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L'enseignement de la lecture en Afrique noire. Cas de quelques collèges de Brazzaville

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par Martin GUIMFAC
Université Marien Ngouabi - Diplôme d'études approfondies 1999
  

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2. Utilité de la contribution du milieu

Les résultats de l'enquête que nous avons exposés au chapitre IV à propos du milieu de résidence de l'apprenant ont montré qu'il offre de bonnes conditions matérielles de vie. En revanche, il n'assure pas toujours les conditions intellectuelles de l'apprentissage de la lecture. Les suggestions suivantes pourraient contribuer à améliorer le milieu d'origine de l'apprenant en vue de l'apprentissage efficace et de la pratique effective de la lecture.

L'apprentissage de la lecture nécessite une véritable collaboration entre l'école et le milieu. Certains éléments du milieu comme le niveau d'études de la mère, sa catégorie socioprofessionnelle, le niveau d'études du père, sa catégorie socioprofessionnelle, son statut matrimonial, la disponibilité d'une salle d'études et d'une table de travail, le moyen d'information choisi, le moyen d'éclairage utilisé devraient favoriser l'apprentissage de la lecture.

C'est la raison pour laquelle il serait bon que l'apprentissage de la lecture tienne compte de la nature du milieu auquel appartient l'apprenant. Globalement, le milieu doit favoriser l'apprentissage de la lecture au triple plan affectif, cognitif et d'action.

A. Contribution du milieu au plan affectif

La contribution du milieu au plan affectif fait référence à l'encadrement que les adultes doivent apporter à l'adolescent, à son incitation à l'apprentissage de la lecture par les parents. Nous nous en tenons au rôle que les parents d'un apprenant sont censés jouer dans sa réussite scolaire et particulièrement en lecture.

La première forme d'aide au travail scolaire qu'une famille peut apporter à un apprenant est de s'y intéresser. Le faire signifie instaurer le dialogue entre les parents et le professeur, participer aux activités que l'établissement organise. La conviction d'un adolescent de la classe de 3ème que son père (ou tuteur) collabore avec son établissement est le gage de la réussite pour ce dernier. Jacques Fijalkow [sd], parle à ce propos de :

La rencontre triangulaire enfant, parent et maître au terme de laquelle le rôle du maître consiste à ce que résulte un contrat d'apprentissage entre les trois partenaires115(*).

Un tel contrat rassure l'apprenant que ses parents (ou tuteurs) et son enseignant désirent tous qu'il réussisse. Il a tout intérêt à s'engager dans les apprentissages scolaires. Le père prend conscience qu'il ne s'agit nullement de :

Enquêter de façon plus ou moins policière sur les contenus d'apprentissage, mais de se faire expliquer par l'enfant lui-même ce qui se passe, s'il a envie116(*).

Il s'agit plutôt de rester disponible à toutes les demandes éventuelles d'un apprenant, à ses propositions de raconter et de partager son expérience de lecteur. Cela implique que les parents sont alphabétisés et sont d'un certain niveau de culture.

Or, en République du Congo singulièrement et en Afrique noire en général, dans les zones rurales tous les parents ne disposent pas de ces atouts. Seule une minorité de parents est lettrée, ce qui rend très complexe l'aide attendue des parents en ce qui concerne les apprentissages scolaires. C'est dans ce sens que Marc Talansi (1989) a pu écrire que Brazzaville, capitale de la République du Congo, ne constitue pas un milieu propice à la lecture117(*).

Il est surtout hors de question de donner l'impression à un adolescent qu'il est contrôlé. La surveillance implique la méfiance et provoque le mensonge. Ce n'est ni par le contrôle, ni par la menace, qu'un parent (ou tuteur) peut aider un adolescent à travailler, mais par une attention soutenue sur son travail.

Il n'est pas souhaitable que les membres de la famille portent essentiellement leur attention sur les résultats positifs qu'un adolescent obtient. Il serait bon qu'ils s'intéressent plutôt à ce qu'il ne sait pas faire pour l'encourager à persévérer. Le contraire risque de le traumatiser et provoquer en lui un désintérêt pour la lecture.

Il est plutôt recommandé que les parents (ou tuteurs) suscitent chez l'adolescent l'envie de lire pour que celui-ci se sente intégré dans l'univers du lire/écrire, c'est-à-dire du monde de l'écrit. Pour ce faire, il serait souhaitable qu'ils accompagnent l'adolescent dans son travail. Celui-ci a besoin d'être rassuré qu'il dispose des moyens pour réussir à l'école.

Les parents devraient aider l'adolescent à surmonter ses difficultés de lecture. Elles sont de trois dimensions : cognitive, affective et opératoire. Les premières sont liées aux règles de fonctionnement des objets de lecture et des stratégies de construction du sens.

Les deuxièmes sont relatives à ce que l'adolescent de la classe de 3ème à Brazzaville se sent très souvent étranger à l'univers du lire/écrire car il a peur de la lecture et de la langue dans laquelle les textes sont écrits.

Les troisièmes concernent les mauvaises habitudes acquises pendant les premiers apprentissages : la lecture linéaire, les capacités perceptives insuffisamment développées, le déchiffrage, l'oralisation, le manque de projets de lecture, la sub-vocalisation, le manque de variation de modes, de types et de supports de lecture, comme nous l'avons indiqué dans les pratiques pédagogiques actuelles.

Aussi, les parents peuvent-ils aider l'adolescent à préparer la lecture et le prolongement des activités de la lecture à la maison. Pour lui montrer l'importance capitale de la lecture en tant qu'une arme sociale, ils peuvent attirer son attention sur tout ce qui est écrit à la maison ainsi que dans la rue, sur les publicités à la télévision, sur les notices des produits pharmaceutiques et les modes d'emploi des appareils électroménagers ; l'attention étant :

Un processus de sélection des différentes informations qui se présentent à l'esprit, celui-ci se focalisant sur certaines d'entre elles, jugées pertinentes, signifiantes, au détriment des autres qui sont écartées118(*).

Les parents devraient par ailleurs initier l'aprenti lecteur à utiliser le dictionnaire, à faire quelques-unes de ses recherches dans des encyclopédies, à visiter les lieux de lecture comme les bibliothèques, les centres de lecture et les centres de documentation et d'information, à la recherche d'ouvrages documentaires permettant de trouver des réponses aux problèmes qui se posent à lui.

Il est désormais acquis que l'apprentissage de la lecture ne saurait se limiter uniquement aux livres de lecture et à la classe. Il existe d'autres supports et d'autres lieux de lecture. Les supports de lecture désignent les livres, les revues, la télévision, l'ordinateur et les affiches. Les lieux de lecture font référence aux bibliothèques, aux librairies et aux kiosques à journaux. C'est certainement pour cela que Marc Talansi (1989) préconise que :

Il est souhaitable qu'une bibliothèque soit implantée dans chaque établissement pour permettre à chaque apprenant, au moment où son esprit est encore malléable, de faire de la lecture un besoin permanent dans sa vie119(*).

C'est probablement dans ce sens que le projet franco-congolais de lecture publique120(*) vise à :

- réhabiliter le réseau de lecture publique sur l'ensemble du territoire national ;

- mettre en place les bibliothèques pilotes départementales ;

- constituer un réseau de bibliothèques partenaires associées.

Dans le cadre de ce projet, treize (13) bibliothèques fonctionnaient à Brazzaville et quelques-unes dans les chefs-lieux de département de la République du Congo, au moment de la réalisation de l'étude qui a abouti à l'élaboration du présent manuel.

Il s'agit d'aider l'apprenant à s'approprier des stratégies de construction de sens, de savoirs et de faire de l'école non seulement le lieu de l'apprentissage de la lecture, mais celui de la découverte du livre et du plaisir de lire. Dans ce sens, Isabelle Iam suggère :

De prévoir dans le temps scolaire, des moments de lecture libre, de lecture extensive, de type bibliothèque, intégrés à la vie de la classe, si toutefois l'architecture scolaire et les pesanteurs administratives le permettent121(*).

Les parents ont l'obligation d'aider l'adolescent à découvrir lui-même la nature et les causes de ses difficultés de lecture. A partir du moment où il les comprend, les solutions seront non seulement aisées à trouver mais beaucoup plus efficaces, car c'est lui-même qui doit résoudre les problèmes d'apprentissage qu'il rencontre. Cela n'est possible que s'il a confiance en ses propres capacités à les résoudre.

Permettre à un adolescent d'avoir ce type de confiance, telle est la tâche essentielle des parents. Ils doivent l'accompagner dans l'exploitation des pistes allant vers une amélioration de ses performances, sans prétendre les améliorer eux-mêmes ou les faire améliorer par un spécialiste. Il n'y a pas de solutions miracles qui peuvent dispenser un adolescent du travail personnel. Tout dépend des conditions de travail et de l'ambiance affective dans laquelle il se déroule. Il faut, comme le suggère Eveline Charmeux (1998) :

Assurer l'enfant sur ses chances de réussir122(*).

En dédramatisant l'échec, en le dépersonnalisant, en faisant apparaître sa relativité, et en aidant l'adolescent à s'approprier des stratégies pour réussir, les parents lui rendent un service utile. Il est important de faire prendre conscience à l'adolescent qu'apprendre ce n'est pas qu'acquérir des contenus tout faits, c'est aussi s'approprier les moyens de les construire c'est-à-dire les connaissances procédurales.

Ainsi, tout le confort matériel et intellectuel dont dispose une famille devrait être mis à contribution en vue de la réussite scolaire de l'enfant, et particulièrement à sa réussite en lecture, discipline transversale et compétence fondamentale.

En résumé, il convient de mettre l'adolescent en confiance et de lui montrer que sa famille l'aime et voudrait qu'il sache lire et bien lire, dans son propre intérêt, eu égard au rôle fondamental que joue la lecture au plan de la réussite scolaire et de l'ascension sociale d'un individu.

* 115. Jacques, FIJALKOW ([sd]), Lecture, Association pour le développement d'auxiliaires pédagogiques et de technologies d'enseignement, Paris, p. 36.

* 116. Eveline, CHARMEUX (1998), Apprendre à lire, échec à l'échec, Paris, Editions Milan, p. 119.

* 117. Marc, TALANSI (1989), « Qui lit quoi au Congo ? », Notre librairie, Paris, n° 92/93, p. 193.

* 118. Olivier CLOUZOT (1999), Former autrement, Apprentissages intellectuels, Langage et structuration des connaissances, Paris, Les éditions d'Organisation, p. 41.

* 119. Marc, TALANSI (1989), op.cit.

* 120. Convention n° 0124/C/2000 du 2 mars 2000 portant création du projet franco congolais de lecture publique.

* 121. Lecture, Association pour le développement d'auxiliaires pédagogiques et de technologies d'enseignement, Paris, [sd], p. 67.

* 122. Eveline, CHARMEUX (1998), Apprendre à lire, Echec à l'échec, Paris, Editions Milan, p. 127.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand