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Paradoxe d'apprentissage dans les partenariats d'innovation

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par Mohamed RAOUAK
Sup de Co Montpellier - MBA 2008
  

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10.Discussion et Conclusion

Cette étude a traité le thème de la gestion des compétences stratégiques au travers de trois dimensions : contrat, relation, modularité. La littérature est moins prolixe, à notre connaissance, sur le rôle de la dynamique de ces trois dimensions par rapport au paradoxe d'apprentissage. La modularité technologique et organisationnelle voire interorganisationnelle est de nature à faciliter la résolution de la tension entre partager et protéger ses compétences. En plus de mécanismes de gouvernance adéquats, la modularité structure les relations et clarifie les responsabilités. Par le moyen de deux cas empiriques riches d'enseignements (grandes et moyennes entreprises dans un secteur de haute technologie), on a indiqué le rôle central de la configuration modulaire combinée avec la gouvernance transactionnelle et relationnelle sur le transfert (positif et négatif) des compétences.

Le premier cas concerne un intégrateur de systèmes (NextSol) qui gère des plateformes propriétaires auxquelles il adjoint des modules importés de l'extérieur ou développés en interne. Au travers des interfaces imposées à son partenaire, il offre à ses clients fabricants d'équipement originaux (OEM) plus de souplesse et de réactivité. MediaPlug protège sa technologie et NextSol n'exclut pas de la développer en interne. L'expérience de celle-ci en gestion d'alliances lui permet de contrôler sa relation avec ses partenaires. En termes de transfert de compétences, officiellement le transfert est limité mais les demandes du client final ont provoqué des modifications dans le module initial et des connaissances tacites ont été échangées de part et d'autre. La modularité résiste mal aux changements importants. Autrement dit, la modularité encapsule les connaissances et simplifie le processus de coordination tant que les modifications sont incrémentales. Cela a eu des répercussions sur la gouvernance qui a glissé, au fur et à mesure, vers plus de relationnel.

Le deuxième cas est celui d'une société OEM (LabsNord) qui fait appel à un ODM pour la réalisation de produits de niche. Elle externalise toutes ses activités R&D sauf la conception du design mécanique et de l'IHM. Ces parties du produit sont conçues en modules et font l'objet d'un accord de développement conjoint. Les interactions entre les deux organisations sont plus importantes car même si les modules sont conceptuellement bien définis, les interfaces sont instables à cause de la nature des modules mécaniques. D'autant plus que les personnalisations d'un produit à l'autre sont confidentielles et exacerbe la tension entre le partage et la protection des informations critiques. Tout cela montre que moins de modularité provoque plus d'interactions et donc plus d'échange d'informations. Des mécanismes de contrôles complémentaires sont nécessaires pour protéger des connaissances critiques.

S'appuyant sur les données collectées, on peut affirmer que la modularité est nécessaire pour protéger les compétences stratégiques de l'entreprise. Toutefois, il faut qu'elle soit accompagnée d'autres dispositifs comme les mécanismes de gouvernance au niveau formel et relationnel.

Discussion

Nous avons proposé une évolution de l'industrie des télécommunications qui a commencé dès la fin des années 90. Auparavant, les sociétés intégraient toutes les activités en leur sein depuis la définition du produit jusqu'au service client. La désintégration verticale s'est opérée par paliers en commençant par la production. Or ce qui est rarement mis en avant est que les activités R&D sont dorénavant partitionnées en modules et confiés à des sociétés spécialisées. Si on prend l'exemple des activités R&D logiciel, une société intègre des modules provenant de l'extérieur tout en essayant de développer des compétences sur les technologies importées. En tant que « system integrator » cette société dispose de plus de souplesse pour gérer ses lignes de produits et répondre rapidement aux aléas du marché. Cela a été rendu gérable grâce à la modularité. Les entreprises associées à la réalisation des produits ne contrôlent que leur module propre et son interface avec l'extérieur.

L'industrie des télécommunications s'inspire partiellement de celle des ordinateurs personnels (PC). Pour des raisons de concurrence et de complexité des technologies la modularité ainsi pratiquée n'est pas totalement ouverte et les interfaces ne sont pas toutes standardisées. Nokia n'a pas réussi à imposer sa plateforme Symbian. La plateforme Windows Mobile veut s'imposer en face de Linux qui gagne du terrain. Ces trois cas illustrent le dynamisme de ce secteur qui, malgré tout, n'évoluera pas rapidement vers la standardisation tout azimut.

Limites

Nos deux cas concernent des sociétés ayant un lien avec des partenaires mondiaux mais opérant sur le plan national. Nous avons fait nos analyses des phénomènes comme s'il s'agissait d'alliances internationales. Certaines affirmations gagneraient à être revues en les plaçant dans leur contexte exclusivement national. D'autant que la littérature a beaucoup insisté sur les grappes (clusters) technologiques (voir par exemple De Propris 2002; Schilling & Thérin 2006; Lawson & Lorenz 1999).

Notre analyse s'est concentrée sur l'aspect dyadique des relations. Or les entreprises approchées font partie de réseaux et quelques unes d'entre elles y occupent une position importante. Les influences liées aux réseaux ont été volontairement occultées.

D'autre part, notre méthodologie s'est concentrée sur les sociétés clientes uniquement. Pour compléter l'étude, cela aurait été utile de questionner leurs vis-à-vis afin d'avoir les deux versions. L'étude aurait eu encore plus de pertinence.

En termes de retombées des relations, nous nous sommes contentés d'avoir les avis des questionnés. Par manque de ressources, nous n'avons fait aucune mesure quantitative des retombées principales. Par exemple, la capacité d'innovation aurait pu être mesurée par le nombre de brevets produits au cours de ces alliances, le nombre d'innovations commercialisées et leurs contributions financières respectives. Mais comment mesurer le niveau d'expropriation ? De protection ? D'apprentissage ?

Cette étude aurait pu s'orienter vers une configuration représentative de la chaîne de valeur complète et adresser les principaux acteurs de chaque entité. L'adoption longitudinale de la recherche contribuerait à extraire des données pertinentes sur la dynamique entre la transaction, la relation et la modularité. Cela aurait permis des généralisations intéressantes pour l'avancée des débats théoriques et managériaux. C'est un projet possible à condition d'y mettre des moyens suffisants.

Apport

Les deux cas concernent respectivement un gestionnaire d'architecture/modules et un gestionnaire de modules uniquement. Cela donne deux angles de vue sur le phénomène. D'un côté on a l'architecte (NextSol) et de l'autre on a le concepteur de modules (LabsNord), chacun dans sa configuration propre. Un cas est l'inverse de l'autre. D'autant plus que ce sont là deux cas qui ne sont pas placés au même endroit sur le continuum transaction- relation. L'un est plus contractuel que relationnel à l'inverse de l'autre. Le degré de la formalisation du premier est justifié par le niveau de modularité et le degré de l'informel du deuxième est dû à l'incertitude du module à concevoir ensemble.

A notre connaissance, le secteur des télécommunications a bénéficié de moins d'attention des chercheurs comparé au secteur de la biotechnologie et le secteur des semi-conducteurs. Est-ce que parce que ce secteur est plus développé en Europe qu'aux Etats-Unis ? Ce secteur ne peut être identifié ni à celui des ordinateurs personnels ni à celui des semiconducteurs malgré certains points de convergence. Notre étude a ceci d'intéressant qu'elle appelle à plus d'initiatives dans l'analyse des pratiques de ce secteur.

Cette étude a des implications managériales en ce sens qu'elle éclaire l'autre bénéfice de la
modularité au niveau des relations interentreprises à savoir la protection des actifs
intangibles. Au niveau pratique, la protection contre les risques d'expropriation ne sont

souvent envisagés qu'en termes légal et formel. La modularité peut être intégrée ex-ante comme un critère de décision de collaboration ou de définition des périmètres de cette collaboration.

Notre recherche contribue à mettre la modularité au centre de la protection des compétences stratégiques. Mon contact avec le professeur Carliss Baldwin13, spécialiste dans ce domaine, me l'a confirmé d'autant plus qu'elle m'a informé (par mail) qu'elle travaille sur une problématique liant la modularité et la propriété intellectuelle. Elle m'a fait part d'une présentation faite en Europe sur le sujet.

Suggestions

Nous avons traité le paradoxe d'apprentissage en nous plaçant dans un contexte social et économique stable. Or le secteur des télécommunications comme bien d'autres est confronté aux aléas des fusions/acquisitions et à la rotation du personnel intra et inter- industries. D'autres perspectives de la tension entre le partage et la protection des compétences stratégiques méritent d'être considérées. De plus, il est intéressant de traiter des cas similaires en intégrant d'autres paradoxes : ceux de la modularité.

NextSol a décidé d'acquérir son partenaire MediaPlug après une première expérience. Cet aspect n'a été qu'effleuré dans cette étude malgré le grand intérêt de l'opération tant au niveau managérial que théorique. Peu d'études, à notre connaissance, ont été consacrées à la transformation des alliances contractuelles en acquisitions ou prise de participation. La contribution de Hagedoorn & SadowskiI (1999) est, cependant, à signaler et peut servir de point de départ à plus de contributions.

13 http://www.people.hbs.edu/cbaldwin/

Abréviations

CMMi : Capability Maturity Model® Integration EMS : Electronics Manufacturer Service

GPA : General Purpose Agreement IHM : Interface Homme Machine

IPR : Intellectual Property Rights

ISV : Independent Software Vendor KBV : Knowledge-Based View

MMI : Man Machine Interface

MNC : Multinational Company

NPD : New product development

ODM : Original Design Manufacturer OEM : Original Equipment Manufacturer R&D : Recherche et Développement RBV : Resource-Based View

TCT : Théorie des Coûts de Transaction

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote