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Le " retour forcé " des roumains en Roumanie, depuis 2007

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par Audrey Guitton
Université de Poitiers - Master migrations internationales 2011
  

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3) Les migrants

Marc Parant explique que ces aides « favorisent le retour au pays d'immigrants prêts à y retourner de toute façon, par choix personnel, et forcent d'autres individus à un retour au pays qu'ils ne souhaitent plus, notamment à cause du décalage de mode de vie et de liberté individuelle. »76 En fonction des personnes reconduites, un même programme peut donc prendre la forme d'un retour forcé, ou volontaire. Certains d'entre eux subissent cette situation. D'autres y ont trouvé le moyen de rentrer « gratuitement », tout en ayant de quoi revenir. Si une personne parvient à bénéficier d'une ARH, plus d'une fois, sa migration peut prendre une forme de circulation migratoire. Les ARH sont distribuées et signées, dans un climat d'urgence et en l'absence de traducteurs. Il n'est donc pas rare que les noms de certains bénéficiaires, ne soient pas correctement orthographiés sur les documents. Ces personnes sont donc enregistrées dans l'application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France, (AGDREF) sous un nom erroné. Il me paraît ici important de noter que si certains Roumains utilisent l'OFII et les ARH pour rentrer en Roumanie gratuitement, l'OFII, lui, utilise les Roumains pour « faire du chiffre » et ainsi montrer l'efficacité de ses programmes77. S'il n'y avait plus personne à reconduire, les ARV et les ARH perdraient leur raison d'être.

L'entretien, réalisé par Mh., auprès d'une famille Rom ayant migré en France s'avère pertinent dans ce contexte. Mh. l'a résumé et je l'ai traduit. En Roumanie ils ne réussissent pas à survivre avec huit enfants, il n'y a pas de travail et pas assez d'argent pour survivre. [...] Ils sont partis en France pour aider les enfants. Là-bas il y a une plus grande chance de se débrouiller, l'argent à une autre valeur. [Le père] est mécanicien, il répare des voitures et la paye est meilleure [en France] qu'en Roumanie. [...] [En France, la famille] vivait dans une caravane de Rom, ce n'était pas facile, il y avait une grande misère, sans eau, etc... mais c'est mieux qu'en Roumanie. Il n'y avait pas de problème avec les autorités, ils ont même reçu les allocations de l'État français qui s'assurent de la survie des enfants quand on a pas de travail. [...] Quand ils sont revenus de France, avec la famille (frères, soeurs, parents) ils ont payé des dettes. Ils connaissent l'OFII mais

75 Ibid.

76 Parant M., « Échecs et illusions des politiques d'aide au retour », Hommes et migration n°1223, Janvier-février 2000. p 85.

77 Romeurope, Témoignage sur le déroulement des opérations de retour organisées par l'ANAEM. Rapport 2008.

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ça ne convient pas pour ceux qui veulent rester en France, et pas en Roumanie. Ils aimeraient bien rester chez eux, en Roumanie, mais ils n'ont pas de maison, pas de travail, la famille s'appauvrit et ils n'y peuvent rien. Leur seul espoir est de rester en France, pour l'avenir des enfants. [...] Ils ne veulent pas rester en Roumanie, parce qu'ils n'ont aucune chance de survivre, s'ils ne réussissent pas en France, ils sont décidés à partir dans un autre pays avec les enfants, mais plus en Roumanie.78

Bien que cette famille affirme vouloir rester en France, elle s'est installée dans la mobilité, sans le concours de l'OFII. Si cette famille avait pu bénéficier de l'aide au retour humanitaire, cela n'aurait probablement pas changé son mode de vie, mais simplement accéléré le mouvement. De plus, cette famille exprime son désir de partir, en France ou ailleurs. Ceci est extrêmement significatif. En effet, je peux en déduire que si l'État français décide de freiner le mouvement des populations roms, les migrants ne s'arrêteront pas de circuler, ils iront ailleurs. Ils sauront s'adapter à nouveau aux politiques mises en place à leur encontre.

Si les migrants doivent s'adapter aux politiques mises en place à leur encontre, cela implique que ces politiques ne leur sont pas adaptées. Les migrants ne sont pas consultés pour l'élaboration des projets leur étant destinés. F.R.A écrit à ce propos : « The research found little evidence of Roma involvement in the design and implementation of responses to their situation, particularly within the context of local authority interventions. [...]although individual Roma activists who are country nationals are very often the key (or only) source of support for Roma from other Member States. »79 Nous avons vu que les Roms, rencontrés dans le cadre de cette étude, forment l'élite Rom. Bien qu'ils se battent pour la reconnaissance des droits des Roms, parfois, ils ne connaissent que très peu les communautés qu'ils doivent aider.

Pour conclure, les conceptions des différents acteurs engagés dans les ARH et les aides à la réinsertion, de ce que représente l'action sociale et humanitaire, divergent. Au sein même de l'OFII, les assistants et les auditeurs ne s'accordent pas sur ce terme. Les autorités locales ont un répertoire d'action très limité et doivent prendre en compte l'opinion de leur électorat. Les différentes ONG et leurs membres ont, eux aussi, des représentations des besoins des communautés aidées, et des actions à mettre en place, qui peuvent être discordants. Enfin les migrants sont absent des cercles décisionnels, avec lesquels ils n'ont aucun dialogue. Ceci implique que les politiques et les actions mises en place à leur endroit, ne leur sont pas adaptées.

78 Annexe 1 : extraits d'entretiens.

79 F.R.A., op. cit., pp. 73-74.

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