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La présence ecclésiale en milieu hospitalier: le cas de l'archidiocèse de Bangui en République Centrafricaine

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par Elkana NDAWATCHA
Université catholique d'Afrique Centrale Yaoundé - Baccalauréat canonique en Sciences Religieuses 2002
  

Disponible en mode multipage

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INSTITUT DE THEOLOGIE ET DE PASTORALE POUR LES RELIGIEUX

JOSEPHINE-BAKHITA

Rattaché à l'Université Catholique d'Afrique Centrale / Institut Catholique de Yaoundé

YAOUNDE

LA PRESENCE ECCLESIALE EN MILIEU HOSPITALIER :

LE CAS DE L'ARCHIDIOCESE DE BANGUI EN

REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

Mémoire de Baccalauréat Canonique en Sciences Religieuses

Par Sous la direction de

Elkana NDAWATCHA Elvis ELENGABEKA

Exégète

2007-2008

DEDICACE

A toute la famille NDAWATCHA,

A la Congrégation du Saint-Esprit,

A la paroisse Saint Marc de Biyem-Assi,

A tous les aumôniers et agents pastoraux.

REMERCIEMENTS

Ce travail est le fruit d'un labeur sans répit et d'efforts conjugués des uns et des autres. C'est pourquoi nous remercions ceux qui ont contribué d'une manière ou d'une autre à sa réalisation.

Nous pensons notamment :

- Au Père Elvis ELENGABEKA, directeur du mémoire qui, malgré ses multiples responsabilités, a accepté de mettre à contribution son savoir.

- A la soeur Gertrude KANA BELLA, directrice de l'Institut, pour l'encouragement et l'appel au travail, car, dit-elle souvent, « le travail paie ».

- Au corps professoral et administratif pour sa disponibilité, sa rigueur, sa régularité aux cours.

- Aux parents et amis pour leurs soutiens et leurs encouragements.

- A nos compagnons d'études pour l'entraide et les échanges.

Que tous reçoivent notre reconnaissance !

SIGLES ET ABREVIATIONS1(*)

CEMAC = Communauté Economique et Monétaire de l'Afrique Centrale

CNJS = Centre National de la Jeunesse et du Sport

ENS = Ecole Normale Supérieure

Ibid. = Ibidem (au même endroit du texte, même ouvrage)

Mgr = Monseigneur

op. cit. = Opus citatum (oeuvre citée)

p. = Page

pp. = Pages

Sida = Syndrome d'Immuno-Déficience Acquis

ss = Suivants

St = Saint

v. = Verset

vol. = Volume

vv. = Les versets

§ = Paragraphe

INTRODUCTION

La République Centrafricaine est un Etat situé au coeur du continent africain. Elle est limitée à l'Est par le Soudan, à l'Ouest par le Cameroun, au Nord par le Tchad et au Sud par le Congo Brazzaville. Sa superficie est de 622 000 km2, pour une population de 5 000 000 d'habitants.

L'évangélisation du pays a commencé en 1894 avec Mgr Prosper Augouard, missionnaire du Saint-Esprit. En 1994, l'Eglise de Centrafrique a célébré le centenaire de cet évènement. L'Eglise locale totalise aujourd'hui neuf diocèses2(*).

Parallèlement à l'Etat, l'Eglise possède ses propres structures sanitaires. Dans ces dernières, la prestation sanitaire est de bonne qualité. Le malade reçoit ce dont il a besoin pour se rétablir. Cependant, ce n'est pas le cas dans les hôpitaux publics. Les malades y vivent des situations alarmantes, qui nécessitent le soutien de l'Eglise. Même si elle dispose de ses propres structures, elle doit trouver un mode de présence dans les hôpitaux publics pour soulager moralement, spirituellement et matériellement les malades indigents.

Dans l'archidiocèse de Bangui, il existe trois hôpitaux publics de référence. Les malades qui y sont admis, sont surtout démunis, parfois abandonnés à eux-mêmes. Les soins ne sont pas toujours donnés dans les conditions requises. L'équipe pastorale reste faible en effectif. Les besoins spirituel, moral et matériel ne sont pas correctement couverts. Alors que les malades ont besoin d'être assistés, soutenus spirituellement, matériellement et moralement. Ils doivent faire l'objet d'une attention accrue car la maladie pousse souvent à s'interroger sur les problèmes essentiels : la vie, la souffrance et la mort. C'est là l'occasion d'une catéchèse d'accompagnement des malades. Or, tel n'est pas toujours le cas.

Dans ces conditions, n'y aurait-il pas lieu de réviser le mode de présence de l'Eglise en milieu hospitalier ? Cette question constitue la problématique de ce mémoire.

Notre étude sera axée sur trois points. Nous présenterons d'abord le milieu hospitalier Banguissois. Ensuite, nous aborderons, à la lumière d'un extrait biblique, le rapport entre Jésus et le malade, car elle devrait inspirer la présence de l'Eglise à l'Hôpital. Enfin, nous dégagerons des perspectives pastorales.

CHAPITRE I

LE CHRETIEN A L'HOPITAL

Lorsqu'un malade chrétien est hospitalisé, il doit être suivi médicalement et spirituellement. Ce suivi sera assuré par l'Eglise car cela fait partie de sa mission. Son indispensable présence permettra au malade de supporter chrétiennement sa souffrance et de bénéficier de son secours. Car la maladie ne fait pas perdre au malade son identité chrétienne et son appartenance à la communauté ecclésiale.

Ce chapitre consistera à présenter d'abord le milieu hospitalier, ensuite à décrire la situation du malade, enfin montrer l'action de l'Eglise.

I. 1. Le milieu hospitalier

L'hôpital est le lieu qui accueille les malades dont l'état de santé exige une surveillance constante. La décision de l'hospitalisation relève de la seule compétence du médecin. Il le fait après avoir notifié la gravité de la maladie.

Après la décision du médecin, le malade est mis à la disposition de l'équipe médicale. Souvent la durée de l'hospitalisation est fonction de la gravité de la maladie. L'hôpital devient à cet effet, le nouveau milieu dans lequel vivra le malade. Pour présenter ce milieu, nous choisirons parmi les trois hôpitaux publics3(*), l'hôpital communautaire. En effet, la présence de l'Eglise y semble particulièrement vivante.

Situé sur l'Avenue des Martyrs au sud, à gauche en allant vers l'aéroport international Bangui M'poko, limité en amont par la CEMAC, en aval par l'ENS et en face par le CNJS, l'hôpital communautaire dispose de nombreux services de soins, entre autres : la pédiatrie, le bloc gynéco-obstétrique avec la réanimation intégrée et un pavillon, la traumatologie avec la réanimation intégrée et un pavillon, le bloc opératoire, la médecine avec la réanimation intégrée et un pavillon, le service d'hygiène, la radiologie, la pharmacie, un cabinet dentaire, le laboratoire, le service d'alimentation (cuisine), une morgue, le service d'orthopédie et de kinésithérapie, le service d'épuration d'eau sans oublier le service d'accueil.

Le service d'accueil s'occupe de la réception et de l'orientation des malades vers les différents services de soins. L'accueil doit être bien conduit pour mettre le malade en confiance. S'il est bien fait le malade est deux fois guéri.

De l'accueil, en fonction de la pathologie qu'il présente, le malade est orienté aux urgences soit médicale soit chirurgicale soit gynéco-obstétricale pour la consultation. De là et selon son état, il est référé dans les services précités pour bénéficier des soins indispensables au recouvrement de sa santé.

L'hôpital offre un milieu plus ou moins salubre, à l'exception de quelques vecteurs nuisibles (cafards, souris...) qui en sillonnent les rigoles. Les locaux sont lavés tous les matins. L'environnement est propre et peut contribuer au rétablissement de la santé.

L'hôpital assure la survie médicale et alimentaire des malades.

Cependant, certains éléments méritent d'être évoqués afin d'améliorer la condition de vie du malade. Nous déplorons la qualité des matelas. Certains de ces matelas sont hors d'usage. Les épaisseurs sont fortement réduites ; les couvre-lits qui les protègent sont délabrés et laissent passer les urines des malades incontinents. Ces matelas se percent donc au centre. Les fesses du malade sont en contact avec le plan dur ; ceci provoque la formation des escarres et la durée d'hospitalisation se prolonge. L'hôpital ne dispose pas non plus de draps. Les lits sont nus. Que fera un malade démuni qui arrive en urgence ? Le sort d'un tel malade est défini. Il sera « jeté » comme tel sur le lit. Or nous savons pertinemment que l'hôpital est un lieu public où des malades se remplacent sans cesse et chacun avec un tableau clinique différent. Il peut en découler la contraction d'une infection nosocomiale. Les affections les plus courantes sont : la méningite, la tuberculose, le sida et le paludisme.

Comment le malade chrétien vit-il dans ce décor ?

I. 2. La situation du malade chrétien

Le malade hospitalisé vit des moments pénibles liés à son état de santé : des douleurs atroces, des conditions d'hospitalisation qui laissent parfois à désirer et surtout quand le malade se sent abandonné.

« L'état du malade exige des soins qui ne peuvent plus être prodigués à domicile et le médecin [...] a décidé que l'hospitalisation était nécessaire. Le malade va donc être séparé de son milieu familial [...] pour être livré à un milieu que très souvent il redoute et au sujet duquel il entretient une série de préjugés [...]. Ces conditions ajoutées à la sensibilité particulière et à la diminution de la résistance créées par la maladie déterminent une appréhension qui mériterait d'être reconnue et calmée, ce qui n'est pas toujours le cas »4(*).

La séparation d'avec le milieu social, familial et spirituel affectera le malade. Dès son admission en milieu hospitalier le malade perd son identité. Il se confond aux autres malades. Il vit dans une salle d'une capacité de trente à quarante lits. A cause de l'effectif des malades, chaque malade sera désigné par un numéro : perte d'identité complète. C'est une blessure d'amour propre.

Or, dans une paroisse ou dans la vie sociale nous sommes nommés par ceux qui nous connaissent et nous sommes heureux d'être connus.

Dans cette situation, le malade chrétien attend le soutien moral, matériel et spirituel.

Sur le plan moral, le malade reçoit très peu de visite de ses frères chrétiens et même de ses propres parents : « Les familles veulent aider mais parfois craignent la contagion et se posent des questions telles que : `` Ai-je attrapé la maladie ? Quelle précaution devrais-je prendre ? Que faire des vêtements ? Est-il prudent de lui rendre visite ?'' »5(*). Devant le questionnement des parents, le malade se retrouve seul avec un moral bas. Du coup il se sent rejeté, abandonné. Face à la maladie l'esprit s'affaiblit. La visite ou l'assistance morale est indispensable pour celui qui souffre. Elle soulage le malade et le guérit psychologiquement de ses maux. Evelyne Franc dira : « La personne atteinte par la maladie a, en plus de ses besoins physiques et sociaux, de grands besoins d'ordre affectif et spirituel [...]. Il est important de considérer le patient en tant que quelqu'un qui a besoin d'être approché d'une manière personnelle [...]. »6(*)

Quand la visite tarde à venir, le malade se fond en larmes et c'est le cri du désespoir : « Tout est fini pour moi ». En effet, rendre visite à un malade procure du bien à celui qui souffre.

Pour un malade démuni sa situation est plus difficile car à l'hôpital tout s'achète. Il peut être exempté de la consultation mais le reste se paie. N'ayant rien pour se procurer les médicaments et faire les examens qui lui sont prescrits, il est appelé à mourir. Personne ne s'occupera de lui : c'est l'abandon total ; car le traitement se fait en fonction du résultat des examens. Jadis, il y avait une pharmacie de secours. Aujourd'hui, il existe un service social mais le travail reste à faire.

Le malade chrétien connaît la dimension caritative de l'Eglise et attend d'être soutenu. Les yeux sont orientés vers l'Eglise pour une aide quelconque. L'Eglise sera pour lui un secours inouï. En voyant la misère du malade, nous nous posons la question suivante : entre le malade et l'argent qu'est ce qui prime ? En voyant le côté matériel, nous nous éloignons de la souffrance humaine. Aucun intérêt n'est porté au malade. Quand le malade se rend compte que l'on ne s'intéresse pas à lui en tant qu'être humain créé à l'image de Dieu, il culpabilise et la vie pour lui devient négative. Plus d'espoir de vivre.

La condition matérielle est un des problèmes auxquels le malade indigent fait face tous les jours en milieu hospitalier. L'hôpital offre un cadre au malade, met à sa disposition une équipe médicale compétente mais lui demande une participation pour le maintien et le bon fonctionnement de la structure. Sans cette participation, il est privé de tous soins ; parfois il lui est demandé de libérer la salle. L'hôpital devient l'affaire des riches. Or, d'après la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme :

« Toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, [...], les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires ; elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d'invalidité...ou dans les autres cas de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté »7(*) .

Une attention devrait être portée au malade le moins assisté ; car la nécessité de sa santé se manifeste dans des conditions de marginalisation et par un manque d'assistance sanitaire. S'il ne fait l'objet d'une attention quelconque cela est lié à sa situation de pauvreté économique, d'indifférence sociale et de solitude.

Généralement, le malade ne souffre pas seulement de la maladie, mais aussi de la peur, de l'abandon, de la solitude et de la marginalisation. Il est angoissé par sa santé, accablé par la douleur liée à sa maladie et aussi celle causée par l'indifférence totale à son égard. Il souffre du rejet social.

L'attention intégrale est le besoin principal du malade. Le malade est avant tout une personne, pas un objet. Il arrive parfois de méconnaître cette réalité, et le malade qui attend de l'aide, devient un objet sur lequel on expérimente un médicament parce qu'il ne peut l'acheter ou bien on s'intéresse plus à sa maladie qu'à son être. Ce n'est pas seulement le médicament qui guérit le patient mais une assistance humaine, spirituelle faite de proximité.

L'accent ne semble pas mis sur l'aspect religieux du malade. Très peu de personnes, dans le personnel médical, s'y intéressent. De temps en temps, un groupe de chrétiens passe pour une prière avec les malades. Celui qui souffre a plus besoin que tout le reste de Dieu pour soulager ses peines. Le pape Benoît XVI dira : « Souvent c'est l'absence de Dieu qui est la racine la plus profonde de la souffrance »8(*). Le chrétien sait que Dieu peut le guérir de sa maladie. Devant la maladie, la guérison qui tarde à venir, la foi faiblit et il faut le soutien des autres pour raviver cette foi. D'où l'importance pour l'Eglise de voir comment aider le chrétien dans sa foi quand il est en situation de faiblesse, de détresse. Car la foi se vit en Eglise.

L'Eglise a reçu la mission d'évangéliser et de secourir le faible, l'abandonné, le pauvre. Que fait- elle pour prendre en charge les besoins du malade hospitalisé ?

I. 3. La pratique de l'Eglise

« Un chrétien, quand il est malade, ne cesse pas pour autant de faire partie d'une communauté chrétienne. La maladie peut même lui donner l'occasion de renouer des liens avec une telle communauté : paroisse, aumônerie, mouvement, oeuvre peuvent apporter leur soutien au malade par la prière, des visites, des lettres »9(*).

C'est dans cette optique que s'inscrit l'action de l'Eglise au côté du malade hospitalisé. C'est le devoir de l'Eglise de servir le malade car elle considère « le service envers les malades comme partie intégrale de sa mission [et] l'assume comme un temps de son ministère »10(*).

L'Eglise pour témoigner de sa solidarité a mis en place une aumônerie des hôpitaux. Cette aumônerie est chargée de la santé spirituelle du malade. Une religieuse passe tous les samedis dans l'après-midi relever les besoins des malades surtout ceux qui désirent recevoir le sacrement des malades. Nous la voyons toujours seule. Le lendemain, elle revient avec un prêtre (aumônier) pour célébrer la messe avec les malades de l'hôpital. Un hangar construit pour les gardes-malades abrite l'office eucharistique. Pour les malades qui ne peuvent se mouvoir, la communion leur est portée. L'aumônerie reviendra encore à la fin de la semaine.

Heureusement, dans la semaine le relais est pris par les différents groupes des paroisses de l'archidiocèse qui passent pour leur apostolat. Aussi, pendant les grands temps de l'Eglise, ces groupes s'organisent et fêtent avec les malades de l'hôpital : un jour de nettoyage à l'hôpital et le lendemain, une messe solennelle est célébrée à leur intention avec distribution des dons.

Une innovation vient d'être faite dans l'enceinte de l'hôpital communautaire. Un des mouvements de l'archidiocèse, la Fraternité saint Joseph, lors de son jubilé d'or, a pris l'initiative d'y ériger avec l'accord de l'archevêque une chapelle. Cette chapelle est déjà opérationnelle. Une équipe pastorale y est présente et permanente. La chapelle est ouverte, l'adoration du Saint sacrement est possible, l'aumônier s'occupe de l'enseignement des parents et des malades qui peuvent se déplacer. Il répond aux sollicitations du malade.

L'Eglise particulière, qui est à Bangui, s'évertue à se rendre présente et active en milieu hospitalier pour aider le malade à connaître sa situation, à préparer et à vivre sa propre mort ; elle aide aussi le malade sur tous les plans car  la maladie comporte aussi un aspect psychologique,  social,  familial, [et spirituel]. Cela fait appel à une attitude d'accueil, d'écoute, de compréhension, de conseil11(*).

Par le pouvoir de guérison qu'elle a reçu, l'Eglise peut combattre la maladie au côté du malade : « Pour vaincre la maladie, Jésus nous a laissé la foi, la prière, la confiance dans le Père »12(*). Ce sont là des armes dont dispose l'Eglise dans sa lutte contre la maladie.

En effet, « Il faut admettre [...] que la prière a aussi son efficacité pour la guérison et le soulagement des misères humaines »13(*).

Cette présence de l'Eglise en milieu hospitalier pourra aider à éviter certains dérapages du malade chrétien. Lorsque le cas se complique, c'est l'inquiétude, le malade est prêt à soupçonner le prochain et quand la guérison tarde à venir, il est prêt à recourir au marabout. L'engagement de l'Eglise vient à point nommé pour sauver de cette dérive. Malgré tout cela il y a toujours l'obstination du malade. Un bel exemple est donné par Eric de Rosny d'un catéchiste de Kribi qui tombe malade et est hospitalisé. Son curé s'évertue à lui porter tous les jours la communion et prier avec lui. Mais sa santé ne s'améliore toujours pas. Il décide de faire venir à son chevet un Nganga14(*) à l'insu du curé. Selon lui c'est grâce aux herbes et aux écorces du Nganga qu'il a été guéri15(*).Etait-ce une coïncidence ?

L'initiative de l'Eglise se heurte à des pratiques sociales et traditionnelles. L'Eglise voudrait justement par son action aider le malade à regarder plus loin, à regarder vers Celui qui a le pouvoir de donner et d'ôter. La mission de l'Eglise au côté du malade s'inscrit à la suite du Christ. Lui qui est passé en faisant le bien et a guéri les malades (Ac 10,38). L'accompagnement du malade est un objectif vers lequel doit toujours tendre la communauté ecclésiale16(*).

CHAPITRE II

JESUS ET LE MALADE

Pour ressortir l'attitude de Jésus envers le malade, nous allons analyser Mc 1, 29-31. Cet extrait parle de la guérison de la belle-mère de Simon appelé Pierre. Marc n'est pas le seul à relater cet épisode. Matthieu et Luc la racontent aussi. Cependant, nous avons choisi Marc parce qu'il nous parait plus explicite et cet épisode vient au tout début du ministère de Jésus.

Ce chapitre propose d'abord une analyse littéraire du texte en étude, ensuite dégage une réflexion théologique.

I. ANALYSE LITTERAIRE

Pour découvrir l'identité littéraire de Mc 1, 29-31, nous étudions sa délimitation, son contexte, son approche synoptique, son genre littéraire et sa structure.

I. 1. Délimitation et contexte

Les versets qui précèdent le v. 29, parlent de l'évènement de la synagogue et finissent au v. 28. A partir du v. 29, nous sommes hors de la synagogue. Après le v. 31, c'est-à-dire du v. 32-34 c'est un autre épisode qui ne concerne pas directement la belle-mère de Simon mais de Jésus avec un groupe de malades même si la scène a lieu dans la même maison.

Comme nous voulons présenter un cas de guérison qui met Jésus en contact direct avec un malade, nous avons préféré limiter notre texte du v. 29-31en le libellant : Jésus et la belle-mère de Simon malade. Ces éléments justifient les limites fixées à la péricope.

Quant à son contexte, Mc 1, 29-31 est la deuxième guérison opérée par Jésus au début de son ministère après celle du démoniaque qui est un cas de possession.

Mc 1, 21-28 inaugure une série de guérisons opérées par Jésus et rythme tout l'évangile de Marc. En effet, sur seize chapitres, neuf contiennent les multiples guérisons effectuées par Jésus

( Mc 1, 21-28 ; 29-31 ; 32-34 ; 40-45 ; 2, 1-12 ; 3, 1-6 ; 5, 1-20 ; 21-34 ; 6, 53-56 ; 7, 24-30 ; 31-37 ; 8, 22-26 ; 9, 14-29 ; 10, 46-52). Ceci amène Marc à attribuer à Jésus l'image ou la figure du médecin, de Jésus guérisseur.

Le texte de guérison de la belle-mère de Simon est précédé de l'enseignement de Jésus à Capharnaüm suivi de la guérison du démoniaque.

De prime abord, nous avons un lien entre les deux textes : texte de la guérison du démoniaque et celle de la belle-mère de Simon. En fait, sur le plan littéraire, il y a une récurrence adverbiale dans les deux passages : ``Et aussitôt'' (v.21b ; v. 23 ; v. 29). La formule ``Et aussitôt'' est suivie d'une mention synagogale : entrant dans la synagogue, sortant de la synagogue. Cela exprime un mouvement et met étroitement en relation les deux textes. En entrant et en sortant de la synagogue, Jésus manifeste son autorité sur les esprits démoniaques et la maladie : l'esprit impur le libère et la fièvre la quitta.

Pour ce qui est du contexte subséquent, il est constitué par le sommaire (1,32-34). Ce sommaire a un style particulier. Il fait une présentation des malades apportés à Jésus et de leur guérison. Tandis que dans le texte précédent, il y a un mouvement, une description avec des formules très expressives et vivantes.

Mc 1,32-34 apparaît comme une synthèse des guérisons opérées par Jésus. En effet, dans l'ensemble formé par Mc 1, 21___2, 12, Mc 1,32-34 se situe au centre de quatre épisodes de guérisons dont deux antérieurs et deux postérieurs. Ces quatre guérisons sont différentes : un démoniaque, la fièvre de la belle-mère de Simon, un lépreux et un paralytique. C'est un résumé de guérisons et une annonce des guérisons qui s'en suivront.

Mc 1,32-34 boucle la journée de Jésus chez Simon17(*) car le lendemain matin, il doit quitter Capharnaüm et la maison de Simon.

Mc 1, 29-31 est un cas de guérisons parmi tant d'autres et qui se situe dans une suite de guérisons. Il est encadré avant et après par des guérisons qui attestent la messianité de Jésus.

Les vv. 32-34 peuvent être reliés aux vv. 29-31 parce que la scène a lieu dans la maison mais plutôt le soir au coucher du soleil.

La guérison de la belle-mère de Simon est signalée dans les évangiles synoptiques. Cela nous permet de voir les différentes approches de ce texte.

I. 2. Approche synoptique

D'après la théorie des sources, Marc serait antérieur à Matthieu et Luc et les deux auraient sans doute puisé chez Marc. Ceci amène à déceler des particularités et des ressemblances chez les trois évangélistes synoptiques.

En ce qui concerne leur particularité, Matthieu présente Jésus étant déjà dans la maison de Simon. C'est Jésus qui vit la malade et prit, ainsi, l'initiative de la guérir. Il lui toucha la main. Jésus est seul avec la malade.

Matthieu nous laisse voir à travers cette attitude, « le mystère de tout homme malheureux, touché par le regard de Jésus et ressuscité par sa grâce »18(*).

Marc, pour sa part, a un style propre et vivant. Il est le seul à employer la formule `` Et aussitôt'' ; il mentionne la présence des disciples qui accompagnent Jésus : Simon, André, Jacques et Jean. Contrairement à Matthieu, Marc signale que Jésus s'approche et la prend par la main.

Quant à Luc, en tant que médecin, il place juste les mots en signalant que la fièvre est forte sinon elle serait debout. Cela jaillit dans l'expression « en proie à une forte fièvre » (Lc 4,38b) ; Jésus se penche et menace la fièvre. Ce sont là des styles propres à chaque auteur mais la finalité est la même : relater la guérison de la belle-mère de Simon.

Pour ce qui est de ressemblances, Marc et Luc sont très proches. Ils retracent l'itinéraire de Jésus : de la synagogue à la maison de Simon. Dans leurs épisodes, la demande de guérison est indirecte. Les deux évoquent la présence des disciples : elle est plus explicite chez Marc et implicite chez Luc. Luc les désigne par le pronom « ils ». A la fin de l'épisode, la malade guérie servait Jésus et ses disciples tandis que chez Matthieu, elle servait uniquement Jésus.

Matthieu et Luc sont aussi proches dans le sens où ils écartent toute la suite de Jésus pour s'atteler aux principaux : Jésus et la malade.

Cette analyse littéraire va se prolonger à l'examen du genre littéraire de Mc 1, 29-31.

I. 3. Genre littéraire et structure

Le texte que nous étudions est un récit. Ce genre littéraire se caractérise par : un lieu, des personnages, un thème, une intrigue, des mots de transition et surtout la référence au passé. Notre texte y répond. Le récit de guérison a lieu à Capharnaüm dans la maison de Simon. Des personnages sont nommés dans le récit : Jésus, Simon, André, Jacques, Jean et la malade. Jésus est le personnage principal qui agit en faveur de la belle-mère de Simon qui est, elle, le personnage bénéficiaire de l'acte de Jésus. Les autres sont des personnages secondaires intermédiaires qui accompagnent Jésus dans son ministère.

Le thème central du récit est la guérison d'une maladie.

Quant aux mots de transition ou style, le récit est écrit de manière très vivante. Nous notons une récurrence comme : ``Et aussitôt'' (v. 29 et v. 30b) ; les deux sont séparés par une conjonction de coordination « or » (v. 30a). Elle marque la transition en mettant en exergue le noeud du problème. L'expression ``Et aussitôt'' marque l'évolution et la rapidité de l'action : « Et aussitôt sortant de la synagogue...et aussitôt ils lui parlent à son sujet ».

Nous notons la présence des temps de narration. Nous avons les verbes : venir (v.29b), faire (v. 31a), quitter (v. 31b) qui sont au passé simple et être (v. 30a), servir (v. 31b) qui sont à l'imparfait.

En outre, il y a un mouvement dans le récit. Il est dynamique. Nous partons d'une situation initiale (couchée) à une situation finale (debout).

Nous avons ainsi cette structure :

1- Arrivée de Jésus chez Simon et André en compagnie de Jacques et Jean (v. 29)

2- Annonce à Jésus de la maladie de la belle-mère de Simon (v.30a)

3- Demande indirecte de guérison (v. 30b)

4- Intervention miraculeuse de Jésus (v. 31a)

5- Guérison de la belle-mère de Simon (v. 31b)

Après cette analyse littéraire qui nous permet de cerner le récit, nous allons en dégager le message théologique.

II. LA REFLEXION THEOLOGIQUE

Nous allons, ici, aborder d'abord la conception de la maladie à l'intérieur et à l'extérieur du texte, ensuite montrer l'attitude de Jésus par rapport au malade.

II. 1. Conception de la maladie intra et extra texte

Dans le récit de la guérison de la belle-mère de Simon, il s'agit d'une maladie : la fièvre. C'est un symptôme commun à plusieurs maladies. Cette fièvre est une maladie qui entrave la belle-mère de Simon et Camille FOCANT affirme que Marc la perçoit comme une maladie19(*). A la fin du récit, comme pour l'esprit impur, la fièvre la quitta. Pour Camille FOCANT, « cela ne signifie pas que la fièvre soit vue comme un démon, mais bien que toutes les instances du mal, qu'elles soient démoniaques ou corporelles, sont mises en déroute par l'action de Jésus »20(*). La fièvre est l'instance du mal qui ankylose l'homme. Nous voyons dans l'expression « la fièvre la quitta », une personnification de la fièvre. Simon LEGASSE le confirme : « La maladie semble personnifiée puisque c'est elle qui ``quitte'' la malade »21(*). Mais elle n'est guère synonyme d'expulsion de démon.

Plus loin, en Luc, il a la même lecture de la fièvre ; il la considère comme une puissance nuisible, une force du mal. Il la personnifie comme ses prédécesseurs en ce terme : « il menaça la fièvre » comme si elle était une personne.

Lorsque nous parlons de la maladie, nous pensons le plus souvent à une perte de force physique ou mentale et spirituelle ou à l'atteinte de l'organisme par un agent microbien ; or , la conception de la maladie va au-delà de toutes ces considérations. On impute la maladie aux démons, aux esprits, aux forces du mal et même à Dieu.

La maladie, dans la civilisation traditionnelle et juive, est censée résulter d'une transgression du sacré et prend ainsi le caractère d'une sanction. Cette conception de la maladie est admise par la tradition synoptique22(*). Avec le récit de guérison du paralytique dans les évangiles synoptiques (Mt 9,1-8 ; Mc 2, 1-12 ; Lc 5, 17-26), Jésus guérit le malade pour confirmer le pardon de ses péchés. Cette guérison obtenue, concrétise l'existence d'une relation symétrique, de cause à effet entre la maladie et le péché. Cette conception va évoluer.

Jésus, le Médecin par excellence, est venu sauver et guérir l'homme de ses maladies qui l'empêchent de glorifier Dieu. Il est venu pour les malades et les pécheurs. Car la maladie, dans le judaïsme et l'antiquité, était synonyme du péché, la conséquence du péché, la punition de Dieu, la sanction d'une faute. Ce qui amène les apôtres à poser la question à Jésus à propos de l'aveugle-né : « Rabbi, qui a péché, lui ou ses parents pour qu'il soit né aveugle ? » (Jn 9, 2). Jésus répond ni lui ni ses parents (Jn 9, 3).

Jésus s'inscrit en faux contre cette conception. Il prend le parti de l'homme contre la maladie et contre le péché. Il démythifie la maladie. Il va s'évertuer durant sa mission à réinsérer les « malades pécheurs » dans la société. Exemple : en purifiant les lépreux, Il les réinsère dans la société car ils sont considérés comme des impurs.

La maladie n'est pas une fin en soi et ne doit pas être caricaturée. Elle est présentée, dans le Nouveau Testament, comme ce qui doit être évacué du Royaume de Dieu. Le Nouveau Testament ne spécule pas sur la responsabilité de la maladie. A l'aveugle-né, Jésus répond ni lui ni ses parents. Il ne situe pas la maladie dans une perspective causaliste, mais dans une perspective finaliste23(*). Ainsi l'idée que Dieu envoie la maladie comme une épreuve est intenable. Elle n'est pas une épreuve venant de Dieu car Dieu ne veut pas le malheur de l'homme mais son bonheur.

De la maladie, peut découler soit la guérison soit la mort et la vie éternelle. C'est le sens finaliste que Jésus donne à la maladie durant son ministère de guérisseur. Pour Lui, « chaque guérison est un signe du Signe par excellence qu'est la mort et la résurrection »24(*) ; ces dernières ouvrent, en effet, la porte de la vie éternelle.

Maladie et guérison sont inséparables du ministère de Jésus. Elles sont, pour Lui, l'occasion de révéler son Royaume. Ce Royaume est déjà présent quand Il guérit un malade.

La maladie n'est pas imputable à Dieu. Les chrétiens doivent le comprendre. Pour cela, il faut insister sur une doctrine chrétienne de la maladie.

En s'inscrivant en faux contre toute conception erronée de la maladie, Jésus se montre accueillant et compatissant envers les malades.

II. 2. Attitude de Jésus par rapport au malade

La maladie est perçue comme un handicap physique, mental et spirituel qui isole le malade de la société, de sa famille et de l'Eglise. Elle brise parfois les relations entre familles et amis. Jésus aura, Lui, un comportement humain envers tout malade.

A travers le récit de guérison de la belle-mère de Simon, Jésus se rend présent à la malade par ses gestes et ses actes.

Tout au long de sa vie publique, Jésus est environné des malades de toute sorte. Il les accueille avec sympathie, attention, en les soulageant de leurs maux. Il n'a jamais rejeté un des malades pour sa sévère maladie, ni affiché brutalité, répugnance, dédaignement ou mépris envers un des malades. Au contraire, Il en est proche par des gestes et actes humains.

L'évangéliste note la compassion de Jésus, il note aussi le geste étonnant : Jésus touche la malade en la prenant par la main ; signe qu'en Lui est la vie, le salut ; signe aussi du contact avec l'être humain qu'Il rétablit. Il rompt avec une tradition qui prohibe tout contact avec les malades. C'est un regard d'amour, un geste d'amour qu'Il pose sur la malade. Il est pris de compassion, Il est ému, troublé dans son coeur d'homme. Son coeur est touché. Sur la demande de ses disciples, Il guérit la malade. Cette guérison octroyée, est donc la réponse de l'amour de Dieu à la détresse humaine. L'amour du Christ « prend forme humaine, coeur humain pour saisir l'homme au niveau de sa misère pour lui rendre perceptible l'intensité de l'amour divin »25(*).

En effet,

« Dans le tableau de la création, sur la voûte de la Chapelle Sixtine, c'est du contact du doigt de Dieu avec celui de l'homme que jaillit l'expression de la vie de l'humanité entière ; ici, en Saint Marc, c'est dans l'intimité de la famille : du contact de la main du Christ et de celle de la malade jaillissent la guérison et la santé, l'affection et la gratuité [...] »26(*).

La maison de Simon devient une Eglise de salut. Par un geste simple, inattendu vient la guérison. Jésus a posé un geste essentiel : « S'approchant, il la fit se lever en la prenant par la main » ; résultat « Et la fièvre la quitta ». En effet, Marc très méthodique, nous montre la suite chronologique de l'action de Jésus : approche, prise par la main et la guérison. La guérison obéit à une suite logique. Par là, Marc nous enseigne que nous ne pouvons pas guérir une personne sans s'approcher d'elle ni la toucher.

Jésus relève la malade. Relever chez Marc signifie « ressusciter ».

Du matin au soir, où qu'Il aille, Il est toujours assailli par les malades, au milieu d'eux. Par sa présence aux malades, deux formes essentielles de son activité apparaissent : parler, s'entretenir avec les malades et vivre au milieu d'eux.

Les Evangiles contiennent de multiples récits de guérisons. Tous ces malades, présentés à Jésus, ont été satisfaits dans leur être.

En portant notre regard sur le récit de la guérison de la belle-mère de Simon, présenté dans les évangiles synoptiques, nous constatons que le fond est le même ; tandis que la manière de le relater et de ressortir l'attitude de Jésus diffèrent d'un auteur à un autre.

C'est son attitude que nous voulons mettre en exergue. Elle sera pour nous une référence dans notre relation avec les malades. Dans ces trois récits, Jésus : touche, relève, s'approche, se penche, prend par la main, menace. Ce sont des gestes que les malades attendent de nous. Roland BUGNON le relève :

« Lorsqu `un malade découvre, au gré d'une visite ou d'une rencontre, de quel amour Dieu l'aime, sa maladie perd beaucoup de son importance. S'il a la chance d'expérimenter presque physiquement l'immensité de l'amour de Dieu pour lui, il peut

continuer à vivre malgré son handicap, avec une grande paix ou joie intérieure »27(*).

Une présence attentive de l'Eglise donnera de l'espérance au malade et ses tourments se transformeront en joie.

Cette femme malade alitée, a été guérie grâce à Simon et André car ce sont eux qui ont parlé d'elle à Jésus. Ils sont pour elle la petite communauté ou l'Eglise. Ils agissent pour sa cause. Nous chrétiens, partout où nous sommes, nous formons l'Eglise même les malades qui sont à l'hôpital. Pour cela, nous devons être attentifs pour plaider la cause de nos frères malades et intercéder en leur faveur.

La maladie de la belle-mère de Simon plonge la famille dans l'angoisse. Cette angoisse est implicite. Jésus, quand à Lui, a répondu présent à une demande angoissante. Jésus compatit à la douleur de cette famille et sauve un être cher.

L'attitude de Jésus en face d'un être humain malade est très profonde. Que l'Eglise qui est sur les traces de Jésus fasse de même. Que par sa présence, les malades sentent la proximité de Dieu.

L'Eglise multiplie des efforts de proximité aux malades mais cette proximité reste beaucoup plus dans les intentions que dans la réalité du vécu. Dans les documents de l'Eglise, elle définit l'identité du malade. Le malade est accueilli, servi, protégé et défendu par l'Eglise mais jamais compris et accompagné personnellement dans son cheminement de foi.

Cela revient à dire que l'Eglise n'a pas toujours aidé l'homme à intérioriser l'expérience de vie de foi dans la maladie.

Au regard de ce que le malade chrétien vit et ce que Jésus fait aux malades, l'archidiocèse de Bangui doit revoir son mode de présence en milieu hospitalier en réactualisant, en inventant des nouvelles pistes pastorales en milieu hospitalier.

Le comportement de Jésus doit avoir un sens. Une fois le compris, nous pouvons l'imiter.

L'attitude de Jésus est pleine de sens.

A travers ce récit de guérison, Marc nous présente l'identité de Jésus comme médecin par excellence, qui est venu sauver et guérir l'homme de ses maladies28(*) qui l'entravent et l' empêchent de glorifier Dieu et de se réaliser en tant qu'homme ou femme. Tel est l'exemple de cette femme fiévreuse incapable de vaquer à ses activités quotidiennes. Après sa guérison, elle est libérée. Aussitôt, elle se montre reconnaissante en se mettant au service de Jésus et de ses disciples.

Le rétablissement de la santé est la finalité de l'action de Jésus29(*) et l'une de ses missions. Car, après l'appel des quatre premiers disciples, Il inaugure son ministère par une série de guérisons (Mc 1, 21ss). L'Homme malade devient le centre de l'action missionnaire de Jésus. Lui-même déclare qu'Il est venu pour les malades et ce sont eux qui ont besoin du médecin (Mc 2, 17).

La mission de Jésus consiste, en effet, à rétablir non seulement l'Homme malade dans la société mais aussi à le rétablir dans son équilibre physique, mental et social30(*). La belle-mère de Simon a ainsi retrouvé son équilibre psychosomatique, spirituel grâce au regard compatissant de Jésus. En effet, « la compassion du Christ envers [la malade], les malades et ses nombreuses guérisons ... sont un signe éclatant de ce `` que Dieu a visité son peuple'' »31(*).

Marc nous montre Jésus qui accomplit le programme messianique de sa mission. Il redonne vie au souffrant.

Cette guérison exalte la grande compassion de Jésus en face de la misère humaine et explique la dimension libératrice de sa mission.

Jésus guérisseur, image de Jésus présenté par Marc, ne se penche non seulement du côté de la maladie mais approche la personne dans toute son intégralité. Philippe GAUER le dit:

« La santé physique et la santé psychique et spirituelle impliquent la mission unique du Christ. Jamais nous ne voyons Jésus s'apitoyer sur la maladie, son regard se fixe toujours d'abord sur la personne. C'est un regard d'amour, de compassion, de miséricorde qu'Il vient poser sur chaque personne [...]. Tout malade est avant tout pour Lui, un homme [une femme] prédestiné à devenir Fils de Dieu, un frère [une soeur]. »32(*)

Dans son agir envers la belle-mère de Simon, Il voit la personne malade de cette femme, une malade qui souffre dans son corps et dans son âme. Ce sont là les deux dimensions de la guérison : celle du corps et celle de l'âme. Car « la maladie n'est jamais seulement un mal physique elle est en même temps une période d'épreuves morale et spirituelle 33(*)».

Dans ce récit de guérison, guérir pour Jésus, signifie réintégrer ; car la maladie exclue, isole parfois de la société. La belle-mère de Simon a retrouvé sa place après avoir été guérie.

C'est aussi engager son être et sa personne. Il fait voir sa puissance et sa bonté. « Les guérisons sont avant tout les manifestations de la charité de Dieu, de l'amour vrai de Dieu, amour actif et compatissant, qui se penche vers toute misère humaine 34(*)».

Jésus a toujours été présent auprès des malades. Son attitude est très caractéristique. Il pose des gestes et actes pleins de signification. Attitude qu'attend tout malade.

Par ses gestes, Il a réconforté et relevé la belle-mère de Simon, qu'en Lui est la vie.

A travers ce récit de guérison, Matthieu nous montre le salut acquis par la venue de Jésus. Il est venu mettre l'homme debout, le guérir pour glorifier Dieu35(*). Car être debout, c'est la gloire de Dieu disait Irénée de Lyon. C'est cette gloire de Dieu que Jésus témoigne sans cesse dans sa rencontre avec les malades.

Luc montre l'attitude éternelle de l'homme-Dieu. Jésus, chaque fois qu'Il est en face d'un malade, pose souvent un geste qui sauve et qui met en mouvement le malade. Il le sort d'un état de dépendance pour l'inviter à prendre la route avec Lui. En outre, Luc nous présente Jésus qui déploie par son comportement, sa puissance, son autorité sur les puissances du mal et sa bonté par une intervention efficace : « En se penchant sur la malade, le Christ exprime sa bonté et en commandant à la fièvre de telle sorte que son ordre est immédiatement exécuté, il relève sa puissance »36(*). Après la guérison, la malade pose un geste qui libère : elle sert Jésus. La belle-mère de Simon est une figure. Quand Jésus guérit, son action n'a pas une fin uniquement thérapeutique mais s'adresse à toute la personne pour la rétablir dans son intégrité physique, morale, spirituelle et sociale. La belle-mère de Simon retrouve son état de complet bien-être physique, mental et social. Le comportement de Jésus va au-delà de nos apparences.

Ces études nous permettent de découvrir les véritables problèmes auxquels est confronté le malade. Du comportement de Jésus avec les malades, ressortent quelques réponses.

CHAPITRE III

PERSPECTIVES PASTORALES

Aujourd'hui, le texte de la guérison de la belle-mère de Simon garde toute sa pertinence pour la pastorale en milieu hospitalier. L'Eglise peut s'en inspirer pour réviser sa présence à l'hôpital comme le pense Mario ALBERTON37(*).

C'est ce que va proposer ce chapitre qui portera primo sur la proximité entre Jésus et le malade, secundo sur la médiation entre Jésus et le malade.

III. 1. LA PROXIMITE ENTRE JESUS ET LE MALADE

Un survol de l'Evangile de Marc permet de nous apercevoir de la place que le Christ accorde aux malades. Neuf chapitres sur seize sont consacrés aux relations de Jésus avec les malades (Mc 1, 21-28 ; 29-31 ; 32-34 ; 40-45 ; 2, 1-12 ; 3, 1-6 ; 5, 1-20 ; 21-34 ; 6, 53-56 ; 7, 24-30 ; 31-37 ; 8, 22-26 ; 9, 14-29 ; 10, 46-52).

Sa rencontre, avec la belle-mère de Simon, laisse percevoir toute une démarche personnelle et profonde. Il porte une grande attention à cette femme, car, dès qu'Il apprend la nouvelle, Il se rend aussitôt à son chevet. Son attention est réelle, physique. Il voit, regarde, s'approche, prend la main, touche. Jésus se pose devant cette malade comme une personne et non comme un thaumaturge. Son comportement très personnalisé le rend proche de chaque malade et Il est capable d'inventer vis-à-vis de chacun, une nouvelle attitude dont la finalité est toujours la même.

Les gestes et les actes de Jésus doivent intéresser, tous les chrétiens, mais particulièrement ceux qui prennent en charge la santé des malades. C'est surtout cette approche très personnalisée que désire un malade. La peur de contagion est le plus souvent un élément qui brise la relation avec les malades. Nous avons peur qu'en les touchant, nous nous exposions à leurs maladies. Nous nous mettons hors de leur portée.

Jésus nous laisse son bel exemple. Toute son existence se déroule en grande partie dans le monde des malades.

C'est en intégrant ce modèle d'approche des malades par Jésus que l'Eglise pourra revoir aussi son mode de présence aux malades et de leur prise en charge.

Elle peut créer une proximité à partir de l'eucharistie, du sacrement des malades, de la visite et de l'accompagnement des malades.

En effet, l'eucharistie est une forme privilégiée de la proximité de l'Eglise vis-à-vis du malade. Elle témoigne non seulement de la proximité du Christ au malade mais aussi celle de la communauté chrétienne : c'est une double proximité.

En effet, la participation du malade à l'eucharistie, s'inscrit dans la tradition de l'Eglise38(*). Elle procure du bien au malade. Par cette célébration, Dieu visite celui qui est atteint dans son être. « Toute communauté chrétienne est un corps où tous sont solidaires et où chacun, quel qu'il soit, a son importance pour l'ensemble. Lorsque l'un d'entre eux est éloigné, il faut créer, inventer des moyens nouveaux de le rejoindre »39(*). L'eucharistie est, ainsi, considérée comme le moyen de se rendre présent, visible au malade isolé, hospitalisé. Elle réconforte et soulage le malade. Célébrer quotidiennement l'eucharistie au milieu et avec les malades, permettra à l'Eglise de s'apercevoir de sa mission vis-à-vis du monde hospitalier et du malade.

Avec l'existence de la nouvelle chapelle au sein de l'hôpital, nous proposons qu'il y ait tous les jours la messe comme dans les paroisses. Cela fortifiera le chrétien malade dans sa foi, dans sa maladie et le rendra plus proche de sa paroisse. Si les chrétiens bien-portants communient tous les jours, celui qui est malade a aussi le droit au corps du Christ qui lui procurera force, courage dans la maladie et la foi. Il est bon au cours de la messe de prier pour le malade ; il est encore mieux qu'un membre de l'assemblé ou que le prêtre vienne établir un lien visible de l'Eglise avec le malade : venir à son chevet lui porter la communion. A cela, « la visibilité de l'Eglise n'est pas seulement l'organisation hiérarchique, elle est aussi la présence réelle des uns aux autres dans la charité, prolongeant la présence eucharistique du Christ ».40(*) La célébration eucharistique ouvre à la charité. C'est pourquoi, en plus de la chapelle, un service caritatif peut être envisagé pour aider ponctuellement les démunis. La chapelle et le service caritatif sont pour le malade un grand soulagement spirituel et matériel.

La visibilité de l'Eglise au malade doit s'exprimer aussi dans le sacrement des malades. Saint Jacques a souligné l'importance de ce sacrement dans la maladie : « Quelqu'un parmi vous est-il malade ? Qu'il appelle les presbytres de l'Eglise et qu'ils prient sur lui après l'avoir oint d'huile au nom du Seigneur. La prière de la foi sauvera le patient et le Seigneur le relèvera » (Jc 5, 13-15). N'attendons pas l'agonie pour nous présenter au chevet du malade. C'est une pratique courante. Il y a là, l'urgence d'une prise de conscience du clergé et de la sensibilisation des parents des malades.

Dans ce sacrement, il y a l'intervention de la puissance de Dieu et des gestes humains pleins de signification : imposition des mains et onction d'huile. Ces gestes mettent l'Eglise en contact étroit avec le malade. Ils nous rappellent aussi les gestes de Jésus à l'égard des malades. Il les touche, les prend par la main, leur impose les mains ; et fait des onctions d'huile (Mc 6, 13) en vue de la guérison. Ainsi Mario ALBERTON nous dit :

« Les gestes, les paroles, les démarches [de Jésus] en faveur des malades seront le modèle de référence qui nous permettra de saisir le dynamisme profond du sacrement de l'onction des malades. Ce dynamisme sera situé aussi dans un contexte plus large, celui des milieux de santé actuels, et éclairé par la doctrine et l'histoire de l'Eglise »41(*).

Ce sacrement peut être administré au cours d'une célébration eucharistique ou en dehors de celle-ci. Ce sacrement manifeste la solidarité profonde de la communauté ecclésiale au malade. A travers la personne du prêtre auprès du malade, nous voyons l'Eglise tout entière qui souhaite sa guérison. Dans ce sacrement, nous voyons deux aspects : l'image de Jésus qui prend soin des malades et les guérit et l'image de la souffrance.42(*) Ce double aspect doit attirer notre attention dans notre relation mutuelle les uns avec les autres car « celui qui souffre a besoin, dans sa solitude, de savoir qu'il n'est pas seul dans sa lutte »43(*).

Le plus souvent, ce sacrement est mal compris et célébré. Nous attendons les dernières minutes et nous arrivons en urgence pour l'administrer. Il est ainsi vidé de son sens : on dirait un ritualisme ou un formalisme. Dans ces conditions, le sacrement n'est pas un moment de communion ; car, pour l'administrer, il faut d'abord écouter, échanger et rencontrer le malade. Cela crée la proximité. Que la valeur de ce sacrement soit restituée et que sa célébration soit plus communautaire que privée et soit soigneusement préparée en impliquant si possible certains malades.

L'eucharistie et le sacrement des malades sont une richesse inépuisable pour l'Eglise et les malades. A côté de ceux-ci, s'ajoutent la visite, l'écoute et l'accompagnement du malade. « La visite aux malades vient recréer la communauté, la communion entre l'Eglise et un des membres »44(*).

Dans le récit de guérison de la belle-mère de Simon, c'est Jésus qui se rend dans la famille de Simon et rencontre la malade. Aujourd'hui, le malade est le plus oublié de la société et de surcroît de l'Eglise. Il est le grand absent de notre monde. C'est sans lui que se poursuit la vie. Nous oublions sa présence et ne lui rendons pas visite. Si la société ne le fait, l'Eglise, elle a le pressant devoir de visiter, d'écouter et d'accompagner le malade : « j'étais ...malade et vous m'avez  visité...» (Mt 25, 36). Elle doit pousser les bien-portants et les malades à se rendre plus solidaires les uns aux autres car nous formons un seul corps dans le Christ et si un membre souffre tous les membres souffrent (1Co 12, 24-26). Le malade est très peu visité, écouté et accompagné. Or, la visite, l'écoute et l'accompagnement sont les grandes dimensions de la pastorale des malades en milieu hospitalier. L'accent doit y être mis.

Les groupes qui rendent visite aux malades, ne passent pas dans toutes les salles des malades et ne prennent pas suffisamment le temps de dialoguer ; certains éprouvent de malaises à entrer dans les chambres surtout des tuberculeux par peur de contagion. Même s'ils entrent, ils préfèrent mettre une réelle distance vis-à-vis du malade.

Que toutes les visites au malade soient soigneusement préparées. Car derrière la visite, il y a l'écoute et l'accompagnement. Quand la visite est préparée, elle est fructueuse, profitable et réconfortante. Nous ne venons pas par formalisme pour visiter et écouter. C'est une pastorale très délicate, un ministère.

En visitant et en écoutant les malades, nous comprendrons beaucoup mieux leurs problèmes et nous pourrons alors apporter l'aide dont ils ont besoin : aide spirituelle, matérielle, psychologique, familiale, affective et sociale.

Le plus souvent, le malade lie sa maladie à des querelles, des antécédents d'envoûtement. La visite et l'écoute sont indiquées pour l'amener à un dépassement de soi, à considérer sa maladie comme un phénomène naturel, à l'accepter et à l'affronter chrétiennement : c'est la méthode psychothérapeutique.

Tous ceux qui visitent les malades, doivent avoir une attitude d'écoute, une oreille attentive aux cris, aux doléances des malades. Ces plaintes ne sont pas à négliger ni à balayer d'un revers de main. Elles seront utiles dans la prise en charge psychosomatique et spirituelle du malade.

La chapelle servira de lieu de référence, d'accueil et d'écoute des malades qui peuvent se mouvoir. Après la sortie de l'hôpital, le relais sera assuré dans chaque paroisse où seront aménagés des lieux d'écoute, d'accueil et d'accompagnement des malades. Car la présence de l'Eglise doit s'exprimer tout au long de la vie, non seulement pendant la mort ou la maladie45(*).

En effet, « Accueillir, écouter la personne qui souffre, en Eglise, pourrait peut-être éviter le recours aux féticheurs »46(*). C'est un des aspects de cette pastorale. Dans cette pastorale, la présence doit être attentive, discrète, non imposante. Présence faite d'écoute, de silence, de dialogue et de soutien dans la lutte47(*).

La visite et l'écoute seront régulières et organisées en dehors des heures de services. Visiter et écouter ne sont pas seulement un privilège réservé aux chrétiens. « Tout homme, pourvu qu'il soit [d'] une conscience réfléchie, est capable de comprendre que d'autres ont besoin de sa présence »48(*). C'est donc sans surprise que nous constations à l'heure de visite des incessants va-et-vient à l'entrée de l'hôpital. C'est une attitude toute naturelle pour faire sortir le malade de son isolement.

Tous, prêtres, chrétiens, parents, amis et soignants, sont interpellés pour entourer le malade pour qu'il ne soit dépaysé et pour éviter un dangereux repli sur soi ou une ouverture à des mauvais conseillers.

Jean BOUCHARD dira ; « La plus grande peine de ceux qui séjournent à l'hôpital est bien connu ; c'est parfois une véritable angoisse : n'avoir aucune visite, ne compter sur personne »49(*). Le fait de visiter un malade, de se mettre près de son lit, est un signe sensible qu'un autre a pensé à lui. De là, il existe pour quelqu'un, la relation est nouée, l'espoir est retrouvé.

Jésus de son vivant, visitait les malades dans leur être, les touchait, leur parlait, cheminait avec eux. Aujourd'hui, la communauté chrétienne, en rendant visite aux malades, renouvelle la fraîcheur des gestes de Jésus50(*).

Hormis l'existence de la chapelle, l'eucharistie célébrée avec les malades, le sacrement des malades, la visite et l'écoute, le service caritatif, d'autres formes de présence, de proximité peuvent être inventées et définies dans le plan pastoral des malades de l'archidiocèse. L'Eglise doit songer à intégrer l'organisation hospitalière par la formation des agents hospitaliers (chrétiens) et pastoraux qui seront des médiateurs entre l'Eglise et les malades comme les disciples de Jésus et la belle-mère de Simon. C'est une nécessité pour que sa présence, en milieu hospitalier, ait un impact.

III. 2. MEDIATION ENTRE JESUS ET LE MALADE

Marc et Luc relèvent la notion de solidarité et de médiation avec la malade en évoquant les personnes qui l'entourent : Jésus et ses disciples. L'Eglise doit aussi entourer le malade à l'hôpital comme Jésus et ses disciples le faisaient.

Chez Matthieu, c'est cette attitude d'intimité avec la personne qui est mise en lumière. C'est cette attitude qui devrait être réservée aux malades en principe à l'hôpital. Préserver la pudeur, la dignité et l'intimité de la personne malade. Car, aujourd'hui, le malade est dépossédé de son corps : il est exposé, confié à tout le monde, soigné, regardé, touché manipulé par tout le monde.

Le malade ne doit pas être exposé au vu et au su de tout le monde quand il est traité. Jésus l'a compris et c'est ce qu'Il a fait à la belle-mère de Pierre. C'est une interpellation pour tous ceux qui entourent les malades de faire comme Jésus.

Aujourd'hui, les agents pastoraux et hospitaliers assurent cette médiation. Pour cela, l'Eglise doit assurer leur formation dans la prise en charge convenable des malades.

Ils seront formés dans les domaines de la psychologie du malade, de l'éthique, de la spiritualité, de la pastorale. Etant formés, ils pourront alors mieux servir le malade qui leur est confié sans toutefois altérer l'image de Dieu qui est en lui. Cette formation s'avère importante car elle permettra à ceux-ci d'agir avec compétence dans les soins et dans l'accompagnement du malade. Le pape Benoît XVI a mis l'accent sur cette compétence :

« En ce qui concerne le service des personnes qui souffrent, la compétence professionnelle est avant tout nécessaire : les soignants [et les agents pastoraux] doivent être formés de manière à pouvoir accomplir le geste juste au moment juste, prenant aussi l'engagement de poursuivre les soins [et l'accompagnement] »51(*).

Il poursuit, car ce sont des êtres humains qui ont besoin, en plus des soins techniques corrects, d'humanité, de l'attention du coeur, de la « formation du coeur 52(*)». Ceux qui s'engagent auprès du malade doivent comprendre que leur présence est un ministère. Ils jouent un rôle privilégié dans l'accomplissement humain du malade53(*)

Parmi les soignants, il y a des chrétiens. Le chrétien qui travaille auprès du malade, est là pour exprimer la volonté et les désirs de Dieu54(*) envers son prochain. En effet, le rôle du chrétien qui sert le malade se situe dans cette prise de conscience qu'il y a un lien nécessaire entre vie et foi, engagement dans le monde et vie de charité. Le service des malades : visites d'amitié, services professionnels, visite pastorale auront une importance capitale pour faire cheminer les malades vers l'acceptation de leur état et vers Dieu. Le geste de celui qui approche les malades est symbole d'un geste plus grand et plus total, geste qui vient de Dieu pour envelopper l'homme et le développer.

La mission de l'Eglise se poursuit à travers les agents hospitaliers ainsi que les visites faites aux malades et à leurs familles. C'est déjà un accompagnement du malade et une forme de présence aux malades : présence à travers ceux qui procurent les soins médicaux et spirituels aux malades. La présence de l'Eglise doit s'exprimer tout au long de la maladie et doit se poursuivre après la guérison d'où la nécessité de connaître les dimensions religieuse, biologique, psychologique, sociale du malade. Et pour réaliser une assistance authentique, il faut des ressources en personnel.55(*) En effet, « L'accompagnement personnel des malades par les chrétiens, les prêtres [et même les soignants] est indispensable pour éclairer et garantir le sens le plus profond de toute l'aide qui leur est apportée au nom du Seigneur »56(*).

Pour que la présence de l'Eglise soit authentique et fructueuse en milieu hospitalier, elle doit collaborer étroitement avec les professionnels médicaux. Car elle a besoin d'eux et eux aussi ont besoin de l'Eglise. La présence de cette dernière en milieu hospitalier n'est pas une occasion de défendre unilatéralement les causes du malade et de fustiger les pratiques et les comportements des soignants. Il faut une présence pacifique.

L'Eglise doit aux soignants reconnaissance et gratitude pour le travail qu'ils effectuent pour le bien des malades. Siracide l'a souligné : «  Honore le médecin pour ses services, car lui aussi, c'est le Seigneur qui l'a créé... » (Si 38, 1-12). Ils ont besoin d'une écoute, d'une proximité, d'un soutien et d'une aide pour vivre leur travail de manière consciente et salutaire. Pour cela, l'Eglise leur assurera une formation. La formation des professionnels de santé et agents pastoraux sera une préoccupation de l'Eglise. Prendre soin de celui qui soigne, qui accompagne les malades, est une manière indirecte de soigner les malades eux-mêmes et de se rendre présent à leur côté.

Elle leur enseignera à être des serviteurs compétents et dévoués, promoteurs de l'humanisation, défenseurs des droits des malades, témoins de Jésus dans le milieu hospitalier.

Ces agents considéreront que recueillir une main moribonde, un geste gentil et un sourire sont plus importants que tous les médicaments. Ils recevront en plus de leur formation, une formation en bioéthique chrétienne et médicale.

L'Eglise entretiendra avec eux une relation faite de dialogue, de collaboration, de formation, de respect. Promouvoir le dialogue et la collaboration avec les soignants et agents pastoraux sera un devoir prioritaire pour l'Eglise.

Parmi les soignants qui font office de soins en milieu hospitalier, il y a des chrétiens. Sous l'impulsion du service de la pastorale ou de l'aumônerie ou relevant de leur propre initiative, ils peuvent créer une association des professionnels chrétiens laïcs qui collabore avec l'aumônier de l'hôpital et l'archidiocèse. Ils vivront l'expérience de leur foi dans l'exercice de leur profession. Par leur canal, l'Eglise pourra intégrer l'organisation hospitalière puisqu'elle est quasi inexistante.

Cette association pourra avoir comme objectif  par exemple :

- Promouvoir un laïcat chrétien engagé dans le milieu hospitalier vivant l'Evangile dans sa profession.

- Susciter des méthodes de soins et des occasions de rencontre, de réflexions sur les questions de santé.

- Aider les agents hospitaliers dans leur épanouissement humain, professionnel, spirituel et religieux ainsi que dans leur formation en bioéthique.

- Promouvoir la santé et les milieux hospitaliers, l'attention intégrale au malade et l'assistance sanitaire à tous les niveaux.

- Collaborer à la défense des droits des malades sans aucune discrimination : « je ne sais qui tu es, de quel pays, de quelle race, de quelle religion tu es, tu souffres et cela me suffit »57(*).

CONCLUSION

L'hôpital est le lieu destiné à procurer la guérison aux malades. Pour cela, il doit être salubre ; car, un environnement sain contribue au maintien de la santé. Le malade admis dans ce milieu recevra du corps médical, de son entourage et de l'Eglise ce dont il a besoin pour se rétablir.

L'Eglise, quand à elle, en tant que famille de Dieu, doit être aujourd'hui comme hier un lieu d'entraide mutuelle et, en même temps, un lieu de disponibilité pour servir aussi des personnes qui, hors d'elles, ont besoin d'aide58(*).

Cette diaconie s'inscrit à la suite de Jésus qui s'est préoccupé de son vivant de soins des malades. Ce n'est pas surprenant, aujourd'hui, de voir l'Eglise s'engager sur les pas de Jésus pour la cause des malades en initiant les hôtels-Dieu et les hôpitaux59(*). Elle est en train de pérenniser l'oeuvre du Christ dans le soin des malades. Nous assistons de nos jours à la multiplication des congrégations religieuses pour s'occuper convenablement des malades avec l'illustre Mère Teresa de Calcutta.

La situation du malade chrétien commence à s'améliorer ; car, l'Eglise l'entoure de sa présence : la chapelle, l'eucharistie, l'onction des malades et la visite. C'est vraiment une Eglise qui se veut proche du monde hospitalier.

L'Eglise doit prendre conscience que seule, elle ne peut résoudre les grands problèmes du monde et surtout du monde hospitalier. Elle a besoin de la collaboration des autres. Sa présence sera faite de coresponsabilité vis-à-vis du milieu. Elle doit contribuer à l'édification d'un milieu favorable à l'épanouissement du malade. Elle veillera à créer à l'intérieur de l'hôpital et des hôpitaux de nouveaux styles de vie chrétienne, adaptés aux temps d'aujourd'hui. Pour cela, l'Eglise doit disposer d'un réel projet pastoral pour les malades et pour le milieu hospitalier. Une priorité sera accordée à la formation de l'équipe pastorale des malades sans oublier les agents médicaux qui le désirent.

Il faut que l'Eglise prie l'Esprit Saint afin qu'il lui donne le charisme d'une nouvelle organisation du service des malades, d'une nouvelle stratégie de présence aux malades. Elle cherchera à assurer la suppléance en milieu hospitalier en réinventant le bénévolat, en signant le contrat, en engageant des chrétiens. Ils deviendront des médiateurs en milieu hospitalier.

La présence de l'Eglise auprès du malade et son soutien à la famille sont possible quand il y a l'engagement et la collaboration de toute une équipe : prêtres, personnel médical, chrétiens et parents.

Les gestes d'écoute, de compréhension et d'affection sont libérateurs pour le malade. L'équipe pastorale y veillera. Elle aura, en outre, un rôle à jouer dans la formation des agents hospitaliers, les inviter à faire leur travail de façon apostolique, à partager une spiritualité, les valeurs et le style du service pastoral s'il y en a. Inviter à vivre les principes éthiques de l'Eglise : c'est un objectif nécessaire. Les soignants seront des signes visibles de l'amour de Dieu pour les patients et leurs familles. Ils témoigneront les valeurs évangéliques auprès des plus vulnérables et souvent oubliés.

Alors, l'archidiocèse aura, ainsi, accompli sa mission de présence auprès du malade hospitalisé.

BIBLIOGRAPHIE

TEXTE BIBLIQUE

Bible de Jérusalem, Cerf / Verbum bible, Paris / Rome, 1999.

INSTRUMENT DE TRAVAIL

Théo. L'Encyclopédie Catholique pour tous, Droguet-Ardant / Fayard, Paris, 1992.

DOCUMENTS DU MAGISTERE

BENOIT XVI, Dieu est amour, Cerf, Paris, 2006.

BENOIT XVI, « En premier lieu l'accompagnement du malade frappé par une maladie infectieuse : il s'agit d'un objectif auquel doit toujours tendre la communauté ecclésiale », in Dolentium hominum 64, 2007, pp. 7-8.

Conseil Pontifical pour la Pastorale des Services de la Santé, Charte des personnels de la santé, Cité du Vatican, Rome, 1995.

OUVRAGES

ALBERTON M., Un sacrement pour les malades dans le contexte actuel de la santé, Centurion, Vendôme, 1978.

BEGUERIE P., DUCHESNEAU C., Pour vivre les sacrements, Cerf, Paris, 1991.

BUGNON R., Lève-toi et marche. Ce Dieu qui invite au voyage, Champ libre, sl, 2000.

FOCANT C., L'évangile selon Marc, Commentaire biblique : Nouveau Testament, Cerf, Paris, 2004.

GAUER P., Le Christ médecin. Soigner : la découverte d'une mission à la lumière du Christ-médecin, C.L.D. L'Emmanuel, Nancy, 1994.

ISRAEL L., Le médecin face au malade, Pierre Mardaga, Belgique, 1968.

LAMARCHE P., La révélation de Dieu chez Marc, Beauchesne, Paris, 1976.

LARCHET J-C., La théologie de la maladie, Cerf, Paris, 1991.

LEGASSE S., L'évangile de Marc. vol. 1, Lectio Divina, Commentaire 5, Cerf, Paris, 1997.

ROSNY (De) E., L'Afrique des guérisons, Karthala, Paris, 1992.

SCHATTNER M., Souffrance et dignité humaine, Mame, Paris, 1993.

SCHILLEBEECKX, E., « Les sacrements dans le plan de Dieu », in Présences 102, 1968.

ARTICLES

BOUCHARD J., « La communauté chrétienne et les malades. Réflexions d'un aumônier d'hôpital », in Lumière et vie 86, 1968, pp. 85-98.

CRESPY G., « La maladie et guérison dans le Nouveau Testament », in Lumière et vie 86, 1968, pp. 45-69.

FRANC E., « Pastorale des maladies infectieuses du point de vue de la personne », in Dolentium hominum 64, 2007, pp. 137-140.

TABARD R., « La paroisse St Kisito à Brazzaville », in Spiritus 154, 1999, pp. 65-70.

DOCUMENT ELECTRONIQUE

http://www.healthpastoral.org/texts/esalud_fr.htm, « La belle-mère de Simon », in L'Evangile de la Santé, consulté le 05 / 01 / 2008 à 10 : 47.

TABLE DES MATIERES

DEDICACE 2

REMERCIEMENTS 3

SIGLES ET ABREVIATIONS 4

INTRODUCTION 5

CHAPITRE I : LE CHRETIEN A L'HOPITAL 6

I. 1. Le milieu hospitalier 6

I. 2. La situation du malade chrétien 7

I. 3. La pratique de l'Eglise 10

CHAPITRE II : JESUS ET LE MALADE 12

I. ANALYSE LITTERAIRE 12

I. 1. Délimitation et contexte 12

I. 2. Approche synoptique 13

I. 3. Genre littéraire et structure 14

II. LA REFLEXION THEOLOGIQUE 15

II. 1. Conception de la maladie intra et extra texte 15

II. 2. Attitude de Jésus par rapport au malade 17

CHAPITRE III : PERSPECTIVES PASTORALES 22

III. 1. LA PROXIMITE ENTRE JESUS ET LE MALADE 22

III. 2. MEDIATION ENTRE JESUS ET LE MALADE 27

CONCLUSION 30

BIBLIOGRAPHIE 32

TABLE DES MATIERES 34

* 1 Pour les citations des livres bibliques, nous utiliserons les abréviations courantes en usage.

* 2 L'archidiocèse de Bangui et les diocèses de : Alindao, Bangassou, Bambari, Berbérati, Bossangoa, Bouar, Kaka-Bandoro et M'baïki.

* 3 Nous avons l'hôpital Communautaire, l'hôpital de l'Amitié et le Centre Hospitalier Universitaire.

* 4 Lucien ISRAEL, Le médecin face au malade, Pierre Mardaga, Belgique, 1968, p. 136.

* 5 Evelyne FRANC, « Pastorale des maladies infectieuses du point de vue de la personne », in Dolentium hominum, 64, 2007, p. 139.

* 6 Ibid.

* 7 Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, article 25, § 1.

* 8 Benoît XVI, Dieu est amour, Cerf, Paris, 2006, p. 64.

* 9 Théo. L'Encyclopédie Catholique pour tous, Droguet-Ardant/ Fayard, Paris, 1992, p. 1107 b.

* 10 Conseil Pontifical pour la Pastorale de la Santé, Charte des personnels de la santé, Cité du Vatican, Rome, 1995, p. 14.

* 11 René TABARD, « La paroisse saint Kisito à Brazzaville », in Spiritus 154, 1999, p. 67.

* 12 Ibid.

* 13 Ibid., p. 66.

* 14 Nganga désigne un médecin traditionnel en Afrique qui soigne à base des herbes et écorces.

* 15 Eric DE ROSNY, L'Afrique des guérisons, Karthala, Paris, 1992, p. 13.

* 16 Benoît XVI, « En premier lieu, l'accompagnement du malade frappé par une maladie infectieuse : il s'agit d'un objectif auquel doit toujours tendre la communauté ecclésiale », in Dolentium hominum 64, 2007, p. 7.

* 17 Camille FOCANT, L'évangile selon Marc, Commentaire biblique : Nouveau Testament, Cerf, Paris, 2004,

p. 94.

* 18 Paul LAMARCHE, Révélation de Dieu chez Marc, Beauchesne, Paris, 1976, p. 60.

* 19 Camille FOCANT, op. cit. , p. 95.

* 20 Ibid., p. 93.

* 21 Simon LEGASSE, L'évangile de Marc, vol. 1, Lectio Divina, Commentaire 5, Cerf, Paris, 1997, p. 135.

* 22 Georges CRESPY, « Maladie et guérison dans le Nouveau Testament », in Lumière et Vie 86, 1968, p. 49.

* 23 Georges CRESPY, op. cit., p. 51.

* 24 Ibid., p. 68.

* 25 Mario ALBERTON, op. cit., p. 65.

* 26 http://www.healthpastoral.org/texts/esalud_fr.htm, « La belle-mère de Simon », in l'Evangile de la Santé, p. 1, consulté le 05 / 01 / 2008 à 10: 47.

* 27 Roland BUGNON, Lève-toi et marche. Ce Dieu qui invite au voyage, champ libre, sl, 2000, p. 80.

* 28 Jean-Claude LARCHET, La théologie de la maladie, Cerf, Paris, 1991, p. 79.

* 29 Ibid., p. 78.

* 30 Ceci rejoint la définition de la santé proposée par l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) selon laquelle : « La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d'infirmité ». Mr BIRO, cours sur La déontologie médicale, Année scolaire 2001-2002 (inédit).

* 31 Philippe GAUER, Le Christ médecin. Soigner : la découverte d'une mission à la lumière du Christ-médecin, C.L.D. l'Emmanuel, Nancy, 1994, p. 42.

* 32 Ibid., p.43.

* 33 Ibid.

* 34 Mario ALBERTON, Un sacrement pour les malades, dans le contexte actuel de la santé, Centurion, Vendôme, 1978, p. 65.

* 35 Jean-Claude LARCHET, La théologie de la maladie, Cerf, Paris, 1991, p. 77.

* 36 Paul LAMARCHE, op. cit., p. 57.

* 37 Mario ALBERTON, op. cit., p. 19.

* 38 Jean BOUCHARD, « La communauté chrétienne et les malades », in Lumière et vie 86, 1968, p. 93.

* 39 Ibid.

* 40 Ibid.

* 41 Mario ALBERTON, op. cit., p. 6.

* 42 Philippe BEGUERIE, Claude DUSCHESNEAU, Pour vivre les sacrements, Cerf, Paris, 1991, p. 203.

* 43 Ibid.

* 44 Jean BOUCHARD, op. cit., p. 94.

* 45 Mario ALBERTON, op. cit., p. 162.

* 46 René TABARD, op. cit., p. 66.

* 47 Jean BOUCHARD, op. cit., p. 100.

* 48 Ibid., p. 89.

* 49 Ibid.

* 50 Mario ALBERTON, op. cit., p. 162.

* 51 Benoît XVI, op. cit., p. 62.

* 52 Ibid., p. 63.

* 53 Mikaël SCHATTNER, Souffrance et dignité humaine, Mame, Paris, 1993, p. 164.

* 54 Mario ALBERTON, op. cit., p. 122.

* 55 Evelyne FRANC, op. cit., p. 138.

* 56 Edouard SCHILLEBEECKX, « Les sacrements dans le plan de Dieu », in Présences 102, 1968, pp. 33-34.

* 57 Citation utilisée dans le jargon médical pour combattre toute forme de discrimination à l'égard du malade. C'est l'être malade qui est le centre d'attention et non les détails.

* 58 Benoît XVI, op. cit., p. 65.

* 59 Philippe BEGUERIE, Claude DUSCHESNEAU, op.cit., p. 21.






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