Université Paris X Nanterre

Rapport de recherche
PRESERVER LA COMPETITIVITE DU FOOTBALL
FRANÇAIS FACE A UNE CONCURRENCE EUROPEENNE ACCRUE
|
Alexandre Wais
Dess Juriste européen 1
Année universitaire 2004/2005
Je tiens à remercier Maître Eric Bolze pour
m'avoir permis de poursuivre la rédaction de ce rapport de recherche
pendant la durée de mon stage. Je le remercie aussi pour m'avoir
accueilli dans son cabinet et impliqué très vite dans des
dossiers complexes à dimension internationale. Grâce à
cette expérience, j'ai pu entrer pleinement dans la vie d'un cabinet
d'affaires et découvrir les nombreux aspects du métier d'avocat
conseil.
Je remercie également l'équipe du cabinet qui
m'a encadré pendant toute la durée de mon stage, à savoir
Sylvaine Guillonneau pour sa disponibilité, Hélène Perron
pour sa patience et Yann Martin Lavigne pour son implication et ses
conseils.
Sommaire
Remerciements 2
Introduction 4
I / L'application du droit communautaire au football
conduit au développement économique des clubs français
6
1. La création d'un football de clubs
à l'échelle européenne 7
1.1. L'arrêt Bosman renforce la concurrence entre
les clubs européens 7
1.2 Le football français en danger 13
2. La révolution économique des clubs
français 21
2.1. La modernisation de la structure juridique des clubs
sportifs professionnels 21
2.2. La prise en compte des attentes des clubs 34
II / Le football français en passe de devenir un
modèle dans un marché
en pleine mutation 46
1. Une santé financière bientôt
retrouvée 47
1.1. Les instances du football participent au redressement
financier des clubs 47
1.2. L'aménagement de la fiscalité favorise la
compétitivité des clubs 62
2. Un nouveau cadre européen pour une
concurrence loyale 74
2.1. L'UEFA organise un contrôle inspiré du
modèle français 74
2.2. Les débats autour du modèle économique
européen 79
Index 82
Bibliographie 83
Introduction
« La réalité n'est pas simple. Il est
naïf de croire qu'une entreprise peut définir sa stratégie
en tenant compte simplement de la concurrence. Elle doit intégrer la
complexité de son environnement, l'avantage ou le handicap
concurrentiel du pays dans lequel elle se trouve. » 1
Cette citation que l'on doit à un Professeur de
stratégie économique et marketing de l'Université de
Harvard rend très bien compte des difficultés qui ont
été rencontrées par les clubs français au cours des
dix dernières années et plus particulièrement depuis
l'arrêt Bosman. Dans un secteur devenu hyper concurrentiel, ils n'ont
d'abord pas su trouver leur place à cause des nombreux handicaps qui
pesaient sur leur compétitivité.
Face à cet échec, le législateur s'est
vite aperçu que « les incidences tant financières que
sportives du renouvellement de l'environnement du sport professionnel ne
pouvaient être ignorées sans porter atteinte à la
compétitivité des clubs sportifs français et à la
spécificité du droit applicable en France aux activités
physiques et sportives, basée sur la solidarité entre sport
amateur et professionnel ».2 Dès lors, le football
professionnel est devenu l'objet de toutes les attentions des parlementaires et
la réaction de l'Etat s'est faite aussi rapidement qu'elle paraissait
correspondre aux attentes des clubs.
Mais dans le même temps, l'absence de régulateur
au niveau européen a fomenté le développement d'une
concurrence sauvage profitant aux seuls clubs capables de surenchérir
dans une véritable « course aux armements ».
L'enjeu a alors pris le pas sur le jeu.
La situation financière des clubs français est
devenue inquiétante au même titre que celle de l'ensemble du
football européen. Pourtant, alors que les instances du football
français sont intervenues pour stopper l'hémorragie, la situation
s'est aggravée dans de nombreux pays, remettant en cause le mode de
fonctionnement d'un secteur économique basé sur le maintien d'un
équilibre entre ses divers protagonistes.
1 Porter, Michael E. est célèbre pour
ses études sur la façon dont une entreprise ou un territoire
géographique peut obtenir un avantage concurrentiel en accumulant le
maximum de moyens renforçant son coeur de compétences.
2 Rapport de la commission des Affaires culturelles
sur la proposition de loi, portant diverses dispositions relatives au droit du
sport, annexe du PV de la séance du 17 novembre 2004
Conscientes des risques qui pesaient sur cette industrie
naissante, les instances européennes ont décidé d'assumer
pleinement leur rôle en mettant en place un nouveau système de
contrôle des clubs, calqué sur le modèle français
dont le championnat était le plus proche de l'équilibre financier
en 2005 grâce à la volonté de l'ensemble des acteurs
politiques et institutionnels de promouvoir la pratique du sport en France.
En quoi l'action menée à la suite de
l'arrêt Bosman à laquelle ont pris part le Gouvernement, la
Fédération et la Ligue a-t-elle permis de préserver la
compétitivité des clubs de football professionnel français
sur long terme ?
En étroite collaboration avec les clubs, les
parlementaires ont tenté de cerner les enjeux liés au football
professionnel pour améliorer la compétitivité des clubs
dans un environnement transformé après que la Cour de Justice des
Communautés Européennes ait décidé d'appliquer au
football les règles de droit communautaire relatives à la
liberté de circulation des personnes ( I ). Parallèlement, les
instances du football ont rempli leur mission permettant aux clubs de redresser
leur situation financière pour devenir un modèle de bonne gestion
( II ).
-I- L'application du droit communautaire au football conduit au
développement économique des clubs français
|
1. La création d'un football de clubs à l'échelle
européenne
|
Le développement économique initié dans
les années 80 du sport le plus populaire en Europe a
façonné la création d'un véritable produit, le
football, sur un marché qui s'étend à travers toute
l'Europe.
Si le législateur français a tardé
à mesurer l'ampleur du phénomène, la Cour de Justice des
Communautés Européennes (CJCE) s'est aperçue très
tôt que les règles de libre circulation au sein de l'espace
communautaire étaient applicables au sport, malgré ses
spécificités.
1.1. L'arrêt Bosman renforce la concurrence entre les
clubs européens
L'arrêt Bosman rendu le 15 décembre 1995 aurait
cependant pu être dévastateur pour le football français,
tant ceux-ci étaient pénalisés par rapport à leurs
concurrents.
1.1.1. Des clubs incapables de faire face à la
concurrence européenne a. Une double surcharge fiscale
> Les charges sociales élevées par rapport aux
autres pays européens
Selon le rapport Denis, en 2003, un joueur qui coûtait
100.000 euros par mois à un club anglais, espagnol ou italien, revenait
à 172.000 euros pour un club français à cause des charges
sociales supportées par ce club.3 Lors la saison 2004/2005,
les clubs français ont ainsi versé 130 millions d'euros au titre
des charges sociales, soit l'équivalent de 14% de leurs charges
comptables.4 Comme le faisait remarquer Frédéric
Thiriez, Président de la Ligue de Football Professionnelle (LFP), cet
écart empêche les clubs français de <<
s'aligner >> sur les salaires proposés par nos voisins
européens et de s'octroyer les services des joueurs les plus
talentueux.5
3 Rapport de Monsieur Jean-Pierre Denis, Inspecteur
des Finances, << certains aspects du sport professionnel en France
>>, novembre 2003.
4 << Comptes des clubs professionnels, saison
2004/2005 >>, DNCG.
5 Article du 12 mai 2004, Frédéric
Thiriez, « Le football français est le bon élève
de l'Europe >>, La Tribune.
> L'impôt sur le revenu peu incitatif pour les
joueurs
Comme le souligne le rapport Denis, il existait une double
surcharge fiscale sur les clubs français : d'abord à cause des
charges fiscales élevées, ensuite parce que la fiscalité
française des ménages est dissuasive pour les personnes les plus
fortunées, dont font partie les sportifs professionnels.
Sous réserve de l'application d'une convention
internationale entre le pays d'origine du joueur étranger et la France,
un joueur évoluant au sein d'un club français est
réputé avoir son domicile fiscal en France au regard de
l'Administration dès lors qu'il remplit au moins l'une des quatre
conditions suivantes: 6
- si son foyer familial est établi en France ;
- si son lieu de séjour principal est la France ;
- s'il exerce son activité professionnelle en France ;
- si le centre de ses intérêts économiques se
situe en France ;
En pratique, un joueur évoluant dans le championnat
français remplit au moins deux conditions : l'exercice d'une
activité professionnelle en France et l'habitation à titre
principal en France. Un joueur professionnel, même étranger, sera
donc toujours réputé avoir son domicile fiscal en France et
conformément à l'article 4-A du Code général des
impôts, il sera passible de l'impôt sur le revenu français
à raison de l'ensemble de ses revenus (même provenant de pays
étrangers).
En France, l'impôt sur le revenu est proportionnel, ce
qui signifie que le taux d'imposition dépend essentiellement du montant
des revenus perçus par le contribuable au cours de l'année. Le
barème varie ainsi entre 0% et 48,09% du revenu imposable (le seuil
maximal est atteint lorsque le revenu est supérieur à 47 932
euros).7 Or, le salaire d'un joueur de renommée
internationale se chiffre en millions d'Euros. A titre d'exemple, la majeure
partie des « galactiques » du Real Madrid touchaient en 2005
près de 6 millions d'Euros par an, somme qui pouvait être
doublée, voire triplée grâce aux primes et aux revenus
publicitaires (les gains annuels de Ronaldo étaient estimés
à 19,6 millions d'euros pour la même année).8
6 Article 4-B du Code général des
impôts
7 Attention : pour obtenir le revenu imposable, il est
nécessaire de diminuer le revenu perçu de diverses charges et
déductions puis de prendre en compte le quotient familial.
8 Estimation de France football, mardi 3 mai 2005.
Selon une étude publiée par INEUM Consulting,
les salariés des clubs de football professionnel auraient versé
au total près de 138 millions d'euros au titre de l'impôt sur le
revenu (et 56 millions d'euros au titre des charges salariales).
Par ailleurs, s'il advenait qu'un joueur imposé
à l'impôt sur le revenu français dispose d'un patrimoine
supérieur à 720.000 euros, alors il serait aussi imposé au
titre de l'Impôt de Solidarité sur la Fortune (ISF) dont le taux
le plus élevé est de 1,80% pour la fraction supérieure
à 15.000.000 d'euros.
L'impôt sur le revenu est peu attractif pour des joueurs
aux carrières courtes (entre 6 à 10 ans) qui choisissent aussi,
à salaire égal, le pays dans lequel ils seront les plus
avantagés fiscalement.
b. Un statut juridique quasi-associatif
> Des ressources limitées
A cela s'ajoutaient des problèmes d'ordre strictement
financier : l'association était seule propriétaire de la marque
et le merchandising était interdit, ce qui empêchait les clubs de
diversifier leurs revenus.
Ils n'étaient pas propriétaires de leurs
installations sportives et ne pouvaient pas se faire garantir un emprunt ou un
cautionnement par une collectivité locale pour acquérir de telles
immobilisations.
> L'investissement découragé
Enfin, avant la loi de 1999, les clubs ne pouvaient ni
rémunérer les dirigeants, ni verser de dividendes lorsqu'ils
réalisaient des bénéfices, ce qui n'incitait guère
les investisseurs à s'engager dans cette aventure risquée et
coûteuse.
En outre, la cotation en Bourse était interdite, ce qui
limitait le nombre d'investisseurs potentiels.
1.1.2. La mise en concurrence provoque le départ des
meilleurs joueurs vers l'étranger
a. L'arrêt Bosman instaure un marché
unique
Jusqu'à l'arrêt Bosman, les clubs français
ne manquaient cependant pas de rivaliser au plus haut niveau car il existait
des barrières à la libre concurrence entre les clubs
européens, fondées sur un critère de nationalité.
Cela avait pour effet de forcer certains joueurs à rester dans leur pays
car les places dans les grands clubs étrangers étaient bien
souvent limitées. Par conséquent, les disparités entre les
différents championnats étaient atténuées, voire
annihilées.
L'Union des Associations Européennes de Football (UEFA)
avait en effet adopté en 1990 la règle dite du << 3 + 2
» qui permettait aux fédérations de limiter sur la
feuille de matchs le nombre de joueurs ressortissants d'autres Etats membres
à 3 et à 2 le nombre de joueurs ayant joué dans le pays en
question pendant une période ininterrompue de 5 ans (dont 3 dans le
secteur des juniors).9
La Cour de Justice des Communautés Européennes a
condamné cette clause de nationalité sur la base de l'article
39 du Traité qui prévoit que << la libre circulation
des travailleurs est assurée à l'intérieur de la
Communauté », ce qui << implique l'abolition de
toute
discrimination, fondée sur la nationalité entre
les travailleurs des États membres, en ce quiconcerne
l'emploi, la rémunération et les autres conditions de travail
». De fait, une équipe pouvait désormais jouer avec 11
joueurs étrangers ressortissants de l'Union européenne.
Par suite, cette jurisprudence a été élargie
aux pays ayant signé avec l'Union européenne un accord de
partenariat prévoyant une égalité de traitement entre les
travailleurs.
La porte fut ouverte par le célèbre arrêt
Malaja du Conseil d'Etat rendu en décembre 2002, immédiatement
suivi par l'arrêt Kolpak de la CJCE (mai 2003), lequel fut
confirmé par l'arrêt Simutenkov du 12 avril 2005.10
Depuis ces arrêts, les ressortissants d'un pays non inclus dans l'Union
européenne ayant un accord de partenariat avec l'Union (instituant une
égalité de traitement des travailleurs) peuvent circuler
librement au sein des pays de l'Union européenne sans qu'une
Fédération puisse limiter leur présence au sein d'une
équipe ou sur le terrain.
9 Louis Frédéric Doyer, <<
l'Union Européenne et le sport, l'arrêt Bosman »
10
http://www.juristeeuropeen.com/,
<< Les arrêts de la CJCE en droit du sport », du 5
mai 2005.
A l'origine, cela ne concernait que 24 pays. Puis, avec
l'accord de Cotonou entre l'Union et 77 pays (d'Afrique, des Caraïbes et
du Pacifique) entré en vigueur en avril 2003, le champ de
coopération s'est accentué pour sétendre à une
centaine de pays.
Les meilleurs joueurs français étaient
désormais libres (ou presque) de jouer où bon leur semblait,
même s'il est vrai que la tendance était plutôt au
départ vers certains grands clubs italiens, anglais ou espagnols. Ainsi,
entre 1995 et 2005, le nombre de joueurs étrangers est-il passé
de 14 à 31% dans le championnat italien, de 20 à 28% en Espagne
et de 34 à 56% en Angleterre.11
b. La concurrence profite à certains grands clubs
européens
> Certains pays avaient déjà
préparé les clubs à une mise en concurrence
En outre, plusieurs études comparatives font
apparaître que nos voisins européens ont très vite permis
à leurs clubs d'opter pour des structures juridiques commerciales
adéquates :
- au Royaume-Uni, le statut de
société de droit commun est coutumièrement admis de longue
date12 et Manchester United était côté depuis
199113, tout comme une vingtaine d'autres clubs de football. Par
ailleurs, << les clubs sont propriétaires de leurs
installations et réalisent aussi des opérations
financières et immobilières qui ne sont pas toujours en relation
avec la pratique sportive », ce qui leur a permis d'acquérir
de << l'expérience et une grande efficacité dans la
gestion économique de leurs structures. »14
- en Espagne, les clubs de football
professionnel doivent même se constituer en société anonyme
sportive (sociedad anonima deportiva) depuis la loi n° 10/1990 du
15 octobre 1990 complétée par le décret royal n°
1084/91 modifié en 1996. Il existe cependant des restrictions quant aux
prises de participation dans ces sociétés et à la
11 << Pour un contrôle de gestion des clubs au
niveau européen », juin 2005, LFP.
12 « Quels arbitrages pour le football professionnel
? Les problèmes liés au développement économique du
football professionnel », de Monsieur Yves Collin, fait au nom de la
délégation du Sénat pour la planification,
déposé le 8 juin 2004.
13... jusqu'à son retrait le 22 juin 2005 par
son nouveau propriétaire Malcom Glazer.
14 << Les aspects juridiques de la gestion
économique des clubs sportifs professionnels : l'adoption d'une nouvelle
loi », de Gérard AUNEAU, La semaine juridique Edition
Générale n° 13, 29 mars 2000, I 216.
distribution de dividendes qui ne peut intervenir que si les
réserves représentent au moins la moitié des
dépenses.15
- en Italie, il est aussi nécessaire
de constituer une société anonyme (società per
azioni) ou une société à responsabilité
limitée (società a responsabilità limitata)
depuis la loi du 23 mars 1981 pour pouvoir contracter avec des sportifs
professionnels. En outre, une loi de 1996 leur a permis de poursuivre des
objectifs lucratifs à condition que 10% des bénéfices au
moins soient alloués aux écoles de formation.
Par contre, l'Allemagne et la Belgique sont d'abord
restées attachées à la structure associative avant que ne
soit offert aux clubs à la fin des années 90 la
possibilité de créer une société de capitaux pour
la gestion du pôle professionnel.
> Les facteurs qui ont aggravé le fossé
séparant les clubs français de leurs voisins
Parallèlement à la mise en place de la libre
circulation des sportifs, deux autres facteurs sont venus intensifier la
concurrence entre les clubs : l'explosion des recettes des clubs et la
modification du format des Coupes européennes en 1996.
Comme le fait remarquer la Ligue de Football Professionnel
(LFP) dans son rapport de juin 2005 préconisant la mise en place d'un
organe de contrôle des comptes des clubs à l'échelle
européenne, la croissance du marché du football a
progressé très rapidement au cours des dix dernières
années. Cependant, tous les clubs ne sont pas égaux devant cette
augmentation des recettes.
Premièrement à cause du système de
répartition des droits de retransmission des évènements
sportifs qui n'est pas le même dans chaque pays : à titre
d'exemple, les droits sont négociés individuellement en
Angleterre et en Espagne, ce qui profite aux grands clubs, alors qu'en France,
le boni des droits télévisés est négocié par
la LFP au nom de l'ensemble des clubs français et est ensuite
réparti entre tous (voir le chapitre sur la LFP). A cela s'ajoute le
fait que certains clubs ont pu se développer commercialement en
disposant de leur marque alors que cela n'était pas possible en France
avant 2003.
15 Idem.
Ensuite, du fait de la modification des Coupes d'Europe : la
mise en place de la Ligue des Champions qui réunit chaque saison les
meilleures équipes européennes a ajouté un nouveau
championnat prestigieux et lucratif. Les meilleurs sont donc les mieux
récompensés. Or, les vainqueurs sont bien souvent les plus riches
car ils sont seuls à même d'attirer, de fidéliser et
d'intégrer sur long terme les joueurs les plus recherchés.
Du fait d'un départ raté, les clubs
français se sont donc retrouvés en bout de file et n'ont pas
été à même de résister à la
concurrence. Alors que les revenus liés aux résultats sportifs
des clubs espagnols en Champions League entre 1997 et 2004 approchent les 200
millions, que ceux des clubs italiens, anglais et allemands sont
évalués à 120 millions, les clubs français n'ont
récolté que 56 millions, soit 15 de plus seulement que les clubs
portugais.16
Et les meilleurs joueurs français en ont profité
pour aller se distraire ailleurs... Selon Monsieur Humbert, rapporteur de la
commission des affaires culturelles après du Sénat, près
de 280 joueurs français évoluaient à l'étranger en
2004.17
1.2 Le football français en danger
1.2.1. Le championnat français moins attractif
a. Les spectateurs se désintéressent du
championnat français
> Moins de stars
Un championnat qui se vide de ses meilleurs
éléments et qui n'en attire pas d'autres pour équilibrer
la balance, c'est un championnat qui perd de son intérêt, en
particulier pour les spectateurs. C'est effectivement ce qui a
été constaté par un sondage BVA/Louis Harris publié
dans l'Equipe en février 2003 : les spectateurs se seraient
désintéressés des diverses compétitions
françaises au profit des championnats étrangers dans lesquels
évoluent les « frenchies », c'est-à-dire des
clubs presque assurés de disputer chaque année la Ligue des
champions comme Arsenal, le Real Madrid, la Juventus et maintenant Chelsea.
16 « Pour un contrôle de gestion des clubs au
niveau européen », juin 2005, LFP.
17 « Compte rendu analytique officiel de la
séance du 24 novembre 2004 »,
www.sénat.fr.
Premièrement, ce désintéressement serait
dû à 89% au départ annuel des meilleurs joueurs vers
l'étranger, non compensé par l'arrivée de joueurs de renom
: l'absence de stars, ces joueurs dont le public attend beaucoup et dont il est
rarement déçu, pèse sur l'activité des clubs.
> Des clubs moins performants en Coupe d'Europe
Cet exode des talents se manifeste aussi forcément par
une baisse en termes de qualité technique et rend les
imprécisions plus fréquentes, au grand dame du spectacle mais
aussi des performances face à des rivaux mieux lotis. Vincent Couvelaere
fait aussi remarquer que l'absence de hiérarchie est une autre faiblesse
du championnat français : << la présence
régulière de locomotives en tête du championnat est
nécessaire pour renforcer la compétitivité des clubs
français à l'échelle européenne.
»18 L'obtention en avril 2006 d'un cinquième titre de
champion pour l'OL va peut-être changer la donne à cet
égard...
Enfin, la difficulté à se hisser au plus haut
niveau peut créer un cercle vicieux : en fonction d'un classement
établi chaque année par l'UEFA selon la performance des clubs
d'un même Etat dans l'une des deux coupes d'Europe, celle-ci attribue un
certain nombre de points à chaque pays. Selon les résultats,
chaque pays verra un nombre plus ou moins élevé de clubs
qualifiés pour les coupes d'Europe. Au 26 mai 2005, la France occupait
la 4ème place de ce classement, ce qui donnait 2 places
directement qualificatives pour la Ligue des champions et une place pour
disputer le tour préliminaire de la même
compétition.19
Or moins de Coupes européennes, c'est moins de passion,
moins de rêve... alors le public se désintéresse. Il se
rend moins au stade (15% du budget), ne regarde plus les matches retransmis
à la télévision (50%), achète moins de produits
dérivés (10%).20
18 « Les stratégies de marque des clubs sportifs
professionnels, étude de cas du football français », de
Vincent Couvelaere, 2003.
19 Source UEFA (site officiel).
20 << Comptes des clubs professionnels, saison
2003/2004 », DNCG.
Le championnat français peine à attirer les
talents
Fort heureusement, il ne faut pas croire que seule la
rémunération intéresse les joueurs... Pour qu'un club
attire de grands joueurs, il doit à la fois disputer
régulièrement une Coupe d'Europe mais aussi être à
même de la gagner, ce qui semble lié notamment au niveau du
championnat.
Par conséquent, si un championnat peine à
attirer d'autres prodiges, alors ce championnat pourra se résumer
à n'être qu'un « tremplin »,
c'est-à-dire un moyen de se faire connaître (grâce à
la télévision notamment) par d'autres clubs plus «
huppés » qui pourront lui permettre d'atteindre son
objectif.
Bien sûr, cela reste une généralité
et certains joueurs tombent parfois sous le charme d'une ville, d'un club,
comme ce fut le cas pour Didier Drogba avec l'Olympique de Marseille, club
auquel il se disait profondément attaché mais qu'il a du se
résoudre à quitter du fait d'une offre mirobolante de Chelsea,
à laquelle ne pouvait refuser... l'Olympique de
Marseille21.
Les investissements sont plus risqués
Enfin, un championnat sur le déclin attirera moins les
sponsors (20% du budget des clubs) et les investisseurs (sauf mesures
incitatives). La rentabilité attendue sera certainement plus faible et
les retombées liées à l'image d'un club à la
dérive pourraient même lui porter préjudice.
Le départ des meilleurs joueurs évoluant en France
couplé à un attrait diminué emporterait par ailleurs des
conséquences néfastes pour le football français dans son
ensemble.
1.2.2. Le football français menacé dans son
ensemble
a. Une diminution des ressources des clubs
français
Les comptes de résultat cumulés des clubs de
Ligue 1 depuis 1999 font apparaître que leur budget est
essentiellement basé sur les produits issus directement des recettes
nées lors des
21 L'indemnité de transfert versée
à l'Olympique de Marseille s'élevait à 38 millions
d'euros.
matchs de football : 65% de leurs ressources viennent en effet de
la cession des droits télévisés ainsi que des recettes
guichet.22
Depuis la saison 1999/2000, les droits
télévisés perçus par les clubs de Ligue 1
représentent près de 50% de leur budget. Ces droits
télévisés, négociés pour une période
de trois ans au nom de l'ensemble des clubs, tendent à prendre une place
prépondérante dans le total des recettes aux côtés
des recettes guichets dont la part dans les produits stagne autour de 15%.
Corrélativement, le poste publicité / sponsors intimement
lié à l'audience représente 20% du budget des clubs alors
que les recettes marketings atteignent à peine 9%.
Les clubs de football professionnels français sont
dépendants de l'intérêt procuré par le championnat
français.
b. La formation des jeunes joueurs professionnels
dépend des clubs
La mauvaise santé sportive et économique des
clubs français risque de porter atteinte à la formation des
futurs professionnels. En effet, la formation dépend des clubs
professionnels : selon l'article 101 de la charte du football 2004/2005, un
club ne peut être titulaire d'un centre de formation (de joueurs
professionnels) que s'il participe au Championnat de football professionnel de
Ligue 1 ou depuis au moins trois saisons consécutives au Championnat de
football professionnel de Ligue 2.
Ce statut de club formateur, visé par l'article 15-4 de
la loi du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la
promotion des activités physiques et sportives est reconnu à
condition de respecter certaines obligations, dont une aide à
l'insertion scolaire ou professionnelle à l'issue de la période
de formation. L'obtention de ce label permet l'application de certaines normes
visant à encadrer la formation du jeune joueur en imposant des
obligations à la charge du club (scolarité,
rémunération...) mais aussi à protéger le club
formateur.
L'article 102 précise de quelle protection il peut s'agir
en prévoyant que lorsqu'un club de Ligue 1 qui ne dispose pas d'un
centre de formation, il perdra :
- la possibilité d'user des contrats spéciaux
prévus par la Charte (aspirants, stagiaires, élite) et
protecteurs pour les clubs ;
22 « Comptes des clubs professionnels, saison
2004/2005 », DNCG.
- le bénéfice du principe d'obligation pour le
joueur de football de signer le premier contrat professionnel dans son club
formateur (article 259 de la charte) ;
- la perte des mesures législatives inscrites dans la
loi sur le sport du 28 décembre 1999, modifiant celle du 16 juillet
1984, au sujet de la convention de formation, de la garantie de l'obligation du
premier contrat professionnel et de la possibilité de percevoir
légalement des subventions pour la formation.
Dans le système français actuel, la formation
tient une place prépondérante ; elle permet aux clubs de
s'assurer qu'ils disposeront d'une relève de qualité,
attachée au club et parfois même constitutive d'une plus-value.
Par exemple, lors de la saison 2004/2005, 18 joueurs de Ligue 2 ont
été transférés en Ligue 1 ou à
l'étranger et 64 joueurs de Ligue 1 ont quitté leur club pour un
autre club de Ligue 1 - 42 -ou pour un club étranger - 22 -).
Cela démontre le rôle essentiel qui est
joué par les clubs de football professionnels en matière de
formation des futurs joueurs professionnels. Or, la formation des jeunes
joueurs français est aujourd'hui reconnue comme une valeur sûre
à travers le monde entier et contribue à un rayonnement sportif
de la France à l'étranger. Il suffit à cet égard de
prendre l'exemple des nombreux joueurs de l'équipe de France qui sont
régulièrement titulaires au sein des meilleures équipes
européennes ; pour ne citer qu'eux :
- Angleterre : Thierry Henri et Robert
Pires (Arsenal), William Gallas et Claude Makelele (Chelsea),
Mickaël Sylvestre et Louis Saha (Manchester United),
Jean-Alain Boumsong (Newcastle United).
- Espagne: Zinédine Zidane (Real
Madrid), Ludovic Giuly (FC Barcelone).
- Italie: Lilian Thuram, David Trezeguet,
Patrick Viera et Jonathan Zebina (Juventus de Turin),
Jérémy Bréchet (Inter Milan), Vincent
Candela (AS Rome),
- Allemagne : Willy Sagnol (Bayern
Munich), Johan Micoud (Werder Brême).23
Préserver la compétititivité des clubs
français, c'est donc aussi assurer la pérennité de la
formation française, donc une relève pour les clubs
français et même peut-être de l'équipe de France.
23 www.bleusdefrance.com/
c. Le football amateur financé en partie grâce
au football professionnel
> Le contrat de progrès entre la FFF et la LFP
L'article 8 du protocole d'accord financier signé entre
la Fédération Française de Football (FFF) et la Ligue de
Football professionnelle (LFP) en juin 2002 pour une durée de cinq (5)
ans prévoit un « contrat de progrès en faveur du
football amateur >> selon lequel la LFP s'engage à verser
chaque année au Fonds d'Aide à l'Investissement (FAI) une somme
destinée aux clubs amateurs. Le montant de cette aide a nettement
évolué depuis 2002 puisqu'il est passé successivement de 9
à 10, puis 15 et enfin 30 millions d'euros par an pour les saisons
2005/2006 à 2007/2008, soit 90 millions d'euros sur trois ans! Cette
réévaluation spectaculaire a été
décidée en juillet 2005 lors de l'Assemblée
générale de la LFP grâce à l'augmentation des droits
télévisés (Canal + devra verser à la LFP 600
millions d'euros par an pendant les saisons 2005/2006 à 2007/2008 que
celle-ci reversera ensuite entre les clubs de Ligue 1 et de Ligue 2), sans
laquelle la LFP n'aurait pas pu se permettre de telles
largesses.24
L'article 10 du protocole poursuit qu'en cas de fluctuation
significative des ressources du football, l'ensemble de l'accord pris entre la
FFF et la LFP pourrait être révisé... Cela pourrait aboutir
à diminuer la somme allouée en faveur du football amateur, ainsi
à ralentir la mise en place d'installations neuves et modernes, donc
à rendre plus difficile le travail des éducateurs avec les jeunes
enfants et peut-être à baisser le niveau de formation...
> La « taxe Buffet >>
Le Fonds National de Développement du Sport (FNDS)
créé pour aider au développement du sport en
général (pas seulement du football), était financé
en 2004 à hauteur de 21,69 millions d'euros grâce à la
contribution des clubs sur la cession des droits reçus en contrepartie
de la diffusion télévisuelle de leurs rencontres (5%), soit 10%
des recettes de ce fond. La récente augmentation des droits
télévisés va accroître la valeur de ce poste et le
faire passer à 30 millions d'euros.
Le poids de cette solidarité avec le sport amateur doit
cependant être atténué dans la mesure où l'Etat
joue un rôle financier majeur : les moyens alloués au profit des
actions en faveur de
24 « Aide financière au football amateur
», L'Equipe.fr du 2 juillet 2005.
la jeunesse, de la pratique du sport et de la vie associative
étaient budgétisés à hauteur de 797,18 millions
d'euros dans le projet de loi de finances pour 2005.25 Mais il n'en
résulte pas moins que les clubs de football professionnels
français contribuent au développement du sport amateur en France.
Une baisse de leurs revenus engendrerait donc une baisse des ressources du
sport amateur français.
d. Des répercussions possibles sur l'emploi
> Le sport est devenu un véritable enjeu
économique
Comme le soulignait un rapport du Ministère des sports
en septembre 2002, « le sport est devenu un véritable enjeu
économique » avec une dépense sportive globale
évaluée en 2000 à 24,6 milliards d'euros, soit 1,7% du
produit intérieur brut. 26
Cependant, les ménages ne participent qu'à
hauteur de la moitié de ces dépenses : l'Etat et les
collectivités locales financent majoritairement les équipements
mis à disposition des amateurs comme des professionnels ainsi que le
personnel encadrant les activités sportives, alors que les
dépenses des ménages (12 milliards d'Euros) s'orientent vers
l'acquisition de biens ou services sportifs.
Selon le même rapport, 350.000 emplois étaient ainsi
liés au sport en 2000.
Mais une question se pose : en quoi un manque de
compétitivité des clubs de football professionnel pourrait-il
affecter l'emploi ?
Il faut en effet rester prudent sur les conséquences
sur l'emploi d'une crise du football professionnel. On imagine mal le
chômage augmenter parce que les clubs français sont sans cesse
éliminés au premier tour de Coupe d'Europe... Afin de mieux
évaluer les risques qui pèseraient sur l'économie du
sport, et du football en particulier, il convient de distinguer selon que les
emplois sont directement ou indirectement liés au football
professionnel.
25 Avis sur le projet de loi de finances 2005
présenté par la Commission des affaires culturelles,
Sénat, session ordinaire 2004/2005, annexe au procès verbal de la
séance du 25 novembre 2004
26 « Le poids économique du sport en 2000 »,
bulletin de statistiques et d'études, n° 02-03, Septembre
2002, sous l'égide du Ministère des Sports.
> Le secteur des services directement concerné
Les activités qui trouvent leur source dans le football
professionnel sont essentiellement des services : il s'agit des journaux
sportifs, des chaînes thématiques << pay per view >>,
des chaînes de télévision spécialisées
(Eurosport, l'Equipe TV...), des sites Internet sportifs, et grâce aux
évolutions technologiques récentes, de nombreux services
accessibles sur téléphone portable. Une baisse de l'attrait du
football français tendrait à pénaliser ces
activités.
> Les effets par ricochet
Indirectement, les conséquences pourraient être de
deux ordres :
- D'abord, cela pourrait nuire au nombre de licenciés
effectuant un sport amateur. Il a en effet été constaté
d'une manière générale qu'après de grandes
victoires, le nombre de licenciés dans le sport concerné
augmentait considérablement (Cf. << l' effet Coupe du
monde >> en 1998), cela étant sûrement très
lié au phénomène de médiatisation. A
contrario, en l'absence de résultats des clubs français, il
ne parait pas impossible que le nombre de jeunes footballeurs s'amenuise au fil
du temps, et que parallèlement diminuent les investissements publics
(équipement, encadrement, subventions...).
- Par ailleurs, une désaffection pour le football
pourrait aussi nuire à l'industrie de production et de distribution
d'articles de sport, soit parce moins de vêtements ou de chaussures
seraient vendus aux licenciés pour qu'ils pratiquent leur sport, soit
parce que les sponsors des clubs bénéficieraient d'une couverture
moins grande (même s'il faut rester conscient que le football n'est pas
le seul moyen pour les marques de toucher leur cible).
Ainsi, même s'il peut paraître hasardeux d'avancer
des chiffres, il est certain qu'un manque de compétitivité des
clubs de football français nuirait à l'industrie de production et
de distribution de biens et de services liés au football.
2. La révolution économique des clubs français
|
Face aux conséquences préjudiciables sur le
football amateur, sur le sport en général, voire sur l'emploi, le
législateur a entrepris de réformer le statut juridique des clubs
sportifs professionnels prévu par la loi de 1984.
2.1. La modernisation de la structure juridique des clubs
sportifs professionnels
2.1.1. Le perfectionnement d'un système fondé
sur des valeurs sportives
a. Le maintien de la dualité association /
société sportive
> L'obligation pour l'association de créer une
société dès le dépassement de seuils
Initialement, les clubs étaient organisés sous
forme d'association.
Puis, les années 80 ont vu le football prendre un
nouvel essor, notamment grâce à la diffusion
télévisée des matchs. Cette popularité grandissante
a permis un développement considérable des ressources des clubs
(même si elles étaient limitées par rapport à nos
voisins) mais a aussi provoqué de nombreux scandales financiers. Le
législateur est donc intervenu très tôt en imposant aux
clubs, dès le dépassement de certains seuils, la création
d'une société sportive à laquelle participe l'association
afin de s'assurer que les clubs soient gérés de manière
transparente.
Dès la publication de la loi du 16 juillet 1984, toute
association sportive dont les recettes et les dépenses
dépassaient respectivement 375 000 euros (2,5 millions de francs
à l'époque) devait constituer une société
commerciale pour la gestion de ses activités relatives à
l'organisation de manifestations sportives payantes.
Des exceptions furent toutefois admises par le
législateur, en particulier à cause du manque de «
popularité » des sociétés qu'il était
alors possible de constituer. La loi du 7 décembre 1987 permit aux
associations de ne pas créer de société à condition
qu'elles s'engagent à renforcer leur contrôle interne. Cette
possibilité fut toutefois restreinte par la loi du 13 juillet 1992
aux
associations ne présentant pas de pertes pendant deux
exercices successifs.27 Puis cette exception fut abandonnée
lorsque le législateur décida de supprimer l'association à
statuts renforcés en 1999.
Cette même année, l'Etat a entrepris de
réformer les anciens seuils par l'instauration d'un système
alternatif préféré au mode cumulatif.28
Désormais, la constitution d'une société sportive est
obligatoire si le montant des recettes nées de l'organisation de
manifestations sportives dépasse 1 200 000 euros ou lorsque les
rémunérations versées aux joueurs sont supérieures
à 800 000 euros.
Concernant les méthodes de calcul, l'article
1er du décret du 24 avril 2002 prévoit qu'il convient
de prendre en compte la moyenne des recettes ou rémunérations
versées au cours des trois derniers exercices. L'article 2 du
décret précise que les recettes nées de l'organisation de
manifestations payantes doivent être entendues comme les recettes guichet
et publicitaires ainsi que la rémunération perçue en
contrepartie de la cession des droits télévisés. Enfin,
l'article 3 ajoute que les rémunérations perçues par les
sportifs professionnels doivent être diminuées des charges
sociales.
Lorsque l'un des seuils est dépassé, l'article
14 de la loi de 1984 modifié précise que l'association dispose
d'un délai d'un an pour constituer une société, à
défaut de quoi elle sera exclue de toute compétition
organisée par la fédération. 29
Dans la mesure où le salaire moyen d'un joueur de Ligue
1 est de 38 000 euros par mois, il suffit de trois joueurs (sans les primes)
pour dépasser les seuils. Or, une équipe disposant en
général d'un groupe de 20 à 30 joueurs... toutes les
équipes de Ligue 1 sont obligées de créer une
société commerciale à côté de
l'association.
> Les relations entre l'association et la
société sportive
La loi du 28 décembre 1999 est venue ajouter un
alinéa à l'article 11 de la loi de 1984 selon lequel <<
l'association sportive et la société qu'elle a
constituée définissent leurs relations par une convention
approuvée par leurs instances statutaires respectives ».
27
http://sports.aquitaine.fr/actualite
breve juridique.php, << Les dispositions relatives au sport
professionnel »
28 Loi 99-1124 du 28 décembre 1999
complétée par le décret n° 2002-608 du 24 avril 2002
(modifiant le décret n° 86-407 du 11 mars 1986).
29 Modification issue de l'article 22 de la loi
2001-624 du 17 juillet 2001.
Cette loi a été complétée par le
décret n° 2001-150 du 16 février 2001 qui précisait
quelles étaient les mentions qui devaient être contenues dans
cette convention : on y retrouvait notamment la répartition entre
secteur amateur et secteur professionnel (responsabilité, formation,
terrains, immeubles...), les conditions d'utilisation par la
société de la marque détenue par l'association, la
durée de la convention, l'impossibilité pour un dirigeant de
l'association de percevoir de rémunération de la part de la
société, ou encore l'inscription par l'association des joueurs
professionnels aux diverses compétitions...
Comme nous le constaterons par la suite, ce régime a
été modifié face à la demande des clubs d'obtenir
la propriété de leur marque et la possibilité de
délivrer le numéro d'affiliation de leurs
joueurs.30
b. Les anciennes sociétés ne correspondaient
plus aux réalités économiques
Plusieurs étapes ont jalonné l'évolution du
statut juridique des clubs sportifs :
- en 1975, une première
société sportive est créée : il s'agit de la
société d'économie mixte sportive locale
(SEMLS);31
- en 1984 / 1985, deux nouveaux types de
sociétés sportives apparaissent: la société anonyme
à objet sportif (SAOS) et l'entreprise unipersonnelle sportive à
responsabilité limitée (SEURL);32
- en 1999, le législateur met en place
une société sportive vouée à exercer une
activité sportive et commerciale : la société anonyme
sportive professionnelle (SASP).33
Ainsi, entre 1975 et 1985, le législateur a
créé trois types de sociétés différents pour
encadrer l'activité des clubs sportifs. Malheureusement, ces
sociétés se sont révélées incapables
d'attirer des investisseurs privés, en particulier à cause de la
présence obligatoire au-delà d'un certain seuil de l'association
et/ou d'une collectivité locale.
30 Loi n° 2003-708 du 1er août
2003 et décret n° 2004-550 du 14 juin 2004.
31 Loi « MAZEAUD » n° 75-988
du 29 octobre 1975, relative au développement de l'éducation
physique et du sport.
32 Loi du 16 juillet 1984 précité et loi
du 11 juillet 1985 relative à l'entreprise unipersonnelle à
responsabilité limitée et à l'exploitation agricole
à responsabilité limitée.
33 Loi du 28 décembre 1999.
> La société d'économie mixte sportive
locale (1975)
Créée en 1975 pour donner aux clubs sportifs
professionnels une structure plus adaptée que l'association, la
particularité de cette société anonyme tenait au fait que
la majorité de son capital (divisé en actions) devait être
détenue par l'association support seule ou conjointement avec une ou
plusieurs collectivités territoriales.34 Les capitaux
privés en étaient donc exclus, à moins d'être
sociétaire de l'association support.
Après avoir largement utilisé la SEMSL dans les
années 80,35 les clubs de première division l'ont
massivement délaissée pour opter dans les années 90 pour
la SAOS. Pour preuve, seul un club de Ligue 1 était encore
constitué sous la forme d'une SEMSL en 1999.36 Cela est
certainement dû à l'omniprésence des collectivités
locales dans la gestion du club. Le rapport Denis fait remarquer que <<
ce statut donnait aux collectivités locales un pouvoir d'orientation
considéré comme la contrepartie de leurs apports financiers au
sport professionnel ».
En revanche, la SEMSL a gardé le même rayonnement
en deuxième division au cours des années 90 avec une part quasi
constante de 40% parmi l'ensemble des sociétés de deuxième
division. Cela s'explique, selon C. Durand, << du fait de la
faiblesse des ressources ainsi que de l'absence d'investisseurs susceptibles
d'intervenir » car le marché y était plus
réduit, cela incitant les clubs à se tourner vers les pouvoirs
publics afin d'obtenir des aides de fonctionnement.37
Malgré tout, le législateur a
décidé de supprimer ce type de société en rendant
impossible sa création depuis 1999. Toutefois, le temps a
été laissé aux SEMSL existantes de changer de structure en
n'imposant aucun délai pour changer de forme.
> La société anonyme à objet sportif
(1984)
A l'instar de la SEMLS, la SAOS fonctionnait selon les normes
applicables aux sociétés anonymes sous certaines
réserves quant à la composition du capital : à l'origine,
l'association
34 Article 7 des statuts-types issus du décret
n° 86-408 du 11 mars 1986.
35 Rapport de Monsieur Jean-Pierre Denis, novembre
2003.
36 Source : LNF (ancienne dénomination de la
Ligue de football Professionnel).
37 « Soutien aux entreprises de spectacle sportif par
les collectivités locales : quelle liberté pour les élus ?
» de Christophe Durand, 2000.
support devait détenir au moins la moitié du
capital social et des droits de vote à l'assemblée
générale. Face aux demandes répétées des
clubs sportifs, ce seuil a cependant été abaissé à
un tiers en 1993.38
Cette société a alors connu un essor rapide : alors
que seul un club avait choisi cette forme en 1990, ils étaient 13 en
2000, soit 72% des clubs de division 1.39
Sans apporter toutefois les réponses aux demandes
émanant des clubs de football à l'époque, cette
société constituait << déjà un tournant
vers l'ouverture aux capitaux privés >>.40
> L'entreprise unipersonnelle sportive à
responsabilité limitée (1985)
Selon le rapport Denis, << ce régime convient
surtout aux groupements sportifs dont les besoins de financement sont des plus
limités >>. De même, selon le rapporteur de la loi
portant création de la SASP, << l'EUSRL paraît
destinée aux dirigeants d'associations qui souhaitent conserver un lien
de dépendance très étroit entre la société
commerciale et l'association et ne pas avoir de partenaires financiers pour
gérer leur activité personnelle >>.41
Cette forme juridique peut cependant correspondre à une
phase de transition pour un club amateur gravissant les étapes vers une
professionnalisation42 : son fonctionnement est en effet
calqué sur celui d'une EURL, dont l'associé unique est
obligatoirement l'association support.43
38 Article 7 des statuts types de la SAOS
imposés par décret n° 86-409 du 11 mars 1986 modifiés
par décret n° 93-1047 du 31 août 1993.
39 Source : LNF (ancienne dénomination de la
Ligue de Football Professionnel)
40
http://sports.aquitaine.fr/actualite
breve juridique.php, << Les dispositions relatives au sport
professionnel >>
41 rapport Beauchaud : JOAN 1998/1999, n° 1670,
p.14.
42 « Les aspects de la gestion économique des
clubs sportifs professionnels : l'adoption d'une nouvelle loi » de
Gérard Auneau in La semaine juridique Edition générale
n°13, 29 mars 2000, I 216.
43 Article 7 des statuts types de la EUSRL
imposés par le décret n°2001-149 du 16 février
2001.
2.1.2. Les clubs reconnus comme de véritables
entreprises
a. La SASP proche de la société anonyme
(1999)
La SASP est résolument la première
société sportive commerciale à avoir vu le jour. Outre
d'être régie selon les règles applicables aux
sociétés anonymes, elle résout surtout le problème
relationnel qui opposait ses aînées aux investisseurs
privés.
Parce que les intérêts en jeu vont au-delà
du simple aspect sportif, les clubs de football professionnels doivent
être gérés comme de véritables entreprises et non
plus comme de simples associations. Aux sociétés sportives
déjà existantes mais peu performantes, le législateur a
donc ajouté la société anonyme sportive professionnelle
(SASP), entité proche de la société anonyme.
> Un point commun : les statuts
Cela se traduit notamment par l'existence de statuts
très proches entre les deux sociétés : alors que le
législateur impose aux SA d'insérer dans les statuts certaines
mentions mais leur laisse toute liberté d'introduire d'autres
articles44, il existe dans le même temps un modèle de
statuts types de SASP qui ne peuvent en aucun cas être
modifiés.45
Les mentions communes sont les suivantes:
- la dénomination et le sigle de la société
;46 - la forme de la société ;47
- la durée de la société ;48
- l'objet social ;49
- le lieu du siège social ;50
- le montant du capital social ;51
44 Articles L.210-2 et L.225-14
C.com et l'article 55 du décret du 23
mars 1967.
45 Décret n° 2001-149 du 16 février
2001 relatif à l'article 11 de la loi du 16 juillet 1984
(modifiée par la loi du
28 décembre 1999).
46 Article L.210-2 (SA) et article 3 des statuts type
(SASP)
47 Idem
48 Article L.210-2 (SA) et article 5 du décret
de 2001 (SASP)
49 Article L.210-2 (SA) et article 2 du décret
de 2001 (SASP)
50 Article L.210-2 (SA) et article 4 du décret
de 2001 (SASP)
- la forme des actions ;52
- la description et l'évaluation des apports en nature et
en numéraire;53
- les restrictions à la libre cessibilité des
actions ;54
- la répartition du résultat et des pertes ;55
- et enfin, les stipulations relatives à la composition et
à l'organisation des organes sociaux.56
Par ailleurs, l'article 1er des statuts types de la
SASP prévoit explicitement qu'il s'agit d'une société
anonyme régie notamment par « les lois et règlements
relatifs aux sociétés anonymes ». Cela a pour
conséquence de soumettre la SASP à une organisation similaire
à celle de la SA ; un choix est donc laissé quant à la
possibilité d'adopter une SASP à directoire ou à conseil
d'administration.
> La SASP demeure une société sportive
Toutefois, la SASP se démarque de la société
anonyme sous certains aspects :
- l'association doit figurer parmi ses actionnaires ;57
- la SASP est également soumise à des les statuts
types ainsi qu'à la loi relative à l'organisation et à la
promotion des activités physiques et sportives ;58
- son siège social doit figurer en France ;59
- l'objet sportif est encadré : il est
précisé en effet que la SASP peut avoir pour activité la
<< gestion et animation d'activités donnant lieu à
l'organisation de manifestations payantes et à des versements de
rémunérations », ce qui lui permet << de
mener toutes actions en relation avec son objet et généralement
toutes opérations commerciales se rattachant directement à
l'objet social ».
- la SASP pourra aussi détenir des <<
participations dans toutes sociétés ou groupements
créés ou à créer, dont l'objet social se rapporte
à son objet social, par voie d'apports ou autrement ». 60
51 Article L.210-2 (SA) et article 6 du décret
de 2001 (SASP)
52 Article 55.2° du décret de 1967 (SA) et
article 7 des statuts type (SASP)
53 Article L.225-14 et article 55.4° du
décret de 1967 (SA) et article 7 des statuts type (SASP)
54 Article 55.3° du décret de 1967 (SA) et
article 9 du décret de 2001 (SASP)
55 Article 55.7° du décret de 1967 (SA) et
article 11 du décret de 2001 (SASP)
56 Article 55.6° du décret de 1967 (SA) et
article 12 et suivants du décret de 2001 (SASP)
57 Article 1er du décret de 2001.
58 Idem
59 Article 4 du décret de 2001.
60 Article 2 du décret de 2001.
Même si elle garde certaines spécificités
relatives à son objet, la SASP se rapproche sous de nombreux aspects de
la SA de droit commun. Voyons maintenant quels ont été les
apports de la SASP par rapport aux sociétés
précédentes.
b. les apports majeurs de la SASP
> Un statut plus attrayant pour les investisseurs
Selon l'article 1832 du Code civil, une «
société est instituée par deux ou plusieurs personnes
qui conviennent par un contrat d'affecter à une entreprise commune des
biens ou leur industrie en vue de partager le bénéfice ou de
profiter de l'économie qui pourra en résulter ».
En principe, lorsqu'une personne investit dans une entreprise,
elle le fait en vue d'en retirer un bénéfice ou une
économie. Or, avant la création de la SASP, le
bénéfice réalisé par une société
sportive « devait obligatoirement être affecté à
la constitution de réserves qui ne [pouvaient] donner lieu à
aucune distribution ».61 Cela s'inscrivait dans le cadre
d'une tradition qui assimilait le sport au secteur associatif, dans lequel la
gestion est désintéressée. Mais, dans le cadre du sport
professionnel, cela paralysait l'arrivée d'investisseurs car ceux-ci
étaient certains de ne jamais récupérer leur mise...sauf
peut-être par le moyen détourné des comptes courants
(l'actionnaire agit comme un banquier vis-à-vis de la
société en lui prêtant une somme d'argent qu'elle devra
ensuite lui rembourser).
Cette interdiction a été levée pour les
clubs choisissant de se constituer en SASP, ce qui constitue une avancée
majeure puisque l'investisseur est enfin reconnu. D'autant plus qu'au cours de
la saison 2004/2005, 60% des clubs de Ligue 1 réalisaient un
bénéfice.
Par ailleurs, le législateur a aussi reconnu pour la
première fois à une société sportive la
possibilité de rémunérer son dirigeant...62
Avant 1999, tout dirigeant devait être bénévole. Certes,
revêtir autant de responsabilités sans être payé est
honorable, mais cela n'allait pas dans le sens d'une gestion rigoureuse et
efficace, car nécessairement, le dirigeant devait cumuler cette fonction
avec une autre, rémunérée...63 Là
encore, la SASP introduit dans le monde du football professionnel une
rationalisation de la gestion des clubs visant à les rendre
61 Article 13, alinéa 3 de la loi du 16 juillet
1984.
62 Article 13, alinéa 2 de la loi du 16 juillet
1984 (sauf pour le gérant le EUSRL).
63 Notons toutefois une « exception de taille
» puisque Le Président de l'OL, Monsieur AULAS, cumule ses
fonctions de Président de club avec celles de dirigeant d'une
société cotée...
plus compétitifs ; ils doivent être
gérés comme de véritables entreprises pour subsister dans
un environnement européen ultra concurrentiel dominant
déjà le << foot business ».
> Le retour aux subventions publiques
C'est d'ailleurs à l'occasion de la loi du 28
décembre 1999 qui introduisait la SASP, que le législateur s'est
décidé à accorder de nouveau aux sociétés
sportives le droit d'obtenir des subventions de la part des
collectivités locales. En effet, après les nombreux
dérapages qui avaient eu lieu au début des années
9064, le législateur avait mis en place en 1994 un
système d'aides dégressives dans le temps qui devait
s'éteindre à la fin de l'année 1999.65 Mais,
Marie Georges Buffet a finalement obtenu que l'article 19-3 de la loi de 1984
soit à nouveau modifié. Dorénavant, les associations
sportives ou les sociétés qu'elles constituent peuvent recevoir
des subventions publiques à condition de disposer d'un centre de
formation de jeunes agréé par les pouvoirs publics, même
s'il existe désormais une limité fixée par décret
à 2,3 millions d'euros.
La Commission européenne a eu à se prononcer sur
ces subventions pour déterminer s'il s'agissait d'aides d'Etat au sens
du Traité. Dans une décision du 25 avril 2004, elle a
décidé de ne pas émettre d'objection car << les
autorités françaises veulent assurer la formation des jeunes pour
leur permettre d'atteindre le meilleur niveau sportif et concilier le
perfectionnement sportif avec une bonne insertion scolaire et
l'acquisition d'une capacitéd'insertion professionnelle
».
> Un fonctionnement comparable à celui d'une
entreprise
Bien sûr, insister sur la gestion ne doit pas faire
oublier le coeur d'activité des clubs de football professionnel,
à savoir constituer la meilleure équipe possible afin de
remporter un maximum de trophées.
Mais grâce à un fonctionnement simple, efficace
et transparent, la rapidité en matière de prise de
décision est favorisée. La SASP suit ce modèle : permettre
aux organes sociaux d'apprécier le bien fondé de certaines
demandes de la part des dirigeants et vérifier qu'elles
s'insèrent dans un projet à long terme cohérent, sans pour
autant immobiliser le fonctionnement du club.
64 Par exemple, les girondins de Bordeaux avaient
accumulé un déficit de 300 millions de francs en 1990.
65 Loi n°94-679 du 8 août 1994 et
décret du 27 janvier 1996 n° 96-71.
Le législateur de 1999 s'est basé sur le
modèle de société qui rencontrait à l'époque
le plus de succès pour les grandes entreprises : celui de la SA. Cette
société permet en effet de choisir entre deux modes
d'organisation selon le contrôle - plus ou moins restreint - qu'il
apparaît souhaitable d'exercer sur les dirigeants : on peut donc
créer une SASP à directoire ou à conseil d'administration,
selon les mêmes règles que la société anonyme (avec
quelques différences toutefois).
> La SASP à conseil d'administration offre plus de
souplesse
La SASP à conseil d'administration - système dit
« moniste » - est le plus souple car la direction de la
société est assurée par le conseil d'administration seul,
sous le contrôle indirect de l'assemblée des actionnaires. Cette
liberté laissée aux administrateurs s'explique par la seule
présence d'actionnaires en son sein, nommés de surcroît par
l'assemblée générale des actionnaires66 -
notons toutefois que les actionnaires peuvent prévoir dans les statuts
que les administrateurs devront être en possession d'un minimum
d'actions.67 Les actionnaires contrôlent ainsi directement la
gestion du club.
Les pouvoirs accordés au conseil d'administration sont
importants : en vertu de l'article A19 des statuts types, celui-ci «
est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toutes
circonstances au nom de la société et prendre toutes
décisions relatives à tous actes d'administration et de
disposition ».$
Toutefois, le conseil d'administration doit agir dans l'objet
social de la société et en dehors des pouvoirs
réservés à l'assemblée des actionnaires, ce qui
limite son champ d'action.68 Mais, contrairement à ce qui est
prévu pour la SA,69 les statuts types de la SASP n'indiquent
pas de sanction en cas de non respect de ces dispositions : l'acte peut-il
être annulé sur demande d'un actionnaire ou bien est-il opposable
à la société ? En l'absence d'interdiction expresse, il
convient de se référer à l'article L.225-35, alinéa
2
C.com, qui prévoit qu'un acte qui ne
relève pas de l'objet social, passé par la société
sans l'accord de l'assemblée des actionnaires, est réputé
engager la société sauf en cas de fraude de la part du tiers -
fraude dont la preuve est généralement difficile à
rapporter -.
66 Article L.225-18
C.com (SA) et article A 14 du décret
de 2001 (SASP).
67 Article L.225-25
C.com (SA) et article A 14 du décret
de 2001 (SASP).
68 Article L.225-35
C.com (SA) et article A 19 du décret
de 2001 (SASP).
69 Même article (SA)
Les pouvoirs du conseil d'administration sont donc
relativement importants dans la mesure où ses membres peuvent engager la
société. Une exception à l'opposabilité de ces
actes existe toutefois lorsqu'une caution, un aval ou une garantie sans avoir
été dûment autorisée par le conseil
d'administration.
Par ailleurs, la direction générale de la SASP
à conseil d'administration est assurée par le Président du
conseil d'administration ; c'est donc lui qui représente la
société à l'égard des tiers. Dans le cadre de cette
mission, il peut se faire assister par un ou plusieurs directeurs
généraux élus par le conseil d'administration, pour une
durée et des pouvoirs bien définis.70 Cette
délégation de pouvoirs rend la gestion du club moins
centralisée et plus flexible, d'autant qu'il n'est pas nécessaire
pour les directeurs généraux d'être actionnaires puisqu'ils
devront obtenir une autorisation préalable du conseil d'administration
pour engager la société.71
Enfin, on retrouve dans les statuts types diverses
dispositions relatives à une certaine transparence dans le
fonctionnement de la SASP. Cela vise en particulier les conventions
réglementées72, les conditions de
délibération du conseil d'administration73,
l'obligation de communiquer un compte rendu des délibérations du
conseil d'administration à l'association << support
»74 et la limite d'âge...75
La SASP à conseil d'administration se présente
donc comme un mode d'administration souple, dans la mesure où la gestion
courante de la société est assumée par le directeur
général et que le conseil d'administration est chargé de
la bonne marche de la société, des orientations
stratégiques des activités sociales et du contrôle des
organes de direction.
> La SASP à directoire est plus ouverte mais plus
surveillée aussi
La SASP à directoire - aussi appelée <<
dualiste » - scinde au contraire les fonctions de direction et de
contrôle entre le directoire et le conseil de
surveillance.76
70 Article A 20 du décret de 2001.
71 Articles A 20 et A 21 du décret de 2001.
72 Article L.225-38
C.com (SA) et article A 22 du décret
de 2001 (SASP).
73 Article L.225-37
C.com (SA) et article A 18 du décret
de 2001 (SASP).
74 Article A 18 du décret de 2001.
75 Article L.225-19
C.com (SA) et article A 15 du décret
de 2001 (SASP).
76 Mémento Francis Lefebvre, droit des affaires
2004, n° 9456.
Cela aboutit au mode d'organisation suivant:
- les actionnaires nomment entre eux les membres du conseil de
surveillance;77 - le conseil de surveillance choisit les membres du
directoire ;78
- le directoire assure la gestion de la société
;79
- le conseil de surveillance contrôle cette
gestion;80
- le conseil de surveillance présente ses observations
à l'assemblée des actionnaires.81
Les membres du directoire ne sont pas tenus de disposer
d'actions au sein de la SASP.82 Cela a le mérite
d'intégrer au sein de l'organe de gestion du club des non actionnaires,
même si cette faculté existe aussi au sein du conseil
d'administration puisque les directeurs généraux ne sont pas
forcément actionnaires.
A l'instar du conseil d'administration, le directoire est
investi des pouvoirs les plus étendus pour agir au nom de la
société, et la limite de ses pouvoirs à l'objet social
doit aussi est regardée comme inopposable à l'égard des
tiers.83 Par contre, les actes de garanties, caution et nantissement
doivent avoir été autorisés par le conseil de
surveillance, faute de quoi les tiers ne pourront pas s'en prévaloir.
Par contre, le directoire doit présenter chaque
trimestre un rapport au conseil de surveillance, organe de contrôle de
gestion composé uniquement d'actionnaires élus pour quatre ans
(à la différence de la SA classique).84
Dans le cadre de sa mission de contrôle permanent, le
conseil de surveillance peut aussi effectuer des vérifications à
toute époque de l'année, voire nommer une commission
chargée d'auditionner les membres du directoire. 85 Enfin, le
conseil de surveillance doit présenter chaque année ses
observations sur le rapport du directoire ainsi que sur les comptes que celuici
établit dans le cadre de sa mission.86
77 Article L.225-72
C.com (SA) et article B 18 du décret
de 2001 (SASP).
78 Article L.225-59
C.com (SA) et article B 14 du décret
de 2001 (SASP).
79 Article L.225-64
C.com (SA) et article B 16 du décret
de 2001 (SASP).
80 Article L.225-68
C.com (SA) et article B 20 du décret
de 2001 (SASP).
81 Article L.225-68, alinéa 5
C.com (SA) et article B 22 du décret
de 2001 (SASP).
82 Article L.225-89
C.com (SA) et article B 14 du décret
de 2001 (SASP).
83 Article L.225-64
C.com (SA) et article B 16 du décret
de 2001 (SASP).
84 Article L.225-68 et L.225-75
C.com (SA) et article B 19 et B 20 du
décret de 2001 (SASP).
85 Article L.225-68, alinéa 1
C.com (SA) et article B 20 du décret
de 2001 (SASP).
86 Article L.225-68
C.com (SA) et article B 22 du décret
de 2001 (SASP).
Le contrôle du directoire permet donc de
sécuriser les actionnaires quant aux agissements des membres du
directoire en leur donnant tout au long de l'exercice des informations par le
biais du conseil de surveillance.
Toutefois, la forme dualiste peut nuire à une bonne
gestion : en effet, le rôle du conseil de surveillance peut être
parfois se révéler illusoire alors que dans d'autres cas le
directoire peut être gêné dans son fonctionnement par
l'impossibilité pour le Président du directoire de choisir les
membres qui le composeront. Les statistiques révèlent d'ailleurs
que le nombre de créations de SA à directoire est en baisse par
rapport aux SA à conseil d'administration.87
c. Conclusion sur la création de la SASP
Le bilan des nouveautés apportées par la SASP
semblait donc convaincant. Il paraissait en tout cas plus à même
d'attirer de nouveaux investisseurs. Cependant, ce modèle ne
répondait que partiellement aux attentes des plus grands clubs : par
exemple, alors que la majeur partie des modifications devait permettre aux
clubs de lever plus facilement des fonds et que la SA est une entité
vouée à faire appel public à l'épargne, le
législateur interdisait une entrée des clubs de football
professionnels sur un marché réglementé.
Par ailleurs, d'autres revendications destinées
principalement à asseoir les actifs des clubs se sont greffées au
débat.
87 Mémento Francis Lefebvre, droit des affaires
2004, n° 9464.
2.2. La prise en compte des attentes des clubs
2.2.1. La correction des insatisfactions laissées
par la loi de 1999
a. Le numéro d'affiliation ne relève plus de
l'association
La loi prévoyait depuis 1984, pour des raisons
d'éthique, << que la participation de la société
commerciale aux compétitions inscrites aux calendriers de la
fédération relevait de la compétence de
l'association. >>88
Cette disposition a finalement été annulée
car elle traduisait << une attitude de méfiance à
l'égard d'organismes fonctionnant sous contrainte financière
>>.89
b. La multipropriété est permise dans
certaines limites
Le législateur a d'abord interdit << à
toute personne privée, directement ou indirectement, d'être
porteur de titres donnant accès au capital ou conférant un droit
de vote dans plus d'une société sportive [...J dont l'objet
social porte sur une même discipline sportive >>.90
Cela avait pour objectif << d'empêcher des manoeuvres qui
pourraient modifier le comportement d'une équipe au cours d'une
rencontre ou d'un championnat, ce qui aurait pour conséquence de
contrarier la glorieuse incertitude du sport >>.91
Il a été jugé que cette
législation excédait << les normes indispensables pour
préserver l'indépendance des clubs et l'intégrité
des résultats sportifs >>. En outre, << le champ de
l'interdiction absolue de la multipropriété ne paraissait plus
adapté aux réalités économiques auxquelles
étaient confrontées les sociétés sportives
>>.92
Le législateur a donc décidé d'assouplir
les dispositions de cet article par une loi du 15 décembre 2004. Cela
s'est traduit par la possibilité de détenir des actions ou parts
sociales
88 « Les aspects de la gestion économique des
clubs sportifs professionnels : l'adoption d'une nouvelle loi » de
Gérard Auneau in La semaine juridique Edition générale
n°13, 29 mars 2000, I 216.
89 Rapport du sénat sur la proposition de loi
portant diverse dispositions relatives au sport professionnel.
90 Article 15-1 de la loi du 16 juillet 1984.
91 « Les aspects de la gestion économique des
clubs sportifs professionnels : l'adoption d'une nouvelle loi » de
Gérard Auneau in La semaine juridique Edition générale
n°13, 29 mars 2000, I 216.
92 Rapport du sénat sur la proposition de loi
portant diverse dispositions relatives au sport professionnel.
dans une autre société sportive, dès lors
qu'il n'y avait pas contrôle au sens de l'article L. 233- 16 du code de
commerce.
Pour mémoire, l'article L. 233-16 prévoit certaines
obligations pour les sociétés qui en contrôlent une autre
dans les cas suivants :
- contrôle exclusif ; - contrôle conjoint ; -
influence notable.
> Le contrôle exclusif
Il existe un contrôle exclusif dès lors qu'une
société détient un :
- contrôle de droit : la société
dispose directement ou indirectement la majorité des droits de vote du
club;
- contrôle de fait : la société
désigne pendant 2 exercices successifs la majorité des membres du
conseil d'administration, du directoire ou du conseil de surveillance (cela est
présumé lorsque la société dispose, directement ou
indirectement de plus de 40 % des droits de vote pendant cette période
et qu'aucune société ne détient plus que cette fraction,
que ce soit directement ou indirectement) ;
- contrôle contractuel : lorsque la
société exerce une influence dominante sur le club en vertu d'un
contrat ou d'une clause statutaire (mais cette seconde hypothèse n'est
pas applicable en l'espèce car les statuts types des
sociétés sportives sont imposés par décrets).
> Le contrôle conjoint
Il existe un contrôle conjoint lorsque le club est
exploité par un nombre limité d'associés ou actionnaires,
de sorte que les décisions résultent de leur accord.
> L'influence notable
Enfin, l'influence notable sur la gestion du club est
présumée lorsqu'une société dispose, directement ou
indirectement, de plus de 20% des droits de vote de ce club.
La notion de contrôle au sens de l'article L. 233-16 du
code de commerce doit donc être perçue comme le contrôle
effectif d'un club de football professionnel. Cependant, son champ
d'application est vaste et il convient d'être particulièrement
vigilant, bien que la loi ne prévoie aucune sanction en cas de non
respect.
En outre, il convient de rappeler que l'article 15-1 contient
aussi d'autres dispositions visant les actes qui permettent de détourner
de manière indirecte cette disposition : il est interdit à toute
personne privée actionnaire d'une autre société sportive
de lui consentir un prêt ou de se porter caution pour cette
société, dès lors que leur activité porte sur le
même sport. Le non respect de ces dispositions est susceptible
d'entraîner la nullité de l'opération et la condamnation
des dirigeants ou administrateurs à une amende de 45.000 Euros ainsi
qu'à une peine d'un an d'emprisonnement.
c. Les clubs acquièrent la pleine
propriété des droits audiovisuels
> La loi permet de conférer la propriété
des droits audiovisuels aux clubs
Alors que les droits télé sont en passe de
représenter près de 50% du budget des clubs français,
ceux-ci ne pouvaient pas être inscrits dans leur bilan car ils
étaient la propriété exclusive des
fédérations.93
Face à cette incohérence qui handicapait les
sociétés sportives, le législateur a modifié en
2003 la rédaction de la loi du 16 juillet 1984.94 L'article
18-1 II permet désormais aux fédérations sportives de
« céder aux sociétés mentionnées à
l'article 1195, à titre gratuit, la propriété
de tout ou partie des droits d'exploitation audiovisuelle des
compétitions ou manifestations sportives organisées chaque saison
sportive par la ligue professionnelle qu'elle a créée [...J,
dès lors que ces sociétés participent à ces
compétitions ou manifestations sportives. »
Cependant, le système prévu est assez complexe :
la cession des droits d'exploitation audiovisuelle est facultative pour la
fédération. Si celle-ci exerce le droit de cession qui lui est
93 Article 18-1 I de la loi du 16 juillet 1984
modifiée.
94 Loi n° 2003-708 du 1er août
2003, article 4 (JORF 2 août 2003)
95 La SAOS, la SEURL, la SEML et la SASP.
accordé, alors la ligue professionnelle est seule
compétente pour commercialiser ces droits, dont le produit devra
être réparti selon certains critères entre les clubs.
Ce nouveau régime a des avantages mais aussi des
inconvénients : alors qu'il permet aux clubs d'inscrire à l'actif
de leur bilan comptable cet élément (permettant d'attirer plus
facilement les investisseurs), ceux-ci n'en ont pas la libre disposition et ne
peuvent pas exploiter les images de leurs matches comme bon leur semble car il
existe des critères de répartition des droits
télévisés.
> Les nouveaux critères de répartition des
droits télévisés
Le principe de solidarité est particulièrement
présent dans le domaine du football : il existe entre sport
professionnel et amateur mais aussi entre clubs professionnels eux-mêmes
grâce à un système de répartition solidaire des
droits télévisés. Les produits de la cession des droits
d'exploitation sont d'abord redistribués entre Ligue 1 et Ligue 2
(respectivement 81% et 19% après avoir retranché 100 millions
d'euros réservés à la seule Ligue 1), puis au sein de
chaque ligue selon certains critères. La LFP a récemment
modifié ces critères, lesquels se présentent
désormais selon le mode de répartition suivant.
En ligue 1, une part fixe doit être répartie
équitablement entre chaque club (50%), une autre est fonction du
classement du club au cours de la saison (25%) et sur les 5 saisons
précédentes (5%). Enfin, la dernière part est
répartie selon la notoriété du club, qui se traduit
concrètement par le nombre de diffusions télévisées
sue les trois matchs décalés par journée de championnat au
cours de la saison (15%) et au cours des 5 dernières saisons (5%). Cela
permet d'assurer pour les saisons 2005/06 à 2007/08 qu'un club de Ligue
1 touchera au minimum 13 millions d'euros et au maximum 44 millions d'euros (ce
qui est peu probable car il est difficile qu'un club soit simultanément
le dernier ou le premier sur les critères de performance sportive et de
diffusion télévisée).
En Ligue 2, 90% des sommes reçues sont
redistribuées à parts égales entre les clubs et 10% selon
d'autres critères qui englobent les performances sportives (5%) et la
formation selon un classement établi par la Direction Technique
Nationale (5%), ce qui est une première mondiale.96
96 Situation du football professionnel
français, saison 2004/2005
d. Les clubs entrent dans l'ère du
merchandising
Avant la loi du 28 décembre 1999, l'article 11-2 de la
loi du 16 juillet 1984 interdisait la pratique du merchandising et de la
commercialisation de la marque des clubs alors que, dans le même temps,
un club comme Manchester United avait engrangé près de 35
millions d'Euros grâce à différents produits et services
portant sa marque (hôtels, boutiques...).
Cette interdiction a été levée mais il
était prévu que l'association reste propriétaire de la
marque, ce qui amputait les sociétés d'un élément
potentiel de l'actif de leur bilan, contrairement à leurs voisins
anglais, espagnols ou italiens.
La forte demande des clubs, confortée par une
suggestion du rapport Denis a poussé le législateur à
supprimer « la disposition dérogatoire au droit commun des
marques qui faisait automatiquement de l'association la propriétaire de
celles-ci ».97 La loi du 1er août 2003
précise que l'association peut désormais céder la
dénomination, marque ou autres signes distinctifs de
l'association.98 Cependant, celle-ci conserve logiquement la
disposition à titre gratuit des signes distinctifs utilisés par
la société ou cédés à elle.99
Le possible accès des clubs de football à leur
marque est un véritable tournant dans la politique de gestion des clubs,
qui vont pouvoir bénéficier du rayonnement de leur marque. A
l'heure actuelle, le club français le plus engagé de ce point de
vue est certainement l'Olympique lyonnais : après avoir
créé OL Taxi, OL Music, OL Boissons, OL Café, OL Conduite,
OL Voyages, OL Beauté, OL Mobile, OL Phone, Planet'OL, OL Store, OL
Forme et Performance et le magazine officiel de l'OL, le Président
Jean-Michel Aulas a décidé de lancer les OL lunettes,
déjà déclinées en trois coloris !
Thierry Sauvage, directeur général de l'OL
groupe, estimait ainsi qu'en 2005, la marque OL rapporterait 20 millions
d'Euros, en dehors des activités exercées par la SASP Olympique
lyonnais, soit 20% du budget de l'OL groupe.
97 LFP magazine n°19.
98 Sur la saison 2004/2005, les clubs ont ainsi
versé 4,8 millions d'euros aux associations pour l'utilisation des
marques, logos et signes distinctifs (Source LFP)
99 Loi n°2003-708 du 1er août
2003 et décret n°2004-550 du 14 juin 2004.
On peut s'étonner cependant que l'Olympique Lyonnais
occupe la première place en matière de gestion de produits
dérivés dans la mesure où sa notoriété est
moindre que celle enregistrée par d'autres clubs tels le Paris Saint
Germain ou l'Olympique de Marseille. En effet, selon une étude
réalisée par la société Sportlab en février
2004, ces deux clubs occupaient la tête devant l'OL.
Cela s'explique en fait parce que ces clubs n'ont pensé
à exploiter leur marque que très tard, notamment à cause
d'un manque de connaissance de leurs clients. Une étude
réalisée par CSC sur la politique marketing à mettre en
place au Paris Saint Germain en 2001 révélait ainsi que <<
les dirigeants n'étaient pas en mesure jusqu'alors de tracer
l'historique des achats ou d'analyser le comportement des supporters
>>, et un dirigeant d'avouer que la majorité des supporters
restait pour eux des << anonymes >>.100
Or, les recettes nées de l'exploitation de la marque
peuvent permettre de sécuriser le budget des clubs. Ainsi, Fabrice
Favetto, directeur marketing du PSG, pointait la difficulté << de
gérer une vraie croissance, à l'instar des entreprises
classiques, avec cette trop importante composante fluctuante et
imprévisible, directement liée aux résultats sportifs
>>.
En juin 2001, le PSG a donc signé un accord avec
Oracle, HP et CSC Peat Marwick dans le but de capitaliser sur ses
activités commerciales en développant la connaissance du client
et sa fidélisation, pour augmenter la part maîtrisable de son
chiffre d'affaire. A l'issue de ce programme, Fabrice Favetto déclarait
: << avec Oracle CRM, nous avons transformé nos supporters en
clients. Et nous pouvons capitaliser sur ce vivier de plusieurs centaines de
milliers de personnes attachées à notre marque pour
développer nos activités commerciales et stabiliser notre chiffre
d'affaires >>.101
Cette politique marketing se caractérise notamment par
la création d'une carte << esprit club >> qui
devrait permettre de mener des actions marketing mieux ciblées car il
s'agit d'un outil d'analyse efficace. L'Express annonçait d'ailleurs en
mai 2005 que la bière PSG serait bientôt disponible en
supermarché !102
100 (( Etude de cas, Paris Saint Germain, CSC aide le PSG
à fidéliser ses supporters et à développer son
capital clients ».
101 (( Comment le Paris Saint Germain appris à mieux
connaître et à fidéliser ses supporters grâce
à Oracle CRM. »
102 (( Le foot sort ses griffes », L'Express du 16
mai 2005, par Paul Miquel.
Ce long développement avait pour objectif de pointer
les apports concrets liés à l'utilisation puis à
l'acquisition de la propriété de la marque par les
sociétés, et l'entrée de ces derniers dans le «
foot-business » grâce à des politiques de gestion
efficientes. Cette évolution aurait logiquement pu s'accompagner d'une
cotation des clubs en Bourse mais le Gouvernement a
préféré laisser en suspend cette demande des grands clubs
français.
2.2.2. Le débat autour de la cotation des clubs en
Bourse
> La loi interdit aux sociétés sportives de
faire appel public à l'épargne
L'article 13 de la loi du 16 juillet 1984 interdit aux SASP, SAOS
et SEMLS de faire appel public à l'épargne.
L'article L 411-1 du code monétaire et financier
précise ce qu'il faut entendre par appel public à
l'épargne : il s'agit soit de la cotation des titres d'une
société sur un marché réglementé, soit de la
diffusion des titres dans le public. Les clubs ne pourront donc ni demander
à ce que leurs titres soient admis aux « négociations
sur un marché réglementé », ni émettre ou
céder « des instruments financiers en ayant recours soit
à la publicité, soit au démarchage, soit à des
établissements de crédit ou à des prestataires de service
d'investissement ».
Toutefois, selon l'article L 411-2 II complété
par un arrêté ministériel,103 ne constitue pas
une opération par appel public à l'épargne
l'émission ou la cession d'instruments financiers mentionnés au
1° ou au 2° de l'article L. 211-1 du code monétaire et
financier104 émis par une société anonyme,
lorsque l'opération présente l'une des caractéristiques
suivantes :
- Son montant total est inférieur à 100 000
euros;
- Son montant total est compris entre 100 000 euros et 2 500
000 euros et elle porte sur des instruments financiers qui ne
représentent pas plus de 50 % du capital de l'émetteur.
103 Article L 411-2 modifié par la Loi n° 2005-842 du 26
juillet 2005 art. 25 I Journal Officiel du 27 juillet 2005. Arrêté
du 1er septembre 2005 portant homologation de modifications du règlement
général de l'Autorité des marchés financiers.
104 Deux types d'instruments financiers y sont visés : les
actions et autres tires donnant accès au capital ou aux droits de vote
et certains titres de créance.
- Elle est adressée à des investisseurs qui
acquièrent les instruments financiers qui font l'objet de
l'opération pour un montant total d'au moins 50 000 euros par
investisseur et par opération distincte ;
- Elle porte sur des instruments financiers dont la valeur
nominale s'élève au moins à 50 000 euros.
Indépendamment de la nature de l'opération, le
législateur considère aussi que ne sont pas des opérations
soumises à la réglementation sur l'appel public à
l'épargne celles adressées à des:
- Personnes fournissant le service d'investissement de gestion de
portefeuille pour compte de tiers ;
- Investisseurs qualifiés ou à un cercle restreint
d'investisseurs, sous réserve que ces investisseurs agissent pour compte
propre.
Le législateur a défini la notion d'investisseur
qualifié : il s'agit d'une « personne ou d'une entité
disposant des compétences et des moyens nécessaires pour
appréhender les risques inhérents aux opérations sur
instruments financiers ». Une liste de ces agents économiques
devrait bientôt être fixée par décret.
De même, une autre notion est précisée,
celle de cercle restreint d'investisseurs : il s'agit d'un groupe «
composé de personnes, autres que des investisseurs qualifiés,
dont le nombre est inférieur à un seuil fixé par
décret ».105 Cette nouvelle définition
semble plus ouverte que l'ancienne définition issue du décret du
1er octobre 1998, qui nécessitait que les membres de ce
cercle soient liées aux dirigeants par des relations personnelles,
à caractère professionnel ou familial.
Concernant les sanctions, l'article 1841 du code civil
prévoit que les sociétés « n'ayant pas
été autorisées par la loi de faire publiquement appel
à l'épargne ou d'émettre des titres négociables
» verront les contrats conclus et les titre émis en violation
de cette interdiction annulés.
L'appel aux investisseurs est donc envisageable mais il devra
se faire soit au profit de certaines sociétés ayant pour
vocation d'investir et d'en retirer un gain, soit au profit de
105 Avant l'abrogation du décret du 1er octobre 1998 -
n°98-880, ce seuil à ne pas dépasser correspondait à
100 personnes
proches. Concernant les sociétés
d'investissement, les réformes engagées depuis 1999 et les
progrès réalisés par les clubs en matière de bonne
gestion sont peut-être à même de les attirer. Et pourtant,
les clubs ont engagé un bras de fer avec le Gouvernement soutenus par
certains élus au Parlement.
> La cotation en Bourse demandée par certains
dirigeants du football français
Depuis quelques années, certains clubs réclament
la possibilité d'être coté en Bourse dans le but d'attirer
de nouveaux investisseurs et de procéder à une augmentation de
leur capital. Jean-Michel Aulas, chef de file des revendications et
Président de l'Olympique Lyonnais, présentait son désarroi
lors d'un entretien accordé au journal Les Echos : (( Dans tout
modèle traditionnel, il y a besoin de fonds propres, d'un processus
opérationnel économiquement viable qui légitime
l'investissement fait dans un deuxième temps. »106
Il expliquait aussi les difficultés que cela pouvait
lui poser à cause de l'interdiction actuelle : « quand je fais
rentrer une vingtaine de chefs d'entreprise et des fonds lors de la
dernière augmentation de capital de l'OL, ils le font sur le
modèle économique que je présente et sur la
crédibilité que je peux avoir en tant que chef d'entreprise
(il est aussi le fondateur et le Président de la
société Cegid, société cotée en Bourse
depuis 1986...), plus que sur la certitude de pouvoir sortir avec une
valorisation de leurs actifs. »107
Certains Parlementaires ont aussi défendu la cotation
en Bourse des sociétés sportives dès 1999 et
l'entrée en vigueur de la loi portant création de la SASP. Ainsi,
Messieurs les Sénateurs Murat, Bernard, Cornu, Courtois, Joyandet,
Lemaire et Martin ont proposé d'insérer dans cette loi plusieurs
amendements visant à autoriser l'admission de la SASP sur un
marché réglementé sous certaines conditions : seules
pourraient bénéficier de cette possibilité les
sociétés ayant (( clôturé leurs comptes en
équilibre au moins trois exercices successifs » et celles
(( propriétaires de [leur] stade et de [leurs] installations
sportives ou bénéficiant d'un bail emphytéotique portant
sur ces biens. » Puis lors des débats au Sénat
concernant l'adoption de la proposition de loi portant diverses dispositions
relatives au sport
106 (( Jean-Michel Aulas : les affinités du sport et
de l'entreprise », Les Echos du 2 mai 2005, par Marie-Annick
Depagneux et Gilles Sengès.
107 (( Jean-Michel Aulas : les affinités du sport et
de l'entreprise », Les Echos du 2 mai 2005, de Marie-Annick Depagneux
et Gilles Sengès.
professionnel108, Messieurs les Sénateurs
Mercier, Nogrix et Boyer et Mesdames Dini et Gautier ont à nouveau
formulé la même demande, sans toutefois prévoir de
conditions. Selon Monsieur Nogrix, « il s'agit de donner aux clubs
français la possibilité de faire face à leurs besoins de
financement, d'assurer une parfaite transparence de leur fonctionnement et
d'harmoniser leur statut juridique avec celui de leurs concurrents
européens. En effet, les différences entre les
législations nationales sont telles que le décalage est
avéré entre les clubs français et les autres grands clubs
européens ».
Les auteurs de deux rapports majeurs sur les aspects
économiques du football professionnel soutiennent aussi l'idée
que la cotation des clubs pourrait permettre une plus grande transparence des
comptes des clubs : « une société souhaitant faire appel
public à l'épargne pour financer sa croissance doit remplir un
certain nombre de conditions qui l'obligent, selon le marché
concerné, à la présentation de deux ou trois années
de comptes certifiés et à la publication d'un prospectus
visé par la COB (l'AMF désormais) comprenant toutes les
informations nécessaires aux investisseurs pour fonder leur jugement sur
le patrimoine, l'activité, la situation financière, les
résultats et les perspectives attendues. Et dès lors qu'elle a
été admise à faire appel public à l'épargne,
la société est tenue de porter à la connaissance du public
tout fait susceptible d'avoir une incidence significative sur le cours du
titre. En cas de risques particuliers, il revient à l'autorité de
marché d'alerter les investisseurs et de les appeler à la
vigilance »
Par ailleurs, force est de reconnaître que la France
fait figure d'exception: la cotation des clubs est en effet autorisée en
Grande-bretagne (24 clubs sont côtés), en Italie (3), au Danemark
(6), au Portugal (2), aux Pays-bas et en Allemagne (1) ainsi qu'en Espagne, en
Suisse, en Autriche et en Belgique même si aucun club n'y a pour le
moment saisi cette opportunité.
> Certains clubs tentent le bras de fer avec le
Gouvernement
Face au refus des Ministres successifs Marie Georges Buffet et
Jean-françois Lamour de permettre aux clubs une introduction en Bourse,
ceux-ci ont tenté de forcer le législateur à admettre
cette possibilité.
108 Loi finalement adoptée le 15 décembre 2004,
n°2004-1336.
La première tentative émane de l'Olympique
Lyonnais qui a déposé devant l'AMF en juillet 2003 un dossier de
cotation concernant sa holding, SCPS, avec l'ambition de lever jusqu'à
30 millions d'euros. Mais en décembre 2003, l'Autorité des
Marchés Financiers (AMF) a rejeté cette demande au motif que
l'opération aboutissait à contourner la loi de 1984 puisque la
majorité des revenus de la holding (80%) était issus de la SASP
Olympique Lyonnais.
C'est alors que huit clubs de renom ont déposé
une plainte auprès de la Commission Européenne en février
2002 « afin de dénoncer certaines restrictions de la
liberté d'entreprise des clubs imposées par la loi du 16 juillet
1984 ».109 L'autorité bruxelloise s'est
prononcée en mars 2003 en faveur des clubs en estimant que cette loi
portait atteinte au principe de « libre circulation des capitaux
» et a adopté une décision de mise en demeure de la
France, sommant le Gouvernement français de venir expliquer cette mesure
dans les deux mois. Finalement, les clubs ont décidé de retirer
leur plainte au cours de l'été 2004.
La situation a évolué sous l'impulsion de la
Commission européenne, invitant la France dans un communiqué du
14 décembre 2005 à modifier sa législation relative
à l'interdiction faite aux clubs d'accéder aux marchés
boursiers.110 « La Commission européenne a
demandé officiellement à la France de modifier sa
législation qui interdit aux clubs de football et aux autres clubs
sportifs d'entrer en bourse. De l'avis de la Commission, cette interdiction
constitue une entrave injustifiée à la libre circulation des
capitaux, en violation du traité CE (article 56). La demande de la
Commission a été adressée sous la forme d'un avis
motivé, ce qui correspond à la deuxième étape de la
procédure d'infraction prévue à l'article 226 du
traité CE. Si la France ne donne pas de réponse satisfaisante
dans les deux mois, la Commission peut décider de saisir la Cour de
justice des Communautés européennes. Les contacts avec les
autorités françaises seront poursuivis pour déterminer si
une solution peut être trouvée, qui soit compatible avec le droit
communautaire. »
Suite à cette injonction, le Ministre des Sports Jean
François Lamour a déclaré que l'interdiction absolue
d'appel public à l'épargne serait levée « de
façon proportionnée ». Ainsi, le Ministre a-t-il a
d'abord conditionné une possible cotation en bourse à la
propriété par le club de son stade.111 Cependant,
cette condition est loin de faire l'unanimité des clubs et l'avocat
belge Jean-Louis Dupont, conseil de six des huit clubs français de
football qui
109 Communiqué officiel de l'Olympique Lyonnais.
110
http://europa.eu.int/rapid/pressReleasesAction.do?reference=IP/05/1592
111 « Clubs en Bourse, oui mais... », de
Nicolas MOSCOVICI, Sports.fr.
avaient déposé plainte auprès de la
Commission européenne en 2002, déclarait à l'AFP que
« cela paraît difficilement compréhensible de poser comme
condition à l'accès à la bourse la propriété
de son stade alors qu'un des motifs les plus légitimes de recourir
à la bourse est d'obtenir le capital qui permet d'acquérir ses
installations ».
L'épineux problème de la cotation des clubs
semblait donc loin d'être réglé début 2006, tant les
divergences entre une vision économique des clubs et une vision
idéologique du Ministre semblaient fortes.
> Une interdiction idéologique
Au contraire de Jean-Michel Aulas, Jean-François
Lamour, Ministre des Sports est persuadé que la cotation des clubs
serait préjudiciable pour l'ensemble du football français. Pour
ce faire, il s'appuie notamment sur l'exemple italien où la situation
des clubs cotés en Bourse est catastrophique et a
nécessité « un décret et une loi pour les sortir
de leurs marasme ». 112 Il fait aussi
référence aux effets pervers et incontrôlés d'une
cotation sur un marché réglementé illustrée par
l'acquisition du club de base-ball de Montréal par le club de
Washington.
Mais outre l'aspect économique, c'est bien l'aspect
idéologique qui prime : à force de mettre en avant le
côté financier, on risque d'en oublier les fondements du sport.
Rétablir un équilibre pour assurer une concurrence saine, oui.
Mais ne pas perdre de vue que le sport ne peut pas être «
comparé à une activité économique ou commerciale
traditionnelle. »113
112 « Compte rendu analytique de la séance du 24
novembre 2004 » au Sénat.
113 « Les aspects juridiques de la gestion
économique des clubs sportifs professionnels : l'adoption d'une nouvelle
loi », de Gérard Auneau in La Semaine Juridique Edition
Générale n°13, 29 mars 2000.
-II- Le football français en passe de devenir un
modèle dans un marché en pleine mutation
1. Une santé financière bientôt retrouvée
|
Le football professionnel est un monde à part dans
lequel un homme d'affaires connu pour sa gestion prudente peut se mettre
à dépenser des sommes folles pour acquérir des joueurs de
renom puis se rendre compte qu'il a plongé son club dans une situation
désastreuse car les résultats n'avaient pas suivi, faute à
la « glorieuse incertitude du sport ».
Le football est aussi un univers original parce que certains
actionnaires sont prêts à investir « à fonds
perdus » pour bâtir une équipe digne de rivaliser avec
les meilleures équipes européennes.
Enfin, le football est spécifique parce que parfois,
l'ensemble des acteurs commet la même erreur et apparaît alors une
perte en un seul exercice de près de 150 millions d'euros pour les clubs
français de Ligue 1...
1.1. Les instances du football participent au redressement
financier des clubs
Heureusement, il semble que cette «
spécificité du sport » s'amenuise pour laisser place
à plus de rationalité.
1.1.1. Les clubs français se rapprochent de
l'équilibre financier
a. Les étapes d'un parcours mouvementé
> Les errements du passé
Au regard de l'activité financière des clubs de
football professionnels, il semble que l'on puisse << dater
>> leur entrée dans l'ère primaire du << foot
business >> aux alentours des années 1995. C'est en effet
à partir de cette période que le budget des clubs a
explosé et que les dirigeants ont dû prendre des décisions
stratégiques quant à la répartition de ces
sommes.114 Leur choix s'est porté massivement sur le court
terme par l'acquisition de joueurs, d'où la création d'une
<< bulle >> qui s'est traduite par une augmentation significative
des salaires et
114 Entre la saison 96/97 et la saison 00/01, le budget global
pour l'ensemble des clubs est passé de 300 à 600 millions
d'euros.
des indemnités de transfert sans justification
réelle,115 ce qui n'a profité en fait qu'aux joueurs
et à leurs agents mais n'a pas permis d'améliorer la
compétitivité des clubs.
Au contraire, l'effet a été désastreux sur
les comptes.
A l'issue de la saison 1996/1997, le bilan cumulé de
l'ensemble des clubs de division 1 (Ligue 1 actuelle) faisait apparaître
un résultat net comptable positif de 6 millions d'Euros tandis qu'en
2001 le résultat était déficitaire à hauteur de 53
millions d'euros (dont 435 millions d'euros de charges à
répartir), puis de 151 millions d'euros en 2003.
Mais heureusement pour le football français, les
dirigeants ont su se ressaisir et assainir leurs comptes.
> « Les clubs professionnels vont mieux
»116
Les institutions encadrantes sont unanimes : tant en Ligue 1
qu'en Ligue 2, les progrès réalisés depuis la saison
2000/2001 sont très encourageants et le redressement économique
du football français est en cours.
Selon un rapport effectué par la DNCG à propos
des comptes de l'exercice 2003/2004 de la Ligue 1, il existait
déjà plusieurs points positifs : le résultat net restait
négatif mais se rapprochait de l'équilibre,117 les
capitaux propres progressaient 118 et les charges à
répartir ainsi que les dettes diminuaient (grâce notamment
à une baisse des investissements joueurs depuis quelques
années).119 Parallèlement, le solde de la contribution
mutation était redevenu bénéficiaire pour la
première fois depuis la saison 1999/2000,120 notamment
grâce à la balance des transferts positive à hauteur de
91,8 millions d'Euros (différence entre joueurs vendus et joueurs
achetés).
115 Entre les saisons 96/97 et 00/01, la
rémunération des joueurs des clubs de Ligue 1 est passée
de 130 à 300 millions d'Euros et l'investissement dans les transferts a
lui été multiplié par dix ! (Passant de 44 à 400
millions d'Euros).
116 « Situation du football français, saison
2003/2004 », introduction, Gervais Martel, Président de
l'UCPF.
117 38,9 contre 151,2 millions d'Euros la saison
passée.
118 139 contre 93 millions d'Euros la saison passée.
119 Mais les charges à répartir représentent
toujours 167 millions d'Euros et les dettes financières 66 millions
d'Euros.
120 18 contre (100,2) la saison précédente.
Lors de la publication du même rapport à propos des
comptes des 20 clubs de Ligue 1 lors de
l'exercice 2004/2005, la DNCG a confirmé l'embellie
constatée l'année précédente :
- # Les comptes de résultats cumulés font
apparaître une augmentation des produits liés à
l'exploitation,121 alors que les charges liées à
l'exploitation ont baissé.122 Le résultat
d'exploitation n'est plus négatif qu'à hauteur de 12 millions
d'euros contre 85 millions lors de la saison 2003/2004.
- # Cependant, cela ne s'est pas traduit par une
amélioration significative du résultat d'exercice en 2004/2005,
123 qui reste négatif à hauteur de 32 millions
d'euros, à cause d'un résultat exceptionnel très
négatif.124
Cette meilleure gestion de l'activité des clubs s'est
aussi traduite au niveau du bilan :
- # Les capitaux propres restent élevés à
hauteur de 112 millions d'euros même s'ils ont diminué de 20%.
- # Les capitaux permanents (capitaux propres + comptes
courants d'actionnaires) ont légèrement diminué à
164 millions d'euros, ce qui ne permet de couvrir que 85% du capital
joueurs.
- # Les dettes financières ont une nouvelle fois
baissé (5%) et n'atteignent plus que 63 millions d'euros.
- # La trésorerie des clubs de Ligue 1 était
positive lors de la clôture de l'exercice.125
Ces résultats sont encourageants mais pas autant qu'en
Ligue 2 où le résultat d'exploitation est redevenu positif
à hauteur de 640.000 alors que le résultat exceptionnel (+ 5,6
millions) a dopé le résultat net qui atteignait près de 6
millions d'euros !
On peut donc conclure qu'après l'euphorie produite par
le doublement des droits TV au cours de la saison 1999/2000, les dirigeants ont
pris en compte leurs erreurs et mènent à présent une
gestion moins hasardeuse, basée sur une meilleure maîtrise de
leurs charges d'exploitation. Cela venant se coupler à une augmentation
des produits d'exploitation (voir l'accord avec Canal + pour le championnat
français), la DNCG envisage que la Ligue 1 enregistre aussi un
résultat positif lors de la saison 2005/2006.
121 + 40 millions d'euros au titre des droits TV et + 11 millions
au titre des recettes guichet ;
122 - 10 millions de charges de personnel et - 30 millions
d'autres charges ;
123 Progression de 10% de - 35 millions à - 32 millions
d'euros ;
124 - 50 millions d'euros contre un solde positif de 10 millions
l'exercice précédent ;
125 109 millions d'euros avec une progression de 18% par rapport
à l'exercice 2003/2004 ;
Pour information, voici les résultats publiés en
juin 2005 de chaque club professionnel au cours de la saison 2004/2005 (en
milliers d'euros) :
Pour la ligue 2 :
Pour la Ligue 1 :
- # A.C. Ajaccio : 802
- # A.J. Auxerre : 5.200
- # S.C. Bastiais : (1.900)
- # F.C. Girondins de Bordeaux : (1.200) - # Stade Malherbes de
Caen : 460
- # F.C. Istres Ouest Provence : 392 - # Racing Club de Lens :
(5.500)
- # LOSC Lille Métropole : (2.000) - # Olympique Lyonnais
: 3.600
- # Olympique de Marseille : (10.600) - # Football Club de Metz :
610
- # A.S. Monaco F.C. : 140
- # F.C. Nantes Atlantique : (9.600) - # OGC Côte d'Azur :
1.900
- # Paris Saint-Germain : (17.800) - # Stade Rennais F.C.
(6.700)
- # A.S. Saint Etienne : 4.400
- # F.C. Sochaux Montbéliard : 1.100 - # R.C. Strasbourg :
2.200
- # Toulouse F.C. : 1.300
- Amiens S.C. : 61
- Angers S.C.O. : 285
- Stade Brestois 29 : 550
- La Berrichonne de Châteauroux : 640 - Clermont Foot
Auvergne : (175)
- U.S. Créteil Lusitanos Football : 200
- Dijon F.C.O. : 125
- Grenoble Foot 38 : (1.850) - F.C. Gueugnon : 350
- E.A. de Guingamp : 500
- Stade Levallois Mayenne F.C. : 909
- Le Havre A.C. : 150
- Le Mans U.C. 72 : 1.300
- F.C. Lorient Bretagne Sud : 1.250
- Montpellier Hérault S.C. : (33) - A.S. Nancy Lorraine :
24
- Chamois Niortais F.C. : 50 - Stade de Reims : 330
- C.S. Sedan Ardennes : 130
- E.S. Troyes Aube Champagne : 700
Les résultats cumulés de Ligue 1 font
apparaître que 60% des clubs y ont enregistrés un
bénéfice. C'est donc un résultat semble-t-il encourageant,
d'autant que trois clubs ont réalisé des gains records à
plus de 3,5 millions d'euros (AJA, OL et ASSE). En revanche, les 8 clubs dont
le résultat a été négatif enregistrent des pertes
d'au moins 1 million d'euros, voire même plus de 9,5 millions d'euros
pour les mauvais élèves (FCNA, OM et PSG). Le bilan pour la Ligue
1 lors de la saison 2004/2005 est donc contrasté mais encourageant.
En ce qui concerne la Ligue 2, seul un club a
enregistré une perte dépassant 200.000 euros et 85 % des clubs
ont réalisé un bénéfice lors de cette même
saison (en moyenne de 400.000 euros). Cependant, deux clubs tiraient leur
épingle du jeu avec un bénéfice supérieur à
1,2 millions d'euros (Le Mans et le F.C. Lorient).
> Les perspectives d'avenir
Ce constat d'entrée des clubs dans une nouvelle
ère de croissance et de prospérité qui les mènera
peut-être au sommet européen est conforté par
l'évolution juridique et fiscale, ainsi que par la nouvelle augmentation
des droits TV.126
Le budget des clubs devrait ainsi augmenter notablement, alors
que dans le même temps le législateur a mis en place un nouveau
système « tax free >> concernant 30% de la
rémunération des joueurs, ce qui devrait permettre de diminuer
l'écart financier entre les clubs français et leurs voisins, et
attirer de nouvelles stars sans pour autant plomber les comptes des clubs
pendant 5 ans.
Il faut toutefois rester lucide, le monde du football est
particulier : les investissements déraisonnés des années
1999/2000 ont été réalisés par des dirigeants qui,
avant d'être Présidents de club, étaient reconnus dans leur
domaine pour être de bons gestionnaires. Prenons l'exemple de Robert Luis
Dreyfus, l'actionnaire principal de l'OM, qui a redressé successivement
Saatchi puis Adidas, ou de François Pinault, l'actionnaire du Stade
rennais, ou encore Yves de Chaisemartin, patron de la Socpresse et
propriétaire du FC Nantes. Un dirigeant d'un grand club affirmait :
« On n'a pas idée de ce que représente le fait de
présider un club de football qui réussit. Il n'y a que la
politique qui soit aussi forte. Quand vous êtes nommé, vous
êtes un parfait inconnu. Quelques mois plus tard, vous faites l'ouverture
du JT de TF1. Cela vous donne l'illusion que, comme au casino, vous allez
gagner beaucoup d'argent. >>127
Les inquiétudes quant à l'utilisation des
produits issus des droits TV sont donc toujours d'actualité et
même au sein de la DNCG, on craint un retour aux années de
dépenses inutiles et néfastes. En outre, force est de constater
que la masse salariale stagne à hauteur de 46% du budget des clubs (soit
59% charges sociales comprises).
126 Canal + versera aux clubs 600 millions d'Euros par an pour
bénéficier de l'exclusivité des droits sur le championnat
français.
127 « Ces patrons qui ruinent le football »,
L'expansion du 1er juin 2002.
b. La DNCG : le nouveau garde-fou du football
français >
Une mission conférée par la loi
En vue d'assurer l'équité des
compétitions, l'article 17-II de la loi du 16 juillet 1984 impose
à << chaque fédération disposant d'une ligue
professionnelle [de] créer un organisme assurant le contrôle
juridique et financier des associations et sociétés
[sportives] ». La FFF a donc instauré en 1990 la Direction
Nationale de Contrôle de Gestion (DNCG), composée de trois
commissions dont une spécialement conçue pour contrôler les
clubs de football professionnel.
« Les clubs ont des comptes à rendre et ne
peuvent plus faire n'importe quoi », déclarait ainsi Philippe
Dialo, directeur général de l'Union des Clubs de Football
Professionnel.128
> Une composition mixte, gage d'équité et de
transparence
La commission de contrôle des clubs professionnels de la
DNCG est composée de membres issus de la FFF, de la LFP, de l'UCPF
(Union des Clubs de Football Professionnels), de l'UNFP (Union Nationale des
Footballeurs Professionnels), de l'UNECATEF (Union Nationale des Educateurs et
Cadres Techniques de Football) et du SNAAF (Syndicat National des
Administratifs et Assimilés du Football).
La présence de tous les acteurs du football
professionnel, tant des joueurs, entraîneurs que des clubs permet de
garantir une certaine transparence. En outre, la présence de 4
commissaires aux comptes parmi les 18 membres de cette commission assure
à cette instance une fiabilité du contrôle des comptes.
> Son action aux côtés du Conseil National de la
Comptabilité
Le Conseil National de la Comptabilité (CNC) ayant
récemment initié un processus de définition des
règles comptables spécifiques au domaine sportif, la DNCG s'est
jointe aux travaux concrétisés par l'adoption d'un
règlement sur la comptabilisation des indemnités de mutation de
joueur.129
128
Libération.fr, << le
gendarme du championnat sanctionne 19 clubs », du 30 juin 2003.
129 CRC 2004-7 paru au JO le 1er janvier 2005.
Depuis, les indemnités de transfert ne sont plus
comptabilisées comme des charges mais comme des immobilisations
incorporelles, amortissables sur la durée du contrat avec obligation
d'opérer des tests de dépréciation périodique afin
de vérifier que la VNC reste inférieure à la valeur
d'usage.
Ce test est effectué à deux niveaux : celui du
joueur et de l'équipe (donc du club). Ces critères ont pour
valeur d'usage : le taux d'actualisation, l'horizon d'évaluation, la
prévision de flux nets de trésorerie, etc.
> #Des prérogatives fortes
Lorsque la situation d'un club apparaît trop fragile, la
DNCG peut prendre des mesures préventives telles que :
- # l'interdiction de recruter de nouveaux joueurs sous contrats
;
- # le placement d'un club sous recrutement
contrôlé (à cause d'un budget prévisionnel ou d'une
masse salariale prévisionnelle trop limitée pour faire face
à l'apparition de nouvelles charges).
De plus, la DNCG dispose aussi d'un pouvoir de sanction
très persuasif. Elle peut en effet : - # rétrograder un club dans
une division inférieure ;
- # interdire une montée dans une division
supérieure ;
- # voire demander l'exclusion d'un club des championnats
nationaux.
En outre, comme l'indique son Président François
Ponthieu, la DNCG n'hésite pas à sévir : « en
moyenne on peut dire qu'un tiers des clubs est sanctionné chaque
année ».130
De ce fait, certains dirigeants peuvent être
tentés de masquer certains détails. Ainsi, Pascal Urano,
Président du club de Sedan (Ligue 2) a-t-il été
placé en garde à vue car il était accusé d'avoir
omis de faire figurer au passif de son bilan le montant du loyer que le club
devait verser à la municipalité pour l'utiliser (soit un montant
de 500.000 euros). Cela ayant été mis au jour, M. Urano a
été placé en garde à vue en avril 2005 pour
« présentation de bilan au contenu inexact
».131 Il a toutefois été relaxé par
le tribunal de correctionnel de Charleville-
130 « Le gendarme du championnat sanctionne 19 clubs
»,
Libération.fr, du 30 juin
2003.
131 « Sommation contre les salaires », Le Web
de l'Humanité, du 21 avril 2005.
Mézières alors qu'une peine de 18 mois de prison
avec sursis et une amende de 25.000 euros avaient été requises
contre le responsable sedanais.
François Ponthieu prévenait d'ailleurs les
équipes qui accèdent en Ligue 2 : << prenez vos
responsabilités, mais si vous arrivez à accéder en Ligue 2
sur la base d'états financiers qui sont plus ou moins masqués,
nous engagerons un système dans lequel on vous enlèvera des
points en championnat l'année de votre montée. Donc, vous n'avez
pas intérêt à vous engager dans cette voie-là.
»132
> Un nouveau rôle : celui de garant du football
français
Dans un rapport paru en mars 2005 sur la situation du football
professionnel à l'issue de la saison 2003/2004, le Président de
la DNCG insistait sur le rôle que cet organisme a tenu dans le
redressement des comptes des clubs initié depuis peu. L'ensemble des
acteurs du football français était aussi unanime : le
Président de la LFP relayé par d'autres acteurs du football
professionnel saluait ce très bon résultat obtenu grâce
à << l'effort de gestion des clubs et à l'action de
surveillance constructive et préventive de la meilleure DNCG
d'Europe ».
Toutefois, le rôle du comptable des clubs
français ne se limite à celui de gendarme : devant la nouvelle
augmentation des droits télévisés provenant du contrat
Canal +, la DNCG proposait d'instaurer un débat sur l'utilisation de ces
sommes en rappelant les erreurs commises précédemment - lorsque
la première augmentation des droits TV n'avait abouti qu'à
augmenter le salaire des joueurs ainsi que le prix des transfert, sans que ces
sommes soient investies pour améliorer les infrastructures.
En se fondant sur le modèle de gestion des clubs
sportifs américains,133 M. Ponthieu proposait des
idées d'investissement à long terme: augmenter les
capacités d'accueil, réchauffer et rénover les stades,
développer les services auprès des << clients
spectateurs », maintenir et développer le système de
formation, etc. Autant de mesures destinées selon lui à <<
accroître la valeur du produit football, qui pourra alors faire
l'objet de nouvelles enchères dans des conditions optimales
».
132 « Sommation contre les salaires », Le Web
de l'Humanité, du 21 avril 2005.
133 Il a déclaré à l'Humanité :
<< Quand on prend l'exemple des stades aux États-Unis ou en
Allemagne, on se rend compte qu'ils sont mieux configurés pour un
accueil du public que nos stades français qui sont souvent assez vieux.
Si on ne fait pas ces efforts, ce serait une catastrophe, et je pèse mes
mots. », Édition du 21 avril 2005.
La DNCG semble donc aller au-delà de la mission qui lui
est impartie en principe : à côté de son action de
prévention et de son action, elle intervient désormais en amont,
avant que les décisions de gestion soient prises pour inciter les clubs
vers une politique à mener une gestion raisonnée.
1.1.2. La LFP profite du contexte pour engager des
réformes au sein du football français
La Fédération Française de Football (FFF)
occupe une place centrale dans le football français puisqu'elle touche
l'ensemble des citoyens entre ses activités de gestion du football
amateur et de l'équipe de France. La Ligue de Football Professionnel
(LFP) est une association créée par la FFF spécialement
conçue pour veiller au développement du sport professionnel.
Il existe une séparation des pouvoirs qui permet
à chaque entité de disposer d'un territoire propre de
compétences. Mais la LFP semble depuis peu dicter ses règles
à la FFF, certainement parce qu'elle a su remplir son rôle de
gestion du football professionnel en étroite collaboration avec la DNCG
alors que la FFF entre dans une période de turbulences du fait d'une
gestion peu orthodoxe.
a. La FFF perd sa crédibilité après
des dérapages financiers
> La FFF participe à l'exécution d'une mission
de service public
La FFF, association loi 1901 agréée par l'Etat
et placée sous la tutelle du ministre chargé des sports a pour
objet l'organisation de la pratique du football en France. Concrètement,
elle est chargée de superviser l'ensemble de l `activité du
football amateur en France, de la délivrance des licences en passant par
la gestion du million de matches orchestrés chaque année par ses
différentes branches. Parallèlement, c'est elle qui gère
l'environnement de l'équipe de France, de la nomination du
sélectionneur jusqu'aux contrats de cession des droits audiovisuels des
matchs des Bleus.
La FFF, qui occupe une place entre football de masse et football
d'élite, exerce donc une mission de service public et
bénéficie à cet égard d'un soutien de l'Etat.
Conformément à l'article 16 de la loi du 16
juillet 1984, la FFF bien que placée sous la tutelle du Ministre des
Sports, exerce son activité en toute indépendance. Elle
bénéficie à cet effet d'un agrément
délivré par l'Etat qui vaut à elle seule «
reconnaissance de sa participation dans l'exercice d'une mission de service
public ».134
En outre, la FFF reçoit chaque année une aide de
l'Etat en contrepartie de son adhésion à une convention
d'objectifs fixée avec le ministère des sports. Selon la Cour des
Comptes, cette aide s'élevait à 1,7 millions d'euros en
2003.135
> La Cour des Comptes pointe un fonctionnement
irrégulier
Déjà dans les années 80, un
contrôle de la Cour des Comptes avait mis en évidence une gestion
défaillante, une organisation inadaptée, un contrôle de
l'Etat illusoire, des fonctionnaires mis à la disposition de la FFF en
infraction avec les règles de cumul de rémunération et
surtout le non respect des règles de mise en concurrence au profit du
groupe Darmon, avec la particularité toutefois que deux des dirigeants
de ce groupe siégeaient aussi au sein de l'organe de décision de
la FFF.136
Dans son rapport annuel publié en 2001, la Cour des
Comptes a décidé de s'intéresser pour la seconde fois
à la Fédération Française de Football afin de se
rendre compte des évolutions par rapport au comportement de cette
association. Elle a ainsi constaté des améliorations, comme la
mise en conformité de ses statuts-types, l'adoption d'une
comptabilité analytique et une meilleure gestion de sa
trésorerie.
Mais elle a relevé que de nombreux problèmes
demeuraient : ainsi, le Conseil fédéral n'a pas été
nécessairement mis en mesure d'apprécier la validité
d'importantes décisions en matière de marketing et de cession des
droits de retransmission télévisée alors qu'il lui
revenait en principe de réaliser et d'autoriser les opérations de
ce type.
En outre, la Cour faisait remarquer un mode de gestion original
: tout d'abord, « le processus de décision [était]
demeuré très centralisé au niveau de la présidence
et de la direction
134 Rapport public annuel de la Cour des comptes 2001,
Fédération Française de Football, p. 533.
135 Rapport public annuel de la Cour des comptes 2003, Sports, p.
573.
136 Le groupe Darmon a été créé
par l'homme du même nom aussi surnommé le « grand
argentier du football français » et qui tient, dit-on, une
place très importante dans la milieux du football français. Il
aurait ainsi favorisé l'élection de Monsieur Bourgoin à la
présidence de la LFP en 2000.
générale, qui [géraient] les dossiers
importants. » De plus, alors que la FFF était signataire d'une
convention collective spécialement applicable aux personnels
administratifs et assimilés au football, elle appliquait à ses
salariés un accord d'entreprise qui reprenait les dispositions beaucoup
plus favorables de la convention collective des employés de la presse
quotidienne parisienne.
Par ailleurs, le train de vie des dirigeants était
montré du doigt : au titre des frais de transport, 100.000 euros ont
été dépensés en deux ans pour la location d'avions
privés. De même, pendant la Coupe du monde 2002 en Corée,
le Président de l'époque aurait laissé une note de
près de 55.000 euros, dont l'achat d'une bouteille de Romané
Conti d'une valeur de 4.800 euros.
Enfin, les auditeurs rendaient compte
d'irrégularités déjà constatées en 1988
concernant les rémunérations versées aux
fonctionnaires137 et les relations avec le groupe Darmon. Ainsi, le
contrat de mandat exclusif confié à la société
France Football Promotion (FFP), filiale du groupe Darmon pour «
négocier et conclure tous contrats ayant pour objet l'utilisation
l'exploitation ou la reproduction du sigle de la FFF et de l'image collective
de l'équipe de France » n'aurait jamais été
conforme aux règles régissant le droit de la concurrence
malgré les engagements répétés de son
Président en 1989 et 1990 et même parfois défavorable
à la FFF.
> Les commissaires aux comptes de la FFF émettent des
réserves à leur certification
Dans le cadre de leur mission exercée
collégialement, Messieurs Génot et Burette ont refusé de
certifier en l'état les comptes de la FFF pour l'exercice 2003/2004. Ils
ont en effet émis une réserve concernant le rattachement d'un
produit de 10 millions d'euros issus de la cession de droits
d'exclusivité à l'exercice 2003/2004. Selon eux, ces
opérations auraient du faire l'objet d'un enregistrement lors
d'exercices futurs.138
Alors que le Président la FFF se défendait
d'avoir consulté le Cabinet d'experts Villemot, certains
commentateurs avancent la thèse de manoeuvres visant à masquer
les mauvais résultats de la FFF, plongée dans une crise
financière sans précédent. Au lieu de présenter
un
137 Un des entraîneurs de l'équipe de France
aurait cumulé pendant huit ans un traitement correspondant à son
grade de professeur de sport et une rémunération qui
excédait très largement ce traitement (plus de dix fois
supérieure en 1996 et 1997).
138 Assemblée fédérale de la FFF du 12
févier 2004, intervention de Monsieur Génot, commissaire aux
comptes.
déficit de 62.000 euros, celle-ci a du se
résoudre à annoncer une perte de 2,6 millions d'euros. Et la
situation n'irait pas en s'arrangeant : l'exercice 2004/2005 s'est soldé
par un déficit de 9,7 millions d'euros (au lieu de 5 millions
prévus) alors que les comptes prévisionnels votés en juin
2005 pour l'exercice 2005/2006 étaient déficitaires à
hauteur de 4,6 millions d'euros.139
Par ailleurs, devant l'assemblée Monsieur Burette
soutenait : « le bilan arrêté le 30 juin 2003 (soit
pour l'exercice 2002/2003) ne reflète pas l'image fidèle du
patrimoine de votre fédération ». Pour justifier sa
position, il citait notamment la non présentation d'une facture de
4.295.479 euros, la non présentation d'un compte rendu qui aurait du
leur être fourni concernant une facturation de 6,5 millions d'euros
versés à un mandataire et le non respect de la procédure
de mise en concurrence lors de la conclusion d'importants contrats.
> Les autorités judiciaires et administratives
s'intéressent de près à la Fédération
En mars 2005, l'Equipe rendait publique une ordonnance du
Tribunal de Grande Instance de Paris de mai 2004 remettant en cause «
les contrats de mandat exclusifs souscrits par la FFF au profit de la
Société Football Promotion pour les périodes 1994-1998 et
1998-2002 » en les sanctionnant de nullité « faute
d'appel à la concurrence ».140 Cette
décision qui pouvait paraître inéluctable tant la Cour des
comptes avait prévenu la FFF, pourrait la plonger dans une crise plus
grave encore si elle venait à être confirmée par la cour
d'appel.141
Par ailleurs, le parquet de Paris a ouvert au printemps 2005
une enquête préliminaire sur les comptes de la
Fédération Française de Football à la suite des
dénonciations de ses commissaires aux comptes concernant les bilans des
exercices 2002/2003 et 2003/2004.
Enfin, le Conseil de la concurrence s'est saisi d'office le
1er juin 2004 « de la situation de la concurrence dans le
secteur de la gestion des droits dans le football professionnel et de la
publicité dans les stades de football et a fait procéder à
des enquêtes pour établir l'existence et l'étendue des
pratiques recherchées ».142
139 « Nouveau déficit en vue », de Marc
Chévrier, L'Equipe du 26 juin 2005.
140 La Société Football Promotion est une filiale
de Sportfive, société mère du groupe Darmon.
141 Mais aussi la société Advent International qui
a acquis 48,85% des actions de la société Sportive aux termes
d'un accord en date du 19 mars 2004...
142 Communiqué du conseil de la concurrence du 18
février 2005 : « enquête dans le milieu du football
».
> L'entrée dans une ère de rigueur ?
En février 2005, Claude Simonet a quitté la FFF
après 10 années passées à sa tête, laissant
derrière lui une fédération stigmatisée par une
gestion mal contrôlée mais aussi un bilan sportif unique avec une
Coupe du monde et une Coupe d'Europe.
Son nouveau Président, Jean-Pierre Escalette
prônait dès son entrée une politique de rigueur, tout en
nuançant les mauvais résultats comptables enregistrés
depuis 2002, même s'il admettait que les procédures en cours
faisaient planer au dessus de sa tête une « épée
de Damoclès ». 143
b. La Ligue de Football Professionnel prend la direction du
football français
> La LFP participe à l'évolution de
l'encadrement juridique du football professionnel
Alors que le domaine de compétence de la FFF tient
à la promotion du football, la LFP est chargée de la <<
représentation, de la gestion et de la coordination des
activités sportives à caractère professionnel des
associations qui leur sont affiliées et des sociétés
qu'elles ont constituées. »144
Aux termes de l'article 6 des statuts de la LFP, celle-ci est
compétente pour << organiser, gérer et
réglementer le football professionnel, financer les opérations
ayant pour but d'assurer la promotion et du football professionnel, pour
appliquer les sanctions prises à l'encontre des groupements sportifs et
de ses licenciés, et enfin prendre la défense des
intérêts matériels et moraux du football professionnel
».145
Concrètement, la LFP gère les championnats de
Ligue 1 et de Ligue 2, la publicité sur les équipements sportifs
et dans les stades, et autorise les équipes à utiliser des
joueurs professionnels. Mais elle a aussi pour objectif de défendre les
intérêts du football professionnel. Les évolutions majeures
qui ont suivi la loi de décembre 1999 en sont la preuve : depuis 6 ans,
le législateur a adopté plusieurs lois pour permettre aux
sociétés
143 Citation de Jean-Pierre Escalette, nouveau Président
de la FFF.
144 Articles 16 et 17 de la loi du 16 juillet 1984.
145 Article 6 des statuts de la LFP.
sportives d'évoluer avec plus d'aisance au sein d'un
environnement ultra-concurrentiel, notamment sous la pression de cet organe qui
est l'émanation des clubs professionnels.
A cela s'ajoute une action plus visible : la négociation
des droits télévisés.
> La LFP fait exploser la valeur des droits
télévisés
En vertu d'un décret paru en juin 2004, la LFP «
commercialise à titre exclusif les droits d'exploitation
audiovisuelle et de retransmission en direct ou en léger
différé, en intégralitéou par extraits, quel que
soit le support de diffusion, de tous les matches et compétitions
qu'elle organise ».146
Selon des chiffres publiés par la LFP, les audiences
moyennes des retransmissions télévisées ont presque
doublé depuis 1999 pour atteindre une moyenne de 2,7 millions de
téléspectateurs pour les matches diffusés sur Canal + au
cours de la saison 2003/2004 (choix 1 et choix 3, alors que TPS diffusait le
choix 2), soit 105 millions de téléspectateurs en cumulé
sur la saison. Cet engouement de la part des français pour le football
professionnel devait donc permettre aux clubs d'être avantagés
dans la négociation de ces droits.
Toutefois, c'est la LFP qui a mené la
négociation (et non les clubs) en qualité de mandataire unique au
nom de l'ensemble du football professionnel français. Le rôle de
la LFP est donc majeur puisqu'un faux pas pourrait porter préjudice
à l'ensemble des clubs professionnel, dans la mesure où depuis
quelques années ils retirent plus de la moitié de leurs
ressources de la cession de ces droits.
Il semble cependant qu'elle ait su tirer le meilleur parti de
ses responsabilités puisqu'au terme d'une bataille commerciale et
juridique de longue haleine, Canal + a remporté face à son
concurrent TPS, l'exclusivité des droits TV de Ligue 1 pour les saisons
2005/2006 à 2007/2008 pour la somme de 600 millions d'euros par
saison.
Enfin, la Ligue s'est aussi investie au niveau de la
négociation de leurs droits de retransmission audiovisuelle par les
clubs : ceux-ci sont en effet autorisés à négocier
seuls
146 Décret n°2004-699 du 15 juillet 2004.
lorsque cela ne touche pas aux matchs en direct ou en
léger différé.147 A cet effet, la LFP a
édicté un Règlement Audiovisuel pour « organiser
de manière rationnelle et homogène l'exploitation de leurs droits
audiovisuels par les clubs afin de leur permettre d'optimiser au mieux
l'exploitation des matches auxquels ils participent ».148
Ce règlement intérieur auxquels sont soumis les clubs leur donne
un cadre pour négocier leurs droits concernant Internet, la
téléphonie mobile, leur propre chaîne de
télévision et les images des matchs auxquels ils ont
participé dès lors qu'ils sont diffusés à compter
de minuit le soir du match concerné. Pour assurer son respect, il est
prévu que les clubs qui ne respectent pas leurs obligations pourront
subir une sanction pécuniaire.149 Cet instrument intervient
donc comme un outil de régulation a priori et tend à
éviter une dérive de certaines sociétés dans la
gestion de leurs droits.
> La LFP prend les rennes du football français
Lors de la première audition des comptes de la FFF dans
les années 80, la Cour des comptes avait déjà fait
remarquer que la FFF était dans les faits soumise à la ligue.
Pour éviter que cela se reproduise, les relations entre les deux
instances ont été formalisées par une convention
établie pour cinq ans.150 La FFF est ainsi seule
compétente en matière de déontologie,
sécurité, formation ou pour la délivrance de licences,
alors que la LFP bénéficie de l'autonomie financière
administrative et sportive pour gérer le football professionnel.
Cependant, la situation de réussite et d'opulence de la
LFP semble à nouveau faire basculer le pouvoir entre ses mains : en
contrepartie de l'augmentation des engagements financiers de la ligue envers le
football amateur adoptée en juillet 2005 lors de son assemblée
générale à Monaco, la ligue a obtenu de la FFF qu'elle
fasse aboutir d'ici 2007 plusieurs revendications :
- la création d'un championnat des réserves des
clubs professionnels;
- « l'amélioration » du
règlement financier de la Coupe de France ;
- l'indemnisation des clubs français lorsqu'ils mettent
à disposition des joueurs pour participer aux matches de l'équipe
de France ;
- la coopération entre clubs de National
(3ème division) et les clubs de Ligue 1 ou de Ligue 2.
147 Article 3.2.2. du Règlement Audiovisuel du 17 mai
2005.
148 Préambule du Règlement Audiovisuel du 17 mai
2005.
149 Article 12 du Règlement Audiovisuel du 17 mai 2005
150 Convention entre la Fédération Française
de Football et la Ligue de Football Professionnel du 30 juin 2002.
Autant de mesures vouées à développer la
compétitivité du football français en prenant appui sur le
formidable potentiel qui réside dans le football amateur grâce
à une école de formation performante.151
En outre, la FFF ne sera pas libre de dépenser les
nouvelles aides que lui a accordées la ligue : il s'agit en effet
d'aides ciblées visant particulièrement la formation. Les
sélections nationales de jeunes et espoirs français
bénéficieront ainsi d'une nouvelle subvention de 2,5 millions
d'euros dès 2006.
La LFP semble ainsi devenir le pilier d'un football
français qui gagne en confiance : les clubs professionnels sont en passe
de devenir de véritables compétiteurs et la relève tant en
équipes pro qu'en sélection nationale a été
favorisée.
1.2. L'aménagement de la fiscalité favorise
la compétitivité des clubs
1.2.1. L'impôt sur les sociétés moins
contraignant qu'il n'y paraît
a. Bref aperçu des modalités d'imposition des
clubs
> La SASP rentre dans le champ d'application de l'IS
Les SASP n'ont pas un régime fondé sur la
personnalité des associés car les actions sont librement
cessibles. La SASP fait donc partie des sociétés de capitaux.
Conformément au principe général
posé par l'article 206-1 du Code Général des Impôts,
les sociétés de capitaux sont passibles de l'impôt sur les
sociétés, même lorsqu'elles sont régies par une
réglementation particulière, sous réserve que celles-ci ne
comportent pas de dispositions fiscales dérogeant au droit commun.
L'Administration précise que l'assujettissement à
l'impôt sur les sociétés constitue le
régime fiscal normal des sociétés de capitaux et
assimilées. Il est motivé par leur forme et intervient
151 Fruit du travail de près de 300.000
bénévoles.
par conséquent quel que soit leur objet.152
Il convient d'appliquer ce régime aux sociétés par actions
(sociétés anonymes, sociétés par actions
simplifiées et sociétés en commandite par actions) et aux
sociétés à responsabilité limitée.
Par ailleurs, l'Administration explique que les
exonérations et dérogations au régime normal d'imposition
des personnes morales en cause ont été expressément
prévues par des dispositions légales particulières. Cela
exclut donc la SASP des régimes dérogatoires et permet d'affirmer
avec certitude que la SASP est soumise à l'impôt sur les
sociétés.
> Le calcul des bénéfices selon le régime
des bénéfices industriels et commerciaux
Pour la détermination du bénéfice
imposable, l'article 209 du CGI renvoie aux dispositions relatives au calcul
des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) auxquels sont
assujetties les personnes physiques153.
Le bénéfice imposable dans la catégorie des
BIC est un bénéfice net égal à la différence
entre les produits perçus par l'entreprise et les charges qu'elle
supporte.154
Aux termes de l'articles 38-1 du CGI, le
bénéfice imposable est défini de manière
très large : il englobe en effet « les opérations de
toute nature effectuées par l'entreprise, y compris notamment les
cessions d'éléments quelconque de l'actif ». Cela
soumet les bénéfices à imposition, qu'ils soient
réalisés dans le cadre de l'activité du club ou non.
> La comptabilisation des produits
Les ressources des clubs se présentent comme suit : -
droits télé (47%)
- sponsors / publicité (22%)
- matches (20%)
- autres produits (9%)
- subventions (4%)
152 D.adm. 4H-1111 n°4, 1er mars 1995
153 Articles 34 à 45, 53 A à 57 et 302 septies A
bis.
154 Articles 38-1 et 38-2 du CGI.
L'imposition de l'ensemble des produits ne pose pas de
problème sauf peut-être concernant les subventions versées
par les collectivités locales. La majeure partie des clubs de football
bénéficie en effet de subventions des collectivités
locales qui viennent augmenter leur budget.
A titre d'exemple, le Paris Saint Germain a reçu en
2004 une indemnité de 2,3 millions d'euros. Cette aide se compose d'une
subvention versée au titre d'une convention passée avec le PSG et
encadrant des missions d'intérêt général
assurées par le club de la capitale : formation, promotion du football
féminin, clubs filleuls, sécurité.
Cette subvention doit-elle être intégrée dans
la base d'imposition ?
L'Administration a précisé le régime des
subventions155 accordées par les collectivités
publiques qui consistent en une aide financière définitivement
acquise par l'entreprise. Elle rappelle à cet effet que le régime
des subventions dépend dans certains cas de règles
spéciales prévues dans le Code général des
impôts. En l'absence d'application de ces règles, il convient de
soumettre la subvention au droit commun. Or, les subventions de
collectivité locale aux sociétés sportives ne sont pas
prévues spécialement et ne semblent pas entrer dans le champ
d'application de l'un des régimes spéciaux visés par le
Code.
Selon la doctrine administrative, « ces subventions,
auxquelles aucune disposition particulière du CGI ne réserve un
traitement spécial, doivent être comprises dans les
résultats imposables de l'exercice au cours duquel elles ont
été acquises ».
> La comptabilisation des charges
A l'image des produits, la répartition des charges peut
être définie comme suit :
- rémunération du personnel (46%)
- services extérieurs (15%) - charges sociales (13%)
- autres charges (6%)
- frais déplacement (5%) - impôts et taxes (5%)
- achat marchandises (4%)
155 Dir. adm. 4 A-24
- amortissements et provisions (3%)
- frais d'organisation de matches (3%)
L'article 39-1 du CGI dispose que le bénéfice
net est établi sous déduction de toutes charges dont il donne une
liste non limitative. Mais contrairement aux produits, leur prise en compte
dans le calcul de l'assiette d'imposition n'est pas automatique.
L'Administration impose en effet que les frais et charges :
- soient << exposés dans l'intérêt
direct de l'exploitation ou se rattacher à la gestion normale de
l'entreprise. 156 >>
- correspondent << à une charge effective et
être appuyés de justifications suffisantes157
>>.
- se traduisent << par une diminution de l'actif net de
l'entreprise 158>>.
- soient << compris dans les charges de l'exercice au
cours duquel ils ont étéengagés
159>>.
> Précision concernant la déductibilité
des dépenses de personnel
En principe, dès lors que ces critères sont
remplis, le club pourra déduire les charges qu'il a constatées en
comptabilité pour calculer son résultat imposable. Il convient
toutefois d'étudier d'un peu plus près les dépenses de
personnel qui représentent 46% du budget et dont l'administration a
précisé les conditions de déductibilité.
Selon l'article 39-1-1°, << les
rémunérations directes ou indirectes, y compris les
indemnités, allocations, avantages en nature et remboursements de frais
» sont déductibles du résultat fiscal << dans
la mesure oil elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas
excessives eu égard à l'importance du service rendu
>>.
La question est donc de savoir si les
rémunérations diverses accordées aux joueurs de football
professionnels salariés ne pourraient pas être regardées
comme étant excessives au regard de l'Administration.
156 Dir. adm. 4 C-11
157 Dir. adm. 4 C-121
158 Dir. adm. 4 C-2
159 Dir. adm. 4 C-13
Pour déterminer si la rémunération n'est
pas excessive, des consignes sont données par l'Administration. D'une
part, la totalité des rémunérations doit être prise
en compte, même en nature. D'autre part, aux termes de la jurisprudence
du Conseil d'Etat, il convient de se baser sur certains critères : le
taux des rémunérations attribuées aux personnels occupant
des emplois analogues dans les entreprises similaires de la
région160, l'importance de la rémunération
totale161 ainsi que la nature des fonctions exercées ainsi
que les responsabilités du salarié162.
Eu égard à ces conditions, il semble possible de
faire passer en charge les salaires des joueurs, aussi importants soient-ils,
dans la mesure où il s'agit d'une pratique répandue que celle de
rémunérer les joueurs professionnel assez largement et parce que
la carrière d'un joueur dure en moyenne 6 à 10 ans au plus haut
niveau. Certes, il est possible de devenir entraîneur après une
carrière de joueur mais seul un petit nombre de personnes peuvent y
parvenir (il n'y a que 40 clubs professionnels en France et la question du
chômage des entraîneurs diplômés est d'ailleurs
d'actualité), alors que la reconversion est parfois abordée avec
difficulté par les anciens joueurs professionnel.
La rémunération des joueurs de football
professionnels consiste essentiellement en un salaire, des primes et des
avantages en nature. Selon l'Administration, les primes doivent être
considérées au même titre que la part relevant du
salaire163. Il suffit donc pour cette part de la
rémunération qu'elle suive les règles
générales.
Les avantages en nature sont variés : l'Administration
cite notamment les avantages suivants : « logement, chauffage,
éclairage, habillement, nourriture, mise à la disposition
temporaire ou permanente d'un chauffeur, d'ouvriers d'entretien (jardinier,
peintres, etc.), d'une voiture »164 et précise que ces
avantages sont déductibles suivant le régime des charges à
condition que soient respectées les conditions générales
énoncées ci avant.
A noter par ailleurs que l'Administration admet aussi que les
rémunérations allouées aux dirigeants soient admises en
déduction des résultats, dans la mesure où elles
correspondent à
160 CE, arrêts du 9 juillet 1986 req. n° 44724 ; du 21
avril 1989, req. n° 79682.
161 CE, arrêt du 14 avril 1970, req. n°s 75687 et
75688, RJ II, p. 79.
162 CE, arrêt du 21 avril 1989, req. n° 79682.
163 Dir. adm. 4 C-442
164 Dir. adm. 4 C-4452
des services effectifs et ne sont pas excessives. Il existe
cependant une limite concernant les jetons de présence.
> Le calcul de l'IS
Une fois ces opérations terminées, il faut
appliquer à l'ensemble des bénéfices imposables un taux de
33,1/3 % sauf aux plus-values à long terme qui bénéficient
d'un taux de 8 %.165
b. Le régime de groupe avantageux pour les
investisseurs
La majeur partie des clubs n'a qu'un actionnaire majoritaire
ou fait partie d'un groupe de sociétés. Or, il existe un
régime particulier concernant les groupes de sociétés
défini par les articles 223-A à 223-U du code
général des impôts destiné à mieux assurer la
neutralité de la fiscalité à l'égard des structures
économiques et à renforcer la compétitivité des
entreprises françaises.
Ce régime est intéressant pour les actionnaires
des clubs français car lorsque ceux-ci réalisent un
bénéfice, le régime mère-fille permet le versement
de dividendes en franchise d'impôt, tandis que lorsque le club est
fiscalement déficitaire, l'actionnaire pourra imputer ce déficit
sur son bénéfice fiscal grâce au régime de
l'intégration fiscale.
> La compensation entre déficits et
bénéfices fiscaux des sociétés du groupe
Le régime de l'intégration fiscale est
défini aux articles 223 A à 223 G du Code général
des impôts. Il permet à une société (dite «
tête de groupe ») de se constituer seule redevable de
l'impôt sur les sociétés dû sur l'ensemble des
résultats du groupe formé par elle-même et les
sociétés dont elle détient au moins 95% du capital.
Ainsi, au lieu que chaque société du groupe soit
imposée séparément, ce régime permet de concentrer
l'imposition sur la tête de groupe après que chaque
société ait calculé son résultat propre. De fait,
cela peut permettre une compensation entre les bénéfices et
déficits de chaque société du groupe.
165 A noter que ce taux sera supprimé dès 2007.
Pour bénéficier de ce régime, l'article
223-A impose une participation au sein du capital du club de plus de 95%.
Toutefois, la participation en question peut être indirecte,
c'est-à-dire par le biais d'une autre filiale. On prendra alors en
compte la participation de la société mère dans la filiale
et la participation de la filiale dans le club afin de connaître le
« poids » de la société mère dans le
club grâce à cette participation indirecte. Enfin, la
société tête de groupe ne doit pas être
détenue à plus de 95% par une autre société et
être soumise à l'IS.
L'application de ce régime résulte par ailleurs
d'une option de cinq ans renouvelable par tacite reconduction prise par la
société tête de groupe avec l'accord des filiales.
Aux termes de l'article 223 B, chaque société
continue à calculer leur bénéfice imposable selon le droit
commun en matière d'IS, puis certaines corrections devront avoir lieu
pour corriger le phénomène de double imposition ou de double
déduction qui pourrait résulter des opérations
intra-groupe notamment. Et selon l'article 223 C du CGI, le
bénéfice d'ensemble est imposé au droit commun de l'IS.
En cas de déficit, celui-ci est aussi reportable dans
les conditions de droit commun, c'est-àdire indéfiniment pour les
exercices ouverts depuis le 1er janvier 2004. La
société mère souscrit alors une déclaration pour
l'ensemble du groupe et est chargée du paiement de l'impôt.
Il en résulte pour une société
actionnaire d'un club une certaine sécurité. En effet, si son
club enregistre des pertes au cours d'un exercice, elle pourra déduire
le déficit fiscal du club de son bénéfice fiscal et ainsi
réaliser une économie en termes d'impôts qui pourra
contrebalancer les investissements réalisés au cours de
l'année.
> L'exonération de la distribution de dividendes
Grâce au régime mère fille, prévu
aux articles 216 et suivants du CGI, les dividendes versés par un club
bénéficiaire pourront être versés en quasi franchise
d'impôts et les abandons de créance au profit du club pourront
être déductibles du résultat imposable.
L'application de ce régime suppose le respect l'article
145 du CGI :
- les titres de participation doivent revêtir la forme
nominative ;
- la société mère doit disposer d'au moins
5% du capital de la fille ;
- si les titres n'ont pas été souscrits à
l'émission, la société mère doit s'engager à
les garder pendant deux ans.
Concernant la déductibilité des dividendes,
l'idée est relativement simple : éviter qu'une même
personne soit imposée deux fois au titre d'un même revenu. En
effet, les dividendes étant distribués après paiement de
l'impôt, si le bénéficiaire personne morale doit inclure
dans son bénéfice imposable ce produit, alors il y aura double
imposition. Lorsque le régime mère fille trouve à
s'appliquer, la société mère pourra donc retrancher de son
bénéfice net total le montant du dividende reçu.
Toutefois, il sera nécessaire de
réintégrer une << quote part pour frais et charges
>> de 5% de son montant, laquelle est censée correspondre, selon
la doctrine administrative, aux charges afférentes aux produits de
participation qu'elles ont perçus et extournés du résultat
fiscal.
Cet aspect relativement attrayant est de surcroît
accompagné d'un autre avantage, la déductibilité des
remises de dette ou subventions sous certaines conditions (ce point ne sera pas
vu en détail).
1.2.2. Les allègements fiscaux spécialement
conçus pour les clubs
a. La diminution du poids des charges sociales grâce
au droit à l'image collectif
> La reconnaissance d'une demande récurrente
Dès 1996, l'union professionnelle des clubs de football
professionnel français a fait réaliser une étude faisant
apparaître << qu'outre une différence de puissance
économique qui permettait aux clubs étrangers de mieux
rémunérer leurs joueurs, il existait, au détriment de la
France, d'importantes disparités de régimes fiscaux et sociaux,
touchant notamment les charges patronales. >>166
Dès lors, l'UCPF a proposé de << faire échapper
à la législation du travail et de la sécurité
sociale une fraction de la rémunération perçue par le
sportif professionnel, représentative de l'exploitation de son image par
son employeur >>.
166 Le droit à l'image des sportifs professionnels,
service des affaires européennes, septembre 1997.
En fait, cela aboutissait à suivre l'exemple de nos
voisins européens (Allemagne, RoyaumeUni, Italie et Espagne) dans
lesquels l'exploitation des droits à l'image se faisait
déjà hors du contrat de travail, l'Espagne permettant même
aux joueurs de percevoir une participation aux bénéfices obtenus
en contrepartie de l'exploitation commerciale de leur image alors que l'Italie
envisageait d'exonérer de charges sociales la fraction supérieure
à 650 000 euros.167
> La loi corrige l'utilisation imparfaite et parfois abusive
du droit à l'image
Lors de débats parlementaires, la commission aux
affaires culturelles fit remarquer que paradoxalement, le droit à
l'image ne profitait qu'à une dizaine d'individus alors que le football
est par essence un sport collectif. Or, la valorisation de l'image s'est
nettement développée sous l'influence du choix des clubs de
diversifier leurs recettes grâce notamment aux produits
dérivés de leurs marques et au sponsoring.
De ce point de vue, l'adoption d'une loi permettant de
rémunérer les joueurs grâce à l'image collective,
celle de l'équipe, paraissait en totale harmonie avec la vision
française du sport : le mot d'ordre étant en effet la
solidarité.
En outre, les clubs voient depuis longtemps dans le droit
à l'image le moyen de soustraire une fraction de la
rémunération du joueur aux charges sociales. Des montages
sociétaires ont ainsi été créés en vue de
reverser indirectement au joueur un surplus de rémunération via
une société au titre de son droit à l'image. Etonnamment,
l'administration a autorisé cette pratique dans une circulaire du 28
juillet 1994 prévoyant que « certains clubs [pouvaient] assurer
une partie de la rémunération au joueur, sous forme d'un
versement à une société domiciliée en France ou
à l'étranger, chargée d'exploiter le droit à
l'image de celui-ci ».
Cependant, cette pratique n'était permise qu'autant que
les clubs versaient les charges sociales relatives à ce que
l'administration considérait comme des rémunérations
découlant du salaire des joueurs.
167 Le droit à l'image des sportifs professionnels,
service des affaires européennes, septembre 1997
> Le droit à l'image fait échapper 30% du
salaire brut total aux charges sociales
La loi du 15 décembre 2004 portant diverses
dispositions relatives au sport professionnel permet désormais aux
sociétés sportives de verser une partie de la
rémunération du joueur sans être soumises au paiement de
charges sociales.168 Le nouvel article L 785-1 du code du travail
précise en effet que « n'est pas considérée comme
salaire la part de la rémunération versée à un
sportif professionnel par une société [sportive], et qui
correspond à la commercialisation par ladite société de
l'image collective de l'équipe à laquelle le sportif appartient.
»
En principe, les modalités de fixation de la part de
cette rémunération doivent être fixées au moyen
d'une convention collective en fonction des recettes commerciales
générées par l'exploitation de l'image collective de
l'équipe sportive. La charte du football professionnel, qui a valeur de
convention collective a récemment été modifiée pour
permettre l'application rapide de ce texte.169
Depuis février 2005, les recettes de parrainage, de
publicité et de merchandising ainsi que celles provenant de la cession
des droits de retransmission audiovisuelle des compétitions peuvent
servir à rémunérer les joueurs, dans la limité
toutefois de 30% de la rémunération brute totale y compris les
primes de toute nature.
Il convient toutefois d'apporter quelques précisions :
l'article L 785-1 du code du travail prévoit que la part de
rémunération correspondant à la commercialisation de
l'image collective de l'équipe ne s'applique pas « à la
part de rémunération inférieure à un seuil
fixé par les convention collectives », désormais
fixé à 120.000 euros par le nouvel article 750 bis de la charte
du football professionnel.
Prenons l'exemple d'un joueur qui perçoit
habituellement 150.000 euros par an. La part de son salaire versée sous
forme de droits à l'image collective ne peut pas aller au-delà
des limites fixées par la loi, soit 30%, donc 45.000 euros. Si la
société souhaite réaliser une économie de charges
sociales en remplaçant une partie de son salaire par cette
rémunération, elle pourra lui verser un salaire de 105.000 euros
et une rémunération liée à son droit à
168 Loi n°2004-1366 du 15 décembre 2004.
169 Dossier : « droit à l'image collectif : les
questions dans les vestiaires », Denis Provost et
Frédéric Chatzle, sur le site de l'Union Financière de
France.
l'image de 45.000 euros. Mais le seuil fixé par la LFP
ne permet aux clubs de reverser les produits de la commercialisation des droits
à l'image collective que lorsque le montant du salaire excède
120.000 euros. En l'espèce, la somme ainsi distribuée au joueur
au titre de ces droits à l'image ne pourra être que de 30.000
euros (150.000 - 120.000), et le salaire devra donc d'élever à
120.000 euros.
> La rémunération moyenne devrait augmenter
L'opportunité ainsi offerte aux clubs aura certainement
deux effets distincts : d'une part, les joueurs déjà liés
au clubs devraient voir leur contrat de travail modifié pour que 30% de
leur rémunération annuelle soit désormais issue de la
commercialisation des droits télévisés. Denis Provost
pense que l'introduction de ce nouveau système « conduira
à une augmentation des rémunérations globales des
sportifs, dans la mesure où ceux-ci et leurs agents pourront faire
pression sur les clubs (sociétés sportives) afin qu'ils
redistribuent sous forme de suppléments de salaires une partie de
l'économie de charges sociales réalisée sur la part du
droit à l'image collective. »170 On peut imaginer
que cette hausse se situera autour de 15% selon l'importance du joueur. D'autre
part, lorsqu'un club français tente d'attirer un joueur dont les revenus
sont déjà élevés, cela pourrait conduire à
garder une base salariale élevée et à y ajouter ces fameux
30%.
> La majorité des joueurs serait perdante
Selon la notoriété d'un joueur, les
négociations avec le club seront distinctes : quand l'un verra son
salaire actuel augmenter de 20 à 25%, l'autre ne
bénéficiera peut-être que d'une augmentation de 5%.
Par ailleurs, cette part dans la rémunération du
joueur n'est pas à son avantage. Il ne pourra plus
bénéficier des abattements de 10 et 20% sur les salaires et la
diminution de la base des cotisations pourra « entraîner une
réduction des droits sociaux tel qu'allocations de chômage, de
retraite complémentaire, indemnités journalières en cas
d'accident du travail ». Ces différentes modifications dans la
situation du joueur devront être compensées par une augmentation
de sa rémunération sans quoi il se trouvera
lésé.
170 Dossier : « droit à l'image collectif : les
questions dans les vestiaires », Denis Provost et
Frédéric Chatzle, sur le site de l'Union Financière de
France.
b. La suppression de la taxe de 1% sur les contrats
à durée déterminée (CDD)
Aux termes de l'article L 931-20 du code du travail, les
employeurs doivent verser à l'Etat une taxe spécifique de 1% sur
les contrats à durée déterminée. L'objectif de
cette disposition introduite en 1990 était de favoriser la
stabilité de l'emploi en incitant à recourir au contrat à
durée indéterminée.
Or, il ressort de la pratique sportive que le CDD est devenu
la norme alors que dans le même temps, la loi et la jurisprudence font
exception à la législation applicable aux CDD lorsqu'il s'agit de
contrats de travail conclus avec des sportifs ou
entraîneurs.171 En outre, la charte du football impose aux
clubs d'embaucher leurs joueurs en CDD, sans quoi le contrat ne sera pas
homologué par la ligue.
Cette taxe ne présentant plus aucun fondement, le
législateur a décidé de la supprimer en insérant
dans le code du travail un nouvel article L 785-3. Les modifications d'ordre
fiscal tendent ainsi à réduire les charges qui pèsent sur
les clubs, dont la situation financière devrait nettement progresser
grâce à de nouveaux produits et à une gestion plus
saine.
Cependant, cela ne devrait pas suffire à permettre aux
clubs de rivaliser à armes égales avec leurs homologues
européens car la prise de sanctions à l'encontre des clubs qui
présentent des bilans financiers révélant un
déficit trop élevé n'existe qu'en Allemagne, en Belgique
et en France, ce qui fosse la concurrence. L'UEFA tente donc de mettre en place
un système plus équitable, en se fondant notamment sur le
modèle présenté par le football français.
171 L'article L 122-1-1 du code du travail autorise la
qualification de contrat d'usage pour contrats conclus dans le cadre du sport
professionnel.
2. Un nouveau cadre européen pour une
concurrence loyale
Malgré les évolutions juridiques et fiscales
adoptées par l'Etat pour permettre aux clubs français de devenir
plus compétitifs et les progrès réalisés par les
clubs en matière de gestion, il est fort probable que les clubs
français ne puissent pas suivre la cadence imposée par la
concurrence du fait du manque de contrôle au niveau européen qui
permet à certains clubs de jouer une Coupe d'Europe alors qu'ils ne sont
plus capables de payer le salaire des joueurs.
L'UEFA a réagi pour créer un instrument de
contrôle : la licence UEFA qui touche à de nombreux aspects dont
le domaine financier. Cette avancée historique ne satisfait cependant
pas tous les acteurs du football professionnel européen, dont une partie
réclame plus de fermeté.
2.1. L'UEFA organise un contrôle inspiré du
modèle français
L'UEFA a décidé de mettre en place une
procédure de contrôle des clubs visant à garantir que seuls
les clubs financièrement sains, axés sur la promotion des jeunes
et planifiant à long terme pourront participer aux compétitions
européennes inter-clubs.
2.1.1. La concurrence entre les clubs était devenue
déloyale
a. La situation financière du football
européen est suicidaire > Des charges en constante augmentation
La concurrence pour attirer les meilleurs joueurs
couplée à l'augmentation exponentielle des droits
télévisés a poussé les clubs à
surenchérir, tant au niveau du salaire des joueurs que sur le montant
des transferts. Ainsi, entre 2000 et 2002, pas moins de 10 joueurs ont
été vendus par leur club pour des sommes oscillant entre 45 et 75
millions d'euros.172 A noter qu'après une accalmie, Chelsea
aurait proposé à l'été 2005 la somme de 70 millions
pour engager le barcelonais Samuel Eto'o et 85 millions pour le milanais Andrei
Shevchenko.173
172 Source :
www.sport.fr
173 Article : « Chelsea veut s'offrir Shevchenko », sur
www.eurosport.fr
Concernant la masse salariale, le phénomène est
identique : lors de la saison 1995/1996, aucun championnat européen
n'enregistrait pour l'ensemble de ses clubs une dépense salariale
supérieure à 250 millions d'euros. En 2004, celle-ci
s'élevait à 600 millions pour l'Espagne, 850 millions pour
l'Italie et 1,2 milliard d'euros pour le Royaume-Uni.174
> Un déficit devenu pharaonique
Dans le même temps, mis à part au Royaume-Uni, le
chiffre d'affaires a cessé sa progression à partir de
l'année 2000. Or, les clubs s'étant engagés auprès
des joueurs pendant une durée qui varie entre 2 et 4 ans, ils ont
accumulé des déficits importants.
Selon le quotidien EL PAIS, la moitié des clubs de
football professionnels espagnols étaient en faillite virtuelle en 2002.
En 2003, le seul club du FC Barcelone totalisait une perte de 163 millions
d'euros, soit l'équivalent des pertes supportées par le
championnat français dans le même temps, alors que son grand rival
le Real Madrid était contraint de vendre une partie de ses biens
immobiliers situés en plein coeur de Madrid pour la somme de 600
millions d'euros.
Malheureusement, tous les clubs n'ont pas la chance de
posséder de telles immobilisations. En Italie par exemple, le
Gouvernement a adopté en 2003 un décret « Salva Calcio
» permettant aux clubs italiens d'amortir sur une durée de dix ans
les pertes dues à la dévaluation de leurs joueurs afin
d'éviter une faillite en chaîne.175
Enfin, entre 2000 et 2004, le résultat cumulé
des 5 grands championnats européens serait passé d'une situation
bénéficiaire à hauteur de 24 millions d'euros à un
déficit de presque 1 milliard d'euros.176
b. La concurrence faussée par la présence de
clubs au bord du dépôt de bilan
> Les clubs sains handicapés
Lors des compétitions européennes, les clubs qui
brillent le plus sont souvent les plus riches car comme nous l'avons
répété, ils sont plus à même d'attirer les
meilleurs joueurs. Cela est
174 (( Pour un contrôle de gestion des clubs au niveau
européen », juin 2005, LFP
175 Cela signifie « Sauve - Calcio », le Calcio
étant le surnom donné au championnat italien.
176 (( Pour un contrôle de gestion des clubs au niveau
européen », juin 2005, LFP
donc un obstacle pour les clubs français puisque la DNCG
veille à ce qu'ils respectent les règles d'équilibre
financier.
En outre, ayant attiré les meilleurs joueurs, ces
équipes font souvent bonne figure en Champions League. Or, comme le fait
remarquer la LFP, cela aboutit à « priver de recettes les clubs
au comportement loyal » et contribue à pérenniser une
telle situation de domination de la part de ces clubs.
> Les championnats bien gérés
pénalisés
Enfin, comme cela a été dit plus tôt, le
championnat français est pénalisé puisque le nombre de
clubs de chaque pays admis à participer aux Coupes d'Europe est
calculé selon leurs précédents résultats.
Afin de sortir de ce cercle vicieux, l'UEFA a
décidé de prendre certaines mesures.
2.1.2. L'instauration d'une licence UEFA
a. Les objectifs de la licence
> La licence UEFA devient nécessaire pour participer
aux Coupes d'Europe
Afin de garantir une concurrence plus saine, l'UEFA impose
désormais aux clubs de disposer d'une licence octroyée selon des
critères fixés dans le manuel UEFA. Les clubs ont
désormais à leur charge l'obligation de respecter une
série de critères juridiques, administratifs, financiers et
d'infrastructure et sont soumis à une obligation d'information à
l'égard des commissions chargées de les contrôler.
Applicable depuis 2004/2005, la licence UEFA devrait entrer dans une
deuxième phase de contrôle financier plus strict dès
2008/2009.
> Objectifs
« La procédure certifiée est un gage de
qualité du service proposé et assure la cohérence de
l'ensemble du système au niveau européen pour une
égalité de traitement entre les clubs disputant ces
compétitions ».177
177 Manuel national pour l'octroi de la licence « UEFA
club » édité par la FFF.
Les objectifs de l'UEFA sont notamment de :
- renforcer la capacité économique et
financière des clubs ; - assurer une gestion transparente et plus
crédible des clubs ; - contrôler l'équité
financière dans les compétitions UEFA ; - promouvoir et
améliorer le niveau sportif du football en Europe.
b. Les domaines du contrôle
> L'autorisation de la licence surtout fondée sur
l'infrastructure
La procédure d'octroi de la licence prend en compte
plusieurs critères mais le plus traité est celui relatif à
la sécurité des spectateurs et des joueurs dans les stades : sont
concernées la capacité d'accueil, la présence d'une
équipe de sécurité habilité à exercer une
surveillance grâce à un système de
vidéosurveillance, la conformité du plan d'évacuation,
l'existence de locaux de premier secours, etc.178
Le critère sportif impose aux clubs désireux de
participer à une compétition européenne de mettre en place
un programme de formation qui permette aux jeunes de suivre un enseignement
scolaire.179
Une équipe d'encadrement administratif est
imposée afin que les clubs soient gérés de manière
professionnelle et que les joueurs disposent d'un accès aux soins et
d'un encadrement technique compétent.180
Enfin, l'UEFA met à la charge des clubs l'obligation de
présenter certains documents juridiques tels les statuts à jour,
des engagements de respecter les obligations qui leurs sont imparties en vertu
de la licence UEFA, une attestation de l'exactitude des renseignements fournis,
etc.181
178 Article 10 du manuel national pour l'octroi de la licence
« UEFA club ».
179 Article 9 du manuel national pour l'octroi de la licence
« UEFA club ».
180 Article 11 du manuel national pour l'octroi de la licence
« UEFA club ».
181 Article 12 du manuel national pour l'octroi de la licence
« UEFA club ».
> Le contrôle financier permet cependant d'assurer plus
d'équité
Parmi les engagements qui pèsent sur les clubs, l'UEFA
a instauré des « dispositions obligatoires relatives à
la tenue de la comptabilité, aux procédures de contrôle et
à la production de documents ».182
L'obligation principale est d'établir des comptes
annuels et une situation intermédiaire comptable conformément
à la législation en matière comptable. Accessoirement, les
clubs devront enregistrer toutes les factures et présenter leurs
documents comptables lorsque cela leur sera demandé. Mais l'apport
majeur est certainement relatif à l'obligation qui est faite aux clubs
de présenter à certaines dates des documents attestant qu'ils ne
sont plus redevables envers leurs employés d'aucun engagement, ou
même envers d'autres clubs au titre des indemnités de
transfert.
A partir de 2008/2009, la licence UEFA entrera dans une phase
2 qui obligera alors les clubs à présenter des comptes
prévisionnels en plus des comptes annuels audités chaque
année, ce qui induit un contrôle préventif de la situation
financière des clubs.183
182 Article 13 du manuel national pour l'octroi de la licence
« UEFA club ».
183 « Pour un contrôle de gestion des clubs au
niveau européen », juin 2005, LFP
2.2. Les débats autour du modèle
économique européen
2.2.1. La LFP souhaite la création d'une commission
de contrôle européenne
a. Les limites de la licence UEFA
> L'impartialité des instances nationales en
question
Conformément aux règles édictées
par l'UEFA, les licences sont gérées par les
fédérations nationales, chargées d'assister une ou
plusieurs commissions désignées pour l'octroi des licences.
Cependant, elles peuvent déléguer leurs compétences aux
ligues, elles-mêmes représentantes des clubs, ce qui pose un
problème d'impartialité dans le contrôle des normes
auxquelles doivent satisfaire les clubs. Or, « l'indépendance
d'une instance de contrôle de gestion est une condition viqh q xd qr q
pour garantir une action efficace ».184
On a par ailleurs constaté que la
Fédération Française de Football avait déjà
commis des irrégularités en matière de concurrence en vue
de permettre un meilleur développement du football français, et
il n'est pas exclu qu'une autre fédération puisse permettre
à ses clubs d'accéder à une compétition
européenne alors qu'elle ne dispose pas d'une santé
financière pourtant nécessaire.
> Les sanctions seraient inadaptées
Selon la LFP, les sanctions prévues ne sont pas
adéquates car elles ne comportent pas de barème progressif
permettant d'apporter une correction à la situation des clubs. Elle
préconise à cet effet d'instaurer un tel système, dont le
contrôle serait assuré par un organe européen, ce qui
éviterait les divergences entre les Etats.
184 « Pour un contrôle de gestion des clubs au
niveau européen », juin 2005, LFP
b. La création d'une commission nécessaire
à une concurrence loyale
> Une nouvelle entité attachée à
l'UEFA
Depuis plusieurs années maintenant, la LFP plaide pour
l'instauration d'un organe de contrôle de gestion comparable à la
DNCG française au niveau européen. Frédéric Thiriez
expliquait cette position : « il faut que les règles soient les
mêmes pour tous. Aujourd'hui ce n'est pas le cas et il y a distorsion de
concurrence. Mais à l'exception de la France, l'Allemagne et la
Belgique, les grands pays de football n'y tiennent pas beaucoup » et
il comptait beaucoup sur l'adoption de la Constitution européenne
sensée « promouvoir l'équité dans les
compétitions sportives ».185
Le Président de la DNCG abondait dans son sens :
« il faut donc avec encore plus de vigueur continuer à plaider
en faveur d'une commission de contrôle européenne unique, seule
à même de garantir, en toute indépendance et
impartialité, à l'image de nôtre instance française,
que les compétitions auxquelles prennent part les équipes
françaises se déroulent également loyales au plan
financier ».
> La réalisation de véritables audits
financiers
Dans le cadre de leur mission qui se déroulerait avant
le début de la saison, les experts membres de la commission de
contrôle pourraient s'appuyer sur tous les documents financiers
nécessaires à la connaissance parfaite de chaque club :
états financiers, informations prévisionnelles, etc. En cas de
mauvaise gestion de la part d'un club, ils pourraient lui infliger une amende,
une interdiction d'inscrire de nouveaux joueurs pour participer aux
compétitions européennes, la perte d'un statut de tête de
série ou même l'exclusion de la compétition.
2.2.2. Les autres suggestions visant à
rétablir la concurrence
a. Plafonner la masse salariale globale
En s'appuyant sur l'exemple des Etats-Unis « oil sport
et Business semblent vivre en harmonie », Jean-François
Bourg, Professeur des Universités, proposait d'instaurer
un « salary cap » afin de plafonner la
rémunération des joueurs. Cette idée semble toutefois
185 Article paru le 12 mai 2004 dans La Tribune.
difficile d'application dans la mesure où la charge
supportée par un club liée au reversement du salaire des joueurs
diffère selon la fiscalité de chaque Etat. Il serait en effet
nécessaire de prévoir un plafond relatif ou établi selon
les normes en vigueur pour éviter une rigidité qui
pèserait sur certains clubs.
Parallèlement, il serait possible de limiter la masse
salariale globale d'une équipe à un pourcentage des recettes
touchées par les clubs. Cela contribuerait à garantir une
meilleure gestion et à éviter les abus qui permettent à
certains de retirer un avantage compétitif.
b. La remise en cause de la liberté de circulation des
joueurs
Dans la mesure où la crise que traverse le football
français est en grande partie due à la mise en concurrence des
clubs sur un marché unique, certains proposent d'atténuer les
effets de cette jurisprudence en proposant d'instaurer à nouveau des
quotas pour limiter le nombre de joueurs étrangers. Ils justifient
notamment cette possibilité du fait que la formation est en danger car
les joueurs peinent à éclore face à une concurrence
très vive, ce qui nuit aussi aux équipes nationales. Sur ce
fondement, la CJCE pourrait être amenée à faire une entorse
à la règle de libre circulation des personnes au sein de l'Europe
communautaire.
L'UEFA pourrait alors adopter un nouveau règlement
visant à imposer aux clubs qu'un certain nombre de leurs joueurs soit
formés au club, ce qui limiterait de facto la circulation des
joueurs.
Si une telle limitation venait à être
adoptée, cela bénéficierait peut-être aux clubs
français mais ne résoudrait pas le problème devenu majeur
aujourd'hui : préserver une concurrence saine entre les clubs à
travers un contrôle financer pour assurer un équilibre
nécessaire à l'intérêt de toute
compétition.
Index
Accord de Cotonou : p. 11
Appel public à l'épargne : p. 40
Association :
- # convention avec la société : p. 22
- # seuils : p. 21
Arrêt :
- # Bosman : p. 6 - 10
- # Kolpak : p. 10
- # Malaja : p. 10
- # Simutenkov : p. 10
Clause de nationalité : p. 9
Contrat de progrès : p. 17
Cotation en Bourse : p. 40
Cour des comptes : p. 56
Déficit : p. 47 - 74
DNCG :
- # composition : p. 52
- # mission : p. 52
- # rôle : p. 54
- # sanctions : p. 53
Droits audiovisuels :
- # propriété : p. 36
- # répartition : p. 37
- # taxe « Buffet » : p. 18 FFF
:
- # Enquête judiciaire : p. 58
- # gestion irrégulière : p. 56
- # mission de service public : p. 55
- # Comptes non validés : p. 57
Formation : p. 16
Impôt sur le revenu : p. 8
Impôt de Solidarité sur la Fortune
: p. 8 Impôt sur les Sociétés :
- # charges : p. 64
- # dépenses de personnel : p. 65
- # exonération des dividendes : p. 68
- # intégration fiscale : p. 67 # produits : p. 63
- # subventions : p. 64 Investissement (risque)
: p. 15 Investisseur « à fonds perdus
» : p. 16 Joueurs :
- # droit à l'image : p. 69
- # impôt sur le revenu : p. 7
Liberté de circulation : p. 11
Licence UEFA :
- # contrôle : 78
- # domaine : p. 77
- # limites : p. 79
- # objectif : p. 76 LFP :
- # mission : p. 59
- # négociation des droits TV : p. 60
- # nouveau rôle : p. 61 Ligue des
Champions : p. 12-13
Marché unique : p. 10
Merchandising : p. 38
Multipropriété : p. 34 Numéro
d'affiliation : p. 34 Notion de contrôle :
- # conjoint : p. 35
- # exclusif : p. 35
- # notable : p. 35 Performances: p. 14
SAOS : p. 23 - 24
SASP :
- # à conseil d'administration : p. 30
- # à conseil de surveillance : p. 31
- # apports majeurs : p. 28
- # impôt sur les sociétés : p. 60
- # statuts type : p. 26
- # spécificités : p. 27 SEMLS :
p. 23 - 24
SEURL : p. 23 - 25
Bibliographie
Lois :
Loi « MAZEAUD » n° 75-988 du 29 octobre
1975.
Loi n° 84-610 du 16 juillet 1984.
Loi n° 94-679 du 8 août 1994.
Loi n° 99-1124 du 28 décembre 1999.
Loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001.
Loi n° 2003-708 du 1er août 2003.
Loi n° 2004-1366 du 15 décembre 2004.
Décrets :
Décret n° 86-409 du 11 mars 1986 modifié par
le décret n° 2002-608 du 24 avril 2002. Décret n° 96-71
du 27 janvier 1996.
Décret n° 98-880 du 1er octobre 1998
modifié par décret n° 2001-96 du 2 février 2001.
Décret n° 2001-149 du 16 février 2001.
Décret n° 2004-550 du 14 juin 2004.
Décret n°2004-699 du 15 juillet 2004.
Communiqués :
Communiqué du Conseil de la
Concurrence du 18 février 2005.
Rapports :
Rapport de Monsieur Jean-Pierre Denis,
inspecteur des finances, « Certains aspects du sport professionnel en
France », novembre 2003.
Rapport de Monsieur Yves Collin,
« Quels arbitrages pour le football professionnel ? Les
problèmes liés au développement économique du
football professionnel », juin 2004.
Rapport de la DNCG : <<
Comptes des clubs professionnels, saison 2003/2004 », mars 2005.
Rapport de la DNCG : << Comptes des clubs
professionnels, saison 2004/2005 », mars 2006. Rapport de la
LFP << Situation du football
français - saison 2003/2004 », mars 2005. Rapport de la
LFP << Situation du football
français - saison 2004/2005 », mars 2006.
Rapport de la LFP << Pour un
contrôle de gestion des clubs au niveau européen », juin
2005. Rapport de la LFP « 2002 - 2005, trois
années de progrès », juin 2005.
Rapport de la LFP « 600
millions pour quoi faire ? », juin 2005.
Rapport du Sénat «
Compte rendu analytique officiel de la séance du 24 novembre 2004
». Rapport du Sénat
sur le projet de loi de finances 2005, séance du 25 novembre 2004.
Rapport du Ministère des Sports «Le
poids économique du sport en 2000 », Septembre 2002.
Rapport annuel de la Cour des comptes
« Fédération Française de Football », 2001.
Rapport public de la Cour des comptes «
Sports », 2003.
Etudes :
Etude de Deloitte << Football Money League
- Changing of the guard », février 2006.
Etude de CSC « Etude de cas,
Paris Saint Germain, CSC aide le PSG à fidéliser ses supporters
et à développer son capital clients », 2001.
Etude d'Oracle CRM « Comment
le Paris Saint Germain a appris à mieux connaître et à
fidéliser ses supporters grâce à Oracle CRM »,
2001.
Mémoires :
Mémoire de Vincent
Couvelaere « Les stratégies de marque des clubs
sportifs professionnels, étude de cas du football français
», 2003.
Mémoire de Christophe Durand
« Soutien aux entreprises de spectacle sportif par les
collectivités locales : quelle liberté pour les élus ?
», 2000.
Mémoire de Louis Frédéric
Doyer << L'Union Européenne et le sport,
l'arrêt Bosman ».
Quotidiens / presse :
<< Les dispositions relatives au sport
professionnel », Aquitaine Sport.
<< Les aspects juridiques de la gestion
économique des clubs sportifs professionnels : l'adoption d'une nouvelle
loi », Gérard Auneau, La semaine juridique Edition
Générale, 29 mars 2000.
« Ces patrons qui ruinent le football »,
L'Expansion, 1er juin 2002.
« Le gendarme du championnat sanctionne 19 clubs
»,
Libération.fr,
30 juin 2003. « Sommation contre les salaires », Le Web
de l'Humanité, 21 avril 2005.
« Jean-Michel Aulas : les affinités du sport et
de l'entreprise », Marie-Annick Depagneux et Gilles Sengès,
Les Echos, 2 mai 2005.
<< Les arrêts de la CJCE en droit du sport
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