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Etudes des principaux déterminants du non enregistrements des actes de naissance en Haïti : cas de la juridiction de Miragoàne de 1990 à  2000


par Benoit CLEMENT
Cornerstone Christian University - Maitrise 2021
  

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Section 2 : Acte de naissance en Haïti

L'acte de naissance est la première pièce d'état civil que doit recevoir tout être humain à la naissance. D'après les lois haïtiennes, chaque membre de la société doit être inscrit dans le registre d'état civil à sa naissance, de manière à être pris en compte par l'Etat auquel il appartient. Cet acte lui servira tout au long de son existence, permettant la rédaction d'autres actes d'état civil à obtenir, pour différentes transactions ou activités professionnelles et commerciales. Dans cette section de notre travail nous présentons l'ensemble des prescriptions contenues dans le formulaire de l'acte de naissance et analysons la portée de l'acte en lui-même.

1. Etablissement de l'acte de naissance

L'acte de naissance représente, pour reprendre Jobnel Pierre, le premier document par lequel l'Etat assume qu'il reconnaît une personne comme son ressortissant. Ce document est une pièce juridique attestant la déclaration ou l'enregistrement d'un fait d'état civil (Pierre, 2005).  Le système d'enregistrement est complexe et pose de sérieux problèmes. D'un coté, l'acte est enregistré par l'officier d'état civil de façon manuscrite sur des formulaires pré remplis proposés par le Ministère de la Justice et de la Sécurité Publique. Ces formulaires laissent beaucoup de possibilités d'erreurs à la personne qui les remplit. De l'autre,  pas de référence d'orthographe officielle. Étant donné qu'il n'existe pas d'orthographe officielle pour les noms de famille haïtiens et le système se base sur simple déclaration, les possibilités d'erreurs paraissent évidentes. Le système offre à chaque officier de l'état civil la latitude d'écrire le nom comme il l'entend. Cela pourrait occasionner qu'au sein d'une même famille, une variété d'orthographes du patronyme. Cette réalité pourrait être source de conflits au moment par exemple, de partager des biens laissés en héritage. Enfin, le système étant exceptionnellement déclaratif, l'officier de l'état civil, bien qu'ayant compétence exclusive pour dresser les actes de naissance, n'a pas le pouvoir de vérifier la réalité de cet événement. Il doit uniquement se fier aux énonciations du déclarant. Il n'a qu'un simple rôle de transcription à tenir, sans vérification aucune. En conséquence, des gens détenteurs d'acte naissance pourraient sans difficultés aucunes s'en font délivrer d'autres. Donc, une personne peut se retrouver détentrice de plusieurs actes de naissance. Toutefois, dans le cadre des naissances institutionnelles (enfant né à l'hôpital), l'officier de l'état civil pourrait exige un certificat de naissance. Il pourrait également demander l'acte de mariage lorsque le déclarant se dit être marié. Lorsque l'enfant n'est pas né à l'hôpital, l'acte de naissance est obtenu par déclaration des parents (ou de l'un d'eux) et de deux témoins devant l'officier d'état civil. Eu égard à la forme, l'acte de naissance tel qu'il se présente aujourd'hui, selon un rapport d'une mission en Haïti, organisée du 26 mars au 7 avril 2017 par l'Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides (OFPRA), est une feuille de papier de format bureautique US letter 8 ½ X 11 pouces (Refworld, 2017). Cette feuille pré imprimé communément appelée formulaire, provient du Ministère de Justice et de la Sécurité Publique (MJSP) et est rempli par l'officier de l'état civil de concert avec le comparant, au moment de la déclaration faite par ce dernier. Selon la représentante de l'ambassade d'Haïti à Ottawa a précisé que les renseignements « de base » qui se trouvent sur l'acte de naissance sont les suivant :

· l'année de préparation et le jour et l'heure de comparution

· le nom de l'officier d'état civil et son identification

· le nom du comparant (père, mère, ou tiers)

· la profession (parfois), le nom de la ville de son domicile

· la déclaration en lien avec le type d'union

· le genre de l'enfant et son ou ses prénoms

· le nom de la mère, s'il s'agit d'une déclaration par le père

· les noms des témoins

· les signatures et sceaux

Le modèle présenté sous la forme de formulaire, pourrait être se décomposer en plusieurs rubriques distinctes. Cette présentation semble être faite à la lumière des conditions fixées par l'article 56 du code civil haïtien. Il faut le mentionner qu'en matière d'acte de naissance, trois (3) formulaires distincts peuvent être utilisés pour déclarer une naissance, selon la qualité du déclarant. Si c'est le père qui est le déclarant, on parle de déclaration père et type de formulaire est utilisé. Dans le cas ou c'est la mère, cas d'un enfant de père inconnu ou qui ne reconnaît pas la paternité, c'est un autre type de formulaire qui est utilisé (déclaration mère). La déclaration est tierce lorsqu'un parent donne mandat à une autre personne de se présenter devant l'officier de l'état civil pour faire la déclaration de naissance. En pareil cas le formulaire utilisé serait la déclaration tierce. Selon notre analyse du formulaire, nous tentons nous-mêmes dans le cadre de notre travail de les regrouper en plusieurs rubriques. La première concerne l'officier de l'état civil lui-même. Elle renferme l'année de déclaration, le jour et l'heure où la déclaration a été faite. En outre, elle contient le nom de l'officier de l'état civil et son identification. La seconde présente des indications permettant de vérifier l'identité du ou des parents et celle de l'enfant. Le père ainsi que la mère doivent être identifiés par l'indication de leur nom(s), prénom(s), profession et domicile. Quant a l'enfant, les informations relatives à son sexe, sa filiation (naturelle ou légitime), le lieu, la date et heure de la naissance, enfin le ou les prénoms qui lui est attribué. L'acte de naissance déclare l'enfant légitime lorsqu'il est né dans les liens du mariage, et naturel dans les autres cas. La dernière rubrique identifie les témoins ainsi que la signature de l'officier de l'état civil, du déclarant et des témoins. Ce sont ces dernières formalités qui permettent de clôturer l'acte de naissance, préalablement soumis à la relecture. Cependant, concernant les enfants trouvés, l'officier de l'état civil procède à une double inscription. D'une part du procès-verbal de découverte, de l'autre, de l'acte de naissance, selon les modalités prévues par l'article 57. Il est à noter que dans le cas d'un enfant trouvé, l'officier devra lui-même choisir les prénoms et noms à attribuer à l'enfant.

2. La portée de l'acte de naissance

Le système juridique haïtien reconnait trois (3) sortes de filiations : celle dite légitime, celle adoptive et celle naturelle. La filiation est légitime lorsque ceux que le droit nomme les père et mère sont mariés lors de la conception ou de la naissance de l'enfant. Elle est dite naturelle dans le cas contraire. Cette dernière catégorie n'est pas homogène. Elle pourrait se subdiviser entre les enfants naturels simples qui sont ceux dont les parents auraient pu légalement contracter mariage mais ont librement décidé de ne pas le faire ; les enfants naturels adultérins qui sont ceux dont l'un au moins des auteurs était, au moment de la conception, engagé dans une union conjugale avec un tiers ; les enfants naturels incestueux qui sont ceux dont les père et mère sont empêchés de s'épouser en raison de leur lien de parenté à un degré proche. La filiation adoptive est une relation de filiation juridique existant entre un enfant et des parents qui ne sont pas du même sang. Il existe deux sortes d'adoption parmi lesquelles un couple peut choisir : l'adoption simple et l'adoption plénière. Selon l'article 24 de la loi du 15 novembre 2013 reformant l'adoption en Haïti, l'adoption simple est celle qui confère le nom de l'adoptant à l'adopté en l'ajoutant au premier nom de ce dernier. Cette loi précise en outre qu'aucune modification ne sera apportée quand l'adoptant et l'adopté ont le même nom patronymique. En cas d'adoption par un couple, l'adopté prend le nom du mari ou du concubin.

Auparavant, le Code civil traitait séparément de la « filiation légitime », qui s'inscrit dans le mariage, et de la « filiation naturelle », qui existe en-dehors de l'union conjugale. A l'intérieur de ces catégories, il était édicté des règles différentes selon que l'on envisageait l'établissement du lien maternel ou du lien paternel, seule la reconnaissance étant commune à la maternité et à la paternité hors mariage. Cependant, la loi du 4 juin 2014 a refondu la présentation du droit de la filiation. L'article 1er de cette loi établi le principe de l'égalité des filiations légitime, naturelle, adoptive. Ainsi les enfants issus de l'une ou de l'autre condition engendrent nécessairement l'égalité entre tous les droits et les obligations moraux et pécuniaires à la charge de leurs parents.

Désignant le lien qui unit un enfant à son père et/ou à sa mère, la filiation n'est donc, comme dit Gutmann, ni du domaine de l'être, ni du domaine de l'avoir : elle est du domaine de la relation. Elle n'est pas non plus de l'ordre du fait, mais de l'ordre de l'artifice en ce qu'elle n'existe pas par elle-même mais est une création du droit (Gutmann, 2000). Certes, à la base de toute filiation, il y a l'engendrement, il y a la procréation. Que ce soit par le biais de relations charnelles ou d'une technique médicale, on rencontre toujours le phénomène de création, entendu comme l'action de faire naître et le phénomène d'assemblage, d'union ou de fusion. Ainsi, la filiation, c'est l'attachement que le droit (et la société dans son ensemble) considère comme digne d'être reconnu. Quel que soit le qualificatif apposé au mot filiation, il n'en demeure pas moins que celle-ci n'existe que parce qu'elle a été légalement établie, c'est-à-dire prouvée conformément à la loi. C'est en cela que Gérard CORNU dit du droit de la filiation qu'il est un droit de la preuve, un système de preuve (Cornu, 2003).

L'acte de naissance en constituera la preuve par excellence, telle que l'indique le premier alinéa de l'article 2 de la loi portant sur la paternité, la maternité et la filiation, publiée dans le Moniteur, le mercredi 4 juin 2014. Cette article souligne que la filiation s'établit par l'inscription de la naissance sur les registres de l'officier de l'état civil ou sur ceux du Consul haïtien à l'étranger, sur comparution des parents ou de l'un d'eux muni d'un acte authentique ou d'une procuration spéciale donnée par l'autre parent, ou d'une décision de justice passée en force de chose souverainement jugée, résultant d'une action en recherche de paternité ou de maternité (Moniteu#105, 2014). En qualité de preuve, il a ses propres particularités. Il peut se servir tantôt pour établir, tantôt pour anéantir une filiation. D'abord, l'acte naissance établit donc la preuve de la filiation de l'enfant à ses parents. En ce sens, il identifie clairement l'auteur, qui, à défaut d'être certain, est le géniteur le plus probable. Ensuite, il témoigne en quelque sorte l'expression d'une volonté du géniteur d'assumer un lien de filiation. Enfin, il est la manifestation d'un acte de foi, d'une vérité instituée : je reconnais l'enfant, je suis inscrit comme père sur l'acte de naissance de l'enfant de ma femme, je suis la femme qui accouche de l'enfant et dont le nom est porté à l'acte de naissance.

L'acte de naissance ne traduit pas seulement des preuves de filiation de son propriétaire. Il est également un outil puissant qui peut aider à protéger notamment les enfants contre des changements illicites d'identité, par exemple un changement de nom ou une falsification des liens familiaux. Cela se situe dans la ligne de l'article 8 de la Convention aux Droits des Enfants, et de l'obligation qu'a l'Etat de préserver l'identité de l'enfant. Une question particulièrement préoccupante ici est l'établissement de faux papiers en vue d'une adoption illégale. Il est à noter que l'article 8 de la Convention précise que le droit à un nom, à une nationalité et à des relations familiales font partie du droit à une identité, et que si un enfant est illégalement privé des éléments constitutifs de son identité ou de certains d'entre eux, les États parties doivent lui accorder une assistance et une protection appropriées, pour que son identité soit rétablie aussi rapidement que possible.

La démarche réalisée devant l'officier de l'état civil est une formalité imposant de révéler à l'État l'existence d'un fait dont on a eu connaissance afin que l'information qu'il constitue ne reste pas secrète. L'article 56 du Code civil dispose que doivent figurer dans l'acte de naissance les prénom, nom, âge, profession et domicile du déclarant lorsque ce dernier n'est pas le parent de l'enfant. Cela signifie que le déclarant agit en son propre nom, et non pas en représentation de l'enfant, de la mère de l'enfant ou de son père. Au sens de l'article 599 du Code civil, cette démarche constitue un acte strictement personnel qui ne peut donner lieu : ni à assistance, ni à représentation. A la différence de la reconnaissance, la déclaration de naissance n'a pas vocation à retranscrire un acte de volonté et c'est pourquoi elle peut être faite par toute personne ayant connaissance de la naissance de l'enfant (Carbonnier, 2004). Conformément à l'article 7 de la Convention internationale des droits de l'enfant qui prévoit que l'enfant est enregistré aussitôt sa naissance, le législateur fait obligation à toute personne ayant eu connaissance de la naissance d'un enfant d'en faire la déclaration auprès des services de l'état civil. En effet, le principal intéressé n'étant pas en mesure de se faire connaître, il faut remettre entre les mains des tiers l'obligation de déclarer sa naissance. A cette fin, le législateur charge toute personne ayant eu connaissance de l'accouchement de procéder à la déclaration. L'article 55 du Code civil ouvre une vaste liste de personnes, qui peuvent être : les docteurs en médecine ou en chirurgie, sages-femmes, officiers de santé ou toute autre personne qui aurait assisté à l'accouchement. Toutefois, ces personnes ne sont visées qu'en l'absence du père de l'enfant qui est prioritairement concerné par l'obligation de déclarer la naissance, puisque ce même article dispose que la naissance de l'enfant sera déclaré par le père ou la mère de l'enfant. Le droit de l'enfant d'être enregistré aussitôt sa naissance donne à l'enfant le droit d'être connu des services de l'État. Dans tous les cas, la jouissance effective des droits dont l'enfant peut bénéficier est soumise à l'enregistrement de sa naissance. A partir de cet instant il acquiert la personnalité juridique qui lui donne le statut juridique de personne et de ce fait le protège.

D'un autre côté, l'acte de naissance est l'un des éléments importants utilisé par les autorités de certains pays pour encourager la scolarisation. D'après l'UNICEF, certains Etats comme le Cameroun, le Lesotho, les Maldives et le Yémen, les écoles refusent d'inscrire les enfants qui n'ont pas de bulletin de naissance. En Turquie, ce document est exigé pour l'obtention d'un diplôme d'études primaires et par conséquent pour le passage dans l'enseignement secondaire ; en Tanzanie, il faut le fournir pour s'inscrire à l'université. A Sri Lanka, un certificat de naissance n'est pas demandé pour l'inscription à l'école, mais il est nécessaire pour se présenter à des examens.

Enfin, il est prouvé, suivant cette même ligne d'idées, que cette pièce administrative facilite la jouissance d'autres droits connexes, comme le droit de voter (une fois majeur) et de se faire élire, le droit au mariage formel, celui de posséder un compte bancaire et des propriétés, le droit de détenir d'autres pièces d'identification d'égale d'importance, comme un passeport et une carte d'identité.

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore