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La protection des droits et intérêts des communautés des forêts et la gestion des écosystèmes forestiers en Afrique Centrale

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par valerie Kendo yonou
Institut des droits de l'Homme de Lyon - DESS en pratique des organisations et protection des droits de l'Homme 2005
  

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CHAPITRE IV

NOS MISSIONS ET LEURS SPECIFICITES

Deux groupes d'activités ont fait partie de nos missions au cours de notre stage. Certaines sont directement liées aux projets alors que d'autres sont en rapport avec les aspects organisationnel, institutionnel ou logistique.

SECTION I : LES ACTIVITES EN RAPPORT AVEC LES PROJETS

Cette section concerne particulièrement les projets suivants :

· L'appui du travail en RDC à savoir analyser et faire des commentaires sur la législation forestière ; préparer les documents et informations pour les groupes en RDC ;

· L'appui avec du projet avec OCDH à Brazzaville consistant à faire une analyse et développer le programme de rédaction des textes pour une nouvelle loi ;

· L'appui à la recherche de solution sur la question foncière pygmée au Cameroun.

I- APPUI AUX PROJETS EN RDC

A- Les priorités de la Rainforest Foundation UK en RDC et nos objectifs

Les priorités de la Rainforest Foundation UK en RDC sont les suivantes :

· Améliorer la situation des droits des communautés forestières

· Améliorer les moyens de subsistance des communautés forestières ;

· Améliorer la gestion et la gouvernance forestière, veiller à ce que les interventions internationales suivent des principes de bonne gouvernance et de bonne gestion.

Notre mission consistait donc à aider la société civile de la RDC dans son travail d'appui aux communautés et d'aménagement de la politique forestières via la Rainforest Foundation UK; A aider la Rainforest Foundation pour trouver les éléments nécessaires de Lobbying auprès de la Banque Mondiale et autres partenaires de la RDC en vue de les amener à la réorientation leur politique en matière forestière en RDC.

B- Aperçu du problème

La RDC a une forêt vaste de près de 125000000 d'hectares soit 52% de sa superficie nationale. Ces forets ou entre 25000000 à 35000000 pygmées habitent sont le terreau culturel pour plusieurs communautés. On retrouve les pygmées sous l'appellation de « Bambuti » ou « Efe » dans la région de l'Ituri et « batwa » au Kivu16(*).

La RDC a ratifié plusieurs accords et traités internationaux reliant les droits des peuples et communautés aux forets parmi lesquels:

· Le pacte international relatif aux droits et politiques ;

· La charte africaine des droits de l'Homme et des peuples ;

· La convention d'Alger du 15 juillet 1965 sur la conservation de la nature et des ressources naturelles ;

· La convention Ram sar ;

· La convention sur la biodiversité biologique.

· La convention cadre sur les changements climatiques

Elle accède à la convention de Carthagène sur les risques biologiques et au protocole de Kyoto.

Sur le plan régional, Elle a signé les accords sous régionaux tels, le Traité relatif à la conservation et la gestion durable des écosystèmes forestiers d'Afrique Centrale. Elle a également pris part au sommet des Chefs d'Etats d'Afrique Centrale qui a abouti à une déclaration dite « La Déclaration de Yaoundé » et à la mise en place de la Conférence des ministres en charge des forêts d'Afrique Centrale (COMIFAC)17(*). Par ailleurs, la RDC a participé à la conférence ministérielle sur l'application des législations forestières (AFLEG)18(*) ayant donné lieu à une déclaration finale incitant les Etats signataires à « prendre en considération les intérêts des toutes les de la société civile dans l'élaboration des législations forestières, y compris la prise en compte des lois et pratiques traditionnelles et coutumes telles que la chasse traditionnelle ». Cette Déclaration réaffirme la volonté des Etats concernés à analyser les politiques et les lois foncières et faire en sorte que les droits de propriété y compris les savoirs traditionnels liés aux forêts, soient respectés. La RDC est membre du Réseau des Aires Protégées d'Afrique Centrale (RAPAC) et de la Conférence sur les Ecosystèmes de Forêts Denses et Humides d'Afrique Centrale (CEFDHAC).

La protection des droits et intérêts des populations des forêts fait donc partie des obligations liées aux engagements internationaux de la RDC auxquels elle devrait s'incliner en tout état de cause en les respectant aussi bien dans son code forestier qu'à travers ses mesures d'application.

Sans être exhaustif, Ces droits sont entre autres :

o Le droit de possession sur les terres qu'elles occupent ;

o Le droit d'usage sur des territoires utiles a leurs activités économiques, écologiques, religieuses etc.

o Le droit de participer dans la gestion des ressources naturelles sur leurs terres.

Une l'analyse faite par la Rainforest Foundation UK19(*) relève qu'après le retour de la paix en 2002, ce pays fragilisé par de nombreuses guerres s'est aussitôt engagé dans une profonde reforme. Cela a donc donné lieu à une nouvelle loi portant code forestier du 29 août 2002 et l'adoption de la Constitution intervenue quatre (4) ans plus tard en février 2006. Depuis lors, un processus appuyé par la FAO et la coopération Néerlandaise vise à développer les normes d'application du code qui sont en fait les panneaux de direction pour sa mise en pratique. Ce processus ayant subi une précipitation, le code a été adopté sans véritable consultation des communautés ainsi que la société civile. Il appert que ce code est défectueux et ne traduit pas nécessairement les réalités de terrain.

A présent la Rainforest Foundation estime que les mesures d'application du code forestier en cours d'élaboration devraient tenir compte des droits incorporés dans la constitution et les instruments internationaux roulant en faveur des populations locales. Selon elle, les pressions exercées lors de la formulation de nouvelles politiques et/ou législations pour l'obtention rapide des résultats et la mise en place des structures se traduisent par des décisions hâtives qui peuvent avoir des conséquences négatives20(*). Partant de cette analyse elle travaille avec la société civile congolaise pour qu'elle participe au développement de la politique forestière en cours afin qu'elle soit efficace et respectueuse des droits des communautés forestières. Son intervention a aussi pour but d'aider les ONG locales pour renforcer les capacités des communautés forestières de façon à ce qu'elles parviennent à faire valoir elles mêmes leurs droits.

C- Notre mandat

Elément clé : décryptage du processus et approche genre (protection des populations autochtones et des minorités).

Il a été question pour nous de faire un état des lieux des mesures d'application du code forestier en dressant leur nomenclature. Il s'agissait de recenser toutes les mesures d'application du code forestier déjà entrées en vigueur, celles qui ne sont pas encore adoptées et dont les moutures sont disponibles auprès de la société civile, et enfin celles dont aucune initiative d'élaboration n'est encore prise. La finalité de cet exercice consistait d'une part à faire ressortir à travers les différentes normes d'exécution du code forestier, toutes celles qui seraient en rapport avec les droits et intérêts des communautés. Le but étant de les ériger comme normes prioritaires. D'autre part, notre mission a porté sur la description du processus par l'identification des principaux acteurs et la définition de leur rôle; la finalité de cette opération consistant à relever quelles sont les failles et les obstacles. Ce travail s'est terminé par une le commentaire détaillé sur chacune des dispositions des différentes mesures d'application mises à la disposition de la société civile, suivi par une critique des paramètres liés à la protection catégorielle (population autochtones, femmes, vieillards, jeunes et autres minorités au sein des communautés) et à la démocratie locale.

1- La nomenclature des mesures d'application en RDC

Nous avons réalisé que les chiffres avancés sur le nombre des mesures d'application du code forestier varient d'une source à l'autre. Ainsi, selon le Dr BARUME, il y aurait 142 dispositions du code forestier nécessitant mesures d'exécution soit au total 142 textes21(*). Quant au projet TCP /DRC 2905 « appui à la relance du secteur forestier », il y en aurait 45. Pour sa part, une étude réalisée par « Avocats verts « sous la demande de WWF en a répertorié 6122(*).

Après avoir finalement répertorié une quarantaine mise à la disposition de la société civile, nous avons dressé la liste des mesures affectant les communautés en nous référant sur celles identifiées préalablement par le projet FNPP. Cette liste classée selon la nature des textes se présente comme suit :

Décrets présidentiels : 1-Procédure de classement et déclassement des forêts; 2- modalités d'attribution des forêts des communautés locales ; 3-organisation et fonctionnement des conseils consultatif national des forêts ; 4-statut, organisation de fonctionnement du fond forestier national.

Arrêtés Interministériels : 1-institution des forêts de production permanente ; 2- réglementation du zonage et modalités de mise en culture des terres forestières.

Arrêtés ministériels : 1- modalités de détermination de l'emprise villageoise à l'intérieur d'une forêt classée ; 2- composition , organisation et fonctionnement des conseils consultatifs provinciaux des forêts, procédure de reboisement mesures d'encouragement et conditions requises aux personnes physiques ou morales pour jouir des bénéfices de reboisement ; 3- critères d'estimation de la mise à prix des forêts et des cahiers des charges ; 4- normes et critères de zonage du territoire national ; organisation et fonctionnement de la commission chargée des règlements des différents forestiers ; 5- mesures relatives à l'exploitation des forêts des communautés locales ; 6 - récolte des produits forestiers nécessitant contrôle.

Arrêtes du gouverneur de province : 1 - fixation de la liste des produits forestiers soumis au droits d'usage et admis à la commercialisation ; 2- Interdiction de la pratique des cultures dans certaines parties des forêts protégées.

Mais dresser la liste des ces mesures d'application seule ne saurait être suffisant pour qu'elles existent et qu'elles soient gardiennes des communautés puisqu'elles sont tributaires de la démarche actuellement mise en place.

2- Description du processus d'élaboration des mesures d'applications du code forestier de la RDC

Les éléments recherchés : Les différentes étapes, les acteurs et leurs rôles, les failles et les responsabilités.

Alors que le code est présenté comme une lueur d'espoir pour les communautés, son succès dépend surtout de la qualité des mesures d'exécution. Pour cette raison, leur rédaction et le cheminement suivis actuellement sont une étape assez importante pour leur assurer l'éviction de toute lésion. Nonobstant le nombre d'acteurs impliqués dans ce processus, il s'est avéré que le bilan n'est guère positif pour plusieurs raisons : L'absence de structure d'appui appropriée chargée des questions purement juridiques parmi lesquels l'évaluation du niveau d'implication des populations locales ; Absence de formalisme procédural23(*) dont la conséquence est logiquement l'exclusion des communautés.

Notre étude a conduit à un schéma simplifié qui présente les étapes du processus jonchée chacune d'obstacles24(*) . Résumé en sept étapes, Il a été noté que le processus souffre:

1. de l'incompétence de certains consultants en charge de rédiger les moutures des textes en faveur des communautés forestières ;

2. du défaut de distribution des moutures dans les délais convenus pour commentaires à la société civile protectrice des droits et intérêts des communautés ;

3. de la modification des avis et considérations de la société civiles après délibération au comité de pilotage ; 

4. de l'entrave au bon fonctionnement du projet FNPP et empiétement du fait de la pré- éminence de la banque mondiale ;

5. du Blocage du bon fonctionnement du comité de pilotage.

A l'issue de ce travail, les recommandations suivantes ont été adressées au gouvernement de la RDC, à la Banque Mondiale, et à la FAO qui sont les principaux fils conducteurs.

Au gouvernement de la RDC :

1) De privilégier d'abord le plan de zonage forestier qui permettrait de circonscrire la part de forêt réservée aux communautés ;

2) De réorganiser le nouveau comité de pilotage de façon à impliquer de manière équitable aussi bien la société civile que les représentants des communautés pour leur permettre de défendre leurs intérêts.

3) De s'assurer que les textes envoyés par le comité de pilotage ne soient ni falsifiés, ni amputés par rapport aux avis et considérations convenus après délibération au comité de pilotage.

A la Banque Mondiale :

1) D'appuyer le gouvernement dans l'élaboration du plan de zonage préalable à toutes les autres opérations forestières;

2) D'encourager le gouvernement à créer le nouveau comité de pilotage dans le plus bref délai au lieu de s'y substituer;

3) De promouvoir aussi bien la foresterie rurale que l'exploitation industrielle tout en ayant veille à l'application des directives en faveur des populations autochtones;

A la FAO :

1) De distribuer dans le délai chaque mouture pour permettre aux parties prenantes au comité de pilotage de disposer du temps nécessaire pour ajouter leurs commentaires ;

2) De privilégier la préparation des textes identifier par FNPP comme prioritaires25(*). Tous affectant de quelque manière les communautés.

3- Critique sur la législation forestière en RDC

Notre tâche consistait à analyser et à commenter en détail les dispositions de certaines mesures d'application en cours d'élaboration. Ensuite, il était question pour nous d'apporter notre jugement par rapport aux paramètres relatifs à la stabilité sociale et à sa durabilité.

Au total 33 textes ont été étudiés desquels nous avons tenu particulièrement rigueur à la protection catégorielle (populations autochtones, les femmes, les vieillards, les jeunes, les autres minorités non appartenant à la « communauté locale »). Nous nous sommes alors inspiré de la constitution qui véhicule un certain nombre de principes et de valeurs auxquels devraient être rattachés aussi bien au code forestier que ses mesures d'exécution. Cela s'est avéré important dans la mesure où la constitution a été redigée longtemps après l'adoption du code forestier.

Parce qu'il appartient surtout aux textes d'exécution du code forestier de servir comme panneaux de surveillance contre toute forme de dérive dans la phase pratique de la politique forestière, il leur appartient de considérer toutes ces préoccupations. Alors se doivent-ils d'être assez claires et cohérents, également, de concilier les objectifs du code forestier avec ceux de la nouvelle constitution ainsi qu'avec les principes et les valeurs qu'elle défend.

Considérant la situation de guerre qu'à traversée la RDC depuis 1995 dont les séquelles persistent encore, nous avons estimé que la gestion durable et décentralisée des ressources forestières pouvait être une aubaine pour le nouveau départ à partir de la base en faveur de la reconstruction de la paix, de l'unité ; du renouveau démocratique, de la restauration de l'égalité des chances et du développement, bref de la prospérité sociale.

En ce sens, notre critique est un appel à la prudence ce, afin d'éviter que les différentes mesures d'application et surtout celles qui affecteront plus ou moins, à long ou à court terme les populations forestières les défassent au lieu de les construire. Les observations que nous nous sommes permis de qualifier « les risques de faux départ » sont inspirées pour l'essentiel des dispositions de la constitution du 16 février 2006, de la loi no 001/2002 du 29 août portant code forestier de la RDC et de nombreux textes d'exécution en cours d'élaboration.

a- La Protection Catégorielle.

Ici, nous avons voulu vérifier comment les intérêts des populations autochtones, des femmes et des jeunes sont envisagés et protégés dans les moutures des différents textes d'application du code forestier.

i- La définition de « la Communauté Locale » : un imbroglio sémantique

Telle qu'elle est définie par le code forestier, la « communauté locale » assurerait une protection catégorielle approximative. L'Etat congolais pourtant à travers sa constitution affirme son désir de consolider son unité nationale, affirme sa détermination à la sauvegarder et à la consolider dans le respect de ses diversités et de ses particularités positives25(*). La nouvelle constitution oblige l'Etat de tenir compte dans l'accomplissement de ses tâches, de la diversité culturelle du pays.26(*) L'Etat a le devoir d'assurer et de promouvoir la coexistence pacifique et harmonieuse de tous les groupes ethniques du pays dont assurent la protection et la promotion des groupes vulnérables et de toutes les minorités et par conséquence veille à leur épanouissement27(*).

Le code forestier de la RDC en désignant les communautés villageoises des forêts par plusieurs appellations : « communauté locale» ou « populations riveraines » ne définit que la première. C'est « une population traditionnellement organisée sur la base de la coutume et unie par les liens de solidarité clanique ou parentale qui fondent sa cohésion interne ; caractérisée en outre par son attachement à un terroir déterminé ».28(*)

Nous pensons que cette définition au sens strict des termes pourrait être difficilement applicable dans les villages mixtes où vivent Bantous et pygmées car les deux communautés ne partagent pas les mêmes ancêtres et ont les coutumes différentes. Même si cette définition se rapproche de celle des peuples tribaux29(*), fort est de constater qu'elle ne met pas en valeur le critère de distinction qui doit être établie par rapport aux autres communautés nationales. Juridiquement, la « communauté locale » ne serait existante que dans les villages homogènes. Ce qui mettrait à mal la protection des populations autochtones et autres minorités qui cohabitent.

A la lecture des différents textes, nous avons relevé trois appellations des populations forestières ; Ces différentes appellations étant : la communauté locale, populations riveraines, populations autochtones

· La définition de la communauté locale : le risque de quiproquo 

Dans cette définition les critères de définitions des populations autochtones n'ont pas été pris en compte même si elle est proche de peuples tribaux sans toute fois designer la même chose. Une telle définition risquerait de créer une sorte de confusion entre les communautés et d'engendrer des conflits entre les familles qui la composent. Il est aussi clair à travers cette situation que les populations autochtones seront les principales exclues et par conséquent cela pourrait renforcer leur marginalisation, et leur précarité.

Le projet de loi sur la conservation de la nature reprend la définition du code forestier en son article 2.18.

· La population riveraine30(*) : une appellation ambiguë

Ni le code, ni même un autre texte législatif ou réglementaire national ne la définit. Cette appellation ne nous semble pourtant pas gratuite. Par exemple le projet de loi sur la conservation de la nature dans son exposé des motifs précise ceci : « dans le processus de création d'aires protégées, le projet de loi fait obligation au gouvernement ........de procéder à la consultation préalable des communautés locales ou riveraines en vue de la prise en compte de leurs besoins communautaires afin de garantir la paix sociale et la gestion participative des aires protégées ».

Dans un premier sens, les deux expressions pourraient bien déterminer une seule et même chose à savoir toute communauté qui partagerait les mêmes limites avec les forêts auquel cas il n'y aurait aucune difficulté. Par contre, une interprétation stricte pourrait amener à penser qu'il s'agit uniquement des populations dépendant totalement des forêts. Alors, on pourrait craindre au regard des enjeux en présence que les populations autochtones soient victimes plus tard d'annexion ou même d'expulsion manu militari par d'autres communautés.

· La population autochtone : une appellation flottante

La nouvelle constitution est innovante également en ce qui concerne la question des populations autochtones. Sans toutefois l'évoquer littéralement, elle promeut la diversité culturelle nationale31(*) ; impose à l'Etat le devoir d'assurer la protection et la promotion des groupes vulnérables et de toutes les minorités dont il doit veiller à leur épanouissement. 32(*)

On pourrait à juste titre conclure qu'en tenant compte de la spécificité culturelle des populations autochtones de la RDC, de leur état de vulnérabilité et leur statut social, elles devraient jouir au moins de la protection à travers le code forestier et ses mesures soit en tant que groupe vulnérable soit encore en tant que minorité.

Cette appellation n'est ni évoquée ni définie dans le code forestier. Et pourtant comme que l'exigent les dispositions constitutionnelles notamment dans le paragraphe 5 du préambule et l'article 60, le code forestier devrait faire preuve de respect des engagements internationaux de la République Démocratique du Congo. En cela, la convention sur la biodiversité, la convention Ramsar ainsi que la charte africaine des droits de l'homme seraient bien venues.

Quant aux mesures d'application, le projet de loi sur la conservation de la nature les a citées mais reste aussi confus tout comme l'arrêté fixant la procédure d'enquête publique préalable à l'octroi des concessions forestières33(*) qui propose que «... les parties prenantes seront consultées en vue ...de la prise en compte et du respect des valeurs esthétiques et culturelles des communautés locales ou des populations des autochtones... »

Aussi, le Projet de loi sur la conservation de la nature dispose que « le gouvernement encourage et assure la protection et le maintient des connaissances, innovations et pratiques des communautés locales et populations autochtones...... »34(*). On pourrait très vite conclure qu'il y a eu une petite rectification au niveau des mesures d'application pour la prise en compte à part des intérêts populations autochtones par rapport au code forestier. Mais, la remarque est que dans ces normes la population autochtone fait fusion avec la communauté locale ou lui est incorporée35(*). A titre d'illustration, l'article 4 à l'opposée de l'article 45 n'opère plus cette distinction et dispose seulement que: « Dans le cadre du processus d'élaboration et de mise en oeuvre de la politique nationale..., le ministère implique...les autorités traditionnelles, les communautés locales, les femmes et les jeunes ». Ce bémol laisse supposer que les droits et intérêts des populations autochtones seraient considérés au gré de ceux qui auront la charge de conduire les opérations de terrain

En somme, la « globalisation des populations des forêts » n'est pas en faveur des populations autochtones car elle crée une fusion des parts. Les populations autochtones risqueraient dans ce cas de payer le pire tribut de la politique forestière lorsqu'il s'agira véritablement de la phase pratique des activités forestières comme elles l'ont déjà été au Cameroun. Pour éviter que ce mélange leur soit préjudiciable, il est souhaitable de faire abstraction de la définition de « la communauté locale » dans les mesures d'application et afin de reconnaître en les précisant tous les droits propres aux populations autochtones selon le standard international.

Recommandations aux consultants de la FAO et la Banque Mondiale dans le processus en RDC

o Les consultants doivent prendre en compte des spécificités des populations autochtones par rapport à leur culture, leurs liens à la terre, l'accès aux ressources etc. ;

o Les consultants doivent prévoir la Protection d'autres minorités non originaires des communautés villageoises concernées ;

o La Banque Mondiale devrait veiller à ce que soient appliquées toutes ses directives relatives aux populations autochtones.

ii Imprécision du rôle de la femme dans la législation forestière

Il serait injuste de faire garde du rôle que joue la femme dans la gestion des forêts étant donné qu'elle femme est particulièrement touchée car c'est elle qui collecte et commercialise les PFNL dont elle tire la nourriture et des revenus pour la famille. Son implication pourrait intervenir dans le cadre de son accès aux emplois, aux activités génératrices de revenue. Ceci pourrait être intéressant dans le cadre de la gestion forestière dans la mesure où le constituant congolais a voulu adapter la constitution aux signes du temps en aménageant le statut de la femme congolaise.

La consécration constitutionnelle de la parité homme femme est aujourd'hui une réalité. En effet, il y est stipulé à l'article 14 de la constitution du 18 février 2006 que « les pouvoirs publics veillent à l'élimination de toute forme de discrimination à l'égard de la femme et assurent la protection et la promotion de ses droits. Ils prennent dans tous les domaines civil, politique, économique, social et culturel, toutes les mesures appropriées pour assurer le total épanouissement et la pleine participation de la femme au développement de la nation... ».36(*) La gestion participative et décentralisée des ressources naturelles devrait être un excellent champ de la concrétisation de cet engagement.

Le mutisme du code forestier sur cette question est absolu. Un seul texte fait allusion aux femmes37(*) notamment dans la procédure de classement des forêts. Ce texte fait obligation au Ministère de les impliquer dans le cadre du processus d'élaboration et de mise en oeuvre de la politique nationale.

En somme, le rôle de la femme est encore minimisé dans le processus forestier en cours en RDC.

Recommandations au comité de pilotage

· D'exiger l'inclusion des femmes dans tous les textes portant sur les procédures et modalités de consultation des populations.

· De faciliter l'implication et d'encourager à travers les textes la participation des femmes aux activités concernant leurs forêts y compris.

iii Une faible implication des jeunes

L'interdépendance de la protection des droits de l'homme et de la protection de l'écosystème forestier voudrait comme le veut la Convention sur la Biodiversité, que les Etats parties favorisent et encouragent une prise de conscience de l'importance de la conservation de la diversité biologique et des mesures nécessaires à cet effet et en assurent la promotion par les medias, ainsi que la prise en compte de ces questions dans les programmes d'enseignement38(*).

Pour sa part, la Charte africaine consacrée par la constitution du Congo impose aux Etats parties l'obligation de promouvoir et d'assurer, par l'enseignement, l'éducation et la diffusion, le respect et la compréhension des droits et des libertés contenus dans la charte, laquelle garantie un droit à un environnement satisfaisant et global, propice au développement des peuples. La formation des jeunes s'inscrit irrévocablement dans ce registre puisque les jeunes sont, comme on a coutume de dire « le fer de lance » pour garantir la gestion durable de ressources dès lors qu'ils sont formés pour. Ceci étant, Ils devraient être associés et être libres d'apporter leurs contributions à toutes les étapes depuis l'identification des projets liés à leurs forets jusqu'à la réalisation des actions. Cela signifie d'autre part qu'ils doivent être sensibilisés, informés, formés, et éduqués pour la l'exploitation durable des ressources forestières aussi bien industrielle que artisanale afin de préserver leur milieu de vie.

En effet, la constitution de la RDC dispose que les pouvoirs publics ont l'obligation de protéger la jeunesse contre toute atteinte à sa santé, à son éducation et à son développement intégral.... les pouvoirs publics ont le devoir de promouvoir et d'assurer, par l'enseignement, l'éducation et la diffusion, le respect des droits de l'homme, des libertés fondamentales et des devoirs du citoyens. Ils ont les devoir d'assurer la diffusion et l'enseignement de la constitution, de la déclaration universelle des droits de l'homme, de la charte africaine des droits de l'homme et des peuples, ainsi que de toutes les conventions régionales et internationales relatives aux droits de l'homme et au droit international humanitaire. 39(*)

Le code forestier pour sa part fait référence aux installations scolaires dans les communautés riveraines des concessions forestières (Article 89) mais ne fixe pas de programme ou de projet de formation à l'éducation environnementale des jeunes des communautés des forêts. Les dispositions relatives aux cahiers des charges dans le cadre d'attribution et d'exploitation des concessions font part de construction d'école dans la réalisation des oeuvres sociales.

Aucun projet de mesure d'application ne fait signe de programme d'éducation et de formation.

Recommandations au gouvernement de la RDC

· Le ministère en charge de l'enseignement primaire et secondaire devrait intégrer dans les programmes scolaires des séances d'éducation environnementale

· Le ministère en charge de l'environnement et des forets devrait créer dans les zones affectées par l'exploitation forestière, des centres de formation environnementale gratuits et ouverts à tout le monde. Il devrait aussi déléguer parmi ses fonctionnaires les responsables quelques agents en charge de formation et d'animation rurale.

b- La Démocratie Locale:

La gestion locale doit asseoir la dynamique de débat, de discussion et de dialogue autour de la gestion des forêts. La non-représentation, l'illégitimité, ou l'irresponsabilité des représentants peuvent conduire à de graves crises au sein voire entre les communautés (P. BIGOMBE). La représentation étant l'une des choses sur lesquelles reposent la gestion décentralisée et la gouvernance locale, nous avons insisté par rapport à la législation congolaise et aux mesures d'exécution en cours d'élaboration, sur les manquements relatifs aux modes de désignation des représentants des communautés des forêts, à la carence de leurs responsabilités et de la représentativité des groupes défavorisés ou minoritaires.

i- Statut et responsabilité des représentants des communautés locales

Une des avancées dans la constitution de la RDC est le fait d'avoir prévu la création des centres d'impulsion et de développement à la base. Cela siée avec la gestion décentralisée de ressources forestières qui se veut, fondée sur les principes de la démocratie et bien entendu qui suppose la dévolution effective des pouvoirs à des institutions endogènes locales et aux responsables démocratiquement élus à l'échelle des communautés. Ces derniers devraient être responsables aussi bien devant les institutions de l'Etat que devant les communautés respectives afin d'éviter toute sorte de contestation de la leur légitimité qui sans doute est une des causes fondamentales des crises.

Malheureusement à la lecture des différents projets de mesure d'application, il ressort que le Ministre en charge des forêts jouit d'un large pouvoir de nomination. Pire encore, la représentation est le privilège réservé dans certains cas, aux seules personnes qui jouissent d'un statut social particulier. C'en est ainsi le cas pour les chefs traditionnels40(*) ou des responsables des comités villageois de développement. Au regard des textes y afférents, il n'est prévu aucune garantie de débat ou de concertation préalable au sein des villages du moins en ce qui concerne le processus en cours. On pourrait alors mettre en doute la bonne fois de l'Etat même si dans d'autres projets on fait mention de « délégués41(*) » ou de « mandataires42(*) » des communautés. Le danger d'une telle imprécision réside dans le fait que le processus au niveau des communautés pourrait être dévié pour leur propre bénéfice, par l'élite intellectuelle ou par un petit groupe de personnes dont le statut social leur donne d'office le statut de représentants des communautés.

* 16 Albert K. BARUME

* 17 Le Sommet des Chefs d'Etat d'Afrique centrale sur la gestion durable des forets, s'est tenu a Yaounde le 17 mars 1999, elle fut la premiere grande assise internationale de haut niveau sur la question de la conservation et la gestion durable des forets denses et humides du Bassin du Congo. Organise a l'initiative du President camerounais, ce sommet avait reuni les Chefs d'Etats du Congo, du Gabon, de la Guinee Equatoriale, de la RCA, de la RDC et du Tchad, en presence notamment du Prince PHILLIP, Duc D'EDINBOURG, membre d'honneur du WWF, et des principaux des bailleurs de fonds.

* 18 Rencontre ayant eu lieu du 13 au 16 octobre 2003 a Yaounde au Cameroun,

* 19 La Rainforest Foundation en RDC, le contexte des droits des peuples forestiers

* 20 La Rainforest Foundation en RDC, Informer le developpement des politiques par la recherche et la documentation

* 21 Le nouveau code forestier congolais et les droits des communautes des forets, Kinshasa, octobre 17Th-19th, 2003

* 22 Liste harmonise des textes d'application de la loi forestiere. Reference document : FNPP/DRC - Doc 002 /2005

* 23 VUNDU MASSAMBA, °etat des lieux du processus de l'elaboration de la legislation forestiere de la RDC#177;

* 24 Voir le tableau descriptif du processus en annexe.

* 25 Paragraphe 4 du preambule de la constitution

* 26 Article 46 al 36 de la constitution

* 27 Article 51 al 1, 2, 3 de la constitution

* 28 Article 2.17 du code forestier.

* 29 Article 1.1. a) convention 169 de l'OIT ì peuples qui dans les pays independants qui se distinguent des autres secteurs de la communaute nationale par leurs conditions sociales, culturelles et economiques et qui sont regis totalement ou partiellement par des coutumes ou des traditions qui leur sont propres ou par une legislation speciale í

* 30 Article 2 al 3, 63 (3), de l'arrete relatif a l'exploitation forestiere.

Article 29 al 3, 39 al 1 projet de loi relative a la conservation de la nature.

* 31 Article 46 al 3

* 32 Article 51 al 1, 2, 3

* 33 Article 6 (4)

* 34 L'article 45 Projet de loi sur la conservation de la nature

* 35 L'article 4 Projet de loi sur la conservation de la nature

* 36 Article 14 de la constitution du 18 fevrier 2006

* 37 Article 4 projets de loi relative a la conservation de la nature

* 38 Article 13

* 39 Article 42

* 40 Article 7 al 2 decret fixant procedure de classement et de declassement des forets ; Article 5 Decret fixant modalites d'attribution des forets aux communautes

* 41 Article 10 (9), 27(8) Arrete fixant procedure d'elaboration, d'approbation et de controle de la mise en (c)«uvre des plans d'amenagement

* 42 Article 4 paragraphe 3 (2) Arrete sur l'organisation et le fonctionnement des conseils consultatifs provinciaux des forets.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld