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La redistribution doit-elle rendre le travail payant ? étude des modalités de conciliation entre redistribution des revenus et incitation monétaire au retour à  l'emploi.

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par Elie Chosson
Université Pierre Mendès-France (Grenoble II) - Master  2001
  

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Annexes:

Annexe 1: Théorie de la justice et distribution optimale des revenus.

En 1971, John Rawls, philosophe américain, publie Théorie de la Justice, un ouvrage majeur dans la pensée économique de l'équité et de la justice sociale, dans lequel il va élaborer une théorie tout à fait originale de la justice. Rawls va parvenir à conjuguer l'existence de libertés fondamentales et de principes très forts de justice sociale dans un état de l'économie particulier, qui possède les caractéristiques d'un optimum de Pareto. Rawls va imaginer une procédure d'élaboration des règles fondamentales permettant d'atteindre un état optimal de justice sociale. L'ensemble des agents sont placés sous un «voile d'ignorance», c'est-à-dire qu'ils ne savent pas s'ils seront hommes ou femmes, riches ou pauvres, salariés ou patrons, handicapés ou bien portant, c'est-à-dire qu'elles seront leurs fonctions et leurs statuts sociaux dans le réel. A partir de là, l'ensemble des agents ignorants vont chercher à établir un certain nombre de règles ou principes qui feront l'unanimité et qui régiront le fonctionnement de l'économie réelle, chacun sachant qu'il peut potentiellement se trouver dans des positions sociales défavorables.

Selon Rawls ces grands principes sont au nombre de deux:

· Le principe d'égales libertés: chaque agent a droit à un système de libertés aussi nombreuses que la compatibilité avec le même système de libertés pour chaque autre agent est garantie. Le nombre de libertés garanties est donc maximum, tant qu'elles ne nuisent pas aux libertés d'autrui.

· Le principe de différence: ce principe, définition parfaite de l'équité, justifie l'existence d'inégalités entre les agents, sous deux conditions:

? a: dans le respect de l'égalité des chances, c'est-à-dire la même possibilité pour

chaque agent d'accéder a des fonctions et situations sociales,...

? b: ...et en faveur des individus les plus défavorisés.

Chacune de ces règles étant hiérarchisées dans cet ordre. Les libertés individuelles ne peuvent être remises en cause par la nécessité de rétablir l'égalité des chances ou de mettre en place une redistribution des plus riches vers les plus pauvres. L'élaboration de ces principes par les individus est guidée par leur volonté de garantir l'accès aux «biens premiers», qui selon Rawls regroupent l'ensemble des valeurs sociales de base. Les biens premiers, qui dépendent de l'organisation sociale et institutionnelle de la société, sont désirés par chaque individus sous le voile d'ignorance et influencent leurs facultés de réalisation des objectifs qu'ils se sont fixé: les libertés de base, de circulation, le revenu et la richesse, les prérogatives et responsabilités des différentes fonctions sociales et les bases sociales du respect de soi-même.

Grâce à ces deux critères, on peut observer quelles sont les principales critiques que Rawls adresse a la conception utilitariste et parétienne de la distribution optimale des revenus: critique de l'absence de prise en compte de la liberté dans l'atteinte d'un état social optimal, et de la non-prise en compte des particularités individuelles et des différences de dotations dans le critère de maximisation de la somme des utilités individuelles. L'état social qui respecte ces principes est donc profondément équitable dans le respect le plus stricte des libertés individuelles. De plus, Rawls va chercher a montrer en quoi cet état social peut aussi être parfaitement efficace grâce aux critères du maximin et du leximin.

Pour Rawls, l'état social juste sera efficace s'il est un optimum de Pareto: il s'agit donc de trouver l'optimum qui minimise les inégalités « subies ». Le critère du maximin revient a maximiser l'avantage des individus se trouvant dans la position sociale la plus favorable, et donc à opérer un choix parmi les optimaux selon ce critère. L'état social juste est donc un optimum de Pareto qui maximise les utilités des agents les plus mal lotis. Ce critère comporte cependant une limite: si deux états, X et Y, génèrent des avantages équivalents pour les individus les plus défavorisés, et que dans le même temps le passage de X a Y permet de faire croître l'avantage des individus les mieux lotis, le seul critère du maximin ne permet pas d'opérer un chois entre ces deux critères. Pourtant, Y est plus efficace au sens de Pareto, et donc préférable. Il convient dès lors d'employer le critère du leximin, selon lequel il faut choisir l'état social qui donne le plus grand avantage aux individus placés juste au dessus des plus défavorisés, et remonter ainsi l'échelle sociale jusqu'au moment où l'état social désigné sera celui qui donne le plus grand avantage aux sociétaires les plus favorisés, compte tenu du fait qu'aucun autre état ne maximise les dotations d'individus moins favorisés.

Rawls parvient grâce au voile d'ignorance, procédure fondamentalement hypothétique, a concilier dans un même état social équité et efficacité. Il nous indique que la redistribution des revenus devra toujours s'attacher à améliorer la situation des plus pauvres en priorité.

Annexe 3: Du revenu primaire brut total au revenu disponible brut total. Source: INSEE, 2010

On voit ainsi que la part des salaires dans le revenu disponible a crû de 10 points de pourcentages entre 1960 et 2008, la part des revenus du capital a crû de près de 4 points, tandis que la part des revenus des indépendants a baissée de 13 points. Les prestations sociales représentent aujourd'hui 26,2% du revenu primaire brut contre seulement 15,5% en 1960. De même, les cotisations sociales et l'impôt sur le revenu ont représenté une proportion croissante du revenu primaire sur la période. Cependant, l'impôt sur le revenu ne représente toujours que 11,6% du revenu primaire, contre un peu plus de 27% pour les cotisations sociales.

Au final, la revenu disponible brut global représentait 95% du revenu primaire brut global en 1960, et il en représente aujourd'hui 89%, ce qui dénote la croissance du système redistributif.

Annexe 4: Calculs de quelques indicateurs d'inégalités de revenus.

L'indice de Gini:

Avec X la fréquence cumulée de la population classée par ordre de revenu croissant, pour tout individus ou groupes d'individus (i), et Y la fréquence cumulée du revenu.

Une des limites de cet indice de concentration est de ne pas savoir différencier deux distributions de revenus ayant le même espacement avec la courbe de Lorenz parfaitement égalitaire, mais n'ayant pas la même forme.

Ainsi, les deux distribution A et B pourront générer le même indice de Gini, alors que dans la distribution B les individus les plus pauvres sont plus riches que dans la distribution A, et que dans la distribution B les individus les plus riches sont plus riches que dans le distribution A. Par exemple, si on décide de fixer un objectif « rawlsien » à la redistribution, l'indice de Gini ne permettra pas de déterminer le niveau d'inégalité satisfaisant qui bénéficie le plus aux plus pauvres.

L'indice de Atkinson:

On a, pour tout agent (i), un revenu (yi). Y désigne le revenu moyen et N le nombre d'individus. Avec ? un paramètre positif qui caractérise le degré d'aversion pour l'inégalité de la population. Plus le paramètre est proche de 0, plus l'aversion pour les inégalités est forte: on corrige artificiellement la distribution des revenus en la rendant plus ou moins égalitaire, grâce à ce paramètre. Ainsi, lorsque il est bas, les inégalités de la distribution des revenus sont exacerbées: les revenus bas par rapport au revenu moyen sont réduits, et les revenus hauts par rapport au revenu moyen sont augmentés.

Ainsi, on voit que le distribution corrigée (yi /Y)^(1-0,25) est plus inégalitaire que la distribution corrigée (yi/Y)^(1-0,75). Ceci permet de prendre en compte l'aversion pour les inégalités qui est plus forte pour ?=0,25 que pour ?=0,75. Il faut ajouter que l'expression croît de façon exponentielle avec yi/Y, ce qui implique que pour un niveau donné de ?, la correction à la baisse des bas revenus est plus faible que la correction à la hausse des hauts revenus. Il y a donc une sensibilité plus importante aux inégalités de revenu générées par de très hauts revenus.

Dès lors, lorsque on calcule la moyenne de ces deux distributions, c'est-à-dire:

, on obtient une moyenne beaucoup plus élevée pour des valeurs faibles de ? (la moyenne de la distribution (yi /Y)^(1-0,25) sera plus élevée que la moyenne pour la distribution (yi/Y)^(1-0,75)).

On a en outre, pour une même valeur de ?, une moyenne plus élevée lorsque la distribution initiale y(i) est inégalitaire par le haut (c'est-à-dire lorsque les inégalités proviennent de hauts revenus très hauts), et on a une moyenne plus faible lorsque la distribution initiale est inégalitaire par le bas (bas revenus très bas). Ce calcul de moyenne permet de prendre en compte les valeurs extrêmes de la distribution.

Le terme est nécessairement positif tant que ? est différent de 1, et est croissant avec la baisse de ?.

On déduit donc de l'ensemble de ces propriété que l'indicateur d'inégalité est croissant avec la baisse de ?. Plus l'aversion pour l'inégalité est forte, c'est-à-dire plus ? est proche de 0, plus l'indice de Atkinson sera proche de 1 pour une même distribution des revenus y(i). Donc, plus la société marque une aversion forte pour l'inégalité, plus l'indice de Atkinson sera élevé. De plus, l'indice croît avec la hausse des inégalités pour une même valeur de ?.

Une dernière propriété de cet indice concerne sa réaction face à la redistribution: plus ? est bas, plus les ponctions réalisées par le redistribution sur les hauts revenus permettent de réduire l'indicateur d'inégalités, alors qu'a l'inverse, plus ? est élevé (i.e. plus la tolérance à l'égard des inégalités est forte), moins les ponctions sur les hauts revenus réduisent l'indicateur d'inégalités. De même, plus ? est bas, plus les transferts octroyés aux plus pauvres (valeurs extrêmes basses de la distribution) font baisser l'indicateur d'inégalités, et inversement lorsque ? est élevé, où ces transferts génèrent une diminution plus faible de l'indicateur d'inégalités.

Annexe 7: Formalisation du TMEI, inspirée par Duclos J-Y. et al.

On peut comprendre le Taux Marginal Effectif d'Imposition (TMEI) grâce à une formalisation très simple. On a, avec YD le revenu disponible, YL les revenus d'activité, YK les revenus du capital, Ysub les revenus issus des transferts et T les impôts payés:

On fait l'hypothèse que le montant d'impôts payés (T) augmente avec les revenus primaires (YK + YL), et que les montants des transferts (Ysub) diminuent avec les revenus primaires:

donc:

Le revenu primaire (YP) est composé des revenus du capital (YK) et des revenus du travail (YL). Donc:

On obtient une fonction exprimant le revenu disponible en fonction du revenu primaire. Ainsi, en dérivant, on exprime la variation du revenu disponible en fonction des variations de revenus primaires:

d'où:

En sachant que le TMEI est égal à , c'est-à-dire la différence entre la hausse d'impôt consécutive à la hausse du revenu primaire et la baisse des transferts consécutive à cette même hausse de revenu primaire.

On a:

Le TMEI est donc fonction de la relation qu'entretiennent les revenus primaires et les revenus disponibles. Plus le rapport sera important, c'est-à-dire plus la hausse du revenu primaire entraîne une hausse importante du revenu disponible, plus le TMEI sera faible. A l'inverse plus la rapport sera faible, c'est-à-dire plus les hausses de revenu primaire sont confisquées par le système fiscal ou se traduisent par des pertes de transferts, plus le TMEI sera élevé. La rapport sera supérieur à 1 dès lors que la hausse de revenu primaire entraîne une hausse plus importante du revenu disponible. Un dispositif tel que le RSA chapeau vise ainsi à faire passer ce rapport au dessus de 1.

Annexe 8: Détail des droits connexes attribués selon le statut, avant la réforme du RSA. Source: Rapport d'informations du Sénat, Commission des affaires sociales, Mai 2005

On peut classer en trois grands groupes les droits connexes: les « droits connexes légaux », les « mesures spécifiques » et les « transferts et avantages locaux ».

· Les droits connexes légaux:

? Les allocataires du RMI et de l'API ont droit aux aides au logement à taux plein. De plus, pour les bénéficiaires de l'AAH qui touchent les aides au logement, une « majoration pour vie autonome » est automatiquement versée, d'un montant de 95,92 euros mensuels.

? Les allocataires bénéficient de nombreux avantages fiscaux: pour tous, exonération de CRDS ; exonération de CSG pour tous hormis -entre autres- les bénéficiaires de l'ASS ; l'AAH et le RMI ne sont pas pris en compte dans le calcul des revenus fiscaux pour l'IRPP et les bénéficiaires de l'API et du RMI voient leur dette fiscale « suspendue ».

? Exonération de taxe d'habitation pour les RMIstes.

? Les bénéficiaires de l'AAH, du minimum vieillesse et du RMI notamment, sont exonérés de redevance audiovisuelle.

? Accès pour tous les allocataires à la Couverture Maladie Universelle (CMU), hormis dans le cas où ils sont déjà affiliés à un régime de sécurité sociale par ailleurs. Accès à la CMU complémentaire pour les RMIstes.

? Les bénéficiaires de l'ASS et de l'AER valident des trimestres pour l'assurance vieillesse.

· Les mesures spécifiques:

? La prime de Noël, versée habituellement tous les ans aux bénéficiaires du RMI, de l'ASS, de l'AER. Son montant était en 2005 de 152,45 euros.

? Tarification sociale du téléphone: le RMI, l'AAH et et l'ASS ouvrent droit à une réduction forfaitaire de six euros sur les factures de téléphone (des réductions sont aussi accordées pour l'électricité, mais en raison du revenu et non pas du statut).

· Les transferts et avantages locaux:

? Ces aides et avantages sont versés par les conseils généraux et les municipalités, et sont donc très divers et répondent à des logiques différentes selon les territoires. De plus, certains de ces avantages sont fonction du revenu, d'autres du statut.

? Les aides en fonction du statut sont le plus souvent des tarifs réduits pour l'accès à des services publics (services municipaux...)

? On peut noter à titre d'exemple l'accès gratuit pour tous les RMIstes aux transports en commun dans la région Ile-de-France.

Ainsi, tous ces avantages contribuent à accroître le coût du retour à l'emploi s'il se traduit par un changement de statut. Le TMEI réel est donc bien plus élevé que les estimations qui en sont traditionnellement faites et ne prenant en compte que les transferts monétaires directes.

Annexe 9: Estimations du TMI optimal dans le cas français par Salanié (in Salanié B. (1998). Un Exemple de Taxation Optimale. In Rapport du CAE Fiscalité et Redistribution ).

Salanié a estimé le terme pour la distribution des salaires bruts en France en 1998:

On trouve en toute logique que pour les revenus faibles, le nombre d'individus gagnant plus est beaucoup plus élevé que la densité d'agents concernés par ces faibles revenus, ce qui explique que l'on ait un rapport supérieur à 14 pour les très bas revenus. Cependant, le rapport diminue très fortement est s'approche de 1 pour des salaires équivalents au salaire brut médian, et de 0 pour des salaires proches de 2 fois le salaire brut médian et supérieurs.

En conséquence, si l'on suppose une élasticité de l'offre de travail de 0,3 et que le gouvernement adopte comme objectif de maximiser le transfert alloué aux ménages les plus pauvres (objectif rawlsien), Salanié trouve une courbe des TMI optimaux qui n'est pas convexe, et qui décroit linéairement avec le salaire brut:

Ainsi, compte tenu de l'optimalité d'imposer les individus de faible productivité, compte tenu de la répartition des individus selon le salaire, et compte tenu de la présence d'objectifs rawlsiens, le taux marginal d'imposition optimal est fortement décroissant avec le salaire brut médian: proche de 100% pour les revenus les plus faibles, et de 50% pour les plus élevés.

Selon Salanié, les TMI que l'on trouve effectivement en France ne sont donc pas optimaux au moins pour les salaires les pus élevés, qui devraient subir des TMI extrêmement faibles au vue de son application du modèle Mirrlees-Diamond. Pour lui, seuls les TMI proches de 1 pour les bas revenus sont donc justifiables au regard du modèle Mirrlees-Diamond. Il conclu donc de l'absence de problèmes liés aux hauts taux marginaux d'imposition appliqués aux bas revenus: la faible productivité de ces individus et leur faible nombre justifient donc que 100% de leurs revenus supplémentaires soient taxés.

Annexe 11: L'impôt optimal sur les revenus: de la maximisation des recettes fiscales à la maximisation de l'emploi.

Nous reprenons ici l'analyse de la théorie de l'impôt optimale formulée par Piketty dans son article, La Redistribution Fiscale face au Chômage.

Les fondements de la taxation optimale: Mirrlees, 1971.

Chaque agent (i) reçoit un salaire horaire (wi) dont le montant correspond exactement à sa productivité. L'agent choisit son niveau d'offre de travail (li) en vue de maximiser son utilité (U), qui décroît avec la quantité de travail offerte et croît avec le revenu disponible après impôts (yi). On a: U(yi ; li)

Un taux d'imposition uniforme (t) est appliqué, et dont le niveau est déterminé par l'Etat. L'objectif de la puissance publique est de maximiser le niveau des recettes publiques (R), dont le montant est égale au taux d'imposition multiplié par le revenu moyen (ymo):

R=tymo

Les recettes fiscales servent à financer un transfert alloué aux individus ayant une productivité nulle, donc un salaire nul.

Le taux de salaire net est égal à: (1-t)wi . C'est le salaire horaire, duquel est déduit l'impôt.

Le modèle permet de voir quel est le niveau optimal de (t). Pour cela, il convient de voir quels sont les effets d'une hausse de (t) de d%. Tout d'abord, le taux d'imposition devient (t+dt).

En conséquence, le taux de salaire net devient (1-t-dt)wi

On a une baisse du taux de salaire net de %

En effet:

Avec (e) l'élasticité de l'offre de travail, on a, par définition:

Donc: . Comme , la baisse de salaire net conduit à une baisse de l'offre de travail égale à %.

La variation des recettes fiscales (äR) combine l'effet positif dû à la hausse du taux

et l'effet négatif dû à la baisse de l'offre d'emploi:

On a:

Le taux d'imposition optimal est celui à partir duquel les deux effets s'égalisent: on augmente le taux tant que l'effet positif sur les recettes est supérieur à l'effet négatif de la désincitation à l'emploi. Au delà de t*, l'effet négatif supplanterait l'effet positif, et les recettes fiscales diminueraient.

Donc: lorsque , c'est-à-dire : .

On obtient , avec t* le sommet de la courbe de Laffer.

Réinterprétation du modèle avec une imposition non-linéaire: Diamond (1996).

Mirrlees avait déjà intégré en 1971 une pluralité de taux pour différentes catégories de revenus; cependant, en suivant Piketty, nous en présenterons ici la ré-interprétation faite par Diamond.

Aucun paramètre n'est modifié hormis le taux d'imposition. On a désormais t(y) la fonction résumant tous les prélèvements et transferts attribués aux agents en fonction de leur revenu primaire (y).On a t(0)<0 : un impôt négatif est versé aux agents dont les revenus d'activités sont nuls (y=0).

On a t'(y) le taux marginal appliqué au revenu (y), c'est-à-dire le taux prélevé sur une unité de revenu primaire supplémentaire.

La même méthode que précédemment est appliquée : on observe quel est l'effet d'une hausse du taux marginal sur les recettes fiscales afin de déterminer le niveau du taux marginal optimal. Ainsi, on suppose une hausse des taux marginaux appliqués aux revenus compris entre y et dy :le taux marginal passe de t'(y) à t'(y)+dt'.

Comme précédemment, l'effet est ambigüe. On a, d'un côté, une hausse des recettes: le taux d'imposition augmente pour tous les agents ayant un revenu supérieur à (y). En effet, pour que le taux marginal s'accroisse pour tous les revenus compris entre y et y+dy sans que les taux marginaux soient modifiés pour les revenus supérieurs à y+dy, il faut accroître les taux d'imposition appliqués à chaque niveau de revenu compris entre y et y+dy en faisant en sorte que le hausse du taux augmente avec le revenu. Pour que les taux marginaux appliqués aux revenus supérieurs à y+dy n'évoluent pas, les taux d'imposition qui leurs sont appliqués doivent tous croître dans une même proportion. On ne prend pas ici en compte les éventuels effets revenus générés par cette hausse des taux d'imposition sur tous les agents ayant un revenu supérieur à y+dy.

Cette hausse des recettes est desur chaque niveau de revenu supérieur à (y).

La part de la population dont le revenu est supérieur à (y) s'exprime ainsi:

Avec F(w) la fonction de répartition des taux de salaires et wy le taux de salaire correspondant à un revenu disponible égal à (y), la hausse globale des recettes est donc:

De l'autre côté, tous les agents situés entre y et y+dy voient leur taux marginal augmenter, ce qui induit, pour Piketty, que « leur taux de salaire net est passé de (1-t')w à (1-t'-dt')w ». Cette baisse du salaire net réduit l'incitation au travail: on a donc une baisse de l'offre de travail qui peut impacter négativement les recettes, égale à :%, avec e l'élasticité de l'offre de travail des individus ayant un revenu compris entre y et y+dy.

Il en résulte une baisse des recettes fiscales dégagées sur ce groupe de:%.

Le nombre d'agents ayant un revenu disponible compris entre y et y+dy s'exprime par la fonction de densité de la distribution des salaires (la fonction de densité exprime l'intégrale de la fonction de répartition sur un intervalle donné), soit : la densité (i.e. le nombre d'agents) pour des taux de salaires compris entre wy et wy+dw, correspondants à l'intervalle de revenu disponible (y ; y +dy).

On a une baisse globale des recettes de :

L'évolution globale des recettes fiscales est ainsi:

On maximise les recettes fiscales lorsque on atteint le taux marginal d'imposition qui ne génère plus de hausse de recettes (c'est-à-dire avant qu'il génère une baisse de recettes), c'est-à-dire pour dR=0

On obtient alors:

De la maximisation des recettes fiscales à la maximisation de l'emploi: Piketty (1997).

Piketty fait l'hypothèse que les agents ne font pas faire varier leur quantité de travail offerte (les heures de travail offertes par un individu n'évoluent pas en fonction de l'imposition), mais plutôt « la quantité d'effort et d'investissement personnel pour trouver un emploi ou pour être promu à un taux de salaire plus élevé ». Par souci de simplicité, on distingue trois groupes de revenus, dont les caractéristiques peuvent être résumées dans le tableau suivant:

 

Sans-emplois

Bas-salaires

Haut-salaires

Niveaux de salaires

 

W1

W2

Revenus disponibles

(y compris prélèvements et transferts).

y0

y1

y2

Nombre d'agents

m0

m1

m2

Taux moyen de prélèvement.

 
 
 

TMEI appliqués:

(la formule est celle présentée Chap.I Part.III)

Pour le passage du non-emploi vers l'emploi:

Pour le passage des bas salaires aux hauts salaires:

 

On peut dès lors exprimer le revenu disponible des bas salaires (y1), qui est égal au revenu disponible des sans-emplois (le transfert y0) auquel on ajoute le salaire w1 diminué du TMEI:

De même pour le revenu disponible des hauts salaires:

Les recettes fiscales (R ) sont définies par

On défini e0 l'élasticité de la probabilité de transition entre le non-emploi et l'emploi à bas salaires par rapport à l'écart y1-y0 : lorsque y1-y0 augmente de 1% « alors une proportion e0% supplémentaire de chômeurs trouvent un emploi à bas salaires ».

Comme précédemment on cherche à déterminer les taux marginaux effectifs d'imposition optimaux, ici T0* et T1*.

Une hausse de T0 jusqu'à T0+dT0 entraine une hausse des recettes fiscales de:

Avec les recettes nouvelles correspondant aux impôts payés par tous les salariés sur leur fraction de salaire brut inférieure à w1, et la perte de recettes dû à la baisse de l'emploi à bas salaire (dm1) consécutive à la désincitation au travail, accrût par la hausse de T0.

En effet, le hausse de T0 entraîne une baisse de y1-y0 de %. Le nombre de personnes demeurant inactives va augmenter de personnes. Au final, la baisse du nombre d'employés à bas salaires est égale à:

On remplace dm1 par son expression, et on obtient:

Et, pour dR=0, c'est-à-dire si l'on vise à maximiser les recettes fiscales:

En suivant la même logique, on obtient pour la transition des emplois à bas salaires vers les emplois à hauts salaires un taux marginal effectif d'imposition optimal de:

Annexe 15: Représentation graphique de l'impôt négatif

Un impôt négatif peut s'avérer identique, d'un point de vue redistributif, au versement d'une allocation universelle financée par un impôt proportionnel.

Voici l'effet redistributif d'une telle allocation:

Et voici l'effet redistributif d'un impôt négatif::

Annexe 16: principaux éléments du système redistributif français:

Les prélèvements:

· Principaux impôts directs:

· Impôt sur le Revenu des Personnes Physiques (IRPP):

Voici le barème de l'IRPP pour l'imposition 2010 des revenus de 2009. Le calcul du revenu imposable est obtenu en déduisant du Revenu Brut Global (grosso modo les revenus primaires) les charges déductibles et les abattements, et après mise en rapport avec la quotient familial (revenu imposable du foyer fiscal divisé par le nombre de parts du foyer).

En 2008, l'IRPP a permis de dégager 51740 millions d'euros de recette nette. 44,6% des foyers fiscaux sont non-imposables.

· Contribution Social Généralisée: impôt sur les revenus prélevé à la source. Le taux de prélèvement oscille entre 7,5% pour les revenus d'activités et 8,2% pour les revenus du patrimoine et de placements. Elle a permi de dégager 76,3 milliards d'euros de recette, ce qui est largement supérieur à l'IRPP.

· Contribution pour le Remboursent de la Dette Sociale (CRDS): impôt prélevé à la source sur les revenus d'activités, du patrimoine et de remplacements. Taux de 0,5% appliqué aux revenus brutes.

· Taxe d'habitation: payée par toutes personnes physiques ayant la jouissance privative d'un logement. Les RMIstes en sont exonérés.

· Cotisations sociales :

· Fonctions des salaires, elles sont imputées aux employeurs, aux salariés et aux indépendants; Elles sont déduites du salaire versé par l'employeur qui a à sa charge leur versement aux différentes caisses de sécurité sociale (URSSAF, UNEDIC...). Le taux effectif de cotisations sociales employeurs était de 26,5% en 2007, et de 14,71% pour les salariés (y compris la CSG et la CRDS).

Les transferts monétaires:

· Transferts sans condition de ressource:

· Allocations familiales: versées à tous les foyers à partir du deuxième enfant à charge. On dénombrait en 2002 près de 4 millions d'allocataires.

· Les prestations d'assurances sociales: protection contre le risque maladie, assurance retraite, assurance chômage.

· Transferts sous condition de ressource:

· Allocation de rentrée scolaire.

· Aides au logement: Allocations de Logements à caractère familial (environ un million d'allocataires), Allocation Personnalisé au logement (APL) (2,6 millions d'allocataires), Allocation de logement à caractère social, 2 millions d'allocataires).

· Les neufs minima sociaux pré-existants au RSA:

· L'Allocation aux Adultes Handicapés (AAH), versée aux adultes handicapés ne bénéficiant pas d'une rente consécutive à un accident du travail. Allocation différentielle, dont le montant maximum atteint 696,63 euros pour une personne seule.

· L'Allocation de Parent isolé (API), versée aux adultes seuls ayant au moins un enfant à charge et aux femmes enceintes isolées. Allocation différentielle, dont le montant maximal était en 2005 de 778 euros pour un ménage avec un enfant à charge.

· L'Allocation Temporaire d'Attente (ATA), allocation forfaitaire versée à certaines catégories de population en attente d'insertion (notamment les demandeurs d'asile et les anciens prisonniers), et pouvant justifier d'un revenu inférieur au RMI. Montant: 10,67 euros par jour.

· L'Allocation Equivalent Retraite,(AER) versée aux personnes ayant cotisés au moins 161 trimestres mais n'ayant pas atteint 60 ans (n'ayant donc pas droit à la retraite). Les allocataires doivent prouver un revenu inférieur à 1570€ pour une personne seule. Montant forfaitaire de 32€ par jour pour une personne seule.

· L'Allocation de Solidarité Spécifique (ASS), versée aux personnes en recherche d'emploi pouvant justifier de revenus inférieurs à 605,6 euros par mois pour une personne seule pour une allocation à taux plein. Montant forfaitaire: 15,14€/ jour (le montant décroit par pallier en fonction des ressources).

· Le Revenu Minimum d'Insertion, (RMI), allocation différentielle versée à tous les résidents en France de plus de 25 ans, et dont le montant maximal était en 2009 de 454,63€.

· L'Allocation supplémentaire d'Invalidité (ASI), pour les moins de soixante ans percevant une trop faible pension d'invalidité.

· L'Allocation Supplémentaire Vieillesse (ASV) pour les plus de soixante-cinq ans ne disposant pas de droits suffisants à l'assurance vieillesse.

· L'Allocation veuvage, pour « les conjoints d'assurés sociaux décédés ».

Les minima ne sont plus que huit aujourd'hui, le RSA (cf. Chap.II Part.III) s'étant substitué au RMI et à l'API. On voit que la plupart de ces transferts non-contributifs sont institués pour pallier une insuffisance du système d'assurances sociales (allocations chômage insuffisantes ou épuisées pour l'ASS et le RMI dans une moindre mesure, protection contre le risque maladie insuffisante pour l'ASI ou pour l'AAH, assurances retraite défaillantes dans le cas de l'ASV ou de l'AER ...)

Résumé:

Nous nous sommes attachés tout au long de notre mémoire à comprendre quels étaient les modalités de conciliation entre travail et redistribution, compte tenu tout d'abord de l'effet désincitatif de la redistribution, mais prenant aussi en compte les impératifs éthiques qui justifient que les revenus soient taxés et que des transferts soient octroyés. En effet, nous avons pu voir que les inégalités et la pauvreté seraient extrêmement importants sans l'intervention redistributive de l'État.

Plus précisément, nous avons cherché à savoir si, nécessairement, la redistribution désincite les agents inactifs à retourner vers l'emploi. Or, il apparaît que si cet effet existe et ne peut être ignoré, nous devons prendre en compte d'autres déterminants du maintien hors de l'emploi.

Les récentes réformes visant à rendre le travail payant adhèrent à cette vision d'une redistribution nécessairement désincitative, que nous remettons en cause. Nous nous sommes donc attachés à montrer que d'autres pistes étaient envisageables pour concilier au mieux travail et redistribution, mais que des choix devaient alors être faits, en terme de valeur attribué au travail et à la redistribution, et en termes d'hypothèses concernant les comportements des agents.

Notre travail repose essentiellement sur une recherche d'informations, de données chiffrées, d'idées et d'analyses, provenant à la fois d'articles et d'ouvrages de recherche, mais aussi d'essais ou de textes mettant en avant des partis pris.

Mots clé:

Pauvreté et Inégalités ; Redistribution ; Offre de travail ; Incitation monétaire ; Exclusion sociale.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand