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Gouvernance locale et developpement communautaire durable : cas du centre de santé du village Gboto Zeve au Togo.

( Télécharger le fichier original )
par Valentine OLOUME BEYEME
Centre de Recherche et d'Action pour la Paix, Institut de la Dignité et des Droits Humains - Master II en Ethique et Gouvernance; Option " Ethique Economique et Développement Durable". 2011
  

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Chapitre V- DISCUSSION

La présente discussion apporte un éclairage nouveau à la suite de l'analyse principale, effectuée au chapitre précédent. A titre de rappel sur le point méthodologique de cette étude, particulièrement sur la méthode de traitement et d'analyse des données, ce chapitre constitue l'analyse secondaire, qui, par définition, s'effectue en fonction des facteurs contrôlés et non contrôlés de l'étude. Dans le cadre de cette discussion, il s'agira précisément des facteurs dits « non contrôlés », car n'ayant pas été pris en compte au départ par la question et les objectifs de recherche.

Le premier facteur (section A) est celui de l'influence méme du cadre global togolais sur la situation de Gboto Zévé.

Le deuxième facteur est celui de la pertinence des modèles de développement communautaire (section B). En effet, il existe plusieurs types de développement communautaire dont la pertinence et l'efficacité doivent être au préalable analysées, puis adoptées en fonction du niveau de la décentralisation, des capacités institutionnelles, organisationnelles, économiques et sociales de la communauté. Un exposé de ces différents modèles de développement communautaire sera fait dans cette section, avant l'indication (dans les recommandations) du modèle approprié pour ce cas d'étude.

Enfin, une conclusion partielle en guise de synthèse (section C), à cette partie concernant l'analyse et l'interprétation des résultats de l'étude, ouvrira la voie au dernier chapitre (chapitre VI) qui traitera essentiellement des principales recommandations formulées à l'endroit des parties prenantes.

A- INFLUENCE DU CADRE GLOBAL

1- Similitude des problèmes au niveau local et au niveau national

Il est certes vrai que la gouvernance locale n'est jamais la transposition à une échelle territoriale réduite de la régulation globale.

Mais, à voir de près, il apparait d'une part que, la plupart des problèmes rencontrés dans la phase du diagnostic communautaire de Gboto Zévé, sont les mêmes que les différentes contraintes du Gouvernement togolais en matière de santé. D'autre part, les obstacles à l'atteinte des OMD, tels que relevés dans la première partie théorique (confère << contraintes et perspectives >>, et OMD 4, 5, 6 ; pages 14, 15 et 16). L'arbre à solutions avait déjà en quelques sortes identifié ces similitudes, en faisant ressortir des responsabilités partagées entre acteurs étatiques et locaux.

Ainsi, au nombre de ces similitudes, l'on peut retenir entre autres :

> l'absence de déclinaison des politiques sectorielles au niveau local, qui peut à juste titre justifier l'absence de déclinaison locale du Plan National de Développement Sanitaire. Il n'existe pas un Plan Local de Développement Sanitaire à Gboto zévé ;

> l'insuffisance des ressources humaines et de la qualité du plateau technique qui entraîne des faiblesses dans la qualité des prestations sur le terrain. De même, l'arbre à problèmes de Gboto Zévé révèle que l'insuffisance des infrastructures (matériels d'analyse, latrines, etc.) est l'une des causes du dysfonctionnement ;

> le faible revenu des ménages qui limite la fréquentation des structures sanitaires (le taux national de fréquentation des structures sanitaires étant de 30%). Une similitude au niveau local de Gboto Zévé (toujours conformément à l'arbre à problèmes), est l'endettement de certaines malades au niveau du centre de santé. Ces derniers se soignent << à crédit >> et sont souvent, pour certains, dans l'impossibilité de payer leur facture par la suite.

A l'analyse, ceci semble aller à l'encontre du questionnement de base de la problématique, recherchant le lien entre gouvernance locale et développement communautaire, tant l'influence de la régulation globale est visible. Au départ, il était question de mettre en relation la gouvernance locale et la dynamique de développement communautaire. Mais à ce niveau, de nouvelles interrogations jaillissent, et l'on peut se demander finalement si la faible fréquentation du centre de santé de Gboto Zévé est logiquement la conséquence d'un système tout entier ou uniquement l'inertie des populations locales.

2- Limites de la décentralisation

Les actions d'aide au développement ou de solidarité internationale jouent un rôle non négligeable dans le développement des communautés des pays pauvres. Cependant elles se déroulent le mieux dans un cadre de décentralisation favorable. Or, la lenteur du processus de décentralisation au Togo ne favorise pas l'émergence de la coopération décentralisée. Ce qui fait que, contrairement aux autres pays africains, le Togo ne bénéficie pas facilement des financements de la coopération décentralisée. Le fait que Gboto Zévé ne soit pas une collectivité locale peut aussi être un frein à son essor.

A titre d'exemple, les tableaux ci-après (tableau 7 et 8) faisant état des lieux de la coopération décentralisée entre la France et le Togo montrent que, les effets positifs de ce moyen d'appui au développement des communautés, pourraient encore être plus visibles, dans un contexte de décentralisation plus avancée.

Tableau7 : Les chiffres-clés de la coopération décentralisée au Togo

49 collectivités locales françaises

69 autorités locales togolaises partenaires 142 projets de coopération décentralisée

Estimation des montants annuels en 2010 alloués par les Collectivités territoriales françaises :

Cadre conventionné : 1 million d'Euros soit 650 Millions de FCFA

Hors cadre juridique loi togolaise : Associations, CVD, ONG, Agences de Bassins, etc.) : 1Million d'Euros.

Source : Atelier sur la coopération décentralisée au Togo, avril 2011.

Tableau 8 : Répartition des coopérations France-Togo (estimations en 2011).

Villages et cantons 45

Préfectures 6

Régions 1

Collectivités française Nombre

Communes 32

Communauté de Communes 9

Conseils Généraux 4

Conseils Régionaux 2

Collectivités togolaises Nombre

Communes 10

Source : Atelier sur la coopération décentralisée au Togo, avril 2011.

En effet, les Comités Villageois de Développement (CVD) et autres associations locales existent beaucoup plus en lieu et place des communes. La conséquence directe est l'absence de convention ou de jumelage de communes, du fait que les CVD ne sont pas des collectivités. La reconnaissance de la coopération décentralisée par la loi de 2007 relative à la décentralisation et aux libertés locales26 stipule à cet effet que :

« Les collectivités territoriales peuvent conclure des conventions ou accords de jumelage avec les collectivités territoriales étrangères dans les limites de leurs compétences et dans le respect des engagements internationaux de la République togolaise. »

Cette loi met en avant un mode de coopération des collectivités territoriales entre elles (voir schéma 4 page 55).Ce qui n'offre donc pas de cadre légal pour la coopération dans le cadre des CVD ou autres associations locales.

26 Atelier d'information et d'échange de bonnes pratiques sur la coopération décentralisée au Togo, France Volontaire, Lomé, Le 19 avril 2011.

Relation entre deux (02) collectivités (minimum) liées pas convention

Collectivité
Territoriale

Schéma 4 : Mode 1 de la coopération décentralisée

erritoiale

Cependant, le cadre légal français de la coopération décentralisée, étant plus flexible, dispose de quelques particularités bénéfiques pour les cas de décentralisation non avancées, parmi lesquelles la possibilité de signer des conventions avec des représentants non élus, sous le respect des engagements de la France, à travers le Ministère des Affaires Etrangères et Européennes (MAEE). C'est ainsi que deux autres modes de coopération deviennent possibles tels que le démontrent les schémas 5 et 6 de la page suivante27 :

27 Les trois schémas sur les différents modes de coopération décentralisées ont pour source le document de présentation de Boutrou C., atelier sur la coopération décentralisée au Togo, avril 2004.

Comités de jumelage

Collectivité du Nord Collectivité du Sud

Comité de jumelage
du nord

 
 
 

Comité de
jumelage du sud

 
 
 
 
 
 
 

Relation
mais
pas de convention

Schéma 5 : Mode 2 de la coopération décentralisée

Association ou ONG prestataire

Collectivité du Nord Collectivité du Sud

Association/ONG
prestataire

Schéma 6 : Mode 3 de la coopération décentralisée

3- Insuffisance des financements dans le secteur de la santé

L'insuffisance des financements dans le secteur de la santé constitue également une influence du cadre global sur la situation de Gboto Zévé. En effet, dans le rapport du Programme des Nations Unies pour le Togo sur les OMD en 2010, on note une longue suspension de la coopération au développement pour les points 4, 5 et 6 des OMD concernant la santé au Togo. Aussi, les Accords de Partenariat pour le développement (APD) qui représentent 11% du PIB en 1990 chutent à 2,5% en 2003.

C'est ainsi que, dans les domaines d'intervention de la coopération décentralisée entre la France et le Togo par exemple, la santé n'est pas parmi les secteurs privilégiés, comme le démontre le graphique ci-dessous :

Graphique1 : Domaines d'intervention de la coopération décentralisée en chiffre

7,4%

7,8%

5,6%

6,3%

13,1%

3,3%

2,6% 2,6% EauAssaunisement

/ Assainissement

19,2%

37,7%

Education-Formation Développement rural Santé

Activités génératrices de revenus

Culture-Communication Environnement Développement social Appui à la société civile

Source : Adapté de la présentation de Boutrou, C. (atelier sur la coopération décentralisée au Togo en septembre 2007), avril 2011.

A toutes ces contraintes susmentionnées, s'ajoute également, sur le plan financier, la faiblesse des ressources internes proprement dites du Gouvernement togolais. Sur cet aspect, malgré les légers progrès accomplis, beaucoup d'efforts restent encore à faire pour accélérer la croissance afin de générer des ressources internes.

Les influences de la régulation globale sur les problèmes analysés ainsi relevées, le deuxième objectif de ce chapitre sur la discussion des résultats consiste maintenant à s'interroger sur la pertinence d'un modèle de développement communautaire propre à Gboto Zévé au regard de toutes ces contraintes.

B- DIFFERENTS MODELES DE DEVELOPPEMENT COMMUNAUTAIRE

Considérant le fait que cette étude se situe dans un processus de Recherche - Action, il est nécessaire d'expliquer l'intérêt d'une stratégie d'intervention future à Gboto Zévé, et de connaitre les modèles de développement communautaire en vigueur ainsi que leur complémentarité et leur flexibilité. Ceci permettra aux parties prenantes de mieux les adapter plus tard dans la phase de planification du changement.

1- Pourquoi une stratégie d'intervention ?

De manière générale, une stratégie d'intervention représente à la fois un art et une science pour orchestrer les ressources en vue d'atteindre certains objectifs28. Le travail social exige qu'après plusieurs travaux empiriques constitués de recherches documentaires, de groupes de discussion et d'entrevues avec les acteurs du système, une stratégie soit définie pour entreprendre l'action en vue du changement. Car, soulignons-le, la finalité d'une telle investigation est la prise de conscience pour l'action future en vue du changement social. Tant il est vrai que le changement social signifie le passage d'une

28 Cormeau Y., Les stratégies d'intervenion en développement économique communautaire (texte court), Université Laval, juillet 2002, 10 pages.

situation << A » jugée moins satisfaisante à une situation << B » jugée satisfaisante. Et c'est là que réside d'ailleurs toute la problématique du développement, de sorte que les pays par exemple qui sont dans cette dynamique sont appelés pays << en voie de développement ».

A l'échelle communautaire dont il question ici, ces voies sont variées en fonction des types de problèmes identifiés, mais aussi des spécificités locales. C'est précisément dans ce sens que Cormeau dans sa définition de la stratégie précise que :

« Elle comporte un processus de réflexion, une approche de l'action et une articulation des moyens dans une direction souhaitée. Une stratégie d'intervention implique une mise en ordre des choix, leur progression, leur synchronisation avec le contexte et une mise en oeuvre appropriée.29 »

Reprenant Checkoway, il ajoute que la stratégie d'intervention se distingue de la tactique en ce sens qu'elle se déploie sur le long terme et qu'elle résulte d'un plan d'action envisagé en accord avec les orientations du groupe, les objectifs à atteindre et les obstacles à surmonter. La tactique représente donc en dernier ressort l'opérationnalisation de la stratégie.

L'exposé de ces modèles de développement communautaire, par rapport à la finalité de cette étude, permettra à la structure d'intervention LUPAJOTE, et éventuellement aux autres intervenants du secteur, non seulement d'orienter efficacement leurs projets, mais aussi de contribuer réellement au développement social de la localité. Ceci en touchant du doigt les réalités locales, par la prise en compte des problèmes jugés prioritaires par les populations elles-mémes. C'est ce qu'on appelle en d'autres termes le développement communautaire participatif.

En effet, c'est un développement qui porte déjà en son sein, et dès sa conception, les germes de la durabilité, puisqu'il accorde une place importante à la participation des bénéficiaires, leur responsabilité et leur engagement pour le changement. C'est la raison pour laquelle le cadre théorique des modèles de développement est à prendre en compte, à cette étape dite d'élaboration et / ou du choix de la stratégie d'intervention.

29 Op.cit., p.57.

Ainsi donc, dans ce cas, la stratégie possible découlera d'un plan de développement communautaire et non d'un plan de développement axé sur la communauté. Car, il s'agit de faire une différenciation entre les deux concepts, le développement axé sur la communautaire étant diamétralement opposé au développement communautaire. Le premier est exogène contrairement au second qui est endogène. C'est en quelques sortes la logique du haut vers le bas, opposée à celle du bas vers le haut.

Or, méme si l'un et l'autre disposent en leur sein des avantages et des inconvénients, nul n'ignore les chances de réussite infimes du « Top down » (un développement du haut vers le bas : il s'apparente au modèle de développement axé sur la communauté, voir tableau 9 ci-dessous) dans le contexte rural. Avant de présenter les modèles de développement communautaire en question, une présentation détaillée (voir tableau 9 ci - dessous), des particularités des deux systèmes s'avère nécessaire.

Tableau 9 : Particularités du développement des communautés

Développement axé sur la communauté Développement communautaire

Met surtout l'accent sur la résolution des problèmes en s'attaquant aux lacunes et aux faiblesses

Les problèmes sont définis par le gouvernement ou des organismes externes

Le changement passe par

l'information, l'éducation et
l'amélioration des services

Les professionnels sont le pivot central du processus et les principaux décideurs

Met plutôt l'accent sur les forces et les compétences

Ce sont les communautés qui cernent leurs propres problèmes

Le changement passe plutôt par l'accroissement des capacités et la prise de contrôle par la communauté

Les professionnels constituent plutôt une ressource pour la résolution des problèmes

Les principaux décideurs sont les institutions, les représentants gouvernementaux et tous les responsables nommés

Les décisions-clés sont prises par les représentants du milieu, qu'ils soient des leaders informels ou élus

Source : Adapté de Lavalle, D., Démarche partenariale de développement de la communauté, Québec, octobre 2001.

2- Modèles de développement communautaire en vigueur

Ici, seront pris en compte essentiellement les modèles de développement communautaire favorables à la promotion de la santé. Le terme modèle ici prendra le sens de théorie. Dès lors, il y a lieu de s'interroger : pourquoi l'intervention dans cette communauté nécessitera t-elle un cadre théorique ?

En effet, une théorie est un modèle explicatif de la réalité. Autrement dit, c'est une manière agencée d'examiner et de décrire un phénomène ou une situation, selon une logique particulière. Les intervenants utilisent donc des théories afin de :

- comprendre les individus, organisations et communautés avec lesquels ils travaillent;

- guider la sélection et le développement des stratégies appropriées pour l'action ;

- expliquer les facteurs favorisant (ou inhibitifs) aux changements individuels, communautaires et sociaux.

La grande majorité des théories en promotion de la santé proviennent des sciences sociales ou du behaviorisme (sciences du comportement). Mais elles contiennent aussi beaucoup d'éléments de différentes disciplines telles que la psychologie, la sociologie, le marketing, le comportement du consommateur, la gestion et la science politique. Cette diversité reflète la complexité même des questions de promotion de santé. Elles vont audelà du comportement de l'individu et incorporent la société toute entière, et même le rôle qu'apportent les politiques publiques tout comme les structures de l'organisation communautaire, dans la définition de la santé. Ainsi l'on parle de modèle ou de cadre théorique pour deux raisons essentielles.

La première raison est que la plupart des théories de la promotion de la santé ayant été développées par des sociologues aux États-Unis, ne reflètent pas la diversité et les spécificités des autres cultures du monde.

La seconde est que, contrairement à d'autres domaines du développement, les théories en promotion de la santé ne sont pas très développées et n'ont pas subi des études poussées.

Toutefois, la littérature30 mentionne qu'il existe un large éventail d'approches découlant des quatre composantes d'une théorie en promotion de la santé. Il s'agit :

- des théories explorant le changement du comportement sain chez l'individu;

- des théories expliquant le changement au niveau communautaire ; - des théories explorant les changements organisationnels;

- des théories expliquant le développement de politiques publiques favorisant la santé.

En pratique, certaines de ces théories ont des caractéristiques communes. Mais la problématique de cette étude et le diagnostic des problèmes de Gboto Zévé étant d'ores et déjà connus, nous nous limiterons aux théories expliquant le changement au niveau communautaire. Ces théories sont : la diffusion de l'innovation, la mobilisation communautaire et un cadre plus récent qui différencie les stratégies de base communautaire des initiatives de développement communautaire.

a) Diffusion de l'innovation

Une innovation est quelque chose de nouveau, en termes d'idée, de pratique ou de nouveau produit. Et la diffusion est le processus par lequel cette chose nouvelle est introduite et acceptée par une communauté ou une société. Les résultats des recherches en sciences sociales, et plus particulièrement en développement communautaire,31 montrent que les gens sont plus aptes à recevoir des pratiques nouvelles si et seulement si celles-ci sont :

- compatibles avec leurs besoins ;

- flexibles et peuvent s'adapter à des situations variées ;

- renversables au cas où les gens veulent retourner à leurs anciennes coutumes ;

- avantageuses en comparaison avec l'alternative ;

- assez simples pour que les gens puissent les comprendre et les adapter ;

30 Bulletins d'information en promotion de la santé (Bloc Notes du Centre ontarien d'information en prévention) disponible sur http://blocarchive.opc.on.ca.

31 Op.cit., p. 57.

- plus rentables que les bénéfices perçus.

La théorie de la diffusion de l'innovation classe les individus dans cinq catégories basées sur le temps pris pour adopter une innovation :

- innovateurs (la source de l'innovation) ;

- premiers adhérents (individus convaincus avec information pertinente) ; - majorité première ;

- majorité tardive ;

- Retardataires.

Le schéma 7 ci-dessous illustre la courbe de diffusion en forme de `S' des catégories d'adoption des innovations. Le petit nombre de premiers adhérents et une petite proportion des retardataires adoptent une innovation après la majorité des individus. Les premiers adhérents sont les chefs de file, ceux qui influencent les autres en les encourageant à adopter les nouvelles coutumes.

Schéma 7: Courbe de diffusion en forme de `S' des catégories d'adoption des innovations

Source : Extrait des travaux du Centre ontarien d'information en prévention, http://blocarchive.opc.on.ca , (Adapté de Nutbeam and Harris, 1998).

La théorie de la diffusion de l'innovation a été étudiée dans plusieurs milieux et pour diverses raisons. C'est un outil utile à l'analyse de la motivation et la réaction de la population face à l'introduction de nouvelles idées. Elle est utile dans l'orientation des interventions en promotion de la santé, en particulier celles qui veulent maximiser l'adoption des idées et pratiques prouvées efficaces.

La principale limite de cette théorie est son approche de la notion de « retardataire ». En effet celle-ci peut poser et pose méme beaucoup d'ambigüité, dans certaines circonstances. Cette théorie entre donc ainsi en confrontation avec d'autres qui établissent que, lorsque le changement est promu dans la communauté, on doit être sensible aux obstacles sociaux, économiques et structurels qui empêchent les groupes marginaux à faire des choix sains. Car, une adoption non réfléchie de la théorie pourrait servir à renforcer les inéquités structurelles qui ne sont pas forcément causées par le choix de l'individu.

b) Mobilisation communautaire

Comme indiqué en début de cette partie, et selon les options du cadre théorique de l'étude, la participation active des membres de la communauté dans l'identification de leurs problèmes prioritaires ainsi que des actions appropriées pour le changement est l'élément pour la réussite d'une initiative de développement communautaire. C'est dans ce cadre que s'inscrit la mobilisation communautaire, qui comprend plusieurs variantes, parmi lesquelles le cadre de Rothman, qui reste le plus connu. Ce cadre décrit trois approches distinctes pour influencer l'implication des communautés32 :

- le développement local ; - le Planning social ; et

- l'action sociale.


· Le développement local : est un processus qui vise la création de progrès social et économique pour la communauté entière en assurant sa participation active. Le problème est défini par les gens du milieu. Le but de ce processus consiste à régler le problème, d'aider les gens à s'organiser et à obtenir plus de pouvoir. Le rôle du

32 Inspiré des travaux du centre ontarien d'information en prévention.

travailleur communautaire est de former des petits groupes de tâche afin d'identifier et de solutionner les problèmes en commun. Toutes les démarches et les décisions nécessaires sont prises par les populations tandis que divers intervenants communautaires apportent un appui technique.

· Le planning social met l'accent sur un processus technique de résolution de problèmes sociaux. Ce modèle présuppose que le changement requiert des planificateurs experts qui possèdent des habiletés techniques pour identifier les problèmes et recommander l'action plus rationnelle.

· L'action sociale postule qu'il existe un segment défavorisé de la population qui a besoin d'être organisé, afin de revendiquer ses besoins pour plus de ressources ou encore, pour un traitement basé sur la justice sociale et la démocratie. Elle consiste en une mobilisation des gens qui sont directement touchées par un problème commun. On cherchera alors à corriger les déséquilibres de pouvoir entre les groupes opprimés et la société. L'action sociale peut donc être entendue comme une approche de confrontation en vue de l'équilibre de pouvoir entre les groupes marginaux et les segments dominants d'une communauté.

c) Cadre récent

Le cadre récent des modèles de développement communautaire en promotion de la santé différencie les stratégies à base communautaire des initiatives de développement communautaire.

Les stratégies à base communautaire assurent un lien entre les programmes et services des groupes communautaires. Les interventions suivent l'échéancier déterminé et les pouvoirs de décision restent avec l'agent responsable des subventions plutôt qu'avec les participants de la communauté.

Les initiatives du développement communautaire quant à elles se distinguent des stratégies de base communautaire dans plusieurs aspects :

- la problématique ou la question est définie par la communauté plutôt que par l'agent responsable des subventions;

- le processus de planification du développement des initiatives communautaires est continu et basé sur des négociations entre les organisations et les groupes communautaires, avec un travailleur communautaire agissant comme médiateur ;

- le développement communautaire est axé sur la capacité potentielle de la communauté, c'est-à-dire son habileté collective à contrôler les facteurs d'influence.

Cependant, à voir de près, ce cadre récent en dehors d'être centré sur la pleine participation communautaire semble néanmoins intégrer d'autres aspects des stratégies à base communautaire. Ce qui rend finalement complémentaires et flexibles les différents modèles.

3- Complémentarité et flexibilité des modèles de développement communautaire

La diffusion du changement, l'organisation communautaire et le cadre récent constituent trois modèles utiles pour décrire la diversité des orientations en développement communautaire. Mais en réalité et dans la pratique, très peu de démarches de développement communautaire correspondent à un seul modèle. Selon les praticiens, qu'importe le choix du modèle que l'on fait, l'essentiel est de s'adapter. Car, il demeure important de toujours garder une marge de flexibilité afin de mieux s'adapter aux changements éventuels qui pourront s'opérer. En effet, dans le processus du changement social, les changements obtenus ne sont pas toujours des changements souhaités. D'où la notion d'effets pervers, c'est-à-dire des effets non souhaités et gênants, entravant souvent les effets positifs souhaités et attendus à la suite de la diffusion d'une innovation.

Tout se passe finalement comme si le modèle type est finalement celui dont la stratégie s'appuie sur le potentiel des individus, des réseaux sociaux, des groupes, des communautés et des ressources. Ceci dans le but de permettre aux populations de prendre en main leurs problèmes sociaux. Chaque communauté qui a donc fait son autodiagnostic peut finalement créer son propre modèle de développement communautaire.

C'est ici que l'approche participative adoptée pendant la phase terrain de cette étude trouve tout son sens. Car, à travers ces ateliers et entretiens de groupe, notamment l'arbre à problèmes, l'arbre à solutions et le diagramme de Venn, la communauté parvient déjà à mieux se connaître elle-même : la priorité de ses problèmes, sa responsabilité, son organisation sociale, ses réseaux, ses ressources internes, ses compétences, etc.

Ainsi, l'on peut donc affirmer sans se tromper que, toute cette démarche a déjà constitué sans doute, pour la communauté de Gboto Zévé, un pas important vers la conception propre de son modèle développement communautaire.

C- CONCLUSION PARTIELLE : QUEL MODELE DE DEVELOPPEMENT COMMUNAUTAIRE POUR GBOTO ZEVE ?

D'une part, la question de recherche de cette étude se proposait de comprendre la relation pouvant exister entre gouvernance locale et développement communautaire. L'analyse principale des données de terrain démontre certes que la gouvernance locale a une influence sur le développement communautaire.

Mais, d'autre part, l'analyse et l'interprétation des résultats révèlent également une influence de la régulation globale sur la situation locale de Gboto Zévé.

Au regard des contraintes générales et spécifiques du Gouvernement togolais, qui sont quasi les mêmes que les problèmes rencontrés dans la communauté, il n'est pas aussi exclu que les politiques publiques aient une influence sur la gouvernance locale ; même si cette dernière ne saurait être entendue comme la transposition à une échelle territoriale réduite de la régulation globale.

Si finalement les contraintes au développement communautaire de Gboto Zévé ont un lien avec les contraintes générales du Gouvernement togolais, il est fort probable que les problèmes que l'on rencontre dans cette localité existent également ailleurs, dans d'autres villages togolais. Ce qui semble alors remettre en cause la position de départ (voir cadre théorique de l'étude) sur la pluralité des voies de développement.

Dans ce sens, cette position donnerait plutôt la suprématie aux théories généralisantes du développement, à l'instar de la théorie du cercle vicieux de sousdéveloppement, des étapes du développement, et donc par conséquent la notion de retardataire face à l'innovation (voir schéma 7, page 63).

A la question de savoir quel modèle de développement communautaire pour Gboto Zévé ? Il convient de répondre que le modèle adéquat s'inscrit dans le cadre récent, c'est-àdire celui de l'initiative communautaire. Toutefois, les approches pouvant être combinées, comme cela a été noté plus haut, il conviendrait d'ajouter à cette initiative communautaire un vaste volet mobilisation communautaire. Car, comme relevé tout au long de ces analyses, la communauté manque d'initiative, non seulement en l'absence d'un leader (que pourrait constituer le Comité Villageois de Développement), mais aussi en l'absence d'une dynamique interne. Il faut également noter une organisation socio-institutionnelle assez disparate, parce très peu, ou même pas du tout, ouverte à la collaboration et au partenariat.

A titre de rappel, cette étude s'est effectuée dans la cadre d'une mission au sein d'une ONG locale. Cette structure qui intervenait déjà dans d'autres communautés rurales, a bien voulu, avant toute intervention, comprendre la situation particulière de Gboto Zévé afin de mieux y orienter ses prochaines actions. Cette étape, loin de dresser déjà un plan d'action proprement dit, pour la mise en oeuvre de cette approche mixte (initiative communautaire et mobilisation communautaire) convenant à Gboto Zévé, se limitera uniquement à faire quelques recommandations à l'endroit des principales parties prenantes.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld