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Philosophie et Poésie

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par Benoit ROUILLER
UFR de Philosophie, Université de Rennes 1 - Master de Recherche 2006
  

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2. Le métier de poète 

Bien que la dissidence soit ancienne entre la poésie et la philosophie32(*), il est temps de réglementer cette dernière et d'accorder un statut de pédagogue au poète. Dans l'Ion, Platon jette sur l'activité des poètes un regard critique somme toute nietzschéen. Il analyse l'activité du rhapsode qu'il qualifie de vaniteuse. Il éclaire d'une lumière blanche et impitoyable la theia moira, cette inspiration divine ou folie désirée par les hommes. Elle fait advenir le poète, non pas comme un être divin, délié de toute contrainte sensible, mais comme un simple exécutant. Au lieu de s'élever, le poète semble n'y semble être qu'un corps. Ses gestes se réduisent à des mouvements de bras et de bouche, ordonnés par un autre qu'il ne connaît pas. Ses récitations et pantomimes le tournent finalement en dérision. Selon Platon, rien n'indique la présence d'un art véritable dont le rhapsode pourrait éventuellement s'enorgueillir. Celui-ci ne fait que réciter, mimer et reprendre maladroitement ce que d'autres faisaient déjà. Ses chants se contentent d'imiter les mythes de ses pères : Homère, Hésiode ou Archiloque. Il n'est que l'ouvrier d'une tradition séculaire dont il méconnaît aussi bien les premières intuitions que la véritable portée. L'enthousiasme poétique est donc reconduit par le philosophe et les récits des poètes, peu véridiques, y sont condamnés.

Dans la République, il semble pourtant que les poètes ont la capacité de reproduire toutes sortes de choses et de situations. Ils mettent en scène des héros, mais aussi la faune et la flore, la terre et le ciel, l'Hadès et toutes les choses qu'ils comprennent33(*). Les poètes reflètent donc l'intégralité du monde dans le miroir de leurs fables. Pourtant, Platon juge qu'ils ne produisent le plus souvent que des apparences, privant les hommes d'imitations véritables. Leurs imitations s'apparentent plutôt à des esquisses ou à des simulacres (eidôlov)34(*), tant du point de l'être que de ce qui semble être. Ces « images d'images », choisies au hasard parmi ce qui est, confondent ainsi les hommes. Elles mêlent des images qui présentent un intérêt à d'autres qui n'en ont que l'apparence. Par deux fois matérialisées, localisées et définitivement abandonnées à la contingence, les imitations des poètes égarent leurs auditeurs. Elles manquent en somme de finalité et d'intelligibilité. L'activité mimétique, pour être aussi étendue, a donc des limites nettes. Elle ne restitue qu'assez maladroitement les choses, compte tenu de leur être véritable, des idées qui sont au coeur de leurs manifestations sensibles. Le discours philosophique se confronte donc à ces "échos" ou "fantômes" pour y substituer un autre discours. Socrate fait judicieusement remarquer que les poètes sont privés du savoir des objets qu'ils imitent : « Crois-tu que si un homme était capable de faire indifféremment et l'objet à imiter et l'image, il choisirait de consacrer son activité à la fabrication des images ? ».35(*) Les poètes méconnaissent, à leur insu et jusque dans la diversité de leurs imitations, les idées qui président à leur activité mimétique. Pour Platon, il est temps qu'un savoir véritable vienne orienter l'action des poètes. Elle doit reposer sur une opinion droite (orthè doxa) et dans un métier utile.

Or, comme le rappelle Platon : « le commencement, en toute chose, est ce qu'il y a de plus important »36(*). Les fables homériques, communiquées aux hommes depuis leur plus tendre enfance, ont une réelle incidence sur l'âme. L'âme, si elle est immortelle, n'en est pas moins fragile et protéiforme. Les « fables homériques » racontées aux enfants forment leurs âmes comme la gymnastique prédispose leurs corps à certaines activités. Elles s'inscrivent comme une empreinte (tupos), de manière "indélébile" et "inébranlable". Elles sont finalement comme une "seconde nature" et fournissent des schémas d'actions quasiment définitifs aux jeunes hommes qui s'en informent37(*). Il importe donc de ne pas dire n'importe quoi, y compris aux jeunes enfants. L'activité mimètique déborde largement le cadre du simple jeu ou de l'amusement. Elle n'appartient pas seulement au genre des biens inoffensifs, agréables pour eux-mêmes et pour la joie qu'ils procurent. Elle est un de ces arts qu'il faut chercher pour leurs bienfaits, au-delà des difficultés qu'ils entraînent. L'art poétique est à l'âme ce que l'art médical est à l'esprit. Ni Homère ni Hésiode ne doivent plus échapper à un examen serré du contenu de leurs poèmes. L'adéquation aux modèles qu'ils proposent peut marquer positivement ou négativement leurs auditeurs. Ils convient donc de s'assurer de la légitimité de leurs propos.

Ce que les poètes imitent se doit d'être instructif, d'avoir une portée gnoséologique. Ils doivent permettre aux hommes de se réaliser, de conserver et d'accroître l'être qui leur revient. L'homme doit y déceler ce qui est divin, afin que son âme s'y convertisse. Ainsi, les représentations des héros ou des dieux, pour être adéquates, doivent se conformer à l'idée la plus juste qu'il est possible d'en avoir. Leur beauté doit avoir pour ascendant la bonté. C'est la raison pour laquelle le poète est blâmé « quand le mensonge est sans beauté »38(*). Les héros peuvent se montrer passionnés, s'ils montrent une véritable offense ou s'ils font preuve de courage. Les dieux peuvent être responsable de ce qui arrive aux hommes, si cela est un bien. Conformément à l'idée de Dieu, le poète doit reconnaître que : « Dieu n'est pas la cause de tout mais la cause du bien »39(*). D'autre part, il doit lui-même admettre ceci : «les dieux ne sont pas des magiciens qui changent de forme, et ils ne nous égarent point par des mensonges, en parole ou en acte »40(*). Bien que contraignantes, ces deux premières règles indiquent déjà, au-delà de la critique, deux formes positives de discours poétique. Elles énoncent des moyens pour que la poésie remédie à ses premiers travers, pour qu'elle informe utilement les hommes.

Il est encore dommageable que les jeunes soient dévalorisés par leurs pédagogues. Le poète en exercice ne semble pas tenir compte de la dimension pragmatique de son art, de ce qu'il a de bon ou de nuisible. Platon ironise donc en trouvant « charmant » le poète qui ne remplit pas la fonction qui lui est traditionnellement dévolue. Ce dernier produit des imitations sans tenir compte de leur portée. Il ne se destine pas aux gardiens, ni ne participe à la culture et à l'épanouissement des âmes des plus jeunes. C'est contre cet état de fait que Platon signale, au livre dix de la République que : « Il est de toute nécessité que l'usager d'une chose soit le plus expérimenté, qu'il informe le fabriquant des qualités et des défauts de son ouvrage et ce, par rapport à l'usage qu'il en fait »41(*). Il revient naturellement aux jeunes gens une part de science, dans les imitations des héros qu'ils s'empressent de faire. L'expérience qu'ils en font témoigne de la connaissance qu'ils en ont42(*). Les jeunes hommes s'identifient à leurs modèles selon des procédures mimétiques. Ils reproduisent leurs modèles avec invention, sans se contenter de la description qu'en a faite le poète. C'est donc au prix d'un sacrifice que le poète doit revenir, selon Platon, à des imitations utiles et bonnes. Le poète doit engendrer des imitations qui soient belles esthétiquement et bonnes éthiquement. En trouvant cet équilibre, il formerait les hommes honnêtes et bons (kaloi kagathoi) auquel il s'adresse.

Le poète doit par conséquent adopter un ton plus rigoureux. Cela signifie qu'il doit parler comme il faut, faire en sorte que ses imitations soient plus agréables, là où elles sont bonnes. Il doit satisfaire les besoins du corps, dans la mesure où ces remèdes conviennent aussi à l'âme. En pratique, il est nécessaire que le poète soit plus modéré, qu'il abandonne la démesure (hybris) caractéristique des tragédies. Il doit restreindre le champs de ses imitations car celui qui se contente d'imiter un homme dans ses traits de fermetés ou de sagesse est nécessairement meilleur que le panégyriste d'Homère, lequel se vante de pouvoir tout imiter. Il agit aussi plus efficacement et plus naturellement. Il n'a pas à avoir honte de lui-même, à la différence de celui qui produit des imitations malsaines43(*). L'orateur capable de tout imiter, en mal comme en bien, est inversement plus médiocre, vantard ou honteux. Il imite tout sans distinguer ce qui est signifiant de ce qui ne l'est pas. En règle générale, plus les imitations mélangent des modèles de valeurs inégales, moins elles sont aptes à communiquer un ethos. Conserver la même harmonie et le même rythme dans l'imitation est, au contraire, le signe d'une constance qui se transmet44(*). Pour produire des imitations mesurées, il convient de rendre sensible ce qui est intelligible, de faire en sorte que le beau coïncide avec le meilleur, non pas avec un tout indifférencié.

Se spécialisant dans certaines imitations, le poète participe à la formation de chacun. Par exemple, il a la possibilité de rendre le corps des chefs plus prudent, de même que ceux qui, en général, délibèrent des affaires publiques45(*). Il peut communiquer du courage aux gardiens et à ceux qui préservent la cité de ses maux. Il peut encore enseigner la tempérance aux artisans et à tous ceux qui sont engagés dans une recherche insatiable de profit46(*). Pour cela, le poète doit lui-même être instruit de ces pratiques. En outre, il doit connaître la vertu pour remédier à leurs manques. Cependant, au moment où écrit Platon, le poète est de ceux qui incitent à la lâcheté ! Il n'exerce de son art que ce qui est flatteur, la partie qui va dans le sens de faux-semblants, de fausses vertus mais vices biens réels. De fait, il engage les autres hommes à abdiquer devant l'effort, à céder devant la tentation et dans la facilité. Cette défaillance du poète apparaît encore dans le rapport aigu que certains héros, comme Achille, entretiennent avec la mort. En la rendant plus terrible qu'elle n'est, tout homme imprégné de ses représentations préfèrera l'esclavage à la lutte.

Comme le rappelle Céphale au livre premier de la République : « Lorsqu'un homme est près de penser à sa mort, craintes et soucis l'assaillent à propos des choses qui, auparavant, ne le troublaient pas »47(*). Ne serait-ce que du point de vue de l'opinion droite, il aurait été préférable qu'Homère s'exprime comme Pindare : « douce à son coeur / et nourrice de ses vieux ans l'accompagne / l'espérance, qui gouverne / l'âme changeante des mortels »48(*). Ce discours est d'autant plus problématique qu'il s'adresse à des jeunes gens et, pour certains, à de futurs gardiens. Leur faire croire des choses terribles sur l'Hadès leur est nuisible. S'ils en viennent à s'effrayer devant le danger, devant la pensée qu'ils puissent mourir, ils vivront nécessairement en lâches, soumis à la tyrannie des passions49(*). En outre, du point de vue de l'être, la mort fait partie intégrante du cycle de la vie. La souffrance vient de l'attachement au corps50(*). Il est absolument faux d'associer l'invisible au rien. Ce genre d'opinions n'engendre que la peur. L'invisible est certes l'Hadès, mais c'est aussi le divin, l'immortel et le sensé51(*). À suivre le mythe, l'âme immortelle retrouve dans l'Hadès ses amitiés défuntes, ainsi que les idées dans une splendeur aux corps insoutenable. Seuls certains gymnosophistes comme il en existe encore en Inde, osent affronter une lumière semblable et, face au soleil, s'aveugler définitivement. Pour Platon, tout honneur véritable consiste à demeurer, de son vivant, aussi près que possible de l'invisible, de ce qui fait sens. Seule l'action sensée, intelligible, déliée de ses attaches corporelles et de ses appétits d'un instant est significative. L'homme a donc la faculté de tempérer son corps, le fleuve de ses passions humaines. Au moment de mourir, celui qui s'est ainsi exercé à vivre n'a pas de peine à se laisser guider. C'est à cette même fréquentation des idées que doit parvenir le poète, lorsqu'il entreprend d'exercer son art. Il convient donc pour Platon d'employer les grands remèdes et d'effacer tout ce qui dans les fables des poètes est irrationnel.

Homère, le premier, se fourvoie lorsqu'il fait commettre au héros de l'Iliade un grand nombre d'exactions. Il y maltraite son rang et ses ascendances divines, ce qui a trait à sa pensée. Achille devrait normalement faire preuve de bravoure, de courage et de résolution dans l'accomplissement de ses travaux. Contre toute attente, il se lamente, il est toujours abattu et comme vaincu à la pensée de son camarade mort au combat52(*). Intempérant, les funérailles de son ami Patrocle sont pour lui l'occasion de commettre une véritable boucherie53(*). entraîné par sa colère, il tue Hector puis traîne son corps inanimé derrière son char54(*). Cupide, il n'accepte enfin de restituer sa dépouille que moyennant une rançon55(*). Démesuré, le héros de l'Iliade se montre donc très en deçà de ce qui est attendu d'un pédagogue. De son côté, Ulysse est un exemple en matière de ruse. Il n'est donc pas le héros qui pourra venir se substituer à Achille en matière de vertu guerrière. Servant de pierre de touche pour les hommes qui se destinent à garder la cité, il faut alors s'attendre à ce que leur éducation, nourrie par l'exemple de ce héros, soit mauvaise. La poésie épique ne leur sera donc pas profitable, ni pour savoir ce qu'il faut faire ni pour savoir ce qui est vraiment. Fonder l'éducation des hommes, la païdeia, sur les seuls vers homériques n'est donc pour l'heure pas viable. Au lieu de revenir, par un mouvement réflexif, à l'idée de ce qui est, les fables des poètes égarent leurs auditeurs dans des simulacres du réel. Ne sachant pas ce qu'il convient de dire ou de taire, elles ne sont finalement qu'un jeu. Ainsi, Platon nous dit avec finesse que : « l'imitation n'est pas une affaire sérieuse ; elle est plutôt une paidìa »56(*).

Le poète a donc une fonction spécifique au sein de la cité. Pour cela, celui qui s'orienterait vers la poésie ne devrait pas se trouver dans une situation indécise, telle que nous pourrions la qualifier de « précaire ». Platon nous dit que : « chacun ne peut bellement n'exercer qu'un seul métier »57(*), ce qui signifie que le champ de ses imitations doit être précisé et non pas laissé au hasard. C'est revaloriser son métier et le reconnaître comme essentiel que de le pérenniser, d'en assurer la continuité par un règlement précis. Ainsi, puisque « le même homme ne peut aussi bien imiter plusieurs choses qu'une seule »58(*), le sens de ses imitations poétiques doit être maintenu, autant qu'il se peut, dans la même direction. C'est parce qu'il occupe une place, distincte du marché, qu'il se doit d'être constant et mesuré. Il ne doit plus, par exemple, vanter les mérites de la pâtisserie attique, ni les charmes des filles de Corinthe. De telles nourritures incitent les hommes à commettre des excès. Dans ses imitations, une gymnastique simple, une musique simple et une cuisine simple doivent être privilégiées, au détriment de techniques plus élaborées. En outre, s'il n'y a pas de plaisirs plus grands que ceux de l'amour charnel, ils seront cadrés par les lois du mariage et de la procréation, ajustés à l'âge des contrevenants et aux saisons.

Avec des auxiliaires et dans la fonction qu'il occupe, dans la meilleure des République possible, le poète doit parvenir à des imitations excellentes. Dans une position essentielle, le poète poursuit deux formes poétiques : Les « hymnes en l'honneur des dieux » et les « éloges de gens de biens »59(*). Loin d'être une brimade supplémentaire, ces deux formes précisent la nature de la fonction du poète, au sein de la païdeutique athénienne. Le poète n'est plus un marginal qui erre dans les faubourgs (ou le dème) mais un membre de la cité à part entière. Il intègre la cité et, dans le même temps, Platon prévoit de lui adjoindre un « magistrat » et un « gardien ». Les charges de ces derniers seraient de veiller à l'authenticité et au respect de ces formes poétique. Le poète serait ainsi en accord avec les lois écrites et conventionnelles de la cité, de même qu'avec les lois orales et les moeurs. Le magistrat et le gardien définissent les meilleures formes poétiques et veillent à leur application. Avec ses deux auxiliaires, le poète s'incorpore à la cité dont il participe à l'accomplissement. Dans une dimension non plus sociale mais religieuse, le poète se fait alors le porte-parole de la divinité protectrice des lieux.

Platon suggère alors de choisir les poètes pour leur action personnelle et altruiste. Sans cet aspect citoyen, le poète ne sera pas vraiment poète dans la cité : « Ils les poètes auront bon posséder le génie poétique excellemment, de même que le don des muses, on ne les prendra pas s'ils n'ont jamais accompli une action d'éclat »60(*). Seuls les meilleurs, selon les points de vue artistique, politique et éthique sont retenus. Leur « éclat » doit donc aussi venir d'une action de bien, d'un engagement personnel. Cette bonne action assure concrètement la valeur et les honneurs dus au poète au sein de la pédagogie athénienne. Ainsi, le poète doit parler en son nom propre, d'un style indirect qui ne lui permette pas de se travestir derrière ses personnages61(*). Il exige de ne pas se désolidariser d'avec ce qu'il dit, de ne pas se travestir constamment comme Homère aux fils de l'Iliade et de l'Odyssée. La simple narration (diégèsis), présente dans les dithyrambes et les hommages envers les dieux est donc le remède qui s'impose aux poètes. L'idéal serait, bien sûr, qu'ils alternent le simple récit à l'imitation dramaturgique. La forme mixte est sans conteste la meilleure car le poète, ainsi que les autres êtres y parlent tour à tour en leur nom propre. Cependant, les poètes ne parviennent pas à s'approprier les personnages qu'ils mettent en scène, généralement des hommes ou des héros aux ascendances divines. Oublieuse de l'autre comme d'eux-mêmes, mieux vaut que la narration des poètes reste simple.

Le poète qui pourrait répondre à cette double exigence poïétique et de pratique est peut-être Sophocle. Platon était plus jeune que lui et il ne l'a sans doute jamais connu personnellement. Pourtant, dans le passage où est nommé le poète62(*), Platon en loue la modération, le choix pour une vie équilibrée ainsi que pour une praxis raisonnée à l'écart des passions. Il est notable que la position de Sophocle soit différente de celle d'Eschyle, condamné par Platon pour son impiété. De même, contrairement à Euripide, il ne fait pas l'éloge de la tyrannie. Il se garde donc de confondre la liberté et l'esclavage, la justice et l'injustice ou le bonheur et le malheur. À la différence des autres grands tragédiens, il semble qu'il y ait une convergence de points de vue entre Platon et Sophocle. Dans leurs oeuvres respectives, la tyrannie y est dénoncée comme un régime défiant les lois les plus fondamentales. Dans Antigone, le poète s'oppose au vouloir mortifère du tyran, Créon. Ubripolis, ce dernier ordonne de ne pas enterrer le corps de Polynice. Derrière une raison d'état (Polynice a levé une armée contre Thèbes), Créon entreprend de commander aux dieux. Il s'oppose au commandement qui exige d'enterrer les morts. Antigone porte donc à elle seule la défense d'un droit aussi fragile qu'essentiel. Callipolis, elle rend cette sépulture et rétablit le droit à Thèbes. Il revient à Sophocle la palme du meilleur poète.

* 32 Ibid., X, 606 c. Sur cette ancienne divergence, confère Les Silles de Xénophane, fragments B X à XX et Héraclite A I, XXII-XXIII et B XLII.

* 33 Ibid., X, 596 c.

* 34 Ibid., X, 598 b.

* 35 Ibid., X, 599 b.

* 36 Ibid., II, 377 b.

* 37 Ibid., II, 395 d.

* 38 Ibid., II 377 e.

* 39 Ibid., II, 380 c.

* 40 Ibid., II, 382 c.

* 41 Ibid., X, 601 d.

* 42 Ibid., X, 601 e.

* 43 Ibid., III, 396 c.

* 44 Ibid., III, 397 b.

* 45 Ibid., IV, 428 b.

* 46 Ibid., IV, 430 c.

* 47 Ibid., I, 331 a.

* 48 Bergk, Poet. Lyr. Gr. I, p. 452.

* 49 Ibid., III, 386 d.

* 50 Platon, Phédon, op. cit., 68 c.

* 51 Ibid., 81 c.

* 52 Homère, Iliade, op. cit., Chant XVIII, vers 27 à 44.

* 53 Ibid., XXIII, 175 et ss.

* 54 Ibid., XXIV, 14 et ss.

* 55 Ibid., XXIV, 502 à 555.

* 56 Platon, La République, op. cit., X, 602 b.

* 57 Ibid., III, 394 d.

* 58 Ibid., III, 395 a

* 59 Ibid., X, 607 a.

* 60 Ibid., VII, 829 c.

* 61 Ibid., III, 393 a.

* 62 Ibid., I, 329 b.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote