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Analyse du développement de la zone commerciale de périphérie Avignon nord - étude de la stratégie des acteurs privés et du rôle des pouvoirs publics.

( Télécharger le fichier original )
par Laurent GIRARD
Institut d'urbanisme et d'aménagement régional d'Aix-en-Provence - Master 2 urbanisme et aménagement spécialité projet urbain et action opérationnelle 2011
  

Disponible en mode multipage

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~ST6 PAUL ce?

Institut d'Urbanisme et d'Aménagement Régional ~j

Université Paul Cézanne Aix-Marseille III

MARSE0-'t

2, avenue Henri Poncet 13628 Aix-en-Provence Cedex 01

Adresse postale : 3 ay. Robert Schuman 13628 Aix-en-Provence Tél. 04 42 64 61 94 / Fax. 04 42 64 61 91. http://www.iar.u-3mrs.fr

Analyse du développement

de la zone commerciale

de périphérie Avignon Nord

Etude de la stratégie des acteurs privés
et du rôle des pouvoirs publics.
Pistes de réflexion pour son avenir
dans un contexte de développement durable.

GIRARD Laurent

Mémoire soutenu le 20 octobre 2011

Master 2 Urbanisme et Aménagement
Spécialité Urbanisme durable et projet territorial
Option Projet d'urbanisme et action opérationnelle

Année universitaire : 2010-2011

Directeur de mémoire : M. Bernard PLANQUE

Président du jury :

M. Denis BERTHELOT

1

Remerciements

Je tiens tout d'abord à remercier M. Lionel CHAMPEY et Mme Caroline LOUVET de la Chambre de Commerce et d'Industrie de Marseille Provence qui, au cours d'un précédent stage, ont su éveiller chez moi l'intérêt que je porte aujourd'hui au commerce dans l'urbanisme.

Je remercie également l'ensemble de l'équipe de l'Agence d'Urbanisme de l'Aire Avignonnaise, et plus particulièrement Mme Ingrid HAUTEFEUILLE, qui m'a accompagné pendant les quatre mois de stage qui ont précédé la rédaction de ce travail.

Au cours de l'élaboration de ce mémoire, un certain nombre de personnes m'ont aidé, guidé et soutenu. Je tiens particulièrement à remercier M. Bernard PLANQUE, mon directeur de mémoire, pour sa disponibilité et ses conseils avisés. Je remercie également M. Denis BERTHELOT, qui a accepté de lire mon travail et de participer au jury de ma soutenance.

Je souhaite également adresser mes sincères remerciements à l'ensemble des professionnels qui ont bien voulu me recevoir et qui m'ont apporté leur aide. Je pense particulièrement à M. Jérôme GOURMELON, Mme Julie GUIROY, et M. Jean-Louis PERRIN de la Communauté d'Agglomération du Grand Avignon mais également à Mme Sara SHERIFF du groupe Immochan et à M. Michel LACROZE, architecte-urbaniste.

Enfin, je souhaite saluer le soutien dont on fait preuve mes proches et ma famille, tout au long de l'élaboration de ce mémoire.

2

Sommaire

Sommaire 2

Introduction 4

1. Présentation de la zone commerciale et des problèmes urbains qui lui sont

 

associés

6

1.1

La zone commerciale et son contexte urbain

6

1.2

Un poids économique incontestable

13

1.3

Un espace dominé par l'automobile

18

1.4

Des paysages transformés par ces nouveaux usages

26

2 Les stratégies d'implantation et d'évolution du commerce de périphérie 31

2.1 Les critères nécessaires à l'implantation commerciale 31

2.2 La diversification des activités sur la zone commerciale 47

3 Le rôle des pouvoirs publics dans le développement de cette zone

commerciale de périphérie 55

3.1 Des élus locaux séduits par les ressources fiscales et le développement de l'emploi

sur leur commune 55

3.2 Le rôle des acteurs du développement routier et autoroutier 62

3.3 L'échec des lois visant à limiter le développement commercial de périphérie 70

4 La zone commerciale Avignon Nord peut-elle s'inscrire dans un projet de

ville durable ? 79

4.1 Construire un projet urbain pour freiner le développement commercial de

périphérie 79

4.2 La mobilité durable et son impact sur la compétitivité du pôle 84

4.3 Avignon Nord peut-elle muter sur des initiatives privées ? 92

Conclusion 102

Bibliographie 105

Table des matières 112

3

Liste des abréviations

A.U.R.A. : Agence d'Urbanisme de l'aiRe Avignonnaise

C.C.I. : Chambre de Commerce et d'Industrie

C.D.A.C. : Commission Départementale d'Aménagement Commercial

C.D.E.C. : Commission Départementale d'Equipement Commercial

C.D.U.C. : Commission Départementale d'Urbanisme Commercial

C.E.R.T.U. : Centre d'Etudes sur les Réseaux, les Transports, l'Urbanisme et les constructions

publiques

C.E.T.E. : Centre d'Études Techniques de l'Équipement

C.N.C.C. : Conseil National des Centres Commerciaux

C.R.E.D.O.C. : Centre de Recherche pour l'Étude et l'Observation des Conditions de Vie

D.A.C. : Document d'Aménagement Commercial

E.P.C.I. : Etablissement Public de Coopération Intercommunale

G.S.D. : Grande Surface Déspécialisée

G.S.S. : Grande Surface Spécialisée

I.C.E. : Indice de Concentration d'Emploi

I.D.C. : Indice de Disparité de Consommation

I.N.S.E.E. : Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques

I.R.I.S. : Ilot Regroupé pour des Indicateurs Statistiques

M.S.S. : Moyenne Surface Spécialisée

P.A.D.D. : Projet d'Aménagement et de Développement Durable

P.LU. : Plan Local d'Urbanisme

P.O.S. : Plan d'Occupation des Sols

S.C.o.T. : Schéma de Cohérence Territoriale

S.D.e.C. : Schéma de Développement Commercial

S.H.O.N. : Surface Hors OEuvre Nette

S.N.C.F. : Société Nationale des Chemins de Fer

S.R.U. : Solidarité et Renouvellement Urbain (loi)

T.C.S.P. : Transports en Commun en Site Propre

4

INTRODUCTION

Le développement durable est aujourd'hui au coeur de toutes les problématiques urbaines. Dans ce modèle d'urbanisme respectueux du territoire, le commerce occupe une place de premier choix. Il est un élément fondateur de la ville et il permet de répondre à des besoins de consommation vitaux pour la population. En cela, il doit être accessible par tous. Les zones commerciales de périphérie semblent être en décalage par rapport à l'idéal du commerce dans le développement durable. Elles sont associées au déclin commercial des centres-villes, à la séparation des fonctions urbaines, à l'étalement des villes et à la dépendance automobile. Ainsi, elles apparaissent comme des « verrues » au sein des terres agricoles et naturelles.

Les promoteurs de projets commerciaux et les élus locaux sont souvent critiqués et jugés responsables de ces problèmes. Ce mémoire propose de faire la part des choses en analysant précisément la stratégie de chacun des acteurs. Chaque décision doit en effet être étudiée dans son contexte, notamment lorsqu'elle concerne un sujet économique aussi sensible que le commerce. Nous allons voir comment les périphéries sont devenues des espaces à fort potentiel commercial, alors que quelques dizaines d'années auparavant, elles ne pouvaient avoir que des usages agricoles.

Cette analyse devra nous permettre de comprendre pourquoi le plancher commercial de périphérie ne cesse de croître, alors que de multiples réformes législatives tentent de le freiner. A l'échelle nationale, le sujet fait plus que jamais débat et le Parlement prépare une énième réforme de l'urbanisme commercial.

Pour comprendre le fonctionnement du commerce de périphérie, nous allons étudier l'exemple de la zone commerciale Avignon Nord. Ce pôle d'influence régionale illustre particulièrement bien les problèmes urbains engendrés par la nouvelle concentration du commerce. Il nous éclairera également sur la position des élus locaux vis-à-vis de l'essor des périphéries. Ce site est particulièrement stratégique à l'échelle locale et il fait l'objet d'une étude de l'Agence d'Urbanisme de l'Aire Avignonnaise (AURA). L'objectif est de restructurer Avignon Nord pour l'intégrer dans un projet de ville durable.

Le pôle Avignon Nord est une zone commerciale. C'est-à-dire qu'il se compose d'une multitude de bâtiments disposés sous la forme d'un lotissement commercial. Il comporte en son sein des activités non commerciales, comme des bureaux ou des entreprises logistiques,

5

mais elles restent très minoritaires. Ces entreprises annexes existent dans toutes les zones commerciales.

Une zone commerciale ne doit pas être confondue avec un centre commercial qui lui regroupe un ensemble d'enseignes sous un même bâtiment. Avignon Nord est une zone commerciale structurée autour d'un centre commercial Auchan. Ce dernier est la locomotive du pôle. Ce terme signifie que c'est l'élément le plus attractif et que c'est lui qui génère l'essentiel de la clientèle.

Comprendre ce type de principes de fonctionnement est essentiel dans l'étude d'une zone commerciale. Le commerce occupe une place importante dans le système économique local. Il crée de l'emploi et génère des ressources fiscales auxquelles les élus sont particulièrement sensibles. Les réalités économiques sont donc au coeur des problématiques de ce mémoire. Par sa taille et son poids économique, la zone commerciale Avignon Nord illustre parfaitement les enjeux qui existent autour du commerce de périphérie.

Pour comprendre son développement, nous allons confronter les stratégies des acteurs publics et privés. Cette analyse nous montrera comment les différents objectifs économiques ont convergé vers cette nouvelle forme de commerce, pourtant opposée au concept de développement durable. Nous chercherons également à comprendre comment les zones commerciales périphériques sont devenues de nouvelles centralités.

L'objectif de ce mémoire est également de montrer que l'ensemble des politiques d'urbanisme, et notamment les projets liés aux transports, influencent le développement commercial. L'urbaniste doit donc connaître le comportement des acteurs privés pour anticiper leurs réactions face à tout nouveau projet urbain.

Le rôle des pouvoirs publics est alors crucial. Entre régulation, désinvolture et soutien, pourquoi ont-ils eu des comportements contradictoires vis-à-vis du commerce de périphérie ?

Pour construire cette démonstration, nous allons tout d'abord mettre en évidence les problèmes d'urbanisme liés à cette zone commerciale (partie 1). Pour comprendre comment sont apparus ces disfonctionnements, nous analyserons la stratégie des acteurs privés du développement commercial de périphérie (partie 2). Nous confronterons ces méthodes avec les différentes actions des pouvoirs publics qui ont pu avoir un impact sur la zone commerciale (partie 3). Après avoir cerné l'ensemble du jeu d'acteurs, nous verrons dans quelle mesure Avignon Nord peut s'inscrire dans un projet de ville durable (partie 4).

6

1. Présentation de la zone commerciale et des problèmes urbains qui lui sont associés

Cette partie va nous permettre d'analyser la zone commerciale Avignon Nord et ses conséquences sur le territoire. Mais elle a aussi pour objectif de montrer les intérêts économiques qu'elle peut représenter.

Au sein de la zone commerciale, il convient de dissocier les commerces en fonction de leur taille et des produits qu'ils proposent. Les points de vente de plus de 2500 m2 sont appelés grandes surfaces. Si plus d'un tiers du chiffre d'affaires d'une grande surface repose sur la vente de produits alimentaires, on parlera d'hypermarché ou de grande surface déspécialisée (GSD). Ce terme s'oppose aux grandes surfaces spécialisées (GSS), du type Leroy-Merlin ou Décathlon, qui ne vendent qu'un seul type de produits. De la même manière, on distingue, au sein des moyennes surfaces (de 400 à 2500m2 de surface de vente), les supermarchés et les moyennes surfaces spécialisées1. Le terme de grande distribution va permettre de regrouper l'ensemble des grandes et moyennes surfaces. Toutefois, le commerce de périphérie comporte également des commerces de petite taille, principalement situés en galerie marchande.

1.1 La zone commerciale et son contexte urbain

1.1.1 Une zone commerciale régionale qui s'affranchit des limites administratives

La zone commerciale d'Avignon Nord est née en 1974 avec l'arrivée de l'enseigne Auchan et de quelques commerces annexes. Depuis, elle s'est considérablement développée jusqu'à devenir un pôle commercial régional. L'agglomération d'Avignon bénéficie d'une situation privilégiée. Elle se situe au carrefour de deux flux économiques majeurs : l'axe rhodanien Paris-Lyon-Marseille et l'arc méditerranéen reliant l'Espagne et l'Italie (cf. figure 1).

1 Insee - définitions

Figure 1 : Une agglomération située sur des flux économiques européens. (Source : SCoT du Bassin de Vie d'Avignon, PADD, p.9)

7

A une échelle plus fine, la situation est tout aussi stratégique. La zone commerciale est située sur l'une des rares entrées de ville de l'agglomération, au carrefour des flux provenant de Carpentras et d'Orange (cf. figure 2). Le développement de la ville d'Avignon est, en effet, historiquement contraint par deux cours d'eau majeurs : le Rhône à l'Ouest, et la Durance au Sud. L'urbanisation s'est donc principalement développée vers l'Est. Le Pontet a été la première commune concernée par cette croissance démographique. Ensuite, le phénomène de périurbanisation s'est développé en direction de Carpentras, puis de son arrière pays.

Figure 2 : L'Aire avignonnaise : un développement tourné vers l'Est (Conception : Girard, 2011. Fond de carte : Géoportail.fr)

8

Si le contexte urbain d'entrée de ville est facile à cerner, le découpage administratif est, quand à lui, beaucoup plus complexe. La zone commerciale occupe une surface d'environ un kilomètre carré, répartie pour 60% sur la commune du Pontet, 30% sur la commune de Sorgues et 10% sur la commune de Vedène (cf. figure 3). La partie la plus ancienne se trouve au nord de la route de Carpentras, sur les communes du Pontet et de Sorgues. Les secteurs au Sud de cette route départementale sont des extensions récentes. Celle située sur la commune du Pontet s'est développée à partir de 2003, sur le lieu-dit de la Tour Blanche, et comporte trois grandes surfaces spécialisées. La part de zone commerciale sur Vedène est en totalité occupée par l'enseigne Ikéa, ouverte en 2010. L'enseigne est en train de développer une vaste galerie commerciale qui devrait ouvrir fin 2011.

Figure 3 : Une zone commerciale qui s'affranchit des limites administratives (Conception : Girard, 2011. Fond de carte : geoportail.fr)

9

On remarque donc que le développement commercial s'est affranchi des limites administratives. Le phénomène le plus révélateur est de voir que le bâtiment du centre commercial Auchan est implanté sur une limite communale. Il est donc en partie sur la commune du Pontet et en partie sur celle de Sorgues. Cela pose des problèmes pour la gestion du site et la collecte des diverses taxes car, si le Pontet et Vedène appartiennent à la Communauté d'Agglomération du Grand Avignon, Sorgues fait partie de la Communauté de Communes des Pays de Rhône et d'Ouvèze. Le SCoT du bassin de vie d'Avignon (cf. figure 4), en cours d'approbation, devra permettre une meilleure coordination des ces deux intercommunalités.

Figure 4 : Un SCoT qui permet de rassembler les intercommunalités concernées (Source : SCoT du Bassin de vie d'Avignon, Rapport de présentation, p. 63)

10

1.1.2 Un commerce de centre-ville déstabilisé

Avignon Nord est, de loin, la plus importante des zones commerciales de l'agglomération en termes de chiffre d'affaires. Cependant, elle n'est pas la seule. Il existe quatre autres zones commerciales de périphérie (cf. figure 5) disposées pour la plupart en entrée de ville. La particularité du commerce de l'agglomération tient au fait que le centre-ville d'Avignon est le quatrième pôle commercial en termes de chiffre d'affaires2. Le bureau d'études AID-Observatoire estime que dans les agglomérations de taille similaire, la ville centre est généralement en première ou seconde position. Dans le cas présent, Avignon est un pôle secondaire qui ne réalise que 7% du chiffre d'affaires de l'agglomération (contre 34% pour Avignon Nord).

Figure 5 : Avignon Nord, premier pôle commercial de l'agglomération (Source : AID-Observatoire, 2011. Etude Avignon Nord p.18)

2 Groupement Interland, AID-Observatoire, Transitec, i pour le compte du Syndicat Mixte du SCoT du Bassin de vie d'Avignon (2011), Stratégie d'évolution du « pôle régional Avignon Nord » phase diagnostic, 85p.

11

Cette particularité avignonnaise n'est pas récente. En 1975, un article de presse affirmait que le Vaucluse était le troisième département le plus équipé en grandes surfaces (derrière Paris et les Yvelines) avec 181m2 de surface de vente pour 1000 habitants3. L'ouverture de l'hypermarché Auchan Avignon Nord en 1974 a, bien entendu, largement contribué à l'augmentation de ce ratio. Aujourd'hui, le Vaucluse compte 191 m2 de plancher commercial en grande surface pour 1 000 habitants, contre une moyenne de 143 m2 au niveau national4.

L'impact du développement de la grande distribution sur le commerce de centre-ville est important. En 1987, une étude universitaire5 s'inquiétait de la disparition de 41 unités alimentaires sur la commune d'Avignon et de 27 autres sur le reste de l'agglomération entre 1972 et 1987. Cette étude pointait déjà les problèmes d'accessibilité du centre-ville d'Avignon aussi bien pour les automobilistes que pour les piétons. L'étroitesse des trottoirs reste aujourd'hui encore une source de conflit entre ces deux modes de déplacements à l'intérieur de la vieille ville.

Avignon n'est pas la seule ville concernée. Les communes de plus petite taille sont également touchées. Le commerce de centre-ville du Pontet, de Sorgues et de Vedène correspond à celui de villes de 5 000 à 7 000 habitants6, alors qu'elles en comportent respectivement 17 000, 18 000 et 10 0007. Ces centres-villes conservent principalement des commerces de proximité et notamment des commerces de bouche de qualité qui s'inscrivent en complémentarité de l'offre présente à Avignon Nord.

3 Le Méridional (8 octobre 1975), A propos de grandes surfaces

4 Op. cit. Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i (2011)

5 BERNARD F. (1987), le commerce avignonnais face au développement de l'agglomération, in Etudes vauclusiennes n°38 p.23-26, Edité par le département d'Histoire et de géographie de la faculté d'Avignon.

6 Op. cit., Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i (2011)

7 www.insee.fr, Recensement de la population 2008

1.1.3 Une zone commerciale décomposée en plusieurs sites

La zone commerciale Avignon Nord a longtemps été contenue au Nord de la route de Carpentras (D225 et D942). Le principal site reste le pôle historique où est situé le centre commercial Auchan (cf. figure 6). Il est entouré d'une multitude de surfaces spécialisées en habillement, bricolage, ... Plus à l'Ouest, un pôle de loisirs et de services s'est développé. On y retrouve notamment le complexe cinématographique implanté en 2008. La délimitation Ouest de la zone commerciale n'est pas très franche car les commerces s'y mêlent à d'autres activités liées à l'industrie et à la logistique.

Deux sites ont été développés plus récemment au Sud de la route de Carpentras. Le premier a été la zone de la Tour Blanche qui a accueilli trois grandes surfaces spécialisées dont l'enseigne Décathlon. Le deuxième est très récent car il s'agit du pôle Ikéa. L'enseigne suédoise a ouvert en 2011 et sa galerie marchande est en construction. Les ensembles commerciaux de la Tour Blanche et d'Ikéa ne se sont pas développés face au centre commercial historique car le Domaine de Roberty est un site classé.

La figure 6 nous montre que des espaces d'habitat jouxtent la zone commerciale. Pour autant ces différentes entités ne communiquent pas entre-elles. Le pôle commercial est divisé par la route de Carpentras, qui est un axe à deux fois deux voies. Les échanges entre les trois sites ne peuvent donc se faire qu'en voiture.

12

Figure 6: Une zone commerciale multipolaire (Conception Girard, 2011. Fond de carte : geoportail.fr)

 
 

13

1.2 Un poids économique incontestable

Même si nous verrons que la zone commerciale Avignon Nord est liée à de graves problèmes urbains, il faut comprendre qu'elle occupe une place importante dans l'économie locale.

1.2.1 Un pôle d'emploi pour l'agglomération

Les trois communes du Pontet, de Sorgues et de Vedène regroupent 2 765 établissements, soit 15% de ceux du SCoT8. Le dynamisme des zones d'activités, situées le long de l'ancienne nationale 7 et de la route de Carpentras, est encore notable. En 2009, on a recensé 119 créations d'établissements sur les IRIS contenant ces zones9. Parmi elles, 29 appartiennent à la catégorie commerce de l'Insee. Même si une part de ces créations peut provenir de transferts d'activités, on peut affirmer que la zone commerciale Avignon Nord continue d'attirer de nouveaux établissements.

Les grandes enseignes présentes contribuent à développer l'emploi. En 1975, l'enseigne Auchan embauchait 280 personnes. En 1982, on recensait 520 employés 10 . Aujourd'hui, l'entreprise Auchan Le Pontet est considérée comme le plus gros employeur du registre du commerce et des sociétés du Vaucluse11. Cette donnée intègre l'hypermarché, mais également les bureaux de la direction d'Auchan « Rhône-Alpes Midi », situés à Avignon Nord. La création du pôle commercial Ikéa et de sa galerie marchande doit également permettre de créer 600 emplois12.

Il est important de comprendre que les emplois du commerce, et notamment ceux de la grande distribution, répondent à un besoin de la population. La part des personnes de plus de 15 ans sans diplôme est de 22,6% sur la communauté d'agglomération du Grand Avignon contre 18,7% en France métropolitaine13. Une étude de l'INSEE14 avait montré que la grande distribution employait plus d'un tiers de jeunes de moins de 25 ans. Les employés peu qualifiés sont également nombreux.

8 Insee - Connaissance locale de l'appareil productif (2006), in SCoT du Bassin de vie d'Avignon (2010)

9 Insee - Répertoire des entreprises et des établissements (2009)

10 Le Provençal (11 juin 1982), 8 ans après son ouverture, Auchan le Pontet est devenu le 2è hypermarché du groupe sur 31 existants.

11 http://economie.vaucluse.cci.fr, Registre du commerce et des sociétés (2010)

12 Ikéa (22 octobre 2009), Dossier de presse concernant l'ouverture d'Ikéa Vedène, 15p.

13 Insee - Recensement de la population (2008) exploitations principales

14 Publication Sud Insee n°8 (1998) Grande distribution : la croissance de l'emploi s'accompagne d'un recours accru au personnel masculin, 4p.

14

Il faut toutefois noter que ces emplois sont généralement précaires. Cette même étude affirme que 52% des employés de la grande distribution ont des contrats saisonniers. Cela permet aux enseignes de s'adapter aux variations d'activité saisonnières, en lien notamment avec le tourisme. Sur la part des emplois à l'année, on recense 40% de contrats à temps partiel. Somme toute, seulement 29% des employés de la grande distribution travaillent à temps complet toute l'année.

A une échelle plus large, il est également important de relativiser le nombre d'emplois créés. En effet, comme nous l'avons vu précédemment, le développement de la grande distribution provoque le déclin du commerce traditionnel. Il est donc difficile de dire si la perte d'emplois liée à ce déclin est plus importante que la dynamique engendrée par le commerce de périphérie. Toutefois, on peut affirmer que la création d'emplois est positive sur les communes d'implantations, mais qu'elle est négative sur les communes de la zone de chalandise qui connaissent une très forte évasion commerciale15 vers Avignon Nord. Ce constat assez simple est important pour comprendre les objectifs des différents élus locaux. Certains auront intérêt à favoriser l'essor de la zone, tandis que d'autres plaideront pour limiter son développement.

1.2.2 Un pôle commercial d'influence régionale

La zone de chalandise d'Avignon Nord est estimée à 575 000 habitants sans prendre en compte le projet Ikéa16. L'arrivée du groupe suédois et de sa galerie marchande devrait la porter à 778 000 habitants17. A titre de comparaison, la communauté d'agglomération du Grand Avignon compte 176 000 habitants et le territoire du SCoT 250 00018. Au niveau de l'agglomération, le rapport entre le chiffre d'affaires du commerce et les dépenses commercialisables est de 162 %. Cela signifie que les ventes sont supérieures de 62% à la consommation des ménages de l'agglomération. La zone commerciale Avignon Nord joue un rôle majeur dans l'attractivité commerciale de l'agglomération. Le bureau d'études AID Observatoire estime que 18% du chiffre d'affaires de la zone commerciale provient des départements voisins et 10% du tourisme.

15 L'évasion commerciale représente la part des dépenses des ménages qui n'est pas dépensée dans la zone étudiée. Elle peut se calculer à l'échelle de la commune, de l'agglomération, du département, ...

16 Sauf indication contraire, l'intégralité des chiffres qui suivent proviennent de l'étude du Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i (2011), déjà citée auparavant.

17Ikéa (22 octobre 2009), Dossier de presse concernant l'ouverture d'Ikéa Vedène, 15p.

18Insee - Recensement de la population (2008) exploitations principales

15

En 2009, Avignon Nord possédait 129 000 m2 de plancher commercial. Le magasin Ikéa de 17 300 m2, inauguré en 2010, et sa galerie marchande de 23 600 m2, qui devrait être livrée fin 2011, vont porter la surface de vente totale du site à 170 000 m2. La zone commerciale est donc de taille similaire à Plan de Campagne, qui totalisait 145 000 m2 en 2009 mais qui connait, elle aussi des extensions. Le gigantisme de la zone commerciale Avignon Nord lui permet de développer le chiffre d'affaires colossal de 518 millions d'euros. A titre de comparaison, le chiffre d'affaires du tourisme dans le Vaucluse est de 610 millions d'euros19.

Le développement de la zone commerciale a fait émerger les communes du Pontet, de Sorgues et de Vedène qui sont aujourd'hui de nouvelles centralités à l'échelle de l'agglomération. Le cas de la commune du Pontet est intéressant. Jusqu'en 1925, elle n'était qu'un quartier de la commune d'Avignon. Elle est ensuite devenue une commune indépendante qui s'est affirmée comme un pôle industriel, puis commercial grâce au développement des zones d'activités.

1.2.3 La présence de grands groupes nationaux et multinationaux

L'essor de la zone commerciale Avignon Nord est lié à la présence de plusieurs groupes nationaux et multinationaux. Ces groupes exercent un lobbying20 et possèdent des moyens techniques et financiers importants, notamment par rapport aux moyens d'actions des modestes communes sur lesquelles ils sont implantés.

L'arrivée de l'enseigne Ikéa est importante, mais le groupe le plus influent de la zone reste le moteur historique d'Avignon Nord : Auchan. Avec 581 hypermarchés et 2384 supermarchés et supérettes répartis en France et dans le monde, le groupe a réalisé un chiffre d'affaires TTC de 53 milliards d'euros en 201021. Cette somme représente quasiment le budget de l'Education Nationale (60,8 milliards en 2010), qui est le plus gros poste de dépense de l'Etat. L'enseigne du Pontet occupe une place importante dans le groupe car, déjà en 1982, elle était le deuxième hypermarché du groupe en termes de chiffre d'affaires22. Aujourd'hui, ce magasin serait devenu le premier du groupe23.

19 www.vaucluse.fr

20 Lobbying : terme utilisé pour caractériser l'ensemble des actions d'influence et de pression que peut exercer le groupe pour défendre ses intérêts

21 www.groupe-auchan.com

22 Le Provençal (11 juin 1982), 8 ans après son ouverture, Auchan le Pontet est devenu le 2è hypermarché du groupe sur 31 existants

23 Op. cit., Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i (2011)

16

Le groupe Auchan a été créé dans les années 1960 par Gérard Mulliez. Il n'a jamais été coté en bourse mais la famille Mulliez a créé un groupement d'intérêt économique appelé « Association familiale Mulliez ». Depuis longtemps, cette organisation possédait, plus ou moins officieusement, des parts importantes du capital de grands groupes de la distribution. Une récente décision de l'Autorité de la Concurrence a officiellement reconnu que l'Association Familiale Mulliez détient des participations conséquentes dans certaines enseignes dont les plus importantes sont : Auchan, Leroy-Merlin, Décathlon, Kiabi, Pimkie, Flunch, Atac, Norauto, Kiloutou, Cultura, Brice, Jules, Xanaka, Top Office, Picwic, Phildar, Grain de Malice, GrosBill, etc.24 Cette association montre l'importance du groupe et du lobby qu'il peut exercer.

Grâce à ses importantes ressources financières, le groupe Auchan possède également des moyens techniques considérables. Il a notamment développé depuis 1976 sa propre filiale foncière : Immochan. Pour comprendre le fonctionnement de cette société, il faut analyser le processus de construction des centres commerciaux25. Le promoteur est le premier maillon de la chaîne. C'est lui qui assure la conception du centre. Pour cela, il réalise une étude de marché qui prend en compte les critères de localisation que nous détaillerons dans la partie 2.1. Une fois l'emplacement trouvé, il construit les bâtiments et vend l'ensemble à des investisseurs. Un certain nombre de groupes bancaires comme le Crédit Lyonnais investissent ainsi dans des centres commerciaux. Les différents investisseurs se regroupent alors pour assurer la gestion du centre commercial. Le but de cette action est de créer une ambiance entre les différentes boutiques. Les investisseurs doivent donc sélectionner les différentes enseignes qui loueront les emplacements en s'assurant de leur complémentarité. Ils peuvent par exemple refuser des commerçants qui donneraient une mauvaise image au centre (sex-shop, bar, bazar, ...). Le principe de cohésion est très important dans un centre commercial. L'adhésion à l'association des commerçants du centre est bien souvent imposée par le bail commercial. Ces baux ont généralement une durée de 9 à 18 ans et ils ne peuvent être résiliés que par le locataire, tous les trois ans.

Ce processus de développement fait intervenir de nombreux acteurs. La particularité du groupe Immochan est qu'il regroupe les fonctions de promoteur, d'investisseur et de gestionnaire. Sur la zone commerciale d'Avignon Nord, le groupe possède une partie importante du foncier commercial bâti et il a acquis certaines réserves foncières (cf. figure 7). Il gère le développement de la zone et loue les différents emplacements commerciaux.

24 Liste établie par l'Autorité de la Concurrence (Décision n° 11-DCC-87 du 10 juin 2011)

25 Ce processus est abondamment décrit dans l'ouvrage de Jean Luc Koehl (1990), Les centres commerciaux.

17

Dans le périmètre proche du centre commercial, seuls Alinéa et Leroy-Merlin sont propriétaires de leurs murs. Si l'omniprésence du groupe sur le site peut sembler hégémonique, elle offre tout de même un avantage : dans le cadre d'un projet urbain pour réorganiser la zone, il est toujours plus facile de travailler avec un seul propriétaire foncier qui fédère l'ensemble des acteurs privés.

Figure 7 : Immochan, un propriétaire foncier incontournable

(Conception Girard, 2011. Cartographie approximative d'après un entretien avec les services d'Immochan)

18

1.3 Un espace dominé par l'automobile

La voiture individuelle est très présente aussi bien à l'intérieur de la zone commerciale que sur les voies routières environnantes. Nous allons maintenant étudier les effets liés à ce développement par le « tout-automobile ».

1.3.1 Des infrastructures lourdes qui séparent les différentes fonctions urbaines

Le site d'implantation de la zone commerciale Avignon Nord est un carrefour routier depuis des décennies. L'arrivée de l'autoroute a contribué à augmenter encore le trafic sur la zone et Avignon Nord est aujourd'hui entouré par des axes à fort trafic (cf. figure 8). L'axe le plus important vis-à-vis du site étudié est la route départementale 942 (D942), qui devient la route départementale 225 (D225) au niveau de la zone commerciale en direction d'Avignon. Cet axe supporte un trafic journalier de 37 000 véhicules avant l'échangeur autoroutier et 46 000 après ce dernier26. C'est un des flux les plus importants qui entre dans l'agglomération avignonnaise et il est saturé par le trafic, notamment aux heures de pointe. La départementale 225 devient un axe très congestionné lorsqu'elle absorbe les flux de la D907 en provenance de Sorgues. Les services du Conseil Général estiment que le trafic augmente de 8% par an sur cette entrée de ville27. Cette situation montre les limites du système « tout-voiture » qui aboutit à de graves problèmes d'accessibilité pour la commune d'Avignon. Pour éviter la jonction entre la RD907 et la RD225, certains automobilistes qui se déplacent entre Sorgues et Carpentras empruntent la RD6. Cette route, qui ne comporte qu'une voie dans chaque sens de circulation, est surchargée. Des projets du Conseil Général envisagent de construire un axe à deux fois deux voies entre Sorgues et la route de Carpentras. Cette nouvelle voirie traverserait la zone commerciale. Elle viendrait encore y ajouter du trafic supplémentaire.

26 Op. cit., Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i (2011)

27 Conseil Général du Vaucluse (2004), Diagnostic territorial sur les transports et les déplacements, 12p.

19

Figure 8 : Un territoire cloisonné par les infrastructures routières (Conception Girard, 2011. Flux estimés par le bureau d'études Transitec en 2010)

20

Les axes à fort trafic que nous venons de présenter ont façonné les trois communes environnantes. Le Pontet et Sorgues ont connu un fort développement industriel le long de l'ancienne Nationale 7 reliant Paris à Marseille. Les autres zones d'activités, et notamment celle de la Lorraine à Vedène, se sont développées plus récemment, privilégiant la proximité de l'échangeur autoroutier. Nous verrons dans la partie 2.1 pourquoi la zone commerciale a, elle aussi, été implantée en bordure d'un des axes les plus fréquenté. Ces différentes zones industrielles et commerciales n'entretiennent pas de relations urbaines avec les centres-villes. Le centre-ville du Pontet est séparé de ces zones d'activités par la route de Carpentras. La D907 isole également Sorgues de la zone d'activités et il en est de même avec Vedène, où l'Autoroute marque la frontière entre l'habitat et les entreprises. Les terres agricoles à l'interstice entre les centres-villes et les zones d'activités ont largement été urbanisées par des lotissements pavillonnaires. C'est d'autant plus le cas lorsqu'elles sont en retrait des infrastructures routières. La séparation des fonctions urbaines est donc très tranchée au sein des 3 communes présentées. Les infrastructures routières ont contribué à l'absence de perméabilité entre ces différentes fonctions.

L'accès à la zone commerciale se faisant principalement en voiture, cela crée des problèmes de congestion à l'intérieur du site. La zone commerciale accueillait, en 2009, 65 000 véhicules par jour en semaine et 80 000 le samedi28. Après l'ouverture du complexe commercial Ikéa, la fréquentation devrait atteindre 80 000 véhicules par jour en semaine et près de 100 000 le samedi. Malgré les trois échangeurs qui desservent la partie de la zone commerciale au nord de la route de Carpentras, des difficultés de circulation apparaissent sur le site. Elles sont principalement liées à l'affluence automobile, mais aussi à la configuration des accès. En effet, il est souvent compliqué d'atteindre le coeur de la zone commerciale. Cela vient du fait que les différents plans de circulation ont été réalisés à postériori des implantations commerciales29. Avec l'arrivée d'Ikéa, les services de l'Etat ont craint que la congestion autour du giratoire en sortie de l'autoroute ne provoque des embouteillages jusque sur les voies de l'A7. Ils ont alors décidé de bloquer l'ensemble des dossiers des Commissions Départementales d'Aménagement Commercial, tant qu'une solution n'aurait pas été trouvée. Les services du Conseil Général ont dû réaliser un nouveau pont au dessus de la route de Carpentras afin de fluidifier le trafic.

28 Op. cit., Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i (2011)

29 Entretien avec Michel LACROZE (2011), directeur de l'atelier d'urbanisme et d'architecture Lacroze travaillant sur les documents d'urbanisme de la commune du Pontet depuis les années 1970.

1.3.2 Des milliers de places de stationnement en surface

Pour absorber le flux de visiteurs, des milliers de places de stationnement ont été créées. Chaque enseigne dispose de son propre parking, hormis pour le centre commercial Auchan où la galerie marchande et l'hypermarché utilisent le même espace de stationnement. A lui seul, ce centre commercial accueille 8 600 000 personnes par an avec des journées d'affluence record allant jusqu'à 55 000 visiteurs. Il détient le record de fréquentation du groupe Auchan30. Les 3800 places qui lui sont dédiées sont saturées les jours de grande affluence, mais elles sont en grande partie vacantes le reste du temps.

Le Cinéma Capitole Studios possède des horaires de fréquentation relativement différents des autres commerces. C'est en effet un des rares commerces ouvert le dimanche et ses pics de fréquentation sont en soirée. Pour autant, son parking n'est pas mutualisé avec un autre commerce et les espaces de stationnement qui lui sont exclusivement dédié sont vides sur une grande partie de la semaine.

21

30 Op. cit., Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i (2011)

22

Figure 9 : Une offre de stationnement démesurée

(Conception : Girard 2011. D'après les estimations citées ci-dessous)

Vu que chaque enseigne possède son propre parking, le nombre de places de stationnement est démesuré. Sur le site, on dénombre environ 8 400 places sur la partie située au nord de la route de Carpentras31, 1 500 places autour de Décathlon32 et 1 800 places pour le projet Ikéa33. Au total, ce sont donc 11 500 places gratuites qui sont dédiées au commerce (cf. figure 9). A titre de comparaison, le centre-ville d'Avignon possède 10 000 places de stationnement en incluant les deux parcs relais de 1 000 places chacun et les 6 600 places payantes34. La quantité de parkings présents sur la zone commerciale joue un rôle d' « aspirateur à voitures ». Les clients effectuent des distances relativement importantes. Les conséquences sur le trafic routier et sur les émissions de gaz à effet de serre sont donc considérables.

31 Id., complété par estimation à partir de l'Orthophotographie de 2005.

32 Estimation à partir de l'Orthophotographie de 2005

33 Ikéa (22 octobre 2009), Dossier de presse concernant l'ouverture d'Ikéa Vedène, 15p.

34 Grand Avignon (janvier 2010), Etude de faisabilité du projet TCSP, réalisée par Egis et Transitec.

23

A l'intérieur de la zone commerciale Avignon Nord, l'espace dédié à l'automobile est donc prédominant. En effet, l'espace lié au stationnement est estimé à 275 000 m2 et la voirie occupe, quant à elle, 60 000m2. Environ deux tiers de la zone sont donc consacrés à l'automobile et seulement un tiers au bâti. Les espaces verts peuvent être considérés comme nuls (cf. figure 10).

Voirie
60 000 m2

11%

Bâti

200 000 m2

37%

Stationnement 275 000 m2

52%

Espaces verts 0 m2

0%

Figure 10 : Occupation du Sol sur la zone commerciale

(Conception : Girard ,2011. D'après Interland, 2011 et diverses estimations)

Cette occupation du sol pose des problèmes urbains majeurs. En effet, entre les espaces de stationnement, la voirie et les bâtiments, la quasi-totalité de l'espace est imperméabilisé, ce qui pose notamment des problèmes pour l'infiltration des eaux de pluie. Les parkings de surface et les bâtiments de plain-pied ont fortement contribué à la faible densité du site. La zone commerciale a donc dû s'étendre sur les terres agricoles afin de pouvoir développer l'offre de stationnement présente aujourd'hui.

24

1.3.3 Des transports collectifs et des modes doux quasiment inutilisés

Pour l'accès à la zone commerciale, la part modale des transports en commun est de 0,5%, et celle des modes doux peut être considérée comme nulle. En effet 99,5% des clients accèdent à Avignon Nord en voiture individuelle35. La faible utilisation des transports collectifs et des modes doux est liée à une carence de l'offre, mais également à la faible densité et à la superficie du site.

L'offre en transports en commun est faible. La desserte départementale ne se fait que par une seule ligne qui ne dessert qu'un arrêt situé à 200 mètres du centre commercial Auchan. La desserte urbaine par la ligne 7 du réseau TCRA (Transports en Commun de la Région d'Avignon) est légèrement meilleure. Cette ligne de bus dessert six points de la zone commerciale avec une fréquence de 15 à 20 minutes en semaine et 20 à 30 minutes le samedi36. La desserte n'est donc pas adaptée à la fréquentation de la zone commerciale qui atteint son maximum le samedi. De plus, les temps de parcours sont beaucoup plus longs en bus qu'en voiture. Depuis Avignon, le temps de déplacement est de 14 minutes en voiture et de 30 minutes en bus.

La sous-utilisation des transports en commun s'explique également par le manque de cheminements doux à l'intérieur du site. La ligne 7 suit les mêmes voies que les automobiles à l'intérieur du site. Les arrêts de bus sont donc généralement situés à 200 ou 300 mètres des enseignes. L'usager doit alors traverser les espaces de stationnement pour accéder aux commerces. Les cheminements doux n'apparaissent qu'à proximité directe de l'entrée des magasins. Ils sont également inexistants entre les différentes enseignes.

Les accès en modes doux depuis l'extérieur du site sont également mal développés. Une piste cyclable a récemment été mise en place entre le centre-ville de Sorgues et Avignon Nord. Mais aucun cheminement doux n'existe depuis les centres-villes du Pontet et de Vedène. Ces deux communes sont quasiment inaccessibles depuis le centre commercial car la Route de Carpentras et l'Autoroute A7 sont infranchissables. La mise en place d'ouvrages d'art pour les relier au site serait extrêmement coûteuse. Ce manque de perméabilité pose des problèmes. En effet, les élèves du lycée professionnel de Vedène n'hésitent pas à emprunter, à pied, le pont routier qui franchit l'autoroute pour accéder au centre commercial (cf. figure 11). Cette pratique est très dangereuse.

35 Op. cit., Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i (2011)

36 www.tcra.fr, Transports en Commun de la Région d'Avignon

25

Figure 11 : Un lycéen franchissant l'autoroute par le pont de la D942 (Girard, 2011)

La faible densité de la zone commerciale explique, en partie, la faible desserte en transports en commun et le manque de cheminements doux. Avignon Nord s'étend sur plus de 50 hectares répartis sur les trois entités (la zone commerciale historique, le complexe autour d'Ikéa et le lieu dit la Tour Blanche autour de Décathlon). La principale partie de la zone commerciale, située au Nord de la route de Carpentras, mesure 1 800 mètres de long. Sur une telle distance, l'usage de la voiture individuelle est plus intuitif, notamment vis-à-vis de la quantité de stationnement disponible. L'automobile est donc utilisée même pour les déplacements internes.

La voiture individuelle semble donc quasiment indispensable pour se rendre sur la zone commerciale et pour s'y déplacer. Cela pose un problème social. Les ménages non motorisés (14 % des ménages du Vaucluse en 200837) sont fortement pénalisés dans l'accès aux commerces s'ils ne peuvent accéder à cette zone commerciale extrêmement complète38. Les personnes les plus touchées sont les plus pauvres, mais également les plus âgées. Des difficultés d'accès existent aussi, si le membre du ménage chargé des achats n'a pas de voiture à disposition. Cela est souvent le cas si elle est utilisée par le membre actif du ménage. De plus, nous avons vu que le commerce de centre-ville est en déclin et qu'il propose une offre de plus en plus réduite.

37 Insee - Recensement de la population (2008) exploitations principales

38 Une étude de l'Université d'Avignon développe ces problèmes d'accessibilité au commerce : GENRE-GRANDPIERRE C. (2007), l'accessibilité aux commerces dans l'aire de vie avignonnaise, in Espace, populations et sociétés, n°2-3 p.421-432, Edité par l'Université de Lille 1.

26

1.4 Des paysages transformés par ces nouveaux usages

L'implantation des activités commerciales a occulté les richesses patrimoniales dont disposait le site. Les usages agricoles ont quasiment disparu et l'entrée de ville s'est dégradée.

1.4.1 Une terre historiquement agricole qui dispose d'un patrimoine important

Avant l'arrivée de l'enseigne Auchan, les terres du Nord de la commune du Pontet et du Sud de la commune de Sorgues étaient exploitées pour produire les célèbres foins de Montfavet. Ces foins, qui servaient notamment à l'alimentation des chevaux, étaient exportés en France et à l'international39. On estime que la surface dédiée à la production de ces foins est passée de 2300 hectares, après la seconde guerre mondiale, à 600 aujourd'hui40. Ce déclin est lié au développement de la zone commerciale Avignon Nord mais aussi au mitage créé par les lotissements de maisons individuelles.

La culture des foins avait été rendue possible par la construction de nombreux canaux. Ils avaient pour fonction d'irriguer la terre pour augmenter la qualité des foins et la productivité des terres. Ces canaux ne sont absolument pas valorisés aujourd'hui. La qualité paysagère de ces cours d'eau aurait notamment pu être mise en valeur comme fil conducteur de cheminements doux. Ils ont plutôt été vus comme des contraintes pour le développement de la zone commerciale. L'un d'eux a notamment été enterré pour permettre l'extension de la galerie marchande d'Auchan.

Si la présence de l'eau était favorable à l'agriculture, elle ne l'est pas pour le commerce. La nappe phréatique est affleurante, l'imperméabilisation des sols est importante et le climat méditerranéen provoque des pluies importantes. Le risque d'inondation est donc relativement élevé. Il est géré par de vastes bassins de rétention qui sont généralement entourés de grillages. Leur usage est strictement fonctionnel et ils ne sont pas exploités pour des fonctions récréatives.

Cette ancienne plaine agricole possède également un patrimoine bâti important et pourtant peu mis en valeur (cf. figure 12).

39 Entretien avec Michel LACROZE (3 août 2011), directeur de l'atelier d'urbanisme et d'architecture Lacroze travaillant sur les documents d'urbanisme de la commune du Pontet depuis les années 1970.

40 La Provence (25 août 2011), Le foin, on en fait toute une histoire à Montfavet !

27

Figure 12 : Des espaces patrimoniaux méconnus (Conception : Girard ,2011)

L'élément le plus menacé par le développement de la zone commerciale est le Monastère de la Visitation. Cet ancien château est en effet situé à proximité directe des enseignes de la commune de Sorgues. Il est totalement invisible depuis la zone commerciale car il est entouré d'un mur et de plusieurs haies d'arbres. Aujourd'hui, la commune de Sorgues envisage de déclasser une partie des terrains appartenant au monastère pour y développer des activités paramédicales et commerciales. Pour l'instant, le SCoT interdit la construction sur ces terrains. Mais ce document n'étant pas approuvé, il peut encore être modifié au terme de l'enquête publique.

28

La Colline Sainte Anne, située sur la commune de Vedène, est elle aussi un élément patrimonial important. Elle est plus soumise aux pressions du développement de l'habitat que du commerce. En effet, elle est séparée de la zone commerciale par l'autoroute et par la route de Carpentras. Sa possible mise en valeur semble moins évidente, du moins en ce qui concerne le lien avec l'activité commerciale.

Le plus vaste et le plus reconnu des éléments patrimoniaux du site est, sans aucun doute, le Domaine de Roberty. Ce parc de 168 hectares est un site naturel classé. Au XIXème siècle, il était un des grands domaines agro-industriels de l'agglomération. Une partie de ce site est occupé par un hippodrome. Les écuries, la tribune mais également le château du parc sont classés comme monuments historiques41. Malheureusement, les abords de ce site ne sont ni entretenus et ni mis en valeur. La communauté d'agglomération envisage d'acheter ce site qui appartient aujourd'hui à un propriétaire privé. L'enjeu serait de l'ouvrir au public pour en faire un grand espace vert pour l'agglomération. Il pourrait éventuellement servir de support pour les cheminements doux entre le centre-ville du Pontet et sa zone commerciale. Pour cela, il faudrait encore construire un ouvrage pour franchir la route de Carpentras.

1.4.2 Une entrée de ville dégradée

Malgré le patrimoine architectural et paysager présent sur le site, cette entrée de ville Nord de l'agglomération d'Avignon est extrêmement banale. La route de Carpentras est bordée d'une multitude d'enseignes qui ne laissent aucune place aux paysages vauclusiens et à la mise en valeur du patrimoine. La photo de l'entrée de ville (cf. figure 13) pourrait en effet avoir été prise dans n'importe quelle ville, aucune particularité architecturale n'y apparaît. Les quelques perspectives sur le Mont Ventoux, figure emblématique du Vaucluse, sont masquées par une multitude d'enseignes (cf. figure 14).

Ce problème d'entrée de ville dégradée remonte plus en amont sur la route de Carpentras sur dix kilomètres environ. Les panneaux publicitaires et les enseignes sont non seulement de grande taille mais elles ont également des couleurs vives. Parmi les exemples de « boîtes commerciales » non intégrées, on peut citer les cas les plus frappants comme Ikéa et son magasin bleu et jaune (cf. figure 15), ou encore Diamantor avec sa façade rouge et pourpre ainsi que son écran publicitaire LCD qui contrastent avec le Mont Ventoux en arrière plan (cf. figure 14).

41 www.paca.culture.gouv.fr

Figure 13 : Une entrée de ville de ville banalisée (Girard, 2011)

29

Figure 14 : Contraste entre les enseignes et la perspective sur le Mont Ventoux (Girard, 2011)

Figure 15 : Le magasin Ikéa, une « boîte commerciale » qui s'intègre difficilement dans le paysage (Girard, 2011)

Conclusion de la première partie :

Présentation de la zone commerciale et des problèmes urbains qui lui sont associés

La zone commerciale s'inscrit dans un territoire dominé par la voiture individuelle. Les grands axes routiers ont façonné le territoire. Les différentes fonctions urbaines sont séparées et les zones d'activités et de commerce ne communiquent pas avec les zones d'habitat. Dans ce contexte, l'usage de l'automobile est indispensable et l'accès au commerce est difficile pour les ménages non motorisés.

La zone commerciale est également associée à l'étalement urbain et à la dégradation des entrées de villes. Pourtant, malgré sa faible qualité urbaine, le site n'est pas obsolète. Il fait partie des moteurs économiques de l'agglomération, aussi bien au niveau du nombre d'emplois que du chiffre d'affaires réalisé. Cette composante est très importante car il est extrêmement délicat de réaménager une zone commerciale qui fonctionne d'un point de vue économique.

30

31

2 Les stratégies d'implantation et d'évolution du commerce de périphérie

Les zones commerciales de périphérie sont souvent qualifiées d' « anarchiques ». En étudiant les stratégies acteurs privés, cette partie va montrer qu'au contraire, elles suivent une logique extrêmement précise. Cette analyse permettra également de comprendre pourquoi le commerce de périphérie s'est implanté sur des noeuds routiers et pourquoi les entrées de villes ont été dégradées.

2.1 Les critères nécessaires à l'implantation commerciale

Les professionnels du commerce aiment à dire que les trois clés de la réussite commerciale sont : « l'emplacement, l'emplacement et encore l'emplacement ». Cette sous-partie a pour but de déterminer ce qui fait qu'un site est stratégique ou non pour l'implantation commerciale. Elle s'inspire des travaux de David Mangin42, de l'ouvrage de Philippe Moati et Laurent Pouquet43 et d'un entretien avec Lionel Champey, ancien directeur régional de Décathlon44. Il se trouve que ces différents acteurs identifient tous les mêmes critères d'implantation commerciale, à savoir :

- un bassin de consommation important qui représente le marché potentiel,

- un site facilement accessible et visible,

- un environnement commercial et non commercial renforçant l'attractivité du site.

Nous verrons alors que la question du prix du foncier apparait comme secondaire par rapport à ces trois exigences.

Les critères d'implantation sont semblables pour tous les commerces, qu'ils soient de périphérie ou de centre-ville. Toutefois, cette sous-partie approfondira les particularités du commerce de périphérie afin de comprendre le fonctionnement du centre commercial Avignon Nord.

42 MANGIN D. (2004), La ville franchisée : formes et structures de la ville contemporaine, Editions de la Villette, 396p.

43 MOATI P. et POUQUET L. (1998), Stratégies de localisation de la grande distribution et impact sur la mobilité des consommateurs, CREDOC, 115p

44 Entretien d'août 2010 avec Lionel Champey directeur du pôle TPE-Commerce à la CCI de Marseille-Provence et ancien directeur général de Décathlon Sud-Méditerranée.

32

2.1.1 Evaluer le marché potentiel

Les zones commerciales coûtent extrêmement cher à la construction. Si les investisseurs sont attirés par ces placements financiers, c'est parce qu'ils en attendent de forts retours sur investissement. Pour cela, la zone commerciale doit produire un chiffre d'affaires qui rentabilise sa construction et qui produit des bénéfices. Avant d'implanter une zone commerciale, il est donc primordial d'estimer le chiffre d'affaires qu'elle va produire via une étude de marché.

2.1.1.1 Déterminer la zone d'influence

La première étape consiste à déterminer le rayon d'influence de la future zone commerciale. Les travaux de Zahavi45 ont été les premiers à aborder la notion de « budget-temps ». En effet, les individus accordent un certain temps pour accéder à chacune de leurs activités (travail, loisirs, ...). La distance à parcourir apparaît comme secondaire par rapport à la durée du trajet. Avec l'essor de l'automobile et le développement du réseau routier rapide, les vitesses de déplacement ont augmenté. Pour autant, le temps accordé aux déplacements n'a pas diminué. Ce sont les distances parcourues qui ont augmenté. Le commerce n'échappe pas à cette règle46 et les acteurs du commerce de périphérie l'ont compris depuis longtemps. Pour les promoteurs, l'important est donc de calculer le temps d'accès au futur pôle commercial, plus que les distances à parcourir. L'aire d'influence sera donc estimée en traçant des courbes isochrones, qui relient les points situés à un temps de parcours égal.

Déterminer le temps de parcours que sera prêt à accorder le futur client est relativement complexe. 75 % des consommateurs déclarent mettre, en moyenne, moins d'un quart d'heure pour se rendre sur le lieu de leurs achats47. Toutefois, ce temps de parcours peut être nettement plus long selon le type d'achats. Une moyenne surface spécialisée comme Boulanger recherche par exemple des emplacements où 100 000 habitants se trouvent à moins de 30 minutes48. Un magasin plus grand possède un pouvoir d'attraction plus fort. Ainsi, Ikéa recherche des emplacements où un million de personnes vivent à moins de 60 minutes. A titre

45 ENAULT C. (2008), Comment la vitesse agit-elle sur l'étalement urbain ?, Laboratoire LVMT, http://thema.univ-fcomte.fr/IMG/pdf/articlerelationvitesseetalementCEnault.pdf et DESSE R-P. (2001), le nouveau commerce urbain, p.23-25

46 Les Enquêtes Ménages Déplacements (EMD) traitent des trajets effectués du lundi au vendredi. Cela suffit pour analyser les déplacements domicile-travail mais pas pour étudier le commerce, les conclusions sont beaucoup plus floues. En effet, un part importante des déplacements pour le motif « achats » se font le samedi. Les conclusions sur le commerce sont donc très floues dans les EMD.

47 Etude CREDOC (1994) in MOATI P. et POUQUET L. (1998),

48 MOATI P. et POUQUET L. (1998), p. 71

33

d'exemple, la figure 16 montre les courbes isochrones à 60 minutes autour du pôle Avignon Nord. On remarque que l'autoroute joue un rôle prépondérant sur la taille du territoire accessible en moins d'une heure.

Figure 16 : Courbes isochrones à 60 minutes autour du pôle Avignon Nord (Conception : Girard, 2011. D'après maps.google.fr. Fond de carte : geoportail.fr)

Nb. : cette figure ne représente pas la zone de chalandise car elle ne prend pas en compte la concurrence. En effet, pour l'enseigne Ikéa par exemple, la zone de chalandise est beaucoup moins étendue au sud, notamment à cause de la présence d'un autre magasin Ikéa à Vitrolles.

La méthode des courbes isochrones nous montre que les infrastructures routières jouent un rôle important dans le développement du commerce de périphérie. Cela explique pourquoi la firme suédoise a choisi de s'implanter à proximité immédiate de l'échangeur autoroutier d'Avignon Nord. D'un point de vue général, l'ensemble de la zone commerciale a bénéficié des grandes infrastructures routières. Le fait que la route de Carpentras possède deux voies pour chaque sens de circulation et qu'elle soit en partie limitée à 110 km/h ont permis d'étendre la zone de chalandise du pôle commercial.

2.1.1.2 Estimer les dépenses des ménages

Une fois que la clientèle potentielle est identifiée, l'étude de marché doit déterminer le potentiel de consommation. Pour estimer les dépenses des ménages, les acteurs du commerce se basent sur de nombreux indices statistiques. Tout d'abord, il faut connaître le nombre d'habitants dans la zone d'influence. Le revenu des ménages et les catégories socioprofessionnelles sont également importants. Des indices de dépense par foyer sont également publiés par l'INSEE et le CREDOC. Toutefois, selon le territoire, les besoins ne sont pas les mêmes. En effet, les dépenses de jardinage sont moins élevées à Paris qu'en province par exemple. Pour tenir compte de cela, les données sur les dépenses des ménages sont pondérées par les Indices de Disparité de Consommation (IDC). L'IDC est calculé et vendu par l'Assemblée des Chambres Françaises de Commerce et d'Industrie49. Il se base sur plusieurs enquêtes de consommation et prend en compte divers éléments comme l'âge de la population ou encore le type d'habitation. L'échelle de précision de cet indice est l'IRIS de l'INSEE. Il peut se calquer sur n'importe quel territoire d'influence préalablement calculé par le promoteur.

34

49 www.cci.fr

Le chiffre d'affaires potentiel de la zone d'influence se calcule ensuite par la formule suivante :

Chiffre d'affaires
potentiel de la
zone d'influence

=

Nombre de ménages

Dépenses

* théoriques par ménage

-

Evasion
commerciale

+

Attraction
commerciale

L'évasion commerciale correspond aux dépenses effectuées par les ménages de la zone d'influence en dehors de cette zone. L'attraction commerciale correspond au chiffre d'affaires réalisé grâce à des ménages qui ne sont pas dans la zone d'influence (les gens de passage). Ces deux chiffres sont très délicats à calculer car l'implantation de l'enseigne va modifier les comportements d'achat.

Pour enfin obtenir le chiffre d'affaires de la future zone commerciale, il faut ensuite tenir compte des concurrents présents dans la zone d'influence :

Chiffre d'affaires potentiel de la future zone commerciale

=

Chiffre d'affaires potentiel
de la zone d'influence

-

Chiffre d'affaires
de la concurrence

Ce calcul permet d'estimer les parts de marché restantes pour les enseignes qui vont s'implanter. Toutefois, la future implantation va également modifier les chiffres d'affaires de des établissements déjà présents. En ce qui concerne la concurrence, Avignon Nord a longtemps bénéficié du faible développement de la grande distribution dans l'agglomération d'Orange. En effet, un projet d'hypermarché au Sud d'Orange a longtemps été bloqué50 et l'essor de la grande distribution n'a été que très récent sur ce territoire.

35

50 Le Dauphiné libéré, articles du 17 octobre 1982, du 21 janvier 1983 et du 25 février 1984.

Dans le vocabulaire de la grande distribution, on appelle taux de pénétration le rapport entre le chiffre d'affaires de l'enseigne et le chiffre d'affaires de la zone d'influence. En 1996, le taux de pénétration des grandes et moyennes surfaces était de 60,5% dans le marché alimentaire, dont 33% pour les hypermarchés51. David Mangin explique que si la grande distribution a si bien fonctionné en France, c'est grâce au développement des lotissements pavillonnaires52. En effet, le fait de construire des maisons sur des parcelles de plusieurs milliers de mètres carrés a éloigné les lieux d'habitation des centres-villes. Les ménages ont donc dû utiliser leur voiture pour faire leurs achats et c'est la grande distribution qui s'est le mieux adaptée à ce nouveau moyen de transport. Dans le cas d'Avignon Nord, la périurbanisation a augmenté la population de sa zone de chalandise. En effet, la figure 17 nous montre que l'arrondissement de Carpentras, qui compte de nombreuses communes périurbaines, a connu un très fort accroissement démographique. En 1962, la population de la ville d'Avignon était supérieure à celle de l'arrondissement de Carpentras. Aujourd'hui, la situation s'est totalement inversée avec un écart de 36 000 habitants. La figure 17bis nous montre que la situation de la zone commerciale était très stratégique pour bénéficier de cet élan démographique. De plus, le revenu médian par unité de consommation est de 13 900 euros à Avignon contre 16 400 euros sur le Vaucluse53. En ce situant en périphérie, la zone commerciale a donc pu satisfaire des ménages plus aisés.

36

51 Op. cit., MOATI P. et POUQUET L. (1998), p.4

52 Op. cit., MANGIN D. (2004) p.112

53 Insee, Revenus fiscaux localisés des ménages (2008)

140000

120000

Nombre d'habitants

100000

80000

60000

40000

20000

0

Ville d'Avignon

Arrondissement de Carpentras

1962

1968

1975

1982

1990

1999

2008

72700

86100

90800

89100

86900

85900

90100

67800

75700

84000

93400

101000

113200

126000

37

Figure 17 et 17bis: Un accroissement démographique plus rapide dans les territoires périurbains (graphique et carte de localisation)

(Conception : Girard, 2011. D'après Insee Recensements de la population. Fond de carte : geoportail.fr)

38

2.1.2 La visibilité et l'accessibilité

2.1.2.1 La visibilité

Une fois que le promoteur a identifié un marché porteur, il doit s'assurer que la clientèle viendra dans le pôle commercial qu'il va développer. La visibilité est alors un critère important pour juger de la qualité d'un emplacement. Un point de vente doit être « visible, repérable et identifiable de loin »54 pour être connu des futurs acheteurs.

L'enjeu est de taille pour une implantation nouvelle, mais également pour une zone commerciale existante. En effet, toute enseigne doit, en permanence, prospecter de nouveaux consommateurs pour compenser la perte de ses clients, qui déménagent ou qui vont aller consommer chez des concurrents.

Les carrefours routiers sont des points stratégiques pour capter l'attention des automobilistes. En effet, le croisement de deux axes à fort trafic, comme l'Autoroute A7 et la route de Carpentras, est le lieu où les flux seront les plus importants. Depuis ces routes, l'usager doit pouvoir identifier le nom des commerces et comprendre quels types de produits sont vendus. Le marketing des grands groupes est là pour faciliter cette identification. En effet, une inscription « BUT » dans un carré rouge n'est pas très parlante en soi. Mais la publicité permet au consommateur d'identifier que, dans n'importe quelle ville de France, cette enseigne est celle d'un marchand de meubles. Le groupe a donc tout intérêt à avoir la même enseigne sur l'ensemble de ses succursales et franchises.

Pour être visible, l'enseigne doit également contraster avec son environnement. L'objectif est donc de ne pas s'intégrer au paysage afin d'être remarqué. L'utilisation de couleurs vives sert ainsi à se démarquer pour que les clients se repèrent facilement. Certains magasins vont jusqu'à peindre leur façade en rouge (SFR) ou en bleu (Ikéa). Le critère de visibilité est indispensable pour comprendre la dégradation des entrées de villes.

A une échelle plus fine, on remarque que les commerces se sont implantés au plus près de la route de Carpentras pour bénéficier de l' « effet vitrine ». Les rares emplacements vacants sur Avignon Nord sont au contraire ceux situés plus en retrait.

Le foisonnement d'enseignes et d'annonces publicitaires est beaucoup plus encadré en centre-ville. Pour les distributeurs, la périphérie a toujours offert beaucoup plus de liberté. Hormis les règles d'urbanisme et d'affichage publicitaire, la seule limite des distributeurs est

54 Op. cit., MOATI P. et POUQUET L. (1998)

39

l'acceptabilité sociale. David Mangin explique que, pour cette raison, Mac Donald's a diminué la taille du mât qui porte son enseigne.55

2.1.2.2 L'accessibilité :

Pour être attractif vis-à-vis de sa concurrence, un commerce doit être accessible. En effet, les achats sont considérés comme une tâche pénible qu'il faut réaliser rapidement. Les enseignes vont donc choisir de s'implanter à proximité des échangeurs et des giratoires pour être immédiatement desservies depuis les axes à fort trafic. Lorsque ces infrastructures n'existent pas, les pouvoirs publics vont les développer afin de ne pas créer de congestion sur les voies routières. Dans la partie 3.2, nous verrons les limites de ce raisonnement.

La facilité d'accès pour les clients est le premier résultat attendu de ces équipements routiers. Mais ils permettent également la gestion des marchandises en flux tendus56. La logistique en flux tendus vise à augmenter le nombre de livraisons par semaine afin de réduire les espaces de stockage sur le site. Les enseignes peuvent alors s'adapter à la demande des clients et proposer un grand nombre de références tout en minimisant leur stock. Ce mode de fonctionnement n'est possible que grâce à la bonne desserte routière et autoroutière et à l'utilisation de camions. Il a pour conséquence de fortement augmenter le trafic poids lourds car les petites livraisons sont nombreuses. En ce qui concerne l'étalement urbain, il permet de limiter les espaces de stockage et donc la surface bâtie sur le site. Mais en contrepartie, de vastes espaces logistiques sont développés par les enseignes à proximité des échangeurs autoroutiers. Ces entrepôts logistiques aux dimensions démesurées assurent la desserte des magasins de plusieurs départements. Les conséquences sur l'étalement urbain et le trafic routier sont donc importantes.

55 Op. cit., MANGIN D. (2004) p.126-127, la hauteur du mât aurait été réduite de 28 à 6,5 mètres.

56 L'intérêt de ce mode de fonctionnement est détaillé dans l'ouvrage de MOATI P. et POUQUET L. (1998) p.42-43 et 58

40

La figure 18 nous montre que le site est particulièrement bien desservi. En effet, on compte trois échangeurs principaux depuis Avignon et deux depuis Carpentras. Malgré ces infrastructures performantes et nombreuses, la très forte affluence sur la zone commerciale peut saturer ces accès.

Figure 18 : Les échangeurs, éléments clés de l'accessibilité (Conception : Girard, 2011)

Pour bénéficier d'une telle desserte, les distributeurs sont prêts à financer une partie des infrastructures routières. Ikéa a notamment versé une participation de 4,6 millions d'euros pour le réaménagement de l'accès à son site57. Cette somme ne couvre pas l'ensemble des travaux mais elle montre l'importance accordée par les enseignes à leur desserte. En aucun cas le groupe Ikéa n'aurait participé au financement de ce carrefour routier s'il n'y trouvait pas un intérêt au niveau de son chiffre d'affaires.

Le réaménagement de ce carrefour fait suite à l'inquiétude de la société des Autoroutes du Sud de la France, qui craignait que l'arrivée de la firme suédoise ne crée de la congestion au niveau du giratoire en sortie de l'autoroute A7. En effet, l'ensemble des clients d'Ikéa auraient dû emprunter ce carrefour, quelque soit leur provenance (cf. figure 19). Ce giratoire,

57 Ikéa (22 octobre 2009), Dossier de presse concernant l'ouverture d'Ikéa Vedène.

41

qui était déjà problématique aurait été saturé et il aurait pu provoquer de la congestion jusque sur les voies autoroutières. Pour éviter cela, le carrefour a été modifié afin que les flux en provenance d'Avignon et du centre commercial ne transitent pas par le giratoire.

Figure 19 : L'aménagement de l'accès au pôle Ikéa (Conception : Girard, 2011. Fond de carte : SIG AURA)

L'accessibilité passe aussi par une offre en stationnement important. Les professionnels sont très attachés à ce point et particulièrement en périphérie où l'immense majorité des clients utilisent l'automobile pour accéder à la zone commerciale. Le célèbre concept de Bernardo Trujillo58 « No Parking, No Business » prend tout son sens sur la zone commerciale Avignon Nord. La quantité de stationnement est dimensionnée selon le nombre de véhicules attendus le samedi, jour le plus fréquenté de la semaine59. Si les distributeurs sont prêts à investir abondamment dans la construction de parkings, c'est que ce sont eux qui vont limiter la capacité d'accueil du site. Leur dimensionnement repose sur des ratios qui sont en moyenne de 7,1 places pour 100m2 de surface de vente à Avignon Nord60. Pour chaque nouvelle implantation, le nombre de places de stationnement est donc augmenté. Cela explique le fait que l'on retrouve plus de 10 000 places sur l'ensemble du site.

58 Bernardo Trujillo est considéré comme le concepteur de la grande distribution. Ses conférences ont inspiré les précurseurs de la grande distribution française.

59 Entretien avec Sara Sheriff (2011), responsable montage d'opérations de la société Immochan région Midi

60 Op. cit., Groupement INterland, AID-Observatoire, Transitec, i (2011)

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L'accessibilité et la visibilité sont très importantes pour des achats impulsifs, ou pour des secteurs d'activités où la concurrence est rude. En revanche, ces critères peuvent être moins indispensables pour une enseigne à forte notoriété. Un établissement reconnu peut en effet se permettre un relatif éloignement par rapport aux principaux flux. La FNAC a, par exemple, longtemps délaissé ces critères afin d'élargir ses sites potentiels d'implantation, qui nécessitaient généralement un grand plancher commercial en centre-ville. On peut remarquer que cette stratégie a changé. La FNAC a en effet ouvert un deuxième point de vente, hors du centre-ville, au sein de la galerie marchande d'Auchan Le Pontet. Le centre-ville d'Avignon est moins stratégique qu'Avignon Nord en termes de visibilité mais surtout en termes d'accessibilité. Le coeur de la cité des Papes ne dispose ni de transports en communs performants, ni d'espaces de stationnement suffisants pour pouvoir atteindre la même capacité d'accueil que la zone commerciale61. Si la réalisation de nouveaux parkings en centre-ville semble inopportune et irréaliste, la mise en place d'un réseau de transports en commun peut permettre de faciliter l'accès au centre62.

2.1.3 L'environnement commercial et non commercial

Le dynamisme commercial peut également être lié à la co-présence d'activités, commerciales ou non.

2.1.3.1 L'environnement commercial

Une enseigne peut être amenée à choisir un site où d'autres enseignes sont déjà présentes ou projettent de s'installer. Ce choix se fait, soit parce que les autres enseignes sont complémentaires à l'activité du futur magasin, soit parce que la présence de nombreuses enseignes du même secteur côte à côte va renforcer l'attractivité du site.

La complémentarité entre plusieurs enseignes est facile à comprendre. Par exemple, un magasin de fournitures de bureaux va être complémentaire d'un magasin de meubles et d'un magasin d'informatique dans le but de créer un univers « équipement du bureau ». Le

61 Ce constat n'est pas nouveau et il était déjà mis en avant dans une étude de l'Université d'Avignon : BERNARD F. (1987), le commerce avignonnais face au développement de l'agglomération, in Etudes vauclusiennes n°38 p.23-26

62 L'objet de ce mémoire n'est pas d'approfondir la question du commerce en centre-ville. Pour plus d'informations, l'accessibilité automobile des espaces centraux est traitée dans l'ouvrage de René Paul DESSE (2001), le nouveau commerce urbain.

43

consommateur sait alors qu'il trouvera tous ce dont il a besoin pour aménager un bureau dans cette zone commerciale.

L'impact de la présence d'enseignes concurrentes sur le même site est moins évident. Tout d'abord, la concurrence va réduire la part de marché de chacun. Mais elle peut également créer un pouvoir d'attraction. Un pôle de plusieurs magasins a une plus grande zone de chalandise qu'un commerce isolé. La concurrence a des effets différents selon le type de biens vendus63. Si la fréquence d'achat des produits est quotidienne ou hebdomadaire, le client n'est prêt à faire que quelques kilomètres et il ne va pas comparer différentes enseignes avant d'acheter. Le consommateur est relativement captif dans le domaine de l'alimentaire, par exemple. Dans ce cas, la concurrence sera négative pour les commerces. C'est pour cela qu'on ne retrouve jamais deux hypermarchés côte à côte. La stratégie de ces magasins est au contraire de mailler le territoire avant que la concurrence ne s'installe.

Dans le cas d'achats plus occasionnels, le consommateur peut avoir besoin de comparer les offres des diverses enseignes. Pour proposer un choix le plus complet possible, la stratégie peut être de s'implanter sur un pôle où l'offre est déjà importante. Dans ce cas, le client sera prêt à venir de plus loin pour être sûr de trouver ce qui l'intéresse. Le marché potentiel est alors agrandi. Les secteurs d'activités les plus concernés par cette effervescence liée à la concurrence sont l'automobile et les magasins d'équipement du foyer. Ces deux types de commerces sont d'ailleurs relativement regroupés sur la zone commerciale Avignon Nord. Pour permettre cette synergie, la société Immochan loue aussi des emplacements à des sociétés qui ne font pas partie du groupe Auchan-Mulliez.

L'exemple des magasins d'usines de Troyes montre particulièrement bien cet intérêt du regroupement de certaines activités. La ville reçoit chaque année plus d'un million de visiteurs, venus spécialement de la région parisienne ou d'ailleurs pour ces magasins d'usine.

Sans qu'il n'y ait ni complémentarité, ni concurrence, la co-présence d'enseignes peut également être bénéfique. C'est le cas si une « locomotive commerciale » génère des flux de clientèle importants. La locomotive commerciale d'Avignon Nord est l'hypermarché Auchan. Cette enseigne accueille jusqu'à 55 000 chalands par jour. De ce fait, elle engendre des flux piétons importants. C'est le fondement même de la galerie marchande. Des enseignes choisissent le centre commercial parce que les flux de chalands y sont plus importants qu'en centre-ville. En effet, les petites boutiques misent sur les piétons qui engendrent des achats impulsifs.

63 MOATI P. et POUQUET L. (1998) p.74-77

44

2.1.3.2 L'environnement non commercial

Certaines activités non commerciales peuvent participer à l'essor de la zone commerciale. C'est le cas de toutes les activités qui génèrent des flux. Tout comme la locomotive commerciale, elles vont permettre d'accroître le nombre de clients potentiels de certains magasins. Les pôles d'emplois vont par exemple créer des flux bénéfiques aux commerces de restauration. Avignon Nord bénéficie notamment des emplois situés à proximité.

L'hypermarché Auchan a également misé sur différents services qui peuvent inciter des personnes à entrer dans le centre commercial. On y retrouve, par exemple, un bureau de Poste, un distributeur de titres de transports SNCF et un distributeur de billets. Tous ces services sont intéressants tant qu'ils ne cassent pas les linéaires commerciaux.

Les enseignes peuvent également rechercher un environnement qui soit en lien avec les produits vendus. On peut citer l'exemple de Décathlon qui a implanté un établissement à proximité du Stade de France.

2.1.4 L'offre foncière

Dans la logique commerciale, la périphérie offre des espaces, non seulement stratégiques, mais également disponibles. Contrairement aux centres-villes qui possèdent des contraintes liées à l'existant, les périphéries ont souvent été considérées comme des espaces vides. Dans les années 1970, les terres agricoles se sont présentées comme des réserves à l'urbanisation sans véritable projet urbain. Une partie d'entre elles ont servi au développement de lotissements pavillonnaires. Mais celles situées à proximité des grands axes routiers souffraient du syndrome NIMBY (Not In My Back Yard64). Mais comme nous l'avons vu précédemment elles possédaient un très fort potentiel commercial. La disponibilité foncière en périphérie a été un critère de faisabilité essentiel dans la réalisation des zones commerciales.

64 NIMBY est un acronyme signifiant littéralement « pas dans mon jardin ». Ici, il signifie que les habitants ont besoin des grands axes routiers pour pouvoir se déplacer mais qu'ils ne veulent pas vivre à côté pour ne pas en subir les désagréments (bruit, pollution, ...)

45

Les terrains constructibles étaient non seulement abondants en périphérie, mais ils étaient aussi bon marché. Le prix du foncier n'est pas un critère d'implantation important. Il est plus judicieux de parler du rapport entre le prix du foncier et le chiffre d'affaires. En effet, les exemples prouvent que les distributeurs vont privilégier les emplacements « numéro 1 »65 même s'ils sont plus chers que des emplacements moins stratégiques. L'exemple le plus frappant est l'avenue des Champs-Elysées. Cette dernière est l'artère commerçante la plus chère d'Europe et la cinquième mondiale avec des loyers commerciaux de 7364€/m2/an en moyenne.66 Malgré ces loyers commerciaux extrêmement lourds, le taux de vacance est quasi-nul. La vacance va, au contraire, toucher les emplacements moins stratégiques, quel que soit leurs loyers.

La véritable force de la périphérie est liée au fait que, non seulement le foncier est moins cher qu'en centre-ville, mais les chiffres d'affaires sont aussi plus élevés. Le rapport Charié sur l'urbanisme commercial affirme qu'un « restaurant rapide de 100 places réalise 4 millions de Chiffre d'Affaires en périphérie et 2 millions en centre ville » ... « Et pourtant les loyers en centre-ville sont beaucoup plus élevés»67. Il est donc beaucoup plus rentable de s'installer en périphérie, mais c'est avant tout une question de chiffre d'affaires.

Le faible coût du foncier permet toutefois d'expliquer l'étalement urbain des zones commerciales. Nous avons vu que pour des questions d'accessibilité, le commerce de périphérie avait besoin de grandes quantités de parkings. Le faible coût du foncier en périphérie permet d'expliquer pourquoi les opérateurs ont choisi de développer le stationnement de surface.

65Terme technique désignant les meilleurs emplacements commerciaux. Ces derniers respectent les règles précédemment énoncées : marché potentiel important, visibilité, accessibilité, ...

66 www.cushwake.com, Cushman & Wakefield, société de conseil en immobilier (1er septembre 2011)

67 Rapport Charié sur l'urbanisme commercial (2009), p.12

46

La figure 20 compare le coût d'un parking de surface et d'un parking silo de 1 000 places chacun68. La surface nécessaire à la création d'une place de stationnement et de ses accès est estimée à 25m2.

 

Coût du foncier

Coût des travaux

Coût total

Méthode de calcul

Surface de terrain

nécessaire * prix du
terrain au mètre carré

Nombre de places * coût des travaux par place

Coût du foncier

+ coût des travaux

Parking de surface

25 000m2 * 70€/m2

= 1 750 000 €

1 000 places * 4000€/pl.

= 4 000 000 €

5 750 000 €

Parking silo (R+3)

6 250m2 * 70€/m2

= 437 500 €

1 000 places * 11 000€/pl.

= 11 000 000 €

11 437 500 €

Figure 20 : Le coût prohibitif des parkings aériens

(Conception : Girard, 2011)

Le tableau ci-dessus montre qu'avec un foncier à 70 euros par mètre carré, le coût des travaux est beaucoup plus important que l'achat du terrain dans les deux cas de figure. L'économie de foncier réalisée grâce à la construction sur plusieurs niveaux ne permet pas de compenser le prix des travaux. Un parking de surface à donc un coût presque deux fois inférieur à un parking silo. Pour que le parking aérien devienne rentable, il faudrait un foncier à plus de 370 euros par mètre carré. De tels prix ne sont constatés que dans les centres-villes ou sur la Côte d'Azur.

Les enseignes peuvent toutefois être amenées à construire, de leur propre initiative, un parking silo. C'est le cas si un point de vente veut s'agrandir mais qu'il n'a ni de réserves foncières à proximité, ni de possibilités de se délocaliser sur un site aussi stratégique. Il peut choisir d'augmenter sa surface de vente en construisant sur son espace de stationnement. Pour compenser les places perdues, le parking aérien est alors la seule solution. En 2004, l'enseigne Carrefour d'Aix en Provence, qui n'avait pas de possibilité d'acquisitions foncières a ainsi choisi le parking silo pour augmenter son nombre de places.

Immochan conçoit actuellement un projet d'extension de la galerie marchande d'Auchan dans lequel il construit un parking silo. Le but étant de rester dans le même ratio de stationnement par mètre carré de surface de vente.

68 Les références du prix du foncier sont issues d'un entretien avec Sara Shériff de la société Immochan.

Le ratio du prix des parkings silo proviennent de l'article du Moniteur du 19 juin 2009 Les parkings véhiculent une nouvelle image, p.60-63 sur les parkings de Mérignac et Sucy-en-Brie

Le ratio du prix des parkings de surface provient du parking relais route des Alpes à Aix en Provence ( www.agglo-paysdaix.fr)

47

2.2 La diversification des activités sur la zone commerciale

Pour attirer et pour satisfaire toujours plus un client qui cherche à faire tous ses achats au même endroit afin de gagner du temps, les acteurs du commerce de périphérie ont progressivement diversifié leur offre. Nous allons étudier l'évolution de la zone commerciale Avignon Nord depuis sa création jusqu'à aujourd'hui. Nous nous baserons sur l'analyse de David Mangin, qui a étudié les différentes générations de zones commerciales centrées sur un hypermarché.

2.2.1 Au commencement : l'hypermarché et sa galerie marchande

Le concept de l'hypermarché se résume par son principal slogan : « tout sous le même toit, au prix le plus bas ». Le principe est de proposer une offre extrêmement complète et d'utiliser les denrées alimentaires comme produits d'appel. L'achat en grandes quantités a permis aux hypermarchés de baisser leur prix de vente afin de conquérir rapidement les marchés.

Le premier hypermarché de France a été créé en 1963 en région parisienne avec 2500 mètres carrés de surface de vente. Il nait dans un contexte où les modes de vie changent. Les loisirs se développent et chacun veut y consacrer du temps. Les femmes accèdent progressivement à l'emploi69. Dans ces conditions, l'achat devient une tâche pénible, pour laquelle les ménages veulent consacrer le moins de temps possible. La grande surface déspécialisée répond à cette demande en proposant de faire tous les achats hebdomadaires en une seule fois.

69 En 1960, un quart des femmes de 25 à 49 ans vivant en couple avec deux enfants travaillaient. En 1990, les trois quarts étaient dans ce cas. In DESSE R-P. (2001), le nouveau commerce urbain, p.24

48

Les premiers hypermarchés se sont développés sans aucun autre magasin autour. Mais rapidement, ils se sont dotés de galeries marchandes pour former la deuxième génération d'hypermarché. C'est le cas pour Auchan Le Pontet qui a été construit en 1974. A cette époque, les distributeurs ont déjà compris que la grande surface à dominante alimentaire génère des flux qui lui permettent de jouer le rôle de locomotive commerciale (cf. partie 2.1). Le centre commercial Avignon Nord naît alors avec une surface de vente de 8 400 mètres carrés pour l'hypermarché et 3 100 mètres carrés pour la galerie marchande70.

Progressivement, le plancher commercial s'est agrandi. Aujourd'hui, l'hypermarché a diversifié toujours plus son offre et sa surface de vente atteint 17 500 mètres carrés. Dans un même temps sa clientèle s'est développée, engendrant de nouveaux flux. De nombreuses enseignes présentes en centre-ville viennent dans le centre commercial pour y implanter un deuxième point de vente ou se délocaliser. Ce choix est motivé par une accessibilité et une visibilité meilleure dans le centre commercial qu'en centre-ville. C'est ainsi que la galerie marchande s'est agrandie jusqu'à atteindre les 11 500 mètres carrés de surface de vente. Comme nous l'avons dit précédemment, le développement du centre s'est fait jusque sur la commune de Sorgues. Le centre commercial mesure aujourd'hui 370 mètres de long. Cela représente environ la longueur du cours Mirabeau à Aix-en-Provence ou de la rue de République à Avignon (cf. figure 21).

70 Le Provençal (1974), Auchan J-2 : des milliers de porte-monnaie attendent le top départ pour se lancer à l'assaut d'Auchan le Pontet

49

Figure 21: Le centre commercial Auchan, élément central et fondateur de la zone commerciale

(Conception : Girard, 2011. Fonds de carte : geoportail.fr)

50

2.2.2 Le développement des surfaces spécialisées et des « discounters »

La taille démesurée de ce centre commercial peut devenir une contrainte. Dans une quête de complémentarité de l'offre, l'hypermarché s'est agrandi pour proposer toujours plus de produits différents. L'équipement de la personne et l'électroménager occupent des surfaces de vente de plus en plus conséquentes et la dominante alimentaire est de moins en moins marquée. Dans le gigantisme du centre commercial, le consommateur a de plus en plus de mal à s'y retrouver et il lui faut de plus en plus de temps pour faire ses achats.

Pour continuer à développer leur offre tout en restant compétitifs sur les temps d'achat, les professionnels de la grande distribution vont créer leurs propres enseignes spécialisées. Le groupe Auchan va ainsi développer des grandes et moyennes surfaces spécialisées dans de multiples secteurs d'activités. On citera, par exemple, Kiabi dans l'habillement, Leroy-Merlin dans le bricolage ou encore Décathlon dans les articles de sport et de loisirs. Ces surfaces spécialisées seront implantées à proximité directe de l'hypermarché qui joue toujours le rôle de locomotive commerciale (cf. figure 22). Le fait de développer des enseignes sous des noms différents de celui de l'hypermarché rassure les clients. En effet, la « concurrence » limite le sentiment d'hégémonie de l'hypermarché sur la zone commerciale.

L'essor de surfaces spécialisées a eu lieu dans les années 1980 en France71. Avignon Nord suit cette tendance. La première arrivée massive de ces enseignes sur le site date de 198672. Quinze moyennes et grandes surfaces se développent alors dans le domaine de l'équipement de la personne principalement, mais également dans la vente de meubles et le bricolage. Des années 1990 à aujourd'hui, la croissance de ces enseignes a été importante. Elle a notamment été soutenue par le développement périurbain qui a, non seulement augmenté la population de la zone de chalandise, mais également généré de nouveaux besoins liés à la possession de maisons individuelles (bricolage, jardinage, loisirs).

Faute de place, ces grandes et moyennes surfaces se sont progressivement éloignées de l'hypermarché (cf. figure 22). L'exemple de Décathlon retrace l'évolution d'une surface spécialisée73. En 1986, l'enseigne s'installe en proche périphérie de l'hypermarché avec une surface de vente inférieure à 2 500 mètres carrés. Sa première extension a lieu en 1990. Pour pouvoir développer à la fois son magasin et son parking, il se délocalise sur la zone de la Tour

71 DESSE R-P. (2001), le nouveau commerce urbain, p.90-91

72BERNARD F. (1987), le commerce avignonnais face au développement de l'agglomération, in Etudes vauclusiennes n°38 p.25

73 Parcours établi d'après BERNARD F. (1987), liste des CDEC (archives départementales), liste des CDAC ( www.vaucluse.gouv.fr/spip.php?article275)

51

Blanche, en se gardant une réserve foncière. En 2011, cette dernière lui a permis d'augmenter sa surface de vente de 2 300 mètres carrés, portant le plancher commercial à 8 200 mètres carrés. Si Décathlon a su conserver un site stratégique, d'autres enseignes se sont, quant-à-elles éloignées de la route de Carpentras. Ce sont sur ces emplacements plus en retrait que la vacance est la plus importante.

Figure 22: L'implantation des surfaces spécialisées autour de l'hypermarché, seconde phase du développement de la zone commerciale

(Conception : Girard, 2011. Fond de carte : geoportail.fr)

Dans les années 1990, la France voit arriver les premiers magasins de « hard-discount ». Né en Allemagne, ce concept repose sur des achats alimentaires rapides et peu coûteux. Un seul de ces magasins est présent sur la zone commerciale Avignon Nord. Les discounters préfèrent en effet se situer plus loin des hypermarchés, qui proposent eux aussi des produits à bas coût. Toutefois, ils captent une part importante de la clientèle et les parts de marché des hypermarchés diminuent dans le secteur alimentaire74.

74 La part de marché des hypermarchés sur les produits alimentaires passe de 35,4 à 33,1% entre 1999 et 2005 (Insee, 2008, Fiche thématique : le commerce de détail)

52

2.2.3 L'essor des services et des loisirs

Les multiples atouts de la périphérie ont ensuite conquis les secteurs des services et des loisirs. La figure 23 nous montre la répartition de ces activités, qui se sont développées sur la partie Ouest de la zone commerciale. Cette partie du site n'est pas détenue par Immochan. Les propriétaires sont donc nombreux et les opérations se sont faites sans planification. Il n'y a pas de limite franche entre cette partie commerciale et les activités industrielles et logistiques plus à l'Ouest.

Le secteur de l'automobile s'y est tout d'abord développé. Les concessionnaires ont profité de la zone commerciale pour se regrouper et ainsi augmenter leur potentiel d'attraction en proposant un choix maximum. Des activités d'entretien et de contrôle technique liés à l'automobile se sont alors installées à proximité.

Sans aucun lien, un certain nombre de restaurants se sont développé dans ce secteur. La présence de la restauration n'est pas récente dans la zone commerciale car l'enseigne Flunch était présente dès l'ouverture du centre commercial en 1974. Toutefois, ce secteur d'activités s'est fortement développé au cours des années 1990 et 2000. La restauration permet de capter une nouvelle catégorie de clients-promeneurs, qui viennent dans la zone commerciale par plaisir. Elle satisfait aussi les employés des zones d'activités, qui sont de plus en plus nombreux sur le site.

Une nouvelle forme d'hôtellerie a également été séduite par la situation des zones commerciales de périphérie. David Mangin a étudié le développement du groupe Formule 175. Cette chaîne hôtelière est apparue en 1985 en France avec pour vocation de loger les représentants et les cadres en déplacements sur les zones d'activités. Grâce au faible coût du foncier, le prix des chambres pouvait être inférieur aux indemnités perçues par ces employés en transit. La question de l'accessibilité est toute aussi importante que celle du prix dans la stratégie de localisation de l'hôtellerie bon marché. En effet, nous avons vu que, contrairement au centre-ville, la zone commerciale offre une accessibilité idéale depuis tout point de l'agglomération. Le développement hôtelier a également été lié à la présence de la restauration sur le site. Ces deux activités sont complémentaires.

L'évolution la plus récente de la zone commerciale concerne l'essor des loisirs. Ce secteur d'activités s'est développé avec l'arrivée d'un bowling en 2006 et du cinéma Capitole Studios en 2009. Avec les restaurants, ces deux commerces sont parmi les rares à être ouvert en soirée et le dimanche. Ces activités semblent relativement isolées au sein de la zone

75 Op. cit., MANGIN D. (2004), p.127

53

commerciale. Toutefois, les multiplexes cinématographiques peuvent devenir les moteurs d'un ensemble d'activités nocturnes comprenant des services de restauration rapide et une discothèque76. Il est trop tôt pour savoir si ce cinéma jouera ce rôle à Avignon Nord.

Figure 23 : Un développement plus récent des services et des loisirs (Conception : Girard, 2011. Fond de carte : geoportail.fr et SIG Grand Avignon)

76 DESSE R-P. (octobre-décembre 2002), Les centres commerciaux français, futurs pôles de loisirs ? in Flux n°50 p.10-11

54

Les hypermarchés ont aussi développé les services et les activités de culture- loisirs. Dans les années 1990, la grande distribution ne bénéficie plus des élans de consommation liés à la vente massive de réfrigérateurs, congélateurs, lave-linges, ... car les ménages sont déjà équipés77. Le contexte économique est également incertain et il faut redonner envie de consommer aux clients. Pour cela, les hypermarchés vont encore diversifier leur offre. Tout d'abord en vendant des bijoux, puis en prenant des parts de marché sur la culture avec la vente de livres78. Dans la continuité du développement du secteur culture-loisirs, la FNAC arrivera dans la galerie marchande en 2007. De multiples services aux clients vont également être développés : agence de voyages, bureau de Poste, distributeur de titres de transports SNCF, distributeur de billets, ...

Conclusion de la deuxième partie :

Les stratégies d'implantation et d'évolution du commerce de périphérie

Les critères d'implantation du commerce de périphérie sont extrêmement précis. Un bon emplacement doit être facilement accessible par sa clientèle potentielle et visible. Pour cela, les carrefours routiers ont été les lieux privilégiés de l'implantation de la grande distribution. Ils ont été choisis car ils permettaient un accès rapide depuis les espaces périurbains en développement.

Même si le commerce génère de nouveaux déplacements, il s'appuie surtout sur des flux préexistants. Le commerce de périphérie a su tirer partie du développement des infrastructures routières et de la périurbanisation. Il représente une adaptation du commerce à ces nouveaux modes de vie.

Les zones commerciales se sont diversifiées pour satisfaire toujours plus les attentes de leurs clients. Pour capter ces nouvelles parts de marchés, elles se sont étendues, repoussant leurs limites toujours plus loin.

77 En 1960, 25% des ménages ont un réfrigérateur. En 1975, 90% des ménages en ont un et 17% ont un congélateur. En 1990, 95% des ménages ont un réfrigérateur et 45% un congélateur. In DESSE R-P. (2001), le nouveau commerce urbain, p.21

78 De 1991 à 2006, la part de marché des hypermarchés sur la vente de livre aurait doublé, dépassant ainsi celle de la FNAC. In GASNIER A. (2007), Dynamiques et enjeux des pôles commerciaux périphériques à partir de quelques cas français.

55

3 Le rôle des pouvoirs publics dans le développement de cette zone commerciale de périphérie

Nous avons étudié les stratégies des acteurs privés du commerce de périphérie afin de comprendre leur fonctionnement. Nous allons maintenant étudier le rôle ambigu des pouvoirs publics, entre régulation, désinvolture et soutien envers le commerce de périphérie.

3.1 Des élus locaux séduits par les ressources fiscales et le développement de l'emploi sur leur commune

La grande distribution va amener un certain dynamisme économique sur les communes d'implantation. Les élus locaux ont ainsi été amenés à négliger les impacts du commerce de périphérie sur l'urbanisme.

3.1.1 Le développement de l'emploi

En amont d'une importante implantation commerciale, des négociations ont lieu entre les élus locaux et les enseignes. La création d'emplois est un argument de poids pour convaincre un maire de l'utilité du projet pour sa commune. Certaines municipalités y sont particulièrement sensibles.

La commune du Pontet a cherché depuis longtemps à développer l'emploi sur son territoire. Historiquement, elle a soutenu le développement d'un grand nombre d'industries, le long de la nationale 7 (devenue D907 aujourd'hui). Ainsi, la commune a vu le développement commercial comme une opportunité de diversifier son panel d'entreprises et de créer de nouveaux emplois79. Dès son arrivée, Auchan avait promis la création de 250 emplois. Aujourd'hui, le centre commercial s'est développé et Auchan Le Pontet est considéré comme le plus gros employeur au registre du commerce et des sociétés du Vaucluse80.

Cette société est donc très importante pour la commune. A tel point que, lorsque le centre commercial a désiré s'étendre en 1982, le maire a accepté d'enterrer 200 mètres du canal Crillon, qui sert de limite séparative entre le Pontet et Sorgues, afin que le magasin puisse s'agrandir au dessus. Cela explique la particularité de ce centre commercial, dont le bâtiment est en partie sur le Pontet et en partie sur Sorgues.

79 Entretien avec Michel LACROZE (2011), directeur de l'atelier d'urbanisme et d'architecture Lacroze travaillant sur les documents d'urbanisme de la commune du Pontet depuis les années 1970.

80 http://economie.vaucluse.cci.fr, Registre du commerce et des sociétés (2010)

56

Le développement de l'emploi par le commerce de périphérie est discutable car il entraîne un déclin de l'emploi en commerce traditionnel. A une échelle large, il est très difficile de savoir si l'emploi en périphérie remplace totalement les pertes d'emploi en centre-ville. Mais à une échelle communale, le constat est sans appel. La commune de Vedène vient par exemple d'accueillir le géant du meuble Ikéa. Ce complexe devrait apporter environ 600 emplois. Pour autant, le commerce de centre-ville de Vedène, qui est déjà très faible et à dominante alimentaire, a peu de chances d'être impacté par le projet. On peut donc s'attendre à un gain d'emplois net pour la commune.

Les communes du Pontet et de Sorgues ont soutenu ce type d'implantations depuis des décennies. En 2008, leurs indices de concentration d'emploi (ICE)81 étaient respectivement de 161 % et 113 %82. Ce taux est en constante augmentation sur la commune du Pontet. En ce qui concerne Vedène, cet indice est passé de 72% en 1999 à 65 % en 2008. L'arrivée de l'enseigne Ikéa et de sa galerie marchande devrait lui permettre de compenser ce déclin en ramenant le taux entre 70 et 80%.

Le commerce est donc un domaine créateur d'emplois qui tient particulièrement à coeur aux élus. Le PADD du SCoT, qui est actuellement en phase d'enquête publique avant son approbation, met en avant que sur la période 1999-2006, le commerce a généré en moyenne 155 emplois par an83. En poursuivant cette tendance, les élus souhaitent créer 1700 emplois dans le domaine du commerce d'ici 2020. Cet objectif est relativement ambitieux compte tenu du contexte économique actuel, où la consommation des ménages stagne. Il prouve toutefois que le projet politique est de conforter l'attraction commerciale, que ce soit en centre-ville ou en périphérie.

3.1.2 Des recettes fiscales importantes

Jusqu'en 2009, la principale ressource fiscale générée par les entreprises était la taxe professionnelle. A l'origine, cet impôt était perçu individuellement par les communes. Il est difficile d'avoir accès aux données historiques de la taxe professionnelle. Nous nous baserons donc sur des sommes récentes pour donner un ordre de grandeur de ce qu'à pu représenter cet impôt pour la commune du Pontet, avant la mise en place de la taxe professionnelle unique. En 2008, le produit de cet impôt s'est élevé à 12,7 millions d'euros pour les seules entreprises

81 L'Indice de concentration d'emploi est le rapport entre le nombre d'habitants de la commune qui ont un emploi et le nombre d'emplois sur la commune.

82 Insee, RP1999 et RP2008 exploitations principales du lieu de résidence et du lieu de travail.

83 ASSEDIC (2006) in SCoT du Bassin de vie d'Avignon (2010)

57

du Pontet84. Sur cette somme 3,8 millions d'euros ont été versés par des commerces85. Cette branche d'activités représente donc un quart de la taxe professionnelle perçue par la commune. On comprend alors pourquoi les élus locaux avaient tout intérêt à favoriser le développement de la zone commerciale. Le Pontet avait également besoin d'une taxe professionnelle importante pour compenser le faible produit de sa taxe d'habitation. En effet, l'assiette d'imposition de cette commune est le plus faible de toute la communauté d'agglomération. Cela est notamment dû à la forte concentration de logements anciens et en mauvais état. On estime que le Pontet a perçu environ 230 000 € de taxe d'habitation en 2009. Un tel écart entre le produit de la taxe professionnelle et celui de la taxe d'habitation est atypique (cf. figure 24). Sur l'ensemble des communes françaises, la taxe d'habitation représente environ 60 % de la taxe professionnelle. Il y a donc une répartition de l'impôt entre les ménages, qui payent également les taxes foncières, et les entreprises. Sur la commune du Pontet, la taxe d'habitation représente moins de 2 % du produit de la taxe professionnelle. Les capacités financières de la commune proviennent donc principalement des activités. Le Pontet a ainsi pu être une commune dotée d'un fort pouvoir financier, tout en ayant des ménages modestes.

 
 
 
 

Produit de la taxe

Produit de la taxe d'habitation

industrielle et commerciale)

professionnelle

par habitant (2009)

764

(part communale)

Villeneuve les Avignon (commune

 
 

par habitant (2009)

Le Pontet (commune à dominante

16 886 habitants

14

de taille similaire sans dominante

industrielle et commerciale)

12 756 hab

164

23

Moyenne des communes françaises

en 2006

251

149

Figure 24 : Un produit de la taxe professionnelle prépondérant par rapport à celui de la taxe d'habitation.

(Conception GIRARD, 2011, d'après données du Grand Avignon et délibérations communales sur les taux de la taxe d'habitation)

84 D'après les données du Grand Avignon sur les ressources fiscales.

85 Idem.

58

A partir de 1995, une communauté des communes à taxe professionnelle unique est créée, regroupant ainsi Avignon, Le Pontet, Morières-lès-Avignon et Saint-Saturnin-lès-Avignon 86 . La commune de Vedène sera intégrée à cet EPCI, devenu communauté d'agglomération, en 2001. Rappelons que la commune de Sorgues rejoindra une autre intercommunalité : la Communauté de Communes des Pays de Rhône et d'Ouvèze. Le regroupement de ces communes industrielles en structure intercommunale va permettre d'utiliser le produit de la taxe professionnelle pour des projets supra-communaux.

Toutefois, les activités de la zone commerciale restent importantes pour la communauté d'agglomération. En 2009, le commerce pontetien a fourni près de 4 % de son budget de fonctionnement et l'ensemble de la taxe professionnelle, 46 % de ce même budget. On comprend alors que le Grand Avignon ait financé des équipements, notamment routiers, pour accueillir de nouvelles entreprises.

Le poids financier du Pontet continue à lui être bénéfique au sein de l'agglomération. En effet, cette commune produit une part importante des ressources du Grand Avignon, et son maire y occupe donc des fonctions importantes. Ce dernier est également président du SCoT du Bassin de Vie d'Avignon. Il est d'autant plus dur de freiner le développement commercial du pôle d'Avignon Nord lorsque le président du SCoT a un certain intérêt à soutenir l'essor de cette zone commerciale.

Depuis 2009, la taxe professionnelle a été supprimée. Les ressources de la communauté d'agglomération liées aux cotisations des entreprises ont ainsi été divisées par deux. Pour autant, cela ne supprime pas l'importance des impôts des entreprises car de nouvelles taxes ont été mises en place : cotisation foncière économique, cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, taxe sur les surfaces commerciales, ... De plus, elle perçoit la part de la taxe d'habitation autrefois attribuée au conseil général.

En ce qui concerne les commerces, il est toutefois difficile de dire comment leurs cotisations ont évolué. En effet, auparavant, la taxe professionnelle se basait sur l'investissement alors qu'aujourd'hui, ce sont la valeur ajoutée, le foncier et les surfaces commerciales qui déterminent l'assiette des différents impôts. La cotisation des grandes surfaces ne devrait donc pas diminuer, voire peut-être même augmenter. Si cela se produit, cela renforcerait la position de force de la grande distribution.

86 Arrêté préfectoral n°2719 du 12 décembre 1994, portant création de la communauté de communes du Grand

Avignon.

59

3.1.3 La mise en concurrence des élus locaux

Le bassin de vie d'Avignon n'a jamais approuvé de Schéma Directeur d'Aménagement et d'Urbanisme, ni de Schéma Directeur. Son premier Schéma de cohérence Territorial (SCoT) a été arrêté en 2010, mais il n'est pas approuvé. Dans ce contexte, les élus communaux n'ont jamais été guidés par un projet commun. A propos du commerce, un Schéma de Développement Commercial a été élaboré à l'échelle du Vaucluse afin de freiner le développement commercial de périphérie. Mais les règles qu'il fixait ont été ignorées car ce document n'a aucune valeur règlementaire.

Dans ce contexte où il n'existe pas de document intercommunal de planification, refuser une implantation commerciale n'est pas facile pour un élu. Il existe en effet de nombreux sites stratégiques en périphérie et les maires savent que s'ils refusent une implantation, l'enseigne ira s'installer sur la commune voisine. Les conséquences pour le commerce traditionnel de sa commune seront les mêmes que s'il avait accepté mais il ne bénéficiera ni des emplois générés, ni des ressources fiscales. La situation ne s'est que très peu améliorée avec la taxe professionnelle unique. En effet, Avignon Nord possède la particularité d'être sur deux intercommunalités. Selon le lieu d'implantation, les ressources fiscales ne sont donc pas perçues par la même structure. Il y a là une incohérence dans le découpage des Etablissements Publics de Coopération Intercommunale qui devrait être résolu par la réforme de l'intercommunalité.

Aujourd'hui, Avignon Nord tire partie de cette situation intercommunale. En effet, les maires du Pontet et de Sorgues n'ont pas les mêmes projets vis-à-vis de la zone commerciale. Le maire du Pontet, qui est également Président du SCoT, veut freiner le développement commercial et promouvoir la mixité fonctionnelle alors que son confrère veut poursuivre l'extension du site. La zone commerciale pourrait donc continuer à se développer, en se rapprochant toujours plus du monastère de la Visitation (présenté en partie 1.4.1). Aujourd'hui, seul le SCoT peut construire un projet d'ensemble capable d'harmoniser les différentes politiques urbaines.

60

3.1.4 Un POS souple pour permettre le développement économique

Pour les raisons énoncées précédemment concernant l'emploi, les ressources fiscales et la concurrence avec les autres communes, chaque commune avait intérêt à développer ses propres zones d'activités. Pour cela, les documents d'urbanisme ont été très permissifs envers les entreprises. Le Plan d'Occupation des Sols (POS) du Pontet illustre bien cette pratique.

A l'arrivée de l'enseigne Auchan en 1974, un Plan Sommaire d'Urbanisme est en vigueur sur la commune. Il définit l'emplacement de la future zone commerciale Avignon Nord comme une zone à vocation économique87. Ce n'est qu'en 1985 que sera approuvé le POS du Pontet. Il sera établi dans une logique de séparation des fonctions urbaines suivant ainsi les théories de Tony Garnier et de Le Corbusier88.

Dans ce document, la commune va en effet décider de réserver le foncier disponible au Nord de la route de Carpentras pour les activités économiques. Ce secteur est stratégique car il permet aux entreprises d'être desservies par l'autoroute et par les voies rapides. Le développement de l'habitat se fera sur le sud de la commune sous forme de lotissements pavillonnaires.

La majeure partie du Nord du Pontet est donc incluse soit en zone UE, à vocation industrielle et commerciale, soit en zone 2NA, zone d'urbanisation future à court terme réservée aux activités (cf. figure 25). Dans ces deux zones du POS, l'habitat est interdit sauf si des logements sont nécessaires au fonctionnement d'une entreprise. On retrouve donc près de 300 hectares dédiés aux activités rien que sur la commune du Pontet. Cette surabondance de terrains disponibles explique le faible coût du foncier, qui est en partie responsable de l'étalement urbain comme nous l'avons vu (cf. partie 2.1.4).

87 Entretien avec Michel LACROZE (2011), directeur de l'atelier d'urbanisme et d'architecture Lacroze travaillant sur les documents d'urbanisme de la commune du Pontet depuis les années 1970.

88 Nous approfondirons ces théories dans la sous-partie suivante (3.2).

61

Figure 25 : Une partie du territoire dédiée à l'activité (Source : Plan d'Occupation des Sols du Pontet, 2009)

Les règles pour les autres constructions sont extrêmement souples sur cette partie de la commune. Le coefficient d'emprise au sol, limité à 70% de la surface du terrain, est une des seules limites. Il est très peu contraignant pour les enseignes car le stationnement n'est pas compris dans ce ratio et nous avons vu que les parkings occupent généralement plus de 50% de la surface. La quantité de stationnement présente sur le site a bien été développée sur des initiatives privées car le document d'urbanisme n'impose pas de ratios de stationnement. Il demande juste à ce que le nombre de places corresponde aux besoins de l'activité.

En ce qui concerne l'intégration architecturale des bâtiments dans le paysage, des règles existent. Aussi bien en zone UE qu'en zone 2NA, il est stipulé que les constructions « par leur situation, leur architecture, leurs dimensions et leur aspect extérieur ne doivent pas porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains, ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ». Toutefois, cette règle laisse le champ libre à l'appréciation de l'instructeur du permis de construire. Si le projet communal est de développer l'activité, elle peut être délaissée. La zone commerciale a ainsi été considérée comme un espace « perdu », sans intérêt paysager car personne n'y habitait.

62

3.2 Le rôle des acteurs du développement routier et autoroutier

La sous-partie 3.1 nous a montré que la commune bénéficiait d'un développement économique lors de l'arrivée d'activités commerciales sur son territoire. Malgré les problèmes urbains engendrés, elle avait donc un certain intérêt à profiter du potentiel que représentait le commerce de périphérie.

Mais nous avons vu dans la partie 2 que ce potentiel était lié aux infrastructures routières. Il nous faut donc maintenant étudier la stratégie des acteurs publics du développement routier, en France et dans le Vaucluse.

3.2.1 Des théories du Corbusier au maillage routier

La théorie de la séparation des fonctions urbaines apparaît en 1917 avec l'idée de la Cité Industrielle de Tony Garnier. Ce zonage des fonctions nécessite un réseau de transports performant entre les différents secteurs de la ville. Le Corbusier poursuivra le raisonnement de Tony Garnier et publiera la Charte d'Athènes89. Dans cet ouvrage, il indique qu'il faut attribuer des secteurs à chacune des quatre fonctions de la ville : « habiter, travailler, se récréer (dans les heures libres) et circuler ». Les espaces de circulation occupent donc une fonction circulatoire uniquement. Ils ne sont pas considérés comme des lieux d'échanges et de rencontres. Dans les orientations de la Chartes d'Athènes, Le Corbusier estime que chaque quartier d'habitation doit contenir des espaces verts pour les loisirs (article 35) et que les zones industrielles doivent êtres contigües aux routes, canaux et voies ferrées. Entre ces deux zones, les espaces verts sont considérés comme des espaces « tampons ». Ces théories, formulées sur des villes importantes, prônaient une densité relativement importante sur les espaces d'habitation, de l'ordre de 300 habitants à l'hectare.

La séparation des fonctions urbaines a bien été réalisée en France. Mais elle s'est faite dans un contexte de rejet des grands ensembles construits dans les années 1960. Il n'y a donc pas eu de densité et les espaces verts prévus dans les quartiers d'habitation ont été remplacés par les jardins privatifs des lotissements pavillonnaires. Pour relier les secteurs résidentiels et les secteurs d'activités, seul le mode routier a été retenu. Le territoire a été structuré par les autoroutes, voies rapides, rocades et radiales qui ont formé des mailles de plusieurs centaines de mètres de large. Ces mailles se sont substituées au traditionnel îlot de cent mètres de côté90.

89 Les théories de Le CORBUSIER reprises dans MERLIN P. (2007), L'urbanisme.

90MANGIN D. (2005), Pour une ville passante et métisse, compte rendu du séminaire Vies collectives, 10p.

63

Le quadrillage du territoire français par le réseau routier et autoroutier a été très rapide. Le premier grand tronçon autoroutier a relié Paris au Nord de la France dans les années 1960 et aujourd'hui on compte plus de 11 000 kilomètres d'autoroutes91. Il est complété par près de 10 000 kilomètres de routes nationales, 378 000 kilomètres de routes départementales et 642 000 kilomètres de voiries communales.

Conjointement à ce développement autoroutier, le taux de motorisation des ménages augmente rapidement. En effet, la figure 26 nous montre que le nombre de ménages a fortement augmenté durant les années 196092. Il continue de croître plus légèrement depuis les années 1980.

10%

1980

69%

Taux de motorisation des ménages

1953

20%

1960

30%

40%

1964

1967

50%

58,60%

1971

1985

1990

76%

73%

0%

90%

80%

70%

60%

50%

40%

30%

20%

1995

78%

2000

80%

2007

82%

1950 1960 1970 1980 1990 2000 2010

Figure 26 : Des ménages qui s'équipent rapidement en automobile

(Conception Girard, 201.D'après Villeneuve A., 1971 pour les données de 1953 à 1971, INSEE de 1980 à 1990 et SOFRES de 1995 à 2007)

91 Insee, service d'études techniques des routes et autoroutes (SETRA) au 1er janvier 2010.

92 VILLENEUVE A. (1971), L'accoutumance à l'automobile, in Economie et statistique n°23, p.3-20. www.persee.fr

64

Il est difficile de dire si c'est l'importance du réseau routier qui a provoqué l'essor de l'automobile et qui l'a rendue indispensable ou l'inverse. Une chose est sûre, le développement routier s'est fait au détriment des autres modes de transports traditionnels. Les cheminements doux, qui existaient à l'intérieur des villes et des campagnes, ont été fragmentés par ce nouveau maillage à la fonction purement circulatoire. L'usage de la voiture est ainsi devenu de plus en plus indispensable.

L'Etat a longtemps encouragé le développement des infrastructures routières et autoroutières. Les schémas directeurs routiers nationaux étaient chargés de planifier et de hiérarchiser l'ensemble de ces grandes voies de liaison. La loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire du 4 février 1995, dite loi Pasqua, imposait même qu'en 2015, tout point du territoire se trouve à moins de 45 minutes en voiture, soit d'une autoroute, soit d'une route express à deux fois deux voies reliée au réseau national, soit d'une gare desservie par le réseau ferroviaire à grande vitesse. L'objectif énoncé était d'assurer une « desserte équilibrée et un désenclavement de l'ensemble du territoire, quels que soient les trafics constatés »93. Même si cette partie de la loi a été abrogée en 1999, elle montre le volontarisme de l'Etat en matière de développement routier.

A une échelle plus locale, les pouvoirs publics ont également investi pour améliorer la fluidité du trafic routier. L'exemple le plus frappant est celui du développement des carrefours giratoires. Le premier giratoire avec priorité aux personnes à l'intérieur de l'anneau est apparu en France en 198494. Ce système, qui permettait d'écouler plus rapidement le trafic qu'un système de feux tricolores, s'est rapidement développé. Le Certu estime qu'en 1984, le nombre de giratoires en France était probablement inférieur à 500. On en dénombrait plus de 12 000 en 1995 et environ 30 000 en 200595.

L'ensemble de ces dispositions pour favoriser le développement routier a eu un impact fort sur l'appareil commercial. Tout d'abord, l'évolution rapide des taux de motorisation a permis de développer un commerce basé sur l'accessibilité automobile. Comme nous l'avons vu, le temps d'accès est primordial dans le calcul de la zone de chalandise de la grande distribution. Les axes routiers associés à des échangeurs performants et à des systèmes de desserte fine, de type giratoires, ont permis de développer des magasins disposant d'une zone de chalandise étendue : les hypermarchés. David Mangin a constaté que le développement des

93www.legifrance.gouv.fr, Loi n°95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire.

94 Le premier giratoire daterait de 1906 avec l'aménagement de la place de l'Etoile à Paris, mais la priorité était donnée aux personnes venant de la droite. www.technicites.fr

95 GUICHET B. (2009), Les accidents dans les carrefours giratoires urbains, étude statistique de 1993 à 2005, Certu, 38p.

hypermarchés est concomitant avec la construction du réseau routier (cf. figure 27)96. Dans ce travail, il ne faut pas comprendre que les clients se rendent à l'hypermarché via l'autoroute, mais qu'il y a une corrélation entre la volonté politique de développer des transports routiers rapides et l'essor de la grande distribution.

Figure 27: Le développement simultané des hypermarchés et des autoroutes (Source : MANGIN D., 2004, La ville franchisée, p.76)

65

96 Op. cit., MANGIN D. (2004)

66

3.2.2 Le développement du réseau routier vauclusien comme catalyseur de la zone commerciale

Pour illustrer les liens entre le développement routier et l'essor du commerce de périphérie, nous allons étudier de l'évolution du réseau routier à l'échelle du bassin de vie d'Avignon. La figure 28 schématise le développement routier de 1946 à aujourd'hui97.

En 1946, le Pontet est un carrefour routier difficile où se rejoignent les flux en provenance de la Nationale 7 et ceux de la route de Carpentras. La congestion est particulièrement importante lors des congés d'été, car la Nationale 7 relie les plages de la Méditerranée aux villes de Paris, Lyon, ...98. La route de Carpentras traverse les communes d'Entraigues-sur-Sorgues, de Monteux et de Carpentras. L'ensemble des flux en direction d'Avignon arrivent directement sur les remparts de la ville.

En 1960, on constate que pour faciliter les échanges entre le Pontet et Avignon, une deuxième route est créée, en parallèle de l'existante, sur les bords du Rhône. Un pont est également construit au Pontet pour passer au dessus de la voie ferrée et ainsi éviter un passage à niveau qui générait de la congestion. Les flux sont en augmentation sur le secteur car l'Autoroute A7 vient d'être mise en service et qu'un échangeur débouche sur la route de Carpentras.

En 1972, on constate que la situation a peu évoluée. Toutefois, Avignon amorce son projet de rocade en construisant la partie Sud-est de celle-ci. L'hypermarché arrive en 1974. Cette implantation concorde avec la période où de nombreux projets routiers apparaissent.

On constate en effet qu'en 1982, la départementale 942 a été déviée et qu'elle contourne la commune d'Entraigues-sur-Sorgues. Un projet de contournement est également en cours de réalisation à Monteux. Ces nouveaux projets permettent d'élargir la route de Carpentras, du Pontet jusqu'à Monteux. L'accès au centre commercial depuis le bassin Est de l'agglomération s'en trouve grandement facilité. Par ailleurs, la partie Ouest de la rocade avignonnaise permet de rejoindre le Gard via un nouveau pont sur le Rhône.

En 2001, le contournement de Monteux est également terminé et il permet de rejoindre Carpentras et Avignon sans traverser un seul bourg. Le barreau Est de la rocade finalise la liaison entre le Gard et Carpentras. Dans une lutte sans fin contre la congestion automobile, le Conseil Général réalise aujourd'hui le contournement de Carpentras.

97 D'après un ensemble de cartes consultées aux archives départementales du Vaucluse (cartes routière de 1946 et 1960, carte IGN de 1972, carte routière de 1989, carte IGN de 2001) et la cartographie actuelle ( géoportail.fr)

98 LACROZE M. (2011), directeur de l'atelier d'urbanisme et d'architecture Lacroze travaillant sur les documents d'urbanisme de la commune du Pontet depuis les années 1970.

Figure 28 : L'évolution rapide du réseau routier sur le bassin de vie d'Avignon

(Conception Girard, 2011. D'après cartes d'archives)

L'ensemble de ces infrastructures routières a permis d'améliorer l'accessibilité à la zone commerciale depuis Avignon, depuis l'Est du département et même depuis le Gard. Auparavant, les limitations de vitesse alternaient entre 50km/h dans les bourgs et 90 km/h entre les différentes communes. Aujourd'hui, l'ensemble du trajet entre Avignon et Carpentras se fait par voies express limités à 90 ou 110km/h.

Dans ces conditions, les enseignes ont bénéficié de la croissance des flux qui a augmenté leur visibilité. La zone de chalandise du pôle commercial Avignon Nord s'est également étendue. Dans un même temps, le développement du réseau routier a favorisé la périurbanisation. La figure 29 montre l'exemple d'Aubignan, une ville périurbaine de l'arrière-pays de Carpentras qui a connu une forte croissance démographique à partir de 1982. Cela a augmenté le nombre de clients potentiels de la zone commerciale.

Ce graphique représente l'évolution de la population dans trois communes-types entre 1962 et 2008. La population de référence est celle de 1962.

Essor des villes de banlieue

Essor des villes périurbaines

250%

200%

150%

100%

50%

1962 1968 1975 1982 1990 1999 2008

0%

68

Avignon Le Pontet Aubignan

Figure 29 : Une démographie influencée par le développement routier (Conception : Girard, 2011. D'après Recensements de la population, Insee)

Le potentiel commercial s'est donc fortement développé. Les nouveaux axes routiers permettaient d'acheminer un flux de clientèle et les immenses parkings réceptionnaient ces flux. Mais l'afflux de voitures nécessitait un système de desserte locale performant pour relier la route principale à l'enseigne. Pour cela, les communes et les intercommunalités ont créé de multiples giratoires pour permettre un trafic fluide. Le dernier en date a été construit en 2009 pour desservir le cinéma Capitole Studios. Il a couté 400 000 euros à la communauté d'agglomération99.

Pour se développer, le commerce de périphérie a eu besoin des trois maillons de la « chaîne de l'accessibilité » : des axes routiers performants, un parking important et entre les deux un système d'échangeurs et de giratoires. Sans l'un de ces trois maillons, le commerce est lésé dans son accessibilité et donc dans sa compétitivité. Le développement des infrastructures routières par les pouvoirs publics a ainsi joué un rôle majeur dans le développement du commerce de périphérie.

Sans le vouloir, l'Etat, acteur du développement routier, a donc créé un potentiel pour le commerce de périphérie. Dans un même temps, nous allons voir qu'il a tenté de freiner la croissance des zones commerciales en votant un certain nombre de lois.

69

99 www.grandavignon.fr

70

3.3 L'échec des lois visant à limiter le développement commercial de périphérie

Dans un souci de maintien du commerce de proximité, l'Etat a vite compris qu'il fallait freiner l'essor de la grande distribution. Nous allons présenter ici l'évolution des différents textes de lois qui ont tenté de régir le commerce de périphérie100.

3.3.1 La loi Royer et la mise en place des procédures d'autorisation

Le développement du commerce de périphérie a rapidement suscité de vives critiques de la part des commerçants traditionnels. La loi Royer, dite loi d'orientation du commerce et de l'artisanat, a été votée en 1973 avec pour objectif de préserver le petit commerce. Pour cela, le législateur a créé un système d'autorisation indépendant du permis de construire : les Commissions Départementales d'Urbanisme Commercial (CDUC). Cette procédure devient obligatoire en préalable de toute implantation d'un commerce de plus de 1 500 mètres carrés de surface de vente dans une commune de plus de 40 000 habitants. Dans une commune de moins de 40 000 habitants, ce seuil est abaissé à 1 000 mètres carrés. La CDUC avait trois mois pour prendre sa décision. En cas de refus, le pétitionnaire avait une possibilité de recours auprès de la Commission Nationale d'Urbanisme Commercial (CNUC).

Les CDUC sont composées de neuf professionnels du commerce et de l'artisanat, de neuf élus locaux et de deux représentants des associations de consommateurs. Parmi les professionnels, on retrouve six délégués du commerce traditionnel, deux représentants des grandes surfaces et un représentant des artisans. Ces commissions ne comportent donc pas de technicien de l'urbanisme. Cela s'explique par le fait que les critères étudiés dans les CDUC sont plus de nature économique. La loi est d'ailleurs inscrite au code du Commerce et non pas au code de l'Urbanisme. Pour évaluer l'impact de la future implantation sur le commerce traditionnel, les commissions allaient réaliser une pseudo-étude de marché. Elles se basaient sur le calcul du taux d'équipement en grandes surfaces par rapport à la population de la zone de chalandise. Ce calcul était contestable car la zone de chalandise considérée était celle fournie par le pétitionnaire. De plus, nous avons vu dans la partie 2.1 de ce mémoire qu'une étude de marché est beaucoup plus complexe. Les membres des CDUC n'avaient pas les compétences techniques pour réaliser une telle analyse.

100 Cette partie s'inspire des textes successifs consultés sur legifrance.fr, des rapports législatifs du Sénat et des analyses de différentes chambres de commerce sur l'évolution législative.

La loi Royer a subordonné les autorisations au respect de critères économiques, mais en contrepartie, les critères d'urbanisme ne sont pas étudiés. Ces derniers ne seront étudiés que lors de la procédure de dépôt du permis de construire, qui est totalement indépendant des CDUC et qui relèvent exclusivement de la compétence communale. C'est un des grands défauts de ce système d'autorisations séparées.

Face à la loi Royer, les enseignes vont tenter, dans la mesure du possible, de réaliser des projets qui ne sont pas soumis à l'autorisation des CDUC. Pour cela, elles ne vont pas développer de cellules mitoyennes dont la surface dépasserait le seuil à partir duquel l'autorisation est requise. Elles vont donc privilégier l'implantation de multiples « boîtes commerciales » de moins de 1 000 mètres carrés de surface de vente. Ce développement sous forme de « lotissements commerciaux » est une particularité française qui a pour seul but de contourner les procédures d'autorisations commerciales. En effet, on ne retrouve pas ce type de formes urbaines dans les pays anglo-saxons par exemple. La figure 30 est une prise de vue aérienne du « Retail Park » Meadowhall situé en périphérie de Sheffield, en Angleterre. Le concept du Retail Park se rapproche de celui de centre commercial avec un ensemble de cellules mitoyennes mais la surface de vente est plus importante et certaines vitrines donnent sur l'extérieur. Celui de Meadowhall est construit autour d'un hypermarché Sainsbury qui joue le rôle de locomotive commerciale. L'ensemble du Retail Park possède une surface de vente de près de 140 000 mètres carrés101. Dans un seul bâtiment, on retrouve donc un plancher commercial plus important que celui de l'ensemble de la zone commerciale Avignon Nord.

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101 en.wikipedia.org

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Figure 30 : Meadowhall, un « Retail Park » composé de cellules mitoyennes (Source : en.wikipedia.org)

Pour éviter le contournement des procédures d'autorisations, le législateur a réformé la loi Royer par la loi Doubin du 31 décembre 1989. Elle permet de soumettre au passage devant la CDUC, tout commerce s'implantant dans un ensemble commercial de plus de 1 500 mètres carrés. Par ailleurs, elle a pour but d'apporter plus de transparence dans les décisions. Auparavant, le vote se faisait à bulletin secret et les CDUC ont souvent été accusées d'alimenter la corruption des élus locaux. A partir de la loi Doubin, le vote est devenu public.

La loi du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite loi Sapin, poursuit le même objectif. Elle met en place les Commissions Départementales d'Equipement Commercial (CDEC) qui remplacent les CDUC. Ces nouvelles instances ne comportent plus que sept membres contre vingt auparavant. Sont représentés les maires de la commune d'implantation et des deux communes les plus peuplées de l'arrondissement, le conseiller général du canton, le président de la Chambre de Commerce et d'Industrie et celui de la Chambre des Métiers et une association de consommateurs. Le fait de réduire le nombre de membres était censé rendre plus difficile l'obtention des autorisations. Le nombre d'ouvertures a en effet diminué depuis la mise en application de la loi (cf. figure 31) mais d'autres phénomènes rentrent en jeu. Premièrement, le territoire commence à être maillé par le réseau des hypermarchés et les

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nouvelles implantations ont des parts de marché plus faibles. On compte en effet 862 hypermarchés en France en 1991 102 . Deuxièmement, une nouvelle forme de vente s'affirme : les hard-discounts. La surface de vente de ces enseignes est comprise entre 300 et 1 200 mètres carrés, mais la majorité se situe entre 600 et 800 mètres carrés. Ce type de magasin propose des prix attractifs en réduisant au minimum son personnel. En 1989, les hard-discounts ne représentaient que 7 % des supermarchés. En 1990, cette part était de 22%, puis de 75% en 1993 et 82% en 1994103. Il y a ici une recrudescence de ce type d'enseignes qui, de par leur surface de vente, sont dispensées d'autorisations préalables. Leur part de marché augmente et les nouvelles implantations d'hypermarchés sont rares. Les autorisations accordées dans les années 1990 concernent donc principalement des commerces non alimentaires.

Nombre d'ouvertures de magasins de plus de 1 000 mètres carrés entre 1986 et 1994.

Figure 31: une légère diminution du nombre d'implantations de grandes surfaces au début des années 1990

(Source : www.senat.fr, Avis n° 272 de M. Alain PLUCHET)

Si le hard discount capte des parts de marché aux hypermarchés, il affaiblit également les commerces traditionnels. Le législateur a donc fait en sorte que les hard-discounts soient également soumis à autorisation, en créant la loi Raffarin du 5 juillet 1996, relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat. Ce texte abaisse le seuil des autorisations à 300 mètres carrés pour toute création ou extension. En ce qui concerne les changements d'activités, ils sont soumis à autorisation à partir de 300 mètres carrés si

102 Insee, comptes du commerce (1991)

103 PLUCHET A. (1995-1996), Avis n° 272 fait au nom de la commission des affaires économiques, au sujet du Projet de loi portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, www.senat.fr

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l'activité du repreneur est à dominante alimentaire, et à partir de 2 000 mètres carrés dans les autres cas. Cette réforme ne laisse que trois élus au sein des commissions, à savoir : le maire de la commune d'implantation, le président de l'intercommunalité et le maire de la commune la plus peuplée. Le délai d'instruction des dossiers est rallongé à quatre mois et les projets de 6 000 mètres carrés sont soumis à enquête publique.

La loi Raffarin est la première réforme qui va réellement renforcer les procédures d'autorisations préalables. Pour autant, le commerce de périphérie va continuer de se développer. Le Schéma de Développement Commercial (SDeC) du Vaucluse estimait que 20% du plancher commercial existant en 2003 avait été développé dans les 5 dernières années. Malgré l'abaissement du seuil des autorisations préalables, la croissance des périphéries reste forte. Cela est lié au fait que sur la période 1998-2003, 63% des surfaces commerciales qui ont fait l'objet d'une procédure de CDEC ont été acceptées104. Lorsqu'une autorisation est refusée, l'enseigne peut exercer un recours auprès de la Commission Nationale d'Equipement Commercial, mais si son projet est également refusé, rien ne l'empêche de représenter un autre dossier plus tard. Certains promoteurs vont ainsi réviser leur projet plusieurs fois jusqu'à ce qu'il soit adopté. Les CDEC ont ainsi été qualifiées de « machines à dire oui ... lentement »105.

Malgré leur faible capacité à freiner le développement commercial de périphérie, les CDEC ont été vivement critiquées car elles étaient contraires à la liberté d'entreprendre, protégée par le droit européen. L'article 43 du Traité instituant la Communauté européenne stipule en effet que « les restrictions à la liberté d'établissement ... sont interdites »106. Ainsi, en 2001, l'enseigne de hard-discount Aldi a déposé une plainte devant la Cour Européenne concernant les lois Royer et Raffarin107. Par un avis motivé du 12 décembre 2006, la Commission Européenne a demandé à la France de faire le nécessaire pour se mettre en conformité avec le droit communautaire.

104 Préfecture du Vaucluse (2004), Schéma de Développement Commercial du Vaucluse, AID-Observatoire, p.26

105 Assemblée Nationale (2010), Rapport d'information de la commission des affaires économiques sur la mise en application de la Loi de Modernisation de l'Economie, 63p.

106 eur-lex.europa.eu, Traité instituant la Communauté Européenne

107 www.lyon.cci.fr, Fiche pratique concernant la directive n° L 376/36 publiée au Journal Officiel de l'UE le 27.12.2006, à propos de la liberté d'entreprendre, 3p.

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3.3.2 La loi de modernisation de l'économie et l'intégration du commerce dans l'urbanisme de droit commun

Afin de prendre en compte les exigences de l'Union Européenne, le parlement a voté la Loi de Modernisation de l'Economie, le 4 août 2008. Cette dernière n'a pas supprimé les CDEC, mais les a modifiées en les renommant Commissions Départementales d'Aménagement Commercial (CDAC). L'objectif est de progressivement supprimer le système des autorisations préalables et d'intégrer l'urbanisme commercial dans l'urbanisme de droit commun. Les CDAC ne s'appliquent plus à partir de 300 mètres carrés de surface de vente mais à partir de 1 000 mètres carrés. Les hôtels et les commerces liés à l'automobile ne sont plus soumis à autorisation.

La composition des commissions a également été modifiée. La Commission Européenne reprochait à la France de faire intervenir des professionnels du commerce pour favoriser le protectionnisme. Les Chambres de Commerce étaient principalement visées. En effet, leurs dirigeants sont élus par les commerçants et le fait d'accorder un vote à cette chambre consulaire pouvait être un moyen de limiter la concurrence. Les Chambres de Commerce et les Chambres des Métiers ont donc été retirées de la composition des CDAC. En contrepartie, les élus locaux ont pris de l'importance car ils occupent désormais cinq sièges sur huit. En effet, le président du Conseil Général et le président du SCoT sont devenus membres des CDAC. Ces deux élus locaux travaillent à des échelles proches de la zone de chalandise des commerces de la grande distribution. Leur incorporation semble donc pertinente.

En dehors des cinq élus locaux, on retrouve « trois personnes qualifiées en matière de consommation, de développement durable et d'aménagement du territoire ». Ces professionnels seront chargés d'apporter des connaissances techniques pour juger des nouveaux critères d'évaluation. Ces derniers ne portent plus sur des indices économiques tels que l'offre et la demande ou la concurrence entre les différentes formes de commerces, mais bien sur des thèmes d'urbanisme. Les éléments pris en compte se réfèrent en effet à l'animation sur la vie urbaine, les effets sur les flux de transports, l'insertion dans le réseau de transports collectifs et la qualité environnementale. Même si d'autres thèmes comme l'impact sur l'étalement urbain ou la mixité fonctionnelle ne sont pas pris en compte, on assiste à une transformation des autorisations préalables qui ne font plus une étude de marché mais qui posent de réelles questions d'urbanisme.

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Pour autant, ces autorisations restent souples et un rapport de l'Assemblée Nationale les décrit comme des « machines à dire oui ... rapidement »108 pour évoquer que les décisions sont encore plus rapides qu'avec les CDEC. Pour freiner le développement anarchique du commerce, il faut donc un document d'urbanisme qui fixe des règles applicables sur les permis de construire. Pour cela, la Loi de Modernisation de l'Economie a créé les Documents d'Aménagement Commercial (DAC). Ce nouvel outil de planification intercommunal a pour objectif de fixer les orientations sur le commerce qui s'imposeront aux Plans Locaux d'Urbanisme (PLU). A terme, le but est de supprimer le système de double autorisation entre les CDAC et les permis de construire pour ne laisser que les permis de construire.

Le DAC tire les leçons de l'échec des Schémas de Développement Commercial (SDeC). Ces derniers étaient des documents plus souples, qui ne s'imposaient pas aux documents d'urbanisme et qui s'appuyaient sur des critères économiques. Les règles décrites par les SDeC devaient guider les CDEC mais elles n'ont jamais été appliquées. Un SDeC avait été réalisé sur le département du Vaucluse en 2004. Il prévoyait de limiter la croissance de la grande distribution à 102 000 mètres carrés supplémentaires sur la période 2004-2010. Ce chiffre colossal permettait à la grande distribution d'accroitre son plancher commercial de 12% et d'augmenter ses parts de marché. Pourtant, la CCI du Vaucluse a constaté que ce plafond allait être atteint en trois ans, au lieu de six comme le prévoyait le SDeC109. Pour ne pas reproduire les mêmes erreurs, le DAC sera quand à lui opposable aux PLU car il sera intégré au SCoT. Une de ses principales fonctions sera de définir les zones d'aménagement commercial, secteurs dans lesquels pourront s'implanter les commerces de plus de 1 000 mètres carrés. Ces zones pourront être délimitées à la parcelle. La loi interdit de reposer les prescriptions du DAC sur l'analyse de l'offre commerciale existante. Les critères doivent être liés à l'aménagement du territoire, tout comme les critères des CDAC.

Seulement quatre DAC ont été mis en place à ce jour, dans les agglomérations de Besançon, Brest, Saint Etienne et Toulouse. Dans chaque cas, le DAC a été établi sur des territoires où un SCoT était en cours d'élaboration. Le but des élus locaux était de réaliser, en quelques mois, un document encadrant le commerce110. En effet, le temps d'élaboration du SCoT était jugé trop long pour pouvoir empêcher le développement anarchique du commerce.

108 Assemblée Nationale (2010), Rapport d'information de la commission des affaires économiques sur la mise en application de la Loi de Modernisation de l'Economie, 63p.

109 Chambre de Commerce et d'Industrie du Vaucluse (mai 2006), L'équilibre commercial en danger, in Dynamique n°43 p.18-20

110 RAUDIN E. (2010), Les documents d'aménagement commercial (DAC) issus de la Loi de modernisation de l'économie, in Les notes de l'agence de développement et d'urbanisme de Lille, 4p.

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Une fois le DAC approuvé, il doit faire l'objet d'une enquête publique afin d'être intégré au SCoT.

Ces quatre expériences ont déjà montré les lacunes du DAC. En effet, la loi LME est très imprécise sur les critères d'aménagement du territoire qui pourront être pris en compte. Ainsi, les DAC existants y ont très peu recours et les critères d'analyse restent économiques. Le DAC de Brest va ainsi choisir les secteurs d'activités qui pourront s'implanter dans ses différents pôles commerciaux. Pour chacun de ses secteurs, il va définir une surface de vente maximale par point de vente et par pôle commercial. Il va également interdire toute nouvelle galerie marchande, pour éviter de concurrencer les boutiques de centre-ville, en imposant une surface de vente minimale. Ce type de prescriptions réglementant à l'extrême les implantations et laissant très peu de liberté au marché semble aller trop loin par rapport à ce qu'autorise la loi.

Le DAC de Toulouse a lui aussi proposé des seuils plafonds de Surface Hors OEuvre Nette (SHON) sur chacun de ces pôles commerciaux. Ces plafonds sont bonifiés si l'ensemble commercial est desservi par un Transport en Commun en Site Propre (TCSP). Les principes d'aménagement du territoire sont donc ici plus avancés. Mais pour autant, les commissaires enquêteurs ont jugé que les plafonds n'étaient pas prévus par la loi et que le DAC manquait de cohérence avec le SCoT111. Au terme de l'enquête publique, le DAC n'a donc pas pu être intégré au SCoT.

Le DAC Sud Loire qui englobe l'agglomération de Saint Etienne a utilisé une autre méthode. Il a délimité les Zones d'Aménagement Commercial à la parcelle. L'objectif était d'empêcher tout nouveau pôle commercial et de limiter l'étalement urbain des zones commerciales existantes. Toutefois, ce document est actuellement attaqué par la Société Immochan. Cette société remet en cause la cartographie non actualisée et la cohérence entre le SCoT et le DAC. Rappelons que les groupes comme Immochan possèdent des services juridiques très compétents et qu'ils sont en mesure d'attaquer le projet dès lors qu'il va à l'encontre de leurs intérêts. Le risque de voir le DAC tomber est important vu que la loi est très imprécise sur son contenu.

La proposition de loi Ollier, relative à l'Urbanisme commercial a pour but de clarifier le contenu du DAC. Elle a été adoptée par l'Assemblée nationale le 15 juin 2010. Elle a ensuite été modifiée par le Sénat le 31 mars 2011. La deuxième lecture du texte par

111 Entretien avec Yann CABROL (2011), Chargé de mission à l'agence d'urbanisme de Toulouse ayant réalisé le DAC de la grande agglomération de toulousaine

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l'Assemblée Nationale n'est pas prévue pour le moment et l'adoption du texte ne semble plus être une priorité parlementaire.

Toutefois, avant même que cette loi soit votée, elle suscite déjà des critiques112. Le pouvoir de décision des maires va être renforcé car, à terme, seul le permis de construire règlementera les implantations. Et nous avons vu que ces élus locaux pouvaient avoir un intérêt à laisser une certaine liberté aux enseignes. Dans ces conditions, on peut se demander si le marché n'est pas toujours plus fort que la réglementation, car malgré les multiples réformes législatives, le développement du commerce de périphérie reste toujours aussi important.

Conclusion de la troisième partie :

Le rôle des pouvoirs publics dans le développement
de cette zone commerciale de périphérie

Pour freiner le développement commercial de périphérie, la règlementation a longtemps essayé de contraindre le marché. Elle a tenté de fournir aux élus locaux les moyens d'interdire les implantations, même s'il y avait un potentiel commercial. Toutefois, avec le recul, on s'aperçoit que le marché a été plus fort que la règlementation. En effet, le commerce de périphérie n'a eu de cesse de se développer, malgré les différentes évolutions législatives.

Cette difficulté à contraindre les enseignes est liée au fait que, les élus locaux trouvent un certain intérêt au développement commercial de périphérie. Les ressources fiscales et les emplois créés ont convaincu un certain nombre de maires qui ont alors laissé libre cours aux implantations. Dans un même temps, les acteurs du développement routier ont construit des axes rapides qui ont permis d'augmenter la zone de chalandise des pôles de périphérie et d'améliorer leur accessibilité. Ce sont ces infrastructures qui ont créé, puis amplifié, le potentiel commercial en périphérie.

Il est alors important de mettre en cohérence les politiques de transports avec le projet de développement commercial. Seul un projet global peut permettre d'harmoniser ces deux composantes du territoire.

112 HACHACHE N. (octobre/novembre 2010), Développement Commercial, à l'aube de l'insertion urbaine, in Traits Urbains n°42, p.18-29

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4 La zone commerciale Avignon Nord peut-elle s'inscrire dans un projet de ville durable ?

Cette partie s'interroge sur l'avenir de la zone commerciale. D'après différents exemples, nous allons voir comment les zones commerciales peuvent intégrer le développement durable. Cette évolution peut passer par la mutation du site ou par des restrictions au développement commercial sur la zone.

4.1 Construire un projet urbain pour freiner le développement commercial de périphérie

Le développement des zones commerciales ne ralentit pas et les centres-villes sont de plus en plus fragiles. Pour remédier à cette situation, deux solutions complémentaires doivent être envisagées :

- Revitaliser les centres-villes en recréant des espaces publics de qualité, en améliorant l'accessibilité et en favorisant l'implantation de locomotives commerciales.

- Freiner le développement commercial de périphérie, notamment en construisant un projet urbain sur ses périphéries délaissées.

Ce mémoire n'a pas vocation à traiter de la redynamisation des centres-villes. Nous allons donc étudier la seconde solution.

L'exemple de la commune du Pontet (cf. 3.1.3.), nous a montré qu'un document d'urbanisme souple pouvait permettre un développement incontrôlé des zones commerciales. Nous allons voir comment les documents de planification, et en particulier les SCoT, peuvent limiter le développement commercial en périphérie.

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4.1.1 Intégrer le commerce dans le projet urbain

Nous avons vu que le commerce était principalement règlementé par le Code du Commerce. On assiste aujourd'hui à un renversement de la tendance et le commerce commence à prendre sa place dans l'urbanisme et dans ses projets urbains. La première réforme législative à avoir impulsé ce mouvement est la loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU). Grâce à la mise en place des Schémas de Cohérence Territoriaux, le projet commercial n'est plus considéré comme une annexe mais bien comme une composante à part entière. En effet, le commerce est source de déplacements qu'il faut planifier dans une ville durable. Il peut également être considéré comme un équipement qui doit être accessible à tous. Toutefois, on remarque que les SCoT traitent moins du commerce que de l'habitat et des transports par exemple. Seuls les territoires déjà dotés de Schémas de développement et d'urbanisme commercial, comme Lyon, ou de Chartes de développement commercial, comme Rennes, ont développé ce thème. Mais en réalité, ces territoires se servent des conclusions de ces documents sectoriels et les insèrent dans le projet de SCoT. L'approche systémique est rarement utilisée, hormis dans le SCoT de Lens-Liévin qui articule le développement commercial autour du projet de TCSP113.

Pourtant ce type d'approche devrait être plus couramment utilisé pour asseoir la solidité du projet. D'après la loi SRU, le SCoT ne peut définir que les localisations « préférentielles » des commerces. A ce titre, il ne peut pas interdire d'implantation. La jurisprudence nous le montre avec le SCoT de l'agglomération Chartraine, qui a été annulé pour son volet commercial114. Ce document avait interdit l'implantation commerciale à l'extérieur de la rocade mais le tribunal a jugé cette mesure illégale.

La proposition de loi Ollier a pourtant pour objectif de faire du SCoT le principal outil de la planification commerciale. Elle prend en effet appui sur les dispositions de la loi Engagement National pour l'Environnement qui impose que toutes les communes devront être couvertes par un SCoT doté d'un volet commercial en 2017. Dans ces conditions, pour préserver les terres agricoles et naturelles de l'étalement des zones commerciales, il faut élaborer un projet urbain sur ces espaces. Il est en effet beaucoup plus difficile pour un

113 CERTU et FNAU (2011), L'aménagement commercial dans les SCOT, retour d'expériences et pistes de réflexion, Certu, 96p.

114 www.fedescot.org, Contribution du Club des SCoT aux réflexions actuelles sur la modernisation de l'urbanisme commercial, relatant la décision du 19 juin 2009 du tribunal administratif d'Orléans d'annuler le SCoT de l'agglomération chartraine.

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promoteur, d'attaquer un SCoT qui valorise des espaces naturels ou agricoles, plutôt qu'un document qui prône simplement une interdiction de construire.

Valoriser les espaces agricoles et naturels autour des zones commerciales va permettre de les contenir dans une enveloppe foncière. Si les possibilités d'extension sont limitées, le foncier va prendre de la valeur et la zone aura alors tendance à se densifier.

4.1.2 Réfléchir à la bonne échelle ...

Le SCoT est un outil qui peut permettre d'encadrer le commerce de périphérie mais encore faut-il qu'il soit conçu à la bonne échelle.

Le centre commercial Auchan - Avignon Nord appartient à la catégorie des centres régionaux dans le barème du Conseil National des Centres Commerciaux 115. La zone commerciale exerce, elle aussi, une influence régionale car sa zone de chalandise de 575 000 habitants 116 atteint les départements du Gard, de la Drôme et des Bouches-du-Rhône. L'ensemble des enjeux liés à ce pôle ne peuvent donc pas être considérés à l'échelle de la commune ou même de l'agglomération.

Le SCoT du Bassin de Vie d'Avignon souffre, comme beaucoup d'autres, de sa taille trop réduite. Il rassemble 26 communes pour un total d'environ 250 000 habitants, soit moins de la moitié de la taille de la zone de chalandise. Ce bassin de vie est donc très restreint par rapport au bassin d'emploi et au bassin de consommation. A cette échelle, les communes qui souffrent de l'évasion commerciale vers Avignon Nord et du déclin du commerce traditionnel ne sont pas associées. Ce sont pourtant des territoires touchés par la perte d'emplois dans le commerce de centre-ville.

Comme nous l'avons vu précédemment, à l'échelle du SCoT du Bassin de Vie d'Avignon, la zone commerciale est plutôt créatrice d'emplois et de ressources fiscales. Ainsi, le PADD décrit qu'il veut « élaborer une stratégie d'aménagement pour Avignon Nord qui permette de conforter son attractivité économique sur le long terme »117. Les territoires environnants désirent au contraire réduire l'évasion commerciale vers l'agglomération avignonnaise et notamment vers Avignon Nord. La commune d'Orange déclare ainsi vouloir

115 Les centres commerciaux régionaux justifient d'une surface de vente et de réserve comprise entre

40 000 et 79 999 mètres carrés et/ou totalisent au moins 80 magasins et services. D'après www.cncc.com

116 Op. cit., INterland, AID-Observatoire, Transitec, i (2011)

117 Syndicat Mixte du SCoT du Bassin de vie d'Avignon (2010), SCoT du Bassin de Vie d'Avignon, version arrêtée, PADD p.29

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« réduire l'évasion non alimentaire »118. L'agglomération de Carpentras a également réalisé une étude de potentiel commercial, via son Schéma de développement commercial119, et elle projette de développer son offre alimentaire ainsi que les commerces de bricolage et de jardinage. Le manque de concertation entre les différents élus locaux risque de créer une surproduction de surfaces commerciales qui pourrait conduire à la naissance de friches commerciales.

Le SCoT de Métropole Savoie a lui réussi à trouver la bonne échelle pour gérer la répartition du commerce120. Son territoire associe 103 communes pour 250 000 habitants. Il recouvre ainsi la zone de chalandise des deux pôles commerciaux d'agglomération situés sur les entrées nord et sud de la ville de Chambéry. En associant les communes concernées par l'évasion commerciale, le SCoT a pu élaborer un projet qui vise à redistribuer l'offre commerciale.

L'exemple allemand est également intéressant. La planification est basée sur le consensus des différentes collectivités et les Lander, qui ont la taille des régions françaises, occupent une place importante 121 . Ces collectivités définissent les plans régionaux d'aménagement du territoire qui sont chargés de préserver l'équilibre entre les zones d'habitation, les zones commerciales et industrielles, et les espaces naturels. Le système comporte des failles, mais il a quand même prouvé une certaine efficacité. En Allemagne, 33% du chiffre d'affaires est réalisé en périphérie contre 66% en France122.

Pour construire un projet urbain autour de la zone commerciale Avignon Nord, il faut donc, au minimum, une échelle de réflexion qui englobe le Vaucluse et une partie des départements limitrophes. Un périmètre intéressant pourra peut-être émerger de la réforme de l'intercommunalité, qui va modifier les contours du SCoT, mais plus vraisemblablement, il faudra attendre le travail d'Inter-SCoT pour avoir une réflexion globale sur le commerce.

118 Mairie d'Orange (2007), Etude stratégique sur le développement commercial de la ville d'Orange, Chambre de Commerce et d'Industrie du Vaucluse, p.6

119Communauté d'Agglomération Ventoux Comtat Venaissin (2010), Schéma Directeur de Développement Commercial, AID-Observatoire, p.21

120 CERTU et FNAU (2011), L'aménagement commercial dans les SCOT, retour d'expériences et pistes de réflexion, Certu, 96p.

121 CERTU (2000), Les réglementations et les pratiques de l'urbanisme commercial en Allemagne, Belgique, Grande-Bretagne, Italie et Suisse, p.20-21

122 SCHMIT P. coordonateur (juin 2009), Dossier Urbanisme commercial, in Intercommunalités n°135, p.4

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4.1.3 Développer de la mixité fonctionnelle au sein de la zone commerciale

Nous avons évoqué que le développement incontrôlé du commerce de périphérie pourrait entraîner la naissance de friches commerciales. Dans ce cas, il faut prévoir une éventuelle opération de rénovation urbaine pour Avignon Nord. L'introduction d'une mixité fonctionnelle au sein de cette zone commerciale semble opportune car il y a un potentiel pour développer de l'habitat. Le SCoT du Bassin de Vie d'Avignon estime que la zone commerciale est située dans le Coeur urbain de l'agglomération car l'urbanisation a rattrapé le site. Le Grand Avignon travaille également sur un projet de tramway qui pourrait, à terme, desservir Avignon Nord. La construction de logements sur cet espace est plus pertinente que sur les communes périurbaines car elle permettrait de rapprocher les habitants de leurs lieux de consommation et d'emploi, et de valoriser l'utilisation des transports collectifs.

La création de logements peut permettre d'intégrer la zone commerciale au reste du tissu urbain. Elle mettrait en valeur les espaces naturels présents comme le Domaine de Roberty ou le Monastère de la Visitation (cf. partie 1.4.1) et justifierait le développement des modes doux au sein du site. Les canaux pourraient alors servir de « trame bleue ». Les logements permettent également la rénovation urbaine des friches commerciales qui pourraient apparaître. D'un point de vue financier, les promoteurs sont prêts à vendre leurs terrains non bâtis pour développer l'habitat car le prix d'un terrain destiné au logement est plus élevé que celui d'une parcelle à vocation commerciale.

Des projets de parcs commerciaux importants ont intégré la mixité fonctionnelle. Le Carré Sénart sera par exemple le coeur de la ville nouvelle de Sénart, située dans le sud de l'Ile de France. Mais, même sur des projets contemporains, la mixité reste horizontale et non verticale. En effet, nous avons vu qu'une zone commerciale régionale pouvait recevoir plusieurs dizaines de milliers de visiteurs par jour. Même si les transports en commun sont développés, une part importante de ces clients vient en voiture. Ces flux automobiles sont difficilement conciliables avec un habitat de qualité. Les exemples de mixité fonctionnelle verticale sont donc plutôt réservés à des centres commerciaux de centre-ville.

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4.2 La mobilité durable et son impact sur la compétitivité du pôle

Comme nous l'avons vu en partie 2.1, le commerce et la mobilité entretiennent des liens très forts. Le commerce se base sur une logique de flux et la compétitivité d'un site dépend de son accessibilité. Une politique de transport qui améliore l'accessibilité d'un site aura tendance à le vitaliser alors qu'une politique contraignant la mobilité pourra l'affaiblir. Les projets concernant les infrastructures de transports doivent donc être différents selon si l'on envisage de restreindre ou de développer Avignon Nord.

4.2.1 La mise en place de transports collectifs performants de type tramway

La communauté d'Agglomération du Grand Avignon travaille actuellement sur la mise en place d'un tramway qui desservirait la commune du Pontet. Il est envisagé que, dans la deuxième phase du projet, le TCSP desserve la zone commerciale. La configuration actuelle du site permettrait que la ligne de tramway se situe à moins de 600 mètres de l'ensemble des commerces. Il existe un certain potentiel de report modal car, selon Immochan, 40% des clients du centre commercial Auchan ne fréquentent que la galerie marchande123. Cela signifie qu'ils achètent des objets de petite taille, transportables dans les transports en commun.

Il est cependant intéressant de se demander si le tramway doit rattraper la zone commerciale ou si c'est au commerce de s'implanter à proximité du tramway. Le DAC de la métropole de Nantes-Saint Nazaire, qui est en cours d'élaboration, veut préconiser la seconde solution. Il subordonnerait les implantations commerciales à la desserte par un TCSP124. Mais ce genre de politique nécessite que certains pôles commerciaux soient déjà desservis. Dans le cas avignonnais, seul le pôle d'Avignon Nord serait éventuellement connecté au réseau de TCSP.

L'impact d'un tramway sur cette zone commerciale n'est pas évident à prévoir. En effet, Avignon Nord a été conçue pour l'automobile et, hormis le centre commercial, elle ne possède pas une densité autour de quelques points, qui pourraient devenir des futurs arrêts de tramway. Le TCSP risque donc d'avoir du mal à proposer un service satisfaisant pour les usagers.

123 Op. cit., INterland, AID-Observatoire, Transitec, i (2011)

124 Entretien avec Laurent SEGURA (2011), chef de projet Urbanisme Commercial à l'agence d'urbanisme de la région nantaise

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La situation est différente dans les parcs commerciaux. Ce nouveau concept propose les mêmes enseignes que les zones commerciales mais sous la forme de cellules mitoyennes. Le site est donc plus compact et il est plus facile de le desservir par les transports en commun. A Montpellier, Odysseum est un parc commercial sur deux niveaux qui illustre bien cette notion de densité. Il a été conçu en intégrant l'arrivée du tramway, qui dessert le coeur du site (cf. figure 32).

Figure 32 : Odysseum, un site compact permettant la desserte par le tramway. (Source : www.centre-commercial-odysseum.com)

Si le tramway vient desservir la zone commerciale Avignon Nord, l'impact sera différent selon le type de commerces. Les effets sur l'hypermarché seront probablement mineurs125 mais les commerces d'équipement de la personne, les cafés et les restaurants pourront être dynamisés. En effet, le tramway crée des flux piétons qui bénéficient plus aux achats liés aux loisirs et au plaisir, qu'aux achats de première nécessité. Les associations de commerçants craignent que les boutiques du centre-ville souffrent de cette montée en puissance des achats-plaisir en périphérie. Les commerçants avignonnais sont farouchement opposés à l'arrivée du tramway sur le site d'Avignon Nord.

125 Les hypermarchés situés en bout de ligne d'un TCSP ne semblent pas bénéficier d'une clientèle supplémentaire d'après DESSE R-P. (2001), Le nouveau commerce urbain p.48

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Le commerce de périphérie se tourne progressivement vers les achats-plaisir mais il ne renonce pas pour autant à ses parts de marchés dans les achats pratiques et rapides, notamment dans le secteur alimentaire. De ce fait, les distributeurs accueillent volontiers un projet de tramway mais sans renoncer pour autant à l'accessibilité par l'automobile. L'encombrement des produits vendus rend d'ailleurs impossible l'abandon de l'automobile. De plus, ce mode de transports amène des clients qui consomment en masse et qu'il est important de préserver. Dans un contexte où le client « zappe » entre les différentes enseignes, il est important qu'il achète le plus possible lors de se venue dans la zone commerciale.

Si le tramway n'est pas attendu avec une certaine indifférence, c'est également parce qu'il ne peut pas couvrir une zone de chalandise aussi importante que l'automobile. En effet, le tramway ne peut amener que des clients qui se situent dans le corridor de son tracé. Qui plus est, on remarque que même dans les agglomérations où le réseau de tramway est développé, la part modale des transports en commun pour le motif achat est faible. Elle est de 11% à Lyon et à Grenoble et de 6% à Strasbourg126.

Si ces parts modales venaient à augmenter du fait de la volonté politique en faveur des transports en commun, le commerce pourrait en être modifié. En effet, nous avons vu que, jadis, la grande distribution s'était implantée sur les carrefours routiers car ce sont eux qui concentraient les flux. Mais, si demain les flux majeurs provenaient des transports en commun, il est possible que le commerce se repositionne de lui-même sur les carrefours des lignes les plus importantes, en adoptant de nouvelles formes de vente. A Paris, où la part modale des transports en commun est importante, les distributeurs ne négligent pas leur desserte. Le centre commercial Italie 2, qui se décrit comme le deuxième espace shopping de la capitale127, est implanté au croisement de deux lignes de métros.

En attendant cet éventuel repositionnement du commerce, une solution de transition peut être développée. L'exemple du centre commercial Odysseum montre qu'un site peut, à la fois, être desservi par un tramway et disposer d'un accès rapide depuis les grands axes routiers. Cette accessibilité performante par les deux modes de transports garantie la compétitivité du site.

126 CETE de l'Ouest (2004), Ville accessible à tous et Activités commerciales, actes de la journée d'échanges du 21 mai 2003, p.45

127 www.hammerson.fr, société foncière possédant le centre commercial Italie 2.

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4.2.2 La difficulté de créer des cheminements doux

Pour que la desserte en tramway soit efficace, il faut que les modes doux soient agréables et sécurisés.

Nous avons vu que la zone commerciale est divisée en trois parties. Le site historique comprenant le centre commercial Auchan est séparé du pôle Ikéa et du pôle de la Tour

Blanche par la route de Carpentras. Cette dernière est un axe à deux fois deux voies limité à

110 km/h au niveau de la zone commerciale (cf. photo A, figure 33). Son franchissement par des modes doux n'a pas été prévu dans la construction des ponts routiers, même les plus

Figure 33 : Des infrastructures routières lourdes qui compliquent le développement des modes doux (Conception Girard, 2011)

récents (cf. photo B, figure 33). Il faudrait alors soit élargir les ouvrages d'art existants soit en créer de nouveaux. La création d'un tel ouvrage coûterait au minimum 800 000 euros. C'est en effet le prix qu'a couté la passerelle qui relie le Zénith de Nantes au parking du centre commercial Atlantis 128 . L'ouvrage d'art est extrêmement basique car il comporte des escaliers et il n'est donc pas accessible aux personnes à mobilité réduite.

Dans le cas d'Avignon Nord, le tissu urbain dense est relativement éloigné du pôle commercial (cf. figure 33). Les quelques quartiers situés autour sont constitués de lotissements pavillonnaires qui ont du mal à justifier l'investissement dans un ouvrage d'art. Les centres-villes du Pontet et de Sorgues sont, quant-à-eux, à plus de deux kilomètres de l'enseigne Auchan. La commune de Vedène, qui à est moins deux kilomètres, est séparée par la route de Carpentras et par l'Autoroute.

128 www.20minutes.fr/nantes/152387-Nantes-Une-passerelle-pietonne-pour-le-Zenith.php

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Les investissements qu'il faudrait réaliser sont lourds et les distances à parcourir sont importantes. Il semble indispensable de réaliser au moins un ouvrage de franchissement pour éviter que les lycéens de Vedène ne franchissent l'Autoroute par le pont routier de la route de Carpentras. Mais sur le principe, il est difficile de dire si la collectivité doit investir dans des cheminements doux pour qu'une zone commerciale devienne un espace de promenade et de loisirs ...

Si des cheminements doux sont réalisés depuis les communes environnantes, ils vont se heurter à l'absence de modes doux à l'intérieur du site. En effet, l'espace est dominé par la voiture et les flux automobiles y sont très importants. Il sera donc difficile de développer des cheminements agréables et sécurisés.

Il faut également rappeler que la partie située au Nord de la route de Carpentras s'étend sur 1 800 mètres de long. Le développement sous forme de lotissement commercial a créé une densité très faible et la difficulté pour implanter les modes doux est la même que la desserte par un TCSP : le site manque de compacité.

Les promoteurs peuvent toutefois être amenés à réaliser des cheminements doux entre les différentes enseignes. Immochan souhaite par exemple créer un mail piéton pour développer des activités de restauration.

89

4.2.3 Peut-on diminuer les espaces de stationnement ?

L'immense quantité de stationnement présent sur le site provoque de graves problèmes urbains. On peut notamment citer l'augmentation du trafic automobile, l'imperméabilisation des sols et l'étalement urbain. Il est extrêmement difficile pour les pouvoirs publics de contrôler ces espaces de stationnement car ils sont entièrement réalisés sur des financements privés et sur des terrains privés.

Comme nous l'avons vu dans la partie 2.1, le commerce de périphérie a besoin d'une excellente accessibilité. C'est entre autre grâce à cela qu'il capte des parts de marché au commerce traditionnel. A l'heure où 99,5% des clients d'Avignon Nord accèdent au site en voiture129, il semble impossible que les enseignes réduisent le nombre de leurs places de stationnement. Les enseignes calculent leur besoin en parkings en fonction de la fréquentation du samedi, jour où les clients sont le plus nombreux. Diminuer le nombre de places reviendrait à brider leur capacité d'accueil et donc leur chiffre d'affaires.

La collectivité pourrait fixer des ratios plafonnant la quantité de parkings en fonction de la surface de vente, notamment à travers le DAC. Toutefois, cela pourrait entrainer un développement du stationnement anarchique et des parkings sauvages pourraient se constituer. Il semble préférable de favoriser d'autres formes de parkings plutôt que d'en limiter le nombre. Les parkings silos permettent par exemple de limiter l'étalement urbain et l'imperméabilisation des sols. Nous avons déjà évoqué que leur coût est prohibitif pour les promoteurs, mais on remarque qu'ils commencent à se développer sur les zones commerciales. En effet, pour agrandir leur surface de vente tout en conservant le même ratio de places de stationnement, les acteurs privés peuvent décider eux-mêmes de construire des parkings silos. Dans le projet d'extension de la galerie marchande d'Auchan, Immochan compte ainsi réaliser un parking en superstructure.

Pour limiter l'imperméabilisation des sols, il existe des revêtements perméables remplaçant l'asphalte. Toutefois, leur création et surtout leur entretien sont beaucoup plus onéreux. Ces revêtements sont plus utilisés par les collectivités, même s'il existe quelques exemples dans le commerce, comme l'enseigne Gigastore à Coignières (78)130.

Pour limiter le nombre de places de stationnement, il est possible de favoriser le taux de rotation et le report modal sur les transports en commun en faisant payer le parking. Cette pratique est très rare pour les zones commerciales de périphérie car la gratuité du parking est

129 Op. cit., INterland, AID-Observatoire, Transitec, i (2011)

130 Ce magasin est le seul à être cité dans les réalisations de l'entreprise Ecovégétal, www.ecovegetal.fr

90

un des éléments qui augmente leur attractivité. Le parc commercial Odysseum a adopté ce système de fonctionnement où le stationnement est géré par une société. Le ratio de stationnement par rapport à la surface de vente a ainsi pu être minimisé sur le site. Mais ce système est décrié par les commerçants qui doivent verser une somme au gérant pour que les deux premières heures de stationnement soient gratuites pour leurs clients. Il semble donc peu probable de mettre en place un stationnement payant sur Avignon Nord.

Ces différentes pistes nous montrent qu'il est difficile de réduire les problèmes liés au stationnement sur le site. Toutefois, le taux de remplissage des parkings n'approche les 100% que le samedi et il est possible de mutualiser ces espaces sur les autres jours de la semaine. Dans le cas où ils sont desservis par un TCSP, de nombreux centres commerciaux accueillent ainsi des parcs relais. On peut citer par exemple le parc relais d'Orvault-Morlières, dans l'agglomération de Nantes, qui est mutualisé avec celui de l'enseigne Castorama, ou encore le parking Odysseum. A Montpellier, on constate que les deux principaux parcs relais, Occitanie et Euromédecine, ont un taux de remplissage de plus de 80% la semaine et de moins de 40% le samedi131. Le fait de mutualiser le parking du parc commercial Odysseum permet d'avoir un taux de remplissage important tout au long de la semaine. Tout comme les commerces, les parcs relais ont besoin d'être visibles et accessibles. Les implanter auprès de la zone commerciale est donc judicieux.

Les pistes présentées ici pour résoudre les problèmes liés à la quantité de stationnement sur le site semblent très limitées. En effet, l'offre en stationnement dépend de des flux de clientèle et pour la réduire, il faudrait que la fréquentation commerciale diminue.

131 PRADY. G (2004), Tramway de Montpellier : le succès des parcs relais, in Cahiers transport aménagement en Languedoc-Roussillon. Source bibliographique n°10, p.5-9.

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4.2.4 Contraindre l'usage de la voiture pour modifier l'influence d'Avignon Nord

Nous avons vu que la zone commerciale s'était adaptée au développement de l'automobile et que pour cette raison, elle s'était localisée sur un carrefour routier. Les pouvoirs publics lui ont permis d'étendre sa zone de chalandise en développant des axes routiers rapides et en aménageant des échangeurs et des giratoires avec pour objectif de limiter la congestion.

Mais aujourd'hui, dans un objectif de développement durable, il semble nécessaire de décentraliser le commerce. Pour cela, le projet urbain peut consister à supprimer l'hégémonie d'Avignon Nord et à favoriser les lieux de consommation proches des lieux d'habitation. Dans ce cas, il faut appliquer la logique inverse. Il faut ralentir les axes routiers pour resserrer les courbes isochrones et ainsi restreindre la zone de chalandise. Il faut accepter la congestion et ne plus multiplier les échangeurs et les giratoires qui améliorent l'accessibilité à la zone commerciale.

Cette thèse qui peut sembler invraisemblable coïncide pourtant avec les réflexions grenobloises sur le Chronoaménagement. Ces études menées par l'Agence d'Urbanisme de la Région Grenobloise montrent que nous évaluons nos déplacements en temps plutôt qu'en distance132. Pour rapprocher les lieux d'habitation des lieux d'emplois, et ainsi limiter l'étalement urbain, les conclusions de ces travaux préconisent d'abaisser la vitesse des voies rapides à 70 km/h. Les études de marchés de la grande distribution, qui résonnent à partir de courbes isochrones, montre que ces réflexions s'appliquent aussi au commerce. En réduisant la vitesse sur la route de Carpentras par exemple, on limiterait l'influence d'Avignon Nord sur Carpentras et son arrière pays.

Dans le cadre d'un projet global pour un territoire durable, un dispositif de Chronoaménagement pourrait à la fois améliorer la répartition du commerce, limiter la périurbanisation et de ce fait réduire les flux automobiles. Une telle décision nécessite un travail partenarial important, notamment avec les services du Conseil Général en charge du réseau routier. Elle demande également beaucoup de pédagogie envers la population.

132 Agence d'Urbanisme de la Région Grenobloise (2009), Chronoaménagement et autoroute autrement, la proximité au secours du territoire, Certu, 200p.

92

4.3 Avignon Nord peut-elle muter sur des initiatives privées ?

Aujourd'hui, la grande distribution a maillé l'ensemble du territoire français et les possibilités de nouvelles implantations sont limitées. Les grandes infrastructures routières ont favorisé la superposition des zones de chalandises et le consommateur est de plus en plus volatile. Le client est aussi devenu méfiant vis-à-vis du marketing et de la communication. Les magasins doivent aujourd'hui trouver comment le rassurer et lui redonner l'envie d'acheter133.

4.3.1 Des efforts dans la conception des pôles commerciaux

Le Conseil National des Centres Commerciaux (CNCC) est un organisme qui regroupe les différents acteurs privés du développement commercial : promoteurs, propriétaires, gestionnaires, enseignes, ... Il recense les professionnels des pôles commerciaux de centre-ville et de périphérie. Depuis 2006, il a créé le label Valorpark qui « a pour objectif de revaloriser l'image de l'immobilier de périphérie et des entrées de ville, notamment auprès des enseignes, des consommateurs et des pouvoirs publics»134. Onze sites ont ainsi été labellisés.

La tendance est de créer des parcs commerciaux inspirés des « Retail Parks » anglo-saxon. Le label Valorpark va ainsi favoriser les cellules mitoyennes reliées entre-elles par des circulations douces, comme le montre l'exemple du pôle AriaParc du Vivier 2 à Allonnes (72) (cf. figure 34). Ce nouveau concept permet notamment d'éviter un recours à l'automobile pour les déplacements internes. Les cheminements doux sont agréables et sécurisés et ils permettent l'accès aux personnes à mobilité réduite. Pour améliorer la convivialité, les promoteurs font également des efforts sur l'architecture. Ils développent des ensembles de bâtiments plus homogènes, conçus avec des matériaux de qualité. Le mobilier urbain est plus soigné qu'auparavant et l'accent est mis sur l'éclairage des cheminements et des parkings. La signalétique des différentes enseignes fait preuve d'uniformité, ce qui permet à la fois leur lisibilité et leur discrétion. D'après une étude de la

133 MOATI P. et POUQUET L. (1998), Stratégies de localisation de la grande distribution et impact sur la mobilité des consommateurs, CREDOC, p.66

134 www.valorpark.com

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CCI de Bordeaux, les clients sont sensibles à l'ambiance chaleureuse des centres commerciaux et à leur architecture135.

Figure 34 : Des sites privilégiant la convivialité

(Source : www.valorpark.com)

Le CNCC travaille également avec le Comité National des Entrées de Ville créé en 1995, par le Sénateur Ambroise Dupont. Dans cette optique, il anime des réunions associant des élus, des acteurs privés et des urbanistes autour du thème « Entrée de ville et Ambitions Urbaines ». Les nouveaux parcs commerciaux essayent donc de s'intégrer au paysage. Les espaces de stationnement sont arborés et au moins 10% du parc commercial est consacré aux espaces verts.

Pour compléter leur apparence écologique, certains sites se sont dotés de panneaux photovoltaïques et de systèmes de récupération des eaux de pluie. Le complexe commercial Atoll, dans l'agglomération d'Angers, sera ainsi labellisé Haute Qualité Environnementale et Bâtiment Basse Consommation136.

135 Chambre de Commerce et d'Industrie de la Gironde (2010), Les pratiques de consommation et la perception des pôles commerciaux, p.19

136 www.certivea.fr, organisme de certification

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Les efforts réalisés par les acteurs du commerce de périphérie méritent d'être salués. Sur une initiative privée, les promoteurs se sont orientés vers des zones commerciales où le cadre de vie est meilleur. Le fait de développer le parc commercial sous forme de cellules mitoyennes limite notamment le trafic automobile interne et favorise les modes doux.

4.3.2 Des zones commerciales qui restent fidèles aux principes de développement du commerce de périphérie

Les efforts consentis par les promoteurs sont notables, mais ils ne constituent pas une réponse complète aux problèmes générés par les zones commerciales. Tout d'abord sur les onze sites labellisés, dix ont été créés ex-nihilo. Ces sites ont donc contribué à l'étalement urbain et ils ont été implantés selon les mêmes principes de localisation que les zones commerciales, à savoir à proximité des grands axes routiers. Seul le centre commercial de Noyelles-Godault a été labellisé suite à une restructuration. Mais c'est de loin le parc commercial le moins abouti car les cellules ne sont pas mitoyennes et les aménagements sont principalement paysagers. Le nombre de parcs commerciaux, non labellisés pour la plupart, a fortement augmenté ces dernières années (cf. figure 35), toujours dans une logique d'étalement urbain.

(Nombre de projets de parcs d'activités commerciales PAC par année) Figure 35 : Un développement rapide des parcs commerciaux

(Source : PAZOUMIAN M. (février 2005), La lettre PROCOS n°2, 4p.)

95

Selon les critères du label Valorpark, l'accessibilité et la visibilité sont particulièrement importantes. La desserte en transports en commun est prise en compte mais elle ne semble pas prépondérante car sur l'ensemble des sites, aucun n'est desservi en site propre. La logique reste donc routière et la quantité de places de stationnement est plus importante que jamais. On remarque d'ailleurs que sur de nombreux projets, le parking est situé comme un espace central (cf. figure 36).

Figure 36 : Le futur complexe commercial Atoll, construit autour d'un gigantesque parking

(Source : www.lemoniteur.fr)

Le parc commercial doit également justifier d'une zone de chalandise minimum de 50 000 personnes à moins de 20 minutes pour être labellisé. L'objectif reste d'attirer une clientèle toujours plus éloignée. Pour cela, les promoteurs misent sur la qualité du site qui permet des achats basés sur le plaisir. Les multiplexes sont même devenus les locomotives de certains parcs commerciaux. Toutefois, les hypermarchés restent des valeurs sûres qui apportent des flux plus récurrents et plus constants137. Pour ne pas perdre les clients entre les achats-plaisir et les achats rapides, les parcs commerciaux s'organisent en « univers » selon le type de commerce.

137 ROBISCHON C. (novembre 2009), Commerces : la bonne taille, in Traits urbains n°34, p.18

96

Le processus d' « auto-labellisation » initié par le CNCC n'a donc pas pour vocation de limiter les problèmes liés aux zones commerciales. Il ne résout ni la dépendance automobile, ni l'étalement urbain et les projets récents concurrencent toujours plus les centres-villes. Il s'apparente plus à un argument publicitaire utilisé pour rassurer les élus et les consommateurs. Lors de son implantation à Vedène, Ikéa a valorisé cet aspect « écologique » en évoquant qu'il envisageait de se doter de panneaux photovoltaïques138.

Le propriétaire d'un pôle commercial ne le rénove que si cela accroît la rentabilité de son investissement. Une opération de rénovation n'est lancée par un propriétaire que si son taux de vacance est important. Le centre commercial régional Rosny 2 avait, par exemple, du mal à attirer les distributeurs. L'enseigne Zara avait refusé de s'y installer à cause de la vétusté des bâtiments139. Le centre a donc été entièrement rénové pour permettre d'attirer à nouveau les enseignes et ainsi permettre une rentabilité pour l'investisseur.

Les propriétaires ont toutefois du mal à lancer des opérations de renouvellement car un ensemble commercial n'est jamais complètement vacant. Il y a toujours des enseignes qui ont un bail et un fond de commerce. Comme nous l'avons vu dans la partie 1.2.3, ces baux ne sont pas résiliables par le propriétaire avant un période minimale de 9 ans. L'enseigne peut le résilier mais si le bâtiment est détruit, elle perd son fond de commerce, qui peut valoir plusieurs dizaines voire plusieurs centaines de milliers d'euros140.

138 Ikéa (2009), Dossier de presse concernant l'ouverture d'Ikéa Vedène, p.12

139 MOATI P. et POUQUET L. (1998), Stratégies de localisation de la grande distribution et impact sur la mobilité des consommateurs, CREDOC, p.86

140 Le fond de commerce nait avec l'ouverture d'un magasin. Il est composé de biens corporels comme la marchandise ou l'équipement du point de vente, mais également de biens incorporels comme la clientèle et le droit au bail. Ce sont ces éléments qui ne sont pas déplaçables.

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4.3.3 Des fonctions qui s'apparentent de plus en plus à celles des centres-villes

Historiquement, les zones commerciales se distinguaient clairement des centres-villes. Elles représentaient le lieu des achats rapides et pratiques. Aujourd'hui, cette frontière est moins franche car les achats-plaisirs se développent en périphérie. Outre les boutiques d'équipement de la personne, on assiste à l'arrivée de la culture et des loisirs avec les implantations de restaurants et des multiplexes. Ce concept de « Fun Shopping » fonctionne depuis longtemps aux Etats-Unis141. Ils se développent en France grâce à la mise en valeur des modes doux et de l'architecture dans le commerce de périphérie.

Au carrefour des grands axes routiers et au coeur des nouvelles populations périurbaines, les espaces périphériques étaient déjà devenus des centralités économiques et commerciales. Ils émergent aujourd'hui comme des centralités dans les activités de détente et de promenade. Le centre-ville perd le monopole qu'il a longtemps détenu en possédant les activités de culture. Il y a donc un risque d'aggraver encore un peu plus la dévitalisation des coeurs des communes en promouvant la qualité urbaine au sein des zones commerciales.

L'intérêt des habitants pour les zones commerciales vient également du fait qu'elles proposent un certain nombre de services. David Mangin expliquait que Mac Donald's répondait à des besoins que les villes n'assument pas, comme les salles d'études, les cafés du soir, ...142 En effet, les centres commerciaux offrent une multitude de services qui se raréfient en centre-ville. Ils disposent de toilettes publiques propres et gratuites. La sécurité est assurée aussi bien à l'intérieur des magasins que sur les parkings. Les bâtiments sont de plain-pied et les allées sont larges pour permettre la circulation des caddies et l'ensemble du centre commercial est donc accessible aux personnes à mobilité réduite143. Le centre-ville a du mal à proposer les mêmes atouts car ils souffrent d'une configuration historique peu malléable.

Nous avons vu que certains services publics, comme les guichets SNCF ou les bureaux de Poste, se développent au sein du centre commercial Avignon Nord. Certains parcs commerciaux vont plus loin encore. Carré Sénart, ouvert en 2007, mise particulièrement sur les services et les loisirs. Il doit devenir le coeur de la ville nouvelle de Sénart. Il dispose d'un cabinet médical et propose une multitude d'activités destinées aux enfants : poney-club, spectacles pour enfants et même un service de prêt de poussettes pour les mères de familles

141 DESSE R-P. (Octobre - Décembre 2002), Les centres commerciaux français, futurs pôles de loisirs ? in Flux n°50, p.8

142 Op. cit., MANGIN (2004), p.126

143 CETE de l'Ouest (2004), Ville accessible à tous et Activités commerciales, actes de la journée d'échanges du 21 mai 2003, Certu, p.23

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qui viennent faire leurs achats144. Ce parc commercial est particulier car il fait partie d'une Opération d'Intérêt National et il est réalisé par un Etablissement Public d'Aménagement. Il y a donc une étroite coopération entre les opérateurs privés et les pouvoirs publics.

Mais d'autres parcs commerciaux ont investi dans les services et ont créé des espaces « pseudo-publics ». A Tours, le centre commercial L'Heure Tranquille est construit autour d'une grande fontaine à ciel ouvert (cf. figure 37). Il y a ici une réelle intention de reproduire un élément central de la ville pour capter les fonctions récréatives qui lui étaient historiquement réservées.

Figure 37 : Un exemple d'espace « pseudo-public » au sein du centre commercial l'Heure Tranquille

(Source : www.lheuretranquille.com)

Un parc commercial ne pourra toutefois jamais recréer la « vie » d'un centre-ville145. Il est soumis à des contraintes comme les horaires d'ouverture et il ne bénéficie pas d'une mixité fonctionnelle qui lui apporterait une vitalité permanente. Le centre-ville possède également une valeur culturelle qui ne peut être reproduite. La ville d'Avignon dispose d'un patrimoine sur lequel elle peut miser pour conserver la vitalité de ses commerces liés aux loisirs et à la restauration.

Toutefois les pouvoir publics doivent s'assurer de l'équilibre entre le commerce de périphérie et celui de centre-ville. Pour cela ils doivent veiller à ce que le développement commercial s'inscrive dans leur vision du territoire.

144 www.carre-senart.com

145 Op. cit., MOATI P. et POUQUET L. (1998), p.87

99

4.3.4 L'insertion des initiatives privées dans le projet urbain

Les projets privés ont tout intérêt à ne pas être en contradiction avec la volonté politique. En effet, même si les CDAC venaient à disparaître, les promoteurs auraient toujours besoin de l'accord des élus lors du permis de construire et pour la viabilisation de leurs terrains. Au-delà des éventuelles oppositions, les promoteurs ont besoin de connaître le projet urbain. En effet, nous avons vu que les politiques de déplacements modifiaient la répartition du commerce et que le développement de l'habitat sur un territoire pouvait transformer le marché en présence.

Pour ces raisons, le commerce a besoin de règles claires et stables146. Si le projet est précisément défini, les promoteurs pourront prévoir les décisions des CDAC et adapter leur programme en fonction des objectifs des collectivités. Les acteurs du commerce souffrent souvent de la lenteur de la planification. Un PLU s'élabore en quatre ans minimum et un SCoT en six ans147. Ce temps n'est pas en adéquation avec les décisions rapides des foncières, comme Immochan, qui jonglent entre des charges importantes et la recherche de profits.

Dans un même temps, les collectivités sont dépassées par la rapidité des évolutions commerciales. On voit sur Avignon Nord qu'il est difficile d'avoir un projet d'ensemble qui regroupe tous les acteurs publics. L'agence d'urbanisme mène actuellement une étude pour établir une stratégie d'évolution de la zone commerciale mais elle se heurte à plusieurs projets divergents. La commune de Sorgues souhaite continuer le développement du commerce alors que celle du Pontet a des projets de mixité fonctionnelle. Le futur quartier du Pontet devrait être intégré au tissu urbain par des cheminements doux mais le Conseil Général souhaite construire une nouvelle voie express entre les habitations et la zone commerciale... Les acteurs privés regrettent l'indécision des pouvoirs publics, qui ne parviennent pas à mettre leurs projets en cohérence148.

146 BONNEVILLE M. et BOURDIN V. (Décembre 1997), Planification urbaine et développement commercial, de la réglementation à la concertation, in Les annales de la recherche urbaine n° 78, p.18

147 SCHMIT P. (15 février 2010), Commerce : la faim des gros, la fin des petits, in La Lettre du cadre territorial n°395, p.15

148 Entretien avec Sara SHERIFF (2011), responsable montage d'opérations de la société Immochan région Midi.

100

Pourtant, les promoteurs de zones commerciales se sont dotés de moyens techniques pour s'intégrer dans les projets urbains. Depuis 2008, Immochan a développé une filiale, Citania, qui est en charge des opérations de renouvellement urbain. Contrairement à Immochan, c'est une structure qui est en mesure de réaliser des opérations mixtes comprenant des logements et des bureaux. A ce jour, la société n'a pas encore réalisé d'opération. Mais, dans le cadre d'un projet urbain porté par l'ensemble des partenaires publics, elle pourrait être amenée à restructurer le pôle commercial Avignon Nord.

Le projet urbain pourra toutefois se heurter à des problèmes de coût, en ce qui concerne le renouvellement urbain. En effet, nous avons vu qu'une restructuration coûte cher, notamment à cause de la perte des fonds de commerce. Le renouvellement urbain est donc difficilement envisageable par les propriétaires si les bâtiments ne sont pas vacants.

Pour mettre en relation le projet des pouvoirs publics et les intérêts économiques des acteurs privés, la concertation semble être indispensable. Les élus locaux peuvent par exemple accepter un accroissement de la surface de vente en échange d'une restructuration. Les négociations ont toujours existé. Auparavant, elles abordaient surtout les thèmes de l'emploi, des taxes et des contributions. Aujourd'hui, les réflexions entre les investisseurs et la collectivité traitent également de l'étalement urbain, de l'insertion dans les réseaux de transports, des polarités économiques et résidentielles, ...149

Le rapport ministériel Rochefort estime que le commerce ne peut pas être traité par une planification rigide, comme on pourrait le faire avec la voirie. Il nécessite beaucoup plus de compromis pour respecter à la fois les règles d'urbanisme et la liberté d'établissement. Il faut selon lui : « interdire parfois, inciter souvent, accompagner et favoriser toujours »150.

149 Interview de Bertrand Julien-Laferrière, membre du directoire d'Unibail-Rodamco dans : SCHMIT P. coordonateur (juin 2009), Dossier Urbanisme commercial, in Intercommunalités n°135, p.12

150 ROCHEFORT R. (2008), Un commerce pour la ville, Rapport au Ministre du Logement et de la Ville, p.19. Robert Rochefort est le directeur du CREDOC.

101

Conclusion de la quatrième partie :

La zone commerciale peut-elle s'inscrire dans un projet de ville durable ?

Les activités commerciales sont dépendantes de leurs conditions d'accessibilité. De ce fait, les politiques de déplacements peuvent modifier la compétitivité des différents pôles. Elles doivent donc s'inscrire dans un projet global qui fédère l'ensemble des partenaires publics. Les acteurs privés ont les capacités de s'adapter à un tel projet, malgré certaines réalités économiques. Mais pour cela, il doit y avoir un certain consensus entres les différentes structures publiques.

102

CONCLUSION GENERALE

L'étude de la stratégie des acteurs privés nous a montré qu'ils ont su créer de nouvelles formes de commerce pour s'adapter aux nouveaux modes de vie des consommateurs. Le fonctionnement du commerce de périphérie s'est ainsi appuyé sur l'essor de la voiture individuelle. Il a ainsi largement bénéficié du développement du réseau routier engagé par l'Etat.

En effet, la mise en place des rocades et autres contournements a permis d'accroître la zone de chalandise du pôle commercial Avignon Nord. Les espaces périurbains se sont également développés, augmentant ainsi son potentiel de clientèle. Les flux routiers ont progressivement augmenté et les enseignes en ont profité pour se faire connaître, en utilisant la visibilité depuis les voies rapides. Il y a ainsi eu une montée en puissance de l'affichage publicitaire toujours plus grand et toujours plus voyant. Ce phénomène a entrainé la banalisation et la dégradation des entrées de ville.

Au fur et à mesure que les flux augmentaient et que les temps de parcours en voiture diminuaient, le potentiel commercial s'est trouvé valorisé. Il y a donc eu un développement de la surface de vente de la zone commerciale. Son poids économique s'est renforcé car le nombre d'emplois et le montant des divers impôts ont augmenté.

Les collectivités locales sont ainsi devenues dépendantes du commerce de périphérie. Le législateur a tenté de limiter cet essor de la grande distribution qui affaiblissait les centres-villes, mais en vain. Le commerce traditionnel s'en est trouvé très affecté aussi bien dans les communes rurales que dans les villes centres. Le pouvoir donné aux élus locaux de contrôler les implantations grâce à un système d'autorisations préalables a échoué. En effet, les maires ont été séduits par l'essor économique et par les ressources fiscales liées au commerce périphérique.

Le commerce a longtemps été régi indépendamment des autres politiques urbaines et les réflexions intercommunales ont été mineures. Les élus n'étaient donc pas guidés par un projet urbain d'ensemble et la zone commerciale Avignon Nord s'est développée sans réel contrôle.

103

La situation est aujourd'hui compliquée car le site est devenu un espace dominé par l'automobile. Les habitants se retrouvent dans une situation de dépendance automobile, même pour réaliser leurs achats les plus basiques. Les différentes fonctions urbaines sont séparées par des voies routières à grande vitesse qui rendent difficiles la mise en place de cheminements doux. Les lotissements commerciaux de périphérie ne sont pas adaptés à la desserte en transports en commun et en modes doux car ils manquent de densité et que les produits vendus sont souvent encombrants. La mobilité durable doit donc s'accompagner d'un changement de la forme de commerce.

Il est difficile pour les collectivités locales d'impulser un tel bouleversement des pratiques dans un système économique qui fonctionne et sur des terrains qui sont entièrement privatisés. Aujourd'hui, il semble que la volonté générale ne soit plus de promouvoir des politiques drastiques mais plutôt de développer la concertation. Les acteurs publics doivent définir un projet urbain clair et stable et le marché doit avoir une certaine liberté du moment qu'il respecte les règles fixées par la collectivité.

A long terme, les politiques de transports pourraient entraîner un repositionnement du commerce, si elles arrivent à modifier les flux. Pour cela, il faut à la fois favoriser l'utilisation des transports en commun et restreindre l'usage de la voiture individuelle. De telles mesures ne peuvent être prises que s'il y a une volonté simultanée de limiter le commerce de périphérie, la périurbanisation et le trafic automobile. Plus que jamais, le commerce doit donc être intégré dans un projet urbain global, qui fédère l'ensemble des thématiques et des acteurs.

104

Table des figures

Figure 1 : Une agglomération située sur des flux économiques européens. 7

Figure 2 : L'Aire avignonnaise : un développement tourné vers l'Est 7

Figure 3 : Une zone commerciale qui s'affranchit des limites administratives 8

Figure 4 : Un SCoT qui permet de rassembler les intercommunalités concernées 9

Figure 5 : Avignon Nord, premier pôle commercial de l'agglomération 10

Figure 6 : Une zone commerciale multipolaire 12

Figure 7 : Immochan, un propriétaire foncier incontournable 17

Figure 8 : Un territoire cloisonné par les infrastructures routières 19

Figure 9 : Une offre de stationnement démesurée 22

Figure 10 : Occupation du Sol sur la zone commerciale 23

Figure 11 : Un lycéen franchissant l'autoroute par le pont de la D942 25

Figure 12 : Des espaces patrimoniaux méconnus 27

Figure 13 : Une entrée de ville de ville banalisée 29

Figure 14 : Contraste entre les enseignes et la perspective sur le Mont Ventoux 29

Figure 15 : Le magasin Ikéa, une boîte commerciale qui s'intègre difficilement dans le paysage 29

Figure 16 : Courbes isochrones à 60 minutes autour du pôle Avignon Nord 33

Figure 17 et 17bis : Un accroissement démographique plus rapide dans les territoires périurbains 37

Figure 18 : Les échangeurs, éléments clés de l'accessibilité 40

Figure 19 : L'aménagement de l'accès au pôle Ikéa 41

Figure 20 : Le coût prohibitif des parkings aériens 46

Figure 21 : Le centre commercial Auchan, élément central et fondateur de la zone commerciale 49

Figure 22 : L'implantation des surfaces spécialisées autour de l'hypermarché, seconde phase du

développement de la zone commerciale 51

Figure 23 : Un développement plus récent des services et des loisirs 53

Figure 24 : Un produit de la taxe professionnelle prépondérant par rapport à celui de la taxe

d'habitation. 57

Figure 25 : Une partie du territoire dédiée à l'activité 61

Figure 26 : Des ménages qui s'équipent rapidement en automobile 63

Figure 27 : Le développement simultané des hypermarchés et des autoroutes 65

Figure 28 : L'évolution rapide du réseau routier sur le bassin de vie d'Avignon 67

Figure 29 : Une démographie influencée par le développement routier 68

Figure 30 : Meadowhall, un « Retail Park » composé de cellules mitoyennes 72

Figure 31 : Une légère diminution du nombre d'implantations de grandes surfaces au début des

années 1990 73

Figure 32 : Odysseum, un site compact permettant la desserte par le tramway. 85

Figure 33 : Des infrastructures routières lourdes qui compliquent le développement des modes doux

87

Figure 34 : Des sites privilégiant la convivialité 93

Figure 35 : Un développement rapide des parcs commerciaux 94

Figure 36 : Le futur complexe commercial Atoll, construit autour d'un gigantesque parking 95

Figure 37 : Un exemple d'espace « pseudo-public » au sein du centre commercial l'Heure

Tranquille 98

105

Bibliographie

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· Fiche thématique : le commerce de détail (2008),

· Recensement de la population (2008),

· Répertoire des entreprises et des établissements (2009),

· Revenus fiscaux localisés des ménages (2008)

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111

Entretiens

CABROL Y. (13 juin 2011), Chargé de mission à l'agence d'urbanisme de Toulouse ayant réalisé le DAC de la grande agglomération de toulousaine (entretien téléphonique).

CHAMPEY L. (27 août 2010), directeur du pôle Très Petites Entreprises - Commerce à la CCI de Marseille-Provence et ancien directeur général de Décathlon Sud-Méditerranée.

GUIROY J. (20 juillet et 15 septembre 2011), chargée d'études à la Communauté d'Agglomération du Grand Avignon.

LACROZE M. (3 août 2011), directeur de l'atelier d'urbanisme et d'architecture Lacroze travaillant sur les documents d'urbanisme de la commune du Pontet depuis les années 1970.

SEGURA L. (25 mars 2011), chef de projet Urbanisme Commercial à l'agence d'urbanisme de la région nantaise.

SHERIFF S. (14 juin et 15 septembre 2011), responsable montage d'opérations de la société Immochan région Midi.

112

Table des matières

Remerciements 1

Sommaire 2

Liste des abréviations 3

Introduction 4

1 Présentation de la zone commerciale et des problèmes urbains qui lui sont

associés 6

1.1 La zone commerciale et son contexte urbain 6

1.1.1 Une zone commerciale régionale qui s'affranchit des limites administratives 6

1.1.2 Un commerce de centre-ville déstabilisé 10

1.1.3 Une zone commerciale décomposée en plusieurs sites 12

1.2 Un poids économique incontestable 13

1.2.1 Un pôle d'emploi pour l'agglomération 13

1.2.2 Un pôle commercial d'influence régionale 14

1.2.3 La présence de grands groupes nationaux et multinationaux 15

1.3 Un espace dominé par l'automobile 18

1.3.1 Des infrastructures lourdes qui séparent les différentes fonctions urbaines 18

1.3.2 Des milliers de places de stationnement en surface 21

1.3.3 Des transports collectifs et des modes doux quasiment inutilisés 24

1.4 Des paysages transformés par ces nouveaux usages 26

1.4.1 Une terre historiquement agricole qui dispose d'un patrimoine important 26

1.4.2 Une entrée de ville dégradée 28

2 Les stratégies d'implantation et d'évolution du commerce de périphérie ....

31

2.1 Les critères nécessaires à l'implantation commerciale 31

2.1.1 Evaluer le marché potentiel 32

2.1.2 La visibilité et l'accessibilité 38

2.1.3 L'environnement commercial et non commercial 42

2.1.4 L'offre foncière 44

2.2 La diversification des activités sur la zone commerciale 47

2.2.1 Au commencement : l'hypermarché et sa galerie marchande 47

2.2.2 Le développement des surfaces spécialisées et des « discounters » 50

2.2.3 L'essor des services et des loisirs 52

113

3

3.1

Le rôle des pouvoirs publics dans le développement de cette zone

commerciale de périphérie 55

Des élus locaux séduits par les ressources fiscales et le développement de l'emploi

 

sur leur commune

55

 

3.1.1

Le développement de l'emploi

55

 

3.1.2

Des recettes fiscales importantes

56

 

3.1.3

La mise en concurrence des élus locaux

59

 

3.1.4

Un POS souple pour permettre le développement économique

60

3.2

Le rôle des acteurs du développement routier et autoroutier

62

 

3.2.1

Des théories du Corbusier au maillage routier

62

 

3.2.2

Le développement du réseau routier vauclusien comme catalyseur de la zone commerciale

66

3.3

L'échec des lois visant à limiter le développement commercial de périphérie

70

 

3.3.1

La loi Royer et la mise en place des procédures d'autorisation

70

 

3.3.2

La loi de modernisation de l'économie et l'intégration du commerce dans l'urbanisme de droit

 
 

commun 75

 

4 La zone commerciale Avignon Nord peut-elle s'inscrire dans un projet de

ville durable ? 79

4.1 Construire un projet urbain pour freiner le développement commercial de

périphérie 79

4.1.1 Intégrer le commerce dans le projet urbain 80

4.1.2 Réfléchir à la bonne échelle 81

4.1.3 Développer de la mixité fonctionnelle au sein de la zone commerciale 83

4.2 La mobilité durable et son impact sur la compétitivité du pôle 84

4.2.1 La mise en place de transports collectifs performants de type tramway 84

4.2.2 La difficulté de créer des cheminements doux 87

4.2.3 Peut-on diminuer les espaces de stationnement ? 89

4.2.4 Contraindre l'usage de la voiture pour modifier l'influence d'Avignon Nord 91

4.3 Avignon Nord peut-elle muter sur des initiatives privées ? 92

4.3.1 Des efforts dans la conception des pôles commerciaux 92

4.3.2 Des zones commerciales qui restent fidèles aux principes de développement du commerce de

périphérie 94

4.3.3 Des fonctions qui s'apparentent de plus en plus à celles des centres-villes 97

4.3.4 L'insertion des initiatives privées dans le projet urbain 99

Conclusion générale 102

Table des figures 104

Bibliographie 105

Sitographie 109

Entretiens 111

Table des matières 112

PRESENTATION DE L'AUTEUR

Expérience professionnelle

·

Laurent GIRARD

CONNAISSANCES GENERALES

Maîtrise de : Adobe Illustrator,

Mapinfo,

Word, Excel, Powerpoint.

· Langues : Anglais,
Espagnol.

CENTRES D'INTERETS

· Muay thaï, Course à pied.

· Sapeur Pompier Volontaire au centre de secours de Luynes (13).

Octobre 2011 - Juin 2012 : CDD de 8 mois au Syndicat Mixte pour le SCOT du Bassin de Vie d'Avignon.

Poste de chargé d'études Urbanisme

- Analyse de la compatibilité des documents communaux avec les orientations du SCoT.

- Présentation des PLU et des modifications devant les élus du Syndicat Mixte.

- Représentation du Syndicat Mixte aux réunions des Personnes Publiques Associées.

- Diverses tâches administratives.

Directeur : Alain FARJON

· Mars - Juillet 2011 : stage de 4 mois à l'Agence d'Urbanisme de l'aire Avignonnaise. - Travail préparatif à l'élaboration d'un SDeC puis d'un DAC sur le bassin de vie d'Avignon. - Réflexions sur la mise en place d'un observatoire économique des effets du tramway. - Mission de conseil sur la création d'un pôle d'échanges multimodal au Pontet (84).

Maître de stage : Ingrid HAUTEFEUILLE ; directeur : Jean-Louis PERRIN

· Eté 2010 : stage de 9 semaines à la Chambre de Commerce et d'Industrie de Marseille Provence au service

Urbanisme Commercial (pôle TPE - Commerces), prolongé par une semaine d'intérim.

- Etude pour la redynamisation du commerce en centre-ville de Port de Bouc (13) dans le cadre du FISAC. - Diagnostic du tissu commercial de la Canebière à Marseille (13).

Maître de stage : Caroline LOUVET ; directeur de pôle : Lionel CHAMPEY

· Mars - avril 2010 : emploi à mi-temps en bureau d'études de SIG (logiciel Mapinfo). - Travaux sur les sites classés du Concors et de la Côte Bleue (13).

Directeur : Jean-Michel MEYER

· Mai - octobre 2009 : animateur dans deux galeries d'expositions scientifiques de Chambéry.

· Etés 2008 et 2009 : sapeur pompier saisonnier à Chambéry.

· Juin 2008 : stage d'un mois à la Direction Départementale de l'Equipement de la Savoie. Maître de stage : David PUPPATO

· Etés de 2004 à 2007 : divers emplois saisonniers en manutention.

Diplômes

· 2011: Master Urbanisme et Aménagement parcours Projet d'urbanisme et action opérationnelle mention B. Institut d'Urbanisme et d'Aménagement Régional d'Aix en Provence (13).

- Mémoire : Analyse du développement de la zone commerciale de périphérie Avignon Nord. (Étude de la stratégie des acteurs privés et du rôle des pouvoirs publics dans le développement de ce pôle commercial).

- Atelier pédagogique : Projet urbain autour de la réouverture de la gare du Pontet (84).

Thèmes: intermodalité, lien urbanisme / déplacements, renouvellement urbain. Commande du conseil régional PACA. http://pas.regionpaca.fr/fileadmin/PAS/IAR/Oral Final versioncompressee.pdf

· 2010 : Maîtrise Urbanisme et Aménagement

Institut d'Urbanisme et d'Aménagement Régional d'Aix en Provence (13).

- Diagnostic territorial sur la ZAC St Louis (Marseille XVème).

- Dossier sur l'action foncière communale.

- Etude de design urbain sur la commune de Cassis (13).

· 2009 : Licence de Géographie spécialité Aménagement Université de Savoie au Bourget du Lac (73).

· 2007 : D.E.U.G. Mathématiques Appliquées et Sciences Sociales Université de Savoie au Bourget du Lac (73).

· 2005 : Baccalauréat Scientifique Lycée F. Buisson à Voiron (38).






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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore