) "Service public chargé d'établir et de conserver
les actes de l'état civil (acte de naissance, de mariage, de
décès)".
Pour sa part, le dictionnaire juridique (Dictionnaire Juridique)
définit l'état civil d'une personne, est constitué de
l'ensemble des éléments relatifs à la personne qui
identifient un individu. Par extension, c'est l'appellation donnée aux
services administratifs d'une commune qui reçoivent les
déclarations et qui conservent les registres concernant les naissances,
les reconnaissances d'enfants naturels, les mariages et les
décès.
Les civilistes français, TERRE et FENOUILLET (Fenouillet
et Terré, 1996) soulignent que l'état civil est constitué
d'éléments assortis d'effet juridiques permettant de situer la
personne sur le plan personnel, familial et social. A ce titre, les
éléments comme la vie, le sexe, l'âge, l'état
mental, la situation par rapport à la filiation (enfant né dans
ou hors mariage, affilié ou non, adoptif,...), la situation matrimoniale
(célibataire, marié, veuf, divorcé) en font partie.
Pour Me. René Julien, l'état civil d'un
citoyen constitue la base de l'organisation familiale et sociale de l'Etat. Il
permet d'avoir des données concrètes sur l'existence de chaque
membre de la société : Naissance, Décès ;
sur les événements ayant marqué leur existence
sociale : mariage, divorce, adoption (Julien, 1989).
Il est à noter, pour nous autre, dans le cadre de cette
étude nous retenons que l'état civil est la structure
administrative qui s'occupe de la délivrance des documents
appelés actes d'état civil.
Enregistrement
En Droit Civil, l'enregistrement est une formalité
fiscale obligatoire ou volontaire, consistant en l'analyse ou la mention d'un
acte juridique sur un registre, donnant lieu à la perception de droits
par l'Etat et conférant date certaine aux actes sous seing
privés, qui en sont dépourvus (Fenouillet et Terré, Droit
Civil: Les personnes La famille Les incapacites, 6 ed. Daloz, 1996).
En droit international public, il est l'inscription des
traités aux archives du secrétariat de l'Organisation des Nation
Unies (ONU), imposée aux Etats membres pour que les traités
puissent être invoqués devant les organes de l'ONU. (Art. 102 de
la Charte de l'ONU) (Fenouillet et Terré, Droit Civil: Les personnes La
famille Les incapacites, 6 ed. Daloz, 1996)
En matière de l'état civil,
l'enregistrement à la naissance c'est l'inscription officielle d'un
enfant à la naissance. Il s'agit d'une procédure administrative
de reconnaissance permanente et officielle de l'existence d'un enfant (ILBOUDO,
2008). C'est à cette dernière définition nous nous
attachons dans le cadre de notre travail.
Enfant
Pour A. Gouttenoire l'enfant serait le petit homme,
c'est-à-dire celui qui n'a pas encore acquis toutes les qualités
nécessaires pour assumer les devoirs et responsabilités de la vie
sociale et juridique (Gouttenoire, 1994). En d'autres termes, ce serait celui
qui n'a pas encore la capacité d'exercer ses droits et obligations.
L'auteure va plus loin quand il dit : l'enfant c'est aussi le petit
d'Homme, celui qui s'inscrit dans le temps par un rattachement
générationnel.
La Convention internationale relative aux droits de
l'enfant de 1989 définit de manière plus précise le
terme enfant : [...] tout être humain
âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est
atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est
applicable. L'idée transmise, à travers cette définition
de l'enfant, c'est sa jeunesse et sa vulnérabilité. En effet,
l'enfant est un être en pleine croissance, un adulte en devenir, qui n'a
pas les moyens de se protéger seul. A partir de ces deux
définitions minimalistes de l'enfant, il faudrait déduire que
l'enfant aurait deux droits fondamentaux distincts et complémentaires :
le droit à la protection et le droit à la transmission.
Délai légal
Pour nous autre, dans le cadre de cette étude nous
retenons que le délai légal est l'espace de temps prévu
par la loi pour que le double de tous les registres de l'état civil
doive être transmis au bureau des Archives Nationales. Délai
compris entre le 1er janvier et le 10 février de l'année
suivante (Pierre-Louis, Code Civil Haitien, 2017).
Expédition
Selon le lexique des termes juridiques, c'est une copie d'un acte
authentique, délivrée par l'officier public dépositaire de
l'original (Guillien et Vincent, juin 2001).
En matière de l'état civil, c'est l'original
de l'acte délivré aux déclarants après qu'il soit
transcrit dans les registres. C'est à cette dernière
définition nous nous attachons dans le cadre de notre travail.
Extrait
Selon le lexique des termes juridiques, c'est la reproduction
partielle d'un acte, délivrée par le dépositaire.
Selon le Groupe d'Appui aux Rapatriés et
Réfugiés (GARR), c'est la reproduction partielle d'un acte de
l'état civil fait par le bureau des Archives Nationales pour prouver que
le dit acte a été enregistré (Wiza Loutis, 2007). Cette
définition est conforme à l'utilisation qui nous est faite dans
notre travail.
Registre
Dans le cadre de cette étude nous retenons qu'en
matière d'état civil, le registre est un cahier spécial
contenant des feuilles pré-remplies des actes de l'état civil,
imprimé soit par les soins du Ministère de la Justice et de la
Sécurité Publique (MJSP) ou par l'officier lui-même et qui
est à la disposition de l'officier de l'état civil pour
transcrire les actes de l'état civil.
Formulaire
Selon la définition de l'ouvrage Vocabulaire
juridique de Gérard Cornu, un formulaire est un "recueil de
formules à l'usage des rédacteurs d'actes". Toujours selon la
définition de l'ouvrage une formule (du latin formula) est un
"modèle contenant les termes dans lesquels il est d'usage (parfois de
rigueur) de rédiger un acte [...] ou de faire une déclaration".
Généralement, les formulaires comprennent des formules et des
commentaires.
Ces formulaires sont alors dits "commentés" et contiennent
des indications précises permettant de compléter les formules
sans faire d'erreur d'interprétation et d'anticiper sur les implications
de telle ou telle formulation. De nombreux professionnels du droit utilisent
donc ces formulaires parce qu'ils leur font gagner un temps précieux.
Filiation
D'après le Dictionnaire Juridique, le mot "filiation"
désigne le rapport de famille qui lie un individu à une ou
plusieurs personnes dont il est issu.
La filiation est tout d'abord un lien juridique par lequel est
définie l'appartenance de l'individu à un groupe de parents, et
auquel sont associés un ensemble de droits (parmi lesquels on trouve
notamment la transmission du nom, la succession et l'héritage), de
devoirs (obligation d'entretien réciproque) et d'interdits (prohibition
de l'inceste) (A. Martial)
Section 2 : Revue de littérature et
méthodologie de la recherche
1. Revue de littérature
Plusieurs auteurs et ou institutions ont travaillé sur les
faits de l'état civil dans le monde en général et
Haïti en particulier. Cette partie se veut être le résultat
des consultations faites tout au long du processus de recherche. Au nombre de
ces consultations se trouvent des ouvrages, des articles des journaux, des
données statiques. Des synthèses de ces éléments
ont servi de points de repère importants pour l'élaboration de
cette recherche. Cette étape facilite l'exploration de
différentes sources ayant contribué à la
littérature de l'état civil dans le but de résumer les
principales positions théoriques et pratiques des différents
acteurs et civilistes relatives a la question. Pour ne pas alourdir notre
travail, nous tenons compte que de quelques-uns qui sont en liens directs avec
notre sujet.
En 2007, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS)
constate que la faiblesse de fonctionnement du système de l'état
civil des pays ne permet pas d'avoir des données fiables sur les
statistiques démographiques, la longévité et la
santé de leur population. Sept (7) ans après, soit en 2014, elle
estime que chaque année, deux tiers (soit 38 millions) des 56 millions
de décès ne sont pas enregistrés au niveau mondial (OMS,
2014). Elle établi que près de la moitié des naissances ne
sont non plus enregistrées, et ceci imputable à un certain nombre
d'obstacles qui empêchent l'enregistrement des naissances et des
décès. Pour elle, les pays doivent connaître le nombre
annuel des naissances et des décès, ainsi que les principales
causes de mortalité, pour que leur système de santé
fonctionne bien. Le seul moyen de comptabiliser tous les habitants consiste
à recenser les naissances et les décès auprès de
l'état civil. Cet enregistrement est à la base de
l'identité légale de chaque individu et permet aux pays
d'identifier les questions sanitaires les plus pressantes. En effet, lorsque
les décès ne sont pas comptabilisés et les causes ne sont
pas enregistrées, les gouvernements ne peuvent pas élaborer de
politiques efficaces de santé publique, ni mesurer leur impact.
L'état civil est un service établi dans tous les pays
développés et nécessaire dans les pays en
développement. Les informations sur la natalité et la
mortalité en fonction de l'âge, du sexe et de la cause sont la
pierre angulaire de la planification en santé publique.
Pour sa part, le Fonds des Nations Unies pour l'Enfance (UNICEF)
remarque que chaque année dans le monde, 51 millions d'enfants ne sont
pas enregistrés. En Asie du Sud, deux enfants sur trois ne sont pas
déclarés à la naissance et n'ont donc aucune trace
officielle de leur nom, de leur famille ou de leur date et lieu de naissance
(UNICEF,
https://www.unicef.fr/article/230-millions-d-enfants-n-existent-pas-officiellement,
2013).
De manière alarmante,
Anne
Bertin,
Cindy
Drogue, présente le système état civil haïtien
comme une structure archaïque et dysfonctionnelle qui exclu bon nombre
d'haïtien. En effet, ils posent le problème au niveau de la
présence des bureaux de l'état civil. Selon eux, en terme
quantitatif le nombre est insuffisant avec seulement 184 bureaux pour 27,750
km2. Le placement géographique des bureaux pose
problème, selon eux, 60 % de la population haïtienne vit en
milieu rural, elle est éloignée des centres urbains et bourgs
où sont implantés ces bureaux. Pour finir, ils mettent en doute
non seulement le mode de recrutement mais également le niveau de
formation des officiers et des clercs (Anne Bertin, 2012).
D'un autre côté, Me. René Julien, dirigeant
d'une association de juriste: Amical des Juristes, s'est penché la
question particulièrement sur ce qui concerne la problématique de
la réforme de l'état civil en Haïti. Selon lui, la question
est vraiment complexe et la résolution n'est pas pour demain s'il n'y a
pas une volonté politique réelle des autorités au plus
haut niveau de l'état. D'une part, Il avance pour dire que les
accusations apportées aux officiers de l'état civil sont
fondées mais il faut aller plus loin car il existe d'autres acteurs qui
sont aussi importants qui interviennent dans le système et qui ne
doivent pas être négligés. Les officiers d'état
civil ne sont pas les seuls concernés. Il y a aussi les commissaires de
gouvernement, les doyens, les Archives nationales, les casecs, prêtres,
pasteurs, les centres materno-infantiles, les femmes-sages et les matrones.
D'autre part, il pense que le pays a des lois suffisantes sur la question. Il
revient à l'Etat de les faire appliquer. Enfin, selon les conclusions
des résultats de son enquête, cinq (5) problèmes rongent le
système en Haïti :
1) l'inapplication des lois régissant l'état civil;
2) l'incompétence de certains officiers d'état
civil;
3) le refus des dirigeants haïtiens de pourvoir les bureaux
de l'état civil en matériels nécessaires;
4) la méconnaissance de l'importance des actes de
l'état civil ;
5) l'abandon total des zones reculées du pays.
D'après le guide de l'Organisation Internationale de la
Francophonie (OIF, 2014) pour la consolidation de l'état civil, des
listes électorales et la protection des données personnelles, la
consolidation de l'état civil sert à renforcer l'action publique.
L'identification des individus et, par là même, la connaissance de
la population grâce aux statistiques publiques obtenues par la politique
d'enregistrement des faits de l'état civil, permet de rationaliser les
politiques publiques, de moderniser l'État et de garantir la
transparence dans l'accès aux services publics. L'état civil,
comme source de fichiers sectoriels, notamment pour les listes
électorales, est un enjeu civique et politique. La liste
électorale appartient à la catégorie des « registres
de population », qui répondent aux objectifs administratifs d'un
État, tels que la perception de l'impôt ou les procédures
relatives à la délivrance des documents d'identité. La
fiabilité du fichier de la population est un facteur majeur de
l'efficacité de l'action publique, dont le premier retour est la
confiance des citoyens. Difficulté récurrente identifiée
par les missions électorales francophones organisées depuis 1992,
la fiabilité des listes électorales figure parmi les principales
recommandations émises par l'OIF. Or, sans listes électorales
fiables, on pourrait se demander s'il serait possible d'organiser des
élections exemptes de contestations.
Le Ph.D. Mickens Mathieu dans une analyse générale
faite sur le système d'enregistrement des naissances en Haïti,
montre les faiblesses du système. Il a fait remarquer que les
structures, appelées à gérer le système
d'enregistrement de l'état civil en Haïti, n'existent que de nom.
Selon lui, ces dernières ne sont pas fonctionnelles, par manque de
budget. Une situation qui offre le champ libre aux officiers de l'état
civil de gérer leurs bureaux sans respect des procédures
légales en vigueur. D'un autre côté, il avance pour dire
que les Archives Nationales qui sont là pour délivrer des
extraits des requérants nationaux, sont confrontées à un
ensemble de problèmes majeurs, non résolus jusqu'alors, en
relation avec la sécurisation des documents, le relais et le
contrôle du travail des officiers d'état civil, l'encombrement,
dû en grande partie à des dossiers en souffrance, suite à
leur non-enregistrement dans les archives nationales, ce qui provoque
l'envahissement des raketès (gens qui se font passer pour des
facilitateurs ou même pour des avocats promettant aux individus de leur
faciliter l'octroi en toute célérité des pièces
recherchées, une fois versée la somme d'argent
sollicitée).
Si nous nous penchons plus en détail sur le concept de
l'état civil, nous pouvons dire qu'il est à la base de tous les
droits, fondamentaux ou non. La Commission européenne explique qu'un
système d'état civil fiable et bien organisé est le socle
de l'exercice par les citoyens de leurs droits fondamentaux et, plus
spécifiquement, un pré requis pour que les citoyens puissent
jouir pleinement, dans le cadre de l'État de droit, de leurs droits
civils, politiques et sociaux (Commission-européenne, 2016). Dans les
textes fondateurs des droits humains, le lien entre l'état civil et
certaines dispositions est facile à établir. Si nous prenons la
Déclaration universelle des droits de l'homme, son sixième
article attire particulièrement l'attention parce qu'il stipule que
chacun a le droit à la reconnaissance en tous lieux de
personnalité juridique. Son article 8 garantit à toute personne
le droit à un recours effectif devant les juridictions nationales
compétentes contre les actes violant les droits fondamentaux qui lui
sont reconnus par la constitution ou par la loi. Toujours d'après ce
texte, son article 15 dispose que chaque individu a droit à une
nationalité. Pour insister sur l'impact universel de l'état
civil, citons aussi l'article 23 qui concerne le droit au travail, ou encore
l'article 26 sur le droit universel à l'éducation (ONU, 1948).
D'autres textes fondateurs des droits humains peuvent être
étudiés à l'aune du caractère vital de
l'état civil, comme le pacte international relatif aux droits civils et
politiques adopté en 1966. Son article 16 appuie lui aussi le droit
à la reconnaissance de sa personnalité juridique. En fait c'est
surtout pour son article 24 que nous le citons. Il énonce que tout
enfant doit être enregistré immédiatement après sa
naissance, avoir un nom et une nationalité. Il fait donc directement
écho à l'importance de l'état civil (ONU, Google.fr,
1966). Il rejoint en cela la Convention relative aux droits de l'enfant de
1989. Plusieurs de ses articles valent la peine d'être cités.
L'article 7 qui entérine l'importance de l'enregistrement à la
naissance, l'article 28 qui indique que les États ratifiant la
convention reconnaissent le droit de l'enfant à l'éducation,
l'article 32 opposé au travail des enfants et l'article 34 à
toute exploitation sexuelle (ONU, Google.fr, 1989).
2. Méthodologie de la recherche
Dans cette partie, il convient de présenter les
orientations épistémologiques et méthodologiques dans
lesquelles cette recherche s'inscrit. Le but poursuivi dans ce travail de
recherche est d'observer les bureaux de l'état civil, d'analyser les
comportements et la perception du personnel qui s'y rattache.
La collecte des données pour la réalisation de ce
travail de recherche tient compte de deux approches méthodologiques. En
premier lieu, nous commençons par un inventaire des documents
disponibles, c'est-à dire la recherche d'information sur le sujet
à travers les bibliothèques, les archives des organisations
nationales oeuvrant dans le domaine des droits humains et sur l'internet.
Cette recherche documentaire nous permettant de faire une analyse de contenus
des différentes positions des chercheurs, des critiques et/ou analystes
sur la question de l'état civil. La consultation de ces documents
conduit à un état des lieux de la problématique et
facilite l'accès à des informations sur les pratiques des acteurs
de l'état civil, en particuliers les officiers. L'analyse des contenus
de ces documents nous permet en outre de voir non seulement, l'importance que
des spécialistes et chercheurs accordent à la notion de
l'état civil, mais aussi nous démontrer les différentes
failles existant dans notre système d'état civil. La recherche
documentaire demeure une étape importante pour la réalisation de
ce travail de recherche dont la qualité est directement liée
à celle de l'information utilisée. C'est en quelque sorte, un
excellent moyen de chercher des réponses à nos questions ou
préoccupations, elle facilite la création de notre grille
d'analyse et d'observations. Si les documents trouvés permettent d'avoir
une vue éclairée sur notre question de recherche, toutefois, ils
ne renseignent pas suffisamment sur nos préoccupations. Ainsi, une
enquête de terrain s'avère-t-elle nécessaire pour
compléter notre travail.
En deuxième lieu, une enquête de terrain est
réalisée en vue de compléter le recueil des
données. Elle comprend deux activités réalisées
simultanément : l'observation et l'entretien. La première
permet de saisir des faits pertinents pouvant aider dans l'accumulation des
données nécessaires pour le renforcement de la deuxième.
Dans la même lignée, Dépelteau définit
l'observation comme un mode d'investigation direct qui permet au chercheur de
porter son regard sur le phénomène à étudier et non
sur la perception du phénomène en question (Dépelteau,
2000). Aussi, les observations directes et les entretiens semi-dirigés
sont ils utilisés comme outils dans le but de collecter un corpus
empirique qui nous permet de pénétrer le sens des
phénomènes observés. L'observation ne serait autre chose
qu'une méthode de recherches servant à décrire le
comportement des individus ou un phénomène quelconque. Cette
façon de collecter des informations exige qu'on soit sur le terrain afin
d'observer et de comprendre les comportements effectifs des individus
travaillant ou agissant dans un cadre institutionnel ou réglementaire.
Dans ce sens, nous projetons un regard sur l'aspect sanitaire des bureaux. Nous
observons également le comportement des clercs ou secrétaires
relativement au respect des droits des gens qui fréquentent les bureaux,
enfin nous observons l'état des bâtiments logeant les
établissements.
Outre la recherche documentaire et l'observation directe,
l'utilisation d'un autre instrument de collecte de données, à
savoir l'entretien semi-dirigé, s'avère-t-elle nécessaire
pour approfondir notre champ d'étude. À cet effet, chaque
interviewé aura l'occasion de donner son point de vue sur la question,
de sorte que le savoir produit par ce travail, soit socialement construit. Des
entretiens ont été réalisés au moyen d'un guide
structuré fait de questions ouvertes adressées aux officiers de
l'état civil et des clercs et/ou Secrétaires travaillant dans les
bureaux faisant l'objet de notre enquête. Tout en étant
constamment en interaction avec le milieu dans lequel ils évoluent, ces
acteurs ont la capacité d'avoir une vision stratégique de la
réalité.
Cette recherche va être réalisée dans le
département des Nippes, dans la juridiction du tribunal de
première instance de Miragoâne. Cette juridiction s'étend
sur les communes de Petite-Rivière, Miragoâne, Fond des
Nègres et paillant. Cet espace géographique, avec l'ensemble de
ses communes, constitue également sur le plan administratif,
l'arrondissement de Miragoâne. Chacune de ces communes contient un bureau
de l'état civil, a l'exception de Miragoâne qui en a deux. Notre
principale population de recherche est constituée d'un
échantillon de trois (3) bureaux de l'état civil dont l'un se
trouve dans chacune des communes Fond des Nègres, Miragoâne et
Petite-Rivière des Nippes. Certes la Commune de Miragoâne
possède deux (2) bureaux de l'état civil mais nous n'avons retenu
qu'un seul. Deux raisons peuvent l'expliquer. D'une part, le bureau de
l'état civil qui se situe dans le quartier de Saint Michel du Sud
n'ouvre ses portes qu'en 2004, alors que notre étude couvre la
période de 1990 à 2000. D'autre part, avec un bureau par commune,
ça nous permet de maintenir un certain équilibre entre les
communes. Pour la commune de Paillant, ce n'est que tardivement son bureau
commence à fonctionner, soit au cours de l'année 2017. Donc,
impossible qu'il soit figuré dans l'échantillon constituant la
population de notre enquête
Le guide d'entretien comporte des points en liaison à
l'hypothèse de travail. Cet outil a été conçu avec
des questions ouvertes afin de prospecter le plus largement que possible les
différentes dimensions et facettes des variables concernés. Il
confère la possibilité, au chercheur, de cibler les informations
qu'il veut obtenir, et à l'interviewé, celle d'obtenir des
clarifications sur les questions qui lui paraissent obscures. Il est
préparé à partir d'une série de questions ouvertes
et quelques unes fermées, permettant au chercheur de recueillir des
informations assez explicites ; ils offrent aussi à l'interviewé
beaucoup de liberté dans les choix de ses réponses.
Réalisé en face à face, il aide à établir
une relation de confiance entre les deux parties. Il faut souligner cependant
qu'on ne peut pas faire une analyse statistique de toutes les données
recueillies des entretiens réalisés. Le traitement de ces
données requiert un important travail d'analyse de contenus et
d'interprétation
Le guide d'entretien est là pour faciliter les directives
lors des entretiens individuels. Les réponses sont notées
directement sur un support papier, mais également enregistrées
sur bande magnétique à partir d'un enregistreur vocal
numérique (un dictaphone pouvant contenir un fichier de 180 minutes)
afin de mémoriser et de retranscrire les données. Après
chaque entrevue, la question de la confidentialité des réponses
et l'usage des informations sont décrites à l'interviewé.
Le guide d'entretien a été formulé en français mais
l'entretien n'a été mené qu'en créole afin de
faciliter une meilleure compréhension et une participation des
interviewés. Pour les besoins de la cause, cet outil d'enquête
apparaîtra en annexe. Faute de moyens financiers, nous avons
assuré nous-mêmes la retranscription des données
recueillies en français.
La collecte des données n'a pas été faite
en toute tranquillité. Quand nous contactons les officiers de
l'état civil pour solliciter d'eux un entretien, ils sont un peu
réticents, cependant avec beaucoup d'insistance et de tact, ils ont fini
par nous parler. Nous étions obligés de prendre plusieurs fois un
même rendez-vous à cause de l'indisponibilité de certains
d'entre eux. En outre, faute de temps, de disponibilité des acteurs et
de moyens financiers limités, nous n'avons malheureusement pu
étendre notre recherche à une plus grande population
d'étude. Nous espérons toutefois que d'autres chercheurs qui
seront intéressés par ce vaste champ d'étude
approfondiront leurs recherches en vue de l'édification de plus d'un.
Notre détermination, nous a permis de surmonter ces
difficultés donc les trois (3) entretiens recueillis constitueront la
matière première sur laquelle se basera notre étude.
Du reste, sur la base des documentations et de l'enquête
menée, nous avons engagé la méthode
hypothético-déductive dans le but de poursuivre les objectifs et
du coup vérifier les hypothèses émises.
Chapitre II : Officier de l'état civil et
acte de naissance en Haïti
Tout comme l'état des personnes, l'état civil est
un élément fondamental en ce qu'il est l'expression des heurs et
malheurs de la vie de l'individu (Teyssié, 2007). C'est sans doute pour
cette raison qu'ils suivent les mêmes particularités. A l'image de
l'état des personnes, l'état civil confère à
l'individu de nombreux statuts dont le statut individuel et le statut familial.
Le premier permet l'identification de l'individu notamment par l'attribution
d'un nom, d'un prénom, d'un domicile et de la reconnaissance de sa
capacité juridique ou son incapacité juridique. Le statut
familial permet, quant à lui, de déterminer la parenté,
soit née des liens du sang (adoption), soit née de l'alliance
(légitime ou naturelle). Pour que l'état civil puisse être
effectif, il faudrait que la personne soit enregistrée dès sa
naissance à un niveau quelconque de l'Etat. L'enregistrement de l'enfant
à sa naissance constitue le point de départ d'un fichage qui doit
durer toute sa vie. L'Etat accorde une valeur toute spéciale
à l'enregistrement. C'est pour cela que la loi oblige à toute
personne ayant été informée de la naissance d'un enfant
d'en faire le signalement à l'officier de l'état civil.
L'enregistrement de la naissance de l'enfant constitue un droit de l'enfant qui
résulte de l'obligation qui est faite à toute personne ayant eu
connaissance de la naissance. En effet, l'autorité
désignée pour participer activement à l'accomplissement de
la tâche d'enregistrement des enfants est donc l'officier de
l'état civil. La loi du 20 août 1974 précise qu'il a
l'autorité non seulement de recevoir et de conserver les actes de
l'état civil, il peut également délivrer les copies ou
extraits auxquels elles confèrent authenticité. C'est pourquoi
dans le cadre de ce chapitre, notre préoccupation consiste, dans un
premier temps, de le présenter comme acteur privilégié de
l'état civil dans le cadre de sa mission (Section 1). Dans un second
moment, analyser l'acte de naissance comme preuve de l'existence juridique de
l'enfant (Section 2).
Section 1 : Officier de l'état civil :
Acteur physique privilégié de l'état civil en
Haïti
En Haiti, la loi sur l'etat civil reconnait six types d'acte de
l'état civil auxquels competence exclusive est donnée à
l'officier de l'état civil pour marquer du sceau de la
souverainneté. Il s'agit, selon l'article 7 de la loi du 20 août
1974, des acte de naissance, de mariage, de décès, de
reconnaissance, de divorce et d'adoption La rédaction de ces actes
répond ainsi à un formalisme rigoureux afin d'éviter tout
risque d'anulation ou de rectification ultérieur. Les attributions de
l'officier de l'état civil ont un rôle essentiel dans
l'établissement de ces dit actes.
1) Rôle et competence de l'officier de l'état civil
dans l'établissement de l'acte de naissance
En ce que la personnalité juridique des personnes
physiques s'entend de la fiction juridique attribuée à chaque
individu au moment de sa naissance, l'intervention de l'officier de
l'état civil est consacrée par l'acte de naissance. L'Etat trouve
dans l'acte de naissance un intérêt en ce que l'enregistrement de
la date, du lieu et du sexe du nouveau-né lui permet d'etablir des
statistiques démographiques de sa population. Au vu de l'importance de
cet acte, l'officier de l'état civil doit s'assurer des conditions lui
permetant de recevoir les declarations au regard de la qualité des
déclarants. Il doit également etre certain que l'acte de
naissance qu'il établira sur les dires du déclarant est conforme
à la réalité. Lors de l'établissement de l'acte de
naissance, les énonciations formulées à l'officier de
l'état civil deviennent le corps même de l'acte. En l'enregistrant
puis en le consignant dans ses registres, selon l'idée de l'aticle 36 du
Code Civil haitien, l'acte est le plus strict reflet des dires des
déclarants, comparants ou parties. Suivant cette logique, l'officier de
l'état civil n'intervient qu'à raison d'une saisine exterieur. Ce
dernier ne peut en effet se saisir d'office quand bien même aurait-il eu
connaissance d'un événement qui ne lui aurait été
déclaré. Il ne peut pas non plus officier et participer à
l'acte en tant que déclarant ou témoin, ces deux qualités
étant incompatibles, selon le voeu de l'article 8 de la loi du 20
août 1974. Pour reprendre J. Massip, un acte dressé en de telles
circonstances serait dépourvu de toute valeur authentique. On peut donc
dire que l'officier de l'état civil n'est pas à l'origine des
actes de l'etat civil. Seules les personnes autorisées par la loi
pourront comparaitre devant lui pour déclarer un événement
ou confirmer l'identité des parties ainsi que l'exactitude des faits qui
seront consignés dans ses registres. Selon les dispositions des lois
haïtiennes relatives à l'état civil, les déclarants
sont quant à eux les personnes que la loi oblige ou autorise à
faire connaître à l'officier de l'état civil des faits dont
il doit être dressé acte. De ce fait, dans les actes de naissance,
le déclarant est l'une des personnes énumérées
à l'article 55 du Code Civil. Le deuxième alinéa de
l'article dispose ainsi que la naissance de l'enfant sera
déclaré par le père, ou, à défaut du
père, par la mère légitime ou naturelle, par les
médecins, chirurgiens, sages-femmes ou autres personnes qui auront
assisté à l'accouchement, et lorsque la mère aura
accouchée hors de son domicile, par la personne chez qui elle aura
accouché. Ainsi, au terme de l'expression générale
mentionnée à l'article précité, l'obligation de
déclarer la naissance semble peser indistinctement sur toutes les
personnes présentes à l'accouchement sans qu'il n'y ait d'ordre
successif. Il est prévu, en outre dans l'alinéa premier de ce
même article que la déclaration de naissance doit être
effectuée dans le mois de l'accouchement, à l'officier de
l'état civil du lieu du domicile de la mère ou du lieu de la
naissance de l'enfant. En effet, outre le délai légal d'un mois
prévu, une prolongation de vingt-quatre autres mois est accordée
aux comparants pour déclarer la naissance à l'officier de
l'état civil. Cependant, le défaut de déclaration de la
naissance dans ce délai de vingt cinq (25) mois entraine
l'incompétence de l'officier de l'état civil. En pareil cas, seul
un jugement rendu par le tribunal de civil de la juridiction où est
né l'enfant ou à défaut par le tribunal civil du domicile
de l'enfant pourra autoriser l'officier de l'état civil de consigner
cette naissance dans ses registres. Il faut noter que selon les dispositions de
l'article 37 du Code Civil en matière d'acte de naissance les parties
interessées ne seront point obligées de comparaitre en personne,
elles pourront se faire représenter par un fondé de procuration
spéciale et authentique. En effet, l'officier de l'état civil,
ayant compétence exclusive pour dresser les actes de naissance n'a pas
à vérifier la réalite de l'événement
déclaré ni se faire juge de la sincérité du
déclarant. Il doit uniquement se fier aux énonciations du
déclarant. Toutefois, le déclarant est tenu de relater à
l'officier de l'état civil, de manière la plus exacte et
fidèle possible, les circonstances de la naissance ainsi que tout
élément qui aurait été porté à sa
connaissance. Car, selon le voeu de l'article 55 du Code Civil, la
déclaration de naissance a un caractère obligatoire pour les
personnes visées. Elles sont tenus de fournir à l'officier de
l'état civil, au sens de l'article 56 du Code Civil, l'ensemble des
renseignements relatifs aux circonstances de la naissance par la
précision du jour, de l'heure et du lieu de naissance ainsi que les
renseignements relatifs à l'enfant par l'indication de son sexe, de son
nom de famille, de ses prénoms ainsi que les dates et lieux de
naissance. Le déclarant doit également renseigner l'officier de
l'état civil sur l'identité des témoins ainsi que les
parents de l'enfant notamment leurs noms, prénoms leurs professions et
domiciles. La derniere rubique de l'acte de naissance porte sur la signature de
l'officier de l'état civil, celle du déclarant et des des
témoins, préalablement soumis à la formalité de
lecture des informations contenant dans l'acte par l'officier de l'état
civil, au sens de l'article 39 du Code Civil. La relecture de l'acte repond
à l'obligation de s'assurer que l'acte de naissance aurait
été compris et serait conforme aux énonciations du
déclarant.
Toutefois, en tant que garant de la régularite de l'acte
de naissance, l'officier de l'état civil devrait avoir la
possibilité d'examiner les déclarations et pièces
produites par les déclarants. Bien que la loi ne le prévoit pas,
il devrait pouvoir d'exiger des pièces justificatives afin
d'éviter toute erreur relative au patronyme des parents. Cependant, au
nom du respect de la vie privée, et de l'immédiateté de la
rédaction de l'acte de naissance, cette possibilité de proceder
à des investigations s'avère, en pratique, délicat. S'il
est vrai que l'officier de l'etat civil ne peut en effet se saisir d'office ,
il faut noter que les dispositions de l'article 57 du Code Civil prévoit
qu'il appartient à l'officier de l'état civil d'établir un
double document concernant les enfants retrouvés dont l'identite de
leurs parents est inconnue. Il s'agit du procès verbal de la
découverte et de l'acte de l'acte de naissance provisoire.
L'officier de l'etat civil fait aussi figure de gardien des actes
et des informations attestant avec certitude la situation des personnes ainsi
que leurs attributs. Sa tâche n'est finalement pas reduite à la
rédaction des actes au regard des déclarations qui lui sont
faites. Elle va au-delà en assurant une véritable coordination
entre les actes et données relatifs à une même personne.
Selon les dispositions de l'article 45 du Code Civil, l'officier de
l'état civil a une double responsabilité. Il lui incombe en effet
de constituer les registres puis de conserver un des deux exemplaires
originaux. Le deuxieme étant adressé au Commissaire du
Gouvernement qui l'expédiera au Ministère de la Justice qui,
enfin, après contrôle et inspection, l'acheminera aux bureaux des
archives nationales. Concernant la constitution des registres, la mission de
l'officier de l'état civil est rigoureusement encadrée. L'article
41 du Code Civil prévoit les procédures d'ouverture des registres
par le Doyen du Tribunal de Première instance à la diligence de
l'officier de l'etat civil, pour chacun des exemplaires des registres.
L'article précise que les feuilles destinées à
l'inscription des actes doivent être numérotées. Elles sont
en outre paraphées par le Doyen. Selon l'article 42 du même Code,
des exigences particulières sont faites à l'officier d'inscrire
les actes dans les registres suivant l'ordre de leur numérotation, de
suite sans aucun blanc. Pour la conservation des registres, en terme de
sécurité, la loi n'a pas tracé de procédures
spécifiques. Elle n'a fait que mentionner dans l'article 45, alinea 2,
que l'officier garde entre ses mains l'un des exemplaires originaux. Il le
gardera autant qu'il soit encore en poste. A sa mutation (révocation,
transfert ou décès) tous les doubles des registres qui constuent
l'archive de l'officier de l'etat civil seront transportés, par les
soins du Commissaire du Gouvernement, pour être déposés au
greffe du tribunal civil de la juridiction de l'officier.
Les actes de l'etat civil sont des actes administratifs relatifs
à l'etat des personnes. Dressés suivant les modalites prescrites
aux articles 35 et suivants du Code Civil, ils devienent des actes
authentiques. L'article 1102 du Code Civil definit l'acte authentique comme
étant celui qui a été reçu par officiers publics
ayant le droit d'instrumenter dans le lieu où l'acte a été
rédigé, et avec les solennités requises. Etant ainsi,
conformément à l'article 1104 du Code Civil, les actes de l'etat
civil font pleines foi de la convention qu'ils renferment entre les parties
contractantes et leurs heritiers ou ayants causes. En outre, la Cour de
Cassation, dans un arrêt de la premiere chambre civile du 12 juillet
1911, a précisé que les actes de l'état civil ne font foi
jusqu'à inscription de faux que des faits qui se passent devant
l'officier de l'état civil et dont la réalité est
constatée par lui ; quand aux déclarations
émanées des témoins et aux faits qu'elles constatent, ils
peuvent être combattus par la preuve testimoniale sans qu'il soit
recourrir à l'inscription de faux. Les dispositions des articles 35
à 38 du Code Civil exigent aux officiers de l'état civil le
respect minitieux des procédures non seulement de la présence
mais aussi de la trascription des actes sur les registres. Poursuivant le
même objectif, l'article 39 du Code Civil prescrit à l'officier de
l'état civil de donner lecture des actes aux parties, comparants, ou
à leur fondé de procuration, et aux témoins. Un autre
élément qui garantit l'authenticité des actes de
l'état civil est la signature des personnes dont la loi exige
l'intervention. L'article 40 du Code Civil précise que les actes doivent
être signés par l'officier de l'état civil, par les
comparants et les témoins, ou mention sera faite de la cause qui
empechera les comparants et les temoins à signer. L'officier devra
également indiquer dans l'acte l'impossibilité pour le
déclarant de signer, notamment en raison de son illetrisme. L'on en
déduit que l'ommission de signature d'une partie, d'un déclarant
ou d'un temoin n'est pas, en principe, une cause de nullité des actes de
l'état civil.
S'il est certes que l'officier de l'etat civil joue un role
important dans la determination de l'etat des personnes pour autant, il detient
un pouvoir qui souffre de marges de manoeuvres limitées. D'abord,
l'officier de l'état civil, selon les prescrits de l'article 17 de la
loi du 20 août 1974, ne saurait établir des actes que la loi ne
lui aurait pas prescrits, sous peine de sanctions. Son champs d'intervention
est d'autant plus limité en ce qu'il soit conditionné strictement
aux énonciations des déclarants. L'article 36 du Code Civil
précise en effet que les officiers de l'état civil ne pourront
rien insérer dans les actes qu'ils recevront, soit par note, soit par
énonciations quelconque, que ce qui doit être
déclaré par les comparants. Malgre la possibilité de
fraude à l'état civil, il est supprenant que les pouvoirs de
l'officier de l'état civil ne soient aussi restreints au regard des
moyens de contrôle et d'investigation dont il dispose afin de s'assurer
de la véracité mais aussi de la sincérité des
déclarants ou parties à l'acte. En effet, la preuve de
l'identité des parties, des déclarants ou des témoins,
n'est pas une formalité substantielle conditionnant l'intervention de
l'officier, qui ne surait refuser d'établir un acte de naissance en
l'absence de justificatifs. En ce sens, l'oficier de l'état civil, selon
l'article 55 alinéa 7, ne peut conditionner la rédaction de
l'acte de naissance à la présentation préalable d'un
justificatif permettant de faire preuve de l'identite du déclarant.
2) Conditions pour devenir officier de l'état civil
La loi du 20 août 1974 portant sur le contrôle et
l'inspection de l'état civil, quand a elle fixe en son article 13 les
conditions pour qu'une personne puisse être devenir officier sont
définies. L'article précise sept (7) conditions essentielles que
toute personne désireuse de devenir officier de l'état civil doit
avoir. Cet article se lit, pour être officier de l'état civil il
faut :
1) Etre haïtien;
2) Etre majeur ;
3) Jouir de ses droits civils et politiques et n'avoir jamais
été condamné à une peine afflictive ou infamante;
4) Avoir subi avec succès un examen de recrutement roulant
sur le programme officiel de la classe de 4e des lycées et
collèges. Les détenteurs de certificat de fin d'études
secondaires, première partie, ou d'un diplôme universitaire sont
dispensés de cet examen;
5) Avoir fait un stage de trois mois au moins, ou avoir
été clerc durant deux années dans un des bureaux de
l'état civil du pays;
6) Etre détenteur d'un certificat de bonnes vie et moeurs
délivré par le Maire de la commune ou le Juge de Paix et
visé par la Police;
7) Avoir une bonne connaissance des centres urbains et des zones
rurales de la juridiction.
M. André. F. BISTOURY, ancien officier de l'état
civil, a écrit à ce sujet: la fonction d'officier de
l'état civil est une des fonctions objet des convoitises les plus
fantastiques. L'homme qui sait à peine écrire son nom, pourvu que
les circonstances le mettent sur le chemin d'un homme politique qui a
réussi, se croit autoriser à devenir officier de l'état
civil.
3) Responsabilités et sanctions de l'officier
d'état civil
L'officier d'état civil agit dans sa juridiction en tant
que représentant de l'Etat. Il est soumis à un contrôle des
autorités judiciaires et en particulier du Commissaire du Gouvernement
(Pierre-Louis, 2011). Les fautes et négligences commises par l'officier
d'état civil dans l'exercice de ses fonctions peuvent engager la soit la
responsabilité de l'Etat, soit celle de l'officier d'état civil
lui-même. Dans le cadre de notre travail, nous prenons en compte que la
responsabilité personnelle de l'officier lui-même. La
responsabilité de l'officier de l'état civil est susceptible
d'être recherchée sur le plan civil ou pénal et les
sanctions qu'il peut encourir vont de l'amende civile à la sanction
pénale en passant par la sanction disciplinaire.
1. Responsabilité civile de l'officier de l'état
civil
Selon le code civil, toute faute ou négligence peut
entraîner la responsabilité de ceux qui l'ont commise (art.1169).
Ces dispositions s'appliquent à tous les citoyens, y compris aux
officiers de l'état civil. Le code civil prévoit un certain
nombre de situations à l'occasion desquelles la responsabilité de
l'officier d'état civil pourra être mise en cause : la tenue et la
conservation des registres d'état civil (art.52 et 53), ou les
dispositions relatives aux mariages (art. 144 et 178).
2. Responsabilité pénale de l'officier de
l'état civil
La responsabilité pénale des officiers de
l'état civil est prévue par les dispositions de l'article 52 aux
termes desquelles (Toute altération, tout faux dans les actes de
l'état civil, toute inscription de ces actes faite sur une feuille
volante et autrement que sur les registres à ce destinés,
donneront lieu aux dommages-intérêts des parties, sans
préjudice des peines portées au code pénal). La nature des
peines qui peuvent être prononcées par des juridictions
répressives renvoie à plusieurs articles du code pénal et
du code civil. Les poursuites pénales relèvent du droit commun,
et sont, suivant les cas, portées devant le tribunal de police, le
tribunal correctionnel ou la Cour d'assises.
3. Sanctions civiles encourues par les officiers de l'état
civil
Des sanctions civiles sont prévues pour manquement aux
obligations des officiers relatives à la rédaction des actes et
à l'apposition des mentions marginales d'une part, à celles
relatives à l'instruction des dossiers de mariage d'autre part.
Toutefois, les montants du dommage-intérêt n'est pas fixé.
4. Sanctions pénales encourues par les officiers de
l'état civil
Comme on dit, la faute pénale est qualifiée de
tout fait qui porte atteinte à l'intérêt public : elle
affecte suffisamment les valeurs jugées fondamentales de la
société pour que son auteur en réponde devant la loi en
subissant une peine. C'est ce que l'on désigne comme
responsabilité pénale. Cette sanction sera requise en principe
par le ministère public, qui représente la Société
; l'action par laquelle la sanction pénale est recherchée
s'appelle action publique ; elle est exercée devant une juridiction
chargée d'appliquer la loi pénale qui sera différente
selon la caractérisation de l'infraction : cours d'assise (crime),
tribunal correctionnel (délit) et tribunal de simple police
(contravention). Pour autant, une sanction pénale n'aura de sens que si
l'auteur de l'infraction peut se voir reprocher sa conduite et en mesurer la
portée, ce qui suppose qu'il ait commis l'infraction et en connaissance
de cause. En qualité de dépositaire public, les sanctions
classiques peuvent être appliquées a l'encontre de l'officier de
l'état civil pour des infractions communes, tels les
détournements d'acte public, la destruction, le détournement ou
la destruction de biens ou pièces remis en raison de sa fonction. Ces
dites infractions sont prévues et punies par l'article 134 du code
pénal haïtien.
Les sanctions pénales susceptibles d'être
prononcées à l'encontre des officiers de l'état civil sont
les suivantes : - amende d'un montant allant de seize (16) à
quarante huit (48) gourdes et de 1 à 3 mois d'emprisonnement : le
fait pour l'officier de l'état civil d'avoir inscrit l'acte sur de
simples feuilles volantes (art. 153 du code pénal) ;
- amende prévue par l'article 154 (16 à 64 gourdes)
et de (6 mois a 1 an) d'emprisonnement : le fait de célébrer un
mariage de mineurs sans avoir recueilli les autorisations familiales
nécessaires ;
- amende de (16 à 64 gourdes): le fait pour l'officier de
l'état civil de célébrer le mariage d'une femme
déjà liée par mariage, en ayant connaissance de cette
situation (art. 155 du code pénal) ;
- amende de 50 à 500 gourdes) : le fait pour l'officier de
l'état civil de dresser un acte pour lequel il n'était pas
compétent en raison de sa juridiction.
5. Sanctions disciplinaires
Outre les sanctions pénales et civiles que les officiers
de l'état civil encourent pour les fautes commises dans l'exercice des
fonctions de l'état civil, ils peuvent, pour les mêmes fautes, et
selon leur gravité, être suspendus et même
révoqués par l'autorité administrative. Ces dispositions
sont prévues d'une part, dans le décret portant révision
du statut général de la fonction publique en Haïti. Ce
décret a été publie dans le Moniteur, Spécial No 7,
22 juillet 2005. Il a entre autre objectif de préciser les droits et
garanties du fonctionnaire conformément aux prescrits constitutionnels
et de fixer ses devoirs et obligations envers I `Etat et les
administrés, ainsi que les sanctions consécutives à leur
manquement. Ainsi le chapitre IV de ce décret, à travers les
articles 182 à 192, la question de la discipline des fonctionnaires
publics est donc traitée. D'autre part, l'article 17 de la loi du 20
août 1974 portant sur le contrôle et l'inspection de l'état
civil en Haïti abonde dans le même sens. Selon cette loi, lorsqu'il
s'agit de mettre en application une sanction disciplinaire, l'autorité
hiérarchique n'a pas à attendre la décision d'un tribunal
quelconque. Cela sous entend que l'action disciplinaire étant
indépendante de l'action pénale, la suspension pouvait être
prononcée, même si les faits sanctionnés pouvaient
constituer une infraction pénale, sans avoir à attendre que la
juridiction pénale compétente ait définitivement
statué.
Section 2 : Acte de naissance en Haïti
L'acte de naissance est la première pièce
d'état civil que doit recevoir tout être humain à la
naissance. D'après les lois haïtiennes, chaque membre de la
société doit être inscrit dans le registre d'état
civil à sa naissance, de manière à être pris en
compte par l'Etat auquel il appartient. Cet acte lui servira tout au long de
son existence, permettant la rédaction d'autres actes d'état
civil à obtenir, pour différentes transactions ou
activités professionnelles et commerciales. Dans cette section de notre
travail nous présentons l'ensemble des prescriptions contenues dans le
formulaire de l'acte de naissance et analysons la portée de l'acte en
lui-même.
1. Etablissement de l'acte de naissance
L'acte de naissance représente, pour reprendre Jobnel
Pierre, le premier document par lequel l'Etat assume qu'il reconnaît une
personne comme son ressortissant. Ce document est une pièce juridique
attestant la déclaration ou l'enregistrement d'un fait d'état
civil (Pierre, 2005). Le système d'enregistrement est complexe et
pose de sérieux problèmes. D'un coté, l'acte est
enregistré par l'officier d'état civil de façon manuscrite
sur des formulaires pré remplis proposés par le Ministère
de la Justice et de la Sécurité Publique. Ces formulaires
laissent beaucoup de possibilités d'erreurs à la personne qui les
remplit. De l'autre, pas de référence d'orthographe
officielle. Étant donné qu'il n'existe pas d'orthographe
officielle pour les noms de famille haïtiens et le système se base
sur simple déclaration, les possibilités d'erreurs paraissent
évidentes. Le système offre à chaque officier de
l'état civil la latitude d'écrire le nom comme il l'entend. Cela
pourrait occasionner qu'au sein d'une même famille, une
variété d'orthographes du patronyme. Cette réalité
pourrait être source de conflits au moment par exemple, de partager des
biens laissés en héritage. Enfin, le système étant
exceptionnellement déclaratif, l'officier de l'état civil, bien
qu'ayant compétence exclusive pour dresser les actes de naissance, n'a
pas le pouvoir de vérifier la réalité de cet
événement. Il doit uniquement se fier aux énonciations du
déclarant. Il n'a qu'un simple rôle de transcription à
tenir, sans vérification aucune. En conséquence, des gens
détenteurs d'acte naissance pourraient sans difficultés aucunes
s'en font délivrer d'autres. Donc, une personne peut se retrouver
détentrice de plusieurs actes de naissance. Toutefois, dans le cadre des
naissances institutionnelles (enfant né à l'hôpital),
l'officier de l'état civil pourrait exige un certificat de naissance. Il
pourrait également demander l'acte de mariage lorsque le
déclarant se dit être marié. Lorsque l'enfant n'est pas
né à l'hôpital, l'acte de naissance est obtenu par
déclaration des parents (ou de l'un d'eux) et de deux témoins
devant l'officier d'état civil. Eu égard à la forme,
l'acte de naissance tel qu'il se présente aujourd'hui, selon un rapport
d'une mission en Haïti, organisée du 26 mars au 7 avril 2017 par
l'Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides
(OFPRA), est une feuille de papier de format bureautique US letter 8 ½ X
11 pouces (Refworld, 2017). Cette feuille pré imprimé
communément appelée formulaire, provient du Ministère de
Justice et de la Sécurité Publique (MJSP) et est rempli par
l'officier de l'état civil de concert avec le comparant, au moment de la
déclaration faite par ce dernier. Selon la représentante de
l'ambassade d'Haïti à Ottawa a précisé que les
renseignements « de base » qui se trouvent sur l'acte de naissance
sont les suivant :
· l'année de préparation et le jour et l'heure
de comparution
· le nom de l'officier d'état civil et son
identification
· le nom du comparant (père, mère, ou
tiers)
· la profession (parfois), le nom de la ville de son
domicile
· la déclaration en lien avec le type d'union
· le genre de l'enfant et son ou ses prénoms
· le nom de la mère, s'il s'agit d'une
déclaration par le père
· les noms des témoins
· les signatures et sceaux
Le modèle présenté sous la forme de
formulaire, pourrait être se décomposer en plusieurs rubriques
distinctes. Cette présentation semble être faite à la
lumière des conditions fixées par l'article 56 du code civil
haïtien. Il faut le mentionner qu'en matière d'acte de naissance,
trois (3) formulaires distincts peuvent être utilisés pour
déclarer une naissance, selon la qualité du déclarant. Si
c'est le père qui est le déclarant, on parle de
déclaration père et type de formulaire est utilisé. Dans
le cas ou c'est la mère, cas d'un enfant de père inconnu ou qui
ne reconnaît pas la paternité, c'est un autre type de formulaire
qui est utilisé (déclaration mère). La déclaration
est tierce lorsqu'un parent donne mandat à une autre personne de se
présenter devant l'officier de l'état civil pour faire la
déclaration de naissance. En pareil cas le formulaire utilisé
serait la déclaration tierce. Selon notre analyse du formulaire, nous
tentons nous-mêmes dans le cadre de notre travail de les regrouper en
plusieurs rubriques. La première concerne l'officier de l'état
civil lui-même. Elle renferme l'année de déclaration, le
jour et l'heure où la déclaration a été faite. En
outre, elle contient le nom de l'officier de l'état civil et son
identification. La seconde présente des indications permettant de
vérifier l'identité du ou des parents et celle de l'enfant. Le
père ainsi que la mère doivent être identifiés par
l'indication de leur nom(s), prénom(s), profession et domicile. Quant a
l'enfant, les informations relatives à son sexe, sa filiation (naturelle
ou légitime), le lieu, la date et heure de la naissance, enfin le ou les
prénoms qui lui est attribué. L'acte de naissance déclare
l'enfant légitime lorsqu'il est né dans les liens du mariage, et
naturel dans les autres cas. La dernière rubrique identifie les
témoins ainsi que la signature de l'officier de l'état civil, du
déclarant et des témoins. Ce sont ces dernières
formalités qui permettent de clôturer l'acte de naissance,
préalablement soumis à la relecture. Cependant, concernant les
enfants trouvés, l'officier de l'état civil procède
à une double inscription. D'une part du procès-verbal de
découverte, de l'autre, de l'acte de naissance, selon les
modalités prévues par l'article 57. Il est à noter que
dans le cas d'un enfant trouvé, l'officier devra lui-même choisir
les prénoms et noms à attribuer à l'enfant.
2. La portée de l'acte de naissance
Le système juridique haïtien reconnait trois (3)
sortes de filiations : celle dite légitime, celle adoptive et celle
naturelle. La filiation est légitime lorsque ceux que le droit nomme les
père et mère sont mariés lors de la conception ou de la
naissance de l'enfant. Elle est dite naturelle dans le cas contraire. Cette
dernière catégorie n'est pas homogène. Elle pourrait se
subdiviser entre les enfants naturels simples qui sont ceux dont les parents
auraient pu légalement contracter mariage mais ont librement
décidé de ne pas le faire ; les enfants naturels
adultérins qui sont ceux dont l'un au moins des auteurs était,
au moment de la conception, engagé dans une union conjugale avec un
tiers ; les enfants naturels incestueux qui sont ceux dont les père et
mère sont empêchés de s'épouser en raison de leur
lien de parenté à un degré proche. La filiation adoptive
est une relation de filiation juridique existant entre un enfant et des parents
qui ne sont pas du même sang. Il existe deux sortes d'adoption parmi
lesquelles un couple peut choisir : l'adoption simple et l'adoption
plénière. Selon l'article 24 de la loi du 15 novembre 2013
reformant l'adoption en Haïti, l'adoption simple est celle qui
confère le nom de l'adoptant à l'adopté en l'ajoutant au
premier nom de ce dernier. Cette loi précise en outre qu'aucune
modification ne sera apportée quand l'adoptant et l'adopté ont le
même nom patronymique. En cas d'adoption par un couple, l'adopté
prend le nom du mari ou du concubin.
Auparavant, le Code civil traitait séparément de la
« filiation légitime », qui s'inscrit dans le mariage, et de
la « filiation naturelle », qui existe en-dehors de l'union
conjugale. A l'intérieur de ces catégories, il était
édicté des règles différentes selon que l'on
envisageait l'établissement du lien maternel ou du lien paternel, seule
la reconnaissance étant commune à la maternité et à
la paternité hors mariage. Cependant, la loi du 4 juin 2014 a refondu la
présentation du droit de la filiation. L'article 1er de cette
loi établi le principe de l'égalité des filiations
légitime, naturelle, adoptive. Ainsi les enfants issus de l'une ou de
l'autre condition engendrent nécessairement l'égalité
entre tous les droits et les obligations moraux et pécuniaires à
la charge de leurs parents.
Désignant le lien qui unit un enfant à son
père et/ou à sa mère, la filiation n'est donc, comme dit
Gutmann, ni du domaine de l'être, ni du domaine de l'avoir : elle est du
domaine de la relation. Elle n'est pas non plus de l'ordre du fait, mais de
l'ordre de l'artifice en ce qu'elle n'existe pas par elle-même mais est
une création du droit (Gutmann, 2000). Certes, à la base de toute
filiation, il y a l'engendrement, il y a la procréation. Que ce soit par
le biais de relations charnelles ou d'une technique médicale, on
rencontre toujours le phénomène de création, entendu comme
l'action de faire naître et le phénomène d'assemblage,
d'union ou de fusion. Ainsi, la filiation, c'est l'attachement que le droit (et
la société dans son ensemble) considère comme digne
d'être reconnu. Quel que soit le qualificatif apposé au mot
filiation, il n'en demeure pas moins que celle-ci n'existe que parce qu'elle a
été légalement établie, c'est-à-dire
prouvée conformément à la loi. C'est en cela que
Gérard CORNU dit du droit de la filiation qu'il est un droit de la
preuve, un système de preuve (Cornu, 2003).
L'acte de naissance en constituera la preuve par excellence,
telle que l'indique le premier alinéa de l'article 2 de la loi portant
sur la paternité, la maternité et la filiation, publiée
dans le Moniteur, le mercredi 4 juin 2014. Cette article souligne que la
filiation s'établit par l'inscription de la naissance sur les registres
de l'officier de l'état civil ou sur ceux du Consul haïtien
à l'étranger, sur comparution des parents ou de l'un d'eux muni
d'un acte authentique ou d'une procuration spéciale donnée par
l'autre parent, ou d'une décision de justice passée en force de
chose souverainement jugée, résultant d'une action en recherche
de paternité ou de maternité (Moniteu#105, 2014). En
qualité de preuve, il a ses propres particularités. Il peut se
servir tantôt pour établir, tantôt pour anéantir une
filiation. D'abord, l'acte naissance établit donc la preuve de la
filiation de l'enfant à ses parents. En ce sens, il identifie clairement
l'auteur, qui, à défaut d'être certain, est le
géniteur le plus probable. Ensuite, il témoigne en quelque sorte
l'expression d'une volonté du géniteur d'assumer un lien de
filiation. Enfin, il est la manifestation d'un acte de foi, d'une
vérité instituée : je reconnais l'enfant, je suis inscrit
comme père sur l'acte de naissance de l'enfant de ma femme, je suis la
femme qui accouche de l'enfant et dont le nom est porté à l'acte
de naissance.
L'acte de naissance ne traduit pas seulement des preuves de
filiation de son propriétaire. Il est également un outil puissant
qui peut aider à protéger notamment les enfants contre des
changements illicites d'identité, par exemple un changement de nom ou
une falsification des liens familiaux. Cela se situe dans la ligne de l'article
8 de la Convention aux Droits des Enfants, et de l'obligation qu'a l'Etat de
préserver l'identité de l'enfant. Une question
particulièrement préoccupante ici est l'établissement de
faux papiers en vue d'une adoption illégale. Il est à noter que
l'article 8 de la Convention précise que le droit à un nom,
à une nationalité et à des relations familiales font
partie du droit à une identité, et que si un enfant est
illégalement privé des éléments constitutifs de son
identité ou de certains d'entre eux, les États parties doivent
lui accorder une assistance et une protection appropriées, pour que son
identité soit rétablie aussi rapidement que possible.
La démarche réalisée devant l'officier de
l'état civil est une formalité imposant de révéler
à l'État l'existence d'un fait dont on a eu connaissance afin que
l'information qu'il constitue ne reste pas secrète. L'article 56 du Code
civil dispose que doivent figurer dans l'acte de naissance les prénom,
nom, âge, profession et domicile du déclarant lorsque ce dernier
n'est pas le parent de l'enfant. Cela signifie que le déclarant agit en
son propre nom, et non pas en représentation de l'enfant, de la
mère de l'enfant ou de son père. Au sens de l'article 599 du Code
civil, cette démarche constitue un acte strictement personnel qui ne
peut donner lieu : ni à assistance, ni à représentation. A
la différence de la reconnaissance, la déclaration de naissance
n'a pas vocation à retranscrire un acte de volonté et c'est
pourquoi elle peut être faite par toute personne ayant connaissance de la
naissance de l'enfant (Carbonnier, 2004). Conformément à
l'article 7 de la Convention internationale des droits de l'enfant qui
prévoit que l'enfant est enregistré aussitôt sa naissance,
le législateur fait obligation à toute personne ayant eu
connaissance de la naissance d'un enfant d'en faire la déclaration
auprès des services de l'état civil. En effet, le principal
intéressé n'étant pas en mesure de se faire
connaître, il faut remettre entre les mains des tiers l'obligation de
déclarer sa naissance. A cette fin, le législateur charge toute
personne ayant eu connaissance de l'accouchement de procéder à la
déclaration. L'article 55 du Code civil ouvre une vaste liste de
personnes, qui peuvent être : les docteurs en médecine ou en
chirurgie, sages-femmes, officiers de santé ou toute autre personne qui
aurait assisté à l'accouchement. Toutefois, ces personnes ne sont
visées qu'en l'absence du père de l'enfant qui est
prioritairement concerné par l'obligation de déclarer la
naissance, puisque ce même article dispose que la naissance de l'enfant
sera déclaré par le père ou la mère de l'enfant. Le
droit de l'enfant d'être enregistré aussitôt sa naissance
donne à l'enfant le droit d'être connu des services de
l'État. Dans tous les cas, la jouissance effective des droits dont
l'enfant peut bénéficier est soumise à l'enregistrement de
sa naissance. A partir de cet instant il acquiert la personnalité
juridique qui lui donne le statut juridique de personne et de ce fait le
protège.
D'un autre côté, l'acte de naissance est l'un des
éléments importants utilisé par les autorités de
certains pays pour encourager la scolarisation. D'après l'UNICEF,
certains Etats comme le Cameroun, le Lesotho, les Maldives et le Yémen,
les écoles refusent d'inscrire les enfants qui n'ont pas de bulletin de
naissance. En Turquie, ce document est exigé pour l'obtention d'un
diplôme d'études primaires et par conséquent pour le
passage dans l'enseignement secondaire ; en Tanzanie, il faut le fournir pour
s'inscrire à l'université. A Sri Lanka, un certificat de
naissance n'est pas demandé pour l'inscription à l'école,
mais il est nécessaire pour se présenter à des examens.
Enfin, il est prouvé, suivant cette même ligne
d'idées, que cette pièce administrative facilite la jouissance
d'autres droits connexes, comme le droit de voter (une fois majeur) et de se
faire élire, le droit au mariage formel, celui de posséder un
compte bancaire et des propriétés, le droit de détenir
d'autres pièces d'identification d'égale d'importance, comme un
passeport et une carte d'identité.
Conclusion de la première partie
Au terme de cette première partie de notre étude,
elle nous montre que l'acte de naissance en son essence ne cesse d'être
au centre des préoccupations de l'individu pris isolement et de l'Etat
lui-même en tant que puissance régulatrice. L'éventail des
regards posés sur lui est fait qu'il devient un élément
précieux et même vital. Quelles que soient les prises de positions
en la matière, elles visent à influencer in fine les logiques qui
sous tendent son rattachement au fonctionnement de tous les jours dans toutes
les grandes décisions sociales et politiques de l'individu.
Toutefois, le diagnostic de la situation de l'état civil
fait ressortir un certain nombre de difficultés, de contraintes et
d'écarts qui ne facilitent pas l'enregistrement des enfants dès
leur naissance, comme en témoignent des études ou
recherche-action menées par des organisations internationales comme
l'Unicef par exemple. Le fait d'être enregistré confère
selon la revue Innocenti Digest de l'UNICEF, des droits et des
privilèges aux enfants dans les domaines de l'alimentation, de la
santé, de l'éducation. Selon la même source, il ouvre la
porte aux droits que de nombreux adultes considèrent comme acquis : le
droit de posséder un bien, de voter et de se présenter à
une élection, d'obtenir un passeport, etc. Les enfants non
enregistrés sont extrêmement vulnérables aux abus de toutes
sortes et sont des proies faciles pour les trafiquants, les esclavagistes, les
employeurs peu scrupuleux et d'autres individus de mauvaise foi. Pire, informe
le document, les enfants sans papiers peuvent être pris pour des adultes
qu'ils soient victimes ou coupables de crimes alors qu'en tant qu'enfant ils
auraient eu droit à une protection spéciale. L'acte de naissance
révèle non seulement le destin de l'individu et des familles,
mais également celle d'une société toute entière.
Conscient de son importance, les pouvoirs publics se livrent à une
quête perpétuelle en vue d'améliorer les conditions de
conservation des données de l'état civil. En tant que mode de
preuve de l'état de personnes, il peut toutefois paraitre surprenant que
l'acte de naissance présente encore certaines imperfections en ce qui
concerne notamment au niveau de son enregistrement. C'est sans doute pour cette
raison qu'un diagnostic approfondi sera faite dans la juridiction de
Miragoâne afin de mieux scruter le problème. Une analyse
approfondie sera faite des données provenant des bureaux d'état
civil avec une attention particulière aux officiers de l'état
civil. Acteur original en droit de la personne et de la famille, l'officier de
l'état civil pourrait être considéré comme chef de
file du système de l'état civil. De la naissance au
décès, en passant par la célébration d'un mariage,
la reconnaissance d'un enfant naturel, les actes qu'il dresse sont autant de
preuves de la situation des personnes et des citoyens. L'entretien et la
conservation des registres qu'il exerce dans sa fonction font de lui un maillon
essentiel dans l'histoire de la famille en particulier et celle de la societe
en générale.
Deuxième partie
Analyse du phénomène de non
enregistrement des actes de naissance en Haïti plus
particulièrement dans la juridiction de Miragoâne et des pistes de
solutions vers son amélioration
La loi sur l'état civil en l'occurrence le Code Civil,
distingue quatre types d'actes de l'état civil lesquels correspondent
aux grandes étapes de la vie des individus et des familles.
Compétence exclusive est donc donnée à l'officier de
l'état civil pour marquer du sceau de la souveraineté les
événements les plus marquants et non moins importants de la vie
des individus à l'occasion de l'établissement des actes de
naissance, de mariage de reconnaissance et de décès. Il ne fait
dès lors aucun doute, au vu de ces attributions, que l'officier de
l'état civil contribue tant à l'identification des citoyens
qu'à l'individualisation des personnes. En enregistrant puis en
consignant les données fournies par les déclarants dans les
registres, l'acte est le plus strict reflet des dires des comparants ou
parties. Les attributions de l'officier de l'état civil ont un
rôle essentiel dans la détermination du but originel et de la fin
naturelle de la vie, à une époque ou l'intervention humaine n'a
de cesse de repousser les limites de l'existence. Le Code Civil donne les
dispositions générales relatives à l'enregistrement des
actes de naissance, toutefois certains décrets et arrêtés
fixent des conditions particulières. L'application rigoureuse de ces
règles est importante en ce qu'elles conditionnent les effets de l'acte
de naissance à compter de son enregistrement à l'état
civil. L'enregistrement de l'acte de
naissance constitue le point de départ d'un fichage qui
doit durer toute la vie. Car c'est Isabelle Dauriac qui disait que
l'état civil est irréversible. Quelle que soit sa politique,
l'État a besoin pour la mener à bien, d'être en mesure
d'identifier les personnes à qui elle s'adresse. Ainsi, l'invention des
moyens nécessaires et la connexion entre les différents acteurs
pour facilité le fonctionnement des techniques sont de l'apanage de
chaque État. C'est pourquoi dans cette partie du travail nous allons
investiguer le mode de fonctionnement des bureaux de l'état civil dans
la juridiction de Miragoâne (chapitre I) pour pouvoir faire des
propositions relatives à leur fonctionnement(chapitre 2).
Chapitre I : Enquête sur le fonctionnement des
bureaux de l'état civil dans la juridiction de
Miragoâne
Ce chapitre présente les résultats de la
deuxième phase de notre recherche, comme il a été
clairement expliqué dans la partie traitant de la méthodologie
utilisée. Pour y parvenir il est question d'une part, de faire une
présentation de la juridiction de Miragoâne. Cette
présentation portera sur deux (2) aspects essentiels : l'aspect
physique et l'aspect administratif (section1). D'autre part, présenter
et analyser les résultats des données de l'enquête
menée dans les bureaux de l'état civil de cette juridiction
(section 2).
Section1 : Présentation de la juridiction de
Miragoâne
Dans le cadre de cette section de notre travail de recherche,
nous tentons de présenter la juridiction de Miragoâne qui comporte
quatre (4) communes : Miragoâne, Petite-Rivière de Nippes,
Paillant et Fond des Nègres. Pour éviter l'alourdissement des
données sur la zone d'étude, nous ne retenons que certaines
données sur les aspects physico-légal et administratif.
a. Aspect physico-légal
Cette partie prend en compte seulement les aspects légaux
(loi portant création du département) ainsi que certains aspects
relatifs à la démographie de la population à travers les
différentes communes de l'arrondissement. Aussi, une présentation
sommaire et sélective de certains éléments relatifs aux
activités économiques retrouvées dans les communes sera
faite.
§ Aspect légal
La juridiction de Miragoâne, comme dit
précédemment, avec ses quatre communes forme également
l'arrondissement de Miragoâne. A côté de cet arrondissement,
on trouve deux autres, l'arrondissement de l'Anse-à-veau et celui des
Barradères. Ce sont ces trois (3) arrondissements qui composent le
département des Nippes. Ce dernier est crée grâce à
un projet de loi déposé au parlement par le pouvoir
exécutif d'alors. Ce dit projet a été voté à
la chambre basse (chambre des députés), le 18 juin 2003 et par le
Sénat, le 4 septembre 2003. L'exécutif a publié cette loi
dans le journal officiel de la République, Le Moniteur, le 30 octobre de
la même année. D'après cette loi, ce département
compte onze (11) communes ; onze (11) quartiers et trente-sept (37)
sections communales (Moniteur#82, 2003).
§ Aspect démographique
Selon les données de l'Institut Haïtien des
Statistiques Internationales (IHSI), l'arrondissement de Miragoâne
à une population estimée à plus de 141 826 habitants dont
85 924 habitants vivant dans les sections rurales, soit environ 61 % de la
population. Cependant, la dernière estimation de la population totale,
par sexe et population de 18 ans et plus estimées en 2009, au niveau des
différentes unités
géographiques réalisée par l'Institut haïtien
de statistique et d'informatique (IHSI) a évalué cette population
à 128 979 habitants. En six (6) ans, de 2009 à 2015, la
population des communes et sections communales qui composent l'arrondissement
de Miragoâne a augmenté de 12,847 habitants environ, ce qui donne
une augmentation de 10% par rapport à la population recensée en
2009. A ce rythme, la population risquera d'atteindre les 180.000 à
l'horizon de 2030. Cet arrondissement couvre un espace de terre pouvant
être estimé à 435 km2 (IHSI, 2015).
Si l'on veut présenter la répartition des
populations de cet arrondissement à travers ces quatre communes, on
aura :
Tableau de répartition des populations par commune
|
Commune
|
Superficie (Km2)
|
Population
|
Densité
|
Miragoâne
|
185.87
|
62 528
|
336
|
Fond des Nègres
|
92.23
|
33 413
|
362
|
Petite-Rivière
|
93.70
|
28 553
|
305
|
Paillant
|
63.27
|
7 332
|
274
|
§ Aspect économique
Sur le plan économique, selon une enquête
menée par le Ministère de l'Agriculture des Ressources Naturelles
et du Développement Rural (MARNDR) le secteur primaire au niveau de
l'arrondissement de Miragoâne occupe une place très importante
dans l'économie. Toutes les activités du secteur primaires
confondues mobilisent environ 75% de la population active de l'arrondissement,
l'agriculture représente quand à elle plus 65% de la population
active. Bien qu'elle soit l'activité la plus importante du secteur
primaire, sa tendance n'est pas trop différente de celle qui
prédomine à l'échelle nationale où plus de 60% de
la population active dans les milieux ruraux se trouvent concentré dans
l'agriculture (MARNDR, 2008).
Toujours d'après les résultats de cette
enquête, la seconde activité ou catégorie importante est le
commerce qui mobilise 18% de la population active. Il contribue à donner
un nombre non négligeable d'emplois à une bonne partie de la
population active, notamment les femmes. Les deux plus grands pôles
d'activités commerciales sont, d'abord, la commune de Miragoâne
qui est le chef lieu du département et possède l'un des
principaux ports de commerce haïtien. Ce port reçoit
généralement des cargaisons d'objets manufacturés en
provenance des États-Unis d'Amérique. Il n'est pas inutile
de mentionner que les installations portuaires étaient également
utilisées par la compagnie américaine Reynolds Metals
Company spécialisée dans l'aluminium et l'exportation
de la bauxite en provenance notamment d'Haïti, notamment dans la
commune de Paillant. Cette compagnie a quitté le territoire haïtien
laissant derrière elle de grosses infrastructures, notamment un port en
eaux profondes. Ce port a remplacé en 2010 l'ancien port civil de la
commune qui a été endommagé avec le séisme du 12
janvier 2010. Ensuite la commune de Fond des Nègres qui, grâce a
son marché, mobilise une part importante de semi détaillants et
de petits marchandes de la région grand sud, en particulier du
département des Nippes. Les produits vendus sont essentiellement
constitués des produits agricoles de première
nécessité, de certains produits manufacturés, et d'autres
produits en provenance de l'étranger. Ce marché existe certes,
mais n'est généralement doté d'aucune infrastructure de
base. Il est représenté essentiellement par des espaces
physiques aménagés en plein air, au bord de la route nationale #2
conduisant vers les Cayes. L'essentiel des échanges est
réalisé dans le secteur informel, entre les agents des
différentes communes du département et ceux venant de
l'extérieur, c'est-à-dire des communes qui se trouvant dans des
départements voisins, comme l'Ouest et le Sud en particuliers.
Toutefois, tenant compte du caractère informel des
échanges au niveau de l'arrondissement, il parait assez difficile de
disposer de données suffisantes permettant en quelque sorte de chiffrer
les flux commerciaux. Quant aux activités du secteur secondaire, elles
sont marginales et englobent la transformation artisanale des ressources
naturelles.
§ Aspect administratif
Sur le plan administratif, c'est la juridiction de
Miragoâne qui détiendrait la majorité des institutions
publiques du département. On pourrait se demander pourquoi une telle
organisation. Peut-être parce qu'il est plus proche
géographiquement de la capitale du pays. Peut-être parce qu'il est
administrativement le chef lieu du département des Nippes
également chef lieu de l'arrondissement de Miragoâne. On n'a
aucune évidence. Sauf nous constatons que presque toutes les
institutions publiques sont représentées, sauf qu'elles sont
présentes uniquement au niveau des villes de Miragoâne et de Fond
des Nègres. On y retrouve : les directions départementales du
Ministère de l'Agriculture des Ressources Naturelles et du
Développement Rural (DDNi/MARNDR), du Ministère de l'Education
Nationale et de la Formation Professionnelle (DDNi/MENFP), du Ministère
de la Santé Publique et de la Population (DDNi/MSPP), du
Ministère de la Planification et de la Coopération Externe
(DDNi/MPCE), du Ministère des Travaux Publics du Transport et de la
Communication (DDNi/MTPTC), du Ministère de l'Economie et des Finances
(DDNi/MEF), du Ministère des Affaires Sociales et du Travail (DDNi/MAST)
et du Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique
via la PNH (DDNi/PNH) et le Parquet près le tribunal de première
Instance de Miragoâne. Parallèlement, le Ministère de
l'Intérieur et des Collectivités Territoriales (MICT) est
représenté dans l'arrondissement par la
délégation, les Mairies et les autres Collectivités
Territoriales locales. Les membres des Collectivités Territoriales
locales sont les plus présents au niveau de l'arrondissement, car on
retrouve les CASECS et ASECS au niveau de toutes les sections communales.
Il faut souligner qu'en passant que depuis 2020, plusieurs
institutions publiques sont en cohabitations. C'est le cas du Tribunal de
Première Instance de Miragoâne et du Parquet près de ce dit
tribunal ; de la DDNi/MENFP ; de la DDNi/MAST ; du Bureau
Electoral Départemental des Nippes (BED-Nippes) et de la Direction de
l'immigration et de l'émigration, pour ne citer que celles-là qui
sont toutes logées au local du complexe administratif public qui se
situe dans la ville de Miragoâne.
Pour ce qui concerne la Police Nationale d'Haïti (PNH), on
rencontre au niveau de cette juridiction le commissariat départemental
qui se situe à Miragoâne avec également la présence
d'une unité spécialisée: Unité
Départementale de Maintien de l'Ordre (UDMO). Il y a également un
sous-commissariat dans chacune des communes y compris un sous-commissariat du
quartier de Saint-Michel du Sud.
Sur le plan judiciaire, on y trouve un Tribunal de
Première Instance (TPI). Ce tribunal qui se situe dans la commune de
Miragoâne a été instauré par la loi du 11 juillet
2002. Cependant, celui-ci ne commence à fonctionner que le 3 octobre
2007, après maintes démarches et mouvements de revendications
faites par la population de cette juridiction, notamment celle de la commune de
Miragoâne. Siégeant à Miragoâne, la juridiction de ce
dit tribunal s'étend sur cinq (5) tribunaux de Paix dont deux d'entre
eux se trouvent dans la commune de Miragoâne : l'un est
situé au centre ville de Miragoâne et l'autre est placé au
niveau du quartier de Saint-Michel du Sud. Ce dernier a été
crée par le décret du 30 octobre 1986 (Moniteur#90, 6 novembre
1986). Pour les autres tribunaux de paix, ils se situent respectivement dans
les communes de Fond des Nègres, paillant et de Petite-Rivière
des Nippes. Il faut noter que le Parquet près du tribunal de
première instance de la juridiction de Miragoâne ouvre ses portes
au même moment que le dit tribunal.
En matière de l'état civil, la juridiction de
Miragoâne renferme également cinq (5) bureaux. Un (1) bureau dans
chacune des communes sauf la commune de Miragoâne qui en a deux. A
l'instar des tribunaux de paix, l'un des bureaux de l'état civil est
situé dans la ville et est censé là, pour desservir la
population centre ville et celle de la première section en raison de sa
proximité. L'autre qui se trouve dans le quartier de Saint Michel du Sud
est, depuis son installation en 2004, cohabité avec le tribunal de paix
de ce dit quartier. Il est censé là pour recevoir non seulement
la population de Saint Michel, à la fois quartier et
4ème section de la commune de Miragoâne mais
également les gens venant des localités de Belle-Rivière
et Dessources, respectivement deuxième et troisième section
communale de Miragoâne.
Il faut noter qu'actuellement dans la juridiction de
Miragoâne les bureaux de l'état civil sont logés dans les
mêmes locaux que les tribunaux de paix. Cette situation est du en vertu
de la loi du 23 juillet 1958 qui, dans ses dispositions, exige que dans chaque
localité ou fonctionne un Tribunal de Paix, les locaux de ce dit
tribunal doit servir également pour loger les Services de l'office de
l'état civil (Moniteur#94, 1958).
Section 2 : Présentation et analyse des
résultats de l'enquête sur les bureaux de l'état
civil
Dans cette section, nous tâchons de présenter et du
coup d'analyser les résultats de l'enquête que nous avons
menée dans les bureaux d'état civil de la juridiction de
Miragoâne. Cette démarche consiste à mettre à
l'épreuve l'hypothèse et l'objectif de la recherche à
partir des données empiriques récoltées sur le terrain
pour ensuite livrer leurs sens dans le contexte théorique de la
recherche. C'est dans cette perspective que nous menons notre enquête au
cours de la période allant du 2 au 12 mai 2021. Les résultats de
notre enquête se présentent sous forme de propositions
catégoriques accompagnées d`explications, afin de vérifier
si notre compréhension est conforme à la réalité et
permettre de montrer que notre traitement des entretiens a été
fait avec objectivité. Car ils vont nous permettre d'examiner en
profondeur les principaux facteurs qui entravent l'enregistrement des actes de
naissance. Pour une meilleure compréhension de cette section, nous
présentons d'abord les démarches méthodologiques
adoptées, ensuite les limites de notre recherche et enfin l'analyse
proprement dite des résultats de l'enquête.
Méthodologie de l'enquête
Dans un souci de clarté et pour permettre une meilleure
compréhension de notre étude, nous avons effectué notre
enquête sur un secteur géographique bien défini, il s'agit
de la juridiction de Miragoâne. Comme nous l'avons déjà
dit, notre recherche a été menée dans les trois (3)
communes abritant les bureaux d'état civil de la juridiction à
savoir les communes de Miragoâne, Petite-Rivière de Nippes et
Fond-des-Nègres. Les bureaux de l'état civil constituent notre
principale population de recherche. Pour recueillir les données, nous
avons utilisé la méthode qualitative.
Limites de notre recherche
Aucun chercheur ne saurait prétendre conduire une
recherche sans se heurter à des embuches et des limites de toutes
catégories ralentissant certaines fois ses élans et compliquant
son travail. Cette recherche est réalisée à partir de la
combinaison de trois techniques de recherches différentes: l'analyse
documentaire, l'observation directe et l'enquête de terrain. Les limites
de chacune de ces techniques étant déjà
présentées, il s'agit ici de s'attarder sur les limites
liées à la passation des guides d'entretien et celles de
l'observation. Dans le cadre de ce travail, nous avons rencontré des
contraintes ayant constitué des freins à notre démarche.
La première limite est liée au désistement spontané
ou à l'absence de certains personnels comme les clercs ayant
préalablement accepté de répondre aux questions. Cette
situation nous a imposé d'effectuer notre enquête seulement
auprès des officiers d'état civil. Une deuxième limite est
inhérente à l'observation directe. Tous les employés des
bureaux d'états civils observés étaient bien
informés à l'avance de notre présence, ils pourraient
éventuellement prendre toutes les dispositions nécessaires pour
que l'espace soit nettoyé et/ou arrangé, avant notre
arrivée. Une troisième limite concerne la réponse des
sujets par rapport aux guides d'entretien, les officiers ne jugent pas
important de nous fournir certaines explications relatives au mode de
rémunération des clercs et nous ont refusé l'accès
à leur registre ce qui nous permettra de vérifier si
effectivement les normes relatives à la transcription des actes de
naissance sont plus ou moins respectées.
Analyse des résultats
Pour pouvoir analyser les données recueillies dans le
cadre de la présente recherche, nous les regroupons autour de 3
thèmes.
D'abord, nous présentons le thème, puis l'objectif
poursuivi par le dit thème. Ensuite, nous exposons et analysons les
résultats qui sont des propositions d'ordre général sur
les pratiques des officiers d'état civil sur la question.
1) Thème 1 : Vérification de l'existence du
personnel attaché au bureau de l'état civil
Par ce premier thème, nous entendons poursuivre un
objectif bien précis. Il s'agit de vérifier le personnel
attaché au bureau de l'état civil. Cependant, il convient de
noter que cette vérification se fait à deux niveaux. Dans un
premier temps, nous prenons en compte l'effectif des employés
attachés au bureau. Cela nous permet de voir si le personnel est
suffisant pour exécuter les tâches essentielles liées au
fonctionnement régulier des bureaux d'état civil. Dans un second
temps, connaitre la formation du personnel, notamment celle liée
directement à leur fonction. Nous faisons référence leur
participation aux ateliers de formation, colloques et séminaires. Ce qui
nous offre l'opportunité de mieux comprendre le lien existant entre le
niveau de formation des employés et la persistance du
phénomène de non enregistrement.
Les opinions des interviewés sont convergées par
rapport à la quantité du personnel attaché au bureau de
l'état civil. Chaque bureau a pratiquement comme personnel un officier
de l'état civil. Ce dernier est un fonctionnaire nommé par le
Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique. Pour
faire fonctionner les bureaux d'état civil, selon le dit des officiers,
la présence des clercs est nécessaire. Dans chaque bureau
d'état civil, le constat montre qu'il existe un clerc. A l'exception du
bureau d'état civil de Miragoâne où l'on en trouve deux. Si
pour les autres bureaux d'état civil le clerc est pris en charge par
l'Etat, ceux de Miragoâne ne sont pas nommés par l'Etat. Par
conséquent, ils ne reçoivent pas un salaire provenant de la
caisse publique. Ils sont considérés comme des clercs
bénévoles. Etant bénévoles, ils n'ont pas un
salaire fixe. En compensation à leur travail, ils reçoivent de
l'officier de l'état civil, chaque semaine, une gratification.
Interrogé sur les sources de provenance et le montant de cette
gratification, l'interviewé nous a déclaré qu'il exige au
comparant, pour chaque acte d'état civil délivré par le
bureau, un frais de service. Quand nous lui questionnons sur le montant des
frais de service versés par les déclarants, aucune réponse
exacte ne nous est donnée. Selon lui, ce montant forfaitaire ne doit pas
être déclaré mais restera à sa discrétion.
Toutefois, pour ce qui concerne la rémunération qu'il attribue
à ses clercs, selon l'officier de l'état civil, il ne s'agit pas
d'un montant fixe et n'est non plus déterminé à l'avance.
Donc, il varie selon la réalité. C'est-à-dire de la
quantité des déclarants qui fréquente le bureau au cours
de la semaine en question. Voulant savoir s'il existe de tâches
spécifiques réservées à chaque clerc, l'officier
nous répond qu'il n'y a pas de tâches spécifiques
réservées à une personne bien déterminée.
Les clercs reçoivent les déclarations dépendamment du
service que réclame le comparant. Si la loi du 20 août 1974
reconnait que l'officier de l'état civil peut choisir un ou plusieurs
secrétaires ou clercs qualifiés uniquement pour la transcription
des actes dans les registres, en principe, la rédaction des actes de
l'état civil devrait être faite par les clercs, et, la signature
seule devrait appartenir à l'officier de l'état civil. Pourtant
dans la réalité ce n'est pas toujours le cas. Dans le cadre de
notre enquête, nous observons, dans certains bureau de l'état
civil, des officiers qui eux-mêmes se chargent de la rédaction et
de l'enregistrement des actes. Selon l'un des officiers interviewé, il
nous a déclaré que certains actes de l'état civil comme le
mariage civil, le divorce par exemple, il se charge lui-même de la
transcription des dits actes. Il est à noter que les bureaux de
l'état civil délivrent différents types d'actes
comme : l'acte de naissance, l'acte de reconnaissance, l'adoption, l'acte
de mariage civil ou religieux, l'acte de divorce, l'acte de
décès, etc.
Quant au petit personnel comme gardien, ménagère et
messager, leur présence n'était pas remarquée lors de
notre enquête. Interrogé sur l'existence de ces employés,
les officiers d'état civil interviewés ont unanimement reconnu
que leurs bureaux fonctionnent sans leur présence. Toutefois, ils
reconnaissent, bien que ces types de personnel ne soient pas directement
concernés par la question de l'enregistrement des actes de l'état
civil délivrés par les bureaux, les officiers savent cependant
que leur absence constituerait un vide, un manquement pour le fonctionnement
normal des bureaux. Pour eux, leur absence pose certains problèmes dans
le fonctionnement régulier du bureau. En règle
générale, ce personnel est là pour s'occuper de la
propreté dans les bâtiments ; la sécurisation des
personnes et la préservation des biens ; le contrôle du
fonctionnement des matériels de bureau et leur maintenance ; la
distribution des courriers, etc. Toutes ces tâches trainent
à être exécutées. Pour exécuter certaines
d'entre elles, dès fois, selon les officiers de l'état civil, le
recours à la bonne volonté des clercs s'impose. Toutefois, pour
réduire la poussière, la boue et toutes autres formes
d'insalubrité dans les bureaux d'état civil leur intervention ne
se fait sans peine.
L'analyse des données, relatives à la
quantité du personnel attaché au bureau d'état civil,
montre qu'il y a certainement un manque en terme quantitatif. Donc, la
quantité de personnel attaché aux dits bureaux est loin
d'être suffisante pour effectuer toutes les tâches relatives au
fonctionnement réel des bureaux.
Concernant le niveau de qualification des officiers d'état
civil, 3 deux interviewés sont des universitaires de niveau licence
notamment en science juridique. Quant à l'autre, il a fait la
9e Année Fondamentale. Pour les clercs ou secrétaires,
leur niveau d'instruction est en générale la classe de
philosophie.
Le personnel attaché au bureau de l'état civil de
la juridiction de Miragoâne possède un niveau académique
acceptable. Car selon les exigences de la loi dans ce domaine, pour exercer la
profession d'officier d'état civil, le niveau de qualification minimale
est la 9e Année Fondamentale.
Pour ce qui concerne la formation relative à l'exercice de
leurs tâches, à date, selon les interviewés, le
Ministère de la Justice n'a mis en place aucun programme destiné
à la formation du personnel attaché au bureau d'état
civil. Certaines fois, selon les interviewés, des rencontres
d'information sont organisées par le Ministère de la Justice,
c'est uniquement pour les informer des dispositions relatives aux
arrêtés sur les actes l'état civil. En ce qui à
trait à la fréquence de ces rencontres, aucune réponse
certaine pour la fréquence. La plus récente remonte en
février 2014. Voulant savoir si les clercs ont reçu une
formation relative à leurs taches, les officiers de l'état civil
ont tous reconnu que la question de la formation des clercs ne fait pas partie
du programme du Ministère de la Justice. Pour exécuter leurs
tâches, ils se sont formés par la routine et la pratique de tous
les jours.
Pour assurer un bon fonctionnement, un personnel formé et
en nombre suffisant est nécessaire à chaque bureau
d'enregistrement des faits d'état civil. N'ayant reçu aucune
formation théorique dans le domaine relatif à la fonction qu'ils
remplissent, n'ayant pas bénéficié d'une
rémunération mensuelle fixe afin de leur enlever toute tentation
de commettre des fraudes, ou de falsifier des documents, on pourrait se
demander si les clercs bénévoles sont motiver pour
exécuter leurs tâches avec de la joie et s'ils ont du souci pour
leur travail. Cette attitude ne devient-elle pas pire quand ils n'ont aucune
certitude s'ils seront effectivement recrutés dans le poste qu'ils
occupent depuis plusieurs années ?
2) Thème 2 : Vérification du matériel
des bureaux de l'état civil
Dans ce thème, les différentes
questions développées nous amèneront à
vérifier si les bureaux de l'état civil disposent de
matériels suffisants et adéquats pour la réalisation de
leur tâche.
Pour que les systèmes d'enregistrement des faits
d'état civil fonctionnent correctement et sans heurt, il est
nécessaire de disposer de ressources suffisantes, notamment en
matière d'infrastructures, de fournitures et d'équipement de
bureaux, notamment et surtout des formulaires d'enregistrement. Au cours de
notre enquête, nous avons constaté que certains bureaux logent des
locaux délabrés. Bien que certains bureaux d'état civil se
trouvent dans des locaux présentant un aspect physique plus ou moins
représentatif, n'empêchent qu'ils se sont
généralement placés au fond des bâtiments dans des
petites pièces. Il faut mentionner qu'en passant, au regard de la loi du
23 juillet 1958, que tous les bureaux de l'état civil de la juridiction
de Miragoâne sont logés dans les locaux des tribunaux de paix.
Ces dits bureaux possèdent des meubles poussiéreux et
rapiécés, de tables bancales et même des registres
rongés par les rats ce qui a attiré notre attention.
La fourniture en temps voulu, les matériels de bureaux
disponibles et en quantité suffisante de formulaires d'enregistrement et
matériels connexes aux bureaux d'état civil au niveau local est
très importante pour assurer l'enregistrement universel, continu et
ponctuel des faits d'état civil. La conservation des registres est aussi
très importante pour éviter toute perte ou
détérioration au fil du temps. Les registres doivent être
stockés et conservés de manière appropriée sur une
longue période pour faciliter la délivrance de documents
juridiques sur demande de toute personne ou institution. Selon les
résultats de l'enquête menée auprès des officiers de
l'état civil nous pouvons remarquer que l'une des principales
difficultés rencontrées par tous les bureaux de l'état
civil de la juridiction est la dotation irrégulière en
matériel et fourniture de bureau pouvant assurer le fonctionnement des
dits bureaux. En effet, d'après l'officier de l'état civil de
Miragoâne, s'agissant des infrastructures de stockage des registres de
l'état civil, il se pourvoit lui-même en certains
équipements comme : bureaux, chaises, armoires où stocker le
double des registres. Quant aux fournitures de bureau comme : plume,
règles, encre, tampon, enveloppes, ruban à encre, papier blanc,
etc. les officiers sont unanimes à le dire que leurs bureaux
possèdent ces fournitures grâce à leur diligence. Ils se
les procurent sur le marché local. Dans ce domaine-ci, pour reprendre
une phrase de l'un des officiers interviewés : le Ministère
de la Justice et de la Sécurité Publique (MJSP) qui devrait
être notre fournisseur, est absent.
Pour ce qui concerne les registres, principaux outils de base de
l'enregistrement des actes de l'état civil, la carence est encore plus
marquante. D'après l'un des officiers de l'état civil,
l'approvisionnement des bureaux en registres fait partie des attributions du
service national de contrôle et d'inspection de l'état civil.
C'est lui qui est d'ailleurs chargé d'en faire les commandes afin
d'alimenter les bureaux de l'état civil en temps utile. Or, selon ce
même officier depuis l'année 2012, il n'a pas reçu du
Ministère de la Justice une seule paire de registres. Il se
débrouille lui-même dans des imprimeries qui se trouvent dans la
capitale à Port-au-Prince, pour s'approvisionner. Quand il place des
commandes ça prend toujours du temps pour l'exécution. Dans cet
espace de temps, le bureau compile les différentes déclarations
et donne des rendez-vous aux déclarants.
Toujours selon ce même officier de l'état civil, le
coût relativement élevé d'une paire de registre varie entre
1500 à 2500 gourdes, dépendamment du nombre de pages. Ne
disposant pas toujours de ces sommes au début de l'année, cela
explique en partie qu'il lui parait quasiment impossible pour l'officier
d'avoir des registres à temps et en quantité suffisante.
Pour l'un des officiers de l'état civil, quand il n'a pas
de registres, il reçoit les déclarations de naissance dans des
petits cahiers en attendant d'être ravitaillé par le
Ministère de la Justice ou par d'autres fournisseurs externes qui sont
généralement des imprimeries de la capitale. Dans pareille
condition, les déclarants peuvent-ils avoir confiance que les documents
délivrés par ce bureau d'état civil soient effectivement
enregistrés ?
· Thème 3 : Transmission des données au
bureau des Archives Nationales
Dans ce thème notre objectif est clairement défini.
Nous cherchons à découvrir si les registres provenant des bureaux
de l'état civil sont transférés à temps d'abord au
Parquet de la juridiction pour être acheminé au Ministère
de la Justice qui lui-même doit les transférer au niveau des
Archives Nationales.
La totalité des officiers de l'état civil avec qui
nous avons entretenu affirme qu'ils connaissent très bien le voeu de la
loi sur la question du délai pour la transmission des registres aux
Archives Nationales. D'après l'article 45 du Code Civil haïtien, il
est fait injonction aux officiers de l'état civil de transmettre le
double de tous les registres au Parquet de leur juridiction au plus tard le 10
février pour l'année écoulée. Toutefois, ils
n'arrivent pas à appliquer scrupuleusement le voeu de la loi. Ils
tentent d'expliquer le non respect du délai de transmission des
données par plusieurs raisons. D'un coté, ils avancent la
question de l'indisponibilité des matériels de bureaux,
notamment des registres dans les bureaux d'état civil. Selon les
interviewés, cette question représente la cause fondamentale du
non respect du délai fixé par la loi. Car, les
déclarations enregistrées dans les petits cahiers seront
reportés par la suite sur les registres lorsque les commandes arrivent.
De l'autre, les officiers évoquent le problème de l'insuffisance
du nombre de clercs attaché au service des bureaux de l'état
civil. Etant donné que le nombre est, selon eux, insuffisant
exécuter les différentes taches du bureau,
généralement, les clercs n'arrivent pas à produire, avant
la fin de l'année en cours, le double de tous les registres disponibles.
C'est également, selon les officiers, l'une des causes du non respect
des délais.
Les officiers de l'état civil se plaignent enfin à
l'égard du comportement des autorités du Parquet. Selon eux,
dès fois ils transmettent à temps les registres, pourtant le
Parquet garde ces registres durant plusieurs mois sans les transférer
au Service National de Contrôle et d'Inspection de l'Etat Civil du
Ministère de la Justice, aux fins de les acheminer aux Archives
Nationales. Ne voulant pas rester immobile face à ce problème,
certains officiers de l'état civil tentent d'agir. C'est une situation
qui, selon l'un d'ente eux, peut souiller leur image en tant que notable. Pour
palier ce retard, selon l'officier de l'état civil de Miragoâne,
une fois les registres sont clos et arrêtés par le Commissaire du
Gouvernement et par le Doyen du Tribunal de Première Instance, il se
charge lui-même de transporter les registres qui proviennent de son
bureau au Ministre de la Justice.
A la lumière de ce diagnostic, il ressort que la
problématique du non enregistrement des actes de naissance est complexe
et présente de multiples facettes. Elle est d'abord d'ordre structurel.
Car elle embrasse des problèmes liés à l'organisation du
système de l'état civil. Elle est ensuite infrastructurelle. Elle
touche des problèmes d'accessibilité des lieux d'enregistrement,
des matériels non disponibles pour l'enregistrement. Enfin, elle est
donc aussi un problème communicationnel. La démarche
adoptée au cours de notre recherche aurait pu nous conduire à
limiter notre étude aux effets de l'enregistrement de l'acte de
naissance en droit des personnes et de la famille. Il est vrai que par le biais
de l'enregistrement des actes de naissance les actions de l'officier de
l'état civil doivent s'étendre comme l'expression de la
reconnaissance officielle non seulement de l'individu, en tant que membre
individualisé et intégré dans la société
mais aussi de la famille, en tant que composante incontournable et
indispensable à la vie en société. C'est peut-être
beaucoup trop restreint une telle vision. Sachant que l'acte de naissance
intéresse également l'Etat et tend à satisfaire des
besoins nationaux. L'intérêt présenté par notre
système d'état civil mérite en effet que l'on ouvre notre
réflexion sur d'autres branches du droit notamment le droit public afin
de comprendre, ou d'identifier d'avantage le fonctionnement des bureaux de
l'état civil qui se rapprochent beaucoup plus d'un service judicaire que
d'un service public. C'est sur la base de nos entretiens avec le personnel des
bureaux de l'état civil et des analyses en profondeurs des
différentes théories et pratiques liées à la
gestion efficace des institutions , qu'il convient d'admettre que nous
présentions, au prochain chapitre de notre travail, certaines
propositions stratégiques de renforcement qui nous espérons
pourront être utile. Cette utilité concerne, d'un
côté, à l'organisation pour une amélioration du
problème de non enregistrement des actes de naissance, et de l'autre,
pour la promotion des déclarations de naissances dans la juridiction de
Miragoâne d'une façon particulière et de façon
générale dans l'ensemble du pays.
Chapitre II : Vers l'amélioration du
problème de non enregistrement en Haïti
Après avoir analysé et interprété le
phénomène du non enregistrement des actes de naissance dans les
aspects liés au personnel et au matériel, l'Etat haïtien
parait incapable de faire fonctionner les bureaux de l'état civil comme
un service public. Est-ce pourquoi nous sommes obligé, croyons-nous, de
formuler à l'État quelques propositions en vue d'améliorer
ce fléau qui détruit la personnalité des victimes, avilit
ceux qui le soutiennent et le pratiquent, et du coup, ruine la
société. En effet, le dernier chapitre de notre travail de
recherche académique, est consacré à un véritable
plaidoyer sur l'ensemble des mesures à prendre pour diminuer
considérablement le phénomène du non enregistrement tant
dans la juridiction de Miragoâne qu'en toute Haïti. Pour ce faire,
nous essayons de proposer toute une série de recommandations palpables
visant à faciliter une solution durable. Dans ce domaine, nous insistons
sur le rôle de l'Etat en tant qu'organe de régulation, il doit
coordonner toutes les actions visant à réduire ou même
à éliminer ce fléau. Ainsi l'intervention de l'État
s'articulera autour de deux grands points : les aspects administratifs et
financiers des bureaux de l'état civil (Section 1), les aspects
techniques et légaux du système de l'état civil (Section
2).
Section 1: Aspects administratifs et financiers des
bureaux de l'état civil
Dans le cadre de cette section de notre travail de recherche,
nous faisons ressortir quelques propositions à l'Etat en Haïti
portant sur des réformes à engager dans le système sur le
plan administratif (§ 1), tout en instant sur la problématique de
la réforme des propositions qui concernent le système au point de
vue de la gestion financière des bureaux de l'état civil
(§2).
I- Sur le plan administratif
Le constat presque général au cours de notre
enquête est que les agents attachés aux différents bureaux
de l'état civil ont très peu de conscience de leur
responsabilité. À la tête d'un bureau est nommé un
officier de l'état civil qui peut s'entourer de clercs pour le seconder.
Aucun d'eux n'est formé à la profession car il n'existe
aujourd'hui aucune école ni aucun concours de la profession, la
nomination de l'officier relevant bien souvent d'un choix politique. Ils
violent donc régulièrement les normes qui réglementent
leur travail et commettent des erreurs dans la rédaction des actes. Aux
administrés de payer pour les voir corrigées. Pour réduire
sensiblement cette défaillance, il est recommandé à ce
sujet que le Ministère de la Justice et de la Sécurité
Publique (MJSP) agit sur les ressources humaines ainsi que les ressources
matérielles sans négliger les ressources financières.
1. Recrutement du personnel
Pour que le système d'état civil fonctionne
correctement nous préconisons que les autorités étatiques
attribuent à chaque bureau état civil en premier lieu tout le
personnel nécessaire à son fonctionnement. Nous entendons par
là non seulement des acteurs de l'enregistrement des actes (officiers de
l'état civil, clercs et/ou Secrétaires) mais également et
surtout le personnel de soutien comme : ménagère, gardien,
messager, etc.
Pour s'assurer de la qualification et de la compétence des
acteurs de l'enregistrement des naissances (officiers de l'état civil,
clercs et/ou Secrétaires) et autres personnels attachés aux
bureaux de l'état civil leur recrutement doit être fait de
manière régulière. Par là, on entend que le
Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique (MJSP)
nomme selon le voeu des lois et règlements régissant la fonction
publique. Selon le décret du 17 mai 2005, aucun agent public ne peut
être engagé que par voie de concours. Donc toute nomination doit
être faite par le truchement d'un concours de sélection
consécutif à un programme de formation sanctionné par un
test d'évaluation.
2. Formation du personnel et sensibilisation de la population
Les premiers chantiers à entreprendre doivent cibler les
acteurs de l'état civil en leur assurant une formation et la population
en l'encourageant à se rendre dans les bureaux de l'état civil.
Sans déclarations il n'y a pas d'actes de naissance et donc pas de
preuves de l'identité légale des personnes. Ces premières
mesures consolideront les bases fragiles de l'état civil en en
garantissant la production documentaire. La formation des professionnels et des
représentants de l'État est impérative. Si l'on veut que
le système d'état civil fournisse des données valables,
fiables pour toute la nation, dans l'immédiat, l'Etat haïtien
devrait donner aux officiers d'état civil, dits gestionnaires des
bureaux d'état civil, une formation et une orientation concernant les
lois et procédures applicables en matière de l'état civil.
Cette formation devra être appuyée par des moyens adéquats
tels que les supports durs (documents) de références
appropriées, faciles à comprendre et régulièrement
mis à jour.
Cette formation technique devrait intéresser non seulement
les officiers, mais également le personnel du service d'enregistrement
à savoir les clercs et secrétaires qui doivent être tenus
constamment au courant des questions concernant par exemple la transcription,
la présentation, le recueillement des données et la conservation
des archives. D'ailleurs, un guide d'orientation devrait être mis
à leur disposition et qui servira de référence dans
l'accomplissement de leurs tâches. Dans tous les cas le personnel de
l'état civil doit continuer à être formé afin
d'atteindre, à défaut de pouvoir respecter la législation
à la lettre faute de moyens, une bonne connaissance théorique de
ses attributions et des pratiques prévues par la loi. Lorsqu'il pourra
exercer leur travail dans de bonnes conditions, il ne sera pas
nécessaire de lui enseigner la théorie.
Toutefois, pour une amélioration réelle et
intégrale des capacités du personnel, la formation des acteurs du
système de l'état civil doit inclure les questions relatives aux
droits de l'homme, à l'étique et à la déontologie
administrative ne seraient pas superflue ; c'est même une
nécessité.
La sensibilisation doit être entièrement axée
sur les actes de naissance. Parce qu'ils sont le premier document qui atteste
l'identité légale d'une personne. La sensibilisation des parents
par le personnel enseignant lors des rencontres de parents dans les
écoles est une activité à envisager. Des professeurs
pourraient écrire des sketches sur l'état civil et les faire
interpréter par les enfants afin de les sensibiliser sur la
problématique. Quand ils deviendront grands, ils garderont dans leur
mémoire ces souvenirs. D'autres actions de sensibilisation peuvent
être initiées comme la réalisation de spots radiophoniques,
de débats publics, d'affiches pour atteindre la population. Ce ne sont
que des exemples parmi d'autres des actions à mener en faveur de la
population qu'il est vital d'encourager à se déplacer vers les
bureaux de l'état civil.
3. Réalisation de voyages d'études dans des pays
francophones
Pour profiter des expériences des pays francophones ayant
déjà mis en oeuvre des programmes de modernisation de
l'état civil, des missions de voyages d'études peuvent être
envisagées surtout dans les pays africain. Ce, au regard des
similitudes avec le contexte haïtien et des avancées
observées dans les pays en question. L'objectif principal de ces
missions est de prendre connaissance de l'expérience en cours dans le
cadre des programmes de modernisation de l'état civil et des
leçons apprises. Cet échange d'expériences dans la mise en
oeuvre du processus de réforme du système d'état civil
visera spécifiquement à : (i) apprendre comment fonctionne le
système avec les innovations technologiques apportées dans le
mécanisme d'enregistrement des faits d'état civil; (ii) obtenir
une meilleure compréhension dans l'utilisation de nouveaux outils pour
la gestion de l'état civil ; (iii) apprécier la valeur
ajoutée des réformes en cours à partir des leçons
apprises ; (iv) développer des partenariats pour des échanges
d'expériences et de collaboration futurs.
4. Surveillance et transmission des données
Le délai allant du 1er janvier jusqu'au 10
février de l'année suivant celle de l'enregistrement qui est
fixé pour la transmission des dossiers aux Parquets de la juridiction du
ressort du bureau de l'état civil est très rarement
respecté. La transmission des dossiers se fait avec beaucoup de retard.
Si l'indisponibilité de registres dans les bureaux d'état civil
représente la cause essentielle de ce retard parce que les
déclarations enregistrées dans de petits cahiers seront
reportées par la suite sur les registres qui arrivent souvent avec
retard, cette défaillance n'est pas incorrigible. Pour réduire
sensiblement cette défaillance, il est obligatoire que le
Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique(MJSP)
fournisse au début de chaque année des registres de tout type
(naissance, mariage, décès, etc.) à chaque bureau de
l'état civil. Le nombre de registre à fournir dépend de la
réquisition faite par chaque Officier à la fin de l'année
écoulée.
Pour empêcher à l'officier de l'état civil de
garder les registres au cours d'une période de temps excédant
l'année civile, le Ministère de la Justice et de la
Sécurité Publique (MJSP) doit installer un
inspecteur-contrôleur de l'état civil dans chacune des
juridictions du pays. Des matériels techniques et logistiques suffisants
doivent être mis à la disposition de chaque
inspecteur-contrôleur pour faciliter les procédures de
contrôle permanent qui sont nécessaires à la bonne marche
de l'état civil. Cet inspecteur-contrôleur aura, entre autre, la
responsabilité de doter régulièrement les bureaux de
l'état civil en registres et en formulaires suffisants pour
l'enregistrement de tous les faits de l'état civil.
5. Conservation des données
L'archivage des documents de l'état civil doit
répondre à certaines normes de façon à garantir
leur stockage et par conséquent leur exploitation durable. L'analyse des
conditions de conservation et d'archivage des registres dans les bureaux de
l'état civil indique que leur état de fonctionnalité n'est
pas conforme aux standards internationaux notamment ceux relatifs aux
orientations du manuel des Nations unies relatif à l'archivage des
données d'état civil (ONU, Manuel des systèmes
d'enregistrement des faits d'état civil, 2000). L'article 45 du Code
Civil haïtien exige que tous les registres de l'état civil doivent
être tenus en double exemplaire pour chaque espèce d'acte de
l'état civil ou dispositif de jugement du Tribunal de Première
Instance. Selon ce même article, l'un des registres est détenu
par l'officier de l'état civil en son bureau jusqu'à sa mutation,
le second est déposé aux Archives Nationales, chaque
année, entre le 1er janvier et le 10 février après la
procédure de clôture prévue au Code Civil. Le
Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique (MJSP)
recommandera par circulaire aux commissaires du Gouvernement la diligence
à laquelle ils sont assujettis au 10 février de chaque
année. Le constat fait durant notre enquête nous montre que
certains bureaux de l'état civil ne disposent pas plus qu'un seul
classeur métallique pour la conservation des registres et autres
documents importants pour le bureau. En ce sens, il est recommandé au
Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique (MJSP)
dans l'immédiat de loger les bureaux dans des locaux spacieux et
sécuritaires. En outre, chaque bureau de l'état civil doit
être doté d'armoires, d'étagères et de tous les
autres meubles importants et suffisants pour le stockage des archives dans des
lieux à l'épreuve du feu, de l'eau, des insectes et des rats. Il
en est de même pour les registres et autres matériels de bureau
non encore en service.
6. Sur le plan financier
Sous l'angle exclusivement financier, pour reprendre le Groupe
d'Appui aux Rapatriés et Réfugiés (GARR), l'État se
borne à instituer les officier de l'état civil mais non les
bureaux de l'état civil. Ainsi, l'officier de l'état civil semble
davantage être un officier ministériel que le représentant
d'un service public. À charge par lui de trouver un local, d'en assumer
les frais afférents (location, entretien, etc.), de recruter des
secrétaires et clercs. Il va sans dire que ces dépenses sont
répercutées sur le coût de tous les actes
enregistrés ou délivrés par le bureau. En effet, la loi ne
prévoit aucun budget de fonctionnement des bureaux de l'état
civil, obligeant ainsi les officiers de l'état civil à
établir des officines privées.
1. Budget de fonctionnement
Il est indispensable que les décideurs politiques
chargés des allocations budgétaires dégagent des
crédits assez substantiels et conséquents qui puissent assurer le
fonctionnement des bureaux de l'état civil. Ces crédits devraient
être suffisants pour l'acquisition d'équipements appropriés
(fournitures de bureau, mobilier, machines à taper et ordinateurs si
possible). Sans oublier certains frais de fonctionnement pour le paiement des
factures de l'électricité, d'eau, téléphone, etc.
Ajouté à cela, les officiers, les clercs et/ou secrétaires
attachés au bureau de l'état civil, comme on le dit
déjà doivent desservir toute une commune ou tout un quartier.
Remplissant une fonction qui requiert des qualifications essentielles comme la
probité et la pratique des écritures, officiellement ne peuvent,
en aucune façon, percevoir directement des taxes. Pour cela, ils
devraient bénéficier d'un salaire équilibré par
rapport au coût de la vie afin de leur enlever toute tentation de
commettre des fraudes, ou de falsifier des documents.
2. Grille de facturation
Le Ministère de la Justice et de la Sécurité
Publique (MJSP) doit créer une grille de facturation pour tous les
bureaux de l'état civil. Cette grille prévoirait le tarif
à payer pour chaque type de service payant que le bureau aura à
fournir à la population. Le cas du mariage civil est un exemple
pratique. Il est l'un des rares cas où l'officier est bien
obligé, certaines fois, de laisser son bureau. Quant aux actes qui sont
réputés gratuits comme les actes de naissance, les actes de
reconnaissance d'un enfant naturel et les actes de décès, des
sanctions doivent être appliquées aux Officiers de l'Etat
Civil en cas de non respect de cette formalité.
Section 2 : Aspect technique et légal
La question de la modernisation du système de
l'état civil est une affaire fondamentale pour tout Etat qui se
respecte quand on sait que les « droits citoyens »,
rappelons-le, commencent avec l'attribution de la personnalité juridique
laquelle a besoin d'être authentifiée par les actes d'état
civil depuis la naissance de la personne jusqu'à sa mort. Certes,
moderniser le service de l'état civil représente un processus
long et coûteux ; mais nul gouvernement ne peut en faire
l'économie s'il souhaite se doter, pour des raisons de
sécurité publique et de gestion prévisionnelle de ses
administrés, d'un fichier national en mesure de lui fournir, ad minima,
les données démographiques d'une importance cruciale en termes de
bonne gouvernance.
Comme nous avions essayé de le montrer plus haut, le noeud
gordien qui étouffe et qui continue d'étouffer la bonne gestion
du système de l'état civil dans la juridiction de Miragoâne
et dans toute Haïti constitue le personnel attaché au bureau et le
matériel mis à leur disposition. C'est pourquoi nous pensons que
dans la recherche de perspectives pour un meilleur fonctionnement du service de
l'état civil, il est important d'adapter le matériel aux
exigences du moment.
Pour ce faire, nous allons, d'un côté, proposer dans
cette section plusieurs mesures comme : l'informatisation des services de
l'état civil, l'interconnexion, la déconcentration et le
fusionnement du service de l'état civil au service l'Office National
d'Identification (ONI). Sous l'angle purement technique, ce sont des pistes
envisageables qui pourraient aider l'Etat haïtien à
l'amélioration du fléau de non enregistrement des actes de
naissance. De l'autre, proposer quelques éléments liés
à la reforme de la législation en vigueur relative à
l'enregistrement des naissances.
I. Aspect technique
1. Informatisation des services de l'état civil
Plus la population haïtienne augmente, plus la tâche
devient ardue pour les autorités qui gèrent le système de
l'état civil. Surtout parce que la gestion de l'enregistrement
s'effectue manuellement dans les bureaux de l'état civil. Non loin de
cet amer constat existe l'informatique. Définie comme science de
traitement automatique de l'information, l'informatique et les nouvelles
technologies ne peuvent échapper à aucune gestion qui se veut
rentable et promotrice. Actuellement, la tendance va dans la centralisation des
informations grâce aux réseaux informatiques.
Face à cette réalité, il est grand temps
d'aborder la gestion de l'enregistrement des faits passés à
l'Etat civil sous l'approche de base de données. En effet, les
informations organisées autour d'un réseau informatique, vont
donner une vision globale de la population ainsi que de son
évolution.
Pour améliorer les services rendus à la population
en matière d'établissement des actes de naissance, il est
impératif que le Ministère de la Justice et de la
Sécurité Publique (MJSP) procède à
l'informatisation des services de l'état civil pour répondre aux
exigences d'un système moderne.
En effet, la mise en oeuvre d'une telle disposition
favoriserait :
- L'exécution des tâches répétitives,
lourdes et complexes par des machines programmables ;
- La sécurisation des données ;
- La centralisation de l'information - sur toute l'étendue
du territoire;
- La rapidité des recherches des informations ;
- La disponibilité en temps réel des données
statistiques en vue de permettre la prise des décisions ;
- La précision et l'exactitude de calcul des
données statistiques grâce aux ordinateurs ;
- La reconstitution du passif des actes de
naissance.
Nous ne sommes pas sans savoir que l'informatisation peut
présenter un certain nombre d'avantage pour le secteur de l'état
civil. Mais il convient de prendre en compte les contraintes
énergétiques du pays et les capacités techniques du
personnel afin de ne pas créer de nouveaux goulots
d'étranglement. Pour l'envisagée, nous pensons que certains
éléments de base sont à régler aux
préalables. Nous faisons référence notamment à
l'infrastructure, les ressources humaines et les capacités
énergétiques. A ce titre, il est important de doter les bureaux
de l'état civil : i) des équipements informatiques
(ordinateurs, imprimantes, serveurs, modem) ; ii) développer une
application pour l'informatisation de l'enregistrement des faits d'état
civil, puis former les acteurs à leur utilisation ; iii) doter les
bureaux de système d'électricité alternatif notamment de
jeu de panneaux solaires et batteries. Outre ces éléments
techniques, l'effectivité et la légitimité de cette action
étant fortement associées à la révision du cadre
juridique en vigueur.
2. Interconnexion du service de l'état civil
On entend par interconnexion la liaison physique et logique des
réseaux ouverts au public exploités par le même
opérateur ou un opérateur différent, afin de permettre aux
utilisateurs d'un opérateur de communiquer avec les utilisateurs du
même opérateur ou d'un autre, ou bien d'accéder aux
services fournis par un autre opérateur. Les services peuvent être
fournis par les parties concernées ou par d'autres parties qui ont
accès au réseau. L'interconnexion constitue un type particulier
d'accès mis en oeuvre entre opérateurs de réseaux ouverts
au public.
Le système de l'état civil haïtien ne garantit
pas dans les faits la permanence et la continuité. Par exemple, en cas
de décès ou de départ (pour l'étranger) d'un
officier de l'état civil, il arrive souvent qu'il n'y ait aucun suivi
à propos des actes que celui-ci détenait, au grand
désarroi des consommateurs (des demandeurs des actes de l'état
civil en question). Le pire dans de telles situations, c'est que les
consommateurs ne paraissent pas avoir de voies (ou de droit) de recours. La
permanence est donc loin d'être garantie.
Il en est de même pour toute personne détentrice
d'un acte de naissance. Quand elle se déplace d'un point à un
autre à travers le pays, elle peut se présenter à
n'importe quel bureau de l'état civil pour se faire enregistrer une
nouvelle fois ou déclarer n'importe quel fait de l'état civil
plusieurs fois. Ne disposant d'aucun contrôle sur les déclarations
des faits de l'état civil avancés par les déclarants,
grâce à l'interconnexion les officiers de l'état civil
trouveront un moyen plus fiable pour contrôler les informations
données par les déclarants.
L'interconnexion peut, en outre, raccourcir le délai de
demande d'expéditions subséquentes pour ceux qui
fréquentent l'état civil. N'importe qui pourra trouver ses
papiers quand on a une affaire urgente à régler car son dossier
est archivé dans tous les bureaux de l'état civil qui se trouvent
à n'importe quel coin du pays.
De par l'interconnexion l'état haïtien pourrait bien
suivre l'état civil de ses ressortissants afin d'éviter toute
usurpation d'identité par des gens malintentionnés.
· Déconcentration du service des Archives Nationales
La déconcentration désigne un mode d'organisation
de l'administration dans lequel certains pouvoirs sont
délégués ou transférés d'une administration
centrale vers des services répartis sur le territoire, dits services
déconcentrés ou services extérieurs. Le but est
d'améliorer l'efficacité de l'Etat en décongestionnant
l'administration centrale et en accélérant les prises de
décisions au niveau local.
Le terme de déconcentration est utilisé pour
décrire des transferts partiels d'activité ou de
compétences administratives ou gestionnelles des ministères, dans
un système organisé et en partie géré à
partir du centre.
L'une des conditions nécessaires pour
l'amélioration de l'accès des populations aux services fournis
par les Archives Nationales est la réduction du rayon d'action de cette
dite institution. Ainsi, l'une des stratégies qui pourrait être
appliquée consiste à considérer toutes les mairies comme
des bureaux d'archives locaux. Elles pourront garder les registres provenant
des bureaux de l'état civil pendant au moins vingt cinq (25)
années, afin de faciliter aux populations des communes, surtout celles
habitant les sections rurales, d'avoir des extraits des actes de l'état
civil. Les avantages de cette décision sont les suivants :
1) Le rapprochement de l'administration des administrés;
2) La modernisation de l'administration: efficiente, responsable
et citoyenne proche des préoccupations des citoyens ;
3) La célérité et la rapidité;
4) La meilleure connaissance du terrain par les responsables qui
oeuvrent sur place;
5) L'adaptation à la diversité des
spécificités et particularisme locaux ;
6) La valorisation des ressources humaines, l'amélioration
de la qualité du service public et la rationalisation des
dépenses publiques;
7) L'obligation pour l'agent déconcentré de
s'habituer à l'exercice de ses nouvelles attributions et
responsabilités par un véritable processus d'apprentissage.
· Fusionnement du service de l'état civil au service
l'Office National d'Identification
En vue de l'attribution d'un numéro d'identification
à chaque individu depuis sa naissance, un fusionnement des bureaux de
l'état civil et des bureaux d'Office National d'Identification (ONI) au
sein d'un même service dirigé par un officier de l'état
civil est donc recommandé. En effet, à chaque déclaration
de naissance prise par l'officier de l'état civil, les données
seront entrées dans le fichier informatisé de la Carte
d'Identification Nationale en vue de l'attribution immédiate d'un
numéro d'identification. A sa majorité, l'enfant devra
compléter son dossier par l'ajout de ses empreintes digitales et de sa
photo numérique avant de se voir délivrer la Carte
d'Identification Nationale (CIN).
I. Aspect légal
Le système d'enregistrement des faits de l'état
civil haïtien repose sur plusieurs textes qui régissent son
organisation et son fonctionnement. Loin de cibler l'ensemble des textes de
lois relatives à l'état civil, nous n'envisageons, dans le cadre
de ce travail que trois documents spécifiques ayant des rapports
étroits avec le système en question. Il s'agit notamment dans un
premier temps du Code Civil. Ce dernier est, selon Portalis, un corps de lois
destinés à diriger et à fixer les relations de
sociabilité, de famille et d'intérêt qu'ont entre eux les
hommes qui appartiennent à la même cité (Jaume, 2009). De
cette définition découle, d'une part, l'idée d'un code
pour les citoyens et d'autre part, d'un code avec pour objectif l'organisation
de la vie en société. Dans un second temps, loi du 20 août
1974 portant sur le contrôle et l'inspection de l'état civil en
Haïti. Elle est donc faite en vue d'assurer la bonne tenue et la saine
conservation des registres de l'état civil. En vue d'établir un
cadre juridique approprié visant l'élimination des obstacles
à l'enregistrement des naissances, nous pensons que la
législation actuelle y relative devrait être passée au
crible.
Promulgué le 27 mars 1825, sous l'administration du
président Jean-Pierre Boyer, Le Code civil haïtien, dans sa
dernière mouture après le vote du Parlement, est constitué
de trente-six lois mises bout à bout. Il contient 2 047 articles et
embrassent, dans un ordre logique, les grands axes du code français:
certains principes généraux du droit - celui de la modification
et de la non rétroactivité des lois, par exemple - le droit des
personnes et de la famille, le droit de la succession et des biens et le droit
des obligations, avec certaines modifications inspirés de moeurs
haïtiennes. Pourquoi faut-il réformer le Code civil ?
Aujourd'hui, le Code civil est une oeuvre dépassée.
Il a perdu de son éclat et n'occupe plus un rôle de premier plan
dans les principales entreprises de codification. Il ne conserve pas même
son aura immense acquise par le passé. En deux siècles le code
civil a vu déferler plus d'une vingtaine de constitutions politiques.
Pour répéter le civiliste G. Cornu, étant un
élément de culture, une façon de penser le droit et
élément du patrimoine, le Code civil ne peut plus être
défendu comme un code symbole d'unité et de cohérence. Il
n'est plus, selon la célèbre formule de Portalis
précédemment employée, un corps de lois destinées
à diriger et à fixer les relations de sociabilité, de
famille et d'intérêt qu'ont entre eux les hommes qui appartiennent
à la même cité. Il n'est pas pessimiste de dire que le
droit civil est éclaté. L'éclatement du droit civil hors
du Code civil consisterait ainsi en une dispersion de ce droit, dispersion
qu'il faut envisager comme un changement profond et non comme un simple
phénomène. L'on comprend alors la gravité du propos : un
Code civil ne peut pas survivre si le droit civil n'est pas codifié en
son sein. Les règles de droit civil se détachent ainsi du Code,
jusqu'à constituer des droits autonomes. Lorsque l'on s'intéresse
au droit des obligations, la gravité de l'éclatement du droit
civil hors du Code civil apparaît : les manifestations
d'éclatement fourmillent. L'ensemble des règles du droit des
affaires ne sont à négliger.
De l'esprit de tous, une loi idéale est une loi de
qualité, qui reflète la réalité. Si les lois
deviennent de plus en plus nombreuses, elles seront méconnues et la
sécurité juridique ne sera pas effective. L'instabilité a
alors pour pendant la complexité, le Code civil souffre donc aujourd'hui
d'une grande précarité. Parmi les trois piliers de la
société civile haïtienne que sont la famille, la
propriété et le contrat, la première matière a
été fondamentalement ébranlée en raison de
l'excès de réforme, autrement dit en raison d'une inflation
législative sans précédent. Citons à titre
d'exemple : le décret du 8 octobre 1982 donnant à la femme
un statut conforme la constitution et éliminant les formes de
discrimination à son égard (Moniteur, 8 octobre 1982). Le Decret
du 14 novembre 1988 modifiant l'article 55 du Code civil et les articles 26, 27
et 28 de la loi du 20 aout 1974 sur le service d'inspection et de concotrole de
l'etat civil (Moniteur#98, Decret modifiant l'article 55 du Code civil , 21
novembre 1988). La loi sur la paternité, la maternité, et la
filiation (M0niteur#105, 4 Juin 2014). En effet, cette avalanche de
réformes est le signe même d'une perte de
crédibilité. Cette inflation législative revêt une
seconde facette agrémentant l'argument selon lequel le Code civil n'est
plus source de sécurité juridique.
En second lieu nous envisageons la loi du 20 aout 1974 sur
l'état civil, créant un organisme dénommé service
d'inspection et de contrôle de l'état civil. Cette loi
était faite en vue de sincériser et sécuriser les actes de
l'état civil ; régulariser le fonctionnement du
système de l'état civil ; garantir une prompte inscription
de tous les événements relatifs aux statuts personnels de
l'haïtien. Dans sa structure, cette loi qui a 37 articles se divise en 3
grandes parties. Dans la première partie elle se propose d'organiser et
de contrôler les bureaux de l'état civil ; la deuxième
se porte sur les procédures de la déclaration tardive des
naissances ; la troisième et dernière sont des dispositions
spéciales. A l'analyse, cette loi souffre certaines imperfections et
mérite donc au même titre que le Code civil de subir des
modifications. Si l'Etat veut réellement arriver à garantir une
prompte inscription de tous les événements relatifs aux statuts
personnels de l'haïtien, il doit agir sur les lois existantes. D'abord en
termes de localisation géographique des bureaux. D'après
l'article 7 de cette loi, les bureaux l'état civil doivent être
situé soient dans les villes ou dans les quartiers. A l'état
actuel on trouve en tout 189 bureaux d'état civil à travers le
pays. Selon un rapport d'étude de la Fonds des Nations-Unies pour
l'enfance (UNFPA), plus de 83% des bureaux se trouvent dans les villes et
seulement 3% au niveau des sections communales soit cinq sections sur 570
disposent d'un bureau d'état civil (UNFPA, 2008). Cette situation montre
que la structure administrative de l'état civil n'est pas toujours
à proximité de tous les citoyens, quand on sait que 52% de la
population vit en dehors des villes (Banque Mondiale, 2012). Cela peut, en
tout état de chose, entrainer une faible demande de services à
cause des difficultés d'accessibilité géographique.
Ajouter à cela des coûts indirects liés au
transport/déplacement quand on sait qu'environ les deux tiers des
pauvres vivent dans les zones rurales. En tant que service public, l'offre des
services d'état civil doit être fondée sur une approche
inclusive et donc d'un accès facile pour toutes les composantes du pays.
Toujours d'après cette même loi, il est prévu
en son article 1er de créer un service d'inspection et de
contrôle de l'état civil. Ce service a pour mission, entre autre,
de former et recycler les officiers de l'état civil, disséminer
toutes les décisions relatives à l'état civil,
contrôler tous les trois mois les registres d'état civil. Ce
service compte en tout six inspecteurs pour les 189 bureaux d'état civil
du pays. Largement insuffisant en terme quantitatif pour exécuter leur
tâche, ce service clame toujours le manque de moyens pour effectuer son
travail. En l'absence de toute supervision, les officiers de l'état
civil accomplissent en réalité leurs tâches comme bon leur
semble ; délivrent habituellement des expéditions aux comparants
avec des erreurs graves dues à leur négligence n'inscrivent pas
toujours les déclarations dans les registres et se font payer cher pour
des actes qui sont en principe gratuits (Beaubrun, L'état civil que
faire et pourquoi faire?, 2018).
En troisieme et dernier lieu, l'arrêté
présidentiel du 13 novembre 2019. Notre analyse et proposition dans le
cadre de cet arrêté s'inspire en grande partie de l'analyse
critique faite par Me. Me. Saint-Pierre Beaubrun, GARR sur
l'arrêté présidentiel du 16 janvier 2014. Dans
l'arrêté du 13 novembre 2019 qui accorde à toute personne
dépourvue d'acte de naissance, un délai de cinq (5) ans à
partir de la publication du présent Arrêté, pour faire
régulariser son état civil. Dans son essence, cet
arrêté vise à garantir les droits fondamentaux à
l'enregistrement et à l'identité de nos compatriotes ; des droits
fondamentaux qui sont non seulement reconnus par le droit positif haïtien
mais aussi et surtout consacrés par de nombreux textes internationaux
ratifiés par Haïti. Toutefois, s'il est vrai que cette pratique
reste louable quant à son but, elle ne demeure pas moins questionnable
à plusieurs égards quant à la méthode ; car dans un
Etat de droit démocratique, le principe machiavélique qui veut
que l'excellence du but justifie tous les moyens ne saurait s'appliquer (GARR,
2014). De là, nous pouvons envisager plusieurs considérations.
Premièrement, d'après la Constitution de 1987 amendée en
2011, l'Exécutif a pour mission fondamentale d'exécuter la loi.
Il ne devrait, en aucun cas, avoir la prétention d'abroger ou de
modifier une loi par voie réglementaire. Seul le Parlement
détient le pouvoir de le faire par le vote d'une nouvelle loi. Ainsi, en
émettant cet arrêté, l'Exécutif a manifestement
empiété sur les attributions constitutionnelles fondamentales du
Législatif et porté de graves atteintes aux principes
fondamentaux de la séparation des pouvoirs et de l'Etat de droit
démocratique. Secondement, la sensibilisation de la population. Nous
savons qu'en 2014, il y avait un arrêté du même genre. A ce
propos, y avait-il une évaluation de l'application de cette mesure
administrative inconstitutionnelle ? Combien de personnes non
enregistrées avaient pu réellement profiter à bon escient
de cette mesure exceptionnelle ? Sont autant de questionnement que
soulèvent cette question relative à la connaissance effective de
la population relative a cette mesure. En ce moment, la quasi-totalité
des masses de personnes les plus vulnérables et exclues de la
société ne seraient pas au courant des termes et conditions
d'application de cet arrêté qui, pourtant, leur devrait être
profitable au premier chef. Sans de vastes campagnes nationales de
sensibilisation de manière à ce que même les personnes qui
vivent dans les endroits les plus reculés puissent être
sensibilisées sur l'importance de l'enregistrement à
l'état civil et informées des opportunités offertes par le
nouvel arrêté, les résultats escomptes seront insatisfaits
et seront de loin incomparables à ceux obtenir. Enfin, en plus
d'être inconstitutionnelles et inefficaces, cet arrêté peut
avoir aussi des effets pervers sur le système d'enregistrement
d'état civil. Il donne la possibilité à de nombreuses
personnes déjà enregistrées dont les expéditions
des actes ont été perdues, détruites ou
détériorées profitaient toujours des décrets et
arrêtés pour se faire à nouveau enregistrer à
l'état civil au lieu d'emprunter l'épuisante route des Archives
Nationales pour l'obtention d'un extrait. Des personnes qui disposaient des
actes dûment enregistrés mais qui nécessitaient un jugement
rectificatif profitaient, elles aussi, de ces situations pour obtenir purement
et simplement de nouveaux actes. Mentionnons également le fait que des
personnes malintentionnées exploitaient souvent ces opportunités
pour faire des modifications de toutes sortes dans leur identité et
cela, parfois, à des fins criminelles. Elles arrivaient ainsi à
obtenir facilement de nouveaux actes de naissance avec de nouvelles
coordonnées spatio-temporelles, de nouveaux prénoms et noms, de
nouvelles parentés ; bref, de nouvelles identités !
Conclusion générale
L'étude des principaux déterminants du non
enregistrements des actes de naissance en Haïti. Cas de la juridiction de
Miragoâne de 1990 à 2000 nous a conduit à
appréhender le rôle de l'officier de l'état civil autant
dans l'élaboration des principaux actes qui participent à
l'état des personnes que dans la gestion du service qui les administre,
les conserve et les exploite. L'état civil façonne non seulement
l'identité civile des individus mais aussi leurs principaux attributs
personnels et familiaux. L'officier de l'état civil serait le peintre
qui façonne cette image. Ses premiers coups de pinceaux sur la toile
seraient précieusement conservés dans sa galerie. Cette oeuvre
première symboliserait donc l'acte de naissance. Ce dernier est donc un
droit fondamental de l'être humain. Non seulement il donne à
l'enfant une existence et une identité légalement connues, mais
il est le signe de son appartenance à une famille, une
communauté, une nation où l'enfant a sa place, et droit de
participation. Il est la clé de certains autres droits, celui par
exemple de bénéficier des services de santé ou
d'éducation, offre une protection contre la discrimination et l'abandon,
détermine le traitement de l'enfant dans le système judiciaire.
Il garantit à l'individu, pendant toute sa vie, le droit de prendre part
à la vie sociale et politique de son pays. Avec la mondialisation
où la migration s'accélère les mouvements croissants de
population tant sur le territoire national qu'au-delà des
frontières, posséder une identité légale reconnue
se révèle d'une importance cruciale.
Dénier ce droit fondamental revient non seulement à
dénier le droit à une identité énoncée dans
l'article 7 de la convention relative aux droits de l'enfant mais beaucoup
d'autres droits auxquels peut prétendre chaque citoyen. C'est pour faire
face aux nombreux problèmes liés au non enregistrement des actes
de naissance que notre étude s'est fixée comme objectif principal
de contribuer à offrir des pistes de solution pour un meilleur
enregistrement des actes de naissance rédigés dans les bureaux de
l'état civil du pays. Cet objectif nous a permis toutefois d'identifier
les principaux obstacles liés à l'enregistrement des actes de
naissance particulièrement dans la juridiction de Miragoâne.
À travers ce mémoire de recherche, nous avons voulu
dresser un portrait et une analyse aussi complets que possible du
système de l'état civil haïtien, de l'enregistrement des
actes à leur archivage. Il s'agit d'un système qui est encore
aujourd'hui miné par des problèmes très différents
mais qui ont tous à peu près les mêmes raisons. Au terme de
cette analyse, nous avons passé en revue nombre d'aspects du
problème. L'explication de ce phénomène a
été fournie à partir des théories des disciplines
connexes au droit pénal et au droit administratif sans oublier d'autres
disciplines comme la sociologie, l'histoire, le droit international, le droit
constitutionnel. Nous avons été curieux d'interroger sur le
dysfonctionnement du système état civil haïtien pratiquement
sur le plan de la gestion administrative, le lien existant entre les acteurs du
système et le pouvoir judiciaire.
La question principale est alors de savoir quelles sont les
barrières empêchant une personne d'avoir son extrait de naissance
au-delà du délai fixé par la loi pour que les registres
provenant des bureaux de l'état civil soient transmis aux Archives
Nationales ? Par ailleurs, les réponses à la question de
départ ont montré que plusieurs facteurs entrent en ligne de
compte autour de la problématique du non enregistrement des actes de
naissance dans le système de l'état civil haïtien. Ils ont
des incidences sérieuses sur le bon fonctionnement du système.
Cette recherche se veut le résultat d'un ensemble de
questionnements sur le système de l'état civil relatifs à
l'enregistrement des naissances. C'est aussi le souci majeur lié
à une curiosité intellectuelle de pénétrer ce champ
pour mieux comprendre le phénomène de non enregistrement en
Haïti. Il s'agissait de répondre à une préoccupation
fondée sur les questions suivantes: 1) le degré d'implication des
officiers de l'état civil dans le problème du non enregistrement
des actes de naissance ? 2) les barrières principales à
l'enregistrement des actes de naissances ? Comment éliminer
durablement ces barrières ? Deux méthodes de recherche ont
été adoptées pour parvenir à apporter des
réponses à ces questions préoccupantes. La recherche
documentaire, l'entretien semi-dirigé. La première a permis de
corréler et de confronter diverses approches théoriques de
l'état civil relatif à l'enregistrement des actes de naissance.
Toute la première partie de notre travail est consacrée à
cet effet. L'analyse à fond sur le concept état civil avec un
certains nombre de concepts les plus utilisés dans le
système ; le rôle assigné à l'officier de
l'état civil; importance de la fonction d'officier de l'état
civil dans la question de droit de la personne ; la portée
réelle de l'acte de naissance dans la vie des humains sont autant des
points théoriques clés abordés dans les deux premiers
chapitres de notre étude. A l'issus de cette analyse nous pouvons
remarquer que l`inapplication des lois soit de manière volontaire ou par
négligence, est donc condamnable. Quant aux dire des textes de lois
traitant la question, l'inobservance de ces règlements paraît en
contradiction avec le principe universel d'enregistrement. Car, ce principe
obligatoire est inscrit non seulement dans les instruments légaux de
notre pays d'une part, mais aussi à travers les instruments juridiques
internationaux régulièrement ratifié par notre pays,
d'autre part.
La pratique du travail de l'officier de l'état civil
relative à l'enregistrement des actes de l'état civil notamment
les actes de naissance dans le système de l'état civil
haïtien est relatée à travers la deuxième partie de
notre étude. Une brève présentation est faite de la
juridiction de Miragoâne surtout sur ce qui concerne l'aspect
administratif ainsi que les résultats de notre investigation à
travers les bureaux de l'état civil de la juridiction.
De l'étude réalisée donc, il ressort que la
totalité des acteurs interviewés reconnait que le système
de l'état civil fonctionne non sans grandes difficultés. Et,
l'une des causes principales du non enregistrement des actes de naissance dans
la juridiction de Miragoâne est la non dotation des bureaux de
l'état civil en matériel adéquat à l'enregistrement
des dits actes. Les interviewés sont unanimes sur l'importance de ce
document qu'est l'acte de naissance dans la vie d'un tout individu mais sont
impuissants à résoudre seuls ce manquement. Le Ministère
de la Justice et de la Sécurité Publique (MJSP) qui devrait
être leur fournisseur, est absent selon l'avis de certains officiers de
l'état civil. De telle attitude porte le citoyen à se demander si
le Ministère n'a pas failli à son devoir en ignorant le droit
selon lequel tout individu membre de la collectivité doit être
enregistré.
Il est également à noter que le personnel
attaché au bureau de l'état civil constitue un autre handicap
majeur à l'enregistrement des actes de naissance dans la juridiction de
Miragoâne. Pour ce qui concerne les clercs et/ou secrétaires leur
nombre n'est pas suffisant et leur degré de formation dans le domaine
laisse à désirer. Ils fonctionnent donc sans une formation
théorique liée à la mission qu'ils remplissent et sans une
rémunération mensuelle fixe afin de leur enlever toute tentation
de commettre des fraudes ou de falsifier des documents.
En somme, l'hypothèse principale selon laquelle le non
enregistrement de certains actes de naissance, qui est légalement une
faute, dans la juridiction de Miragoâne est due au fait que les
bureaux de l'état civil ne disposent pas de personnel et de
matériel suffisants et adéquats devant faciliter l'enregistrement
des dits actes est donc confirmée.
La cause principale du non enregistrement des actes de naissance
dans la juridiction de Miragoâne est d'ordre administratif et
relève de la politique publique des autorités
décisionnelles du pays. C'est un point crucial en matière de
développement, auquel il faut s'attaquer en même temps qu'à
la lutte contre la pauvreté et pour l'accès à la
scolarisation universelle. Comme toute planification réaliste de
développement exige que l'on dispose de données crédibles,
l'enregistrement des actes de naissance est essentiel pour toute la nation.
Enfin, le chapitre quatrième qui est d'ailleurs le dernier
a présenté un ensemble de propositions portant sur la gestion
administrative et la modernisation du système de l'état civil
dans le pays. L'application de ces propositions présenteront des
avantages tant pour le présent que pour l'avenir de chaque individu et
de toute la société en générale. A cet effet, une
réforme du système de l'état civil est nécessaire
pour faire face à certains problèmes suscités par le
déséquilibre entre le dire des textes et la réalité
qui se développe sur le terrain et à travers les bureaux.
Notre pays ne pourra améliorer le phénomène
de non enregistrement des actes de naissance que si les autorités
étatiques manifestent leur volonté politique de changement dans
l'intérêt de la population surtout des masses
défavorisées. Il est essentiel que les mesures juridiques
adoptées pour améliorer le phénomène doivent d'une
part, s'accompagner de moyens matériels adéquats pour que soient
effectifs les voeux légaux mais de l'autre, sanctionnent de
manière effective tous les acteurs de l'enregistrement qui enfreignent
les dites lois.
L'Etat peut effectivement répondre à la demande de
la population en améliorant la gestion administrative et
financière des bureaux de l'état civil par le respect des normes
établies pour recruter le personnel qualifié capable d'intervenir
à tous les niveaux dans le système ; en adoptant des mesures
devant favoriser la modernisation du système de l'état civil par
l'introduction de la Nouvelle Technologie d'Information et de Communication
(NTIC). On peut aussi maximiser le rendement des ressources en jumelant
l'enregistrement des actes de naissance avec la déconcentration des
services des Archives Nationales d'Haïti (ANH).
La mise en place d'un service d'état civil
opérationnel à travers tout le pays à la portée de
tous les fils et filles du pays afin de délivrer systématiquement
à chaque individu l'un des documents les plus précieux qu'une
personne puisse posséder qu'est l'acte de naissance est plus
qu'important. Car, l'enregistrement de chaque naissance sur le territoire d'un
pays est un pas vers le développement d'une administration nationale
à part entière, et aide à consolider les fondements de la
société civile. C'est important, surtout, parce que c'est
l'unique moyen de garantir à chaque individu la jouissance de son droit
à une identité et une nationalité, avec tout ce que cela
implique. Car dénier ce droit fondamental revient non seulement à
dénier le droit à une identité énoncée dans
l'article 7 de la Convention Relative aux Droits de l'Enfant mais beaucoup
d'autres droits auxquels peut prétendre chaque citoyen.
Disons enfin qu'aujourd'hui l'être haïtien doit
continuer sans relâche sa lutte pour la défense de son droit
social violé par les inégalités sociales et son droit
civil bafoué particulièrement par le non enregistrement de son
acte de naissance et généralement par tous les autres papiers
importants délivrés par les bureaux de l'état civil. Car,
il est grand temps que l'équité ainsi que la justice et le
respect de tous les droits fondamentaux de la personne soient triomphés
au grand dam de tous les haïtiens.
Ainsi nous ne prétendons pas épuiser ce sujet vu sa
complexité et la limite de nos connaissances qui d'ailleurs ne l'ont
même pas exploité comme il se devait. Une brèche est donc
ouverte à quiconque souhaiterait l'exploiter à fond et
éclairer par ce fait notre lanterne qui du reste ne suffit pas pour
éclairer à lui seul la route obscure de la recherche dans la
quelle nous nous sommes lancé.
Le parfait n'étant pas de notre nature, nous nous excusons
pour toutes les erreurs ou omissions que vous avez pu remarquer en parcourant
ce travail et dont nous sommes seul responsable.
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Annexes
Annexe 1 : Modèle Acte de naissance
déclaration Père
Annexe 2 : Modèle Acte de naissance
déclaration Mère
Annexe 3 : Guide d'entretien
Enquête auprès des Officiers d'Etat Civil de la
juridiction de Miragoâne sur la problématique des actes de
naissance non enregistrés au bureau des Archives Nationales.
Période : du 2 au 12 mai 2021
I. Données générales sur le bureau
d'état civil
1. Localisation du bureau :
............................................................
2. Etat général du bâtiment :
.........................................................
3. Le bâtiment est-il alimenté en
électricité ? : ....................................
4. Le bâtiment a-t-il une clôture ? :
................................................
5. Le bâtiment a-t-il une pancarte qui permet de
l'identifier? : ..................
II. Personnel du bureau d'état civil
6. Combien d'agents votre bureau d'état civil
compte-t-il?
7. Précisez les taches spécifiques de chacun
d'eux.
8. Comment avez-vous eu ces agents ?
9. Avez-vous des bénévoles dans votre bureau ?
Combien sont-ils ?
10. Reçoivent-ils une compensation ?
11. A combien s'élève cette compensation ?
12. Où vos agents ont-ils été
formés ?
13. Quels sont les types d'actes délivrés par votre
bureau ?
14. Avez-vous un agent préposé à la
rédaction de chaque type d'acte ?
15. Avez-vous un agent préposé à
l'enregistrement de chaque type d'acte ?
16. Entre la rédaction et l'enregistrement des actes,
à quel moment apposez-vous votre signature sur les actes ?
17. Comment savez-vous que votre acte signé a
été enregistré ?
18. Quels sont les différents chemins parcourus par vos
registres avant d'arriver au bureau des Archives Nationales ?
19. A quel moment de l'année transmettez-vous vos
registres au parquet de votre juridiction ?
20. Avez-vous un agent préposé à la
transmission des registres au parquet de votre juridiction ?
21. Comment avez-vous la preuve que vos registres sont transmis
au parquet ?
22. Et pour les autres étapes, qu'est ce qui peut vous
rassurer que vos registres sont acheminés à temps ?
III. Équipements du bureau d'état
civil
23. De quels types de matériels dispose votre
bureau ?
24. Où stockez-vous vos documents d'Etat Civil ?
25. Avez-vous des registres?
26. De quels types sont-ils ?
27. Combien en avez-vous dans chaque type ?
28. Quelles sont leurs provenances?
29. A quel moment de l'année les recevez-vous?
30. Combien en recevez-vous par année ?
31. Sont-ils arrivés en quantité
suffisante ?
32. Sont-ils arrivés à temps
souhaité ?
33. Que faites vous quand ils ne sont pas arrivés à
temps ?
34. Quelle est la contenance d'un registre ?
35. Combien de temps environ dure un registre avant qu'il soit
rempli ?
36. Que faites vous quand un registre est rempli avant la fin de
l'année ?
37. Peut-il arriver, au cours d'une année, que vous n'avez
pas reçu de registres ?
38. Dans ce cas que faites vous ?
39. Quels autres matériels utilisez-vous pour faire
fonctionner votre bureau ?
40. Pour ces matériels, qui vous approvisionne ?
41. Sont-ils arrivés en quantité
suffisante ?
42. Sont-ils arrivés à temps
souhaité ?
43. Pensez-vous que ces conditions peuvent faire obstacles
à l'enregistrement des actes de naissance ?
44. Quelles sont, selon vous, d'autres barrières à
l'enregistrement des actes de naissance ?
45. Quelles solutions proposerez-vous en tant qu'acteur pour un
meilleur enregistrement des actes de naissance ?
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