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Fêtes de village et nouvelles appartenances. Les fêtes rurales en Hainaut occidental (Belgique)

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par Etienne Doyen
Université Catholique de Louvain - Licence en Sociologie 2007
  

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II. LA FÊTE AU VILLAGE

2.1. Les différentes théories des fêtes rurales

Avant de pouvoir définir notre problématique et procéder à l'analyse de notre matériau, nous avons jugé nécessaire de présenter une synthèse des analyses importantes qui ont été produites sur les fêtes rurales. Nous allons en premier lieu effectuer un rapide survol des productions des sciences humaines sur la fête.

La fête sous l'oeil de la science

La fête, tout aussi spontanée et a-problématique qu'elle puisse paraître, n'en demeure pas moins un phénomène complexe63(*). L'anthropologie, dès ses débuts, s'est intéressée aux moments festifs dans les communautés qu'elle analysait. Les sciences humaines dans leur ensemble ont produit de nombreux écrits sur le thème. Nous nous contenterons ici de rappeler les principales dimensions de la fête mises en avant par cette production importante, en nous inspirant de la synthèse effectuée par Moreau et Sauvage64(*).

La fête permet, tout d'abord, de scander le temps et les saisons. Cretin scinde les fêtes occidentales en quatre temps : les fêtes du printemps et du renouveau ; les fêtes de la croissance et du mûrissement, qui se déroulent entre le 1er mai et la Saint-Jean ; les fêtes estivales et automnales, qui célèbrent l'abondance ; et enfin, les fêtes hivernales. Il est ainsi possible de lier de nombreuses fêtes à une période précise de l'année. Dans cette perspective, le temps est souvent décrit comme un balancier65(*) : il ne s'écoule pas d'une manière continue mais oscille tel un pendule qui s'arrête à intervalles réguliers pour mieux reprendre sa route. Les fêtes se situent à ces extrémités : moments hors du temps, elles constituent des évènements extraordinaires de la vie d'un collectif pendant lesquels le cours des choses est suspendu.

Les fêtes prennent également la forme de rites de passage, qui voient la communauté se rassembler pour célébrer l'accession d'une partie de ses membres à un nouveau statut. Le groupe se réunit parce que cette transition doit être socialement sanctionnée ; à travers l'acquisition d'un nouveau statut pour quelques individus, c'est tout le collectif et son mode de fonctionnement qui est célébré.

La fête, c'est aussi le moment de la transgression et de l'inversion des codes sociaux, pendant lequel les excès sont tolérés parce qu'ils s'inscrivent dans un cadre précis et limité. Le carnaval est l'illustration parfaite de cet aspect, dans la mesure où il est ce formidable moment de renversement des interdits : il constitue la licence absolue, l'exutoire de toutes les pulsions, une parenthèse du cours des choses qui permet, paradoxalement, de légitimer l'ordre social établi.

Moreau et Sauvage synthétisent ces différents aspects de la fête de la manière suivante :

« La fête est une des choses essentielles que les sociétés humaines ont inventée non seulement pour construire leur appartenance à une communauté de temps et de lieu - première fonction, sociale -, mais aussi pour leur permettre de s'exercer à la transgression afin de mieux se maîtriser - seconde fonction, émotionnelle. »66(*)

Cette formule comporte un aspect de la fête que nous n'avons, à dessein, pas encore abordé, à savoir sa fonction sociale ; la fête, c'est cet évènement crucial dans la vie d'un groupe qui lui permet de renforcer sa cohésion. La fête rassemble, elle permet aux individus de se percevoir comme appartenant à un groupe et de renouveler ce sentiment. Sa puissance réside dans cette capacité de réunion : au-delà des intérêts personnels, au-delà des tensions et des conflits, la fête rassemble un groupe, le fait exister et se percevoir comme un, en effectuant « une abolition temporaire des différences sociales ou des divergences politiques »67(*).

C'est cette dimension qui nous intéresse particulièrement dans le cadre de ce travail : comment une fête de village parvient-elle - ou pas - à créer un groupe villageois ? Nous reviendrons de manière plus systématique sur cette question dans notre problématique.

Il convient maintenant de passer en revue plusieurs interprétations qui ont été produites sur les fêtes rurales, afin de pouvoir nous positionner et construire une problématique qui prenne en compte l'état du champ dans lequel nous travaillons. Repartir des productions antérieures va ainsi nous permettre de nous inscrire dans une démarche cumulative.

Nous allons structurer cette présentation de la manière suivante : après avoir décrit la fête rurale classique, nous exposerons les productions de trois auteurs ou groupes d'auteurs : dans un premier temps, Champagne ainsi que Gervais, Jollivet et Tavernier ; viendront ensuite Bodson et Dibie ; et enfin, Fournier.

* 63 Cretin N., Fêtes et traditions occidentales, Paris, P.U.F., 1999, p. 3.

* 64 Moreau C., Sauvage A., La fête et les jeunes. Espaces publics incertains, Rennes, Apogée, 2006. En ce qui concerne des ouvrages classiques sur la fête, voyons Caillois R., L'homme et le sacré, Paris, Gallimard, 1972 (1939), et Duvignaud J., Fêtes et civilisations, Genève, Weber, 1973.

* 65 Cretin, op. cit., p. 4 ; Moreau, Sauvage, op. cit., p. 13.

* 66 Moreau et Sauvage, op. cit., p. 172.

* 67 Cretin, op. cit., p. 66, citant Ségalen et Chamarat. On retrouve également cette idée chez Lautman F., « Fête traditionnelle et identité locale. Rêve ?... ou recherche d'équilibre politique ? », Terrain, 5, 1985, p. 35.

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