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Journalisme et société : analyse d'une influence

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par Papa Samba DIOUF
Institut Mariste d'Enseignement Supérieur - 1ère Année de Licence Professionnelle 2009
  

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Conclusion................................................................................................22

Bibliographie.....................................................................................23

Webographie.....................................................................................24

Annexes 1........................................................................................25

Annexe 2..........................................................................................27

Introduction

Afin de valider notre première année de licence à l'Institut Mariste d'Enseignement Supérieur, chaque étudiant doit rédiger un mémoire. Ce mémoire est une étape importante pour nous, non seulement du point de vue de la scolarité, mais aussi d'un point de vue personnel. C'est dans cette perspective que j'ai passé mon stage à Canal Infos News en vue d'approfondir le thème de mon mémoire professionnel qui porte sur l'influence du journaliste sénégalais sur la société dakaroise. Il convient ici, en tant que futur diplomate, de m'interroger sur l'influence bonne ou mauvaise des journalistes sur la société dakaroise et de voir le pourquoi cette influence.

La place des médias au Sénégal est due à l'histoire de notre pays. Elle est liée à l'histoire coloniale et missionnaire. Les habitants des quatre communes (Saint-Louis, Gorée, Rufisque et Dakar) de plein exercice vivaient une activité médiatique intense (importante). A partir de l'indépendance, le transfert des technologies et l'ouverture du Sénégal au reste du monde a davantage contribué au développement des médias ; à Dakar en particulier qui était la capitale de l'Afrique occidentale française (AOF). De ce fait, le Sénégal est l'un des premiers pays africains à avoir connu la diversité dans ce domaine. Mais durant cette période, la préoccupation des journaux fut essentiellement politique. C'est seulement à la fin des années 1980 qu'on assiste à la libéralisation avec l'avènement de journaux privés d'informations générales.

« Il n'y a jamais de liberté sans responsabilité et les limites de la liberté, c'est justement la responsabilité » disait Hubert BEUVE-MERY1(*), le fondateur du quotidien français Le Monde. Les professionnels des médias ont de tout temps et à divers endroits de la planète, revendiqué cette liberté sans laquelle ils ne pourraient pas accomplir convenablement leur travail. Pour l'accompagner, pas question que le pouvoir étatique intervienne, ils pensent à l'autorégulation car : « le journaliste n'accepte en matière d'honneur professionnel, que la juridiction de ses pairs, à l'exclusion de toute ingérence gouvernementale ou autre »2(*). Liberté et responsabilité seraient donc les deux versants indispensables pour le développement harmonieux des médias, le premier étant assuré par la législation d'un pays tandis que l'autre est du ressort de la profession. Telle est, en tout cas, la vision globale des codes et chartes internationaux qui ont inspiré les textes nationaux qui régissent les médias dans les pays démocratiques.

Cependant, autant la censure est contraire à l'affirmation d'une presse libre, autant les dérapages liés à un excès de liberté sont nuisibles à une presse qui se veut de qualité. Et si les professionnels parlent de responsabilité ou d'autorégulation cela veut dire qu'ils reconnaissent les dégâts que pourraient causer les dérives de certains d'entre eux en usant de cette liberté. Au Sénégal, les journalistes jouissent d'une liberté leur permettant d'aborder les sujets de leur choix pour mener leurs investigations. Au nom de cette liberté, les médias ont toujours revendiqué leur rôle civique en se considérant comme des « sentinelles de la démocratie »3(*). Mais, cette liberté tant louée et si salvatrice semble produire un effet des moins inattendus. Au cours de ces dernières années se sont produits pas mal de dérives et de manquements manifestes aux principes éthiques et déontologiques qui sont sensés régir la profession. C'est ce qui nous pousse à nous interroger sur l'influence du journaliste sénégalais sur la société dakaroise.

Dans ce travail, nous nous intéresserons à la question suivante : Comment expliquer l'influence du journaliste sénégalais sur la société dakaroise ?

Notre analyse nous amènera d'abord à faire le point sur la problématique et les hypothèses. Ensuite, il sera question de la définition du journaliste. En dernier lieu, nous présenterons le rôle de la presse ; en particulier du journaliste dans la société dakaroise.

I. Problématique et Hypothèses

Dans nos sociétés, les médias jouent un rôle éminent, entretenant un lien social minimal entre des individus que les modes de vie contribuent à isoler et garantissant une communication minimale entre les gouvernants et leurs assujettis. Dès lors, on ne peut que s'interroger sur le pouvoir des médias et de ceux qui y diffusent des informations, surtout quand la stricte étymologie du média-médiateur (celui qui est au milieu, qui assure le contact) est dépassée au profit d'un média-acteur (qui joue un rôle propre et autonome influant sur ce qu'il est censé simplement relayer). Le comportement de l'ensemble de la société, du système politique aux citoyens, en passant par les enfants a été modifié par l'intrusion des médias de masse, notamment audiovisuels. Les journalistes dans ce schéma ont forcément acquis un certain pouvoir. Mais les conclusions hâtives et la survalorisation des médias, des journalistes sont à bannir. La question du pouvoir des médias a en effet donné lieu à une vaste littérature et à de nombreuses polémiques qui sont loin d'être closes. Les études de cas et les approches théoriques s'affrontent sans que l'on puisse fixer une interprétation univoque. Pour les chercheurs les effets sont jugés directs ou indirects, à court ou moyen termes, ponctuels ou durables, immédiats ou cumulatifs, puissants, limités ou nuls. Certains insistent sur les effets de renforcement des opinions ou du pouvoir en place, alors que d'autres mettent en valeur les effets de changement ou d'évolution que les médias induisent4(*).

Nous vivons dans un monde médiatisé. Les médias nous apportent diverses informations. Dans ce sens, ils sont utiles. Toutefois, il existe divers effets auxquels on ne s'attend pas ou on ne pense pas toujours. Le journaliste en particulier intervient dans différents aspects de notre vie quotidienne. Il peut influencer les décisions politiques et les choix du consommateur ; il contribue à la prise de conscience du citoyen, mais il peut aussi encourager des comportements à risque ou des modes de vie malsains. Les faits qu'un journaliste rapporte au public sont porteurs de sens, par exemple dans le domaine de la politique, de l' économie ou de la culture. Cela confère un pouvoir aux journalistes (dont la profession est souvent qualifiée de quatrième pouvoir, par allusion aux trois pouvoirs constitutionnels) dans le processus de la formation de l' opinion publique et dans l'influence que la révélation de ces faits peut avoir dans les prises de position de ce public.

L'influence des médias sur la vie de tous les jours est devenue un thème incontournable. En effet dans notre société actuelle, le journaliste est de plus en plus présent dans notre vie. Il est nécessaire de s'interroger sur l'influence de ce dernier, bonne ou mauvaise, sur la société dakaroise.

Il est d'abord intéressant de préciser que le journaliste joue un rôle important dans la société. Toutefois, le journaliste tente délibérément d'influencer les attitudes du récepteur (la Société) en vue de convaincre, de changer nos attitudes vis-à-vis des candidats politiques, des produits de consommation par exemple. Théoriquement, l'information doit suivre des étapes pour imprégner la mémoire du récepteur et influencer son attitude et son comportement. Le récepteur doit donc être exposé à une information avec une attention suffisante qui lui permette d'y trouver un intérêt. Il doit ensuite la comprendre pour pouvoir la traiter et l'évaluer. Ce n'est qu'alors qu'il pourra se laisser influencer par le contenu du message et le mémoriser. Le développement prodigieux des modes d'expression et singulièrement celui des médias a conduit à l'émergence d'un corps particulier de praticiens dont le rôle, le poids social est allé en s'élargissant et en se perfectionnant. C'est celui des journalistes.

Depuis les sociétés traditionnelles, marquées du joug des souverains, la première préoccupation de l'homme en quête de sa propre compréhension a été le droit d'avoir une opinion qui lui soit propre, différente voire opposée à celui du chef, le chef de famille, du mari, de l'aîné... Si à cette période, le journaliste n'était pas encore nommément désigné, la première de ses fonctions était déjà manifestement exprimée. C'est la fonction revendicatrice du droit à la pensée, à la réflexion, à l'opinion.

Par la suite, le perfectionnement de l'écriture, la vulgarisation de la chose imprimée a abouti à un premier commerce de ces opinions, vite accompagné du souci de pouvoir les exprimer. La formalisation du droit à l'expression a ainsi pris corps. Avec la naissance de la presse écrite, l'occasion a en effet été donnée de faire la publicité des opinions et des idées. C'est dans cette période que va surtout s'ériger la stature particulière du journaliste. Polémiste, pamphlétaire d'abord, il va évoluer vers une mission d'observateur. Témoin des évènements, il s'arroge le droit d'en rendre compte, mettant ainsi sa propre personne, du moins son crédit en jeu dans la sincérité de la relation. Cet aboutissement a reçu une fonction sociale notamment à travers les proclamations politiques et sociales entre le 18ème et le 20ème siècle. Ainsi, la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1848 en son article 19 écrit :

« Tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considération de frontières, les informations et les idées par quelque moyen que ce soit. »

Ce statut reconnu et ainsi labellisé prescrit un rôle déterminant au journaliste, lequel va devoir être assumé en pleine conscience.

Mais la déclaration va être avant tout interprétée et élargie à la liberté de communiquer, impliquant la liberté d'accès aux voies de circulation de l'information. En effet, les évolutions précédentes ont été accompagnées d'un développement spécifique et autonome des médias qui en ont fait l'objet d'un enjeu tout aussi spécifique. Pour y accéder, le journaliste va être soumis à une compétition de plus en plus sévère au cours de laquelle il sera tenu de composer tantôt avec les intérêts essentiellement économiques du média, son employeur, les exigences contradictoires de son auditoire, ainsi que les affirmations autoritaires des divers groupes de pression. Dès lors, il lui faudra ajouter à ses multiples obligations, celui du médiateur, c'est-à-dire la capacité d'interaction et de dialogue. Ce sont là de nouvelles obligations et responsabilités.

Pendant ce temps, le flot informationnel grossissant a introduit la possibilité d'une spéculation sur les faits. Ainsi, le journaliste va être à son tour exposé à la critique. De part et d'autre, on attend désormais de lui qu'il assure à ses publics :

- Un plein accès à l'information dans sa toute sa variété ;

- La présentation et l'explication des valeurs de la société, lesquelles peuvent être contradictoires d'un groupe à l'autre ;

- La réflexion fidèle des divers groupes constituant la société ;

- La distribution des commentaires et des critiques ;

- Un compte rendu, complet, intelligent et sensé de l'actualité placée dans le contexte le plus approprié.

- Pendant tout ce temps, le journaliste lui-même ne peut s'oublier ni oublier ses propres préoccupations5(*).

C'est dans un tel cadre que s'exerce de nos jours la mission sociale du journaliste. Il doit informer ses concitoyens tout en participant à la vie de la cité. Tantôt juge, tantôt partie, il en sera autant blâmé que sollicité. Il lui appartient pour faire face à la controverse d'être pleinement responsable.

Les médias, en particulier les journalistes, jouent un rôle crucial dans la formation de l'opinion publique. Les médias sont les différents supports qui permettent de diffuser l'information. Il en existe plusieurs : la télévision, la radio, la presse écrite, internet... Aujourd'hui, personne ne peut échapper aux médias car ils sont de plus en plus présents dans nos vies. Ils permettent de s'informer, de se divertir, de se cultiver et de s'ouvrir au monde. Mais, il faut prendre conscience que les médias influencent notre mode de pensée et notre façon d'agir. Afin de prendre une distance critique à la masse d'informations transmises par les médias, il est important de savoir si l'influence qu'ils exercent sur nous est positive ou négative. En effet, d'après le psychologue MC Guire(1986), la fonction majeure des médias est « d'influencer les cognitions, attitudes ou comportements du récepteur dans des directions voulues.»6(*) Il s'agit de se positionner positivement ou négativement à l'égard d'un objet, ce qui intervient dans la manière de définir et de percevoir notre environnement.

C'est dans cette logique que nous avons émis deux hypothèses qui sont les suivantes :

1. Plus le journaliste informe avec crédibilité, plus il participe à l'ouverture des esprits ;

2. Plus la désinformation, la propagande, la censure sont importantes chez le journaliste, plus il met la société en danger.

Si nous établissons un rapport de cause à effet entre l'information et l'ouverture des esprits dans la société dakaroise, cela revient à dire que la position du journaliste est centrale et qu'elle a des conséquences positives ou négatives selon que l'information soit crédible ou pas.

Hypothèse1 : Information et Ouverture des Esprits

Nous postulons l'hypothèse que dans le contexte dakarois, l'information a un rôle important ; elle permet l'ouverture des esprits à condition que le journaliste s'acquitte avec crédibilité de sa fonction.

Le grand intérêt que présentent les médias, que ce soit la presse écrite, la télévision, l'internet ou encore la radio est d'informer rapidement et largement la plupart de la population des faits importants, des événements nationaux et internationaux. Ainsi, chaque citoyen grâce à son poste téléviseur ou radio, son ordinateur ou en achetant le journal dispose d'un compte rendu des derniers événements. Les journalistes collectent pour le peuple les informations et les éditent afin de les leur transmettre. Il est fréquent d'entendre que le journalisme n'est pas une profession comme les autres. On parle de «métier noble», de «quatrième pouvoir», de «chien de garde», de «garants de la société», etc. De tels propos révèlent au passage un aspect fondamental, celui de la liberté d'expression, et véhiculent une idée-force, celle de la démarcation du professionnel de l'information dans sa fonction sociale décisive tant pour le développement de la personnalité des citoyens que pour l'évolution sociale et démocratique d'un pays. Si l'activité journalistique consiste dans le recueil de l'information factuelle, son traitement et sa communication au public, au coeur donc de celle-là, on distinguera une seule cause : rechercher la vérité et un seul but : servir au mieux l'intérêt public. C'est en ce sens que l'un des pionniers de la presse comme Théophraste Renaudot appréhende le journaliste comme un «amoureux de la vérité» pratiquant un «journalisme de conscience»7(*).

Nous avons établi un rapport de cause à effet entre l'information et l'ouverture des esprits. Cela revient à dire que le journaliste occupe une position centrale. En effet, le rédacteur en chef de Canal Info News, Ousseynou Ndiaye soutient que «le journaliste est l'instituteur des temps modernes». En effet, la classe du journaliste est hétérogène par les âges, les niveaux socio-culturels et accueille plusieurs millions d'élèves, jeunes et adultes. Une classe dans laquelle on ne voit pas les absents, on ne donne pas de notes, on ne fait pas de différence entre les douées et les autres. Une classe (société) dont tous les élèves possèdent une intelligence suffisante pour comprendre les phénomènes de la vie. Ce qui fait dire à Ousseynou Ndiaye que «la mission du journaliste est d'informer son public avec crédibilité». Il doit toujours écrire la vérité et doit être aussi neutre que possible. Si le journaliste sénégalais informe bien, les lecteurs apprennent beaucoup. La tâche de ce dernier consiste à rassembler les informations et les présenter au peuple parce que nous voulons savoir ce qui se passe. Ainsi le journaliste sénégalais nous apprend beaucoup de choses intéressantes qui ne viendraient jamais à la lumière du jour sans ce dernier. La fonction première du journaliste est d'informer et il a un devoir d'impartialité mais toutefois, le journaliste sénégalais prend parfois position ; ce qui n'est pas la fonction du journaliste qui doit être impartial. Ainsi par exemple, Ousseynou Ndiaye qualifie l'attitude du journaliste Léopold Tamba d'«irresponsable» dans l'affaire de la bâche brûlée durant le meeting du Parti Socialiste sénégalais à Thiès. Pour lui, Léopold Tamba a été «irresponsable» en mettant son portable sur main-libre devant les cadres du Parti Socialiste après un coup de fil de Mamadou Lamine Massaly qui se revendiquait les faits. C'est dans cette logique que Massaly fera l'objet d'une poursuite judiciaire et sera condamné à deux ans de prison dont six mois fermes. Dès lors, il apparait clairement que dans cette affaire, le journaliste Léopold Tamba a pris position en s'alliant à l'opposition.

Un micro-trottoir dans les rues de Dakar-Plateau nous a permis de voir que la mission éducative du journaliste sénégalais est essentielle. Ici, le journaliste délivre des messages et des leçons de tolérance : apprendre à vivre ensemble, à régler pacifiquement les conflits, à participer au dialogue et à la paix. Lors du combat de lutte opposant Balla Gaye 2 à Modou Lo, les journalistes sénégalais ont appelé les supporters des deux camps a plus de responsabilité car soutenant qu'ils sont tous des frères et que la victoire ne sortira pas du Sénégal. Dans cette logique d'ouverture des esprits, le journaliste sénégalais a joué un rôle important pendant les élections présidentielles de Mars 2000. En effet, la presse a été, sans doute avec la jeunesse, l'un des éléments les plus déterminants dans l'alternance politique de Février-Mars 2000. Le rôle des médias privés a été unanimement reconnu comme décisif dans la transparence du processus électoral mais aussi et surtout dans la prise de conscience des citoyens sénégalais. Le dynamisme de la presse privée relativement récente et essentiellement composée de jeunes journalistes utilisant les nouvelles technologies des télécommunications a indéniablement changé la donne. Le rôle des journalistes dans les élections présidentielles de Mars 2000 a été très souvent magnifié par la presse internationale, ils reconnaissent l'importance cruciale qu'ils ont eu dans le cours des événements.

Sur ce point, il est intéressant de voir comment le contexte a évolué au Sénégal. En effet dans les années 1970, Léopold Sédar SENGHOR rappelait à ceux qui ne le sauraient pas encore qu' « il n'existe pas, dans notre vie politique de quatrième pouvoir, qui serait le « pouvoir journalistique » et qui ferait régner sa loi8(*). Fin 1980, Abdou DIOUF son successeur instaure le libéralisme médiatique et, en quelque sorte, il en sera la principale victime lors de l'élection présidentielle de 2000. Abdoulaye WADE l'actuel président ne peut éluder ce qui, à ses yeux est devenu une réalité. Lors d'un débat radio-télévisée le 9 décembre 2000, il affirme que « nous n'avons pas créé le concept de quatrième pouvoir mais il correspond bien à notre réalité (...) Je considère que la presse est tellement puissante qu'il faut la réglementer »9(*). Dès lors, il apparait clairement que les médias peuvent être utiles d'une part mais peuvent s'adonner à des dérapages, d'autre part l'importance ou même la nécessité d'une réglementation.

Par ailleurs, les journalistes sénégalais ont abondamment utilisé les téléphones portables pour communiquer en temps réel les résultats ; ce qui n'autorisait plus certaines manipulations frauduleuses. Le simple fait de pouvoir divulguer aux populations les résultats au fur et à mesure qu'ils tombaient, d'un bureau de vote à un autre fut extrêmement important dans l'histoire électorale du Sénégal. Il n'en a pas toujours été ainsi.

Hypothèse2 : Désinformation, Propagande, Censure

Par conséquent, dans la logique de la première, notre seconde hypothèse repose sur le fait que par la désinformation, la propagande, la censure, le journaliste incite à des comportements qui sont dangereux.

Les médias, particulièrement les médias de masse, sont nés sous le régime du soupçon. Leur étude systématique se développe dès l'entre-deux-guerres. Depuis, elle se poursuit en mesurant des « pouvoirs » contre lesquels les uns nous mettent en garde et que les autres relativisent. Outils d'embrigadement guerrier ou de contrôle politique, les médias sont d'abord pensés comme les multiplicateurs de la propagande « dure », mais aussi comme les responsables d'une aliénation douce et d'une molle passivité. Au moment où les nouveaux médias suscitent un discours enthousiaste, les camps se reforment. Les uns prêtent aux technologies des vertus libératrices, voire libertaires, les autres en dénoncent les périls. Une tradition intellectuelle oppose la communication à la violence comme la plume à l'épée, une autre dénonce les spectacles comme illusion contraire de la vie. La pensée stratégique pénètre donc ici sur un terrain qui est tout sauf vierge.

L'histoire nous révèle que c'est dans le sillage du colonisateur que les médias, en particulier la presse et la radio, ont été introduits en Afrique noire essentiellement pour servir les besoins d'information de l'administration coloniale. Et c'est surtout après l'accession à l'indépendance à la fin des années 1950 que la gestion des médias revient aux élites autochtones, avec un fait majeur à la clef : la mainmise des politiques sur les médias au nom de la nécessité de la construction de nations stables et prospères. Dans cette logique, les gouvernants vont adopter les principes du système autoritaire comme méthode de gestion de l'Etat, dont le contrôle des médias. C'est la consécration d'un journalisme dit d'«union nationale» ou de «développement» qui va servir plutôt de porte-voix, d'outil de propagande aux pouvoirs politiques en place. Un homme politique pouvait intervenir à tout moment dans un journal pour qu'on donne un écho à ses propos ou qu'on place sa photo à la une. La couverture des organes de presse était centrée sur les personnes politiques et non sur la réalité sociale.

Les médias jouent un rôle crucial dans la formation de l'opinion publique. La télévision, la radio, la presse écrite et aujourd'hui l'Internet, constituent les moyens majeurs par lesquels une grande partie de cette opinion publique règle son comportement aussi bien dans le domaine de la politique que pour ce qui est de la consommation. Cela confère, comme nous l'avons déjà dit, une puissance inestimable à ces masses médias. D'où la question : est-ce que ces derniers pourront, pour une raison ou une autre, résister à la tentation de se servir de cette masse d'individus, à leur merci, pour faire passer leurs intérêts crypto-personnels ? Les médias ont tous pour objectif, du moins dans leur principe, d'informer objectivement le citoyen de ce qui se passe ; cela se lit à travers leur devise. Seulement, ce sont des hommes qui manient ces instruments, et, en général, on trouve derrière ces médias de grands groupes industriels, des entreprises, des partis politiques etc. Soumis à la pression de ceux-ci, est-ce que les médias ne pourraient pas être portés à se défaire de leur vocation principale qui est d'informer juste et vrai, pour finalement servir de moyens de propagande à ces derniers ? Ajouté à cela, nous pouvons évoquer l'appât du gain, les risques de corruption, l'argent facile, les chantages que peuvent éventuellement subir les journalistes, mais aussi la loi du marché qui valorise l'efficacité en termes de rentrées de fonds au détriment de la scientificité (l'audimat, le volume de tirage...). Ainsi, dans le contexte dakarois, nous pouvons donner l'exemple des hommes politiques qui disposent d'organes de presse et qui influencent le traitement de l'information journalistique. Par exemple, le quotidien «Messager» appartient à Farba Senghor. La désinformation peut aussi être due à l'appartenance politique des journalistes. En effet, dans notre pays, certains journalistes ont des cartes dans les partis politiques qui les poussent à prendre position pour leur parti.

La ruse est une mise en scène, souvent de ses propres actes ou de sa propre apparence, pour accréditer une version fausse de la réalité. Elle mène un adversaire ou concurrent à perdre quelque chose : du temps, de l'énergie, des soutiens ou des alliés, une position favorable. Cet art de fourvoyer agit sur le contenu ou sur le contexte de l'information si bien que son destinataire adopte l'interprétation qu'on lui suggère. Les moyens de communication introduisent un autre facteur, l'opinion. Du coup, apparaît une discipline du faux, la désinformation. Elle consiste à tromper l'opinion sur le contenu, sur la source et sur le sens de l'information : un désinformateur qui parlerait à la première personne, ce serait un propagandiste. Il doit aussi dissimuler le but visé : démoraliser l'opinion, discréditer l'adversaire auprès de la population, de ses alliés, des autorités. Introduisant au moins un partenaire de plus, multipliant les masques et faux-semblants, jouant sur les bandes et les rebonds, la désinformation est une forme raffinée de falsification. Elle prolifère à la mesure des réseaux d'information.

Dans cette partie, il s'agit aussi de bien cerner cette notion de désinformation. En effet, la désinformation consiste à fournir des informations qui font croire quelque chose de contraire à la vérité. A part le mensonge pur et simple que les journalistes évitent soigneusement, la désinformation se fait par deux moyens :

§ Ne dire qu'une partie de la vérité, celle qui conforme le point de vue qu'on veut défendre ou celle qui génère le plus d'émotion : c'est la désinformation par omission.

§ Donner à certaines informations une importance et un poids très différent de leur poids réel en faisant paraitre important un fait qui en réalité l'est bien moins : c'est la désinformation par exagération.

Par propagande, on entend un type de discours à visée persuasive, qui enjoint explicitement le récepteur de penser et/ou d'agir de telle ou telle façon. La propagande se caractérise par une action systématique sur le public pour lui faire partager une doctrine politique ou sociale, ou pour l'amener à soutenir une position ou une personnalité (en particulier dans une compétition électorale)10(*). De par la propagande, le journaliste peut passer à l'aide des médias des informations souvent fausses ou exagérées, qui leur sont favorables. La fabrique de l'opinion peut se baser sur les propagandes journalistiques. En effet, dans la logique de la deuxième hypothèse, le journaliste sénégalais a subi une profonde mutation passant de l'information à la désinformation en passant par la propagande. Ainsi, il est clair que l'information est une arme et celui qui le contrôle a un pouvoir.

· DÉRIVES DES JOURNALISTES

Selon TIDIANE KASSE11(*), « Si la conscience du devoir d'informer et la liberté devenue effective d'informer ont donné une presse qui passe pour un des piliers de l'édifice démocratique dans nos Etats, cela ne mène pas toujours au triomphe du bien. On peut faire plus mal encore en usant de cette liberté ».

Dérives ou pas, certains événements qui se sont produits ces dernières années ont interpellé les observateurs du paysage médiatique sénégalais. Concernant la presse indépendante dite sérieuse, ce n'est pas vraiment une nouveauté. L'affaire Sud-CSS (compagnie sucrière sénégalaise) de 1996 est là pour nous le rappeler. Cet épisode avait fait couler beaucoup d'encre et de salive. A cette époque, la presse indépendante fut accusée par le pouvoir étatique d'être devenue très puissante, incapable de s'autoréguler ce qui pourrait mener à toutes sortes de dérives. Quant aux journalistes, ils se sont naturellement ralliés à leurs confrères de Sud Quotidien dénonçant de concert une entrave à la liberté de presse. Par contre ce qui peut porter un intérêt particulier concernant les dérives ou les manquements aux principes éthiques c'est cette nouvelle presse dite populaire qui, en quelques années, a battu tous les records de par le nombre d'affaires portées devant les tribunaux. Pour ce qui est du quotidien gouvernemental, après l'alternance, le peuple sénégalais était dans le droit d'attendre d'Abdoulaye WADE qu'il supprime ou privatise Le Soleil, média public mais au service du parti au pouvoir. Ce journal qui lui avait causé tant de mal alors qu'il était dans l'opposition, il semble s'en accommoder aujourd'hui qu'il est arrivé au pouvoir.

II. Le Journaliste : Définition

Le journaliste est celui qui collecte, rassemble, vérifie et commente des faits. Un vrai journaliste est celui qui respecte le principe d'objectivité le plus possible. Il doit en effet avoir une distance critique entre les faits et sa propre opinion. Pour autant, le journaliste a ensuite le choix entre deux types d'article: l'article factuel qui se contente de rapporter les faits comme le fait divers par exemple et l'éditorial où le journaliste commente l'actualité, analyse et interprète des faits à partir de ses propres convictions, son mode de pensée, ses affinités...12(*)

Il est fréquent d'entendre que le journalisme n'est pas une profession comme les autres. On parle de «métier noble», de «quatrième pouvoir», de «chien de garde», de «garants de la société», etc. De tels propos révèlent au passage un aspect fondamental, celui de la liberté d'expression et véhiculent une idée-force, celle de la démarcation du professionnel de l'information dans sa fonction sociale décisive tant pour le développement de la personnalité des citoyens que pour l'évolution sociale et démocratique d'un pays. L'activité journalistique consiste dans le recueil de l'information factuelle, son traitement et sa communication au public. Donc, au coeur de celle-là, on distinguera une seule cause, rechercher la vérité, et un seul but, servir au mieux l'intérêt public comme mentionné précédemment.

L'engagement journalistique

Très souvent, on définit, de deux manières et de façon contradictoire, le journaliste.

- Par le négatif, on met à l'index son manque d'objectivité ;

- Par le positif on salue quelques fois sa pugnacité.

L'objectivité est un non-sens pour un journaliste s'il doit signifier l'observance d'une attitude équilibrée entre les deux pôles d'un phénomène. A ce sujet, le journaliste Claude SERILLON disait : « l'objectivité pour moi, ce n'est pas un kilo de vérité face à un kilo de mensonges »13(*). L'engagement du journaliste est d'abord un engagement vis-à-vis de sa propre conscience. Un engagement à ne pas tricher avec soi-même.

C'est le premier moyen pour ne pas tricher avec autrui. Avec ce dernier, l'engagement journalistique est un acte de loyauté et de respect mutuel. Il en est ainsi du fait même de la nature du métier. En effet, la transaction matérielle est rarement présente entre le journaliste et son public. La rencontre physique entre les deux est rare. Ce n'est pas le journal qui est acheté mais l'information qu'il contient. Cela se perçoit mieux encore en radio et en télévision où en dehors de toute émission le poste peut à la rigueur servir de pièce de décor dans une maison. Or, l'information n'est pas la propriété du journaliste. C'est un fait public qui doit retourner au public. Ce qui veut dire que le seul objet de la transaction, c'est l'implication du journaliste dans les faits qu'il a pris au public. Ainsi, l'information journalistique peut être considérée de trois manières au moins :

- C'est une information qui s'occupe de la vérité des faits et non de la vérité personnelle ou individuelle.

- L'information journalistique ne se rapporte pas à des vérités mathématiques, elle est donc extrêmement périssable alors même que le journaliste conclut un pacte de longue durée avec son public.

- L'information journalistique confrontée à la politique devient fragile parce que cette dernière a la faculté de la transformer en opinion.

Ces trois critères déterminent l'exigence d'honnêteté régulièrement confondue avec l'objectivité. Dans cette exigence, le journaliste peut céder facilement à la tentation de substituer sa vérité à la vérité des faits, de l'inscrire dans une illusoire postérité, en somme de préférer son opinion à l'information. Or, si le journaliste a pour devoir d'éclairer son auditoire, de l'aider à se forger une opinion, il ne peut pas s'arroger le droit de faire commerce de son opinion personnelle sans tomber dans le viol de conscience. Le travail journalistique doit être revêtu d'honneur à tous les stades. Cependant, les stades suivants ne peuvent échapper à l'honneur sans danger pour le journaliste et la société.

Au niveau des sources d'information : Le journaliste doit se persuader qu'une source n'est jamais indéfiniment et complètement fiable. Pour cette raison, il s'impose dans tout traitement la règle du recoupement de ses sources. Il lui faut par ailleurs être exigeant sur la transparence de ses sources, laquelle transparence doit bénéficier au public.

La rectification : Par respect de la vérité, toute information qui s'avère erronée devra être rectifiée.

Plaidoyer pour une presse utile et dynamique : La presse peut faire beaucoup. Parce qu'elle touche une foule nombreuse et diverse, elle peut servir de moteur à des missions de mobilisation. Parce qu'elle nourrit les esprits, elle peut constituer un instrument indispensable d'éveil des consciences. Mais cela a un prix. Les journalistes, moteur de cette presse, s'ils sont en mesure d'occuper dignement leur place dans la société, constitueront sans aucun doute un vivier de modèles à suivre par l'ensemble du corps social. Dans le cas contraire, ils serviront de repoussoirs que les foules tiendront à distance et avec eux les valeurs sociales qui leur sont reconnues14(*).

Code de déontologie des journalistes : Plus qu'à tout autre citoyen, les règles et règlements s'imposent au journaliste. On peut penser à priori qu'il y a contradiction entre la liberté de presse, la liberté des journalistes et le sens de la responsabilité, voire le respect des lois. Un journaliste peut difficilement dans son fonctionnement quotidien se situer au-dessus des lois. Toutefois, son observation des règles ne peut être non plus un conformisme aveuglant qui lui enlèverait sa capacité à expliquer. Respecter la loi, c'est savoir en relever les insuffisances, interpeller la conscience du législateur et quand il le faut prendre à témoin l'opinion, l'alerter sur les dangers imminents face à une loi mal pensée ou à l'application dévoyée d'un texte. Cela doit se faire en maîtrisant ses propres passions. Le journaliste doit savoir que ses actes en ce qu'ils comportent de positif ou de négatif échappent au domaine privé. La stature du journaliste imprime à son moindre geste des effets grossissants qui ont vite fait d'élever au rang de modèle ce qui ailleurs passe inaperçu. Si un journaliste se trompe, le risque est grand qu'il trompe l'opinion. C'est pourquoi, le journaliste, pourtant exposé en permanence à l'erreur, a difficilement droit à celle-ci, parce que astreint à un rôle de service public.

Bien souvent, on a défini le droit à l'information en rapport avec les journalistes, compris comme professionnels. La définition est la plupart du temps, formulée sous forme de revendication en direction des instances publiques. Mais, les publics ont des exigences à formuler également qui s'adressent plus aux journalistes. Il faut à ceux-ci de plus en plus inclure leurs publics récepteurs dans l'énonciation du droit à l'information. Surtout, il leur faut être réceptif aux préoccupations de ces publics. En effet, le développement autonome des médias a créé des récepteurs captifs, attachés particulièrement à des organes d'information. Ce sont autant des auditoires pour les journalistes que de la matière première commerciale pour les détenteurs de ces organes. Si de par son emploi le journaliste est redevable à son employeur, il est autant serviteur, soumis à la règle de la loyauté et n'a pas le droit de décevoir, de trahir son audience. Ici, le journaliste doit partager sa rigueur morale. Il a un devoir de protection à l'endroit de son public. De plus, les capacités des médias modernes à transgresser les genres, les ordres établis et les frontières font pratiquement du journaliste un gardien de consciences.

Statut juridico-formel : Jusqu'à présent, c'est la loi 96-04 qui régule la presse sénégalaise. Etat, journalistes, techniciens, patrons de presse, juristes, société civile et parlementaires sont maintenant conscients du caractère de ce texte.  Celui-ci ne prend pas en compte toutes les préoccupations des journalistes et des entreprises de presse, de manière générale. C'est pourquoi, le nouveau Code de la presse est jugé salutaire, en ce sens qu'il permet de réguler le secteur des médias. Il est aussi un instrument qui aidera à assainir un milieu où la formation est désormais primordiale pour revendiquer le statut de journaliste.

« De l'affirmation du principe de la liberté de la presse, nous sommes passés au droit du public à l'information. Mais, il n'y a pas de liberté sans limites. Ce qui implique la responsabilité des médias et des professionnels des médias. Le Code de la presse va consacrer ces principes »15(*). Ces propos de Papa Atoumane Diaw, coordonnateur de la pré-concertation nationale sur la presse, témoignent du souci de l'Etat de doter le secteur des médias d'un Code de la presse qui tienne compte de l'accès à l'information plurielle pour le citoyen, comme de l'accès aux sources d'informations pour la presse.

III. Rôle de la presse dans la société dakaroise

Le  journaliste a, dans les démocraties, un rôle absolument fondamental. Il a pour mission de collecter, traiter, analyser et diffuser l' information afin d'éclairer le citoyen sur le déroulement de la vie publique. Afin que l' information soit la plus objective possible, il doit pouvoir exercer sa profession de manière libre et indépendante. Il a donc été nécessaire de lui conférer un statut particulier que ce soit dans l'accès à la profession ou dans les relations avec son employeur, notamment au moment de la rupture du contrat de travail.

Selon Jean Claude BERTRAND, il existe quatre régimes de presse possibles. Deux despotiques (l'un autoritaire, l'autre communiste) et deux autres démocratiques (libéral et de responsabilité)16(*). Le régime libéral est né en Europe au siècle des lumières (18e). Il se caractérise évidemment par son libéralisme, c'est-à-dire par un désengagement de l'Etat qui laisse faire : « il suffit que tous les faits soient objectivement rapportés et que toutes les opinions soient mises sur le marché des idées ». Quant au régime dit de responsabilité sociale, il n'est en fait que le prolongement du précédent en s'efforçant toutefois d'associer liberté et qualité des médias. Les médias doivent être indépendants, donc des entreprises commerciales à la recherche du profit, mais ils doivent aussi être responsables vis-à-vis des groupes de la société.

Le régime adopté par le Sénégal est une conjugaison des deux derniers : le régime libéral de responsabilité qui règne dans une démocratie. Déjà en 1947, l'application de la loi française du 29 juillet 1881 jusque-là partielle, devenait effective. La constitution sénégalaise de 1963 en son article 8 garantit à chaque citoyen la liberté d'expression : « chacun a le droit d'exprimer et de diffuser librement ses opinions par la parole, la plume et l'image ». Cette garantie est une source où s'abreuve la liberté de presse. Une loi, encore appelée code de la presse fut votée à l'assemblée le 11 avril 1979. Jugée incompatible avec l'évolution démocratique du Sénégal, elle fut abrogée en 1986 par une autre loi, celle du 16 juin 1986 qui, à son tour, fut remplacée par la loi du 02 février 1996 actuellement en vigueur17(*). En outre, cette nouvelle loi donne plus de liberté aux journalistes contrairement à la précédente qui leur fixait plus de devoirs que de droits. Elle stipule que « le journaliste ou le technicien de la communication sociale a libre accès à toutes sources d'informations non confidentielles et a le droit d'enquêter librement sur tous les faits qui conditionnent la vie publique »18(*).

En nous référant aux travaux de Jean STOETZEL19(*), nous allons essayer de réduire ces six fonctions en trois, mise à part la fonction évidente et principale qui est l'information. Nous retiendrons :

la fonction d'appartenance sociale ou mobilisatrice : concernant la presse sénégalaise, la presque quasi-totalité des journaux se disent indépendants. Mais l'analyse du contenu rédactionnel d'un journal comme Le Soleil montre pourtant une évidence qui ne souffre d'aucune ambiguïté, à savoir son allégeance au pouvoir étatique. Des journaux comme WalfadjriSud Quotidien... ont joué le rôle de « sentinelles de la démocratie » en accompagnant la victoire du Front pour l'alternance (FAL)20(*) lors de la présidentielle. En se faisant le relais des tensions populaires mais également en fustigeant l'action du défunt gouvernement, n'est-ce pas là une manière de mobiliser tous les insatisfaits d'un système ?

la fonction récréative ou de divertissement : les journaux sénégalais assument aussi cette fonction comme en témoignent les rubriques Sports, Culture et les jeux qu'ils proposent aux lecteurs

la fonction psychothérapeutique : elle semble proche de la précédente mais se différencie par son effet cathartique : elle se manifeste particulièrement dans les articles de faits-divers.

En définitive, il est évident qu'il ne peut y avoir de presse libre en dehors d'une démocratie comme il est aussi impossible de parler de démocratie sans presse libre. Débarrassée de toute contrainte, elle est à même d'assumer le rôle qui lui est dévolu. Qu'elle soit mobilisatrice, récréative ou psychothérapeutique, elle doit viser à servir toutes les franges de la société. Au Sénégal, cette expression des sensibilités plurielles fait passer la presse indépendante pour une presse d'opposition, anti-gouvernementale.

Avec les différents éléments abordés, on peut tout affirmer que le rôle du journaliste est multiple. Ils ont pour rôle premier d'informer. Par le biais des médias, ils informent sur l'actualité et sur les événements. Mais plus encore, ils commentent l'actualité, ils donnent leur avis sur les événements et les informations. C'est en cela qu'ils sont très importants et utiles pour le Pouvoir en place : ils influencent. Il y a aussi un aspect de divertissement de la part des médias. Les médias incarnent une certaine notion de Liberté. Enfin, il y a l'aspect collectif, l'aspect communautaire et participatif des médias.

1. Journalisme et Société dakaroise

Ancienne capitale de l'Afrique Occidentale Française (AOF), puis de l'éphémère Fédération du Mali, Dakar est depuis le 4 avril 1960 celle de la République du Sénégal. Son emplacement géographique, à l'extrémité occidentale de l'Afrique a facilité l'installation des premiers colons, puis le commerce avec l'Europe et les Amériques. Dakar est le siège de la Banque Centrale des États de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO), de l'Institut Fondamental d'Afrique Noire (IFAN). Dakar présente la structure classique des villes portuaires africaines : port, quartier colonial à l'urbanisme (actuellement le quartier du Plateau avec des infrastructures telles que l'Assemblée, le palais présidentiel, la cathédrale du Souvenir Africa), quartier indigène (actuellement la Médina, les SICAP...) ainsi que le remarquable patrimoine de l' île de Gorée à moins de trente minutes du port.

Depuis l'indépendance, des édifices plus modernes tels que l'Université Cheikh Anta Diop, la Grande Mosquée, l'immeuble de la BCEAO, la Porte du Troisième millénaire ont été édifiés. Récemment, la corniche reliant l'aéroport au centre-ville a été aménagée en voie expresse permettant d'éviter les embouteillages spectaculaires que connaissait cet itinéraire.

Avec plus d'un million d'habitants, Dakar regroupe 25% de la population et concentre 80 % des activités économiques du pays21(*). Cette forte concentration humaine ainsi que la géographie particulière de la presqu'île sont responsables d'un engorgement croissant. La société dakaroise constitue un tissu ethnique, culturel et religieux complexe formé de plus d'une vingtaine d'ethnies ayant chacune une langue et des traits culturels spécifiques. Grâce à une longue tradition de tolérance, à une religion largement partagée (Islam, 94% des sénégalais)22(*) et en raison de l'urbanisation qui a transformé les modes de vie, les représentants des diverses ethnies respectent leurs différences et ont appris à vivre et à travailler ensemble. Cette paix sociale conjuguée à la stabilité politique a favorisé l'épanouissement de l'État de droit et la reconnaissance de l'égalité de tous devant la loi. Néanmoins, il subsiste des iniquités importantes entre hommes et femmes, entre ruraux et citadins, entre riches et pauvres. La population du Sénégal est estimée à 11 126 832 habitants pour l'année 2005. Cette population est surtout concentrée dans la région de Dakar qui abrite 25 % de la population totale alors qu'elle ne couvre que 0,3 % de la superficie nationale. La région de Dakar enregistre ainsi une densité de population de 4 251 habitants au km2 en 2004 contre une moyenne nationale de 53 habitants au km223(*).

Comme mentionnée en introduction, la place des médias au Sénégal est liée à l'histoire coloniale. Dakar qui faisait partie des quatre communes de plein exercice vivait une activité médiatique intense. A partir de l'indépendance, les médias vont plus se développer. Le Sénégal est un pays stable, Dakar a un bon réseau de transports et d'excellentes connexions avec le monde. La Constitution garantit la liberté d'expression, la liberté de la presse et le droit à l'information. Cette garantie constitutionnelle s'effectue sous le contrôle du Haut Conseil de l'Audiovisuel (HCA) et des nombreux syndicats de la presse telle que l'Agence de Presse Sénégalaise. Les quotidiens de la presse écrite sont nombreux et variés. Concernant les nombreux titres de la presse sénégalaise, on peut noter une originalité, à savoir l'existence de quotidiens satiriques. Ainsi, nous avons : Le Soleil, quotidien gouvernemental, Sud quotidien, Walfadjri, L'Actuel, La Pointe, Le Matin, Le populaire, Frasques Quotidiennes... Il y a également des hebdomadaires tels Eco Hebdo, La Vérité, La Source, Le courrier du Sud, Le journal de L'économie, Le Politicien, Le Témoin, Nouvel Horizon etc. Le pluralisme radiophonique est reconnu et un haut conseil de la radiotélévision (loi 92-57 du 25 août 1992) y veille. On note, en plus de la radio gouvernementale, les radios Sud FM, Dunya FM, Nostalgie, Diamono FM, Energie FM, Téranga FM, Oxyjeunes, Radio Dunya, Sept FM, Sokhna FM, WalFadjiri FM, ainsi que des stations internationales comme RFI (Radio France Internationale), Africa n°1, BBC (British Broadcasting Corporation). Plusieurs télévisions étrangères comme Canal Horizon ou TV5 émettent au Sénégal. De nos jours, les médias, en particulier les journalistes, sont confrontés à de nouveaux défis. Des pressions commerciales et politiques menacent leur crédibilité et affaiblissent leur influence sur la société. Ils doivent faire preuve de transparence et assumer leurs responsabilités pour établir une relation de confiance avec leurs lecteurs, auditeurs ou téléspectateurs, ainsi qu'avec les divers autres acteurs concernés : leur propre personnel, les annonceurs,  le public en général, la société civile, les pouvoirs publics, etc.

Le contexte social et culturel est marqué par les mêmes grandes tendances sociologiques et culturelles que dans les pays développés, tendances qui contribuent au développement de l'interactivité. La forte déstabilisation des identités sociales, la fin des idéologies ont stimulé le retour en force de la subjectivité. Ces tendances, avec d'autres, ont contribué au changement de régime en 2000 avec, pour la première fois depuis l'indépendance, la prise du pouvoir par une majorité libérale prônant une politique fondée sur la libre entreprise et la responsabilité individuelle. Il est d'ailleurs important de souligner que les radios communautaires ont contribué fortement de l'aveu même des responsables politiques, à la victoire d'Abdoulaye Wade, même si par la suite les relations entre Wade et la presse se sont rapidement dégradées, le pouvoir cherchant par des pressions de plus en plus pressantes sur la presse et les journalistes.

Toutefois, des différences de contextes importantes séparent les medias du Sénégal des médias des pays développés. Certaines ne vont pas dans le sens du développement des émissions interactives. Les normes traditionnelles sont encore fortement prégnantes. La faible emprise de la démocratie, la corruption, le rôle des confréries, le fatalisme qu'inspire la perpétuation de la misère par-delà les changements politiques ont progressivement délégitimer le débat politique et la démocratie. Ici aussi, les journaux sont également plus ou moins contrôlés mais la différence est que nos journalistes ont tendance à s'autocensurer de façon plus ou moins consciente. Du fait d'avoir un patron qui dépend du pourvoir en place.

* 1 BEUVE-MERY HUBERT, Parole écrite, Grasset, Paris, 1991, p.134

* 2 Cf. Charte internationale des droits et des devoirs des journalistes adoptée à Munich en 1971 

* 3 Cf. Institut PANOS, Médias et élections au Sénégal, NEAS, Dakar, 2002

* 4 Cf. Arnaud Mercier « Pouvoir des journalistes, pouvoir des médias ? », communication, Forum du Centre des sciences sociales de la Défense, 23 janvier 2002.

* 5 Cf : Les responsabilités sociales des journalistes

* 6 CANTAGREL Benoît Influence des médias

* 7 Cf. LE JOURNALISME ET LA QUESTION DE LA RESPONSABILITÉ SOCIALE DANS LES PAYS AFRICAINS NÉCESSITÉ D'APPROPRIATION DES VALEURS ÉTHIQUES ET DÉONTOLOGIQUES Par Taïrou BANGRE

* 8 Cité par LOUM NDIAGA Pluralisme de l'information et groupes multimédias au Sénégal, thèse de doctorat, Bordeaux III 2001 p. 335

* 9 Institut PANOS, Ne tirez pas sur les médias : éthique et déontologie de l'information en Afrique de l'Ouest, L'Harmattan, Paris, 1996, p. 200

* 10 Cf : Le « pouvoir des médias »

* 11 Mouhamadou Tidiane KASSE, journaliste, Institut PANOS, Ne tirez pas sur les Médias, Harmattan, Paris 1996

* 12 http://www.come4news.com/definition-du-journalisme-citoyen-4.html

* 13 Textes/uaco/responsabilité sociale.doc

* 14 Textes/uaco/responsabilité sociale.doc

* 15 DIAW PAPA ATOUMANE, coordonnateur de la PRE-CONCERTATION NATIONALE SUR LES MÉDIAS : L'esprit et la lettre d'un Code de la presse consensuel

* 16 BERTRAND JEAN CLAUDE : Les fonctions des médias, régime acteurs rôle in Médias : Introduction à la presse, radio et télévision, Ellipses, Paris 1999

* 17 Loi du 2 février 1996, loi n°92-16, chp 4, art 15

* 18 Loi du 2 février 1996, loi n°92-16, chp 4, art 26

* 19 BALLE et J.-G. PADIOLEAU, Sociologie de l'information : textes fondamentaux, Larousse, Paris 1972, pp. 281-282

* 20 Nom donné à la coalition de l'opposition menée par Abdoulaye WADE lors de l'élection présidentielle de 2000

* 21 http://fr.wikipedia.org/wiki/Dakar

* 22 http://fr.wikipedia.org/wiki/Dakar

* 23 http://www.ancs.sn/Senegal%20situation%20demographique.htm

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