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Les doyens ruraux dans le diocèse de liège au moyen àąge. Contribution à  l'histoire politique et religieuse du monde rural.

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par Vincent BASTIN
Université de Liège - Licence en histoire 2000
  

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§2. Les évêques de Tongres, Maastricht et Liège, de Falcon à Etienne.

D'un point de vue géographique, les limites du diocèse de Tongres correspondent donc originellement à celles de la civitas Tungrorum, qui s'étend de Revin (aujourd'hui en France, dans le département des Ardennes) à Westmaas (près de Rotterdam).10 Maastricht

5. PALANQUE, J.-R., PARDY, G. et LABRIOLLE, P., De la paix constantinienne à la mort de Théodose, dans Histoire de l'Eglise des origines à nos jours, sous la direction de FLICHE, A. et MARTIN, V., t. 3, Paris, 1936, pp. 438 et 441.

6. DE MOREAU, E., Ibid., pp. 1-3.

7. PALANQUE, J.-R., PARDY, G. et LABRIOLLE, P., Ibid, pp. 437-439.

8. BOEREN, P. C., les Evêques de Tongres-Maastricht, dans la Christianisation des pays entre Loire et Rhin (IVe-VIIIe s.), actes du colloque de Nanterre (3 et 4 mai 1974), 2e éd., Paris, 1993, pp. 28-30. DE MOREAU, E., Ibid., pp. 31-39. KUPPER, J.-L., dans Series episcoporum ecclesiae catholicae occidentalis, série 5, Germania, t. 1, Archiepiscopatus Coloniensis, Stuttgart, 1982, pp. 48-49.

9. BOEREN, P. C., Ibid., p. 30. DARIS, J., Histoire du diocèse et de la principauté de Liège, t. 1, Des origines jusqu'au XIIIe siècle, Bruxelles, 1974, pp. 31-40. PAQUAY, J., les Origines chrétiennes dans le diocèse de Tongres, dans B.S.S.L.L., t. 27, Tongres, 1909, p. 90.

10. BOEREN, P. C., Ibid., p. 25.

devient la résidence préférée des évêques, de par sa position stratégique sur la Meuse, son dynamisme économique et le culte de ce saint qui s'y est développé entre-temps.11 D'autres demeures épiscopales ont vu le jour, notamment à Liège, à Huy, à Namur, à Dinant et à Givet.12

Le christianisme se définit comme un phénomène essentiellement urbain et propre aux membres de l'aristocratie.13 Contrairement à la ville, la campagne se ferme traditionnelle- ment aux nouvelles doctrines. Une des préoccupations majeures des évêques, mais aussi des maires du palais et des rois,14 sera donc de lutter contre le paganisme qui y est ferme- ment ancré.

Pier Franco Beatrice a relevé cinq méthodes d'évangélisation très différentes. La plus spectaculaire est incontestablement l'élimination physique des objets de culte païen et leur oblitération. La violence est ainsi utilisée pour la destruction de statues, d'objets sacrés et de temples ainsi que leur remplacement par des églises, des croix ou autres symboles chrétiens. Un autre moyen de diffusion des doctrines chrétiennes consiste à fonder des couvents. L'action des moines est double. En tant qu'hommes d'Eglise, ils amènent les communautés rurales à se convertir à la parole de Dieu ; en tant que médiateurs entre ville et campagne, ils défendent les intérêts des paysans. L'éventail de leurs méthodes s'étend de l'agression contre les supports du culte païen à la prédication et à l'aide accordée aux pauvres. De nombreux évêques tentent aussi de convaincre les grands propriétaires fonciers de se tourner vers Dieu, ce qui facilite la conversion de leurs sujets. Il faut ensuite expliquer aux paysans les vérités de la foi et la supériorité du pouvoir divin sur celui des idoles, afin de modifier leur mentalité en profondeur. Outre l'oblitération par la force d'objets de culte païen, Beatrice mentionne le remplacement, beaucoup plus pacifique, de fêtes païennes par des célébrations évangéliques.15

11. GEORGE, Ph., Saint Remacle, évangélisateur en Ardenne (ca. 650). Mythe et réalité, dans la Christianisation des campagnes, actes du colloque du C.I.H.E.C., p. 57.

12. BOEREN, P. C., Ibid., pp. 32-33. GEORGE, Ph., Ibid., p. 57.

13 DIERKENS, A., Quelques aspects de la christianisation du pays mosan à l'époque mérovingienne, actes du colloque la Civilisation mérovingienne dans le bassin mosan, Liège, 1986, p. 42. GEORGE, Ph., Ibid., p. 58.

14. DIERKENS, A., Abbayes et chapitres entre Sambre et Meuse (VIIe-XIe siècles). Contribution à l'histoire religieuse des campagnes du Haut Moyen Âge, Paris et Sigmaringen, 1985, p. 320.

15. BEATRICE, P.F., Ibid., pp. 24-32.

Dans nos régions, de nombreux exemples étayent ces considérations. L'action évangélisatrice de saint Hubert, par exemple, revêt quelquefois un caractère violent, notamment dans la destruction ou l'oblitération de bois sacrés, de représentations de dieux païens et de temples consacrés à leur culte.16 Dès le VIIe siècle, les Pippinides se rendent particulièrement actifs dans la fondation de couvents, notamment à Nivelles, à Fosses et à Moustier-sur-Sambre. Ils participent aussi au développement de monastères existants.17 Grâce à leurs efforts, le culte du panthéon traditionnel s'éteint progressivement et tend à disparaître au cours du siècle suivant. Certaines régions, comme la Campine, connaissent toutefois un retard de développement considérable sur le plan religieux. Quant aux conversions massives consécutives au baptême de Clovis, il ne s'agit là que d'une fable.18

Dans le cadre de leur action évangélisatrice, les rois mérovingiens et les maires du palais peuvent compter sur quelques grands hommes. Outre saint Hubert, dont nous avons déjà souligné la verve, citons aussi saint Amand, saint Remacle et saint Lambert. Sur base d'une étude concernant l'origine géographique des missionnaires du Haut Moyen Âge, Martine de Reu a mis en lumière le schéma classique de la progression du christianisme dans une région donnée. Au sein de celle-ci, il faut distinguer trois zones, dont les limites évoluent au fur et à mesure de l'action évangélisatrice. La première est quasi entièrement vouée à la doctrine du Christ. La seconde est partagée entre l'Eglise et le culte du panthéon païen. Quant à la troisième, le christianisme n'a pu y filtrer que très sporadiquement. La plupart des missionnaires sont originaires de la partie la plus récemment christianisée de la première de ces trois zones. Leurs activités se portent essentiellement sur la deuxième, tout en ayant des répercussions sur la troisième. Le même processus se reproduit aussi longtemps que la région comporte des zones de paganisme.19

Saint Amand, originaire d'Aquitaine, a vécu au milieu du VIIe siècle. Ses rapports de proximité avec le palais l'ont amené à recevoir l'honneur de baptiser le futur roi d'Austrasie, Sigebert III. Après s'être retiré dans les monastères de l'île d'Yeu, de Tours puis de Bourges, il part en pèlerinage à Rome. Il parcourt ensuite le bassin de l'Escaut, où il tente, non sans mal, de

16. DE MOREAU, E., Ibid., p. 101.

17. DIERKENS, A., Abbayes et chapitres, p. 318.

18. DIERKENS, A., Superstitions, christianisme et paganisme, p. 9.

19. DE REU, M., Pas à pas : la conversion des campagnes au cours du Haut Moyen Âge, actes du colloque du C.I.H.E.C., t. 1, pp. 37-46.

convertir la population à la parole du Christ. Vers 649, le roi Sigebert III l'aurait désigné comme évêque de Tongres-Maastricht. En fait, Amand a été, durant toute sa vie, ce que De Moreau appelle un «évêque missionnaire» car il parcourt inlassablement les régions païennes, sans jamais se fixer nulle part. Il meurt, après 675, dans le monastère d'Elnone.20

Saint Remacle est le contemporain d'Amand. A Luxeuil, il reçoit une formation spirituelle drastique, calquée sur les règles de saint Colomban et de saint Benoît, auxquelles sont ajoutés quelques règlements originaux. Il se rend ensuite à Solignac, où il est confié, par ses parents, à saint Eloi. En 632, il est appelé à diriger cet établissement. Sigebert III, qui a acquis la souveraineté sur l'Austrasie, le recrute alors, peut-être sur le conseil de saint Eloi, pour fonder une abbaye. Grimoald, le maire du palais, pense que Remacle pourrait lui permettre d'augmenter son pouvoir. Le site de StavelotMalmedy est choisi comme emplacement pour la nouvelle institution. Remacle se rend donc dans les Ardennes, où il reçoit le titre d'episcopus abbas, ce qui le dispense de faire appel à l'évêque pour certaines tâches. Cela permet aussi au maire du palais de le surveiller de plus près. Le christianisme a ainsi trouvé un de ses principaux points d'ancrage dans les campagnes ardennaises.21

La Thudinie est évangélisée en profondeur à la fin du VIIe et au début du VIIIe siècle par des moines et autres évêques ambulants. Le dynamisme de saint Landelin, entre 653 et 686, et de saint Ursmer, de 691 à 713, est particulièrement percutant. Landelin a fondé les abbayes de Lobbes, entre 637 et 654, et d'Aulne, vers 656, dont le rayonnement au travers de l'Europe est remarquable.22

Saint Lambert est le descendant d'une des plus grandes familles de la ville de Maastricht. Après avoir étudié l'Ecriture sainte, son père le confie à l'évêque de Tongres-Maastricht, Théodard, qui jouit d'une influence considérable au palais royal. Après l'assassinat de ce dernier, le roi Childéric II décide de placer Lambert sur le siège épiscopal vacant. Mais, en 675, un coup d'état au

20. DE MOREAU, E., Ibid., pp. 78-91, 107-119, et 133-135. DE MOREAU, E., Saint Amand, le principal évangélisateur de la Belgique, Bruxelles, 1942. WERNER, M., Der Lütticher Raum in frühkarolingischer Zeit, Göttingen, 1981, pp. 231-236. KUPPER, J.-L., Ibid., pp. 51-52. DARIS, J., Ibid., pp. 81-90.

21. GEORGE, Ph., Ibid., pp.

22. SOUPART, A., Ibid., pp. 10-11.

palais l'oblige à abandonner ses fonctions pendant sept ans, au profit de Pharamond. Durant cette époque trouble, Lambert se retire dans le monastère de Stavelot. Il revient ensuite à la tête de l'évêché sous Pépin II, à la faveur de l'effondrement du clan de ses adversaires. La guerre de Pépin II contre les Frisons devant s'accompagner d' une campagne d'évangélisation, Lambert décide de se rendre en Toxandrie afin d'y répandre la foi chrétienne. Il meurt dans sa résidence de Liège, victime d'une vendetta, en 705 au plus tard. Son corps est enseveli dans le caveau familial, à Maastricht.23

Saint Hubert est né en 665, dans un milieu aristocratique proche des Carolingiens. Il succède à Lambert sur le siège épiscopal. Il se consacre énergiquement à la lutte contre le paganisme par la destruction d'idoles, de temples et d'arbres sacrés ; il place aussi les sources et les pierres magiques sous le signe de la croix. Son action évangélisatrice se porte surtout sur la Campine et les Ardennes. Il est réputé pour avoir accompli de nombreux miracles. Douze années après la mort de son saint prédécesseur, suite à des apparitions miraculeuses et après maintes réflexions, il prend la décision de transférer ses reliques de Maastricht à Liège. Le culte du saint martyr ne tardera pas à s'y développer. Liège se place alors au centre de la vie religieuse du diocèse. Hubert meurt le 30 mai 727. D'abord enterré à Liège, son corps est transféré, un siècle plus tard, au couvent d'Andage, sous l'épiscopat de Walcaud, en plein coeur de la forêt ardennaise, afin de ne pas concurrencer le culte de saint Lambert et de participer au développement de cette abbaye.24

C'est probablement dans la seconde moitié du VIIIe siècle que s'est opéré le transfert du chef-lieu du diocèse, de Maastricht à Liège. Durant cette période, cette dernière est qualifiée de vicus publicus et l'essor du palais de Herstal atteint son apogée. En 908, elle a définitivement dépossédé Maastricht de son titre de civitas.25

23. KUPPER, J.-L., Ibid., pp. 54-55 et 58. KUPPER, J.-L., Saint Lambert : de l'histoire à la légende, dans R.H.E., t. 79, Louvain, 1984, pp. 5-49. DE MOREAU, E., Histoire de l'Eglise, pp. 93-98. BAIX, F., Ibid., pp. 20-23. WERNER, M., Ibid., pp. 241-274. DARIS, J., Ibid, pp. 99-123.

24. DE MOREAU, E., Ibid., pp. 101-107. BAIX, F., Saint Hubert, dans la Terre wallonne, t. 16, Charleroi, 1927, pp. 106-122 et 200-222. GENICOT, L., Aspects de saint Hubert, dans Leod., t. 63, Liège, 1978, pp. 5-18. KUPPER, J.-L., dans Series episcoporum, pp. 55-56. WERNER, M., Ibid., pp. 275-280.

25. KUPPER, J.-L., Saint Lambert, pp. 24 et 26.

Pendant la seconde moitié du IXe siècle, les évêques Hartgarius et Francon doivent affronter les raids redoutables des Normands, qui pillent et dévastent les principales entités du diocèse, dont la reconstruction s'amorce sous l'épiscopat d'Etienne. C'est précisément sous cet évêque qu'apparaît la première mention d'un archidiacre et d'un doyen rural, ce qui sera le point de départ de notre exposé.26

26. KUPPER, J.-L., dans Series episcoporum, pp. 59-61.

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