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L'activité culinaire des étudiants étrangers

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par Frédérique Giraud
Ens-Lsh - Master 1 de Sociologie 2006
  

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a) La distance structurelle des cuisines étrangères à la cuisine française : l'exemple de la Chine

En Chine, dans la consommation alimentaire courante, les protéines apparaissent essentiellement comme un accompagnement de l'aliment de base qu'est le riz. Toutes les viandes et les légumes sont tranchés et coupés soigneusement. Les légumineuses, les haricots, pois et le soja sont éminemment utilisés. La cuisson souvent rapide permet de conserver les vitamines des légumes.

La Chine est caractérisée par un nombre gigantesque de spécialités culinaires locales. On peut toutefois distinguer dans la cuisine chinoise quatre grandes cuisines régionales39. Le découpage le plus souvent reconnu en distingue, dont la localisation géographique correspond globalement aux directions cardinales : la cuisine du Nord centrée sur Pékin et la vallée du fleuve Jaune, s'étendant à l'est jusqu'au Shandong, la cuisine de l'Ouest et du Centre occupant le Sichuan mais incluant en outre le Guizhou, le Yunnan, le Hunan et le Hubei, la cuisine du Sud-Est avec Shanghai, le Zhejiang, le Jiangsu et l'Anhui, la cuisine du Sud avec Canton, le Guangdong et à l'est le Fujian.

Cette classification assez artificielle ne tient pas compte de certaines différences importantes, mais elle répond à un souci de mise en ordre du monde en fonction de corrélations anciennes entre macrocosme et microcosme qui reliaient les points cardinaux aux saveurs, aux couleurs, aux climats, aux animaux, aux céréales... L'identification des goûts jouant un rôle particulièrement important dans la cuisine chinoise et son appréciation, les différentes cuisines régionales sont caractérisées par une ou plusieurs saveurs dominantes :

- Les habitants du bassin du fleuve Jaune au nord sont réputés pour aimer les arômes forts comme celui de l'ail, du vinaigre et de la sauce de soja. Le canard laqué de Pékin à la peau grasse et croustillante ne saurait se manger sans son indispensable accompagnement de ciboule crue et de sauce sucrée-salée tianmianjiang. De même, la viande de mouton, largement consommée en hiver dans ces régions, est associée à l'ail et à un vinaigre balsamique dont l'acidité tempérée s'accorde à merveille avec cette chair musquée.

- Au Sichuan, considéré comme la terre des aromates, on aime les épices, et en particulier les plus piquantes et les plus aromatiques d'entre elles, tels les piments et le clavalier (poivre du Sichuan). Elles parfument tous les plats avec la pâte de fèves fermentée (doubanjiang) ou l'huile et la purée de sésame, produisant des harmonies gustatives baptisées de noms évocateurs : goût étrange (guai wei), goût familial (jiachang wei), goût pimenté-parfumé (xiangla wei)

38 Pfirsch, Jean-Vincent, La saveur des sociétés. Sociologie des goûts alimentaires en France et en Allemagne, PUR, Rennes, 1997

39 Le partage de la Chine en cuisines régionales s'appuie sur une évolution historique datant du XIIe siècle, époque où la petite ville de Hangzhou, située au sud de l'embouchure du Yangzi et transformée en capitale par la Cour qui s'y réfugia à la suite de la pression barbare, devint un lieu d'échanges et de brassages intenses entre populations émigrées du nord, commerçants de l'ouest et populations autochtones. Les restaurants aux goûts des quatre horizons prospérèrent, et c'est ainsi que naquit le concept de « style culinaire régional ».

- Dans les basses plaines du Yangzi, « royaume du poisson et du riz », ce sont les tendres légumes, accompagnés de poissons et de crustacés d'eau douce, qui sont appréciés. On y prépare des plats au goût léger, subtil, exacerbé par la présence rafraîchissante du gingembre et par le coup de fouet du vin de Shaoxing. C'est la seule région où les saveurs douces et aigres-douces sont véritablement appréciées et admirablement cuisinées.

- Dans la cuisine cantonaise les produits de la mer y ont une place de choix. On en exalte la fraîcheur, en faisant cuire par exemple les poissons tout simplement à la vapeur au naturel ; la sauce d'huîtres relève volailles pochées ou légumes verts à peine ébouillantés. Mais Canton est aussi réputée pour ses cochons de lait rôtis entiers et ses viandes laquées exposées en rideaux appétissants aux devantures des restaurants.

Ces différences régionales n'excluent pas un fond commun de saveurs, de procédures et de techniques

Bien qu'il soit en effet difficile de parler d'une cuisine chinoise unique et que l'on puisse même mettre en doute son existence, trois ingrédients aromatiques, indispensables à toute expression culinaire, sont universellement employés sur l'ensemble du territoire : le gingembre frais, la sauce de soja et la ciboule, sans lesquels il paraîtrait impossible de cuisiner chinois. Leur association dans un mets apporte une touche et un parfum que l'on peut définir comme typiquement chinois.

Quant aux procédures et aux techniques, elles sont aussi communes à toutes les régions, étant entendu que certaines cuissons et façons ont été plus développées ici ou là.

Les découpages et l'assaisonnement constituent donc les deux étapes-clés de la préparation d'un mets avant son élaboration finale par le feu. Viandes et légumes sont ainsi prédécoupés, taillés, ciselés et cuits de manière à pouvoir être saisis, séparés ou déchirés par le seul recours aux deux instruments dont dispose le mangeur.

Le mode de découpage choisi pour tel ou tel ingrédient doit non seulement permettre une parfaite préhension par les baguettes mais faciliter aussi son assaisonnement. Les goûts sont ainsi exaltés par les formes choisies. L'un des exemples les plus frappants de cet accord entre forme et goût est représenté par les seiches, dont la chair est entaillée de lignes régulières et croisées qui produisent à la cuisson sa rétractation, donnant ainsi l'impression de petites fleurs dont chaque pétale s'imprègne alors parfaitement de sauce.

Tous les modes de cuisson sont pratiqués en Chine, mais le four n'existe pas à l'échelon domestique.

Les rôtissages relèvent donc de l'exercice professionnel de la cuisine et sont effectués dans de grands fours verticaux de forme tronconique. On pourrait dire que la cuisson à la vapeur tient en Chine la place que les rôtissages ont en Occident. Cependant, le mode de cuisson, considéré comme emblématique de la cuisine chinoise par les Chinois eux-mêmes, est le sauté rapide, chao. Il consiste à faire sauter très rapidement et à feu très vif les différents ingrédients d'un plat, le plus souvent les uns après les autres pour les réunir avec leur assaisonnement avant de les servir. Cette procédure permet de saisir les petits morceaux qui sont cuits très superficiellement et conservent de ce fait leur croquant, leur moelleux et leur saveur.

La cuisine chinoise est d'une remarquable économie en matière d'outils. De même que tous les découpages s'effectuent à l'aide d'un seul type de couteau, le sauté rapide, comme les autres modes de cuisson, requiert l'usage d'un seul instrument, une espèce de poêle de fer en forme de calotte, connue en Occident sous le nom cantonais de wok.

Ce que nous devrions appeler « passage par le feu » plutôt que cuisson joue un rôle capital. En effet, plus que l'idée de cuire compte celle d'« élaborer au point juste et souhaité », ce qui

signifie qu'un aliment peut, selon sa nature ou la recette, ne nécessiter qu'une cuisson très légère ou au contraire plusieurs cuissons successives destinées à lui apporter goûts et consistances variées. Ainsi, le cru n'est pas une catégorie culinaire chinoise. Tout aliment, pour paraître à table, doit avoir subi une préparation conduisant à son « élaboration au point juste et souhaité », une cuisson pour un plat chaud intégré dans un menu, ou une transformation par macération, saumurage ou conserve s'il s'agit d'un condiment ou d'un encas.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe