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Enracinements polynésiens d'hier et d'aujourd'hui dans l'archipel de Nouvelle Calédonie

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par Tomasi TAUTU'U
Université de Nouvelle Calédonie - Master 2 arts, lettres et civilisations option francophonie 2012
  

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2. L'expansion de l'empire « tongien »

Ainsi comme l'avons dit plus haut, la Polynésie dite « marginale » est en fait le retour des populations qui étaient passées par là des siècles, voir plusieurs millénaires auparavant. La tradition orale de Wallis et Futuna commence elle, avec l'arrivée des Tongiens dans ces archipels ; le Père Henquel a recueilli cette histoire des origines au début du XXème siècle:

« On raconte que Maui Atalaga et Maui Kisikisi ; le père et le fils seraient parti de Aotéaroa à la recherche d'une terre d'asile et auraient découvert ainsi Tonga et Uvea.

Ils arrivèrent d'abord à Tonga puis à Uvéa et constatèrent que ces îles étaient inhabitées. Ils repartirent vers les îles Samoa puis revinrent à Tonga où ils s'installèrent sur l'île de Vavau au lieu dit Mataika. Peu de temps après, ils se rendirent à Tongatapu au lieu dit Hamene'uli. Le monument Ha'amonga à Maui est la marque de leur passage, il fut construit par le Tu'i Tonga Tu'itatui. L'île de Tonga fut alors peuplée.

Beaucoup plus tard, deux Tongiens nommés Hauolekele et Ufi allèrent à Uvea, ils firent rejoints par un troisième Tongien nommé LUPELUTU ; Ces trois Tongiens et leurs femmes seraient à l'origine de la population de l'île d'Uvea.

Quand la population commença à être nombreuse, le noble Hoko ou Tu'uhoko arriva à Tonga et s'intitula chef d'Uvea et intronisa Tauloko comme premier Hau»91(*).

Des guerres se succèdent entre les Uvéens et les envahisseurs Tongiens, avant que Wallis deviennent plus ou moins indépendant au XVIIIème siècle. Guerres de chefs et vengeances tongiennes, ont alimenté la mémoire des « vieux » encore vivace. Depuis, l'île de Wallis est imprégnée de la culture et de la structure politique tongienne92(*). Bernard BROU93(*) dans son ouvrage d'essai historique, souligne qu'il y avait eu plusieurs vagues de migrations polynésiennes : une vers 1100 ou 1500, puis vers 1700 en Nouvelle Calédonie94(*). Cependant, on ne peut s'empêcher de faire le lien entre ces migrations, et les évènements politiques de l'Océanie Centrale durant cette période.

Toujours est-il, que ces migrations sont liées à l'expansion de l'empire Tonga. I.C Campbell qui est spécialisé dans l'histoire des Tonga, ayant collaboré avec J.P Latouche chercheur au CNRS, dans l'ouvrage « Les insulaires du Pacifique 94(*)» nous indique que : 

Carte 4- Le berceau polynésien

« Seul parmi les groupes insulaires du Pacifique, Tonga avait établit un système politique centralisé et unifié, sous l'autorité d'un seul monarque le TUI TONGA. Les traditions et les généalogies suggèrent que ce développement se produisit au Xème siècle après Jésus Christ, et à l'époque de la visite de l'explorateur hollandais Abel TASMAN en 1643, il y avait les signes d'une paix durable établies. Celle-ci se maintient, semble-t-il pendant un autre siècle et fut alors apparemment menacée par des ambitions dynastiques. »

Apparemment, Tonga propagea son influence sur toute « la Polynésie Centrale » avec entre autre Fidji, Samoa, en passant par Uvéa et Futuna. On verra plus tard, que le contexte particulier dans cette zone, va favoriser les excursions hauturières de grande envergure95(*). L'affaiblissement de l'hégémonie tongienne au XVIIIème siècle est, selon l'auteur, dû aux conflits internes entre les chefs en quête de suprématie. En 1799, une guerre civile éclata jusqu'en 1852, au moment où un chef de l'île de Ha'pai prit le pouvoir à Tongatapu pour former la dynastie actuelle. Les auteurs rajoutent :

« Ces dynasties ont pu se maintenir grâce à la mise en avant du « statut » au détriment de « la parenté », le «  territoire » a pris le pas sur «  la descendance » comme nouveau concept identitaire d'un groupe social.  Le mana devait être remplacé par un concept plus séculier de légitimité, et le tabou par un procédé juridique plus systématique.  Cette nouvelle donne, va permettre d'avoir un pouvoir centralisé autour d'un monarque ».

Remarquons tout de même, que cette physionomie politique n'a pas survécu dans les îles mélanésiennes occupées exclusivement d'exilés de l'Océanie centrale. Sans doute, que ces migrations « polynésiennes » fuyaient ce dictat imposé par Tonga, et qu'elles constituaient en fait, des « réfugiés politiques »96(*). Le système de chefferies que ces migrants rencontrent dans les sociétés mélanésiennes seront à leur avantage, à partir du moment où les accueillants les pousseront à devenir leur chef97(*). Grâce au système de filiation, les nouveaux chefs pourront pérenniser leur propre statut à leur descendance filiale98(*) alors que cela n'était pas systématique en Polynésie dû à la multiplication des prétendants au sein de la famille. Jean GUIART fait allusion à cette problématique, quand il constate qu'à Ouvéa, Nékélo le chef théorique suprême au départ de Wallis n'est plus aussi respecté à l'arrivée à Ouvéa par ses compagnons de route99(*), et que les chefferies de ces populations migrantes sont calquées sur les chefferies « mélanésiennes ».

De même, à cette même époque à Viti Levu, la petite communauté de BAU (petite île à l'ouest de Fidji) prétendra à la suprématie dans tout l'archipel, de par la stratégie de mariage entre les grandes lignées d'une part, et d'autre part par leur maîtrise de la technologie maritime.

Concernant les dynasties d'Hawaï et de Tahiti en Polynésie Orientale, la perte de vitesse de la suprématie des chefs, sera due aux conflits entre les prêtres traditionnels et les chefs. Ces nouvelles donnes permettront à ces dynasties d'organiser des voyages maritimes ; les conflits internes dans les îles se traduiront par des fugues. La surpopulation, les catastrophes naturelles100(*), la famine, contribueront à ces départs en pirogue double vers l'Est comme vers l'Ouest. Un essai intéressant de Léo Paléo101(*) a été publié en 1993 dans le bulletin scientifique de la Société d'Etudes Historiques. Il aborde «  l'épopée de la dynastie tongienne » et l'influence tongienne à « Wallis » et à Futuna102(*).

Ainsi, le contexte politique tongien au début du premier millénaire, a favorisé les migrations des populations du berceau « polynésien » (Tonga, Samoa, Futuna, Wallis, Fidji etc.) vers les archipels de l'ouest, et notamment vers celui de la Nouvelle-Calédonie. S'intéresser à ces îles annexées (ou confiées) par ces « Polynésiens » dans l'espace mélanésien, nous serait profitable.

Fig.8 et 9 - Ustensiles anciens des Tongiens

* 91 Le Père Henquel a publié, vers 1910, Talanoa ki Uvea nei, Wallis, Presses de la Mission, 63p. Il s'agit d'un recueil de généalogies et de l'histoire traditionnelle de Wallis, encore largement commentée de nos jours.

* 92 Ch. SAND in. 101 mots pour le dire- Wallis et Futuna, Iles de lumière, 1999, p 95.

* 93 Bernard BROU, Préhistoire et société traditionnelle de la Nouvelle Calédonie, 1987, Edition SEHNC, cite AVIAS p 147.

* 94 I.C Campbell &JP Latouche, Les insulaires dans le Pacifique, Edition PUF, 2001 p 46 à 53.

* 95 La tradition Wallisienne fait allusion à des voyages légendaires comme celui d'une pirogue géante connue sous le nom de Lomipéau.

* 96 Nous verrons dans le chapitre IV que ce sera le cas de Kaukelo à Ouvéa.

* 97 Raymond H. LEENHARDT, Au vent de la Grande-Terre- les îles Loyautés de 1840 à 1895, p 9. Cet auteur suppose que « l'absence de femmes » dans les pirogues polynésiennes s'est traduit par l'adoption de ces migrants de l'organisation politique des sociétés mélanésiennes, p11.

* 98 Notons qu'à Wallis et Futuna, le roi n'est plus forcément élu de père en fils mais un roi peut être destitué par un autre prétendant membre de la même famille, puisqu'il y a plusieurs lignées éligibles à cette plus haute fonction. Les intermariages rendent complexes les palabres et le consensus.

* 99 Jean GUIART, la chefferie en Mélanésie, Institut d'Ethnologie, 1992, p 438. Effectivement toutes les familles d'origines wallisiennes ne dépendent pas forcément de la chefferie Nékélo sensées représenter les clans d'origine uvéenne.

* 100 Les volcans, les cyclones, les tsunamis et les tremblements de terre sont fréquents dans cette partie du monde.

* 101 Spécial Wallis et Futuna, SEHNC, n° 97, 1993, Ancienne et récente préhistoire de Wallis et Futuna, p 29 à 35.

* 102 Cf. notamment LELEVAI, l'influence Tongienne à Wallis et Futuna, Mémoire de maîtrise à l'UNC.

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