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Exploitation artisanale de l'or et développement en territoires de Mambasa et Wamba (province orientale, RD Congo)

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par Jean de Dieu AYBEKA KOPIKAMA
Universite Catholique du Graben - Licence en Economie de developpement 2010
  

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    INTRODUCTION GENERALE

    Devant les contraintes économiques que subissent les agriculteurs villageois en territoires de Mambasa et de Wamba ces dernières décennies1(*), plusieurs stratégies de réponses sont déployées par ceux-ci pour faire face à la situation. L'exploitation des ressources naturelles telles que le bois et l'or est l'une de ces stratégies. Le constat est plus manifeste quand on doit considérer ce que l'on a appelé depuis le XIXe siècle la « ruée vers l'or »2(*). Nous avons voulu étudier ce phénomène socio- économique en relation avec le développement en territoires de Mambasa et de Wamba. Mais avant tout qu'ont dit les autres chercheurs à ce sujet ?

    1. Etat de la question

    L'histoire des mines d' or qui a pendant longtemps mobilisé des millions d'orpailleurs, ces creuseurs d'or attirés par la moindre rumeur, a intéressé beaucoup de chercheurs. Les thématiques développées peuvent être regroupées en trois optiques: 1) l'exploitation artisanale de l'or occasionne des changements socio- économiques énormes, 2) l'orpaillage est un élément critique dans les abus contre les droits humains et 3) l'extraction de l'or, comme toute activité minière, fait partie du régime juridique particulier, celui de la séparation du sol et du sous sol, dénommé « régime du domaine éminent de l'état ».

    Se situant dans la première optique, dite optique des sociologues, Kouasi Nicolas KOUADIO, dans Exploitation artisanale de l'or dans le processus de mutation socio- économique à  Hire (Sud Bandama, Côte d'Ivoire)3(*), aboutit au résultat selon lequel la pratique de l'or a occasionné des changements dans la structure sociale et économique par son adoption au sein de la population de Hire. Ces changements sont constatés au niveau de rapports de production économique au sein de l'unité familiale et se manifestent par des contestations de l'autorité ou par des conflits d'autorité entre aînés et cadets sociaux.

    Plus proche de nous, MULULU MUGINIBWA Jean Marie, traitant de L'exploitation minière artisanale et l'amélioration des conditions socio-économiques des exploitants et des habitants de l'hinterland minier à Likasi4(*), abonde dans le même sens. Il conclut que l'exploitation minière artisanale, en diminuant le nombre des sans emplois à Likasi, contribue l'amélioration, donc au changement, des conditions socio-économiques des exploitants et des habitants de cette ville. Elle constitue également une activité de sauvegarde à la situation de manque d'emploi liée aux difficultés conjoncturelles que connaissent la plupart d'entreprises du pays en général et de la province du Katanga en particulier.

    La deuxième optique, celle des activistes des droits humains, apparaît dans les rapports de HUMAN RIGHITS WATCH et de CENADEP. Le rapport de HUMAN RIGHTS WATCH5(*), publié en 2005, avait révélé que l'attrait de l'or fut au coeur de très nombreuses atrocités commises contre les droits humains dans la région du Nord-Est de la RD Congo. Des seigneurs de guerre locaux et des compagnies internationales comptaient parmi les bénéficiaires de l'accès aux régions riches en or alors que les gens sur place étaient soumis à des massacres ethniques, des actes de torture et des viols. Au lieu d'apporter la prospérité aux populations de la Province Orientale, l'or s'est révélé être un « fléau » pour les populations qui ont eu la malédiction de vivre sur cette partie du pays. Publié en 2009, le rapport de CENADEP6(*) confirme cette situation. En effet, l'or a été un élément critique dans les abus contre les droits humains étant donné la cruauté avec laquelle les populations se sont entretuées pour le contrôle des mines d'or en Province Orientale.

    Une étude menée en 2003 au Sud- Kivu par Koen VLASSENROOT et Timothy RAEYMAEKERS, intitulée Conflit et minage artisanal à Kamituga (Sud- Kivu), et publiée en 2004 comme Cinquième chapitre de l'ouvrage de Koen VLASSENROOT et Timothy RAEYMAEKERS, Conflit et transformation sociale à l'Est de la RDC, allait déjà dans le même sens. Selon cette étude, dans un contexte de conflit et donc d'isolement socio-économique, le minage artisanal de l'or constitue à la fois la stratégie de survie pour la population locale mais surtout le moyen de financement des conflits armés avec tout ce que cela comporte comme violation des droits humains7(*).

    La thèse de NDELA KUBOKOSO Jivet, Les activités minières et la fiscalité (Cas de la République Démocratique du Congo), aborde cette question dans une optique purement juridique. Il s'agit d'une étude du régime juridique des activités minières en RD Congo. Pour NDELA KUBOKOSO Jivet, l'exploitation de l'or, en tant qu'activité minière, fait partie du régime de la séparation du sol et du sous sol, c'est un régime juridique particulier dénommé « régime du domaine éminent de l'état ». Ceci est à l'origine de plusieurs incompréhensions du code minier et du code foncier8(*).

    La lecture de ces études sur l'exploitation minière en général et sur l'exploitation artisanale de l'or en particulier nous a permis de préciser d'avantage notre propre problématique.

    2. Problématique

    Nous avons abordé la question d'orpaillage dans une optique différente de trois premières : c'est une optique « développementaliste ». La particularité de notre travail est cet effort de montrer les incidences de la pratique de cette activité sur le développement des populations locales. Nous nous sommes proposé d'aborder cette problématique sous l'intitulé : « Exploitation artisanale de l'or et développement en territoires de Mambasa et de Wamba (Province Orientale, RD Congo) ». Il s'agit de s'interroger si l'exploitation artisanale de l'or qui tend à dépeupler les villages de ses forces vives contribue au développement de ces derniers ou ne contribue qu'à en faire des riches d'une nuit et d'un jour avant de les jeter dans la misère après une aventure qui ne profite qu'aux trafiquants rusés venus de loin. Cette interrogation constitue le problème de développement que ce travail s'est proposé d'aborder.

    Ainsi la question centrale qui guide cette recherche est la suivante : Quel est l'impact de l'exploitation artisanale de l'or sur le développement en territoires de Mambasa et de Wamba ? Cette question centrale peut être éclatée à trois sous- questions :

    - L'exploitation artisanale de l'or favorise-t-elle l'éclosion des petites initiatives locales de développement (ILD) et la cohésion sociale qui manifestent un développement local ?

    - Qu'est-ce qui explique cette « ruée » de la population vers l'orpaillage ?

    - Quelle est l'incidence de l'activité aurifère sur l'environnement et la santé des populations, gages d'un développement durable?

    A ces questions correspondent les trois hypothèses de cette étude.

    3. Hypothèses provisoires

    La thèse provisoire de la recherche est la suivante : la pratique de l'exploitation artisanale de l'or aurait beaucoup plus d'impacts négatifs que positifs pour le développement en territoires de Mambasa et de Wamba. De cette thèse provisoire, nous avons déduit trois hypothèses pour ce travail :

    - Hypothèse 1 : L'exploitation artisanale de l'or viderait les villages de leurs populations actives, ce qui induirait par voie de conséquence, à l'absence des petites initiatives de développement (à vocation agro-pastorale par exemple) et à la fragilisation de la cohésion sociale par des conflits d'autorité.

    - Hypothèse 2 : Il semble que l'exploitation artisanale de l'or procure un revenu rapide et élevé permettant de satisfaire les besoins fondamentaux des exploitants artisanaux.

    - Hypothèse 3 : L'orpaillage aurait des conséquences néfastes sur l'environnement et sur la santé des hommes.

    4. Objectifs de recherche

    Cette étude a pour objectif général de montrer comment l'exploitation artisanale de l'or en territoires de Mambasa et de Wamba a une incidence sur le développement local. De cet objectif général, on peut déduire trois objectifs spécifiques, à savoir:

    - déterminer l'incidence de l'exploitation artisanale sur les petites initiatives de développement (à vocation agro-pastorale par exemple) et sur la cohésion sociale;

    - identifier les raisons de l'orientation de la population vers l'orpaillage ;

    - montrer les risques environnementaux et sanitaires occasionnés par l'orpaillage.

    5. Méthodes et techniques utilisées

    Etant donné que l'usage d'une méthode est tributaire de la nature de l'objet d'étude et des objectifs poursuivis par le chercheur, pour comprendre la problématique de l'exploitation artisanale de l'or en territoires de Mambasa et de Wamba, nous avons préconisé le recours aux méthodes à la fois qualitatives et quantitatives.

    a) Une méthode qualitative : le fonctionnalisme9(*)

    Pour bien mener notre recherche, nous avons utilisé la méthode fonctionnelle ou le fonctionnalisme. Inventée par le sociologue français BROMSLAV MALINOWSKI, la méthode fonctionnelle, comme toutes les autres méthodes qualitatives, privilégie le tout ou la totalité par rapport aux éléments. En effet, l'exploitation artisanale, de l'or en tant que fait socio- économique, ne peut pas se comprendre de façon isolée. Ainsi, la méthode fonctionnaliste nous a permis de ressortir les différents rôles de tous les acteurs ou intervenants de cette activité et les différentes fonctions de toutes les autres activités en relation avec l'orpaillage.

    Aussi avons-nous recouru à plusieurs techniques pour collecter les données qualitatives. En effet, nous avons pratiqué :

    - l'observation directe basée sur l'observation visuelle qui a pour avantages la saisie de comportements et des événements sur le vif, le recueil d'un matériau d'analyse non suscité par le chercheur mais relativement spontané, la relative authenticité des comportements par rapport aux paroles et aux écrits10(*) ;

    - le recueil des données existantes : nous avons fait donc un usage intensif des informations indirectes contenues dans diverses sortes de documents tels que des rapports, des documents personnels, des sources journalistiques et d'autres sources publiées ou non ;

    - l'entretien : il s'agissait d'entretiens individuels, mais parfois d'entretiens de groupe semi- directifs (nécessitant des réponses ouvertes) ou non directifs (en laissant place aux digressions et à la conversation spontanée) ;

    - et enfin, nous avons aussi obtenu des informations de première main auprès d'informateurs divers (exploitants artisanaux, négociants, services étatiques, etc.).

    b) Une méthode quantitative : l'induction statistique

    Nous avons aussi utilisé la méthode quantitative qu'est l'induction statistique. L'induction statistique est une méthode d'analyse statistique des données. Elle nous a permis de présenter une grande quantité de données statistiques descriptives et d'utiliser des techniques d'estimation en vue de généraliser les résultats obtenus sur l'échantillon à toute la population11(*).

    La collecte des données quantitatives nous a forcé d'utiliser la technique d'enquête par questionnaire, qui a pour principal avantage « la possibilité de quantifier de multiples données et de procéder des lors a de nombreuses analyses de corrélation »12(*).

    Dans l'analyse de données quantitatives proprement dite (âge, revenu, épargne), nous nous sommes attelés surtout au calcul de :

    - la tendance centrale, particulièrement la moyenne arithmétique, appelée plus simplement moyenne (un nombre qui résume à lui seul l'ensemble des données). La médiane et le mode sont deux autres mesures de la tendance centrale. La médiane d'une distribution est égale au nombre réel qui sépare l'effectif total en deux parties égales. Le mode correspond à la valeur de la variable qui apparaît le plus souvent dans la distribution ;

    - la dispersion quand on cherche à savoir si les mesures sont étroitement regroupées autour de la moyenne ou si elles sont dispersées. L'écart- type est une mesure de dispersion que nous avons le plus utilisé. Si l'écart- type est faible, les valeurs de l'échantillon sont regroupées autour de la moyenne ; s'il est important, elles sont en revanche très dispersées.

    Pourquoi le choix de ce sujet et quel intérêt revêt cette étude ?

    6. Choix et intérêt du sujet

    Notre choix pour ce sujet a été motivé par le fait que c'est depuis les années 1980 que les populations de territoires de Mambasa et de Wamba pratiquent l'exploitation artisanale de l'or. Il est temps de se demander si cette activité a aidé à impulser le développement en territoires de Mambasa et de Wamba. Si tel n'est pas le cas, faut-il continuer cette activité de la même manière qu'elle se déroule aujourd'hui ?

    Ce sujet est intéressant sur trois aspects. Il faut d'abord savoir que depuis l'époque coloniale, le secteur minier a contribué considérablement au développement du pays. En effet, pendant cette époque coloniale, le secteur minier a fonctionné comme un véritable chantier de production des matières premières destinées à l'exportation ; qu'à cela ne tienne, ce secteur a jeté le jalon de  l'équipement du pays. Malgré la crise multiforme qui a frappé le pays durant les années 1990, l'on a noté cependant que le secteur minier a contribué à soutenir l'économie nationale13(*). Nous avons ainsi essayé de comprendre et d'analyser cette relation entre l'exploitation minière, en particulier de l'or, et le développement local en territoires de Mambasa et de Wamba.

    Cependant, il faut ensuite reconnaître que l'exploitation d'importantes ressources minières (uranium, or, diamant, cuivre, etc.) que renferme la RD Congo engendre une multitude d'impacts sur la faune, la flore, les milieux naturels, aquatiques et terrestres. Aussi, certains projets d'exploitation des ressources minières alimentent la polémique et suscitent de vives inquiétudes. Dans les territoires de Mambasa et de Wamba en Province Orientale, l'exploitation artisanale, par exemple, entraîne de graves préjudices à l'équilibre de l'écosystème de plus en plus précaire dans le pays. Les principaux problèmes environnementaux qui en résultent sont la forte concentration des orpailleurs qui entraîne le déboisement anarchique des ressources végétales pour la satisfaction des besoins énergétiques (bois de chauffage) et d'habitation (bois de service); et l'accumulation des rejets d'exploitation du minerai, les déchets et ordures ménagères de toutes sortes constituent des éléments de pollution et de dégradation de la diversité biologique. Ce sont ces genres de problèmes que nous avons aussi essayé d'aborder dans le dernier chapitre de ce mémoire.

    Enfin ce sujet nous parait intéressant dans la mesure où il essaie d'apporter quelques informations aux praticiens, aux enseignants, aux étudiants et au public sur l'exploitation artisanale de l'or en territoires de Mambasa et de Wamba.

    7. Délimitation du sujet

    « L'exploitation artisanale de l'or et le développement» est un sujet vaste. Ainsi pour ce qui nous concerne, nous n'avons traité que de l'exploitation artisanale de l'or en territoires de Mambasa et de Wamba, en Province Orientale, dans la partie Nord-Est de la RD Congo, et aussi dans une optique de futur économiste de développement. L'exploitation industrielle qui a commencé récemment par KILO GOLD, particulièrement en territoire de Mambasa, ne fait pas partie de ce mémoire. Notre recherche porte précisément sur les activités artisanales d'orpaillage dans l'axe Bafwabango - Bafwambaya - Bafwanekengele, appelé respectivement 51 km - 47 km - 25 km, en territoire de Mambasa, et dans l'axe Gbonzunzu - Bolebole - Mambati, en territoire de Wamba. Les données y relatives ont été récoltées dans l'intervalle d'août 2010 à mai 2011.

    Toute fois, dans le souci de bien circonscrire le sujet, le cadre conceptuel, théorique et juridique de la recherche déborde cet espace géographique et va aussi au-delà de la période concernée par le sujet. On remarquera aussi ici et là quelques allusions en dehors de l'espace et du temps délimités pour illustrer certains faits observés.

    8. Subdivision du travail

    Ce mémoire présente trois chapitres qui sont : le premier traite des considérations générales sur l'exploitation artisanale de l'or et le développement; le deuxième de l'activité aurifère en territoires de Mambasa et de Wamba et le troisième de la place de l'orpaillage dans le processus de développement en territoires de Mambasa et de Wamba.

    Dans le premier chapitre, il est question de présenter les considérations conceptuelles, théoriques et juridiques sur l'exploitation artisanale de l'or et le développement. Nous définissons d'abord des concepts clés et connexes du sujet abordé. Ensuite, nous présentons les théories du développement qui sous-tendent notre réflexion. Enfin, nous exposons le cadre juridique de l'orpaillage en RD Congo.

    Le deuxième chapitre porte sur la description du milieu et des différents sites d'exploitations sur lesquels s'est réalisée l'enquête. Dans ce chapitre, nous présentons aussi les différents acteurs qui interviennent dans cette activité. Un accent particulier est mis sur la présence de la femme de l'enfant dans les carrières d'or. Le chapitre traite enfin des modes et types d'exploitation, du circuit de commercialisation et de l'attrait pour l'activité aurifère.

    Le troisième et dernier chapitre s'articule autour de trois points. Il s'agit de montrer les externalités positives et negatives de l'exploitation artisanale de l'or, d'analyser les conditions de l'émergence du développement à partir de l'orpaillage et de proposer les pistes vers un plan stratégique de l'exploitation artisanale de l'or.

    9. Difficultés rencontrées

    Pendant la durée de notre enquête, nous avons rencontré quelques difficultés majeures :

    - une difficulté d'ordre linguistique : cette difficulté est due à l'élaboration du questionnaire qui s'était faite en français, par conséquent, nous étions obligé de le traduire nous-mêmes en Swahili ou en Lingala pour nos enquêtés qui ne comprenaient pas le français ;

    - une difficulté d'ordre technique : nous avons été pris pour un agent judiciaire qui menait une enquête policière afin de découvrir les fauteurs de troubles, d'où la méfiance dans le chef de certains de nos enquêtés ;

    - une difficulté relative à la distance : les sites d'exploitation minière étant éloignés, nous étions obligés de parcourir de longues distances à pied pour les atteindre ;

    - une difficulté d'ordre matériel : la documentation nous a été insuffisante.

    Malgré les difficultés auxquelles nous avons été confronté, nous ne nous sommes pas laissé faire. Nous les avons surmonté, par exemple, en persuadant nos enquêtés que nous n'étions pas de détective. Quant à la distance, nous recourions parfois aux gens de bonne foi qui nous donnaient du carburant que nous mettions dans notre moto pour atteindre les sites miniers. Quant à la documentation, nous avons contacté les gens de bonne volonté qui nous ont aidé avec les documents intéressant notre sujet qu'ils gardaient dans leurs bibliothèques privées.

    CHAPITRE PREMIER :

    LES CONSIDERATIONS GENERALES SUR L'EXPLOITATION ARTISANALE DE L'OR ET LE DEVELOPPEMENT

    Ce chapitre traite des généralités jugées importantes pour la compréhension du sujet abordé. Il a pour objectif de présenter les considérations conceptuelles, théoriques et juridiques sur l'exploitation artisanale de l'or et sur le développement. Il s'agit de « retenir un cadre théorique consistant, adapté au problème étudié et dont on a bien saisi les concepts et les idées principales »14(*).

    1.1. DEFINITION DES CONCEPTS

    Commençons par préciser les contenus sémantiques des concepts-clés et connexes avant de nous employer à présenter le cadre théorique de notre étude.

    1.1.1. Les concepts- clés

    La compréhension du sujet abordé nécessite la compréhension de certains concepts- clés, à savoir l'exploitation minière artisanale et le développement.

    a) Exploitation minière artisanale

    L'ONU distingue trois types d'exploitation minière : grandes mines (exploitation industrielle ou à grande échelle), petites mines (exploitation semi- industrielle ou à petite échelle) et les mines artisanales (exploitation artisanale ou traditionnelle)15(*). C'est cette dernière qui concerne notre mémoire.

    Selon le code minier congolais16(*), en son article premier, l'exploitation traditionnelle ou artisanale est toute activité par laquelle une personne physique de nationalité congolaise se livre, dans une zone d'exploitation artisanale délimitée en surface et en profondeur jusqu'à trente mètres au maximum, à extraire et à concentrer des substances minérales en utilisant des outils, des méthodes et des procédés non industriels. Un article du Département des Affaires Economiques et Sociales des Nations Unies ajoute que, l'exploitation artisanale c'est l'utilisation directe de l'énergie humaine dans l'extraction des minerais17(*). Le terme orpaillage est souvent utilisé pour désigner l'exploitation traditionnelle ou artisanale de l'or.

    Le code minier congolais dans son article 109 précise que lorsque les facteurs techniques et économiques qui caractérisent certains gîtes d'or, de diamant ou de toute autre substance minérale ne permettent pas d'en assurer une exploitation industrielle ou semi- industrielle, mais permettent une exploitation artisanale, de tels gîtes sont érigés, dans les limites d'une aire géographique déterminée, en zone d'exploitation artisanale. L'institution d'une zone d'exploitation artisanale est faite par voie d'Arrêté du Ministre après avis de la Direction des Mines et du Gouvernement de la province concernée.

    L'exploitation minière artisanale est parfois confondue à l' « exploitation minière à petite échelle ». Le législateur congolais définit l'exploitation à petite échelle comme étant toute activité par laquelle une personne se livre à une exploitation de petite taille et permanente, exigeant un minimum d'installations fixes en utilisant des procédés semi- industriels ou industriels, après la mise en évidence d'un gisement. Ainsi la définition adoptée par l'ONU tient compte du nombre d'employés (moins de 40), du tonnage exploité (moins de 50.000 tonne par an) et du chiffre d'investissement (moins de 1 million d'Euros) et de sa durée de vie (généralement de moins de 5 ans)18(*).

    Ainsi dit, les éléments de distinction entre l'exploitation à petite échelle et l'exploitation artisanale peuvent être synthétisés dans le tableau ci-après, du point de vue de la nature des installations autorisées, de la nature des procédés d'exploitation admis ainsi que de la nature du gisement sur lequel chacun de ces formes peut être développée19(*).

    Tableau N° 1 : Différences entre les formes d'exploitation minière

    RUBRIQUES

    EXPLOITATION A PETITE ECHELLE

    EXPLOITATION ARTISANALE

    Nature des installations

    Permanent mais minimum

    Non permanente

    Nature des procédés d'exploitations

    Semi- industrielle

    Non industrielle

    Nature du gisement autorisée

    Faibles réserves mais bien mises en évidence

    Gisement pauvre et mise en place non établie

    Source : Congo- Afrique XLVIIIe année, N° 425, mai 2008

    Bien qu'il ressorte de cette distinction une grande proximité entre la mine à petite échelle et la mine artisanale, deux formes souvent rassemblées dans la doctrine sous le vocable de « Small Scale Mining », telles qu'elles sont organisées dans la loi congolaise, elles couvrent néanmoins deux réalités très différentes.

    En RD Congo, les orpailleurs continuent d'utiliser les moyens et les méthodes anciens. Le terme d'orpaillage ou d'exploitation artisanale trouve donc ici tout son sens. On retient donc que l'exploitation artisanale de l'or est une activité qui se fait sans l'utilisation de moyens techniques (machines) ou du moins à un degré moindre. Dans le cas des carrières d'or en territoires de Mambasa et de Wamba, la grande partie des orpailleurs n'utilise pas de machines, seules quelques unités de production possèdent des moto- pompes.

    Quel sens peut alors prendre le concept « développement » ?

    b) Développement

    La notion de développement reste floue car elle recouvre une large complexité. Aussi, vu la complexité du terme, nous avons voulu privilégier les concepts de développement local, de développement socio- économique et de développement durable étant donné leurs liens étroits avec le problème étudié.

    1° Développement local

    Le développement local, aussi appelé développement à la base, est un processus utilisant les initiatives locales au niveau des petites collectivités comme moteur du développement économique. Il est prôné dans les pays en développement en complément des mesures macroéconomiques et des grands projets. Le concept est apparu en France au milieu des années 1960 en réaction aux pratiques dirigistes de l' aménagement du territoire fondées sur des logiques sectorielles de filière. Le développement local n'est donc « (...) ni le fruit des décisions des pouvoirs publics ni le produit des mécanismes du marché, il s'enracine dans un terreau de plus en plus fertile, celui du monde associatif, qui bouillonne et canalise progressivement le flot de l'engagement citoyen, effrayé par l'irresponsabilité des marchés et découragé par l'apathie des élus »20(*).

    Pour MUSONGORA SYASAKA21(*), avec la faillite de l'Etat en RD Congo, les initiatives de prise en charge de tout genre ont gagné du terrain. Les populations elles-mêmes cherchent à trouver des solutions alternatives à leurs problèmes. Ces initiatives sont considérées comme du développement local dont parle le Professeur KAMBALE MIREMBE dans sa thèse22(*). Pour ce dernier, c'est de préférence au niveau local qu'il y a lieu de mieux considérer les individus et les groupes sociaux comme des acteurs à part entière de leur développement, tirant part des opportunités à leur disposition, essayant de maîtriser leur destin et non comme des destinataires passifs d'un développement offert par l'Etat ou les projets.

    Tout compte fait, nous pensons que le développement local, une des dimensions du développement, se manifeste à travers les petites initiatives locales entreprise par la population autochtone qui doit être active et vivant dans une cohésion sociale acceptable. Ces initiatives locales de développement, ILD en sigle, ne sont rien d'autre que des « petits projets dont le bénéfice peut revenir à ses membres et à la communauté. Par exemple une banque de céréales, un moulin a manioc, une forge, une pharmacie villageoise, un jardin, une pisciculture, un programme d'alphabétisation, un creusage des puits, (...) »23(*).

    2° Le développement socio-économique

    Le développement économique et social fait référence à l'ensemble des mutations positives (techniques, démographiques, sociales, sanitaires, ...) que peut connaître une zone géographique ( monde, continent, pays, région...). Ainsi, selon J. A. SCHUMPETER, dans son livre L'analyse du développement économique, le développement (socio- économique) est présenté comme « la mise en oeuvre des nouvelles combinaisons de moyens de production de telle façon que les conditions anciennes soient modifiées, que de nouvelles combinaisons créent de nouveaux produits, que de nouveaux marchés s'ouvrent, que la structure de marché se modifie. Ces diverses possibilités créent des révolutions productives »24(*).

    Le développement socio- économique ne doit pas donc être confondu avec la croissance économique. Celle-ci est habituellement nécessaire ou consécutive au développement mais elle n'en est qu'un aspect. La volonté de concilier développement socio- économique et croissance a mené le PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement) à forger, à côté des indicateurs de développement traditionnels (produit national brut, PNB en sigle et produit intérieur brut, PIB en sigle), d'autres indicateurs, tels que l' indice de développement humain (IDH), qui prend en compte la santé, l' éducation, le respect des droits de l'homme (dont font partie, depuis 1966, les droits économiques et sociaux), etc. Quand les membres d'une collectivité locale exercent les activités qui génèrent un revenu leur permettant de satisfaire les besoins fondamentaux tels que la nourriture, l'habillement, la santé, l'éducation, ... on peut donc dire qu'ils sont sur la voie du développement socio- économique, une deuxième dimension du développement que nous abordons dans ce travail.

    Tout développement, économique ou social, doit tenir compte aussi bien des générations actuelles que des générations futures pour qu'il soit durable.

    3° Le développement durable

    Selon le Professeur MAFIKIRI TSONGO25(*), le développement durable, en tant que la traduction actuellement la plus courante des termes anglais « sustainable development », a été défini en 1987 dans le Rapport « Word Conservation Strategy » comme un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. Deux concepts sont inhérents à cette notion : 1) le concepts de « besoins », et plus particulièrement des besoins essentiels de plus démunis, à qui il convient d'accorder la plus grande priorité, et 2) l'idée de limitations que l'état de nos techniques et de notre organisation sociale impose sur la capacité de l'environnement à répondre aux besoins actuels et avenir.

    En citant un article de R. LELE, paru en 1991, le Professeur MAFIKIRI TSONGO énumère quelques objectifs principaux du développement durable :

    - la reprise de la croissance ;

    - la modification de la qualité de la croissance ;

    - la satisfaction des besoins essentiels en ce qui concerne l'emploi, l'alimentation, l'énergie, l'eau, la salubrité ;

    - la maîtrise de la démographie ;

    - la préservation et la mise en valeur de la base de ressources ;

    - la réorganisation des techniques et gestion des risques ;

    - rendre le développement plus participatif.

    Le concept de développement durable se fonde donc sur la mise en oeuvre d'une utilisation et d'une gestion rationnelles des ressources (naturelles, humaines et économiques), visant à satisfaire de manière appropriée les besoins fondamentaux des générations actuelles en tenant compte des générations futures. Le développement durable tient compte à la fois de la rationalité économique (norme économique), de l'équité sociale (norme socio- éthique) et de la contrainte des milieux physiques (norme scientifique).

    Il existe d'autres concepts, pas de même importance, mais qui nécessitent aussi d'être définis pour bien comprendre les pourtours de notre sujet.

    1.1.2. Les concepts connexes

    Nous nous limiterons seulement à définir quatre concepts étant donné leur lien avec notre travail. Il s'agit de la mine, la carrière, le creuseur et le travail des enfants.

    a) Mine

    Selon le Code minier congolais26(*), la mine est tout gisement artificiel des substances minérales classés en mine, exploitable à ciel ouvert ou en souterrain, et/ou toute usine de traitement ou de transformation des produits de cette exploitation se trouvant dans le périmètre minier, y compris les installations et les matériels mobiliers et immobiliers affectés à l'exploitation.

    Somme toute, une mine est un gisement exploité de matériaux (par exemple d'or, de charbon, de cuivre, de diamants, de fer, d'uranium, etc.). Elle peut être à ciel ouvert ou souterraine. Il existe de gisements de forme tabulaire, d'origine non sédimentaire et montrant souvent une forte inclinaison, des gisements tabulaires se conformant à la stratification des roches encaissantes ; et dans des amas, de grands ensembles de minerai de forme irrégulière et d'inclinaison quelconque. On trouve souvent l'or dans des placers, des gisements alluviaux de sable et de gravier27(*).

    b) Carrière

    Le mot carrière est défini dans le Code minier congolais comme : « tout gisement des substances minérales classé en carrière exploitable à ciel ouvert et/ou toute usine de traitement de produit de cette exploitation se trouvant dans le périmètre de carrière pour réaliser leur transformation en produits marchands, y compris les installations et les matériels mobiliers et immobiliers affectés à l'exploitation »28(*). Pour ce qui concerne notre décente sur terrain, il a été constate qu'une carrière est tout simplement un gisement a ciel ouvert ou souterrain et le camp qui abrite les creuseurs.

    c) Creuseur

    En République Démocratique du Congo, le terme creuseur est utilisé couramment pour désigner l'exploitant minier artisanal. Il s'agit d'un travailleur qui exploite des gisements avec des procédés manuels, rudimentaires ou non industriels. Dans la suite, nous utilisons donc indifféremment les termes exploitants miniers artisanaux, creuseurs et orpailleurs. Ces derniers sont souvent de tout âge, y compris des enfants. Ceci nous amène à définir ce qu'on entend par travail des enfants, de plus à plus fréquent dans les mines.

    d) Travail des enfants

    Le travail des enfants est, selon la Banque Mondiale, « celui exécuté par des enfants qui sont trop jeunes au sens qu'en le faisant ils réduisent indûment leur bien-être économique présent ou leurs capacités futures à se faire un revenu, soit par le rétrécissement de leur horizon en matière de choix ou à travers la réduction de leurs propres capacités individuelles de production dans le futur »29(*). Le code du travail congolais qualifie le travail des enfants des pires formes de travail30(*).

    Selon l'UNICEF31(*), le travail des enfants est caractérisé par l'âge précoce au travail, une rémunération insuffisante, l'entrave de l'accès à l'éducation, l'exercice des contraintes physiques, sociales et psychologiques excessives, trop d'heures consacrées au travail, des atteintes à la dignité et au respect de soi des enfants, comme l'esclavage ou la servitude et l'exploitation sexuelle, l'obligation à une vie dans des conditions peu salubres ou dangereuses, etc.

    On estime aujourd'hui à environ 245,5 millions d'enfants qui exercent le pénible métier de mineur ou de creuseur. En RD Congo, par exemple, au moins 50000 enfants sont impliqués dans des activités d'exploitation artisanale des mines, dont des enfants autrefois associés aux forces et groupes armés. Parmi ces enfants, près de 20000 se trouvent au Katanga, environs 12000 en Province Orientale et au moins 11800 au Kasaï oriental32(*).

    Après ce bref parcours de définitions des concepts, présentons à présent les théories économiques sur lesquelles peuvent se fonder nos réflexions.

    1.2. CONSIDERATIONS THEORIQUES

    Cette section présente deux théories économiques en rapport avec notre travail : la théorie des externalités et la théorie des besoins fondamentaux.

    1.2.1. La théorie des externalités33(*)

    La théorie des externalités fait allusion une situation dans laquelle l'action d'un agent économique influe, sans que cela soit le but de l'agent, sur la situation d'autres agents économiques, alors même qu'ils n'en sont pas partie prenante : ils n'ont pas été consultés et n'ont reçu (si l'influence est négative) ni versé (si elle est positive) aucune compensation. Pour ce qui concerne notre travail, l'activité d'un orpailleur peut influer sur l'activité d'un agriculteur (et éleveur), d'un pêcheur, d'un artisan, voire même d'un écolier.

    Selon les effets économiques, on distingue les externalités positives (ou économies externes) qui désignent les situations où un acteur est favorisé par l'action de tiers sans qu'il ait à payer ; et les externalités négatives (ou déséconomies externes) qui désignent les situations où un acteur est défavorisé par l'action de tiers sans qu'il en soit compensé.

    Selon l'acte économique, on a les externalités de production et les externalités de consommation.

    a) Les externalités de production

    Les externalités de production désignent l'amélioration ou la détérioration du bien-être ressenti par l'agent B, non indemnisée, suite à une production de l'agent A. Il s'agit en particulier des externalités techniques, pécuniaires et technologiques.

    On parle d'externalité technique dans la production lorsque la fonction de production d'un acteur est modifiée par l'action d'un tiers. Un exemple célèbre est celui de l' apiculteur et de l' arboriculteur développé par James MEADE en 1952. L'apiculteur profite de la proximité de l'arboriculteur et obtient un miel de meilleure qualité qu'il pourra vendre à meilleur prix et cela gratuitement. L'arboriculteur ne sera pas payé pour le service indirect qu'il a rendu à l'apiculteur. Il s'agit dans ce cadre d'une externalité positive. Mais l'arboriculteur profite aussi gratuitement de la pollinisation de ses arbres, ce qui améliore son rendement sans faire recours à de coûteuses méthodes manuelles, et la pollinisation aléatoire des abeilles enrichit aussi la diversité génétique qui permet aux plantations de mieux résister à d'autres affections ou maladies. L'externalité est positive dans les deux sens.

    Il y a externalité pécuniaire lorsque les coûts d'achat ou de vente d'un acteur est modifiée par l'action d'un tiers. En ce qui concerne la production, on dira qu'une externalité pécuniaire modifie non pas la fonction de production, mais la fonction de coûts. Ce type d'externalités est très courant et peut être illustré par les investissements dans un secteur, par exemple l'acier, qui ont pour effet de diminuer le prix du bien produit et donc de diminuer les coûts d'un autre secteur, par exemple les constructeurs de chemin de fer, ce qui peut en retour augmenter sa demande d'acier qui amènera de nouveaux investissements et ainsi de suite. Les économistes du développement industriel se sont beaucoup interrogés sur ce type de dynamique dans le choix des investissements dans les pays en développement.

    Proches des externalités techniques, les externalités technologiques ont pour effet de modifier la productivité totale des facteurs et donc de modifier potentiellement la fonction de production individuelle de chaque firme. Les apports du progrès scientifique global sont des externalités censées profiter à tous sans qu'ils en aient à subir directement les frais. Le logiciel libre par exemple est aussi une externalité positive. Qu'en est-il des externalités de consommation ?

    b) Les externalités de consommation

    Les externalités de consommation, quant à elles, désignent l'amélioration ou la détérioration du bien-être ressenti par l'agent B, non indemnisée, suite à une consommation de l'agent A. On subdivise souvent les externalités de consommation en externalité de position et en externalité d'adoption.

    On parle d'externalité de position lorsque l' utilité que l'acteur tire d'un bien dépend de l'utilité que les autres consommateurs tirent du même bien, et surtout de la position de l'acteur par rapport aux autres dans la possession du bien. L'exemple des externalités de position le plus classique est celui des biens de luxe, pour lesquels la satisfaction tirée de la possession dépend en grande partie du fait que les autres possèdent ou non le même bien, le fait d'être le seul augmentant le plaisir retiré.

    Il y a externalité d'adoption, ou effet de réseau, quand le fait que d'autres personnes font la même action accroît l'utilité/valeur de l'action, autrement dit, la valeur du produit dépend de son nombre d'utilisateurs. Un bon exemple d'externalités de réseau réside dans l'adoption d'un standard informatique, par exemple un système d'exploitation. Plus il y a d'utilisateurs d'un système d'exploitation, plus il y a de programmes et de documentation faits pour ce système, ce qui amène d'autres utilisateurs, et ainsi de suite. On a là une logique de cercle vertueux.

    Ce phénomène d'externalité d'adoption permet d'expliquer le fait que le produit le plus utilisé sur un marché ne soit pas le plus utilisé parce qu'il est le meilleur en comparaison de ses concurrents, mais simplement parce qu'il regroupe plus d'utilisateurs. Plusieurs auteurs, ARTHUR en particulier, relève que dans une situation pareille le marché ne conduit pas forcément à la meilleure solution, et que dès lors l'intervention de l'État peut être légitime.

    Qu'en est-il maintenant de la théorie des besoins fondamentaux ?

    1.2.2. La théorie des besoins fondamentaux34(*)

    L'échec des politiques fondées sur une vision mécaniste du développement, le renforcement des inégalités, y compris celles engendrées par la croissance économique dans certains pays en voie de développement, contribuèrent à réorienter la réflexion en la matière. À partir des années 1970, les programmes de développement, sous l'impulsion du PNUD, prirent davantage en considération les spécificités culturelles et sociales des pays concernés ainsi que leurs structures institutionnelles.

    L'accent fut mis sur la satisfaction des besoins fondamentaux des populations. Il ne pouvait y avoir de développement sans que fût résolu le problème de l'insécurité alimentaire et sanitaire, sans élévation du niveau d'éducation des hommes et des femmes, acteurs du développement local. À la notion d'un modèle imposé de l'extérieur se substitua l'idée que le développement devait être un processus endogène, favorisé par la mise en place d'un cadre politique, financier et juridique favorable à l'initiative économique. Les populations devaient être plus étroitement associées aux projets de développement : leur participation fut notamment encouragée par les organisations non gouvernementales (ONG), de plus en plus impliquées sur le terrain.

    La mise en oeuvre des politiques d'ajustement structurel, à partir des années 1980, a cependant marqué un retour à la primauté de l'économie. Elle a eu pour conséquence immédiate de renforcer l'influence des institutions financières intergouvernementales au détriment des organismes spécialisés des Nations unies. Ces politiques ont incontestablement contribué, en Amérique latine et en Asie, à rétablir les grands équilibres financiers, et partant, à restaurer la confiance des investisseurs et prêteurs étrangers. Mais elles ont eu un coût social extrêmement élevé. Leur efficacité est davantage contestée dans les pays les moins avancés, notamment africains. Là, le processus d'industrialisation et de diversification de l'économie est à peine amorcé. Les possibilités de croissance sont hypothéquées par l'existence de multiples goulets d'étranglement (infrastructures inconsistantes ou défaillantes, segmentation des marchés internes et absence d'intégration régionale), handicaps aggravés par la corruption, la bureaucratie et l'instabilité politique.

    En fait, ces facteurs de blocage sont désormais mieux intégrés aux stratégies de développement et au cours des années 1990, les approches de la Banque mondiale, voire du Fonds monétaire international, ont tendu à rejoindre celles d'organismes tels que le PNUD. Un consensus tend à se dégager quant aux priorités : la transformation des modes de production, que doivent accélérer les transferts de technologie, doit s'accompagner d'une réforme de l'État et d'un changement des structures sociales. Il n'en demeure pas moins que l'évolution des pays en voie de développement dépend étroitement du contexte international, à plus forte raison lorsque s'opère une mondialisation de l'économie.

    En bref, la théorie des besoins fondamentaux prend en considération les spécificités culturelles et sociales des pays concernés ainsi que leurs structures institutionnelles. Ceci nous permet d'aborder la question du cadre juridique de l'orpaillage en RD Congo.

    1.3. CADRE JURIDIQUE DE L'ORPAILLAGE EN RD CONGO

    Nous étudions le cadre juridique de l'exploitation artisanale de l'or car c'est un aspect important qui peut favoriser ou défavoriser le développement des populations riveraines. Nous partons de l'historique du droit minier congolais.

    1.3.1. Historique du droit minier congolais

    Le droit minier congolais a subi plusieurs influences. NDELA KUBOKOSO35(*) regroupe ces influences en trois grandes parties : une partie qui concerne la période allant de l'époque coloniale à la prise du pouvoir par Mobutu, ensuite, il y a eu la période de la deuxième République et enfin la période de l'après- chute du président Mobutu, c'est-à-dire de 1997 à nos jours.

    a) De la période coloniale à la Première République (1885-1965)

    Le droit minier Congolais a pour origine primaire, le droit indigène. Ce droit était simple : les minerais appartenaient au souverain. Tout produit émanant d'une exploitation minière sur le territoire dont il régnait, lui était apporté. En sa qualité de souverain, c'est lui qui procédait à la redistribution. Ce système a fonctionné jusqu'à l'arrivée des colonialistes.

    Avec la colonisation, le droit minier Congolais a été influencé, par le droit occidental, notamment le droit minier français qui prônait la séparation ente la propriété du sol et celui du sous sol, et le système anglais qui prônait la propriété du sol emportait la propriété du sous sol et parallèlement, la propriété du sous sol appartenait au souverain.

    C'est le roi Léopold II qui a été vraiment à l'origine du droit minier Congolais actuel. A l'époque, les concessions minières ainsi que le territoire du Congo, étaient sa propriété personnelle. La stratégie du roi consistait à donner l'exploitation de ces concessions aux sociétés privées qui l'exploitaient, en contrepartie, celles-ci versaient des impôts à « l 'Etat Colonial du Congo » qui était également sa propriété. Les recettes réalisées par le système mis en place a permis au roi de prendre des participations dans les sociétés qui avaient des concessions.

    Et par la suite, afin de pouvoir contrôler l'économie congolaise, le roi créa une holding « société générale de Belgique » qui créa des filiales dans les différents domaines de l'activité du pays dont une de ses filiales était spécialisée dans l'activité minière : « le comité spéciale de Katanga » l'ancêtre de la fameuse GECAMINES.

    b) La Deuxième République (1965-1997) 

    Avant 1965, il n'existait pas de droit et de fiscalité minière comme tels. Le droit minier était détenu par trois sociétés coloniales : le comité spéciale de Katanga (CSK), le comité national de Kivu, la compagnie des chemins de fer de grands lacs.

    De 1965 à 1969 c'est la genèse du droit minier congolais avec plusieurs ordonnances lois. Avec l'arrivée de la junte militaire au pouvoir en 1965, il y a eu une vraie volonté de créer un droit et une fiscalité minière au Congo. Avec différentes ordonnances lois, on a abouti à un système à double régime d'imposition : un régime de droit commun, et un régime spécial pour les sociétés bénéficiaires des conventions d'établissement (à savoir un régime dérogatoire, au droit commun).

    De 1970 à 1997 il y a eu plusieurs autres textes dont notamment, le système de Contribution Générale Forfaitaire (CGF). Par ce système, les sociétés minières pouvaient opter pour payer mensuellement un montant de l'impôt ; à la fin de l'année, une évaluation était réalisée par rapport au vrai montant de l'impôt à payer. Comme on peut bien s'en douter, à la fin de l'année, la plupart des sociétés minières avaient trop versé d'impôt, donc disposaient d'un crédit d'impôt à valoir sur les impôts futurs. C'était la perversité du système.

    c) La Troisième République (depuis 1997)

    Depuis la chute du régime du président MOBUTU, et l'arrivée au pouvoir de Laurent Désiré KABILA, il y a eu deux périodes :

    - la période de 1997 à 2002 (date de la promulgation du code minier). Pendant cette période, il y a eu plusieurs lois et décrets dont les objectifs essentiels étaient la modification des taux des impôts ;

    - et la période actuelle après 2002 (juillet 2002), c'est le nouveau code minier qui régit le droit et la fiscalité minière actuels.

    Que pense alors ce nouveau code minier congolais de l'exploitation artisanale de l'or ?

    1.3.2. Le Code minier congolais et l'exploitation artisanale36(*)

    Le nouveau code minier organise l'exploitation artisanale des minerais de la manière suivante :

    a) De l'autorisation d'exploitation artisanale

    L'article 111 du nouveau code minier stipule que dans les zones d'exploitation artisanale, seuls les détenteurs des cartes d'exploitant artisanal en cours de validité pour la zone concernée sont autorisés à exploiter l'or, le diamant ou toute autre substance minérale qui est exploitable artisanalement. Les cartes d'exploitant artisanal sont délivrées par le Chef de Division Provinciale des Mines du ressort aux personnes éligibles qui les demandent et qui s'engagent à respecter la réglementation en matière de protection de l'environnement, de l'hygiène et de la sécurité dans les zones d'exploitation artisanale, conformément aux modalités qui sont fixées par le Règlement Minier après en avoir pris connaissance.

    b) Des obligations du détenteur de la carte d'exploitant artisanal

    D'après l'article 112, le détenteur d'une carte d'exploitant artisanal doit respecter les normes en matière de sécurité, d'hygiène, d'utilisation de l'eau et de protection de l'environnement qui s'appliquent à son exploitation conformément à la réglementation en vigueur. Il doit indemniser les exploitants agricoles pour tout dommage engendré par son activité. Le Règlement Minier fixe les modalités d'exécution des normes en matière de sécurité publique, de santé publique et d'environnement37(*).

    c) De la transformation des produits de l'exploitation artisanale

    Le Code minier, en son Article 113, dit que la carte d'exploitant artisanal n'autorise pas son détenteur de transformer les produits de l'exploitation artisanale. Toutefois, la transformation des produits par l'exploitant artisanal ne peut se faire que moyennant une autorisation préalable accordée par le Ministre.

    d) Du retrait de la carte d'exploitant artisanal

    L'article 114 du Code minier précise que la carte d'exploitant artisanal peut être retirée par le Chef de Division Provinciale des Mines ou par son représentant local qui l'a émise après une mise en demeure de trente jours sans remédier à la situation par la personne qui détient la carte, pour tout manquement aux obligations prévues à l'article 112 du présent Code.

    Le cas échéant, la personne à laquelle la carte a été retirée n'est pas éligible pour obtenir une nouvelle carte d'exploitant artisanal pendant trois ans, à moins qu'il complète un stage de formation en technique d'exploitation artisanale appropriée, organisé ou agréé par l'administration des mines. Le retrait de la carte d'exploitant artisanal donne droit aux recours prévus dans les dispositions des articles 315 et 316 du présent code. Le règlement minier fixe les modalités d'organisation de stage de formation en techniques d'exploitation artisanale.

    Le règlement miner qui complète le nouveau code minier définit le régime juridique et fiscal pour l'exploitation artisanale des minerais en RD Congo.

    1.3.3. Le régime juridique et fiscal pour l'exploitation artisanale

    A propos du régime juridique et fiscal pour l'exploitation artisanale en RD Congo, il faut encore rappeler que c'est un régime juridique particulier dénommé « régime du domaine éminent de l'état » qui consacre la prééminence du code minier sur la loi foncière. A ce propos, nous nous limitons seulement à dégager les droits et les obligations des différents acteurs concernés : l'exploitant artisanal, les négociants et les comptoirs agréés.

    a) L'exploitant artisanal

    L'exploitant artisanal est toute personne physique ou morale de nationalité congolaise qui se livre, dans une zone d'exploitation artisanale délimitée en surface et en profondeur jusqu'à trente mètres au maximum, à extraire et à concentrer des substances minérales en utilisant des outils, des méthodes et des procédés non industriels. Avant de commencer son activité, il doit supporter :

    - le droit d'entrée et l'impôt sur le chiffre d'affaires (ICA) à l'importation pour le matériel, équipement, liés à l'exploitation artisanale ;

    - le droit d'entrée pour les réactifs ;

    - la taxe rémunératoire pour la carte d'exploitant artisanal;

    - l'impôt professionnel sur les rémunérations ;

    - l'impôt sur le chiffre d'affaires (ICA) à l'intérieur.

    b) Le négociant

    Un négociant est toute personne physique de nationalité congolaise qui se livre aux opérations d'achat et de vente des substances. Selon le règlement miner38(*) qui complète le nouveau code minier, tous les négociants doivent supporter la taxe rémunératoire annuelle :

    - l'équivalent de USD 500 pour les négociants de catégorie A ;

    - l'équivalent de USD 3 000 pour les négociants de catégorie B ;

    - les impôts professionnels sur les rémunérations ;

    - l'impôt sur le chiffre d'affaires (ICA) à l'intérieur.

    c) Les comptoirs agréés

    Ce sont des personnes physiques ou morales autorisées à acheter des substances minérales d'exploitation artisanale provenant des négociants ou des exploitants artisanaux, en vue de les revendre localement ou de les exporter conformément aux dispositions du Code minier. Les comptoirs agréés paient :

    - la redevance annuelle lors de l'octroi ou du renouvellement de l'agrément : un montant d'environs USD 200 000;

    - la caution lors de l'agrément qui s'élève à peu près USD 50 000;

    - la taxe sur la carte d'acheteurs : plus ou moins USD 3 000;

    - la taxe sur la carte d'acheteurs supplémentaire (à partir de la 11ème carte) : environs USD 15 000;

    - la taxe d'intérêt commun : 1% sur les transactions d'or et de diamant ;

    - la taxe rémunératoire sur la carte de travail des étrangers ;

    - les impôts réels (impôts fonciers, impôts sur véhicules, taxes spéciales de circulation routière, l'impôt sur les concessions minières et hydrocarbures) ;

    - l'impôt cédulaire sur les revenus.

    1.3.4. Critique du code minier congolais

    Le code minier congolais appelle de notre part, trois principales remarques. En premier lieu, dans ce code minier, tout l'accent est porté sur la rentabilité du projet minier et très peu sur le développement national.

    Ensuite, l'Etat est complètement affaibli au bénéfice d'une libéralisation à outrance - il manque d'objectif de développement. Le titre I chapitre 2 alinéa 1 du code minier indique : « l'Etat n'a pour rôle que la promotion et la régulation du secteur minier ». Ce qui l'exclut donc de bon nombre de décisions importantes sur l'activité. Cette situation est dommageable à notre avis, voir même catastrophique, car l'Etat est garant de la richesse du pays, et doit être présent dans un secteur essentiel des activités du pays. La multiplication des acteurs dans l'activité minière constitue également un frein pour réduire le rôle de l'Etat.

    Enfin, le manque d'objectifs de développement social des populations locales. Sur les 941 articles du code et de règlement minier, un seul article traite de la mise en place des infrastructures locales. C'est l'article 242 du code minier qui traite de la répartition de la redevance minière. Le paragraphe 2 de cet article indique : « les fonds résultant de la répartition dont il est question à l'alinéa précédent en faveur des entités administratives décentralisées (EAD) sont affectés exclusivement à la réalisation des infrastructures de base d'intérêt communautaire ». Rien n'est prévu pour la formation des agents qui interviennent dans l'administration du code miner. Il n'existe non plus aucun dispositif pour la négociation des conventions minières pour des gisements de grande ampleur.

    L'application des dispositions du nouveau Code minier pose donc beaucoup de problèmes, notamment par rapport aux droits des occupants de sol. Sur ce point, il y a de plus en plus du mal à convaincre les populations autochtones de la différence entre le droit minier et le droit foncier. A notre avis, la raison se trouve dans la faible vulgarisation du Code minier. En effet, la faible vulgarisation du Code minier a conduit plusieurs interprétations erronées de ses dispositions, surtout en ce qui concerne la cohabitation des droits miniers avec les occupants des sols et l'exclusion des communautés de base de la jouissance des produits du sous-sol.

    Somme toute, le cadre juridique de l'exploitation artisanale de l'or en RD Congo pose problème. En effet, le nouveau code minier ne constitue pas un environnement favorable au développement des communautés locales. L'exploitation artisanale de l'or ne semble pas être intégrée dans les politiques de développement du gouvernement de la République.

    Conclusion partielle

    Durant ce chapitre relatif aux considérations conceptuelles, théoriques et juridiques sur l'exploitation artisanale de l'or et sur le développement, nous avons eu à définir, dans un premier temps, deux concepts clés de notre sujet, à savoir l'exploitation artisanale et le développement. . On retiendra donc que l'exploitation artisanale de l'or est une activité qui se fait sans l'utilisation de moyens techniques (machines) ou du moins à un degré moindre. Le concept de développement, plus précisément de développement durable se fonde sur la mise en oeuvre d'une utilisation et d'une gestion rationnelles des ressources (naturelles, humaines et économiques), visant à satisfaire de manière appropriée les besoins fondamentaux des générations actuelles en tenant compte des générations futures.

    En second lieu, nous avons distingué deux théories de développement qui fondent notre réflexion : la théorie des externalités et la théorie des besoins fondamentaux. De la théorie des externalités ( James MEADE), il est ressorti que l'activité d'un agent économique (l'exploitation artisanale de l'or, pour ce qui nous concerne) peut avoir des effets externes, positifs ou négatifs, sur les activités des autres agents (agriculture, éducation ou scolarisation, par exemple). Pour les tenants de la théorie des besoins fondamentaux (PNUD), l'accent est mis sur la satisfaction des besoins fondamentaux des populations.

    Enfin, nous avons clôturé ce chapitre en étudiant le cadre juridique de l'exploitation artisanale de l'or en RD Congo. L'exploitation artisanale de l'or peut constituer un facteur de développement qui relève d'un processus d'accumulation - et non des seuls comportements de survie - mais à la seule condition que le cadre juridique crée un environnement favorable au développement des communautés locales. Cela ne semble pas être le cas pour notre pays. Nous le verrons dans le chapitre suivant qui est consacré à l'exploitation artisanale de l'or dans les territoires de Mambasa et de Wamba.

    CHAPITRE DEUXIEME :

    L'ACTIVITE AURIFERE EN TERRITOIRES DE MAMBASA ET DE WAMBA

    Ce chapitre a pour objet à la fois l'étude du milieu de la recherche, l'étude de la caractérisation des acteurs de l'activité aurifère qui y opèrent, l'étude des types d'exploitation artisanale qui s'y pratiquent et l'étude des raisons de l'attrait de la population pour cette activité aurifère. Ce chapitre nous permettra ainsi de vérifier les deux premières hypothèses de ce travail.

    2.1. PRESENTATION DU MILIEU DE RECHERCHE

    Nous présentons ici le milieu de notre recherche en trois points : son contexte socio-économique et politique, la Réserve de Faune à Okapi (RFO) qui s'y trouve et les carrières d'or opérationnelles dans ce milieu.

    2.1.1. Contexte socio-économique et politique des territoires de Mambasa et de Wamba en Province Orientale

    Les territoires de Mambasa et de Wamba, comme tant d'autres territoires de la RD Congo, ont été frappés durement par les conflits armés qui ont endeuillé la population congolaise entre 1997 et 2008, année officielle de la réunification politique. Ces conflits armés qui ont enrôlés volontairement ou de force des milliers d'enfants et adultes ont eu un impact négatif sur la situation socio-économique de ces territoires : la persistance des certaines maladies (l'onchocercose, la trypanosomiase, le goitre, ...), la consommation exagérée de la drogue et de l'alcool par les jeunes, l'habitat rudimentaire, le revenu très faible des habitants, etc39(*).

    L'environnement économique de ces deux territoires est cependant marqué par des potentialités naturelles et du sous-sol énormes (or, diamant, fer, pétrole, bois, cours d'eau, etc.) et des potentialités touristiques importantes (les vestiges du champ de Stanley (Ford-Boolo) à Mambasa, la station de capture des Okapis à Epulu, les sanctuaires de la Bienheureuse Sr. Anoalite à Wamba et à Bafwabaka) capables de propulser la croissance économique et le développement des populations locales. Malheureusement, toutes ces richesses ont toujours été spoliées et n'ont jamais profité suffisamment à la population.

    Le territoire de Mambasa, situé au Nord de l' équateur entre 1°00' et 1°30' latitude Nord et 29°00' et 29°30 longitude Est, possède un sol fertile favorisé par un climat tropical humide fortement influencé par l'altitude. Cette fertilité du sol favorise la production de différents produits : manioc, haricot, igname, patate douce, riz, ail, banane, soja, choux et d'autres légumes. Les activités économiques du territoire de Mambasa sont, pour la plupart, à caractère individuel et familial. La population autochtone vit principalement de travaux agricoles, d'élevage et de commerce. De nombreux jeunes s'orientent vers les travaux d' orpaillage ou de moto- taxi . Les personnes originaires des autres provinces du pays sont venues habiter Mambasa pour y exercer des activités d'agriculture, de commerce ou d'employés de l'administration publique40(*).

    Quant au territoire de Wamba qui a une superficie de 10305 km2, il est situé à 02°09' latitude Nord et à 28°00' longitude Est. La température moyenne varie entre 28° et 30° C. Dans l'ensemble du territoire, le relief du sol est accidenté par de grandes et petites collines dont l'élévation peut atteindre 300 à 400 m, puis par des grosses pierres. Le sol est sablonneux, surtout aux endroits se trouvant près de rivières et dans d'autres endroits le sol est argilo -sablonneux. Cette entité administrative se distingue par ses vocations agro-pastorale, forestière et minière41(*). A cause de son enclavement, le moyen de transport longtemps utilisé a été le vélo. Cela n'a pas favorisé les activités commerciales.

    Les problèmes majeurs communs aux deux territoires de Mambasa et de Wamba et qui constituent la manifestation même de la pauvreté généralisée qui sévit dans le pays sont la pauvreté intellectuelle (analphabétisme42(*)), la pauvreté socio-économique (manque d'eau potable43(*), inexistence des marchés agricoles, impraticabilité des routes de desserte agricole, ...) et la pauvreté sécuritaire (conflits sociaux). Parmi les déterminants de la pauvreté en territoires de Mambasa et de Wamba, le DSCRP provincial cite principalement l'absence des services d'encadrement des paysans, d'intrants agricoles et des marchés des produits agricoles44(*).

    Bref, les guerres à répétition, particulièrement depuis 1996, le morcellement de la province entre les belligérants, les conflits interethniques à l'Ituri et l'insécurité persistante ont détruit le tissu socio-économique des territoires de Mambasa et de Wamba et réduit les populations locales à une grave misère. Une autre conséquence des ces conflits armés est la dégradation avancée et en voie de disparition de plusieurs espèces animales de la réserve de faune à Okapis d'Epulu, habitat d'Okapis, une espèce unique au monde.

    2.1.2. La Réserve de Faune à Okapis (RFO) à Epulu45(*)

    La Réserve de Faune à Okapis est un site de patrimoine mondial créé pour la conservation de la richesse biologique de la foret de l'Ituri et du Haut- Uélé afin d'assurer l'utilisation durable de ses richesses naturelles par la population locale.

    a) Son historique

    Après la deuxième guerre mondiale, vers 1944, Mr. PUTNAM de nationalité américaine, est venu s'installer à Epulu comme hôtelier. Entre-temps, il capturait les singes et okapis à montrer aux visiteurs. En 1952, Mr. DE MEDINA, un portugais, crée officiellement la station de capture et d'hébergement de beaucoup d'espèces animales, à savoir les okapis, les éléphants, les crocodiles, les chimpanzés, etc. Pendant la rébellion de 1964, tous les animaux en captivité furent massacrés, dont 28 okapis. Après la rébellion, la station de capture d'Epulu reprit ses activités avec le soutien de plusieurs partenaires étrangers : le Wildlife Conservation Society46(*) (W.C.S.) depuis 1982, le projet Gilman International Conservation Inc (G.I.C.) depuis 1987, le Word Wildlife Funds47(*) (W.W.F.) depuis 1987, le projet Frankfurt Zoological Society48(*) (S.Z.F), etc.

    Le 2 mai 1992 fut créée la Réserve de Faune à Okapis (R.F.O.) par l'arrêté ministériel n°045/CM/ECN/92. Elle s'étend sur une superficie de 1372625 hectares soit environs 40862 km2 dont la gestion est confiée à l'Institut Congolais pour la Conservation de la Nature (I.C.C.N.). Elle est à cheval sur trois territoires administratifs : Mambasa (90%), Wamba et Watsa (10%)49(*).

    b) Ses richesses

    Du point de vue végétation, la R.F.O. couvre trois types principaux de forêts de terre ferme et un type de forêts riveraines:

    - les forêts mixtes avec « cynometra alexandri » et « julbernadia seretii » (appelés localement « Tuna » et « Alambi ») comme espèces d'arbres dominantes ;

    - les forêts mono- dominantes avec « gilbertiodendron dewevrei » (appelé localement « Mbau ») comme espèce d'arbre dominante ;

    - les forêts sèches des hautes collines ;

    - les forêts riveraines ou les forêts marécageuses.

    Du point de vue faune, l'inventaire mammalien a donné un chiffre de plus ou moins 5000 okapis. A part cette espèce, il existe 2000 léopards, 4700 éléphants de forêts, 7500 chimpanzés à face claire, 6 espèces de céphalophes, 3 espèces de crocodiles, 13 espèces de primates, 327 espèces d'oiseaux, les buffles de la foret, la genette aquatique,le chevrotain aquatique, divers insectes, reptiles et amphibiens, etc. La plupart de ces espèces sont reprises dans la liste des espèces animales totalement ou partiellement protégées en RD Congo50(*).

    Parmi les problèmes qui menacent aujourd'hui la RFO, on note l'exploitation artisanale de l'or qui crée des grands foyers de chasse commerciale dans la réserve et qui altère l'habitat des animaux51(*).

    2.1.3. Les carrières d'or dans les territoires de Mambasa et de Wamba

    En Province Orientale, l'or a été découvert pour la première fois dans la rivière Agola au Nord-Est de la RD Congo en 1903 par les prospecteurs australiens. Ils ont baptisé la zone du nom de chef local Kilo. Une autre découverte a été faite par eux dans la rivière Moto, un peu plus au Nord. D'où le nom de l'Office de mines d'or de Kilo- Moto (OKIMO), devenu actuellement la Société de mines d'or de Kilo- Moto (SOKIMO). Les carrières d'or en territoires de Mambasa et de Wamba ne font pas partie de ces mines. Elles se trouvent entre les mines de Kilo et de Moto comme l'indique la carte en annexe (Annexe N°4).

    Les territoires de Mambasa et de Wamba regorgent plusieurs carrières d'or concentrées autour des grandes agglomérations comme Mambasa, Niania, Wamba, Gbonzunzu, Bolebole et Mambati. Mais nos enquêtes se sont déroulées seulement sur quelques carrières regroupées en deux zones d'orpaillage. Ce sont les zones de Bafwabango - Bafwambaya - Bafwanekengele (territoire de Mambasa) et de Gbonzunzu - Bolebole - Mambati (territoire de Wamba). Le choix de ces deux zones se justifie par le fait qu'elles sont les plus connues et les plus fréquentées.

    a) La zone de Bafwabango - Bafwambaya - Bafwanekengele

    Cette zone comprend trois sites ou agglomérations importantes (Bafwabango, Bafwambaya et Bafwanekengele) autour desquels s'organisent une trentaine des carrières d'or. Il s'agit des carrières suivantes : Santa Maria, Mopa, Libre -ville, Camp Base, Malekesa, Kazania, Lisala, Adombi, Vatican, Canon, Monde Arabe, Mbuji-Mayi, Mambo Bado, Mabele Mokonzi, Tindika Longindo, Dieu- Merci, La Grâce, Kputuka, Mangenengene, Yindi, Kanana, Singa Muambe, Manzedaka, Potopoto, Etoile, Tika Muana, Landa Bango, Akili Nyuma, Tokobika, Maroc, Senke Bisengo, Maka, Lisala, Tokomeka, etc.

    Les sites de Bafwabango et de Bafwambaya, situés respectivement à 51 km et 47 km de Niania sur l'axe Niania - Wamba - Isiro et séparés seulement de 3 km entre eux, sont caractérisés à la fois par des exploitations à ciel ouvert et des exploitations souterraines. Pour ce qui concerne les exploitations souterraines, les orpailleurs de ces deux sites descendent dans des puits antérieurement creusés lors du premier orpaillage à l'époque coloniale. La profondeur de ces puits peut atteindre parfois 20 à 25m. Il existe des tunnels qui relient les puits entre eux de sorte que l'ensemble constitue un réseau souterrain dense. L'une des particularités de ces exploitations souterraines, est sa richesse en or. Mais s'il est possible d'avoir un rendement élevé d'or sur ces exploitations, leur fréquentation est redoutée par la plupart des orpailleurs parce qu'elles présentent des risques d'éboulement.

    Situé aussi sur l'axe Niania - Wamba - Isiro, à environ 25 km de la cité de Niania, le site de Bafwanekengele est un site d'exploitation a ciel ouvert. Du fait de sa proximité à la cité de Niania par où passe la route nationale n°4 réhabilitée en 2008, il se développe aussi sur ce site, des activités économiques importantes. Il y a notamment le commerce de médicaments, de produits cosmétiques, de vêtements, de produits vivriers et surtout de la restauration (vente de bières et de différents mets).

    b) La zone de Gbonzunzu - Bolebole - Mambati

    Cette zone comprend aussi une trentaine des carrières d'or opérationnelles reparties inégalement dans trois sites importants (Gbonzunzu, Bolebole et Mambati). Ces carrières d'or portent des noms évocateurs et qui font l'objet de l'attirance des jeunes en quête d'une vie meilleure :

    1.

    Bawakawaka

     

    11.

    Jaribu

     

    21.

    Arete

     

    31.

    Mapenzi

    2.

    Jehova Juré

     

    12.

    Lisanga

     

    22.

    Bon marché

     

    32.

    Bon samaritain

    3.

    Makapela

     

    13.

    Ndoka Juu

     

    23.

    Bon voyage

     

    33.

    Makasi

    4.

    Sele Sele

     

    14.

    Barrage

     

    24.

    Bande d'Azu

     

    34.

    Sina makosa

    5.

    Central

     

    15.

    Kitona

     

    25.

    Pas à pas

     

    35.

    Kobe

    6.

    Makambo

     

    16.

    Natho

     

    26.

    Disco

     
     
     

    7.

    Malekesa

     

    17.

    Baweza Te

     

    27.

    Makosemane

     
     
     

    8.

    Alléluia

     

    18.

    Gbado

     

    28.

    Keba

     
     
     

    9.

    Bruxelles

     

    19.

    Bamako

     

    29.

    Esui yo wapi

     
     
     

    10.

    Mbongo

     

    20.

    Geneve

     

    30.

    Empire

     
     
     

    Le site de Gbonzunzu, situé à une centaine de kilomètres du chef-lieu du territoire de Wamba, a un statut de poste d'encadrement administratif et se présente comme un grand centre commercial qui ravitaille les carrières d'or environnantes. On y compte une quarantaine de boutiques, une dizaine d'officines pharmaceutiques et un marché hebdomadaire d'une centaine d'étalages. A coté des activités aurifères, il se développe tout de même des activités agricoles pour des finalités commerciales.

    Le site de Bolebole, situé au bord de la rivière Nepoko, affluent de l'Aruwimi qui est lui-même affluent du fleuve Congo, est caractérisé à la fois par les exploitations à ciel ouvert et les exploitations souterraines. A coté des activités minières, il se pratique dans ce site plusieurs autres activités liées à l'exploitation fluviale : l'exploitation du beach pour la traversée des biens et des personnes, la pêche à petite échelle, la fabrication des radeaux pour la circulation des marchandises par la voie fluviale, etc. Il faut noter déjà que ces exploitations sont à l'origine de plusieurs conflits qui vont de simples disputes à des batailles rangées par familles.

    Le site de Mambati, situé à plus de 150 km de Wamba sur l'ancienne route qui reliait le territoire de Wamba au territoire de Bafwasende, est caractérisé particulièrement par des exploitations souterraines où les orpailleurs descendent dans des puits antérieurement creusés par les sociétés minières qui y ont travaillé à l'époque coloniale. Ce site a toujours eu une grande importance depuis l'époque coloniale quant à sa production en or. On sait encore voir aujourd'hui les vestiges des grandes sociétés minières qui y ont travaillé : les vieux bâtiments administratifs, les camps des ouvriers, les ateliers, etc.

    Apres cette présentation du milieu de recherche, parlons aussi des différents acteurs qui oeuvrent dans ce milieu.

    2.2. CARACTERISATION DES ACTEURS DE L'ACTIVITE MINIERE

    L'analyse de la caractérisation des acteurs de l'activité minière en territoires de Mamba et de Wamba nous permet de dégager l'âge et l'origine socio- professionnelle de ces derniers. Mais avant tout, qui sont-ils ?

    2.2.1. Les acteurs de l'activité minière

    Les différents acteurs qu'on rencontre dans les carrières d'or en territoires de Mamba et de Wamba agissent chacun suivant ses règles et motivations propres. L'intérêt de l'examen de ces acteurs permet de comprendre leurs rôles, leurs motivations, leurs stratégies, leurs points forts et faibles pour l'activité aurifère.

    a) Les services de l'Etat52(*)

    L'Etat joue un rôle réglementaire, notamment dans l'institution d'une zone d'exploitation artisanale qui est faite par voie d'Arrêté du Ministre après avis de la Direction des Mines et du Gouvernement de la province concernée. Comme stratégie, l'Etat, le premier acteur, devrait être présent dans toutes les carrières d'or à travers ses différents services et administrations.

    1° Le cadastre minier (CAMI)

    Le cadastre minier a été créé en 2003. En 2004 il a dû interrompre ses activités à la suite d'une décision du Gouvernement, il a re- ouvert ses portes en juin 2005. Le CAMI est responsable de l'octroi et du renouvellement des concessions et des droits miniers pour la recherche et l'exploitation des minerais. Il est prévu un cadastre électronique. Le CAMI gère à ce jour près de 2500 licences, il se finance par l'intermédiaire des taxes sur les gisements et 50 % de celle-ci lui étant destinés. Sur terrain, ce service a connu des hauts et des bas dictés par des interférences intempestives des autres services de l'Etat dans le secteur.

    2° La direction des mines

    La direction des mines est chargée de l'inspection et du contrôle des activités minières et des travaux de carrières en matières de sécurité, d'hygiène, de conduite de travail, de production, de transport, de commercialisation et en matière sociale. Elle est chargée aussi de la compilation et de la publication des statistiques et informations sur la production et la commercialisation des produits des mines et de carrières. Elle est seule habilitée à contrôler et à inspecter l'exploitation minière industrielle, l'exploitation minière à petite échelle et l'exploitation artisanale. Elle reçoit et instruit les demandes d'agrément au titre des comptoirs d'achat. Ce service est représenté dans chaque territoire.

    3° Service d'assistance et d'encadrement des Small Scale Mining (SAESSCAM).

    Fondé en 1999, ce service est subordonné au ministère des mines seulement depuis 2003. Il est chargé de l'organisation et de surveillance du secteur minier de type artisanal. De nombreux bureaux de SAESSCAM se mettent progressivement en place depuis 2005. Il est prévu d'organiser des coopératives modèles sur l'ensemble des provinces minières. On a constaté que le SAESCAM manque des capacités de déploiement sur l'ensemble du pays et ne dispose pas des moyens de travail conséquent. Sa présence n'a pas été manifeste dans les carrières où nous sommes passé.

    4° Le service chargé de la protection de l'environnement minier

    Le service chargé de la protection de l'environnement minier au sein du Ministère des mines exerce, en coordination avec les autres organismes de l'Etat chargés de la protection de l'environnement, les prérogatives qui lui sont dévolues par le Code minier et par toute autre réglementation en matière de protection de l'environnement, notamment la définition et la mise en oeuvre de la réglementation minière en matière de protection de l'environnement en ce qui concerne le régime pour la prospection, le régime pour les exploitants artisanaux, les directives pour les opérations de recherches et d'exploitation des mines et des carrières et les modalités de contrôle des obligations en matière de protection de l'environnement.

    Qu'en est-il des exploitants miniers proprement dits ?

    b) Les exploitants miniers artisanaux

    Sur terrain, nous avons aussi constaté que les exploitants artisanaux se repartissent en deux catégories : les grands exploitants et les petits exploitants. A ces deux catégories, nous y avons ajouté les ouvriers journaliers qui sont associés d'une façon ou d'une autre au travail de ces deux premières catégories. Tous ne possèdent aucune structure de leur encadrement ni de défense de leurs intérêts.

    1° Les grands exploitants

    Ce sont des orpailleurs qui sont les détenteurs des cartes d'exploitant artisanal en cours de validité pour la zone concernée et sont ainsi appelés propriétaires de la carrière ou PDG (Président Délégué Général). Ils possèdent généralement les facteurs de production et un fond de roulement plus ou moins élevé. Ce capital leur permet d'engager dans leur unité de production de la main d'oeuvre. Ces grands orpailleurs possèdent souvent des motopompes qui les aident à vider les puits pendant les travaux de creusage.

    Une grande partie de cette catégorie d'acteurs n'est pas novice dans l'activité. Ils ont déjà exercé ailleurs et leur ancienneté dans l'activité leur permet d'acquérir le fond de roulement, les moyens de production et les connaissances pratiques dans le lavage du fond limoneux contenant les particules d'or. En réalité, ces grands exploitants ont commencé pour certains en tant que petits exploitants, pour d'autres en tant que ouvriers ou même main-d'oeuvre gratuite au près de leurs parents. Dans tous les cas, ces grands exploitants ne sont pas venus sans avoir appris quelque part.

    A coté des grands exploitants, il existe aussi les petits exploitants dans les mêmes carrières d'or.

    2° Les petits exploitants

    Ils sont les plus nombreux. C'est parfois même toute la famille au complet qui s'engage à l'exploitation de l'or. Pour la plupart, l'orpaillage se présente comme une stratégie de survie, « (...) un marché self -service et anarchique, à la limite de l'informel et duquel le pays ne tire en réalité aucun profit substantiel. Tout au plus permet-il aux masses désoeuvrées de s'assurer une certaine survie »53(*).

    La quasi-totalité de petits exploitants n'a pas d'autorisation d'exploitation. Ils exploitent soit dans la clandestinité (illégalité) soit dans des zones gérées par les grands exploitants qui ont des cartes d'exploitation artisanale. Dans l'incapacité de se procurer les moyens de productions de masse, ils se contentent de creuser la terre à la recherche de pierres ou encore de ramasser celles rejetées par les grands exploitants.

    Les grands exploitants et même quelques petits exploitants se font souvent aider par les ouvriers journaliers.

    3° Les ouvriers journaliers

    Ce sont des jeunes, voire des enfants (filles et garçons) sans emploi. Ils offrent leur force de travail aux grands exploitants et aux petits exploitants moyennant une rémunération journalière. Leur travail consiste à creuser la terre, à transporter jusqu'au bassin où se fait le lavage et enfin à laver la terre. Les tâches des ouvriers sont souvent classifiées en fonction du genre. Les hommes sont affectés aux tâches qui nécessitent beaucoup de forces physiques. Ainsi, ils s'occupent du creusage de la terre et du lavage. Les filles quant à elles s'occupent du transport de la terre creusée et aussi à servir l'eau pour le lavage. Cependant, l'attribution de ces postes n'est pas figée. Il arrive que des filles lavent la terre ou encore que des hommes assurent le transport de la terre jusqu'au lavage.

    c) Les négociants

    Nos enquêtes ont montré que ce sont les négociants ont le monopole d'achat dans les milieux étant donné l'absence des comptoirs agréés sur place. Ceci signifie qu'ils sont les seuls à fixer le prix de l'or aux exploitants artisanaux qui ne sont pas d'ailleurs organisés en associations. La plupart des négociants n'ont même pas de carte de négociant. De façon générale, tout commerçant oeuvrant dans les zones aurifères achètent de l'or.

    Un autre acteur important dans les carrières d'or demeure la femme qui entreprend une multitude d'activités surtout dans le domaine de la restauration populaire et de buvettes ou « Nganda ».

    d) Les femmes

    Les femmes jouent de façon générale un rôle reproductif. Ce sont elles qui gèrent la production alimentaire, l'approvisionnement en combustible du foyer, en eau potable et le commerce des produits de base. Mais de plus en plus, les femmes entreprennent des activités commerciales informelles. Cet esprit d'entreprise chez les femmes est dû à leur « aspiration à l'indépendance économique et à la conquête vers l'autonomie »54(*). En effet, « entreprendre, dit Philippe DE WOOT, consiste à changer un ordre existant »55(*).

    Ainsi les femmes sont aussi embauchées pour des tâches connexes à l'orpaillage comme le transport d'eau et de pierres (voir Photo N°3 en annexe). L'étude menée à Kamituga, au Sud Kivu, confirme cette situation. En effet, après la procédure de creusage, le minerai d'or doit être transporté, pilé, nettoyé et tamisé. Généralement ces taches sont réservées aux filles ou aux femmes. Le transport consiste à déplacer les roches de quartz de la mine vers l'outra. Le tamisage consiste à casser les roches de quartz en une poussière plus malléable, qui est alors nettoyée et tamisée dans les outrans environnants. Comme le font remarquer Koen VLASSENROOT et Timothy RAEYMAEKERS56(*), ce pilage quotidien - qui se fait au moyen d'une frappe répétitive de la roche dans un récipient de métal (comme l'écrasement de racines de manioc) - est surtout la prérogative de femmes.

    Plusieurs femmes rencontrées dans les sites d'orpaillage travaillent comme tenancières des restaurants populaires. Elles sont ainsi appelées « mamans restaurants ». Ces « mamans restaurants » se font aider par des filles qui sont employées dans les bars et les restaurants destinés à la communauté minière. On y a trouvé même des filles, âgées de 10 à 12 ans, travaillant jusqu'à 12 heures par jour. Et dans beaucoup de cas, ce travail peut mener à la prostitution ou aux abus sexuels imposés par des clients ou des employeurs.

    A propos de la qualification des femmes tenancières des restaurants populaires, nos enquêtes ont montré que sur 40 d'entre elles que nous avons rencontré, aucune n'a attestée avoir un diplôme scolaire ou académique (D4, D6, G3, L2) comme l'indique ce tableau :

    Tableau N° 2 : Niveau d'instruction des tenancières des restaurants

    N.

    NIVEAU D'ETUDES

    EFFECTIFS

    %

    1

    Primaire 

    15

    37,5

    2

    Secondaire 

    19

    47,5

    3

    Alphabétisée

    6

    15

    4

    Diplômée (D4, D6, G3, L2)

    0

    0

     

    TOTAL

    40

    100

    Source : Données d'enquête de janvier 2011.

    On comprend donc que les facteurs principaux de leur succès ne résident pas dans une qualification scolaire ou académique mais aussi dans leurs qualités d'entrepreneurs : la confiance en soi, la persévérance, voire la ténacité ou l'obstination face aux innombrables obstacles qui parsèment la route de l'entrepreneur, la flexibilité ou la capacité de faire évoluer son projet en fonction des contingences locales ou externes souvent imprévisibles,  leur potentiel créatif, leur enthousiasme, leur charisme, leur capacité de diriger et de gérer57(*).

    Les petites entreprises gérées par ces femmes ont besoin d'un financement. L'apport personnel est en général la règle au démarrage de ces micro- entreprises. L'enquête menée sur 40 femmes donne les résultats suivants :

    Tableau N° 3 : Sources de financement des tenancières des restaurants

    SOURCES DE FINANCEMENT

    EFFECTIFS

    %

    1

    Apport personnel 

    20

    50

    2

    Emprunt de la famille 

    9

    22,5

    3

    Tontine

    6

    15

    4

    Crédit fournisseur

    4

    10

    5

    Epargne traditionnelle

    1

    2,5

     

    TOTAL

    40

    100

    Source : Données d'enquête de janvier 2011.

    Au regard de ce tableau, on peut affirmer que :

    - 50% des « mamans restaurants » ont démarré leur activité grâce à leur apport personnel. Cet apport personnel a parfois pour origine une décapitalisation (vente de produits agricoles ou des biens de valeur), mais plus souvent une épargne cumulée au cours des années ;

    - 22,5% des ces femmes ont financé leur activité par des emprunts contractés dans la famille (mari, grand frère, oncle, cousins, etc.). Les conditions de remboursement restent floues, les prêts devenant souvent des dons qui, dans le contexte familial, sont néanmoins remboursés en nature ou en services ;

    - 15% des tenancières des restaurants financent leurs micro- entreprises par une forme d'épargne collective en Afrique qu'est la tontine ;

    - 10% financent leurs restaurants par le crédit fournisseur, considéré ici comme source informelle de financement car il dépend autant des relations personnelles (et du capital confiance) que des liens commerciaux classiques entre ces femmes entrepreneurs et leurs fournisseurs ; et

    - 2,5% de ces entrepreneurs financent leur activité par l'épargne traditionnelle qui consiste souvent à transformer de l'argent en biens (bétail, terres, immeubles, bijoux, etc).

    Ces différents acteurs que nous venons d'analyser, à savoir les services de l'Etat, les exploitants artisanaux, les négociants et les femmes, proviennent de diverses origines socio- professionnelles et sont de différents âges.

    2.2.2. Age et origine socio- professionnelle des acteurs

    Commençons par l'analyse de l'âge des exploitants artisanaux et des femmes tenancières des restaurants.

    a) Age des acteurs

    Les enquêtes menées au cours de nos recherches ont montré aussi que l'âge moyen pour les acteurs qui travaillent dans les carrières d'or est de 25 ans pour les femmes et 35 ans pour les hommes, comme l'indiquent les calculs de moyenne d'âge suivants :

    Pour les femmes, on a :

    1° Détermination de nombre de classes k, de l'étendue d, de l'amplitude a et de la borne inférieure de la première classe

    2° Tableau de calculs intermédiaires

    Tableau N° 4 : Tableau de distribution du caractère age des femmes

    CLASSE

    CENTRE DE CLASSE Xi

    EFFECTIF ni

    xini

    FREQUENCE fi

    fi %

    fi %

    croissant

    fi % décroissant

    1

    [7,5; 16,5[

    12

    7

    84

    0,175

    17,5

    17,5

    100,0

    2

    [16,5;25,5[

    21

    18

    378

    0,450

    45,0

    62,5

    82,5

    3

    [25,5;34,5[

    30

    7

    210

    0,175

    17,5

    80,0

    37,5

    4

    [34,5;43,5[

    39

    6

    234

    0,150

    15,0

    95,0

    20,0

    5

    [43,5;52,5[

    48

    2

    96

    0,050

    5,0

    100,0

    5,0

     

    TOTAL

    -

    40

    1002

    1,000

    100,0

    -

    -

    Source : Nos calculs à partir des données d'enquête de janvier 2011.

    3° Calcul de la moyenne d'age des femmes tenancières de restaurants

    A partir de cette moyenne de l'échantillon, nous pouvons estimer la moyenne de toute la population concernée par l'intervalle de confiance a 95%, avec un écart type de 9,373.

    L'âge moyen de la population, ici l'age moyen des femmes vivant dans les carrières d'or, se situe donc entre 22 ans et 27 ans.

    Pour les creuseurs d'or proprement dits, on a :

    1° Détermination de nombre de classes k, de l'étendue d, de l'amplitude a et de la borne inférieure de la première classe

    2° Tableau de calculs intermédiaires

    Tableau N° 5 : Tableau de distribution du caractère âge des creuseurs

    N

    CLASSE

    CENTRE DE CLASSE Xi

    EFFECTIF

    ni

    xini

    FREQUENCE fi

    fi %

    fi % croissant

    fi % décroissant

    1

    [16;23[

    19,5

    17

    331,5

    0,157

    15,74

    15,54

    100,00

    2

    [23;30[

    26,5

    25

    662,5

    0,232

    23,15

    38,89

    84,26

    3

    [30;37[

    33,5

    16

    536,0

    0,148

    14,81

    53,70

    61,11

    4

    [37;44[

    40,5

    30

    1215,0

    0,278

    27,78

    81,48

    46,30

    5

    [44;51[

    47,5

    8

    380,0

    0,074

    7,41

    88,89

    18,52

    6

    [51;58[

    54,5

    7

    381,5

    0,065

    6,48

    95,37

    11,11

    7

    [58;65[

    61,5

    5

    307,5

    0,046

    4,63

    100,00

    4,63

     

    TOTAL

    -

    108

    3814,0

    1

    100,00

    -

    -

    Source : Nos calculs à partir des données d'enquête de janvier 2011.

    3° Calcul de la moyenne d'âge des creuseurs

    A partir de cette moyenne de l'échantillon, nous pouvons aussi estimer la moyenne de toute la population concernée par l'intervalle de confiance a 95%, avec un écart type de 12.

    L'âge moyen de la population se situe donc entre 33 ans et 38 ans.

    C'est ici pour nous le moment de confirmer la première hypothèse selon laquelle « L'exploitation artisanale de l'or viderait les villages de leurs populations actives, ce qui induirait par voie de conséquence, à l'absence des petites initiatives de développement (à vocation agro-pastorale par exemple) et à la fragilisation de la cohésion sociale par des conflits d'autorité».

    En effet, le centre d'intérêt des populations actives étant désormais tourné vers l'orpaillage, il y a non seulement un transfert de la main-d'oeuvre agricole à la main d'oeuvre minière mais aussi un déplacement, une « ruée », une sorte d'exode des villages vers les carrières d'or. Ceci a eu des conséquences néfastes sur le dynamisme de plusieurs villages. Dans ces villages vidés de leurs populations actives, on a constaté la diminution de la production agricole, notamment vivrière, l'absence de petites initiatives de développement comme  un grenier, une boutique, une décortiqueuse à riz, un moulin à manioc, une forge, une pharmacie villageoise, un programme d'alphabétisation, l'aménagement d'une source d'eau potable, etc. Selon un rapport de la FEC Wamba58(*), dans tout le territoire, on compte seulement 338 boutiques et 57 officines pharmaceutiques reparties comme suit :

    Tableau N° 6 : Boutiques et officines pharmaceutiques en Territoire de Wamba

     

    WAMBA

    MATETE

    MAMBATI

    BOLEBOLE

    GBONZUNZU

    IBAMBI

    BABONDE

    TOTAL

    BOUTIQUES

    60

    55

    50

    50

    50

    30

    10

    305

    OFFICINES

    10

    5

    4

    7

    8

    7

    3

    44

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    ASESE

    LASA

    BAYENGA

    BAKPAU

    PAWA

    LEGU

    BETONGWE

    TOTAL

    BOUTIQUES

    10

    6

    4

    4

    3

    3

    3

    33

    OFFICINES

    3

    2

    2

    1

    2

    2

    1

    13

    Source : Rapport 2009 de la FEC Wamba

    Sur le plan social, cette situation ne favorise pas une cohésion sociale. En effet, des époux abandonnent leurs épouses pendant des longues années et cela génère des divorces. Les activités d'exploitation artisanale de l'or ont aussi détourné les enfants du contrôle parental. Ces conflits se manifestent par des querelles qui amènent parfois les enfants à quitter a jamais le domicile familial.

    b) Origine socio- professionnelle

    L'étude de l'origine socio- professionnelle des orpailleurs permet d'analyser les fonctions que joue l'orpaillage sur les autres activités socio- économiques. D'après nos enquêtes, les orpailleurs et les autres acteurs oeuvrant dans les carrières d'or sont d'origines socio- professionnelles diverses. En effet, avant d'exercer l'activité aurifère, ils étaient soit agriculteurs (39,82%), soit élèves (26,85%), soit commerçants (17,59%), soit artisans (11,11%), soit enseignants (3,7%) soit encore petits fonctionnaires de l'Etat (0,93%) comme l'indique le tableau ci-dessous.

    Tableau N° 7 : Origine socio professionnelle des acteurs

    ORIGINE SOCIO PROFESSIONNELLE

    EFFECTIFS

    %

    1

    Agriculteurs 

    43

    39,82

    2

    Elèves

    29

    26,85

    3

    Commerçants 

    19

    17,59

    4

    Artisans

    12

    11,11

    5

    Enseignants 

    4

    3,70

    6

    Fonctionnaires de l'Etat 

    1

    0,93

     

    TOTAL

    108

    100,00

    Source : Données d'enquête de janvier 2011.

    Ce tableau confirme d'avantage la première hypothèse, car il indique le transfert de la main-d'oeuvre agricole (39,82%) et artisanale (11,11%) à l'orpaillage. Il indique aussi l'abandon du petit commerce (17,59%), des études (26,85%), de l'enseignement (3,7%) et de la fonction publique (0,93%) au profit de l'exploitation artisanale de l'or.

    Bref, tous les acteurs intervenant dans l'activité aurifère sont en interactions. L'ensemble forme tout un système. La compréhension du rôle des uns dépend de la compréhension du rôle des autres comme l'indique cette figure ci-dessus :

    Figure N° 1 : Les acteurs de l'activité aurifère.

    2

    Exploitants artisanaux

    Rôle d'exploitation: sans structures d'encadrement et de défense de leurs intérêts

    3

    Négociants

    Rôle d'achat: tenant lieu des comptoirs agréés inexistants sur terrain

    1

    Services de l'Etat

    Rôle réglementaire: institution d'une zone d'exploitation artisanale

    2.3. MODES, TYPES D'EXPLOITATION ET CIRCUIT DE COMMERCIALISATION DE L'OR

    L'analyse de modes et types d'exploitation artisanale de l'or et même de son circuit de commercialisation nous permet de juger de la rapidité et de la suffisance du revenu de l'orpaillage par rapport aux autres activités économiques telles que l'agriculture, le commerce, l'artisanat, etc. Retenons toutefois que le choix d'un mode et d'un type d'exploitation souterraine dépend de plusieurs facteurs : la forme du gîte (régulière ou irrégulière), la dimension du gîte, les conditions du gisement, les propriétés du minerai et de gangues et la répartition des minéraux de valeur qui conditionne le choix entre une exploitation sélective ou une exploitation globale59(*).

    2.3.1. Modes d'exploitation artisanale de l'or

    Selon MULLER60(*), on peut distinguer deux modes d'exploitation : exploitation à ciel ouvert et exploitation souterraine. Tous ces deux modes se pratiquent dans l'ensemble de sites de notre étude : la recherche de roche à ciel ouvert à 92,59% et exploitation souterraine à 7,41% comme l'indique le tableau suivant :

    Tableau N° 8 : Répartition selon les modes d'exploitation

    TYPES D'ACTIVITES

    EFFECTIF

    %

    1

    Recherche de roche à ciel ouvert

    100

    92,59

    2

    Exploitation souterraine

    8

    7,41

     

    TOTAL

    108

    100,00

    Source : Données d'enquête de janvier 2011.

    a) La recherche de roche à ciel ouvert (« durba »)

    Cette exploitation à ciel ouvert (voir Photo N°4 en annexe) est définie comme toute exploitation qui met à nu le gisement à exploiter en enlevant les terrains de couverture et extrait ensuite le minerai. Donc, dans ce mode d'exploitation, appelé localement « durba », tous les terrains stériles qui recouvrent la substance à exploiter sont enlevés, permettant ainsi un accès facile à celle-ci. On distingue deux phases dans ce mode d'exploitation :

    - le décapage ou découverture ;

    - l'extraction du minerai.

    Ces deux opérations sont, le plus souvent effectuées simultanément sur les chantiers. Ce type d'exploitation présente du point de vue sécurité, des avantages certains sur l'exploitation souterraine. Par contre, il peut poser de gros problèmes d'environnement car il se fait sur des gradins à front vertical. On met en place une mine à ciel ouvert lorsque le minerai se trouve relativement proche de la surface.

    Cette méthode consiste donc à creuser la terre pour rechercher des roches. Ces roches sont à la suite lavées et examinées minutieusement en vu de détecter à la surface, des palettes d'or. Les roches présentant les palettes d'or sur leurs surfaces sont mises de côté puis concassées par la suite à l'aide d'un marteau. Après avoir rendu ces roches en petits morceaux, elles sont pilées dans un mortier en fer avec un pilon également en fer. Les roches rendues en poudre sont à la suite lavées et tamisées à l'aide d'un tamis et d'une calebasse selon la même approche que le lavage simple. Cette opération permet de séparer les particules d'or de la poudre de roche.

    Cette méthode est très utilisée. Le jour comme la nuit, on entend à travers les sites, dans chaque concession, des bruits de mortiers métalliques. Toutes les couches sociales sont représentées dans cette méthode (jeunes, élèves, sans emplois, commerçants, femmes au foyer, hommes adultes, vieux, etc).

    b) La recherche souterraine (« djogo »)

    Le mode d'exploitation souterraine, appelé localement « djogo », est utilisé pour les gisements en profondeur, c'est-à-dire pour les minéralisations se trouvant à plus d'une dizaine de mètres de profondeur. Dans les mines souterraines, il faut veiller à l'exhaure, l'éclairage, l'aérage, le soutènement pour la sécurité et la santé des travailleurs.

    La recherche souterraine consiste donc à entrer dans des puits antérieurement creusés par les premiers orpailleurs avant l'indépendance du pays. L'orpailleur, une fois dans les tunnels, procède au sondage de la terre pour voir sa teneur en or. L'échantillon est prélevé sur les piliers du tunnel. L'orpailleur fait sortir cet échantillon qui est traité dans la rivière à proximité du site. Une fois l'échantillon testé positif dans sa teneur en or, l'exploitation proprement dite commence. L'exploitation souterraine se fait par groupe d'au moins quatre personnes.

    C'est un travail à la chaîne qui est fait à ce niveau. Il y a une personne qui se trouve au fond du puits dans les tunnels. Celle-ci creuse la terre avec une barre de mines, remplit le seau de terre et le remet à une autre qui l'évacue vers la sortie du puits dans la partie verticale. Une autre est chargée de faire sortir le seau chargé de terre à l'aide d'une corde. Une fois sortie, la terre creusée est transportée vers les femmes pour le traitement.

    Ce mode d'exploitation présente des inconvénients car le risque d'accident est élevé. Et les accidents qui se produisent sur ce site sont très souvent graves et mortels. C'est ce qui explique une faible pratique de cette méthode.

    2.3.2. Types d'exploitation artisanale de l'or

    On trouve l'or sous forme de pépites, de flocons ou de poussières dans du gravier ou du sable, le long des ruisseaux et des rivières. Il se présente aussi sous forme de métal dans des minerais de roches (quartz) et de métaux de la famille du platine. Les types d'exploitation dont il est question ici ne sont rien d'autres que des méthodes de traitement pour l'obtention de l'or. Il se pratique deux types d'exploitation ou mieux de traitement de l'or en territoires de Mambasa et de Wamba : le lavage à la batée (91,67%), et le lavage simple (8,33%).

    Tableau N° 9 : Répartition selon les types d'exploitation

    TYPES D'ACTIVITES

    EFFECTIF

    %

    1

    Lavage à la batée

    99

    91,67

    2

    Lavage simple

    9

    8,33

     

    TOTAL

    108

    100,00

    Source : Données d'enquête de janvier 2011.

    a) Le lavage à la batée (« d'origine »)

    Le lavage à la batée (voir Photo N°1 en annexe) est une méthode qui consiste à séparer les graviers du sable fin par lavage à l'aide de jet d'eau afin de récupérer l'or contenu dans le sédiment de sol. Cette méthode nécessite l'intervention de plusieurs personnes à différents niveaux suivant une division du travail : il y a une personne qui met la terre dans la pirogue, une autre qui met l'eau sur le sable par jet et le lavage est assuré par une autre par des mouvements circulaires de la main. Le gravier séparé du sable fin est récupéré à l'autre bout de la pirogue pour être jeté plus loin et permettre de la sorte la circulation de l'eau. Le sable fin retenu dans la pirogue sous forme de sédiment et contenant les papilles d'or est recueilli par le propriétaire de l'unité de production à la fin de la journée pour le lavage final.

    A la fin de la journée, on peut donc avoir l'or prêt pour la vente chez le négociant. Il ne suffit pas d'attendre les semaines ou des mois voire des années comme le ferait un agriculteur, un artisan, etc. pour profiter du fruit de son travail.

    b) Le lavage simple

    Le lavage simple (voir Photo N°2 en annexe) consiste à séparer le gravier du sable fin par le procédé de lavage à l'aide d'un bassin métallique appelé « karay ». Cette opération se fait dans un petit barrage construit par les orpailleurs eux-mêmes à cet effet. Il y a ici manipulation du mercure pour permettre de recueillir l'or en dessous du bassin plein du sable préalablement pillé.

    Le lavage simple est même pratiqué par les enfants et les femmes, cela pour plusieurs raisons, notamment parce qu'il ne nécessite pas beaucoup d'effort physique, ensuite parce que la méthode est la même que lorsque les femmes lavent le riz pour le séparer des grains de sables. Les femmes en particulier ont donc une connaissance pratique de cette méthode et sont donc aisées à cette activité. Cette méthode se fait en quelques heures seulement.

    On note que les différents modes et types d'exploitation sont diversement appréciés et utilisés. Ainsi le lavage à la batée et la recherche de roche à ciel ouvert par exemple sont les plus pratiqués.

    2.3.3. Le circuit de commercialisation de l'or

    Pour comprendre combien les services de l'Etat perdent comme recettes dans cette partie du pays longtemps enclavée, nous avons reconstruit les circuits de commercialisation en utilisant bien sur les informations du terrain et les informations publiées par rapport de HUMAN RIGHTS WATCH en 2005.

    Le commerce de l'or des territoires de Mambasa et de Wamba se fait essentiellement via Butembo. Le comptoir Congo Com de Dr KAMBALE KISONI (KIDUBAI), assassiné en juillet 2007, est reconnu comme le plus grand des comptoirs d'or de Butembo. Ce comptoir disposait, avant l'assassinat du propriétaire, d'une fonderie qui lui permettait de fondre l'or en lingots. Congo Com était alors l'une des plus grandes compagnies d'exportation de l'or de la RD Congo et de la région des grands lacs. Il existe une multitude d'autres petits comptoirs d'or qui ont pris la relève après la chute de Congo Com. Selon HUMAN RIGHTS WATCH, on estimait en 2005 entre 20 a 60 kgs d'or par jour quittent la Province Orientale pour Butembo. Cela équivaut a environs 600000 à 1800000 dollars américains par jour qui sort de la Province Orientale pour Butembo. En effet, sur place en carrières un gramme d'or coûte environs 30 dollars américains.

    Tous les comptoirs de Butembo vendent de l'or en Ouganda ; les ougandais le revendent à des compagnies en Suisse ou en Afrique du Sud, parfois à Dubaï. La plus grande partie de cet or est exporté de la RD Congo illégalement par des commerçants sans licences d'exportation, ni des documents de change, sans autorisation de fonctionnement comme comptoir ou maison d'achat, sans comptes bancaires ouverts à la banque centrale du Congo et ne s'acquittant d'aucune taxe comme l'exige le code minier congolais. Ainsi, pendant la période de 1998 - 2004, l'exploitation illégale de l'or de la RD Congo a amené une amélioration significative dans la balance de paiement de l'Ouganda, ceci a ensuite donné aux bailleurs de fonds multilatéraux et en particulier le FMI qui suivaient la situation du trésor ougandais, une confiance accrue dans l'économie ougandaise61(*).

    Les principaux comptoirs qui achètent de l'or congolais en Uganda sont :

    - MACHANGA LTD : c'est le 2ème exportateur de l'or de l'Ouganda. D'après Human Rights Watch, les responsables de cette compagnies affirment que pratiquement tout l'or qu'ils exportent provient de la RDC à destination de la Suisse, chez Metallor technologie SA. Ces propos de Human Rights Watch sont confirmées par les déclarations de nos enquêtés. En effet, l'entreprise Machanga achète de l'or dans le cadre d'une relation commerciale régulière avec des négociants en RD Congo ;

    - UGANDA COMMERCIAL IMPEX (UCI) LTD: cette entreprise UCI achète aussi de l'or de manière régulière à des négociants en RD Congo. Pendant les rébellions, ces négociants étaient étroitement liés à des milices. Cela a constitué pendant longtemps une « fourniture d'assistance » à des groupes armés illégaux en violation de l'embargo sur les armes établi par les résolutions 1493 (en 2003) et 1596 (en 2005).

    Le circuit de commercialisation de l'or peut être schématisé comme suit :

    Figure N° 2 : Circuit de commercialisation de l'or

     
     

     

     

     
     
     
     

     

     

     

     
     
     
     

     

     

     

     

     

    Suisse

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Mambasa- Wamba

     

    Butembo

     

     

     

     

    Exploitants

     

    (ConcoCom)

     

    Ouganda

     

    Afrique du Sud

    Négociants

     

    Comptoirs

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Dubaï

     
     
     

     

     
     

     

     
     
     

     

     
     

     

     
     
     

     

     

     

     

     
     
     
     
     
     
     

    Mais qu'est-ce qui justifie au juste l'engouement de la population active vers l'orpaillage au point même d'abandonner d'autres activités telles que l'agriculture, le commerce, l'artisanat, les études, etc.

    2.4. ATTRAIT POUR L'ACTIVITE AURIFERE

    Plusieurs raisons, aussi bien économiques que sociales, justifient l'attrait des populations des territoires de Mambasa et de Wamba pour l'activité aurifère.

    2.4.1. Raisons économiques

    Nous entendons par raisons économiques les motivations purement économiques, c'est-à-dire le gain, le profit et qui sont les facteurs incitatifs à cette activité. Les différentes raisons économiques à la base de la motivation des acteurs sont ici regroupées dans un tableau. Le calcul des pourcentages est fait selon les réponses des enquêtés.

    Tableau N° 10 : Facteurs économiques de motivation à l'orpaillage

    FACTEUR DE MOTIVATION

    EFFECTIFS

    %

    1

    Revenu rapide et élevé

    31

    28,70

    2

    Activité circonstancielle

    28

    25,92

    3

    Activité de soudure

    26

    24,09

    4

    Opportunités d'affaires

    21

    19,44

    5

    Soutien aux parents

    2

    1,85

     

    TOTAL

    108

    100,00

    Source : Données d'enquête de janvier 2011.

    a) Un revenu rapide et élevé

    Contrairement aux activités champêtres, artisanales et commerciales, l'orpaillage permet aux acteurs d'avoir rapidement de l'argent. C'est ce qui motive une grande partie de la population qui se rue sur les sites d'orpaillage. En effet, pour chaque type ou mode d'exploitation, l'or peut être recueilli sur place le même jour ou quelques jours après, en tout cas au plus deux semaines. Quand on a déjà le sable fin, le lavage à la batée ou le lavage simple ne prend qu'un jour ; la production est vendue sur place au soir même du lavage.

    Cette activité génère aussi un revenu élevé par rapport aux activités socio-économiques. Les enquêtes menées au cours de nos recherches ont montré que le revenu moyen des orpailleurs s'élève à environs 245 dollars américains par mois, comme l'indiquent les calculs suivants62(*) :

    1° Détermination de nombre de classes k, de l'étendue d, de l'amplitude a et de la borne inférieure de la première classe

    2° Tableau de calculs intermédiaires

    Tableau N° 11 : Tableau de distribution du caractère revenu des creuseurs

    CLASSE

    CENTRE DE CLASSE Xi

    EFFECTIF ni

    xini

    FREQUENCE

    fi

    fi %

    fi % croissant

    fi % décroissant

    1

    [20;189[

    104,5

    57

    5956,5

    0,528

    52,8

    52,8

    100

    2

    [189;358[

    273,5

    38

    10393

    0,352

    35,2

    88

    47,2

    3

    [358;527[

    885

    5

    4425

    0,046

    4,6

    92,6

    12

    4

    [527;696[

    611,5

    5

    3057,5

    0,046

    4,6

    97,2

    7,4

    5

    [696;865[

    780,5

    2

    1561

    0,019

    1,9

    99,1

    2,8

    6

    [865;1034[

    949,5

    0

    0

    0

    0

    99,1

    0,9

    7

    [1034;1203[

    1118,5

    1

    1118,5

    0,009

    0,9

    100

    0,9

     

    SOMME

     

    108

    26511,5

    1

    100

     
     

    Source : Nos calculs à partir des données d'enquête de janvier 2011.

    3° Calcul de la moyenne de revenu mensuel des creuseurs

    A partir de cette moyenne de l'échantillon, nous pouvons estimer la moyenne de toute la population concernée par l'intervalle de confiance à 95%, avec un écart type de 185,697212.

    Le revenu moyen de la population se situe donc entre 210 et 280 dollars américains. Un orpailleur peut donc gagner entre 210 et 280 par mois, ce qui n'est pas le cas d'un agriculteur ou d'un petit fonctionnaire de l'Etat qui ne gagne pas plus de 100 dollars selon le minimum légal (SMIG) de 3 dollars par jour. Cependant, 12,52% seulement de ce revenu (245 dollars américains) soit 30,674 dollars américains est consacré à l'épargne et 87,48% soit 214,326 dollars américains à la consommation. La propension marginale à consommer est très élevée (0,87), elle approche l'unité. Cette consommation consiste plus à la satisfaction des besoins alimentaires et vestimentaires. D'autres besoins fondamentaux comme les soins de santé, l'éducation, le transport, l'eau, l'énergie, ... restent non satisfaits.

    La deuxième hypothèse selon laquelle « Il semble que l'exploitation artisanale de l'or procure un revenu rapide et élevé permettant de satisfaire les besoins fondamentaux des exploitants artisanaux» est à nuancer. Le revenu nominal des creuseurs est élevé mais étant donné la cherté de la vie dans les carrières d'or, il ne parvient pas à couvrir tous les besoins fondamentaux. Il y a illusion monétaire car ce revenu n'a pas un pouvoir d'achat correspondant.

    b) D'autres raisons économiques

    En plus de la motivation d'un revenu élevé, il y a d'autres raisons qui poussent les gens à devenir orpailleurs. Il s'agit de :

    - une activité de soudure : selon certains orpailleurs, en attendant que les activités économiques reprennent leur rythme normal, il est judicieux pour eux d'exploiter artisanalement l'or en vu de faire face aux charges familiales qui leur incombent ;

    - une activité circonstancielle et un soutien aux parents : une grande partie des acteurs ne pense pas exercer cette activité pour toujours. Ils sont là juste pour avoir de l'argent pour faire face à des besoins urgents. C'est le cas des élèves qui sont massivement présents sur les sites pendant les vacances. Ils disent être là pour avoir un fond et aider leurs parents dans le financement de leur scolarité. Ces élèves prétendent soutenir leurs parents en préparant ainsi leur rentrée scolaire ;

    - des opportunités d'affaires : les sites d'orpaillage sont pour certaines personnes une occasion de faire du commerce vu le nombre important de population qui s'y trouve. Plusieurs produits sont offerts aux orpailleurs. Il s'agit du commerce de produits vivriers mais aussi de médicaments. Notons aussi la croissance de la vente des instruments d'orpaillage notamment les bêches, les pioches, etc. Ce commerce, d'ailleurs informel, se fait sur les sites d'orpaillage et n'a rien à voir avec celui pratiqué pour les besoins ordinaires des paysans agriculteurs.

    2.4.2. Raisons sociales

    Certains facteurs sociaux sont à la base de la motivation des populations vers l'orpaillage : effet de mode (47,22%), contrainte familiale (43,52), le silence administratif (2,78%), etc.

    Tableau N° 12 : Facteurs sociaux de motivation à l'orpaillage

    FACTEUR DE MOTIVATION

    EFFECTIFS

    %

    1

    Effet de mode

    51

    47,22

    2

    Contrainte familiale

    47

    43,52

    3

    Silence administratif

    3

    2,78

    4

    Autres

    7

    6,48

     

    TOTAL

    108

    100,00

    Source : Données d'enquête de janvier 2011.

    A propos de l'effet de mode, un enquêté justifiait sa présence à l'orpaillage en ces termes : «On parle trop de ça. Il faut que je vienne voir ce qu'on gagne réellement. Quand les gens font il faut faire aussi, on ne sait jamais où se trouve la chance... ». La diffusion de ces informations plus ou moins fondées est donc un facteur déterminant dans la croissance et la persistance de l'orpaillage.

    Certains justifient leur pratique de l'orpaillage par la contrainte familiale. En effet, certaines familles ont pour activité principale l'orpaillage. Les chefs de ces groupes domestiques mobilisent toutes les personnes à leur charge dans cette activité. Un autre groupe d'orpailleurs justifient leur présence par les besoins sociaux de la famille. D'autres encore disent qu'ils pratiquent l'orpaillage parce que la famille toute entière s'y est tournée pour assurer sa survie.

    L'orpaillage dans l'ensemble de sites de notre recherche se déroule aussi dans des conditions d'illégalité. En effet, selon le Code minier congolais, il faut une autorisation délivrée par les services de l'administration minière pour toute exploitation artisanale. Le constat que nous avons fait sur le terrain c'est que presque tous les petits orpailleurs (ou petits exploitants) n'ont pas la connaissance de cette loi. Ils n'ont donc pas d'autorisation d'exploitation. Aucune action contraignante n'est aussi menée en vu de régulariser le secteur. Ce mutisme des autorités compétentes sur l'illégalité des orpailleurs est ainsi un des facteurs de la croissance de l'exploitation artisanale de l'or dans la contrée.

    Parmi toutes ces raisons, économiques comme sociales, qui expliquent l'attrait des populations des territoires de Mambasa et de Wamba vers l'exploitation artisanale de l'or, la principale demeure le revenu rapide et élevé.

    Conclusion partielle

    En guise de conclusion de ce chapitre, il convient de dire que l'environnement économique des territoires de Mambasa et de Wamba est vraiment marqué par des potentialités naturelles, touristiques et du sous-sol énormes. Ceci justifie la présence d'une multiplicité de carrières d'or dans ces territoires.

    Les différents acteurs, à savoir les services de l'Etat, les exploitants artisanaux, les négociants et les femmes entrepreneurs, qui vivent dans ces carrières d'or proviennent de diverses origines socio- professionnelles et sont de différents âges. L'âge des exploitants artisanaux, par exemple, se trouve dans l'intervalle de 33 et 38 ans et celui des femmes entrepreneurs entre 22 et 27 ans. Cette situation a confirmé notre première hypothèse selon laquelle «L'exploitation artisanale de l'or viderait les villages de leurs populations actives, ce qui induirait par voie de conséquence, à l'absence des petites initiatives de développement (à vocation agro-pastorale par exemple) et à la fragilisation de la cohésion sociale par des conflits d'autorité ».

    Il se pratique dans l'ensemble de sites de notre étude  deux modes d'exploitation de l'or, la recherche de roche à ciel ouvert (92,59%) et la recherche souterraine (7,41%), et deux types d'exploitation de l'or, le lavage à la batée (91,67%) et le lavage simple (8,33%). Plusieurs raisons, aussi bien économiques que sociales, justifient l'attrait des populations des territoires de Wamba et de Mambasa pour cette pratique. Mais la raison principale est le fait que l'orpaillage génère un revenu rapide et élevé. En effet, le revenu mensuel des orpailleurs varie entre 210 et 280 dollars américains. Ceci a confirmé notre deuxième hypothèse selon laquelle « L'engouement de la population vers l'orpaillage s'expliquerait par la capacité de cette activité à fournir un revenu rapide et élevé».

    CHAPITRE TROISIEME :

    LA PLACE DE L'ORPAILLAGE DANS LE PROCESSUS DE DEVELOPPEMENT LOCAL

    Ce chapitre tente de montrer la place que peut occuper l'orpaillage dans le processus de développement en territoires de Mambasa et de Wamba. Mais avant d'y arriver, nous analysons d'abord les conséquences environnementales et sanitaires de cette activité dans la première section. Nous posons ensuite dans la deuxième section les conditions de l'émergence du développement à partir de l'orpaillage. Nous proposons enfin dans la dernière section les pistes vers un plan stratégique national de l'orpaillage.

    3.1. ANALYSE AVANTAGES - COUTS

    L'analyse avantages - coûts consiste généralement à :

    - identifier les avantages (externalités positives) et tous les coûts (directs, indirects, externalités négatives, etc.) ;

    - chiffrer ces avantages et tous ces coûts ; et enfin

    - les comparer.

    Etant donnée les difficultés d'évaluation chiffrée des conséquences environnementales et sanitaires, nous nous limiterons à identifier les avantages et les coûts et à les comparer en termes d'importance des bénéficiaires des avantages et des victimes des coûts provoqués par la dégradation de l'environnement et de la santé publique.

    3.1.1. Les externalités positives : avantages

    Les externalités positives peuvent être regroupées en trois catégories : le revenu généré par l'orpaillage, l'émergence des centres commerciaux autour des carrières d'or et l'importance de l'or dans la finance informelle.

    a) Le revenu généré par l'orpaillage

    Dans le chapitre précédent, nous avons trouvé que l'orpaillage génère un revenu rapide et élevé. En effet, le revenu mensuel des orpailleurs varie entre 210 et 280 dollars américains. Bien que ce revenu soit globalement affecté à la consommation alimentaire et vestimentaire, quelques rares enquêtés nous ont témoigné avoir acheter des tôles de leurs maisons en semi durables par le revenu issu de l'orpaillage. D'autres se sont procurés des parcelles dans les chefs lieux des territoires (Mambasa et Wamba) grâce au revenu tiré de l'orpaillage. D'autres encore ont acheté des biens d'équipement domestiques, des vélos voire des motos.

    Au niveau provincial (Province Orientale), 20 à 60 kilogrammes d'or estimés à environs 600000 à 1800000 dollars américains par jour quittent la Province Orientale en direction de Butembo. Il y a quand même un flux financier très important à l'origine duquel il y a l'exploitation artisanale de l'or. Le rapport de HUMAN RIGHTS WATCH avait déjà publié l'évolution plus ou moins de la production de l'or en Province Orientale en valeur (dollars américains) comme l'indique le tableau suivant :

    Tableau N° 13 : Evolution de la production artisanale de l'or en Province Orientale

    en valeur (dollars américains)

    ANNEE

    1998

    1999

    2000

    2001

    2002

    2003

    2004

    EXPORT

    18.600.000

    38.360.000

    55.730.000

    50.350.000

    59.900.000

    45.760.000

    45.590.000

    Source: Rapport de HUMAN RIGHTS WATCH

    Comme le disent Koen VLASSENROOT et Timonthy RAEYMAEKERS63(*), les mineurs sont quelques fois confrontés à des grandes quantités d'argent, surtout lorsqu'ils attirent une quantité équivalente d'or. La découverte d'une pépite ou d'une veine d'or signifie souvent l'avènement rapide d'une fortune. Ainsi, dans les carrières, les orpailleurs dépensent souvent leur argent pour de la bière et de « lotoko » (l'alcool local fait de mais et de manioc) dans des « nganda » locaux.

    b) L'émergence des centres commerciaux autour des carrières d'or

    L'exploitation artisanale de l'or en territoires de Mambasa et de Wamba a attiré un nombre important de paysans et des chômeurs urbains en quête de fortune ou simplement de survie économique. Ces migrations ont eu des effets importants sur le paysage socio- économique des centres miniers ruraux périphériques aux centres « urbanisés » d'accumulation informelle et de survie. Ainsi, dans ces centres, on trouve des marchés des produits vivriers, des boutiques et officines pharmaceutiques, la naissance du secteur tertiaire en campagne où sont organisés certains services tels que les restaurants populaires, les bars, le transport (vélo ou moto taxi), la multiplicité des groupes des prières, etc.

    c) L'importance de l'or pour la finance informelle

    L'or joue un rôle important d'épargne et de transfert dans la finance informelle. En effet, dans les carrières d'or, les gens ont pris l'habitude d'épargner leur argent (les francs congolais) en le convertissant en or. Ainsi, pour quelques paysans qui pratiquent encore des activités agricoles et vendent leurs produits vivriers dans les centres miniers, la vente de produits vivriers s'accompagne toujours par l'achat de l'or si les produits eux-mêmes ne sont pas achetés en or. Il n'est pas donc étonnant que certains prix soient directement fixés en or. Lors de nos enquêtes par exemple un kilogramme de riz blanc coûtait une « tige » d'or (l'équivalent de un dixième du gramme et pèse comme une tige d'allumette).

    L'or sert de plus en plus comme intermédiaire dans les opérations de transfert d'argent. Les parents ou les petits entrepreneurs qui veulent transférer l'argent a Butembo par exemple pour l'une ou l'autre raison, le déposent auprès des négociants qui ont des liens d'affaires a Butembo. Ces négociants achètent de l'or avec cet argent pendant que l'équivalent de cette somme d'argent est servi à Butembo. C'est la l'un des principaux avantages de l'orpaillage dans un milieu où il n'existe pas un système formelle de micro finance.

    Quelles sont donc les conséquences de l'orpaillage sur l'environnement et la santé.

    3.1.2. Les externalités négatives : conséquences environnementales et sanitaires

    Si l'exploitation artisanale de l'or peut jouer un rôle important dans le processus de développement en territoires de Mambasa et de Wamba, il faut cependant avoir à l'esprit que cette activité s'accompagne aussi des conséquences néfastes sur l'environnement et la santé.

    a) Les problèmes environnementaux

    L'exploitation artisanale de l'or entraîne de graves préjudices à l'équilibre de l'écosystème. Les principaux problèmes environnementaux qui en résultent sont la pollution des eaux (32,41%), la destruction de la faune (25,93%), la dégradation des sols (21,29%) et la déforestation (6,48%).

    Tableau N°14 : Problèmes environnementaux de l'orpaillage

    TYPES DE PROBLEMES

    EFFECTIF

    %

    1

    Pollution des eaux

    35

    32,41

    2

    Destruction de la faune

    28

    25,93

    3

    Dégradation des sols

    23

    21,29

    4

    Déforestation

    15

    13,89

    5

    Autres (pollution sonore, dévastation de l'aire protégée, ...)

    7

    6,48

     

    TOTAL

    108

    100,00

    Source : Donnée d'enquête de janvier 2011.

    1° La pollution des eaux

    L'activité d'orpaillage cause des dommages réels aux eaux. Il s'agit de la modification du tracé originel des cours d'eaux, de la pollution des cours d'eau et de l'intoxication de leurs habitants, la pollution des nappes phréatiques. Les éléments chimiques produits par l'orpaillage ont un effet très nocif sur les eaux. On utilise souvent des quantités excessives de substances chimiques, par exemple du mercure, au détriment de l'environnement (déchets extrêmement polluants). On a tendance à croire que plus on utilise des produits chimiques, mieux cela vaut.

    Notre étude n'est pas allée jusqu'à analyser le degré de pollution des cours d'eau en éléments chimiques produits par l'orpaillage. Cependant, d'autres dégâts causés à l'eau sont visibles. L'eau retenue pour laver l'or est à la suite de son usage déversée directement dans la rivière qui passe tout juste à côté. Le drame, c'est que ce geste inconsidéré met en danger la vie des ressources halieutiques et même des vies humaines, car l'eau, de cette rivière polluée par le fait de l'orpaillage, est souvent consommée par des paysans dans leurs champs.

    2° La destruction de la faune

    L'orpaillage dans les territoires de Mambasa et de Wamba, avec toutes ses activités connexes telles que la chasse intensive et commerciale, le braconnage armé et l'exploitation intensive du charbon du bois, contribue à l'altération rapide du biotope et à la destruction massive de la faune. Selon un rapport de la Réserve de Faune à Okapis (RFO Epulu), la présence des carrières minières sur l'axe Badengaido- Bafwanekengele- Bafwambaya- Bafwabango, un des deux axes de notre recherche, favorise la chasse intensive et commerciale ainsi que le braconnage64(*).

    3° La dégradation des sols

    La dégradation des sols par les activités d'orpaillage est parmi les conséquences les plus visibles dans les conséquences environnementales. Le couvert végétal des sites est dégradé par l'action des fouilles. Les orpailleurs dégagent la végétation avant de creuser la terre. Dans cette logique, toutes les herbes et les arbres sont coupés. Ainsi, les sites d'orpaillage sont des terrains rendus nus sur des centaines de mètres.

    Les trous creusés par les orpailleurs, les pierres infertiles en or rejetées à la surface rendent les sites irrécupérables pour l'agriculture. Dans un premier temps, les trous rendent les sites d'accès dangereux et dans un second temps ils ne disposent pas les sites à une activité agricole. Les champs proches des sites d'exploitation sont quotidiennement détruits par l'action des orpailleurs. Aussi, les dégâts causés au sol sont-ils un problème pour l'aménagement de ces carrières.

    4° Les autres externalités négatives

    Parmi les autres externalités négatives environnementales, il faut citer notamment les suivantes :

    - la déforestation très avancée : la forte concentration des orpailleurs, parfois spontanée sur les sites, entraîne le déboisement anarchique des ressources ligneuses végétales pour la satisfaction des besoins énergétiques (bois de feu) et d'habitation (bois de service);

    - la non évacuation des déchets solides et dangereux : l'accumulation des rejets d'exploitation du minerai et les déchets et ordures ménagères de toutes sortes constituent des éléments de pollution et de dégradation de la diversité biologique ;

    - la dévastation de l'aire protégée (RFO) ;

    - la pollution sonore;

    - etc.

    b) Les problèmes sanitaires

    Pour ce qui concerne les conséquences sanitaires de l'orpaillage, les enquêtes du terrain nous ont permis de les regrouper en quatre catégories : les risques sanitaires proprement dits, les risques d'accidents, les risques d'éboulement et l'insalubrité.

    Tableau N°15 : Les externalités sanitaires de l'orpaillage

    TYPES D'EXTERNALITES

    EFFECTIF

    %

    1

    Risques sanitaires

    52

    48,15

    2

    Risques d'accidents

    28

    25,93

    3

    Risques d'éboulement

    14

    12,96

    4

    Insalubrité

    8

    7,41

    5

    Autres (diarrhée, « filaire », ...)

    6

    5,55

     

    TOTAL

    108

    100,00

    Source : Donnée d'enquête de janvier 2011.

    1° Risques sanitaires proprement dits

    Les effets délétères de l'orpaillage sont nombreux. Ils sont pour la plupart liés à l'hygiène des sites d'exploitation et la poudre de poussière dégagée par la pierre pilée. Les orpailleurs les plus exposés sont ceux qui pratiquent le lavage simple, le lavage à la batée et le broyage des pierres.

    Dans le cas du lavage simple et le lavage à la batée, la présence des orpailleurs dans l'eau insalubre tout le temps de leur activité est un risque potentiel d'infections. Ils sont vulnérables à plusieurs maladies cutanées et sexuelles à court et à long terme. Pour ceux qui broient les pierres, ils sont exposés à des infections cérébrales.

    Selon les médecins des zones de santé environnantes, plusieurs consultations ont un rapport direct avec l'orpaillage. Il s'agit des maladies comme la bilharziose, les infections vaginales, la fièvre typhoïde, les infections cutanées, la méningite, la tuberculose, la malaria, la dysenterie, etc.

    Au-delà de ces maladies, les orpailleurs sont exposés à d'autres maladies liées à l'intoxication au mercure. Les études de l'O.I.T65(*)., en 1999, ont démontré que la vapeur de mercure, qui se dégage lorsque l'amalgame de mercure et d'or est chauffé en cycle ouvert, est ingérée par voie pulmonaire, ce qui entraîne des coliques, des vomissements, des gastro-entérites, des maladies des reins et des voies urinaires, des entérites aiguës, une ulcération des gencives et une sensibilité extrême à la lumière.

    Par ailleurs, l'accent a été mis dans de nombreuses réponses sur l'importance de la santé communautaire. Les installations sanitaires insuffisantes, le manque d'eau saine, le paludisme, la typhoïde, la dysenterie, la tuberculose, les maladies sexuellement transmissibles (notamment le SIDA), la malnutrition et la consommation abusive d'alcool et d'autres drogues constituent des problèmes fréquents qui s'accentuent, prenant parfois des proportions d'épidémie lorsque des petites exploitations s'établissent dans une nouvelle région et que leurs travailleurs doivent s'installer dans des logements précaires.

    2° Risques d'accident, notamment d'éboulement

    Bien qu'on manque de données sur les accidents dans les petites exploitations minières, on doit affirmer que les accidents sont légions sur les différents sites d'orpaillage. Ces accidents partent des plus bénins au plus graves, aboutissant parfois à la mort.

    Les accidents sont souvent causés par l'imprudence des orpailleurs. Pour la plupart des cas par exemple, c'est parce que les victimes ont taillé les piliers permettant de soutenir la partie supérieure des tunnels. Cette imprudence conduit à des accidents causant la mort des personnes.

    Parfois, les accidents sont causés par la chute de portions de terre. En effet, les orpailleurs à la recherche de roches creusent la terre de façon verticale et à une certaine profondeur (2 à 3 mètres). Ils font des lobes. Même si ces trous ne sont pas suffisamment profonds, la partie supérieure des lobes constituent un danger permanent pour les orpailleurs. Car la partie supérieure n'est pas soutenue par des piliers, et l'action de la pluie provoque des éboulements.

    Un autre risque d'accident est non négligeable. Il s'agit des particules de roche qui sautent lors du concassement du broyage des roches. Selon les informations reçues, beaucoup d'orpailleurs perdent leurs yeux par des fragments de roches.

    Les accidents sont donc liés aux méthodes d'exploitation. Ainsi, les méthodes d'exploitation souterraine et la recherche de roche sont particulièrement les plus risquant.

    3° Insalubrité

    Dans tous les sites de notre recherche, de nombreuses ressources en eau sont polluées et on a remarqué une absence quasi-totale d'installations sanitaires. L'eau propre est devenue rare. Cette situation de mauvaises conditions sanitaires et d'hygiène constitue des vecteurs de maladies d'origine hydrique. D'ailleurs selon une étude commandée par le Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) à l'occasion de la Journée mondiale de l'eau en mars 2010, l'eau souillée et l'absence d'installations sanitaires sont responsables de plus de morts que toutes les formes de violences y compris les guerres66(*).

    En grosso modo, l'analyse avantages - coûts de l'activité aurifère en territoires de Mambasa et Wamba peut être résumé dans un tableau :

    AVANTAGES

    COUTS

    1. Revenu issu de l'orpaillage:il est plus au profit des négociants, aucun impact sur les infrastructures d'intérêt communautaire

    1. Problèmes environnementaux: pollution des eaux, destruction de la faune, dégradation de sols, etc.

    2. Emergence des centres commerciaux avec développement du secteur tertiaire

    2. Problèmes sanitaires:risques sanitaires, d'accident, d'éboulement

    3. Rôle important dans la finance informelle: l'or sert a l'épargne et au transfert

     

    BENEFICIAIRES:

    VICTIMES:

    Une partie de la population présente de ces 2 territoires

    Toute la population présente et future de 2 territoires

    Les négociants

     

    Les comptoirs des villes (Butembo, ...)

     

    L'Ouganda

     

    Tableau N°16 : Analyse avantages - coûts de l'orpaillage

    L'activité aurifère telle qu'il se fait actuellement en territoires de Mambasa et de Wamba s'accompagne donc des conséquences néfastes sur l'environnement et la santé. Ceci confirme notre troisième hypothèse selon laquelle « L'orpaillage aurait des conséquences néfastes sur l'environnement et sur la santé des hommes ». Que faut-il donc faire pour que l'orpaillage présente plus des avantages que des conséquences néfastes ?

    3.2. LES CONDITIONS NECESSAIRES DE L'EMERGENCE DU DEVELOPPEMENT A PARTIR DE L'ORPAILLAGE

    Pour que l'orpaillage puisse contribuer a l'émergence du développement local en territoires de Mambasa et de Wamba, il faut entre autre 1) réviser le cadre juridique de l'orpaillage en RD Congo, 2) résoudre le problème des externalités négatives de l'exploitation artisanale de l'or et 3) encadrer les différents acteurs intervenant dans ce domaine.

    3.2.1. La révision du cadre juridique de l'orpaillage en RD Congo

    Cette révision ne mettra pas l'accent seulement sur le Code minier mais concernera tout l'ensemble du cadre juridique : le code minier, les orientations stratégiques, les mesures particulières, etc.

    a) Du Code minier proprement dit

    La révision du Code minier pourrait concerner trois aspects. En premier lieu, au lieu de mettre tout l'accent seulement sur la rentabilité du projet minier, il faut aussi mettre l'accent sur le développement national.

    Ensuite, à la place d'une libéralisation du secteur minier à outrance jusqu' à manquer d'objectifs de développement, l'Etat doit devenir de plus en plus garant de la richesse du pays et doit être présent dans ce secteur essentiel à tous les niveaux.

    Enfin, le cadre juridique de l'orpaillage en RD Congo doit viser aussi des vrais objectifs de développement social des populations locales, en plus de la réalisation des infrastructures de base d'intérêt communautaire. Il faut par exemple prévoir la formation des différents acteurs qui interviennent dans le secteur miner, un dispositif participatif pour la négociation des conventions minières pour des gisements de grande ampleur, etc.

    b) Des orientations stratégiques précises

    Le cadre juridique de l'orpaillage pouvait donner de façon explicite, par exemple les orientations stratégiques suivantes :

    - minimisation des impacts négatifs de l'exploitation artisanale de l'or sur l'environnement en général et sur la diversité biologique en particulier ;

    - développement des exploitations minières conservatrices de la diversité biologique ;

    - élaboration d'un programme de surveillance environnementale et de contrôle dans les zones d'exploitation minière ;

    - restauration des écosystèmes dégradés, création des périmètres de reboisement autour des carrières et des mines ;

    - promotion d'une analyse comparative des avantages et des inconvénients, pour toute exploitation des ressources minières.

    Ces orientations peuvent être coulées dans un document sous forme d'un plan stratégique national de l'exploitation artisanale de l'or. Somme toute, l'exploitation artisanale de l'or doit être intégrée dans des politiques de développement du gouvernement de la RD Congo.

    c) Des mesures de lutte contre le travail des enfants dans les mines

    Ces mesures que l'Etat doit prendre peuvent tourner autour de la sensibilisation/mobilisation de l'opinion, de l'éducation des enfants, de la réinsertion sociale des enfants « mineur » grâce à des services de soutien et  de la promotion d'activités génératrices de revenus pour les parents.


    La sensibilisation et la mobilisation de l'opinion sont de précieux outils de prévention et d'élimination du travail des enfants. Le premier pas dans la bonne direction est de faire connaître au public les conséquences du travail des enfants dans les petites exploitations minières. Il est désormais admis qu'à partir du moment où la société tout entière prend conscience du problème, la situation est mûre pour stigmatiser et éradiquer les formes les plus abusives et les plus dangereuses de travail des enfants.


    Le moyen le plus efficace pour endiguer l'afflux des enfants d'âge scolaire vers les formes abusives d'emploi et de travail est d'élargir et d'améliorer la scolarisation de ces enfants, de manière à les attirer à l'école et à les y maintenir. L'éducation de qualité est un élément essentiel de la solution. A tout le moins, l'école doit être présente et accessible; elle doit être ouverte à plein temps ou du moins une bonne partie de la journée. Son coût doit être modéré, pour un enseignement de qualité acceptable et adapté au contexte socio-économique. Il est impératif que les enfants soustraits au travail bénéficient d'un suivi et d'un soutien supplémentaire lorsqu'ils sont placés dans des écoles traditionnelles.


    Lorsqu'un enfant est retiré du travail, il doit bénéficier de toute une série de mesures de soutien. Cela est particulièrement important lorsque son développement a été compromis par le travail. Il aura besoin non seulement d'une instruction et d'une formation professionnelle, mais aussi de services médicaux, d'une alimentation adaptée, d'une formation professionnelle, de loisirs et de jeux et d'un suivi intensif.


    De nombreux enfants sont obligés de travailler pour suppléer au revenu familial. Lorsqu'on les retire de leur travail à plein temps ou à temps partiel, il importe le plus souvent de prévoir une autre activité génératrice de revenus pour les parents et/ou les enfants.

    3.2.2. La gestion des externalités négatives : quelques solutions

    Le concept d'externalités a trouvé un intérêt accrû aux yeux des économistes de l'environnement, parce qu'il permet de formaliser le problème de pollution. Cette section propose des solutions en présence d'externalités négatives principalement.

    a) Le laissez- faire

    La solution du laissez- faire peut paraître triviale et inopérante, mais il ne faut pas s'arrêter à cette première impression. Il s'agit de laisser faire mais en intégrant les coûts de pollution dans les frais de permis d'exploitation artisanale et dans les autres frais d'installation dans une zone minière. Les externalités, notamment négatives, sont internalisées sous forme du prix des logements et terrains dans les sites d'orpaillage. Seuls, les habitants avant l'installation de sites d'orpaillage sont fondés à se plaindre, pas ceux qui se sont installés après et donc en toute connaissance de cause.

    b) La fusion

    C'est une solution simple : les petites exploitations minières rachètent, par exemple, les champs des populations riveraines. L'externalité est internalisée par les petites exploitations minières. Les petites exploitations minières, restant seules, maximiseront leur profit global : elles seront alors obligées de tenir compte de l'effet néfaste de leur exploitation minière sur sa production agricole. De manière naturelle, elles seront conduites à trouver l'optimum de production.

    c) La négociation

    C'est solution à l'amiable entre les différents agents économiques, entre par exemple des orpailleurs et les agriculteurs. Si les petites exploitations minières et les populations riveraines parviennent à un accord, il n'est nul besoin d'une intervention extérieure, et ce quelle que soit la répartition des droits de propriété, selon le théorème de COASE. Ronald COASE ( 1960)67(*) a montré que les conditions pour qu'un tel accord soit possible sont assez restrictives. Il faut en effet que les droits de propriété soient parfaitement définis, les coûts de transaction entre pollueurs et pollués soient inférieurs aux bénéfices de l'entente, la transaction soit plus favorable, aux exploitants miniers comme aux populations riveraines, que l'entente, les coûts de transaction recouvrent les coûts de prospection (qui pollue ?), de négociation (trouver les termes d'une éventuelle entente), et d'exécution (veiller à l'application de l'accord).

    d) L'intervention des pouvoirs publics

    Il existe de multiples situations où les solutions précédentes ne sont pas suffisantes (ou ne sont pas considérées comme admissibles). Par exemple, en l'absence de droits de propriété (cas de pollution d'une rivière par exemple), ou lorsque l'externalité est diffuse, avec un montant faible par agent mais touchant un très grand nombre d'agents (ce qui rend impossible tant la fusion que la négociation).Une intervention des pouvoirs publics est alors possible, sous certaines conditions, avec trois outils de base : la norme, la taxe et le marché des droits à polluer.

    Le principe de la norme consiste à fixer un plafond (pour une externalité négative) ou un plancher (pour une externalité positive) sur une variable représentative de l'externalité. On fixera par exemple des limites à des niveaux de pollution, en volume (exemple : quantité maximale de mercure produite par une petite exploitation minière) ou en proportion (exemple : limite de mercure par km pour une petite exploitation minière).

    La notion de taxe visant à mener les pollueurs à internaliser les externalités est due à l'économiste britannique Arthur Cecil Pigou, d'où son nom de taxe pigouvienne. Il s'agit de mesurer le niveau de production du pollueur si celui-ci prenait en compte le coût de l'externalité :

    - Coût marginal privé + Coût marginal de l'externalité = Coût marginal social ; ou

    - Coût moyen privé + Coût moyen de l'externalité = Coût moyen social.

    La valeur du Coût de l'externalité correspondant à l'optimum social fournit la valeur de la taxe pigouvienne à appliquer (ou, si l'externalité est positive, de la subvention à accorder), afin que la production corresponde à l'optimum social.

    La solution du marché des droits à polluer fut proposée pour la première fois par John DALES en 196868(*). Dans ce cadre, l' État fixe, en fonction des contraintes qu'il s'est choisi ( traités internationaux, comme ceux du type du protocole de Kyoto par exemple), la quantité maximale de polluants qu'il souhaite émettre. Puis, il distribue ou vend des «  droits à polluer » de façon « équitable » aux pollueurs. Les entreprises polluant moins que prévu par l' État (ou ayant dépollué) sont alors gagnantes : elles peuvent revendre ou louer leurs droits à polluer inutilisés à d'autres entreprises qui polluent plus que prévu, et perçoivent donc une récompense pour leur «  civisme ». Symétriquement, les entreprises polluant plus sont perdantes, ce qui satisfait au «  principe pollueur- payeur ».

    3.2.3. L'encadrement des acteurs intervenant dans l'orpaillage

    Cet encadrement peut se faire d'une part par les pouvoirs publics, à travers le Service d'Assistance et d'Encadrement du Small Scale Mining, SAESSCAM, et d'autre part par les acteurs non étatiques de ce secteur.

    a) Encadrement institutionnel par le SAESSCAM

    Le Service d'Assistance et d'Encadrement du Small Scale Mining, SAESSCAM, est un service technique spécialisé de l'Etat dans les zones d'exploitation minière artisanale. Il s'occupe principalement de l'encadrement technique des creuseurs. C'est ainsi que les orpailleurs artisanaux exploitant dans les concessions de l'OKIMO (Office de mines de Kilo- Moto) en Ituri et dans le Haut- Uélé sont désormais encadrés par le SESSCAM au terme d'un protocole d'accord signé à Bunia et à Watsa , respectivement le 14 et le 16 août 200869(*). Cette initiative doit être étendue sur toutes les zones d'exploitation artisanale, notamment dans les territoires de Wamba et de Mambasa.

    En effet, les objectifs poursuivis par le SAESSCAM sont les suivants :

    - assainir le secteur minier d'exploitation artisanale et de la petite mine par l'assistance et l'encadrement, en vue de promouvoir l'émergence d'une classe moyenne congolaise;

    - canaliser les productions des exploitations minières artisanales et de la petite mine vers les circuits officiels de commercialisation afin de lutter contre la fraude des substances minérales et de percevoir les recettes dues à l'Etat;

    - préparer l'après mine par la mise en oeuvre des projets de développement intégré en faveur des communautés locales de base vivant dans les zones où se déroulent les activités minières artisanales et/ou de petite mine.

    Pour que cet encadrement institutionnel soit efficace, il faudra ainsi renforcer les capacités des agents et cadres de ce service technique de l'Etat, les équiper et les motiver par des bons salaires. Il faut ici de la coopération décentralisée pour que ce service de proximité soit effectivement opérationnel. Le Cadastre minier devra travailler en collaboration avec le SAESSCAM dans son travail d'attribution des concessions minières aux communautés locales pour l'exploitation artisanale en vue de réduire le potentiel des conflits locaux.

    Il faudra ensuite créer un corps d'inspecteurs des mines chargés de vérifier régulièrement la conformité des activités d'exploitation artisanale et semi- industrielle au code minier et règlement minier, et renforcer les contrôles aux frontières.

    Il faudra enfin décentraliser mais coordonner certes, les services des recouvrements des redevances et droits superficiaires du secteur minier. Car depuis la mise en oeuvre par le Ministère des finances du principe de l'unicité de la caisse de l'Etat sur recommandation du FMI (Fonds Monétaires Internationales), les autres services techniques de l'Etat sont affaiblis. On peut s'attendre à moins de ressources générées. Le SAESSCAM ne sait plus rétrocéder aux communautés locales leur 10%. Ceci nous parait évidemment une violation des dispositions du code minier.

    b) Encadrement technique, financier et en formation par les partenaires non étatiques

    Pour atteindre ses objectifs, le SAESSCAM devra collaborer avec les différents partenaires non étatiques dans le secteur minier. En effet, les orpailleurs et autres acteurs qui interviennent dans le secteur de l'orpaillage ressentent un besoin d'encadrement à divers niveaux, notamment au niveau de la formation et au niveau de l'accès au financement.

    Il y a un fort déficit en formation technique, l'essentiel de l'apprentissage se faisant sur le tas sans aucun bagage théorique. Ceci est vrai aussi bien pour les creuseurs que pour les femmes associées plus ou moins directement aux travaux d'orpaillage. La formation technique est donc indispensable pour améliorer la qualité de la production et même pour éviter les accidents. En vue de préparer l'après mine, on peut commencer aussi à initier des petits programmes d'apprentissage des métiers en vue de diversifier les activités des acteurs dans ce secteur.

    Le besoin en formation peut être aussi résolu par l'alphabétisation fonctionnelle (en langue locale), notamment pour les femmes (0% des diplômées D4, D6, G3, L2). Elle a pour objectif de donner des notions de base en lecture, écriture et calcul. Les villageois eux-mêmes savent que les alphabétisés se débrouillent mieux, que leur cour est plus propre, qu'ils se font moins rouler par les commerçants, etc. D'ailleurs, il est très difficile à ceux qui ne sont pas alphabétisés de suivre des formations, qu'elles soient données en gestion ou dans d'autres domaines.

    On peut aussi organiser de temps à temps des formations en gestion et en management. Les orpailleurs, en particulier, après des exercices de comptabilité élémentaire se rendent compte du coût très élevé de leurs dépenses sociales (funérailles, fêtes religieuses, visites des parents, etc.). L'initiation à la gestion (cahier d'entrée- sortie, estimation des coûts de production) et au management est indispensable, même si beaucoup prétendent avoir leurs comptes dans la tête. Cependant s'il faut initier ces acteurs à la gestion, il faut tenir compte de l'environnement et formaliser cette comptabilité avec des outils facilement compréhensibles.

    Selon nos enquêtes, 50% des « mamans restaurants » dans les carrières d'or ont démarré leur activité grâce à leur apport personnel, 22,5% grâce aux emprunts contractés dans la famille, 15% grâce à la tontine, 10% grâce au crédit fournisseur et 2,5% grâce à l'épargne traditionnelle qui consiste souvent à transformer de l'argent en biens. Le besoin de financement de leurs activités se fait donc sentir avec acuité. Il en va de même des creuseurs proprement dits qui ont d'énormes difficultés pour payer les permis d'exploitation et pour se procurer des outils de travail.

    La propension marginale à épargner étant très faible (1,3) dans ces carrières d'or, l'encadrement financier peut se faire donc en créant les caisses d'épargne et de crédit (argent chaud) et en organisant le crédit direct (argent froid) dans les milieux. Les coopératives d'épargne et de crédit mutualistes insistent sur la nécessité d'une épargne préalable (argent chaud) avant l'octroi d'un crédit. Le crédit direct (argent froid) peut se faire soit sous forme du modèle Grameen Bank (crédit solidaire) ou les sommes prêtées sont garanties par des groupes de caution solidaire soit sous forme des IMF (Institutions de Micro Finance) spécialisées dans l'offre de crédit aux petites et micro- entreprises.

    3.3. LES PISTES VERS UN PLAN STRATEGIQUE NATIONAL DE L'EXPLOITATION ARTISANALE DE L'OR

    Nous proposons ici des indications pour la mise en oeuvre d'un plan stratégique national afin d'améliorer les pratiques et conditions de travail dans le secteur de l'extraction minière artisanale et à petite échelle de l'or et d'atténuer ses incidences sur l'environnement et la santé. Nous nous referons principalement au Conseil d'administration du Programme des Nations Unies pour l'Environnement (PNUE), dans sa décision 24/3 IV, priant le Directeur exécutif du PNUE, de concevoir un document d'orientation pour l'élaboration d'un plan stratégique national pour l'exploitation minière artisanale et à petite échelle de l'or70(*).

    3.3.1. But et avantages du plan

    Le plan stratégique national permet de fournir une base et des orientations précises pour l'exécution d'activités destinées à surmonter les problèmes posés par l'extraction minière artisanale et à petite échelle de l'or. Ce type d'outil de planification est particulièrement utile pour tirer parti des activités existantes, mobiliser des ressources, unir des parties prenantes qui ne sont pas nécessairement habituées à travailler ensemble ainsi que pour représenter des approches et des intérêts divergents.

    L'élaboration d'un plan stratégique national pour l'exploitation minière artisanale et à petite échelle de l'or est l'occasion de mettre en place une base claire et transparente pour l'appui à la mise au point et à la mise en oeuvre d'activités durables pour aborder le problème au niveau national. Le plan devrait s'efforcer de coordonner et de mobiliser les capacités nationales en vue de prévenir la pollution, de réduire et d'éliminer les risques associés à ce secteur d'activités.

    La mise en oeuvre d'un plan stratégique national pour l'extraction minière artisanale et à petite échelle de l'or présente de nombreux bénéfices et avantages potentiels :

    - amélioration de la santé et de la qualité de l'environnement des communautés d'orpailleurs, y compris réduction des rejets de mercure ;

    - renforcement des liens avec l'ensemble des programmes de développement et de ceux relatifs aux droits de l'homme et à l'environnement ;

    - meilleur accès aux ressources nécessaires ;

    - intensification de la coopération et de la collaboration ;

    - durabilité à long terme du secteur de l'exploitation minière artisanale et à petite échelle de l'or

    3.3.2. Contenu du plan

    Le pour un plan stratégique national d'exploitation minière artisanale et à petite échelle de l'or peut comprendre sept parties :

    1. Résumé analytique

    2. Introduction et informations générales ;

    3. Aperçu national

    4. But et objectifs prioritaires ;

    5. Stratégies de mise en oeuvre ;

    6. Mécanisme d'évaluation ;

    7. Annexes.

    3.3.3. Les étapes du plan

    Nous mettons en avant une proposition de processus en six étapes pour utilisation par les autorités nationales lors de l'élaboration du plan stratégique national.

    a) Première étape : Mise en place d'un mécanisme de coordination


    L'élaboration d'un plan peut constituer une occasion intéressante d'acquérir de nouvelles expériences, de nouvelles compétences et connaissances, et d'apporter une contribution positive au secteur de l'exploitation minière artisanale et à petite échelle de l'or. Une partie de l'élaboration du plan s'appuiera sur la création d'un groupe de travail.

    Le groupe de travail supervisera le projet étape par étape et veillera à la bonne planification et gestion de celui-ci tout au long du processus. Même si toutes les parties intéressées ne peuvent faire partie du groupe de travail, il est important d'assurer un équilibre représentatif de tous les intérêts pour contribuer au processus.

    Les membres comprennent des représentants nationaux et/ou régionaux chargés des divers aspects concernés notamment environnementaux, financiers, exploitation minière, santé publique et éducation. 

    b) Deuxième étape : Collecte d'informations de référence

    Avant d'élaborer le plan, il convient de rassembler des informations de référence qui constituent la base de « l'aperçu de la situation au niveau national ». Cet aperçu expose brièvement la portée et l'ampleur de la situation ainsi que des activités nationales d'exploitation minière artisanale et à petite échelle de l'or et devrait donc comprendre des informations sur :

    - la situation juridique, y compris un examen des conditions juridiques et réglementaires de ce type d'exploitation ;

    - les aspects géographiques et les statistiques pertinentes ;

    - les données économiques, telles que le revenu par habitant, l'approvisionnement, l'utilisation et la demande en mercure, des informations sur le commerce et l'exportation de l'or ;

    - les exploitations minières, y compris des informations sur les corps minéralisés, les procédés utilisés, le nombre de personnes participant directement ou indirectement à l'exploitation minière artisanale et à petite échelle de l'or (y compris des informations par sexe et âge) ;

    - l'environnement, en détaillant des informations connues telles que la destruction de l'environnement, les sites contaminés, les rejets de mercure dans le sol, l'air et l'eau ;

    - des informations sanitaires sur les incidences pour la santé et le développement, les divers types d'exposition au mercure ;

    - l'encadrement et l'organisation de l'exploitation minière artisanale et à petite échelle de l'or aux niveaux national et local ;

    - les derniers enseignements pour aborder les problèmes posés par ce secteur.

    c) Troisième étape : Définition d'un but et d'objectifs

    Avant d'élaborer le plan, il est utile d'énoncer le problème. Il s'agit de décrire brièvement le problème particulier que le plan devra aborder. En s'appuyant sur l'énoncé du problème, il devrait être possible de définir un but pour le plan : un énoncé concis qui décrit le but du plan. Les buts doivent être réalistes et définis sur la base de la situation particulière du pays. Dans certains cas, la définition d'un but général concernant le mercure peut être une approche concrète qui pourrait être considérée comme un bon premier point d'accès. Par exemple : protéger la santé humaine contre les pratiques de l'exploitation minière artisanale et à petite échelle de l'or en réduisant au minimum, voire en éliminant l'utilisation du mercure et ses rejets pour ce secteur.


    Les objectifs indiquent, de manière plus détaillée que pour le but, les résultats particuliers que le plan d'action doit atteindre, en répondant à la question « Que faut-il faire pour atteindre les résultats escomptés à partir de la situation présente? ». Les questions relatives à l'exposition du mercure peuvent constituer une première approche des questions environnementales. Par exemple : la réduction de 70 % de l'utilisation du mercure d'ici 2020 grâce à l'élimination des principales pratiques inefficaces et dangereuses utilisant du mercure.

    d) Quatrième étape : Formulation de la stratégie de mise en oeuvre

    La stratégie de mise en oeuvre est une partie importante du plan stratégique national pour l'exploitation minière artisanale et à petite échelle de l'or. Il jettera les bases des activités de suivi et précisera les responsabilités des agences nationales et autres partenaires et parties prenantes. Le plan, bien qu'élaboré à un niveau national, devrait être adapté aux conditions et besoins locaux et, de ce fait, il devrait être mis au point en consultation avec toutes les parties prenantes et tous les partenaires potentiels aux niveaux national, régional et local.

    La stratégie devrait comprendre les éléments suivants : le programme de travail à l'appui des objectifs du plan stratégique national, le plan de sensibilisation, l'échéancier et le budget global.

    e) Cinquième étape : Mécanisme d'évaluation

    Des critères spécifiques devraient être définis pour évaluer l'efficacité globale de la mise en oeuvre du plan stratégique national pour l'exploitation minière artisanale et à petite échelle de l'or. Ce faisant, le plan sera conçu de façon à permettre de mesurer et de suivre les progrès et les résultats.

    Il peut être utile d'utiliser des critères d'évaluation tels que l'efficience et l'efficacité des mesures, l'accessibilité économique, la rentabilité fondée sur une analyse coût- bénéfices, la possibilité de réalisation y compris les aspects socio-économiques, les besoins urgents dans les domaines de la santé et/ou de l'environnement, etc.

    f) Sixième étape : Adoption du plan stratégique national

    Afin d'assurer l'appui des institutions, il est indispensable que les décideurs prennent des engagements à différentes étapes du processus d'élaboration du plan : au début, à des points critiques identifiés au cours du processus et, à la fin, lorsque le plan a été définitivement mis au point. Il y a différentes formes d'engagement, par exemple des accords formels et des directives ministérielles. Un travail de sensibilisation dès le départ est un bon moyen d'obtenir leur appui.

    Une activité essentielle consiste à distribuer un modèle du plan en temps opportun et de façon appropriée, sous une forme approuvée au préalable, à ceux qui ont une influence sur son approbation. Il est important d'adapter la documentation aux différents publics en associant les activités à d'autres priorités gouvernementales plus générales. Il peut également être nécessaire d'obtenir un engagement des décideurs extérieurs au processus national d'approbation.

    Conclusion partielle

    Abordant la question des conséquences négatives de l'orpaillage, ce chapitre a relevé sur le plan environnemental la pollution des eaux (32,41%) et sur le plan sanitaire les risques sanitaires proprement dits (48,15%).

    Pour que le développement en territoires de Mambasa et de Wamba émerge à partir de l'orpaillage, il faut d'une part bien gérer les externalités négatives et d'autre part encadrer les acteurs intervenant dans le secteur artisanal de l'orpaillage. Cet encadrement pourra se faire et par les pouvoirs publics, a travers le SAESSCAM, et par les autres partenaires non étatiques de ce secteur. Tout cela ne peut être possible que s'il existe un cadre juridique favorable au développement local et durable.

    Ce chapitre s'est clos par la proposition de quelques éléments d'un plan stratégique national de l'exploitation artisanale de l'or. Ceci est important car la mise en oeuvre d'un plan stratégique national pour l'extraction minière artisanale et à petite échelle de l'or présente de nombreux bénéfices et avantages potentiels, notamment l'amélioration de la santé et de la qualité de l'environnement des communautés d'orpailleurs, y compris la réduction des rejets de mercure. 

    CONCLUSION GENERALE

    Ce travail intitulé, « Exploitation artisanale de l'or et développement en territoires de Mambasa et de Wamba (Province Orientale, RD Congo) », est parti de cette question de départ « Quel est l'impact de l'exploitation artisanale de l'or sur le développement en territoires de Mambasa et de Wamba ? » et s'est assigné comme objectif de montrer comment l'exploitation artisanale de l'or en territoires de Mambasa et de Wamba a une incidence sur le développement. Il fallait ainsi déterminer l'incidence de l'exploitation artisanale de l'or sur les initiatives locales de développement et sur la cohésion sociale, identifier les raisons de l'orientation de la population vers l'orpaillage artisanal, et montrer les risques environnementaux et sanitaires occasionnés par l'orpaillage artisanal.

    Pour atteindre l'objectif qu'on s'est fixé au départ, nous avons adopté une démarche méthodologique appropriée. A partir de l'exploration au tour de la question du départ, nous avons circonscrit notre problématique. Cela nous a permis, dans le premier chapitre, à construire notre analyse sur le modèle de la théorie des externalités (James MEADE), selon laquelle l'activité d'un agent économique (l'exploitation artisanale de l'or, pour ce qui nous concerne) peut avoir des effets externes, positifs ou négatifs, sur les activités des autres agents (les initiatives locales de développement à vocation agro-pastorale, par exemple) et sur le modèle de la théorie des besoins fondamentaux (PNUD) qui met l'accent sur la satisfaction des besoins fondamentaux des populations.

    Pour l'analyse des informations de terrain obtenues par l'utilisation de plusieurs techniques telles que la technique d'enquête, le questionnaire, l'observation participante, les entretiens, et la technique documentaire (exploitation des rapports, des documents personnels, ...), nous avons recouru à la méthode fonctionnelle (méthode qualitative) et à l'induction statistique (méthode quantitative). Cette dernière nous a poussé à constituer, par la technique de boule de neige, un échantillon de 148 individus, dont 40 femmes et 108 hommes. Cette analyse nous a permis d'aboutir à trois résultats qui constituent d'ailleurs les apports de ce travail contenus dans le deuxième et le troisième chapitre.

    Primo. L'exploitation artisanale de l'or vide les villages de leurs populations actives. En effet, il s'est révélé que l'âge des exploitants artisanaux se trouve dans l'intervalle de 33 et 38 ans pour les hommes et dans l'intervalle de 22 et 27 ans pour les femmes. Cet exode des villages vers les carrières a eu des conséquences néfastes sur le dynamisme et la cohésion sociale de plusieurs villages : la diminution de la production agricole, l'absence de petites initiatives de développement, des époux abandonnent leurs épouses pendant des longues années aboutissant souvent aux divorces, les enfants sont détournés du contrôle parental et donc de l'éducation formelle, etc. Cette situation a donc confirmé notre première hypothèse selon laquelle «L'exploitation artisanale de l'or viderait les villages de leurs populations actives, ce qui induirait par voie de conséquence, à l'absence des petites initiatives de développement (à vocation agro-pastorale par exemple) et à la fragilisation de la cohésion sociale par des conflits d'autorité».

    Secundo. Parmi les multiples raisons de l'attrait de la population pour l'activité aurifère, l'obtention d'un revenu rapide et élevé reste la raison principale (28,70%). Pour le lavage à la batée et le lavage simple, les types d'exploitation les plus pratiquées, la production est vendue sur place au soir même de l'exploitation alors qu'il faut attendre 6 mois ou plus pour avoir la production agricole (riz, bananes). De plus, le revenu mensuel d'un orpailleur varie entre 210 et 280 dollars américains. Il est élevé par rapport à celui d'un fonctionnaire (enseignant) qui n'atteint pas 100 dollars américains même en respectant le SMIG (Salaire Minimum Interprofessionnel Garanti). Mais, nous avons constaté que la propension marginale à consommer est très élevée (0,87), elle approche l'unité. Cette consommation consiste plus à la satisfaction des besoins alimentaires et vestimentaires. D'autres besoins fondamentaux comme les soins de santé, l'éducation, le transport, l'eau, l'énergie, ... restent non satisfaits. La deuxième hypothèse selon laquelle « Il semble que l'exploitation artisanale de l'or procure un revenu rapide et élevé permettant de satisfaire les besoins fondamentaux des exploitants artisanaux» doit être nuancée.

    Tertio. L'orpaillage a cependant des conséquences néfastes sur l'environnement et sur la santé. Abordant la problématique des conséquences négatives, nous avons relevé sur le plan environnemental la pollution des eaux (32,41%) et sur le plan sanitaire les risques sanitaires proprement dits (48,15%). La troisième hypothèse selon laquelle « L'orpaillage aurait des conséquences néfastes sur l'environnement et sur la santé des hommes» a donc été confirmée.

    Somme toute, pour que le développement en territoires de Mambasa et de Wamba émerge à partir de l'orpaillage artisanal, nous pensons qu'il faut, d'une part, bien gérer les externalités négatives et, d'autre part, encadrer les acteurs intervenant dans ce secteur. Cet encadrement pourra se faire et par le pouvoir public (par le biais du SAESSCAM) et par les autres partenaires non étatiques de ce secteur. Tout cela ne peut être possible que s'il existe un cadre juridique favorable au développement et un plan stratégique national de l'exploitation artisanale de l'or. A la fin de ce travail, nous avons proposé quelques éléments d'un plan stratégique national de l'orpaillage, un des aspects que d'autres recherches ultérieures peuvent approfondir.

    BIBLIOGRAPHIE GENERALE

    I. OUVRAGES

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    III. TRAVAUX, MEMOIRES ET THESES

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    2. KOUADIO KOUASSI N., Exploitation artisanale de l'or dans le processus de mutation socio- économique à  Hire (Sud Bandama Côte d'Ivoire), D.E.A (diplôme d'études approfondies) Sociologie, Université de Bouaké (Côte d'Ivoire), Bouaké 2003.

    3. MULULU MUGINIBWA, L'exploitation minière artisanale et l'amélioration des conditions socio-économiques des exploitants et des habitants de l'hinterland minier de Likasi (cas du site de SHAMITUMBA), Mémoire de licence en sciences sociales, ISES- Lubumbashi, Septembre 2000.

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    5. NDELA KUBOKOSO J., Les activités minières et la fiscalité (Cas de la République Démocratique du Congo), Thèse de doctorat en Droit, Administration et Secteur Public, Université Paris I Panthéon - Sorbonne, Paris, 2008.

    IV. TEXTES LEGAUX

    1. Code du travail, in Journal officiel, Numéro spécial du 25 octobre 2002.

    2. Code minier congolais, in Journal officiel, Numéro spécial du 15 juillet 2002.

    3. Le règlement minier, in Journal officiel, Numéro spécial du 1er avril 2003.

    V. COURS

    1. KATSUVA MUHINDO, Cours de Méthodes de recherche en sciences sociales, G2 Economie, UCG, Butembo, 2008-2009 (inédit).

    2. MAFIKIRI TSONGO A., Cours d'Economie d'environnement, L2 Faculté des Sciences Economiques (Options Economie rurale et Economie de développement), UCG Butembo, 2010-2011. 176 pages.

    3. MAFIKIRI TSONGO A., Cours de Théorie de développement, L1 Faculté des Sciences Economiques (Option : Economie de développement), UCG Butembo, 2009-2010. 262 pages.

    VI. AUTRES DOCUMENTS

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    2. FEC WAMBA, Rapport annuel 2009, Wamba, 2010 (inédit).

    3. HUMAN RIGHTS WATCH, Le Fléau de l'or, Kinshasa, 2005.

    4. I.C.C.N, Ce qu'est la Réserve de Faune à Okapis, Kinshasa, 2006.

    5. I.C.C.N, Protection du paysage forestier Ituri - Epulu - Aru et notion de site du patrimoine mondial, Kinshasa, 2006.

    6. KABUYA MUYEBA A. (CENADEP), Impact de l'exploitation de diamant et de l'or dans la reconstruction socio-économique de la Province Orientale. Rapport, Anvers, 2009. 20 pages.

    7. KABWELULU M., Le secteur minier congolais, 50 ans après, toujours porteur d'espoir. Discours du ministre des Mines à l'occasion de la clôture des journées minières, organisées par le Ministère des Mines à la FIKIN (Foire Internationale de Kinshasa) du 5 au 19 août 2010, disponible sur http: //www.digitalcongo.net /article /69426 ##.

    8. Le Quotidien kinois Le potentiel, dans son Edition 3679 du samedi 18 mars 2006.

    9. LUTETE C., «  Le gouverneur Médard Autsaï déterminé à accompagner l'encadrement des exploitants miniers artisanaux en RDC », disponible sur http://www.digitalcongo.net/article/53570##, Kinshasa, 12/09/2008, consulté le 20 mars 2011.

    10. O.I.T., Les problèmes sociaux et de travail dans les petites exploitations minières. Rapport soumis aux fins de discussion à la Réunion tripartite sur les problèmes sociaux et de travail dans les petites exploitations minières, Bureau International du travail, Genève, 17-21 Mai 1999 (inédit).

    11. O.I.T., « Mines et carrières : l'autre calvaire des enfants au travail », disponible sur http://www.africk.com/Niger.

    12. OMS & UNICEF, Rapport conjoint de l'Organisation mondiale de la santé et du Fonds des Nations unies pour l'enfance, Mars 2010, disponible sur http://www.planetsave. com/blog/2010/03/24/unsafe-water-kills-more-people-than-war-study.

    13. PIRRONE N. et MASON R., Rapport intérimaire du Partenariat mondial du PNUE pour la recherche sur le transport atmosphérique et le sort du mercure ; disponible sur le site  http://www.chem.unep.ch/mercury/Sector-SpecificInformation/Fate%20and% 20Transport(1).htm.

    14. PNUE, Document d'orientation : Elaboration d'un plan stratégique national pour l'exploitation minière artisanale et à petite échelle de l'or, 7 mai 2009.

    15. PNUE, Rapport du Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) à l'occasion de la Journée mondiale de l'eau, Mars 2010, disponible sur http://www.humains-associes.org/blog/2010/04/27/choses-vues-040410/.

    16. UNICEF, Rapport sur la situation des enfants dans le monde en 1997.

    TABLE DES MATIERES

    INTRODUCTION GENERALE 1

    1. Etat de la question 1

    2. Problématique 3

    3. Hypothèses provisoires 4

    4. Objectifs de recherche 5

    5. Méthodes et techniques utilisées 5

    a) Une méthode qualitative : le fonctionnalisme 5

    b) Une méthode quantitative : l'induction statistique 6

    6. Choix et intérêt du sujet 7

    7. Délimitation du sujet 8

    8. Subdivision du travail 9

    9. Difficultés rencontrées 10

    CHAPITRE PREMIER : LES CONSIDERATIONS GENERALES SUR L'EXPLOITATION ARTISANALE DE L'OR ET LE DEVELOPPEMENT 11

    1.1. DEFINITION DES CONCEPTS 11

    1.1.1. Les concepts- clés 11

    a) Exploitation minière artisanale 11

    b) Développement 13

    1.1.2. Les concepts connexes 17

    a) Mine 17

    c) Creuseur 18

    d) Travail des enfants 18

    1.2. CONSIDERATIONS THEORIQUES 19

    1.2.1. La théorie des externalités 19

    a) Les externalités de production 20

    b) Les externalités de consommation 21

    1.2.2. La théorie des besoins fondamentaux 22

    1.3. CADRE JURIDIQUE DE L'ORPAILLAGE EN RD CONGO 23

    1.3.1. Historique du droit minier congolais 24

    a) De la période coloniale à la Première République (1885-1965) 24

    b) La Deuxième République (1965-1997) 25

    c) La Troisième République (depuis 1997) 25

    1.3.2. Le Code minier congolais et l'exploitation artisanale 26

    a) De l'autorisation d'exploitation artisanale 26

    b) Des obligations du détenteur de la carte d'exploitant artisanal 26

    c) De la transformation des produits de l'exploitation artisanale 26

    d) Du retrait de la carte d'exploitant artisanal 27

    1.3.3. Le régime juridique et fiscal pour l'exploitation artisanale 27

    a) L'exploitant artisanal 27

    b) Le négociant 28

    c) Les comptoirs agréés 28

    1.3.4. Critique du code minier congolais 29

    Conclusion partielle 30

    CHAPITRE DEUXIEME : L'ACTIVITE AURIFERE EN TERRITOIRES DE MAMBASA ET DE WAMBA 32

    2.1. PRESENTATION DU MILIEU DE RECHERCHE 32

    2.1.1. Contexte socio-économique et politique des territoires de Mambasa et de Wamba en Province Orientale 32

    2.1.2. La Réserve de Faune à Okapis (RFO) à Epulu 34

    a) Son historique 34

    b) Ses richesses 35

    2.1.3. Les carrières d'or dans les territoires de Mambasa et de Wamba 36

    a) La zone de Bafwabango - Bafwambaya - Bafwanekengele 36

    b) La zone de Gbonzunzu - Bolebole - Mambati 37

    2.2. CARACTERISATION DES ACTEURS DE L'ACTIVITE MINIERE 39

    2.2.1. Les acteurs de l'activité minière 39

    a) Les services de l'Etat 39

    b) Les exploitants miniers artisanaux 41

    c) Les négociants 43

    d) Les femmes 43

    2.2.2. Age et origine socio- professionnelle des acteurs 46

    a) Age des acteurs 46

    b) Origine socio- professionnelle 49

    2.3. MODES, TYPES D'EXPLOITATION ET CIRCUIT DE COMMERCIALISATION DE L'OR 51

    2.3.1. Modes d'exploitation artisanale de l'or 51

    a) La recherche de roche à ciel ouvert (« durba ») 52

    b) La recherche souterraine (« djogo ») 53

    2.3.2. Types d'exploitation artisanale de l'or 54

    a) Le lavage à la batée (« d'origine ») 54

    b) Le lavage simple 55

    2.3.3. Le circuit de commercialisation de l'or 55

    2.4. ATTRAIT POUR L'ACTIVITE AURIFERE 57

    2.4.1. Raisons économiques 57

    a) Un revenu rapide et élevé 58

    b) D'autres raisons économiques 60

    2.4.2. Raisons sociales 61

    Conclusion partielle 62

    CHAPITRE TROISIEME : LA PLACE DE L'ORPAILLAGE DANS LE PROCESSUS DE DEVELOPPEMENT LOCAL 64

    3.1. ANALYSE AVANTAGES - COUTS 64

    3.1.1. Les externalités positives : avantages 64

    a) Le revenu généré par l'orpaillage 64

    b) L'émergence des centres commerciaux autour des carrières d'or 65

    c) L'importance de l'or pour la finance informelle 65

    3.1.2. Les externalités négatives : conséquences environnementales et sanitaires 66

    a) Les problèmes environnementaux 66

    b) Les problèmes sanitaires 68

    3.2. LES CONDITIONS NECESSAIRES DE L'EMERGENCE DU DEVELOPPEMENT A PARTIR DE L'ORPAILLAGE 72

    3.2.1. La révision du cadre juridique de l'orpaillage en RD Congo 72

    a) Du Code minier proprement dit 72

    b) Des orientations stratégiques précises 73

    c) Des mesures de lutte contre le travail des enfants dans les mines 73

    3.2.2. La gestion des externalités négatives : quelques solutions 74

    a) Le laissez- faire 74

    b) La fusion 75

    c) La négociation 75

    d) L'intervention des pouvoirs publics 75

    3.2.3. L'encadrement des acteurs intervenant dans l'orpaillage 77

    a) Encadrement institutionnel par le SAESSCAM 77

    b) Encadrement technique, financier et en formation par les partenaires non étatiques 78

    3.3. LES PISTES VERS UN PLAN STRATEGIQUE NATIONAL DE L'EXPLOITATION ARTISANALE DE L'OR 80

    3.3.1. But et avantages du plan 80

    3.3.2. Contenu du plan 81

    3.3.3. Les étapes du plan 81

    a) Première étape : Mise en place d'un mécanisme de coordination 81

    b) Deuxième étape : Collecte d'informations de référence 82

    c) Troisième étape : Définition d'un but et d'objectifs 83

    d) Quatrième étape : Formulation de la stratégie de mise en oeuvre 83

    e) Cinquième étape : Mécanisme d'évaluation 84

    CONCLUSION GENERALE 86

    BIBLIOGRAPHIE GENERALE 89

    TABLE DES MATIERES 93

    * 1 Il s'agit surtout de l'absence des services d'encadrement des paysans, d'intrants agricoles, des marchés des produits agricoles et de l'enclavement des villages et des entités administratives. La population ne sait plus vendre sa production pour obtenir de l'argent et payer d'autres services.

    * 2 Didier LATAPIE, La Fabuleuse Histoire de la ruée vers l'or, Californie - XIXe siècle, Mémoire vive. Privat, 2001, p. 10.

    * 3KOUADIO KOUASI N., Exploitation artisanale de l'or dans le processus de mutation socio- économique à  Hire (Sud Bandama Côte d'Ivoire), D.E.A (diplôme d'études approfondies) Sociologie, Université de Bouaké (Côte d'Ivoire), Bouaké 2003.

    * 4 MULULU MUGINIBWA, L'exploitation minière artisanale et l'amélioration des conditions socio-économiques des exploitants et des habitants de l'hinterland minier de Likasi (cas du site de SHAMITUMBA), Mémoire de licence en sciences sociales, ISES- Lubumbashi, Septembre 2000.

    * 5 HUMAN RIGHTS WATCH, Le Fléau de l'or. Rapport, Kinshasa, 2005.

    * 6 KABUYA MUYEBA A. (CENADEP), Impact de l'exploitation de diamant et de l'or dans la reconstruction socio-économique de la Province Orientale. Rapport, Anvers, 2009.

    * 7 VLASSENROOT K. et RAEYMAEKERS T., Conflit et transformation sociale à l'Est de la RDC, Bruxelles, 2004 ; particulièrement le Chapitre V : Conflit et minage artisanal à Kamituga (Sud- Kivu).

    * 8 NDELA KUBOKOSO J., Les activités minières et la fiscalité (Cas de la République Démocratique du Congo), Thèse de doctorat en Droit, Administration et Secteur Public, Université Paris I Panthéon - Sorbonne, Paris, 2008.

    * 9 KATSUVA MUHINDO, Cours de méthodes de recherche en sciences sociales, G2 Economie, UCG, Butembo, 2008-2009 (inédit).

    * 10 QUIVY R. et VAN CAMPENHOUDT L., Manuel de recherche en sciences sociales, Ed. Dunod, 2eme édition, Paris, 2001, pp.201-202.

    * 11 QUIVY R. et VAN CAMPENHOUDT L., Op.cit., pp.225-226.

    * 12 QUIVY R. et VAN CAMPENHOUDT L., Op.cit., p. 191.

    * 13 KABWELULU M., Le secteur minier congolais, 50 ans après, toujours porteur d'espoir . Discours du ministre des Mines à l'occasion de la clôture des journées minières, organisées par le Ministère des Mines à la FIKIN (Foire Internationale de Kinshasa) du 5 au 19 août 2010, disponible sur http: //www.digitalcongo.net /article /69426 ##, consulté le 5 janvier 2011.

    * 14 QUIVY R. et VAN CAMPENHOUDT L., Op.cit., p. 98.

    * 15 UNCTAD, 1997 cité par ELENGE MOLAYI, « Législation minière, environnement et protection de la santé du travail des artisans miniers en RD Congo », in Congo -Afrique XLVIIIe année, N° 425, Mai 2008, p. 376.

    * 16 Pour plus de détails, lire Loi N° 007/2002 du 11 Juillet 2002 portant Code Minier, en ses articles 1er ; 109 et 111.

    * 17 Département des Affaires Economiques et Sociales des Nations Unies cité par KOUADIO KOUASI N., Op. cit., p. 10.

    * 18 ELENGE MOLAYI, Op. cit., p. 377.

    * 19 ELENGE MOLAYI, Op. cit., p. 376.

    * 20 BERZOSA C. et al., Comment se construit la pauvreté, Ed. L'Harmattan, Paris, 2000, pp. 27-28.

    * 21 MUSONGORA SYASAKA E., Mouvement associatif et dynamique de développement au Nord Kivu. Cas des associations de tendance religieuse en territoire de Beni et Lubero, Mémoire présenté en vue de l'obtention du diplôme de Master complémentaire en développement, environnement et sociétés, ULC, Louvain, 2007-2008, pp. 22-23

    * 22 KAMBALE MIREMBE O., Echanges transnationaux, réseaux informels et développement local. Une étude au Nord-Est de la République Démocratique du Congo, Thèse de doctorat en sciences sociales : développement, population et environnement, UCL, Presses Universitaires de Louvain, Louvain-la-Neuve, 2005, p.84

    * 23 CENTRE DE VULGARISATION AGRICOLE, La gestion des initiatives locales de développement, Ed. Centre de Vulgarisation Agricole, Kinshasa 2, 1991, p.101.

    * 24 SCHUMPETER J. A., L'analyse du développement économique, cité par MAFIKIRI TSONGO, Cours de Théorie de développement, L1 Faculté des Sciences Economiques (Option : Economie de développement), UCG Butembo, 2009-2010, pp. 49-50.

    * 25 MAFIKIRI TSONGO, Cours d'Economie d'environnement, L2 Faculté des Sciences Economiques (Options Economie rurale et Economie de développement), UCG Butembo, 2010-2011, p.6.

    * 26 Loi N° 007/2002 du 11 Juillet 2002 portant Code Minier, en son titre premier, chapitre premier, article premier.

    * 27 HOCHLEITNER R., Les minéraux, Ed. Nathan, Paris, 1994, p.14.

    * 28 Loi N° 007/2002 du 11 Juillet 2002 portant Code Minier, en son titre premier, chapitre premier, article premier.

    * 29 BANQUE MONDIALE, « Le travail des enfants en Afrique : problématique et défis », in www. worldbank. org/childlabor, Novembre 2001.

    * 30Code du travail, in Journal officiel, No spécial du 25 octobre 2002.

    * 31 Rapport de l'Unicef sur la situation des enfants dans le monde en 1997.

    * 32 OIT, « Mines et carrières : l'autre calvaire des enfants au travail », in http://www.africk.com/Niger, consulté le 19 Mars 2011.

    * 33 Nous avons conçu ce paragraphe à partir de deux ouvrages principaux : BAUMOL W.J., Théorie économique et analyse opérationnelle, Ed. Dunod, Paris, 1963, pp. 281-285 (Traduit par P.PATREL); GOULD J.-P. & FERGUSON C.E., Théorie Microéconomique, Ed. Economica, Paris, 1982, pp. 528-533 (Traduit de l'américain par J.-M. LAPORTE & J.-M. SIX).

    * 34 Pour ce paragraphe, nous nous referons principalement de BERZOSA C. et al., Op. cit., pp. 59-60 et pp. 190-191.

    * 35 Cf. NDELA KUBOKOSO J., Les activités minières et la fiscalité (Cas de la République Démocratique du Congo), Thèse de doctorat en Droit, Administration et Secteur Public, Université Paris I Panthéon - Sorbonne, Paris, 2008.

    * 36 Pour plus de détails, lire Loi N° 007/2002 du 11 Juillet 2002 portant Code Minier, en ses articles 111, 112 et 114.

    * 37 Décret N°038/2003 du 26 mars 2003 portant Règlement minier.

    * 38 Décret N°038/2003 du 26 mars 2003 portant Règlement minier.

    * 39 PROVINCE ORIENTALE, Document de la Stratégie de Croissance et de Réduction de la Pauvreté, Kisangani, 2007, pp. 11-12.

    * 40 PROVINCE ORIENTALE, Op.cit., p. 13.

    * 41 BABOYA ILUNGA L., Le territoire de Wamba, inédit, Kinshasa, 2000, p.4.

    * 42 Selon les données de l'enquête MICS 2 (Enquête par Grappes à Indicateurs Multiples), dans cette contrée, le taux net de la scolarisation au primaire est de 49,5% contre 51,7% pour le pays.

    * 43 Une enquête menée par le District sanitaire de l'Ituri et couvrant 36 aires de santé en Ituri (donc y compris les aires de santé du territoire de Mambasa, voisin au territoire de Wamba) a montré que 65% des sources et puits utilisés par la population n'étaient point protégés.

    * 44 PROVINCE ORIENTALE, Op. cit, p.23.

    * 45 Pour constituer ce paragraphe, nous nous sommes référés aux documents suivants : I.C.C.N, Ce qu'est la Réserve de Faune à Okapis, Kinshasa, 2006, pp. 3-8; I.C.C.N, Protection du paysage forestier Ituri - Epulu - Aru et notion de site du patrimoine mondial, Kinshasa, 2006.

    * 46 Société pour la Conservation de la Nature.

    * 47 Fonds Mondial pour la Nature.

    * 48 Société Zoologique de Francfort.

    * 49 Arrêté ministériel n°045/CM/ECN/92 du 2 mai 1992 portant Création et délimitation d'une réserve naturelle dénommée « Réserve de Faune à Okapis », cité par I.C.C.N, Op. cit., pp. 3-8.

    * 50Arrêté ministériel n°020/CAB/MIN/ECN-EF/2006 du 20 mai 2006 portant agrément de la liste des espèces animales protégées en République Démocratique du Congo, cité par I.C.C.N, Op. cit., pp. 3-8.

    * 51 Un rapport de la RFO fait état de 27 carrières d'or identifiées et évacuées en 2006 de l'étendu de la RFO.

    * 52 Cette section s'inspire abondamment de la Loi N° 007/2002 du 11 Juillet 2002 portant Code Minier.

    * 53 Le Quotidien kinois Le potentiel, dans son Edition 3679 du samedi 18 mars 2006.

    * 54 LANCELIN M., « Quelques éléments de réflexion sur les problèmes d'épargne et de crédit », in Technique financière et développement dans l'esprit d'entreprise, Ed. AUPELF - UREF, John Libbey, Paris, 1993, p.4.

    * 55 HENAULT G. et M'RABET R. (sous la direction de), L'entrepreneuriat en Afrique francophone : culture, financement et développement, Ed. AUPELF - UREF, John Libbey Eurotext, Paris 1990, p. 299.

    * 56 VLASSENROOT K. et RAEYMAEKERS T., Op cit., pp. 132-133.

    * 57 CAMILLERI J.-L., La petite entreprise africaine. Mort ou résurrection ?, L'Harmattan, Paris, 1996, p. 209.

    * 58 FEEC WAMBA, Rapport annuel 2009, Wamba, 2010 (inédit).

    * 59 BARIAND et al., Les minéraux. Leurs gisements, leurs associations, Ed. Minéraux et fossiles, Meung-sur-Loire, 1972, p. 425.

    * 60 MULLER, Y., Mines, Tome II, Ed. Dunod, Paris, 1964, p. 140.

    * 61 Pour plus de renseignements, lire HUMAN RIGHTS WATCH, Le Fléau de l'or. Rapport, Kinshasa, 2005, cité par KABUYA MUYEBA A. (CENADEP), Op. cit., pp. 10-13.

    * 62 Les données relatives a ces calculs sont en annexe : ANNEXE 3 : DONNEES BRUTES SUR LES EXPLOITANTS ARTISANAUX DANS LES CARRIERES D'OR EN TERRITOIRES DE MAMBASA ET DE WAMBA.

    * 63 VLASSENROOT K. et RAEYMAEKERS T., Op. cit., p. 135.

    * 64 ICCN, Op. cit., p. 7.

    * 65 O.I.T., Les problèmes sociaux et de travail dans les petites exploitations minières. Rapport soumis aux fins de discussion à la Réunion tripartite sur les problèmes sociaux et de travail dans les petites exploitations minières, Bureau International du travail, Genève, 17-21 Mai 1999.

    * 66 PNUE, Rapport du Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) à l'occasion de la Journée mondiale de l'eau, Mars 2010, disponible sur http://www.humains-associes.org/blog/2010/04/27/choses-vues-040410/, consulté le 5 mars 2011.

    * 67 COASE, R., «The problem of social cost», in Journal of law and economics, 1960, Vol. 3, pp. 1-44, cité par J.-P. GOULD & C.E. FERGUSON, Op. cit., p. 531.

    * 68 Cf. GOULD J.-P. & FERGUSON C.E., Op. Cit., pp. 528-533

    * 69 LUTETE C., «  Le gouverneur Médard Autsaï déterminé à accompagner l'encadrement des exploitants miniers artisanaux en RDC », in http://www.digitalcongo.net/article/53570##, Kinshasa, 12/09/2008, consulté le 20 mars 2011.

    * 70 Cette section s'inspire du document du PNUE, Document d'orientation : Elaboration d'un plan stratégique national pour l'exploitation minière artisanale et à petite échelle de l'or, 7 mai 2009.






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