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Les femmes migrantes et le VIH/SIDA a Poitiers

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par Jeanne Finda MILLIMONO
Universite de Poitiers - Master  2001
  

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3. Analyse

Je peux souligner une certaine contradiction dans le discours de Fatoumata : d?un côté, elle dit avoir eu la chance d?être tombée sur un bon médecin et de l?autre, accuser le système d?être en partie responsable de ses malheurs. Elle fait une distinction, d?un côté, elle met le médecin et les associations et de l?autre côté elle met le système administratif à part.

«Dans le système administratif de la santé il ya rien à dire ; il est défaillant. Bon, je parle pour moi (silence), certes il y a l'AME qui est mis en place pour les personnes sans papiers mais bon on te retarde tellement, que finalement tu ne sais plus quoi faire. Je te dis et je te le redis, être étranger amène déjà une précarité. Maintenant, il y a quand même tout un système qui est mis en place pour venir en aide aux migrants Mais, je pense qu'il y a un certain discours qui est quand même défavorisant et en plus, ce que je trouve dommage, ce sont les remarques qui tuent provenant de certaines personnes du corps médical. En tout cas, il y a une grande différence entre mon médecin et les gens que j'ai rencontrés au sein des associations Ils m'ont aidé, ils ne m'ont pas jugé, ils m'ont pris telle que je suis venue. Une fois je suis allée accompagner une amie à la préfecture ; si tu voyais comment ils l'ont renvoyé chez elle. C'est fou après cela tu as la haine. Un jour, un laboratoire et une pharmacie ont refusé de s'occuper de moi soit disant que j'ai l'AME et qu'ils ont toujours des problèmes avec l'AME des étrangers sous entendue nous les personnes migrantes Moi, je dis

il faut repenser le discours émit, peut être faire une prévention par les migrants eux-mêmes en gros au lieu de nous donner le poisson qu'on nous apprenne à prcher le poisson.»

Ce récit montre que Fatoumata croit aux systèmes de santé et à tout ce qui est mis en place afin de les aider à mieux vivre leur séropositivité. Mais d?un autre côté, il suffit qu?elle soit confrontée à une difficulté pour mettre tous ses «malheurs» sur le système de santé et le service administratif.

Alors qu?on pourrait penser que les femmes migrantes une fois leur séropositivité connue se préoccuperait de leur santé, ces femmes pensent en tout premier lieu à l? origine de leur contamination, et ensuite à tout ce que la maladie engendre (exclusion, discrimination, mobilité etc.). L?accès aux soins est quelque chose qui vient en dernier lieu. Ce n?est pas une priorité chez ces femmes contrairement à ce qu?on pourrait croire. Généralement, ces femmes n?arrivent pas à déterminer exactement l?origine de leur contamination, mais elles continuent à vouloir la trouver. Ce n?est qu?une fois qu?elles arrivent à comprendre comment vivre au milieu des gens de leur communauté avec leur séropositivité et avoir une situation qu?elles appellent «normale» c'est-à-dire avec régularisation des papiers, trouver un bon logement etc. c?est seulement là, qu?elles pensent à leur santé. Dans le cas de Fatoumata, elle est un peu désemparée entre s?occuper de la santé de son enfant et trouver un lieu où rester sans que sa séropositivité ne soit jamais connue.

Hormis le fait que le VIH/SIDA est perçu comme un stigmate, une exclusion, source de mobilité, c?est aussi perçu comme un malheur et une honte mais renvoie aussi une certaine image négative de soi.

C?est un malheur puisque, cela les revoit à une situation d?impuissance. C?est une fatalité, ces femmes savent qu?elles ne vont pas guérir de la maladie. Il y a bien sür les traitements efficaces qui permettent de vivre plus longtemps avec la maladie et ne pas atteindre le stade du VIH/SIDA mais le malheur est souvent plus associé à une souffrance morale. Morale, parce que ces femmes sont le plus souvent confrontées à un silence : c?est un lourd poids pour elle. Le fait de ne pas dire leur séropositivité les travaille psychologiquement donc, le SIDA est un malheur, il renvoie très souvent un discrédit sur les personnes séropositives.

C?est une honte puisque, la personne qui est malade du SIDA au sein d?une famille véhicule une mauvaise image de la famille. La famille dont est issue la personne est mal vue au sein de la communauté dans laquelle elle vit. La famille préfère exclure la personne déviante que de la garder au sein de la famille. Etre porteur du VIH, c?est forcement avoir eu une débauche sexuelle. C?est source d?exclusion au sein de la famille qui est l?une des plus grandes punitions pour un être humain. Ce témoignage illustre bien ces propos.

«La plus grande douleur est de ne pas avoir d'amis, d'ame soeur. Pour nous, la clé c'est la notion de honte. Si vous faite honte à quelqu'un c'est très grave. La personne qui a le SIDA n'est pas un individu isolé, elle appartient à un clan, à une tribu, et finalement à une société. Et sa propre honte rejaillit sur le reste de la famille. La cause de la maladie étant souvent liée au sexe, la principale réaction est : "C'est toi qui l'a cherché, c'est toi qui va payer". Donc la famille te rejette..Et la plus grande punition pour un Africain, c'est l'isolement». (n° spécial remaides, novembre 2005, p30)

L?image de soi renvoie à comment ces femmes se perçoivent mais aussi aux regards des autres sur elle. Ces femmes pensent qu?être porteuse du VIH se lit sur leur visage. Ainsi, sans le vouloir ces femmes s?auto excluent. Les femmes interviewées font attention á toujours être bien présentables. Depuis l?annonce de leur séropositivité, elles n?ont pas eu de relations sexuelles, elles pensent que leur corps est sale et donc, le fait d?être nu devant un homme est inconcevable. Il leur faut du temps avant d?accepter ce corps qui se change et se transforme. Le regard des autres sur ces femmes se traduit par leur réaction, et leur attitude en présence de ces femmes. Et ceci est souvent mal vécu par ces femmes. Le reflet de l?image négative du VIH/SIDA contribue à construire l?image de soi de la personne séropositive.

"Tu ne vois pas comment elle a maigri ?" Cette simp le phrase équivalait à une véritable

condamnation. Je me suis retrouvée du côté des personnes à la "minceur suspecte". (Femm'info, p24)

La perception du VIH/SIDA est vu ici d?un point de vue plutôt comportemental, c?est un construit social. Ces femmes pensent que le VIH/SIDA est source de beaucoup de maux qui, selon elles, n?ont pas lieu d?être. Pour ces femmes tout est façonné dans la société dans laquelle elles vivent et cela quelque soit le lieu où elles résideront.

IV : Rapport au risque et protection de soi

Le rapport que les femmes ont du risque, c?est la protection de soi. En se protégeant, elles protègent les autres. Elles évitent toute relation sexuelle qu?elles perçoivent comme seul moyen de se préserver. Mais aussi un moyen qui peut leur éviter de révéler leur séropositivité. Les propos qui suivent illustrent le rapport que les femmes interviewées ont du risque.

«Tu veux parler de quel risque, je suis déjà séropositive. Mais bon, avant l'annonce de ma séropositivité, je savais déjà ce que c'est qu'~tre séropositive. Une fois, j'ai rencontré les volontaires d'Aides qui faisaient de la prévention dans un salon où j'ai l'habitude de me faire coiffer. J'ai pu échanger avec eux mais bon bien avant ça je voyais toutes les campagnes de préventions faites sur le VIH/SIDA. Avec eux, on a discuté des risques que l'on pouvait encourir. On a échangé sur les différentes choses qu'on pouvait mettre en place afin de limiter les risques d'infections. En ce temps, j'étais encore séronégative. Maintenant, le risque pour moi c'est d'éviter l'une des maladies opportunistes. Pour cela, le plus simple, c'est de ne pas avoir de rapport sexuel. Tu me diras il y a pas que cela. Il faut se protéger contre les maladies, et surtout des attitudes des autres, sinon on se laisse facilement abattre, mais il faut aussi adopter une nouvelle hygiène de vie. Je fais attention à ce que je mange, à ce que je bois, en gros à mon mode de vie.» (Mary)

«Moi, je n'ai pas de rapport avec le risque puisque, je viens d'apprendre ma séropositivité. J'essaye tant bien que mal de me protéger de la méchanceté de mes compatriotes. (Long silence). Je sais avec qui je peux parler de cette maladie. C'est un risque de se prostituer, mais j'avais toujours fais attention à ne pas prendre de risque en me préservant et en me faisant dépister au moins une fois par mois. Je ne sais pas ce qui s'est passé, tu sais le préservatif peut se percer, ou je ne sais pas. Le risque c'est de faire attention et éviter tout rapport sexuel. Mais il faut aussi que je change de mode de vie et intégrer de nouvelles règles dans ma vie.» (Fatoumata)

«Le rapport au risque c'est quoi. Les risques se trainent à nos côtés et surviennent au moment où on les attend le moins. Je fais attention à moi et à ce que je fais et j'essaye de vivre ma vie. Ce dont je suis sûre, je suis séropositive et c'est irréversible. Je me protège en évitant tout

rapport sexuel, ainsi je me protège. Mais je fais aussi attention à ce que je mange, ce que je bois, j'ai appris à vivre autrement avec le VIH/SIDA. Tu sais, si on ne fait pas attention, on peut se choper n'importe quelle maladie. Donc comme je te l'ai dit faire attention, mais vraiment à tout.» (Lydia)

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote