WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Evolution des politiques environnementales françaises sur quarante ans

( Télécharger le fichier original )
par Valérie Lacroix
Université Libre de Bruxelles - Institut de Gestion de l'Environnement et d'Aménagement du Territoire - Master en Sciences et Gestion de l'Environnement 2008
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy
Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

3. Incidence du progrès technologique

Au tournant des années 70, une foie quasi-religieuse anime les technocrates, qui croient principalement en deux solutions pour résoudre le gros des problèmes d'environnement: la réglementation et le progrès technologique. Nous présenterons les principales forces motrices qui ont porté les avancées technologiques, après quoi nous nous pencherons sur les applications technologiques aux problèmes de pollution atmosphérique par les émissions acidifiantes.

De nouveau, les rapports sur l'état de l'environnement ont guidé nos recherches. Concernant la pollution de l'air, deux articles d'experts ont été consultés:

· Knoepfel (1998), Remarques d'un observateur étranger sur la lutte contre la pollution atmosphérique en France;

· Larrue (1998), La lutte contre la pollution de l'air en France. 3.1. Forces motrices

Trois forces motrices majeures nous semblent avoir progressivement motivé le secteur privé à investir dans la recherche de solutions viables aux problèmes d'environnement:

· De nouvelles législations, notamment suite à la retranscription de directives européennes, ont favorisé une hausse des normes de santé. Ainsi, au début des années 90, l'UE a instauré des normes concernant l'essence sans plomb, résultant à des améliorations conséquentes au niveau de la santé. De façon générale, «Une voiture commercialisée aujourd'hui émet dix fois moins de polluants qu'une voiture commercialisée dans les années 70.» (Ifen 1999: 369)

· L'augmentation des prix des matières premières et de l'énergie primaire a également motivé les entreprises à diminuer l'intensité de leur consommation. «À la fin de la décennie 80, la notion d'éco-efficacité a été introduite dans l'industrie, comme moyen de réduire l'impact sur l'environnement tout en accroissant la rentabilité. » (PNUE 2002)

· L'investissement de l'Etat dans les procédés de dépollution (eau, déchets) représentait - et représente toujours - une manne économique susceptible de mener à de nouvelles techniques. Ainsi, une évaluation sur 20 ans d'environnement en France constate que «c'est

essentiellement dans les domaines où l'environnement réussira à acquérir un certain poids économique que les progrès réalisés seront les plus rapides ». (Theys 1998 : 29)

Le fruit de cette évolution sur 20 ans - au niveau technologique ainsi qu'au niveau de la perception - et l'inclusion de l'économie dans la notion de développement durable par le rapport Brundtland mènent à l'acceptation publique de la sphère environnement par le secteur privé.62 Cependant, malgré la disponibilité de technologies propres, celles-ci prennent parfois des années à outrepasser les multiples obstacles économiques, politiques ou sociaux63. Par exemple, les petites et moyennes entreprises mettront globalement plus de temps que les grandes entreprises à moderniser leurs installations du fait des coûts élevés et/ou de législations moins contraignantes à leur égard.

Autre exemple: «Les technologies disponibles permettent d'envisager la construction de voitures consommant entre un quart et un tiers de carburant en moins. Ces voitures pourraient coûter moins cher à l'automobiliste sur la durée de vie complète du véhicule (frais de carburant compris), mais seraient un peu plus chères à l'achat, si bien que les constructeurs y voient un risque excessif. » (Ifen 1999 : 21)

3.2. Application à la lutte contre la pollution atmosphérique

Nous tenterons de déterminer le rôle des avancées technologiques dans la diminution des émissions atmosphériques de SO2 et de NOx, principaux composés acidifiants. Décelé vers la fin des années 60 par l'acidification des lacs scandinaves, le problème des pluies acides est intéressant en cela qu'il représente le premier cas de pollution transfrontalière et qu'il a abouti à une gestion globalement efficace.

Nous avons choisi de mettre à profit les graphiques 13 a et 13 b (en annexe) émis par le Centre Interprofessionnel Technique d'Etudes de la Pollution Atmosphérique (CITEPA) car ils mettent en lumière le poids marqué de certains secteurs sur les émissions, à savoir l'énergie et l'industrie pour le SO2 et le transport pour le NOx.

En France, les émissions de SO2 croissent jusque vers le milieu des années 70; se stabilisent et se découplent du PIB entre 1975 et 1980; plongent de manière spectaculaire entre 1980 et 1985 et continuent à baisser par après. Les émissions ont ainsi diminué de 60 % entre 1980 et 1990 et de 65 % entre 1990 et 2005.

Les émissions de NOx diminuent et se découplent temporairement du PIB vers le milieu des années 80, mais la baisse prononcée débute véritablement vers le milieu des années 90. La réduction se chiffre à 38 % entre 1980 et 2005 (dont 35 % entre 1990 et 2005), soit environ quatre fois moins que la réduction des émissions de SO2 sur la même période.

En Europe de l'ouest comme en France, les émissions de SO2 et de NOx présentent aujourd'hui un net
découplage par rapport à la croissance du PIB. Les progrès technologiques ont joué un rôle majeur

62A titre d'exemples:

- la création du Conseil mondial des entreprises pour le développement durable en 1995

- la création d'ISO 14000, norme volontaire pour les systèmes de gestion environnementale dans l'industrie, en 1996

- la tendance auprès des grandes entreprises de présenter des rapports sur leur action environnementale (PNUE 2002)

63 «L'Union européenne adopte un plan d'action pour promouvoir les écotechnologies (technologies ayant moins d'effets négatifs sur l'environnement que d'autres techniques appropriées) afin de réduire la pression sur les ressources naturelles, d'améliorer la qualité de vie des européens et de favoriser la croissance économique. Ce plan d'action cherche à éliminer les obstacles à l'exploitation de tout le potentiel des écotechnologies, à faire en sorte que l'Union joue un rôle dominant dans leur application et à mobiliser toutes les parties concernées dans la poursuite de ces objectifs. » (UE)

dans cette évolution. La mise en place d'équipements de désulfuration des gaz de combustion et le recours à des combustibles à teneur en soufre moindre représentent les principales améliorations technologiques qui ont permis de réduire les émissions de SO2. Concernant la baisse des émissions de NOx, l'équipement progressif du pot d'échappement à convertisseur catalytique a éliminé près de 90 % des rejets de NOx par véhicule. De manière générale, le développement des économies d'énergie a également largement contribué à la réduction des émissions des secteurs énergétique et industriel.

La France se distingue de la moyenne européenne principalement au niveau de l'évolution des émissions de SO2. Débutant avec un léger retard par rapport à plusieurs pays qui affichaient une baisse des émissions dès le milieu des années 70 (OCDE 1991: 21), la France s'est rapidement rattrapée par la combinaison de trois facteurs primordiaux:

· les économies d'énergie

· le développement rapide du programme électronucléaire

· la mise en place d'équipements de désulfuration des gaz de combustion au sein des centrales thermiques maintenues

Entre 1974 et 1985, les économies de combustibles liquides ont en effet contribué pour environ 25 % aux réductions totales de SO2 (ME 1990: 145).

Quant à la substitution énergétique, le graphique 3 témoigne d'une multiplication par trois du pourcentage d'énergie nucléaire en parallèle à une division par deux du pourcentage d'énergie thermique entre 1980 et 1990. Ainsi, en 1994, les centrales thermiques ne contribuaient plus qu'à 19

% des émissions nationales de SO2 comparé à 55 % pour l'UE-12 en 1993 (Ifen 1997 : 25).

Propres à l'Europe en général, «les progrès les plus récents résultent des actions développées par les exploitants industriels favorisant l'usage de combustibles moins soufrés.» Il est intéressant de noter que le PNE appréhendait une stabilisation des émissions de SO2 autour de 1 ,4MT au cours des années 1990-95. (ME 1990: 27) Or le développement de la technologie a permis à la France de maintenir la baisse des émissions et de continuer à figurer parmi les bons élèves. En 2000, les émissions de SO2 de la France étaient ainsi de 0,4 kg/1000 unités de PIB comparé à une moyenne de 1 pour les pays de l'OCDE Europe (OCDE 2005: 43). Notons qu'en France, la principale réglementation appliquée au niveau de la pollution industrielle est le BATNEC, ou meilleures technologies disponibles n'entraînant pas de coûts excessifs. (Chabason et Larrue 1998 : 76)

Le développement du programme électronucléaire explique la légère baisse des émissions de NOx en France vers le milieu des années 80. Cependant, dans l'ensemble, la France ne se démarque pas de la moyenne européenne. Compte tenu du poids important du transport routier dans la provenance des émissions de NOx, l'intensification du trafic routier et l'augmentation du parc de véhicules fonctionnant au diesel (particulièrement important en France, puisqu'il a triplé au cours des années 90) ont largement modéré les effets des progrès technologiques (pot catalytique pour le cas du NOx).

L'exemple des émissions de SO2 et de NOx met en lumière une corrélation plus forte entre la disponibilité de techniques plus propres et la prise d'action pour réduire la pollution, qu'entre l'urgence environnementale et la prise d'action. Ainsi, «le NOx est plus agressif et plus dangereux [que le SO2] pour la santé du fait de sa transformation en ozone sous l'influence de la lumière du soleil ». (Knoepfel 1998 : 167) Or les efforts se sont d'abord concentrés sur les émissions de SO2, pour lesquelles des technologies plus propres étaient disponibles dès les années 70.

Ces cas d'étude nous apprennent également que, si les avancées technologiques mènent à un début de réduction de la pollution, l'évolution sur le moyen terme dépend largement de politiques dont la finalité n'est pas essentiellement environnementale (développement du nucléaire et efficacité énergétique dans le cas du SO2) ou d'évolutions structurelles profondément ancrées (augmentation du trafic routier dans le cas du NOx).

La réduction des émissions de SO2 représente le succès le plus notable de coopération internationale en vue de réduire la pollution de l'air dans les pays industrialisés. Combinée aux réductions de NOx, elles ont permis d'éliminer la majeure partie du smog et des pluies acides.

Cependant, malgré une diminution des gaz acidifiants de plus de 40 % dans l'UE-15, des problèmes persistent suite à l'effet retard des polluants. Ainsi, quarante ans après avoir suscité l'attention de la communauté internationale, bon nombre de lacs suédois demeurent affectés par l'acidification du passé. De même, plus d'un cinquième des forêts sont toujours considérées comme endommagées. Et conséquence des émissions récentes, quelque 10 % des écosystèmes européens ont dépassé leur seuil critique de dépôts acides en 2004.64 (AEE 2005 : 97)

Au niveau des réponses à ces problèmes de pollution, nous constatons que les secteurs économiques n'ont pas contribué de manière homogène à réduire leurs parts d'Aeq65. Alors que les secteurs de la transformation d'énergie et de l'industrie manufacturière y ont largement contribué par la baisse des émissions de SO2, les actions entreprises par le secteur des transports pour diminuer les émissions de NOx n'ont pas suffi à contrecarrer l'augmentation du trafic routier, et enfin, le secteur agricole66 n'a pratiquement pas contribué à réduire ses émissions de NH4. Cette hétérogénéité des actions explique l'évolution dépeinte par le graphique 13 c (en annexe): entre 1980 et 2005, la part des émissions de SO2 contribuant à l'Aeq baisse de 36 %, tandis que celles des émissions de NOx et de NH4 augmentent respectivement de 9 % et 27 %.

«Si jusque-là la pollution de l'air était essentiellement considérée par les pouvoirs publics comme une pollution d'origine industrielle, la loi sur l'air de 96 introduit une nouvelle perspective en recentrant l'action de prévention de la pollution atmosphérique sur la pollution des véhicules automobiles.» (Larrue 1998: 137)

Notons cependant que, dans le cas du S02, la pollution industrielle est encore dominante aujourd'hui ! Ainsi, Lascoumes et Le Galès appliquent leur hypothèse selon laquelle «l'instrument induit une problématisation particulière de l'enjeu» au cas de la pollution de l'air: « L'orientation principale vers l'information grand public a progressivement orienté l'essentiel du contenu des messages diffusés vers la question des seuls effets de la circulation automobile. (...) Par contrecoup, l'autre dimension plus ancienne, celle de la pollution industrielle qui continue à constituer le fond de la pollution atmosphérique tend à disparaître de l'information. » (Lascoumes et Le Galès 2004 : 33-34)

En guise de conclusion, citons le dernier rapport du PNUE:

« L'attention de la politique environnementale de l'UE s'est déplacée de l'utilisation de mesures correctives dans les années 70, à des solutions de réduction de la pollution en fin de chaîne dans les années 80 puis, dans les années 90, à une prévention et un contrôle de la pollution intégrés, tirant profit des meilleures techniques disponibles. Aujourd'hui, les politiques vont au-delà de ces solutions techniques afin d'agir également sur les modèles et moteurs d'une consommation et d'une demande non durables, et se dirigent vers une approche intégrée de ces questions se concentrant sur la prévention. » (PNUE 2007 : 227)

64 Nous avons choisi de traiter des impacts des pluies acides au niveau européen étant donné qu'il s'agit d'un enjeu régional. De plus, le territoire français n'est que partiellement affecté par les pluies acides (essentiellement le nord-ouest).

65 «L'indicateur "acide équivalent" (Aeq) vise à caractériser la quantité globale de substances rejetées dans l'atmosphère qui contribuent, à des échelles géographiques et temporelles variables, aux phénomènes d'acidification des milieux terrestres, aqueux et aériens. » (CITEPA)

66 « Les émissions d'ammoniac [NH4] de l'agriculture sont difficiles à calculer et encore plus compliquées à contrôler. Elles devraient s'être largement stabilisées en même temps que le nombre de têtes de bétail des exploitations agricoles européennes. » (AEE 2005 : 93-97)

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand