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L'expérience comme interprétation des faits dans la " théorie physique " de Pierre Duhem

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par Héritier Mbulu
Université catholique du Congo - Gradué en philosophie 2010
  

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Conclusion générale et perspectives

Au terme de ce travail consacré à l'analyse de la conception duhémienne de l'expérience de physique, nous pouvons relever que, notre problématique était centré sur le débat qui a agité les scientifiques au début du 20e siècle, et même actuellement. Lorsque d'un côté les rationalistes purs se positionnent contre l'interprétation et veulent que leurs théories servent d'explication de faits, puisqu'il faut les expliquer pour en déterminer les causes premières. Les positivistes empiriques, d'un autre côté, donnent à l'énoncé d'expérience sensible le fondement de toute théorie et de toute scientificité. Dès lors, théorie et expérience sont pensées comme radicalement séparées, parfois même indépendantes. Ce partage empêche de penser la coopération étroite entre théorie et expérience dans la constitution de la connaissance. C'est ainsi que, voulant dépasser ce débat, P. Duhem propose une nouvelle façon de concevoir l'expérience de Physique.

Notre hypothèse, explicitée en deux chapitres, davantage dans le second que le premier, qui fondait l'expérience de Physique comme une interprétation théorique est allée dans le sens de restituer cette harmonie ou coopération brisée.

Le mérite de P. Duhem, dans notre premier chapitre, a été de montrer que la théorie physique ne doit pas rechercher l'explication des phénomènes, mais à être une représentation des faits, et en dernier lieu se présenter comme une simple classification naturelle : « La théorie physique n'a d'autre objet que de fournir une représentation et une classification des lois expérimentales »95(*). En d'autres termes, la science (la physique), pour lui, n'est ni une explication métaphysique des phénomènes ni une description de la réalité sensible, elle est un langage permettant de coordonner et de prévoir les phénomènes, après les avoir traduits en grandeurs abstraites. Elle a pour but une classification naturelle. Nous retenons la thèse selon laquelle « la physique théorique ne saisit pas la réalité des choses ; elle se borne à représenter les apparences sensibles par des signes, par des symboles. Or nous voulons que notre physique théorique soit une physique mathématique, partant que ces symboles soient des symboles algébriques, des combinaisons de nombres »96(*). C'est pourquoi nous affirmons que la science ne s'occupe pas des réalités visibles. C'est par similation que nous arrivons à découvrir la réalité telle que conçue et construite par la science et la technologie.

En outre, selon notre analyse, nous comprenons que P. Duhem remplace l'inductivisme par l'hypothético-déductivisme. Il insiste sur la méthode hypothético-déductive et la prône comme méthode des sciences physiques. Selon lui, l'aspect de l'« apriorité logique » doit être privilégié par rapport à celui de l'empiricité ou de l'« apostériorité logique » ; quand bien même ces deux aspects contribuent ensembles au progrès scientifique.

En confrontant notre texte à d'autres auteurs, nous reconnaissons à P. Duhem une certaine originalité dans sa conception de la théorie physique. Même si cette conception a été négligée à son époque, comme l'indique A. Brenner, l'histoire ne fait que clouer ses adversaires, en récupérant la pensée de ce Grand Savant Pierre Maurice Marie Duhem. La conception théorique que nous défendons aujourd'hui entre dans le cadre d'une récupération intellectuelle de cette pensée duhémienne. D'ailleurs, nous ne pouvons que lire les plus grands épistémologues actuels pour retrouver, dans leurs textes, les grandes lignes de la pensée de P. Duhem97(*).

C'est pourquoi, à la suite de P. Duhem, nous soutenons que c'est une chimère que de vouloir faire de la théorie physique une explication réelle des lois, se vantant d'atteindre la réalité des choses même ; puisque l'on rendra la théorie solidaire d'une certaine conception métaphysique du réel, et on l'engagera dans des discussions sur l'Absolu. Cependant, il faut voir dans la théorie une simple représentation résumée et classée des connaissances expérimentales qui ne copie pas la réalité telle qu'elle est.

Toutefois, nous pouvons relever que, selon A. Boyer, l'erreur de P. Duhem se situe dans le fait que, sa notion de classification naturelle peut être jugée trop réaliste, puisque « la difficulté principale de la conception duhémienne réside peut-être en ceci que l'on ne voit pas clairement comment la seule idée de classification naturelle pourrait expliquer par exemple ce succès prédictif de la théorie ondulatoire que constitue la découverte inattendue de la "tâche de Poisson", brièvement rapportée par Duhem lui-même dans sa Théorie physique »98(*). P. Duhem est trop réaliste dans le fait qu'il voit dans toute théorie physique une classification naturelle et que celle-ci devrait conduire à la prévision des expériences nouvelles. Mais, il ne dit pas comment une classification naturelle pourrait prédire les faits nouveaux.

Disons que notre grand apport a été de concevoir l'expérience de Physique comme une construction, une réalisation schématique et symbolique. La conception duhémienne de l'expérience développée ci-haut n'a fait qu'affirmer et confirmer notre hypothèse de base : celle de concevoir l'expérience comme une interprétation des faits observés. Nous soutenons, de ce fait, l'idée selon laquelle l'expérience de physique contient déjà en elle une interprétation théorique qui s'ajoute aux données expérimentales ; d'autant plus que la théorie mathématique a introduit, en son sein, ses représentations symboliques et abstraites. L'expérience emploie des symboles mathématiques qui lui offrent une généralisation, une concision et une précision dans la représentation des lois expérimentales. Il y a donc toute une construction théorique relevant du développement algébrique qui prévoit, guide et contrôle l'expérience.

Mais si l'expérience est une interprétation théorique, que doit devenir la nature du rapport théorie-expérience ? Répondre à cette préoccupation constitue notre originalité à la résolution au débat - entre rationalisme et positivisme - qui a constitué notre problématique.

En rapport à cette question, nous pensons que, la théorie et l'expérience s'entremêlent dans une sorte de complémentarité. Nous soutenons qu'il y a une imbrication entre le théorique et l'expérimental au point que l'on ne saura plus établir un commencement réel devant le résultat de l'expérience. La théorie, se construisant sur des principes mathématiques, n'a pas, en elle-même et indépendamment de l'expérience, une valeur réelle. Nous pensons qu'elle n'a qu'une valeur méthodologique. Selon la pensée duhémienne, la théorie apparaît comme un instrument de l'expérimentateur, au point que l'on ne peut plus faire de la Physique sans une théorie (ne fut-ce que mathématique). Nous pensons donc que, la théorie implique l'expérience et vice versa. Ni l'une ni l'autre ne peut rejeter l'autre. Ces deux aspects, pour nous, sont inextricablement liés : on ne peut plus construire actuellement une connaissance scientifique, dans n'importe quel domaine, avec soit la seule théorie soit la seule expérience.

Certainement, nous voulons élaborer, dans cette ouverture d'une recherche ultérieure, l'hypothèse selon laquelle l'intelligence humaine, dans les sciences des nouvelles technologies de la communication et de l'information, progresse grâce à un enchaînement des applications théorico-expérimentales ; et grâce à un haut niveau de symbolisation mathématique, algébrique et algorithmique, que nous considérons comme fondement de notre rationalité empirique.

III. Bibliographie

* 95 P. DUHEM, La Théorie physique. Son objet-sa structure, p. 273.

* 96 Ib., p. 170.

* 97 Cf. A. BRENNER, Duhem, dans Revue internationale de philosophie, 46 (1992) n. 182, p. 1-2.

* 98 A. BOYER, Physique de croyant ? Duhem et l'autonomie de la science, dans Revue internationale de philosophie, 46 (1992) n° 182, p. 321.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault