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Enjeux énergétiques et insécurité dans le golfe de Guinée: contribution à  l'étude des menaces liées à  la ruée vers le pétrole au Nigéria.

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par Fabrice NOAH NOAH
Université de Yaoundé II- Soa - Diplôme d'études appliquées en géostratégie 2011
  

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Paragraphe 3 : Richesse pétrolière et dépendance énergétique: le Nigéria au coeur d'un paradoxe africain.

A. Le pétrole dans l'approvisionnement énergétique mondial :

Le pétrole est aujourd'hui une des sources d'énergie les plus utilisées au monde. Au cours du siècle dernier, il a progressivement supplanté le charbon comme « première source énergétique, indispensable à un mode de développement économique alliant industrialisation, urbanisation et explosion des échanges. ».381 Le pétrole représente près de la moitié de la fourniture de l'énergie primaire, loin devant le charbon, le gaz et le nucléaire. Il est impossible d'envisager, à court terme, un renversement de tendance en matière d'approvisionnement énergétique mondial.

La place du pétrole dans l'approvisionnement énergétique en Afrique est tout aussi importante. Même si la consommation annuelle par habitant y est faible, comparativement à d'autres régions du monde (0,3 tep en moyenne contre 7,8 pour un américain et 4 pour un européen),382 le manque d'alternative au pétrole en décuple l'importance. En effet, le pétrole est la principale énergie dans le transport (essence, kérosène, gaz oil, etc.). Il constitue une matière première importante dans l'industrie chimique, la production électrique, et sert à la fabrication de produits dérivés (médicaments, peinture, matière plastique, détergents, caoutchouc, etc.). La part du pétrole dans les relations commerciales des pays producteurs d'Afrique est demeurée importante au fil des années. Il représente plus de 90 % des exportations de pays comme l'Algérie, la Libye, la Guinée Equatoriale ou le Nigéria.383

B. Production pétrolière et dépendance énergétique du Nigéria :

Le premier producteur de pétrole d'Afrique connait une dépendance énergétique majeure. Les failles observées dans l'organisation et le fonctionnement de sa filière pétrolière, le rendent profondément dépendant de l'expertise technologique extérieure. Dans ces conditions, l'indépendance stratégique ou tout simplement énergétique du Nigéria s'en trouve menacée. Les autorités en charge de la gestion du pétrole, empêtrées dans des luttes pour le contrôle de positions rentières, n'ont pas pu mettre le pays à l'abri d'une éventuelle crise énergétique. La situation du Ni-géria est alors originale, comparée à celles d'autres membres de l'OPEP.

La dépendance énergétique du Nigéria est perceptible à la fois dans l'amont et l'aval pétroliers. Au niveau des activités d'exploration-production, le Nigéria fait montre d'une incapacité stratégique, qui l'expose aux manoeuvres des grands consommateurs. En effet, la compagnie pétrolière nationale, la NNPC, est l'actionnaire

381 -Pascal Lorot, « Géopolitique des hydrocarbures », in Questions internationales n°24, mars-avril 2007.

382 -Ngoungue Stéphane, les enjeux de l'énergie pour l'Afrique, exposé présenté dans le cadre de l'UE PHY 595 intitulée géopolitique des hydrocarbures, master II de physique, Université de Yaoundé I, année académique 2011-2012.

383 -Voir Etanislas Ngodi, Gestion des ressources pétrolières et développement en Afrique, 11e assemblée géné-rale du CODESRIA, 6-10 décembre 2005, Maputo, Mozambique, 30 pages.

Noah Noah Fabrice, Science po 5, Université de Yaoundé II-Soa. Page 90

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majoritaire dans les joint-ventures qui le lient aux multinationales.384 Par ce procédé, l'Etat essaye d'assurer le leadership du Nigéria sur son secteur pétrolier, tout en évitant la nationalisation des réserves. Cependant, à cause de problèmes financiers et politiques, l'Etat assure difficilement ses charges dans les différentes associations pétrolières. Selon Philippe SEBILLE-LOPEZ, « A l'amont, le principal problème pour le gouvernement fédéral est de financer les appels de fonds correspondant à sa quote-part dans les joint-ventures. ».385 En 2004, le gouvernement nigérian a difficilement obtenu du sénat 3,2 milliards de dollars de crédit budgétaires, alors que les besoins de la NNPC étaient évalués à 5 milliards de dollars.386 L'impossibilité pour l'Etat de remplir ses obligations financières en matière pétrolière réduit ses chances d'intervenir directement dans les activités d'extraction. L'industrie pétrolière nigériane devient alors dépendante des investissements et de l'expertise extérieurs.

L'organisation de la filière amont de l'industrie pétrolière nigériane a ceci de particulier qu'elle accorde l'exclusivité du travail de terrain à des actionnaires minoritaires. Les compagnies pétrolières internationales, malgré leurs parts relativement faibles dans les joint-ventures, sont les opérateurs chargés d'extraire le pétrole du sous-sol et des fonds marins. La compagnie SHELL par exemple, qui est partie dans une joint-venture avec l'Etat dont elle détient 30% des parts, tandis que celui-ci en possède 55%, est chargée des activités au jour le jour sur le terrain.387 Le Nigéria fait ainsi preuve d'une immaturité stratégique qui accentue sa dépendance énergétique. L'approvisionnement du pays en pétrole est, ainsi, tributaire des volumes extraits et effectivement déclarés par les multinationales, travaillant dans l'amont pétrolier.

Au niveau de l'aval pétrolier, le Nigéria connait essentiellement un problème d'approvisionnement de son marché en produits raffinés. Le pays possède 4 raffineries de pétrole : une au nord à Kaduna et trois au sud, dans les villes de Port-Harcourt (deux) et de Warri (une). Elles lui assurent une capacité théorique de raffinage de 438 000 barils par jour,388soit environ 69 642 000 litres de pétrole. Or, à cause d'une mauvaise gestion « chronique », les raffineries nigérianes produisent un peu plus de la moitié de ces chiffres. La NNPC, qui reçoit des compagnies opératrices 57% de la production totale de pétrole brut, est alors obligée d'en exporter une grande partie.389 Ainsi, l'essentiel des produits pétroliers que l'on retrouve sur le marché nigérian est importé. Le premier producteur de pétrole d'Afrique se trouve en être également un importateur net. Les sommes engagées dans l'achat du pétrole raffiné à l'étranger sont importantes. Selon Sanusi Lamido Sanusi, gouverneur de la Banque centrale du Nigéria, le pays a utilisé près de 16 milliards de dollars de ses réserves

384 -Cf. supra

385 - Philippe Sébille-Lopez, « les hydrocarbures au Nigéria et la redistribution de la rente pétrolière », in Afrique contemporaine n°216, avril 2004, P

386 -Idem.

387 - Voir Amnesty International, CEHDR, La vraie « tragédie ». Retards et incapacité à stopper les fuites de pé-

trole dans le Delta du Niger, Amnesty international, novembre 2011, P. 26

388 -Cf. Alexandra Gillies, « Reformer la corruption de l'or noir nigérian ? Première partie : cartographie des risques de corruption dans la gouvernance de la filière pétrole. », in U4 brief n°23, septembre 2009, disponible sur http://www.u4.no/

389- Voir Ian Gary, Terry Lynn Karl, Le fond du baril, catholic relief services, Juin 2003, p.26

Noah Noah Fabrice, Science po 5, Université de Yaoundé II-Soa. Page 91

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de change, au cours des onze premiers mois de l'année 2011, pour importer du pé-trole.390 Il dépend presque autant des importations de pétrole que certains pays peu ou non producteurs. Cette dépendance pétrolière du Nigéria, en plus de l'exposer aux aléas du marché international, réduit considérablement l'impact économique et social du pétrole.

L'importation de produits pétroliers raffinés par le Nigéria a un coût économique considérable. En effet, pour permettre aux nigérians d'acheter du pétrole moins cher, l'Etat en subventionne les prix. Les distributeurs achètent le pétrole aux prix du marché international, puis le revendent aux prix subventionnés. Une filiale de la compagnie pétrolière nationale leur rembourse la différence. Avant la tentative de suspension des subventions aux prix du pétrole de janvier 2012, elles coûtaient annuellement à l'Etat fédéral près de huit milliards de dollars, soit plus du quart de ses dépenses.391 Le soutien de l'Etat aux prix à la pompe lui fait perdre des moyens financiers considérables et constitue une poche de corruption et de détournement des fonds.392 En outre, il ne résout pas le problème de la dépendance énergétique du Nigéria. Bien qu'étant pour ses adeptes le « seul bienfait tangible de la richesse pétrolière pour la plupart des nigérians »,393 la subvention aux prix du pétrole est une manoeuvre politicienne qui grève le budget de l'Etat et l'empêche de songer à l'amélioration des capacités de raffinage du pays. Cette situation rend alors incertaine l'approvisionnement énergétique du pays, dont la population est appelée à croitre considérablement.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon