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Kaamelott humour télévisuel et série intertextuelle

( Télécharger le fichier original )
par Sébastien Brossard
Université de Franche-Comté - M2 Discours Texte Communication Documentation 2012
  

Disponible en mode multipage

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Directeur de recherches : Mongi Madini Session 2012

Maître de conférences à l'Université de Franche-Comté

Master 2

Discours, texte, documentation, communication

Kaamelott

Humour télévisuel et série intertextuelle

Mémoire présenté et soutenu publiquement par

BROSSARD Sébastien

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 2

Remerciements

J'exprime ma profonde gratitude à Monsieur Madini, mon directeur de recherches, pour avoir accepté de m'accompagner dans cette aventure intellectuelle qu'est la réalisation d'un mémoire. Ses conseils judicieux et sa confiance m'ont permis de mener à bien ce projet. Je témoigne toute ma reconnaissance à Madame Chauvin-Vileno pour m'avoir conseillé dans le choix de mon directeur de recherche ainsi qu'à Monsieur Viprey de m'avoir encouragé à poursuivre mon parcours avec ce sujet. Je tiens également à remercier toutes les personnes qui ont contribué à mon parcours universitaires, étudiants, enseignants et administratifs compris. Je remercie plus particulièrement Nicole Salzard pour son aide au laboratoire LASELDI.

Enfin je tiens à adresser toutes mes amitiés à Martin Grand pour son scepticisme concernant le sérieux de ce sujet et de la série Kaamelott et qui désormais a fini par l'apprécier, je l'espère un peu grâce à mon travail.

Je n'oublie pas non plus Emeline Gaudot pour ses judicieux conseils de mise en page et de lecture. Pour les mêmes raisons j'adresse toute ma gratitude et mon amitié à Clémentine Vermot-Desroches, Thibaud Nedey, Marie Laure Louis pour ma photo de couverture ainsi qu'à Alexandre Mathiot pour nos séances de visionnage et surtout pour ses précieuses relectures, à Sébastien Hacquard pour sa patience et à Ludovic Nicot ainsi qu'à ma soeur Sandra pour m'avoir persuadé que cette série me ferait rire, je pense avoir dépassé ses espérances.

Je ne saurais conclure ces remerciements sans évoquer mes parents qui m'ont permis d'accéder à cette formation avec tout le soutien moral et matériel que cela implique et de démontrer, puisqu'il est hélas encore utile de le faire, que l'université est un merveilleux lieu d'émancipation et un rempart contre la reproduction sociale.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 3

Sommaire

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 4

Remerciements 2

Bilan de recherche 6

Kaamelott : Du programme court humoristique au format américain dramatique

10

1. Le phénomène des programmes courts humoristiques 11

2. La télévision, objet culturel 13

3. Les séries, un atout majeur pour la télévision du XXIème siècle. 14

4. M6 et les programmes courts. 15

5. Evolution de Kamelott. 17

6. La distribution et ses spécificités. 18

7. L'intrigue. 20

8. La communauté de fans. 23

Kaamelott :26De la Légende Arthurienne à Michel Audiard, une série construite

sur plusieurs niveaux d'intertextualité. 26

1. Les origines 27

2. Le formalisme russe. 29

3. La transtextualité de Genette. 30

4. Le pastiche 31

Les traces de contemporanéité dans Kaamelott, une astuce scénaristique pour

évoquer le siècle du téléspectateur. 45

1. Présentation du corpus 46

2. Contextualisation des thèmes analysés. 47

3. Analyse des épisodes. 49

Conclusion 72

Bibliographies 76

Livres 77

DVD 77

WEBOGRAPHIE 78

Abréviations :

CC : Caméra Café

SDM : Scènes De Ménages AA : Alexandre Astier

LA : légende Arthurienne

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 5

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 6

Bilan de

recherche

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 7

Une oeuvre n'est qu'une rencontre passagère dans notre vie mais il peut aussi être une trace indélébile. Cette pensée nous semble être une explication satisfaisante pour justifier le choix du sujet de ce mémoire. La rencontre avec la série Kaamelott il y a de cela quatre années nous a marqué profondément et nous a incité à nous y intéresser non plus avec le regard du spectateur ou du critique mais bien avec l'oeil du chercheur. Nous avons amorcé ce travail l'an dernier en nous intéressant à l'intertextualité, aux influences qui ont inspiré Alexandre Astier, l'auteur de la série, notamment Michel Audiard. Nous reviendrons sur cette référence majeure au cours du deuxième chapitre.

Nous restions donc dans le cadre de la série, sans la considérer en tant qu'objet télévisuel avec toutes les contraintes que cela implique.

L'objectif de ce mémoire est de démontrer en quoi Kaamelott n'est pas qu'une série française humoristique supplémentaire mais bien un programme original de qualité, bien qu'il soit diffusé sur une chaine commerciale, et ne se limitant pas à la télévision. Kaamelott est vouée à devenir une référence dans l'histoire de la fiction française, quelque soit le support et qui mérite qu'on lui consacre deux années universitaires.

Selon le Trésor de la Langue Française une série peut se définir comme un ensemble représentatif dans un domaine technique. Dans le domaine des arts, c'est « un ensemble composé d'oeuvres qui possèdent entre elles une unité et forment un tout cohérent ». Et pour le genre télévisuel c'est « une suite de feuilletons, de films, d'émissions liés par une unité de genre, de forme, de sujet ou de personnages ».

Nous avions donc conclu dans un travail précédent intitulé Kaamelott Humour, parodie et réflexion sur l'échec au vu des différents éléments techniques que l'oeuvre d'Alexandre Astier peut être considérer comme une série aussi bien au format télévisuel que sous la forme de bande dessinée et bientôt de long métrage pour le cinéma.

Les quatre premières saisons de Kaamelott sont composées de cents épisodes chacune, d'une durée de trois minutes trente secondes. Les saisons 5 et 6 comptent moins de dix épisodes mais ont une durée de cinquante deux minutes chacun.

Selon le Petit Larousse 2012 une saison est « l'ensemble des épisodes d'une série télévisée, diffusés à intervalles réguliers pendant une période déterminé ».

Les sujets récurrents sont la quête du Graal, les diverses quêtes secondaires ainsi que les problèmes de la vie quotidienne. Il y a une dizaine de personnages que nous retrouvons presque systématiquement durant les six saisons

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 8

Selon Hegel « l'homme n'est rien d'autre que la série de ses actes ».1 La série évoque ici donc une construction, une évolution due à l'ajout de nouveaux éléments différents.

C'est un phénomène identique à celui défini par Hegel qui se produit dans le cas des séries télévisées. Kaamelott évolue au fil des épisodes avec l'ajout de nouveaux personnages qui deviendront pour certains d'entre eux récurrents. C'est le cas pour les chevaliers Yvain et Gauvain qui sont respectivement le frère de la Reine et le neveu du Roi. L'arrivée de ces deux personnages permet à l'auteur d'exploiter davantage le filon des intrigues familiales. Le Tavernier ou encore l'enchanteur Elias, rival de Merlin, sont deux autres personnages ajoutés et qui enrichissent la série avec l'apport de nouveau lieux et de nouvelles intrigues. L'arrivée de ces nouveaux personnages perturbe donc tout l'univers de la série et crée alors des situations nouvelles. Citons par exemple la rivalité entre Elias et Merlin qui provoquera le départ de ce dernier dans la saison 5 ou encore l'évolution du personnage de Lancelot qui, révolté par la bêtise et la faiblesse des autres chevaliers, passera de serviteur dévoué au Roi à traître qui décide de fonder son propre camp. L'évolution se ressent aussi du point de vue de l'espace puisque la série va progressivement quitter l'enceinte du château et évoluer dans de nouveaux lieux tels que la taverne le camp de Lancelot ou le domaine de Caïus.

Nous pouvons d'ailleurs faire la distinction entre série et feuilleton. La série est constituée d'épisodes que nous pouvons suivre indépendamment les uns des autres, même si quelques éléments comme les personnages et des événements font le lien, ayant un début et une fin. Le feuilleton est constitué également d'épisodes mais avec une fin ouverte permettant au scénariste d'introduire l'intrigue du prochain épisode et un début récapitulant les éléments essentiels de l'intrigue des épisodes précédents. Si nous suivons ces définitions de François Jost2, Kammelott serait dans un premier temps une série et deviendrait partiellement dans le livre IV et totalement dans les livres V et VI un feuilleton. Cependant, pour plus de commodité, nous allons systématiquement employer le mot série.

Nous retrouvons ces conditions en analysant plusieurs séries, quelque soit le format et la nationalité ou leur genre qu'il soit comique, dramatique, policier ou historique. La trame de fond, qu'il s'agisse d'un commissariat, un hôpital, Rome, un quartier aisé, une île ; etc. et les personnages récurrents constituent ce que nous pouvons nommer les invariants. Il en va de même pour la forme qui évolue rarement .La durée, l'ambiance, la réalisation, et l'habillage musical restent généralement sensiblement le même de la naissance à la mort d'une série. La seule constante est que cet habillage est intégralement composé par Alexandre Astier.

1 Hegel (Friedrich), Encyclopédie des sciences philosophiques en abrégé, 1830, Gallimard, 1990.

2 Jost (François), 50 fiches pour comprendre les médias, éd. Bréal, 2012

Kaamelott est un parfait contre exemple puisque tout a considérablement changé entre les quatre premières saisons et les deux suivantes. En effet, la série est passée du format court ou « shortcom » au format dit « américain ». Le nombre de plans et de décors s'est également multiplié. Le casting s'est considérablement renouvelé dans la saison 6. La trame de fond principal de la saison 6 s'est déplacée de la Bretagne à Rome et l'habillage musical ainsi que le générique ont été retravaillés.

Il est également important de préciser que généralement le genre conditionne la forme. Par exemple les séries policières ou dramatiques, américaines et européennes, ne sont jamais des formats vingt-six minutes ou shortcom Cette durée est réservée aux sitcoms telles que Friends, Hélène et les garçons mais également à certains soap3 comme Plus belle la vie, aux intrigues plus légères et évidemment à Un gars, une fille, SDM ou CC.

Ainsi Kaamelott entre parfaitement dans cette logique. Il s'agit d'abord d'un format court n'ayant d'autre prétention que de faire rire le téléspectateur et évolue à un format cinquante deux minutes (américain) à mesure que son ambition dramatique grandit.

Pour mener à bien ce travail, nous allons étudier la télévision qui est le support principal de Kaamelott et plus particulièrement les séries télévisées. Ensuite nous chercherons à déterminer si Kaamelott appartient au registre de la parodie ainsi que ces liens avec la LA. Enfin nous analyserons une sélection d'épisode traitant tous de sujet postérieur au Moyen Age afin de caractériser une autre spécificité de la série. Toutes ces étapes vont nous permettre de vérifier notre hypothèse de départ.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 9

3 Cette désignation provient du fait que les premiers feuilletons radiophoniques américains étaient produits1 et sponsorisés2 par des fabricants de savons et autres produits d'hygiène comme Procter & Gamble, Colgate-Palmolive et Lever Brothers. Aux États-Unis, les premiers soap operas étaient radiodiffusés en semaine, à une heure où ils pouvaient être suivis par les femmes au foyer ; ces feuilletons sont donc conçus à l'origine pour une audience majoritairement féminine.

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Kaamelott : Du

programme court

humoristique au

format américain

dramatique.

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1. Le phénomène des programmes courts humoristiques.

Les programmes courts sont apparus sur les chaines de télévision française depuis bientôt quinze ans. Il en existe principalement deux sortes : les promotionnels et les fictionnels, généralement humoristiques.

Les promotionnels sont des programmes de type « du coté de chez vous » financé par une marque, généralement une grande enseigne et, dans ce cas précis, les magasins d'outillages Leroy Merlin. Nous pouvions y voir, sur TF1 juste après le journal de 20h, des particuliers présentant leur maison qui était originale de par leur conception ou leur décoration. Auchan, Leclerc, mais également le ministère de l'intérieur pour les campagnes de prévention de la Sécurité Routière adopteront ce format avec plus ou moins de succès.

Mais ce qui nous intéresse dans ce travail d'étude ce sont les fictionnels appelés aussi shortcom. « Un gars, une fille » est la première du genre à avoir connu un immense succès public et critique , diffusée sur France2 avant le journal de 20h entre le 11 octobre 1999 et le 16 octobre 2003.

Suivront ensuite les succès de Caméra Café, Kaamelott ou encore Scènes de ménages, toutes diffusées sur M6 entre 2001 et 2012 (Scènes de ménages est en cours de diffusion mais aussi de tournage). D'autres connurent moins de succès comme Que du bonheur, Laverie de famille, Code barge diffusée sur TF1 ou encore La bande dehouf sur France2 et Caméra Café : la boite du dessus sur M6.

Nous pouvons comparer tous ces programmes mais il existe des aspects pertinents pour les distinguer.

Le premier en est l'origine. Pour Kaamelott et Caméra Café il s'agit de programmes originaux français alors que Un gars, une fille est une oeuvre venant du Québec et Scènes de ménages est la libre adaptation d'une série espagnole4. De plus Kaamelott et Caméra Café sont tous les deux produits par la société de production CALT à qui l'on doit également Off prime et Héro Corp. Ce sont deux séries créées par Simon Astier, le frère du créateur de Kaamelott.

Caméra Café est le projet de deux comédiens déjà célèbres avant la série, Bruno Solo (La vérité si je mens, Jet Set au cinéma) et Yvan Le Bolloch, animateur de télévision qui a découvert Bruno Solo., dans le public d'une de ses émissions. Ce sont les acteurs principaux de la série mais également les plus connus du grand public, ce qui est un critère important pour M6. En effet leur notoriété réduit le risque d'échec.

Le projet Kaamelott naît lorsqu'Alexandre Astier réalise en 2003 le court métrage DIES IRAE. Ce court-métrage pose les bases de la future série de M6. Nous y retrouvons la plupart

4 Escenas de Matrimonio

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des personnages, un des décors principaux (la salle de la Table Ronde) et le ton caustique qui caractérise la série. DIES IRAE (jour de colère), est récompensé par le prix du public au Festival Off-Court. A Trouville en 2003. Le titre évoque la liturgie catholique ainsi qu'une oeuvre de Mozart. M6 tombe alors sous le charme de ce projet et commande six épisodes pilote à Astier.

Le Livre I sera diffusée en janvier 2005.

Il s'agit donc d'une commande à la suite du visionnage par M6 d'un court métrage réalisé et écrit par un artiste inconnu du grand public. Le risque est donc plus important pour la chaine même si Kaamelott profite du fait de prendre la suite de Caméra Café qui s'était installé à cet horaire, 20h05.

Un deuxième critère différenciateur est le diffuseur. Nous l'avons vu hormis Un gars, une fille, toutes les shortcoms à succès sont diffusées sur M6. D'ailleurs après avoir été programmée sur France2, nous avons pu voir Un gars, une fille sur France4, Teva (groupe M6) et aujourd'hui sur... M6 ! Il est même intéressant de souligner qu' « Un gars, une fille » avait été proposé à M6 en premier5.

Il existe également des différences au niveau de la structure. Si certaines séries peuvent se suivre dans le désordre grâce à des intrigues indépendantes (Scènes de ménage, Un gars, une fille, Caméra Café), ce n'est pas toujours le cas pour la série Kaamelott. Même si les saisons 1 et 2 semblent constituées d'épisodes n'ayant aucun lien d'un point de vue narratif, quelques indices nous montrent le contraire (évocation d'événement s'étant produit dans des épisodes passés, personnage effectuant leur retour, etc)

Le nombre de comédiens présents à l'écran et leur relation marquent aussi la différence entre ces programmes. Pour Caméra Café et Kaamelott nous constatons la présence d'une dizaine de personnages se connaissant tous et ayant tous un lien relationnel (employeur- subordonnée, couple, rival)

Scènes de ménages ou Un gars, une fille utilisent un nombre de personnages plus restreints. Dans Un gars, une fille, seuls Jean et Alexandra sont à l'écran, les autres personnages sont hors champs. Concernant Scènes de ménages, nous comptons huit comédiens (quatre couples) mais l'originalité réside dans le fait qu'ils ne se connaissent pas, ils ignorent jusqu'à l'existence des autres. Mais contrairement à Un gars, une fille, nous voyons régulièrement d'autres comédiens qui apparaissent plus ou moins fréquemment (amis, parents, voisins).

5 Pellerin (Marc), Viot (François), M6 story, la saga de « la chaîne en trop », Flamarion, 2012

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Enfin Kaamelott se différencie d'un point de vue filmique. Lorsque Caméra Café, Un Gars, une fille ou Scènes de ménages sont en plan fixe pour tout l'épisode, Kaamelott est la seule shortcom a utilisé plusieurs plans et même plusieurs décors pour le même épisode.

2. La télévision, objet culturel

Pendant plusieurs décennies télévision pouvait se concevoir de deux manières : offrir aux téléspectateurs ce qui est susceptible de les intéresser. C'est généralement ce que fait la télévision privée (TF1, M6) afin de séduire le plus grand nombre. Ou alors on estime que la télévision est un outil permettant de développer la culture et qui permet de faire découvrir de nouveaux horizons aux masses6. C'est ce qui est censé être la mission du service public et le choix de quelques chaînes comme ARTE. Cependant, depuis les années 1990, le service public se préoccupe également de l'audience et propose des programmes moins ambitieux qu'auparavant. De même nous pouvons regarder des programmes de qualité sur des chaines privés, il ne s'agit là que d'une tendance générale et non un schéma binaire. L'objectif d'une chaîne privée étant d'engranger des recettes publicitaires, elle doit donc proposer des programmes fédérateurs et ne peut donc pas se permettre de prendre des risques sur sa programmation. Nous aboutissons donc à des programmes consensuels pourvus de personnages stéréotypés, des scénarios convenus et des sujets pouvant plaire à tous et évitant de heurter certaines couches de la population ou certaines communautés.

Il est également difficile de parler d'Histoire à la télévision ou de diffuser du théâtre, des concerts, bref d'imposer une certaine qualité culturelle. Le risque pour le diffuseur est de paraître élitiste. C'est pourquoi les rares pièces de théâtre diffusé à une heure de grande écoute sont des vaudevilles ou des pièces de boulevards. Comme pour les fictions, les décideurs choisissent d'augmenter les chances de réaliser une large audience.

Cette question de la qualité et du respect de la culture existe depuis la naissance de la télévision4 et continue de diviser professionnel de la télévision, de la culture et téléspectateurs avertis.

Bien que, la tâche semble ardue pour les diffuseurs et que la prise de risque soit nécessaire, il est tout de même possible de produire des programmes de qualité à la télévision (nous

6 Le sociologue Michel Crozier traitait déjà cette question en 1966 dans son article Télévision et développement culturel et Thomas Yadan évoque à nouveau ce sujet en septembre 2006 pour le site Evene.fr

http://www.evene.fr/celebre/actualite/culture-television-audimat-arte-bourdieu-divertissement-455.php

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entendons ici, qualité ayant une valeur culturelle, la culture légitime telle que la conceptualise Pierre Bourdieu en 1979 dans La distinction).

3. Les séries, un atout majeur pour la télévision du XXIème siècle.

Longtemps considéré comme un art mineur, la télévision est en passe de prendre le dessus sur le cinéma grâce à ses productions et qui relèvent en premier lieu de la fiction.

Pendant des décennies les principales chaînes américaines (network) et françaises misaient sur les programmes de variétés, le sport ou encore le cinéma pour renforcer leurs audiences. Désormais la recette du succès est la diffusion de séries, principalement américaines.

Ainsi entre le 3 janvier 2011 et le 1er janvier 2012, 72 des cent meilleures audiences en France étaient réalisés par cinq séries américaines diffusés sur TF17. Il s'agit soit de fiction basées sur des intrigues policières (Mentalist, Les Experts, Esprits criminels) soit médicales (Dr House, Grey's Anatomy, Urgences)

La fiction française ne représente que quatre petites places et il ne s'agit que de comédies familiales à contrario des séries US destinés à un public plus avertis ou adultes. En effet nous pouvons visionner dans ces productions des scènes de crimes, d'autopsies, d'opérations chirurgicales, entendre des dialogues plus crus, bien qu'édulcorés à la traduction.

Les succès planétaires des différentes déclinaisons de CSI (en France Les Experts), de Lost, 24h Chrono et aujourd'hui Terra Nova ou encore Mad Men le prouvent. Toutes ces séries sont unanimement encensées par la critique et figurent désormais dans les pages de magazines culturels tels que Télérama ou encore Les Inrockuptibles.

Ces séries bénéficient toutes de signatures cinématographiques, que ce soit les producteurs (Steven Spielberg, Quentin Tarantino, Bryan Singer, Martin Scorsese...) ou les acteurs (Kiefer Sutherland, Laurence Fishburne). Et désormais les séries TV sont des tremplins vers le cinéma. Ainsi J. J. Abrahams, producteur des séries Lost, Heroes ou encore Alias, est devenu un des réalisateurs les plus prisés d'Hollywood, notamment en adaptant les séries Star Trek et Mission Impossible pour le grand écran.

Elles traitent de sujets réservés jusqu'ici au cinéma tels que la drogue, l'homosexualité, la mafia, la mort, etc.

La situation en France était encore différente au début des années 2000. Les héros étaient soit des familles sympathiques usant des ficelles du Vaudeville telles que l'adultère, le quiproquo, les problèmes d'héritage, soit des policiers intègres, père ou mère de famille, se remettant très

7 TF1 réalise sur cette période 99 des 100 meilleures audiences. Source Médiamétrie

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 15

rarement en question ainsi que leur profession. Par ailleurs, ils n'étaient que trop rarement crédibles principalement à cause de leur ancienneté, par exemple Navarro et Cordier ont passé la soixantaine depuis plus de vingt ans8 ! Tous ces héros sont politiquement corrects, intègres (Joséphine ange gardien, L'instit) et n'emploient que très rarement un vocabulaire familier. Tous les héros de ces séries sont déjà connus du grand public qu'ils s'agissent des sitcoms françaises portés par des figures du théâtre et de l'humour comme Rosy Varte, Jean Marc Thibaud, Marthe Vilalonga pour la série à succès d'Antenne2 Maguy ou encore Gérard Rinaldi l'ancien leader de la troupe comique Les Charlots et héros de la série phare des années quatre vingt de TF1 intitulée Marc et Sophie.

Seules les sitcoms de TF1 produites par AB Production comme Hélène et les garçons, Le miel et les abeilles pour ne citer que les plus connues mettaient en scène une majorité d'acteurs totalement inconnus du grand public. Ce fut également le cas en 2004 sur France3 avec le feuilleton Plus belle la vie.

Les choses changent dans les années 2000 avec la concurrence des séries américaines citées précédemment. Elles vont mettre en porte à faux les fictions françaises et les obliger à se remettre en question. Ainsi, TF1 produira des épisodes de ses séries phares Julie Lescaut et Brigade Navarro dans un format 52 minutes « à l'américaine » contre 90 minutes auparavant. La première évolution notoire survient avec Caméra Café qui présente sous un jour critique le monde de l'entreprise et impose ses dialogues dans la veine de Michel Audiard9 sur M6 à 20h05 en 2001.

4. M6 et les programmes courts.

A cette époque M6 est encore « la petite chaîne qui monte » et doit se démarquer de la concurrence en prenant des risques. C'est ainsi qu'en 2001, elle bouleverse le PAF en important l'émission de téléréalité Big Brother, rebaptisée pour le marché français Loft Story. La chaîne poursuit cette stratégie de contre-programmation en diffusant des séries familiales

8

Roger Hanin incarnera un commissaire divisionnaire dans la série Brigade Navarro à 83 ans. Pierre Mondy jouera le Commissaire Cordier jusqu'en 2007 à l'âge de 82 ans. Idem pour Yves Rénier, 63 ans pour le dernier épisode du Commissaire Moulin. La départ en retraite, avant 2010, pour les services actifs étaient alors fixées à 55 ans. http://www.retraite.net/retraite-police-gendarmerie,d31-6.html

9 Scénariste, dialoguiste, réalisateur et écrivain, on lui doit notamment les dialogues des films cultes Les Tontons flingueurs, Les Barbouzes ou encore 100 000 dollars au soleil.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 16

américaines (Cosby Show, Notre Belle Famille, Une nounou d'enfer) en face de la grande messe du 20h et du JT de 13h, et en étant la chaîne « 0% foot » lors de la coupe du coupe du monde de football en France en 1998. L'information sur M6, jusqu'en décembre 2005, c'est le Six minutes un format court et tout en image diffusé à 12h54 et 19h54, proposant l'essentiel de l'actualité juste avant les grands journaux télévisés de TF1 et France2.

C'est toujours dans cette politique de contre-programmation que M6 diffuse des programmes courts et humoristiques tels que Caméra Café, Kaamelott, Un gars, une fille (pionnier du programme court humoristique en France diffusé pour la première fois sur France2 en 1999). Depuis 2009 Scènes de ménage a pris le relais à la suite des rendez-vous d'informations de la chaîne. M6 a jugé bon de remplacer le six minutes et de se pourvoir de journaux télévisés, aux formats plus traditionnels, pour atteindre les nouveaux objectifs de la chaîne, aussi bien en terme d'audience que d'image. Caméra Café a également profité de l'engouement suscité par Loft Story diffusé juste avant le six minutes pour s'imposer. Cependant, , Kaamelott, est le véritable déclencheur de ce renouveau de la fiction française.

C'est effectivement la première fois en France que nous avons pu voir une série comique d'une telle ambition, aussi bien sur le fond, la légende du Roi Arthur, que sur la forme. Kaamelott se reconnaît et se démarque rapidement par sa multitude de décors, ses costumes d'époques, son importante distribution ou encore sa figuration et qui plus est sur une chaîne privée généraliste.

Canal+ emboîte alors le pas à M6 et commence à produire des créations originales telles que Braquo, reporters, Engrenages, Platanes, Maisons closes, Pigalle la nuit, Hard, Carlos, Mafiosa, Kaboul Kitchen, etc. s'essayant avec succès à la comédie, au drame, au policier mais s'adressant rarement à un public familial.

France2 choisi une voie différente en adaptant des classiques de la littérature française (Balzac, Maupassant) ou anglaise (Agatha Christie) et la série familiale Fais pas çi, Fais pas ça. France3 impose sa série Un village français se déroulant pendant la Seconde Guerre Mondiale, une saison correspondant à une année.

Pour toutes ces productions nous pouvons compter au moins une tête d'affiche au générique. Citons par exemple les populaires acteurs Antoine Duléry, Isabelle Gélinas, Bruno Salomone, Gilbert Melki, Jean Hugues Anglade ou encore Eric Judor10. Alors que Kaamelott est

10 Antoine Duléry (Petits meurtres entre amis) a joué dans de grands succès populaire au cinéma (Camping, Jean Philippe...).Isabelle Gelinas (Fais pas ci fais pas ça) incarne l'amie de Jean Pierre Bacri dans Didier d'Alain Chabat (également présent dans Kaamelott).Gilbert Melki (Kaboul Kitchen) est patrick Abitbol dans la trilogie La vérité si je mens (qui cumule plus de 10 millions d'entrées).Bruno Salomone (Fais pas ci fais pas ça) était Caius dans Kaamelott et à

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 17

composé essentiellement de comédiens inconnus du grand public à l'exception du Maître d'Arme (Christiant Bujeau), célèbre pour son rôle de Jean Pierre dans Les Visiteurs. Cependant le succès de Kaamelott nous permet de voir aujourd'hui de nombreux comédiens de la série dans d'autres productions. Nous pouvons prendre pour exemple la série Off Prime diffusé en mai 2007 sur M6. C'est une création de Simon Astier dans laquelle nous retrouvons une partie du casting de Kaamelott soit épisodiquement, soit de manière récurrente. Simon Astier est également le créateur de la série Hero Corps, diffusée sur France4 et Comédie, en octobre 2008.

5. Evolution de Kamelott.

Kaamelott est la seule série française dite shortcom à être passée au format américain, c'est-à-dire des épisodes d'une duréée de cinquante deux minutes(saison 5 et 6). Le seul exemple d'évolution de format est le soap marseillais Plus belle la vie. En effet France3 produit au rythme de trois par an des épisodes au format américain et les diffusent en prime time11.Les épisodes quotidiens diffusés du lundi au vendredi depuis 2004 face au JT durent 26 minutes.

Nous avons vu précédemment que les shortcoms sont soit destinés à la contre programmation face aux grands rendez-vous d'informations que sont les 20h de TF1 et France2, soit des produits d'appels pour ces JT ou le programme de la soirée, le prime time.

La mutation opérée par Kaamelott peut être expliquée de deux façons. D'abord il existe une volonté de l'auteur de faire évoluer sa série. Nous avons vu que le comique est souvent utilisé dans des formats plus courts que le dramatique. Or l'évolution de Kaamelott est clairement dramatique à partir de la saison 4 et son application est réel dans la saison 5, saison du changement de format.

Kaamelott est d'abord un court métrage puis une shortcom avec l'apport financier de M6 et devient une série au format américain. C'est donc le succès critique et surtout public qui permet cette mutation de la série et incite M6 à suivre Astier dans cette voie. Ce succès ne

l'affiche de Brice de Nice avec Jean Dujardin (Un gars, une fille) .Jean Hugues Anglade (Braquo) est le protagoniste principal de 37°2 le matin de jean jacques Beneix, Eric Judor est célèbre pour son du duo comique avec Ramzy Bédia et pour avoir joué dans la sitcom H (Canal+).

11 Anglicisme. Terme employé par les professionnels de la télévision et de la publicité pour désigner la période de plus forte audience dans la journée. En radio, il s'agit de la tranche 7h-9h

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sera pas démenti avec ce nouveau format12. La série passe du statut de produit d'appel pour inciter le téléspectateur à rester sur M6 pour le prime time et dans un deuxième temps devient prime time elle-même.

M6 a déjà employé cette méthode avec CC et continue avec SDM13. Mais d'autres chaînes consacrent désormais leur prime time aux shortcoms. Nous pouvons citer Teva (groupe M6) ou France 4 et les soirées Un Gars, une fille ou Comédie (groupe Canal+) avec Les Blondes (shortcom d'animation) ou encore Canal+ et la série phénomène de la rentrée Bref. Astier et jean Christophe Hembert apparaissent dans un épisode de la deuxième saison dans lequel ils font référence à leur personnage d'Arthur et Karadoc.14

M6 n'est pas seulement une chaîne mais un groupe de télévision auquel appartient entre autres W9, et Paris première. Sur ces deux chaînes nous pouvons voir régulièrement des rediffusions de CC et Kaamelott, soit par salve d'épisodes en cours de journée ou bien lors de soirées spéciales.

6. La distribution et ses spécificités.

a) Livre I à IV :

La distribution de Kaamelott peut être divisé en deux catégories, les acteurs inconnus du grand public et ceux ayant déjà une certaine notoriété.

AA n'aime pas les castings et recrute donc des acteurs qu'il connaît bien et si possible avec lesquels il a déjà travaillé. Le père, la mère la belle-mère et le frère d'AA figurent dans la distribution de la série. Ce sont avant tout d'excellents acteurs. Les personnages de Merlin, Perceval, Karadoc entres autres sont interprétés par des acteurs qu'il connaît depuis ses débuts dans la région lyonnaise. Le point commun entre tous ces acteurs et le fait qu'ils soient parmi les meilleurs dans leur domaine.

12 M6 fera sa meilleure audience 2009 pour un samedi soir avec la diffusion le 18 octobre des trois premiers épisodes de la saison 6 de Kaamelott.

http://www.allocine.fr/article/fichearticle_gen_carticle=18486567.html

13 Devant l'immense succès de Scènes de Ménages, M6 a consacré la soirée du 31 décembre 2011 à la série en diffusant un best of.

http://tvmag.lefigaro.fr/programme-tv/fiche/m6/divertissement/50235658/soiree-speciale-vos-meilleures-scenes-de-menages.html

14 Bref. Y a des gens qui m'énervent.

http://www.canalplus.fr/c-divertissement/pid3848-c-bref.html

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 19

Kaamelott a la particularité d'être une série qui accueille beaucoup d'acteurs déjà connus par la télévision du grand public, le temps d'un ou quelques épisodes. Nous citerons dans le désordre Bruno Solo, Yvan le Bolloc'h15, Virginie Efira, Elie Semoun, Barbara Schultz, Marcel Phillipot ou Didier Bénureau.

b) Livre V et VI

Suite au grand succès critique et publique de la série, Le Livre V voit arriver beaucoup d'invités tels Christian Clavier, Géraldine Nakache, Patrick Bouchitey, Guy Bedos ou encore Alain Chabat. Pour M6 et CALT c'est un enjeu considérable de propulser la série en prime time et ces grands noms au générique sont un immense atout pour réaliser une bonne audience.

Alain Chabat est l'un des acteurs les plus populaires du cinéma français, en particulier depuis la réalisation d'Astérix : Mission Cléopâtre qui compte plus de quinze millions d'entrée au cinéma.

Christian Clavier est l'un des acteurs français comptabilisant le plus d'entrées au cinéma et ayant joué dans des pièces de théâtre mais aussi des fictions à la télévision extrêmement populaire. Nous pouvons citer au cinéma, les deux premiers volets d'Astérix, Les Visiteurs de Jean Marie Poiré16, la trilogie Les Bronzés, au théâtre Le père noël est une ordure et La Cage aux folles et à la télévision Les Misérables (TF1) et Napoléon (France2).

Il est intéressant de préciser qu'Astier travaille actuellement sur l'adaptation en dessin animée 3D de l'album d'Astérix, Le domaine des Dieux17. Et qu'il a fait une apparition dans le film Astérix aux jeux olympiques18.Nous comprenons donc encore une fois ce besoin pour Astier de s'entourer d'acteurs gravitant autour de son univers et de ses références, qu'il s'agisse de la bande dessinée.(Astier a déjà écrit 7 tomes de la BD Kaamelott) ou de forme d'humour. René Goscinny et Albert Uderzo, les créateurs d'Astérix, sont des maitres dans l'art de l'anachronisme (Gaulle-Vingtième siècle) et de l'absurde. Ainsi, dans l'album Astérix gladiateur, certains Romains vivent dans des HLM, « habitation latine mélangée »19. Les

15 Bruno Solo et Yvan le Bolloc'h sont deux comédiens de la série Camera Café, diffusée sur M6 et produite par CALT. Kaamelott est le programme qui a succédé à Caméra café. Virginie Efira était, du temps de la première diffusion télévisée, l'animatrice vedette de M6. Elle joue également le premier rôle dans la sitcom Off Prime de Simon Astier. On retrouve dans cette série de nombreux acteurs de Kaamelott.

16 Voir le travail de M1 Kaamelott : Humour parodie et réflexion

17 http://www.commeaucinema.com/tournage/alexandre-astier-pioche-dans-le-domaine-des-dieux,189574

18 http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=18793598&cfilm=61259.html

19 Goscinny (René), Uderzo (Albert), Astérix gladiateur, p22, Dargaud, 19644

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 20

habitations à loyer modéré datent de 195420. Ou encore dans l'album Les lauriers de César21, nous pouvons lire sur le mur de la cellule des deux Gaulois « Interdit d'interdire ». Jean Yanne est l'inventeur de ce slogan « il est interdit d'interdire » lors d'une de son émission dominicale sur l'antenne de RTL au printemps 1968. Ce slogan sera repris par les étudiants lors des événements du mois de mai de la même année22. Nous verrons par la suite que le personnage d'Yvain emploie parfois un langage proche des étudiants de mai 68.

Le Livre VI se situant 15 ans avant Kaamelott, 80% du casting est renouvelé et est composé d'encore plus d'acteurs connus parmi lesquels Pierre Mondy metteur en scène de La cage au folles et héros de la célèbre trilogie La 7ème compagnie, Patrick Chesnais, Manu Payet.

Astier retrouvera Manu Payet en 2011 dans le film parodique Philibert, capitaine puceau. Nous retrouvons parmi les personnages du casting original de la série uniquement Arthur dans tous les épisodes du Livre VI.

Pour clore ce chapitre il est intéressant de préciser qu'AA utilise la technique du flashback sur une saison pour raconter la genèse de son histoire. Dans l'album Les lauriers de César23, Goscinny utilise le même procédé pendant cinq pages pour expliquer aux lecteurs pourquoi Astérix et Obélix sont à Rome. Nous apprenons donc que l'intrigue démarre à Lutèce.Le précurseur de ce procédé n'est autre qu'Homère dans L'Odyssée.

7. L'intrigue.

A l'exception du Livre VI qui évoque la genèse du Roi Arthur, Kaamelott se déroule de manière chronologique. En effet, ce dernier se situe 15 ans avant le Livre I et en grande partie à Rome. Le casting est donc très différent de celui des Livres I à V.

Soulignons juste qu'Arthur est propulsé par le sénateur romain Salustius. Ce dernier a eu vent de la légende de l'enfant choisi par les dieux pour retirer Excalibur de son rocher et souhaite ainsi contrôler les différents chefs Bretons. Salustius fait venir à Rome Merlin pour que celui-ci rappelle à Arthur son enfance en Bretagne. Arthur se retourne contre Salustius et dirige la Bretagne sans les Romains. Enfin notons qu'Arthur avant de partir en Bretagne épouse une Romaine de haut rang, Aconia, et lui fait la promesse de ne jamais toucher à Guenièvre qu'il épouse pour raisons diplomatiques, étant fille de Léodagan, nouveau roi de Carmélide.

20 http://www.union-habitat.org/les-hlm-de-%C3%A0-z/l%E2%80%99histoire-des-hlm/il-%C3%A9tait-une-fois-le-logement-social

21 Goscinny (René), Uderzo (Albert), Les lauriers de César, pp6-11, Dargaud, 1972

22 http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Yanne

23 Goscinny (René), Uderzo (Albert), Les lauriers de César, pp6-11, Dargaud, 1972

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 21

L'action de Kaamelott se situe à la chute de l'Empire romain d'Occident. Le roi Arthur a pour mission de fédérer les peuples bretons afin d'en faire une nation unie et indivisible. Arthur tient son autorité d'Excalibur, son épée magique. « Celui qui retira l'épée du rocher deviendra maitre de tout le royaume de Logres. » Arthur, devenu roi, fait bâtir la forteresse de Kaamelott24 et cherche des chevaliers à travers toute le royaume de Logres pour accomplir la mission que Dieu lui a confiée : conquérir le Saint Graal25. Une fois les chevaliers trouvés, Arthur fit construire une table ronde afin qu'ils puissent se réunir autour pour discuter des affaires du royaume et surtout de la quête du Graal.

Les Livres I, II et III servent surtout à installer l'ambiance, à nous familiariser avec les lieux et les personnages récurrents. On y découvre alors la mauvaise foi et la bêtise de la plupart des protagonistes et un pauvre roi essayant de diriger le tout, entre une mère castratrice et une femme peu attirante et guère dégourdie pour espérer l'arrivée d'un héritier.

Le premier bouleversement apparaît à la fin du Livre II. Lancelot, alors second du roi supporte de moins en moins la bêtise et l'incapacité de ses congénères à avancer dans la quête du Graal et reproche à Arthur sa clémence, sa bonté, voire son laxisme. Lancelot et Arthur en viennent alors à se disputer vivement et, après un séjour forcé de repos pour Lancelot, conviennent « d'un mi-temps » pour que ce dernier puisse redevenir un chevalier errant et solitaire, protecteur de la veuve et de l'orphelin.

A partir du Livre III, la narration change légèrement et les épisodes deviennent moins indépendants les uns des autres. Cependant, on peut encore les suivre dans le désordre sans que cela perturbe le plaisir de spectateur.

Le tournant intervient à la fin du Livre III. Arthur a une liaison avec Mevanwi, la femme de Karadoc. Or il est interdit pour un chevalier de convoiter la femme d'un autre chevalier ou bien l'un des deux devra mourir dans un duel.

Lancelot, quant à lui, est amoureux dès le début de la reine Guenièvre. Le chevalier Bohort, cousin de Lancelot, porte un message d'amour de Lancelot à Guenièvre et celle-ci part rejoindre Lancelot dans son « futur camp » lorsqu'elle apprend la liaison d'Arthur et Mevanwi. Le Livre IV démarre avec une Bretagne sans reine et Guenièvre chez son amant, ennemi d'Arthur, habitant dans un camp dans la forêt.

Lorsque Karadoc découvre que sa femme le trompe, Arthur cherche un subterfuge pour éviter le duel prescrit par la Loi. Il trouve donc une ancienne loi de Vannes (région d'origine de

24 CHABBERT, Christophe, Aux sources de Kaamelott, acte 1 : les moeurs et les femmes,

Livre II, 28 septembre 2005, M6 Vidéo

25 Le Graal est le récipient à l'aide duquel Joseph d'Arimathie aurait recueilli le sang du Christ lors de sa crucifixion.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 22

Karadoc et Mevanwi) autorisant l'échange d'épouses. Naïvement, Karadoc accepte d'échanger Mevanwi avec Guenièvre partie vivre avec Lancelot !

Cette situation déplaît aux dieux qui bannissent du Ciel la Dame du Lac, protectrice et guide d'Arthur dans la quête du Graal.Afin d'apaiser la colère des dieux (et peut être aussi de sa belle-famille, pas franchement ravie de cette échange d'épouse), Arthur va rechercher Guenièvre chez Lancelot, qu'il piège en lui donnant un faux rendez-vous. Guenièvre commençait à se lasser, de la vie en forêt, sans « gens » à son service. A son retour, Lancelot découvre son camp dévasté et sa belle envolée. Dès lors, il ne sera plus jamais le même. L'échange d'épouses est donc annulé et tout semble rentrer dans l'ordre.

Uther Pendragon est bien le père d'Arthur mais, selon la légende, la conception d'Arthur n'a rien de naturelle. Uther Pendragon est amoureux d'Ygerne de Tintagel, femme du Duc de Tintagel et déjà mère d'Anna. Pour séduire sa belle, Uther va demander à Merlin, son enchanteur, de lui concocter une potion de polymorphie. Cette potion permet de prendre l'apparence d'un autre. Merlin fit cette potion et Uther peut donc se faire passer pour le Duc de Tintagel, meilleur ami d'Uther, et séduire Ygerne. De cette « union » nait Arthur, héritier d'Uther Pendragon et du royaume de Bretagne. Merlin est alors chargé de veiller sur Arthur. Merlin n'est pas non plus né de façon naturelle. En effet, sa mère est une jeune vierge pieuse et celle-ci fut visitée, une nuit où sa ferveur s'était un peu relâchée, par un démon. Sa mère devint alors une paria dans son village de Galles, mais sa sincérité pour se repentir lui sauva la vie. Elle fut alors veillée par les deux femmes jugées les plus pieuses du village jusqu'à son accouchement. Merlin fut ensuite élevé dans l'amour de Dieu chrétien ce qui contrebalance avec ses origines démoniaques. Sur ce point la série est incohérente puisque Merlin révèle à Lancelot avoir 884 ans. Il serait donc né avant la naissance de Jésus Christ26.

Cependant le fait que Merlin ait des pouvoirs surnaturels montre tout le paradoxe de ce personnage mi ange mi démon. Dans le sens christianisme et paganisme.

Nous retrouvons ce paradoxe dans la série puisque les chevaliers sont à la quête du Graal, objet chrétien, mais sur l'ordre des Dieux qui sont la preuve de ce paganisme. Il y eut une longue période transitoire dans la réalité entre le polythéisme et le monothéisme chrétien.

Dans Kaamelott, les naissances « surnaturelles » d'Arthur et Merlin sont quelquefois évoquées notamment dans « Les défis de Merlin » et « Polymorphie ».

26 Kaamelott, Livre II, épisode 66, Merlin l'archaïque

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 23

A noter que Perceval a également des origines étranges. Il a été trouvé nourrisson par ses parents, adoptifs par le fait, dans un cercle de culture. Ce fait est évoqué dans l'épisode du Livre VI, « Lacrimosa ».

La quête du Graal semble être l'axe majeur de la série mais son évolution nous démontre finalement que cette quête n'est finalement qu'un prétexte et que la véritable intrigue principale de Kaamelott concerne Arthur lui-même. La première partie de la série nous montre un Arthur roi. La cinquième saison, Arthur renonce à la couronne et tombe progressivement dans la dépression. Enfin la sixième saison retrace son ascension politique.

8. La communauté de fans.

C'est un phénomène qui est apparu au XXème avec l'essor de la société de consommation et de la culture de masse. Des millions de personnes ont ressenti le besoin de prolonger l'expérience et de partager leurs impressions sur leur série, film ou encore artiste favori à travers des fans club ou actuellement de forum ou des réseaux sociaux sur Internet.

C'est aux Etats Unis que cette pratique est né. L'arrivée de produits culturels de Science fiction telles que Star Wars ou encore Star Trek à la télévision et au cinéma et même auparavant les Comics Books et les héros Marvel de Stan Lee (Spiderman, X-Men, Superman, Hulk...) ont largement contribué au succès des communautés.

Au 21ème siècle nous avons constaté un enthousiasme inégalé pour les séries télévisées. Ce sont désormais les séries qui assurent les meilleures audiences des chaînes de télévisions, qui sont les plus téléchargés sur internet, les plus vendus en DVD et sont sont portés sur grand écran pour les plus populaires d'entre elles. Citons des séries cultes comme Mission Impossible ayant déjà été adaptés quatre fois au cinéma, Ma sorcière bien aimée, Le Saint, Drôles de dames, Star Trek ou encore Miami Vice. Notons que c'est J. J. Abrahams créateur de série télévisées (Lost, Alias, Heroes) qui a réalisé la dernière version de Star Trek27.

Les séries ont un avantage considérable sur le cinéma qui est de pouvoir fidéliser le spectateur. Il est en effet plus aisé de développer la personnalité des personnages sur 24 épisodes de 50 voire 25 minutes que sur 2h en moyenne pour un film. Le spectateur a donc tendance à s'attacher aux personnages ou à les détester mais ne reste pas indifférents. Il faut donc suivre une série pour savoir ce qu'il va arriver à notre personnage préféré. La spéculation entre deux épisodes, généralement une semaine, va alors bon train. C'est dans ce cadre que la

27 http://www.allocine.fr/personne/filmographie_gen_cpersonne=41000.html

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 24

communauté de fan est la plus intéressante. Le fan communique son avis et ses envies sur la série et peut ainsi savoir si ceux-ci sont partagés par les autres membres de la communauté.

a) Son pouvoir d'influence.

C'est une communauté désormais extrêmement influente qui a un réel pouvoir sur la vie ou la mort des séries. Par exemple, la mort d'un personnage peut provoquer un tel mécontentement dans la communauté que les producteurs peuvent imposer aux scénaristes de réintégrer le héros dans la série. L'exemple le plus célèbre est celui de la série Dallas ou les producteurs ont du faire croire que le personnage de Bobby Ewing avait rêvé pendant un an alors que ce dernier était mort au début de la saison. Même si la réintégration du personnage a été une bonne nouvelle pour le public celui-ci a tout de même jugé l'astuce scénaristique ridicule.

Pour l'instant Astier n'a pas eu à utiliser ce genre de ficelles : le casting de Kaamelott étant toujours le même (une prouesse pour une série de six saisons) et on ne compte à ce jour aucun personnage important mort à l'exception de la saison 6 particulièrement sanglante) ou même disparu. De plus Alexandre Astier a déjà vivement exprimé son refus de se laisser influencer, autant par les fans de la série que par le diffuseur ou les médias, dans l'écriture de Kaamelott. Ainsi lorsque certains magazine comme le mensuel Tétu, destiné à un public majoritairement homosexuel, a décrit le personnage de Bohort comme la figure du gay, Astier a décidé d'écrire un épisode levant toute ambiguïté dans lequel nous pouvons voir la femme de Bohort28. Cependant en agissant de la sorte nous pouvons donc affirmer qu'il s'est laissé influencer par le magazine Tétu.

b) Hypnoweb.

Hypnoweb est un site internet regroupant les communautés de fans de dizaines de séries en cours de diffusion ou non. Parmi celles ci nous retrouvons évidemment Kaamelott, ainsi que quelques autres séries françaises (Caméra Café, Off Prime de Simon Astier diffusés sur M6, Engrenages et Braquo qui sont deux créations originales de Canal +, Plus belle la vie ou Sous le soleil qui est une série sentimental ayant connu un grand succès sur TF1).

Pour appartenir à une ou plusieurs communauté (généralement les fans d'une série le sont également de plusieurs) il est conseillé de se créer un compte pour profiter pleinement de cet espace. Dans la partie consacrée à Kaamelott, nous avons accès à de très nombreuses option. Il est ainsi possible de visionner les épisodes, de lire un résumé bref ou long de et même

28 Kaamelott, Livre III, épisode 55 , Au bonheur des dames.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 25

l'intégralité des dialogues de l'épisode. Il est également possible de débattre de la série (son avenir, le rôle d'un personnage, la qualité d'un épisode, l'actualité des comédiens) et de contribuer en proposant son propre épisode ou ce que l'on appelle un fan art (dessin, parodie, chansons en lien avec la série).

L'actualité des comédiens est un aspect très important pour les fans et très avantageux pour les comédiens. En effet, un fan de Kaamelott a tendance à suivre les acteurs en dehors de la série puisque le fan a un a priori favorable sur l'acteur. Pour l'acteur c'est l'assurance d'avoir d'avoir un public déjà acquis pour ses projets hors Kaamelott. Il existe de nombreux sites relayant l'actualité de la communauté Kaamelott (Astier and co, On en a gros.etc).

Les dialogues des épisodes ont été réalisés et mis en ligne par des fans de Kaamelott. Il s'agit donc d'une version légèrement différente des manuscrits édités chez Télémaque. Le mode de saisie est différent puisqu'il s'agit d'une transcription des épisodes. Nous constatons alors des différences flagrantes d"un point de vue stylistique entre le forum et le manuscrit (« n' » sur le forum au lieu « de ne » dans le manuscrit ou « f'rais » à la place de « ferais »). Cela a pour conséquence de dynamiser le texte et de se rapprocher à la sensation vécue en visualisant la série. On se rapproche d'avantages du style télévisuel.

Alexandre Astier déplore le manque de rigueur des internautes au cours d'un entretien que nous pouvons lire dans le recueil des épisodes du Livre I. Il explique que la métrique est très importante pour lui et pour les comédiens et qu'il ne peut pas éviter certaines élisions. Par exemple, il écrit « vous avez pas le temps » pour éviter que le comédien dise « vous n'avez pas le temps » mais en revanche il écrira « on n'a pas le temps » et non pas « on a pas le temps ». L'internaute à tendance à choisir la faciliter et donc la deuxième solution. AA précise « je pars quand même de la phrase française clean. Ce qui n'est pas le cas de ceux qui ont relevé les textes sur Internet »29.

C'est pourquoi après mure réflexion, nous pouvons lire dans ce mémoire la version extraite du site internet pour les épisodes diffusés sur celui-ci. Bien évidemment les quelques fautes ou coquilles rencontrées sur le site sont ici corrigées et la vérification avec la version papier est systématique afin d'éviter de grossières erreurs qu'auraient pu commettre les internautes ayant transcrit le texte.

29 Astier (Alexandre), Kaamelott livre 1, texte intégral, p16, éd. Télémaque, 2009, Paris

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 26

Kaamelott :

De la Légende

Arthurienne à

Michel Audiard,

une série

construite sur

plusieurs niveaux

d'intertextualité.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 27

La Parodie de Daniel Sangsue30 recense, de façon chronologique, et critique les différentes définitions de la parodie et des notions qui en sont proches comme le pastiche ou le burlesque. Ces différentes approches de la parodie vont nous permettre de déterminer si Kaamelott en est une, et sinon, comment peut-on définir cette oeuvre.

La parodie a longtemps été considéré comme un sous genre, comme une régression ou une vision péjorative du texte. Il nous a fallu attendre la fin du XIXème et le début du XXème siècle avec le Formalisme Russe pour que la parodie soit considérée comme enrichissante

Tout d'abord parodie est emprunté au grec et signifie «imitation bouffonne d'un morceau poétique» (dérivé de «auteur de parodies», de «à côté de» et de «chant», ou ode)31

Nous pouvons également évoquer la racine latine parodia, « para » signifie plusieurs et « oda » signifie chant. Genette32 y voit le détournement de rhapsodia, une diction détournée de la rhapsodie. Il s'agit d'un détournement ou d'un travestissement d'une oeuvre tragique en une oeuvre comique.

L'objectif de ce travail sur la parodie n'étant pas la parodie en soi mais de définir Kaamelott et observer s'il s'agit d'une parodie de la LA et d'analyser les différences intertextualités que nous rencontrons à travers notre sujet d'analyse.

1. Les origines

Le premier à en parler est le philosophe Grec Aristote dans son ouvrage La Poétique3. Il ne la définit pas clairement et donc ne la considère pas comme un genre à part entière, ses travaux sur ce thème restant incomplets. Nous pouvons résumer qu'il aborde la parodie comme une anti-Iliade, texte d'Homère datant de l'antiquité et retraçant l'épopée de la dernière année de la guerre de Troie. Les personnages bas deviennent alors les héros d'une épopée.

Au XVIIIème siècle encore la parodie n'est toujours pas reconnue à sa juste valeur mais comme un « trope ». Dans le traité des tropes (1730), le grammairien Du Marais parle de « figure de sens adapté, consistant à rapporter des paroles connues en leur donnant un sens différent de celui qu'elles avaient originellement »33.

30 Sangsue (Daniel), la parodie, coll. Contours Littéraires, Hachette, 1994

31. http://atilf.atilf.fr/dendien/scripts/tlfiv5/advanced.exe?8;s=1871725245;Définition du Trésor de Langue Française.

32 Genette (Gérard), palimpseste, Seuil, 1982

http://www.universalis.fr/encyclopedie/gerard-genette/

33 Sangsue (Daniel), la parodie, coll. Contours Littéraires, p17, Hachette, 1994

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 28

L'Abbé Sallier, dans son Discours sur l'origine et sur le caractère de la Parodie, affirme que cette dernière doit avoir pour visée l'utile et l'agréable, de même que tous les autres genres de poétique. On peut la regarder comme « une fiction ingénieuse, sous le voile de laquelle on propose quelques vérités. »34

Au XIXème siècle les choses vont évoluer considérablement. Certains comme le philosophe Charles Nodier dans Questions de littérature légales, ou encore Joseph Marie Quérard dans Les Supercheries littéraires dévoilées n'en parlent même pas, d'autres comme Etienne Gabriel Peignot dans Amusement philologique reprennent d'anciennes théories définissant toujours la parodie comme « une petite poétique curieuse et amusante »35.

Progressivement au cours de ce siècle cette notion prend de l'ampleur. Elle est confondue avec d'autres termes comme la caricature, notamment dans L'histoire de la caricature antique de Jules Champfleury (1865) ou par André Gill qui intitule son journal satirique La Parodie, ce qui va fortement populariser ce terme. La Monarchie de Juillet et le Second Empire sont des périodes propices à la presse humoristique.

A la fin de ce siècle et avec le déclin du romantisme36, la littérature réfléchit sur elle-même et sur des notions comme la réécriture (des auteurs et non des oeuvres comme il était monnaie courante avant l'apparition de la notion de droit d'auteur qui apparait au XIIème siècle en Angleterre). Proust débutera par des pastiches, le poète Stéphane Mallarmé imitera Baudelaire et le second degré s'installe dans le paysage littéraire, comme une nécessité. Léon Bloy écrira même en 1886 dans Le désespéré que «l'invention n'est plus possible »37, ou encore Guy de Maupassant dans Pierre et Jean « que reste-t-il à faire qui n'ait été fait, que reste-t-il à dire qui n'ait été dit? »38.

Octave Delepierre dans l'ouvrage « Essai sur la parodie » apporte de nouveaux éléments notamment dans la distinction entre parodie et burlesque. Selon lui le burlesque serait la déformation d'un sujet existant en changeant par exemple de registre de langue. La parodie est l'imitation d'un genre mais à partir d'un sujet nouveau. Elle serait donc la dégradation

34 Ibid, p19

35 Ibid, p21

36 Selon le Trésor de la Langue Française il s'agit d'un mouvement intellectuel, littéraire, artistique qui visait à renouveler les formes de pensée et d'expression en rejetant les règles classiques et le rationalisme, en prônant la nature, le culte du moi, la sensibilité, l'imagination, le rêve, la mélancolie, la spiritualité, en réhabilitant le goût contemporain, la couleur locale, la vérité historique. Romantisme, prédominance de la passion sur la forme et de l'inspiration sur la règle (FLAUB., Corresp., 1871, p. 230). Le romantisme (...), en exaltant le sentiment, l'imagination et l'intuition, allait provoquer un remaniement profond de la pensée occidentale (Hist. sc., 1957, p. 1565).

37 Op cit., p22

38 Ibid., p23

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 29

d'une oeuvre plus ancienne sous une forme différente, une vieille littérature qui ne respecte pas ses anciennes oeuvres.

Un autre point important dans les observations de Delpierre concerne la réception. Toujours selon lui la réception est différente selon le contexte historique. Par exemple, un texte du Moyen Âge n'a pas le même poids, lu plusieurs siècles plus tard et peut perdre de sa force satirique. Par sa dimension critique, il y a désormais une dimension sociale et politique qui est en partie reconnue à la parodie.

2. Le formalisme russe.

L'évolution majeure de la reconnaissance du genre parodique est le fruit du travail des formalistes russes et plus particulièrement celui de Mikhaïl Bakhtine. Mais revenons tout de même sur les théories développées par d'autres chercheurs russes avant lui.

Les théoriciens russes ont, dans un premier temps, cherché à démontrer la littéralité des objets littéraires ou plus simplement à définir ce qui différencie la langue poétique de la langue quotidienne. Ensuite, ils se sont attachés aux relations entre la nouvelle oeuvre (la parodie) et son modèle (l'original). Pour Iouri Tynianov la parodie est un procédé de destruction de l'ancienne oeuvre, dans le sens où elle la dépasse et l'enrichit39. Il cite Dostoïevski qui reprenait des procédés stylistiques de Gogol, et parlant de stylisation plutôt que d'imitation. Mais pour qu'il y ait parodie, il faut un décalage, un effet de discordance. Il parle de « mécanisation » du procédé créé par l'insertion de procédés tels que la contrepèterie, le calembour, le détournement de vers célèbre, etc. Tomachevski va plus loin en parlant de règle canonique lié aux époques et que la parodie fait voler en éclat.

Le principe fondamental pour Bakhtine est que tout oeuvre ne se conçoit qu'en rapport avec d'autres énoncés, ce qui est le principe du dialogisme. Dans chaque discours nous comptons deux sujets, l'homme qui parle et son groupe social et d'autre part « un déjà dit ». Il affirme également que le dialogisme est plus prédominant dans la prose que dans la poésie. Le roman a tendance à être polyphonique bien que certains le soit plus que d'autres. Il oppose notamment Dostoievski qu'il considère comme l'inventeur du roman polyphonique à Tolstoi qui est davantage monologique40.

En ce qui concerne la parodie, il montrera l'importance du langage en citant des auteurs anglais ou allemands (Charles Dickens pour ne citer que le plus connu), et soulignant l'emploi de toutes les couches du langage littéraires parlé et écrit de leur temps et en forçant le trait.

39 Ibid., p32

40 Problème de la poétique de Dostoievski, M. Bakhtine, 1963

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 30

Il évoque également l'hybridation des langages ou le mélange de deux langages sociaux dans le même énoncé.

En ce sens, Kaamelott rentre parfaitement dans cette définition de la parodie. Le Roi Arthur, mais pas seulement lui, passe très souvent d'un langage protocolaire ou bien technique à un langage plus familier et même, mais cela nous le verrons plus tard d'un langage supposé médiéval à un langage plus moderne.

Nous pouvons donc constater toute la complexité à définir la parodie étant donné le caractère polyphonique donné à ce terme. Nous pouvons tout de même retenir la pratique d'imitation ou de transformation d'un texte, un langage ou un thème. C'est également destiné à un usage plus polémique pour dénoncer à travers le langage social.

Il est encore plus difficile de différencier parodie de pastiche mais ce n'est pas l'essentiel dans la démarche entreprise par Bakhtine. Il accorde une plus grande importance à l'aspect idéologique du genre. La parodie existe depuis l'antiquité, elle est le pendant nécessaire, voire indispensable de toute oeuvre dite sérieuse. Mais la parodie par le biais du rire, de la moquerie, de la légèreté s'inscrit davantage dans la réalité que les formes canoniques telles que l'épopée. C'est une lutte contre les stéréotypes et la déformation angélique de la réalité. Elle implique également une distanciation de l'auteur créant alors une « conscience parodique ».

Pour résumer l'apport de Bakhtine nous pouvons souligner qu'il considère la parodie non pas comme une simple technique de renouvellement ou un moteur de l'évolution littéraire mais qu'elle engageait également des postures sociales, culturelles ou encore politiques.

3. La transtextualité de Genette.

Nous finirons par les théories de Gérard Genette. Genette est le père de la transtextualité41 qu'il définit comme « tout ce qui met un texte en relation, manifeste ou secrète avec d'autres textes ».

Selon Genette, et c'est une théorie que nous appliquerons, tout texte est en relation avec des textes antérieurs. Il distingue deux processus, la transformation et l'imitation. C'est aussi la distinction que l'on peut faire de pastiche et parodie. Le premier imite un style (écrire à la manière de) alors que le second s'en prend à un texte. Il parle alors d'imitation caricaturale ou pastiche satirique.

Dans notre cas, Kaamelott relève à la fois de la parodie (appropriation des textes de la légende Arthurienne sur le fond) mais également du pastiche (langage d'Audiard, que l'on pourrait lui même qualifier à certains égards de rabelaisien (un style gai, licencieux, grivois, parfois

41 Palimpseste, Seuil 1982

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 31

grossier et cynique), pour certains personnages comme Arthur ou encore Léodagan et registre médiéval plus proche de la représentation des écrit traditionnels relatant la légende pour Lancelot ou encore Gauvain.

Pour Genette la parodie se réduit à « la transformation textuelle à fonction ludique ».

Toutes ces définitions de la parodie allant d'Aristote à Genette ne sont que des repères, certes indispensables, pour entrer dans notre travail et mieux définir l'esprit Kaamelott mais il s'agit de théories s'appliquant à des textes. Or ici, comme nous avons pu le voir dans les parties précédentes, nous sommes en présence d'un objet télévisuel. Bien que le corpus soit un manuscrit des épisodes ou la transcription des épisodes par des internautes c'est avant tout une série télévisée qui a été retranscrite à l'écrit dans un but pédagogique42 ou plus simplement un produit dérivé ou objet de collection afin de satisfaire les fans de la série toujours désireux d'en connaître davantage sur leur série favorite.

Kaamelott est donc à la fois une parodie de la légende arthurienne en en reprenant les bases narratives qu'ils s'agissent de la quête du Graal par les chevaliers de la table ronde ou les intrigues sentimentales comme la romance de Guenièvre et Lancelot. Nous pouvons également parler des lieux, des protagonistes ou de péripéties diverses que l'on retrouve dans le roman arthurien. D'après la définition de Delpierre, Kaamelott est une oeuvre burlesque détournant la légende Arthurienne mais ne peut pas être considéré comme une parodie puisque la base est la même.

Certaines oeuvres ne gardent que la base narrative et transposent le récit dans un autre cadre historique. Prenons l'exemple de Songes d'une nuit d'été du dramaturge anglais William Shakespeare43 ».Cette pièce écrite entre 1594 et 1595 fut transposée en 2011 par Nicolas Briançon dans les années 19708.

4.Le pastiche

Nous l'avons vu c'est également un pastiche par la multiplicité de ses langages. Arthur est obligé d'adapter le sien selon ses interlocuteurs. L'épisode Ambidextrie44 est un très bon exemple. Il peut employer un langage très technique en tant que chef de guerre avec Lancelot , son second.

42 l est précisé sur la quatrième de couverture du manuscrit que c'est un outil idéal pour les professionnels du spectacle et de l'éducation.

43 http://www.lexpress.fr/culture/scene/shakespeare-c-est-bon-pour-le-moral_1035325.html

44 59Kaamelott Livre I, épisode 35, Ambidextrie

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 32

Arthur - Donc on reprend: Calogrenant est posté depuis hier au

nord-ouest de la zone d'attaque.

Lancelot - Et Léodagan, sud-sud-est, un peu plus en retrait avec

les cavaliers.

Cependant tous ses hommes n'ont pas ce niveau de compréhension de la tactique militaire.

Perceval - J'aime pas bien ces histoires de sud-est, de nord ouest et tous ces machins.

L'épisode est intitulé Ambidextrie. Ambidextre signifie pouvoir se servir aussi bien de sa main droite que de sa main gauche, notamment pour l'écriture. Ici Perceval ne sait pas faire la différence la différence entre ces deux notions. Mais le dialogue suivant nous permet de mieux comprendre ce choix de titre :

Perceval : D'accord ! Allez c'est bon (tire son épée) j'les attends les

envahisseurs ! Ils vont s'prendre mon épée dans les côtelettes ça va

les calmer pour un moment ! Ah j'ai hâte d'y être ! Ils vont s'frotter

à la fausse-patte du Pays d'Galles !

Lancelot : Les fausses-pattes c'est des gauchers.

Perceval : Bah oui !

Arthur : Vous êtes pas gaucher vous.

Perceval : Ben si !

Lancelot : Vous dégainez d'la main droite.

La confusion entre la droite et la gauche est ainsi accentué. Perceval n'et pas un valeureux combattant. Nous pouvons le vérifier dans de nombreux épisodes dont celui-ci qu'il n'est pas un expert militaire et que cet univers le dépasse.

Lancelot : Le Seigneur Calogrenant est parti il y a deux jours pour placer son armée en amon de la rivière.

Perceval : Ah, c'est pour ça qu'il est plus là.

Lancelot : Bah oui, on l'a envoyé se positionner en avance...

Perceval : Ah bon, moi j'croyais qu'il était rentré chez lui alors j'me disais "il s'fait pas chier quand même" !

Nous pouvons tout de même reconnaitre à Perceval sa volonté de bien faire et de progresser. Il manifeste son enthousiasme à pourfendre l'ennemi une fois qu'Arthur et Lancelot ont fini de lui expliquer la marche à suivre. Pour cela ils abandonnent les repères spatiaux, étrangers à

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 33

Perceval, et s'expriment par le biais d'élément naturel que devra rencontrer Perceval sur son chemin (arbre, rocher, rivières).

Ce lien à la nature est assez révélateur de la personnalité de Perceval. Enfant naïf et protégé par sa mère, dans la série par « sa mamie », Perceval est un homme crédule mais d'une grande bonté et d'une fidélité à toute épreuve.

Arthur est également un homme de son époque, c'est à dire rustre et s'emporte facilement ce qui l'incite à employer également un registre plus familier.

Arthur - (s'adressant à Perceval) Mais vous êtes complètement con !

Ce langage est d'ailleurs partagé par la majorité des protagonistes de la série. Ce registre familier ou argotique, emprunté à Audiard, est une des clefs du succès de la série.

D'autres personnages tels que Léodagan ne changent pas de registre (pour ce cas il s'agit du familier). Citons également Yvain qui s'exprime davantage comme un adolescent du XXIème siècle qu'à la manière d'un chevalier du VIème ou du XIIème siècle.

Yvain - (refusant d'aller au combat) Je m'en fous, j'irai pas !

Et voici la réaction face aux menaces de son père :

Yvain - (levant les yeux au ciel) Super ! Bonjour la pédagogie !

Nous reverrons plus en détail les particularités d'Yvain dans la troisième partie.

Enfin, il est important de préciser que Kaamelott réfléchit sur de nombreuses questions en lien avec le monde des arts en général et de la littérature en particulier. Ainsi plusieurs épisodes s'intitulent La poétique et font clairement référence à Aristote45.

Nous pouvons voir Arthur enseigné à Perceval l'art de raconter aux autres chevaliers de la Table Ronde des récits de ses aventures épiques. Il cite alors Aristote et à son grand étonnement Perceval précise que c'est « lui qui a écrit La poétique. » Précisons que Perceval ne sait pas lire. Il lui explique alors, qu'un tout est constitué d'un début, un milieu et une fin.

45 Kaamelott, Livre III, épisode 27 et 28, La poétique

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 34

Arthur insiste sur la nécessité de susciter l'intérêt du lecteur en allant à l'essentiel afin de ne pas perdre le lecteur et qu'il faut parfois embellir la réalité. Arthur fait remarquer à Perceval que tout le monde emploie cette technique, même Lancelot et que c'est pour cette raison que ses récits ont l'air vrai. En alternance ; nous voyons donc dans l'épisode Perceval relater ses prétendues aventures aux autres chevaliers et nous comprenons.

Dans un second épisode utilisant la même mécanique, Arthur explique à Perceval ce qu'est un élément déclencheur dans un récit. Les chevaliers de la table ronde ont conscience, ou au moins quelques uns de leur importance dans l'Histoire et de la portée de leurs récits. C'est pourquoi il est primordial de soigner l'image de la légende. Par exemple Arthur proteste contre Merlin qui surnomme le Roy « le sanglier de Cornouailles ». En représailles Arthur demandera au père Blaise, son copiste d'appeler l'enchanteur Coco l'asticot dans l'un des récits46.

De même nous pouvons voir Arthur enseigner l'art de la poésie à Guenièvre et la notion de licence poétique47

Guenièvre : Mais je vous en prie, éclairez-moi de vos lumières, puisque vous êtes soudainement devenu un expert en beau langage...

Arthur : Pas besoin de devenir un expert, s'il vous plaît ! « Le vent, pareil à l'enfance, se joue de l'arbre moqueur... » ?

Guenièvre : Oui, et ben ?

Arthur : Eh ben c'est nul. Nul, nul, nul, zéro. « L'arbre moqueur », déjà ; ils peuvent pas s'empêcher de foutre des épithètes à tout ce qui bouge, ces poètes, même à ce qui bouge pas ! « La fleur goguenarde », « L'abeille malicieuse », « Le roseau pliable », « L'ourson rabat-joie ». Et même, des fois, ils le mettent avant le mot, comme ça, ça fait genre : « Le gai souriceau », « Le prompt madrigal », « La frisottée moustache ». (Il lève les yeux au ciel.)

46 Kaamelott, Livre III, épisode 8, Le sanglier de Cornouailles

47 Kaamelott, Livre II, épisode 19, Le poème

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 35

Cette réflexion sur les arts et en particulier sur la langue et le langage est un nouvel indice de l'originalité de ce programme et un ingrédient essentiels pour la particularité de son humour.

Astier est, finalement, très fidèle à la légende et certaines intrigues qui paraissent anodines ne le sont pas. Par exemple, dans l'épisode Le Chevalier mystère, Perceval éprouve des difficultés à retenir son patronyme et accomplit une quête sous le nom de Provençal le Gaulois. le seigneur Perceval dans le roman inachevé Perceval ou le conte du Graal de Chrétien de Troyes écrit en 1181 ne connait pas son identité. Sa mère l'ayant toujours appelé mon enfant ou par des surnoms propre à une mère pour son fils. Son identité lui viendra miraculeusement en se présentant devant Arthur.

Il est important de rappeler que l'action de Kaamelott se situe à la chute de l'Empire Romain. Le roi Arthur a pour mission de fédérer les peuples bretons afin d'en faire une nation unie et indivisible. Arthur tient son autorité d'Excalibur, son épée magique. Celui qui retira l'épée du rocher deviendra maître de tout le royaume de Logres. Arthur, devenu roi, fait bâtir la forteresse de Kaamelott48 et cherche des chevaliers à travers toute le royaume de Logres pour accomplir la mission que les Dieux lui ont confiée. C'est une incohérence de la série puisqu'il devrait s'agir du Dieu unique de la chrétienneté. : conquérir le Saint Graal49. Une fois les chevaliers trouvés, Arthur fit construire une table ronde autour de laquelle ils pourront se réunir pour traiter des affaires du royaume et surtout de la quête du Graal.

Par la suite la chronologie devient plus confuse et nous fait voyager à travers plusieurs siècles. Si la première partie de Kaamelott (bien que ce ne soit pas systématique) semble se dérouler autour du Vème siècle, les Romains quittent la Bretagne en 410 dans une Bretagne encore en proie aux invasions barbares et à la chrétienneté, Nous pouvons également percevoir de nombreux indices sur l'incohérence historique du récit. Ainsi Arthur et les siens sont au fait de culture qui leur sont logiquement pratiquement inconnu. Nous pouvons notamment voir Arthur réciter un poème chinois50. Ou encore jouer d'un instrument oriental51. Nous suivons alors Arthur dans un moyen Âge féodal radicalement différent du moyen Âge plus « primitif » par bien des aspects (politique, religieux, culturelle ; etc.).

Astier ne prétend pas respecter à la règle une chronologie historique, ce n'est pas un travail d'historien mais se servir de manière optimale de la Légende Arthurienne. N'oublions pas que

48 Chabbert, (Christophe), Aux sources de Kaamelott, acte 1 : les moeurs et les femmes,

Livre II, 28 septembre 2005, M6 Vidéo

49 Le Graal est le récipient à l'aide duquel Joseph d'Arimathie aurait recueilli le sang du Christ lors de sa crucifixion.

50 Kaamelott, Livre II, épisode 19, Le poème 51Kaamelott, Livre 1, épisode 39, Le Oud

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 36

celle-ci n'est pas cloisonnée dans une période bien précise mais a considérablement évolué au cours des siècles. Ainsi les intrigues sentimentales (amours courtois entre Guenièvre et Lancelot par exemple) prennent toute leur importance dans les récits du XIIème siècle et plus spécifiquement sous la plume de Chrétien de Troyes.

L'originalité de Kaamelott réside également dans le choix de son sujet. C'est-à-dire la légende Arthurienne, vieille de plus de 1500 an, connu de tous mais de manière imprécise. La difficulté dans le traitement de ce sujet est de choisir quelles partie de la légende l'auteur veut exploiter. AA a choisi de ne pas respecter à la lettre telle ou telle version mais de proposer la sienne.

Les premiers écrits datent du Moyen Âge (autour de l'an mille) par Geoffroy de Monmouth52 Cependant, dans la tradition orale et dans plusieurs poèmes d'anonymes, il est déjà question des aventures de ce roi légendaire, défendeur de la Bretagne face aux invasions des Saxons autour du VIe siècle.

Après Geoffroy de Monmouth, il sera écrit d'innombrables versions, toutes très différentes. Nous retiendrons principalement les écrits de Chrétien de Troyes qui mettront en avant le concept de l'amour courtois, ou fin'amor, et s'attachera beaucoup au personnage de Lancelot, à la quête du Saint Graal et relatera les amours de Guenièvre et Lancelot.

Comme nous venons de le voir dans ce chapitre, Kaamelott n'est pas un pastiche ou une parodie de la LA mais une nouvelle version reprenant les mêmes éléments (intrigues, lieux, personnages) il s'agit d'hypertextualité que Genette définit comme « toute relation unissant un texte B (hypertexte) à un texte antérieur A (hypotexte) sur lequel il se greffe d'une manière qui n'est pas celle du commentaire. » L'hypertexte est un texte dérivé d'un autre texte préexistant au terme d'une opération de transformation.

Il existe donc quelques points communs à toutes les versions. Les personnages d'abord. On retrouve Arthur, sa femme Guenièvre, Merlin, Lancelot du Lac le chevalier errant ou encore Perceval le Gallois. Pour ce qui est des autres personnages, on trouve de nombreuses divergences, qu'il s'agisse des prénoms, de la fonction ou de l'importance dans les récits.

Il en va de même pour les objets. Tous les récits s'accordent sur Excalibur, l'épée des rois, qu'Arthur a retirée du rocher. Le caractère surnaturel d'Arthur et de Merlin fait aussi partie des bases de la légende.

En revanche, la Table Ronde ne fait pas consensus. Parfois elle est un objet très concret comme dans la série et a une importance politique et symbolique (ronde pour que tout le monde soit égal autour de cette table). Dans certains récits, elle ne serait qu'une désignation

52 NABOUR, Eric, Kaamelott, Tome 1 : Au coeur du Moyen Âge, Perrin, 2007

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 37

d'une confrérie et il existerait la table carrée, la table ovale, etc. Dans la version d'un anonyme de la fin du Moyen Âge, il y aurait plus de 1600 chevaliers à la Table Ronde, ce qui nous permettrait de douter de son existence physique.

Astier s'inspire fort logiquement de la LA pour créer des épisodes. Certains peuvent paraitre totalement absurdes et sans rapport direct avec la légende tels que les épisodes Unagi dans lesquelles nous pouvons assister aux entrainements de Perceval et Karadoc à de nouvelles techniques de combats de leurs inventions53. L'unagi est une anguille d'eau douce, on peut donc rapprocher cet animal aux techniques d'esquives en se basant sur l'expression « se faufiler comme une anguille » D'autres, notamment ceux évoquant la romance de Lancelot et Guenièvre, sont directement inspiré de la légende et plus particulièrement des romans de Chrétien de Troyes. Mais il existe également de nombreuses intrigues dont l'inspiration parait moins évidente pour les néophytes. Ainsi l'épisode En forme de Graal54 traite de la forme du graal. Nous assistons à une réunion de la table ronde et plusieurs versions s'affrontent. Pour certains il s'agit d'un vase ou d'une coupe, Bohort dit « un récipient », Perceval évoque une pierre incandescente. A la fin de l'épisode Perceval et Karadoc poursuivent le débat :

Karadoc : Franchement, vous êtes Joseph d'Arimathie. Vous vous pointez devant Jésus qui pisse le sang. Dans quoi vous le récupérez le sang ?

Perceval : Dans un bocal à anchois. Déjà pour la contenance, j'peux pomper un demi-gallon de sang, j'suis tranquille. Et surtout qu'après j'peux refermer le bocal, j'en fous pas de partout dans mon sac. Si Joseph d'Arimathie a pas été trop con, vous pouvez être sur que le Graal, c'est un bocal à Anchois.

Intéressons nous à ce bocal à anchois. Aux premiers abords il nous apparait simplement un gag de AA pour démontrer à la fois la naïveté et le sens pratique du Seigneur Perceval. Mais en effectuant quelques recherches sur l'origine du terme graal, nous apprenons qu'il s'agit du mot désignant au Moyen âge un plat à poisson.55 Or dans le roman de Chrétien de Troyes Le Conte du Graal, Perceval trouve dans le château du Roi Pêcheur « un graal merveilleux et une lance qui saigne. Nous ne retrouvons nulle trace dans Kaamelott d'une lance qui saigne

53 Kaamelott, Livre 1, épisode 93, Unagi, Livre 2, épisode 57, Unagi II, Livre 3, épisode 16, Unagi III, Livre 4, épisode 51, Unagi IV.

54 Kaamelott, Livre 1, épisode 18, En forme de Graal

55Christine Ferlampin Acher, Denis Hüe, Mythe et réalités, Histoire du Roi Arthur, Edition Ouest France

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 38

mais le graal est omniprésent. Dans la série le graal est le récipient ayant servi à recueillir le sang du Christ. Cette vision religieuse du graal n'est pas présente dans l'oeuvre de Chrétien de Troyes. Ce sont les continuateurs de son oeuvre qui donneront une fonction mystique à cet objet .Christian Ferlampin Acher et Denis Hüe écrivent dans Mythes et réalités, Histoire du Roi Arthur qu' il « revient à Messinier en quelques 11 000 vers, de mener à sa fin la quête du Graal, christianisant fortement le vaissel, présenté désormais comme une relique de la passion du Christ ».

Il parait donc évident à la lumière de tous ses éléments que l'emploi du bocal à anchois n'est pas anodin et qu'AA faisait directement référence au plat à poisson du Moyen âge. Le champ sémantique autour du graal comprend le bocal à anchois, le Roi pêcheur, unagi ou anguille.

La LA est une source d'inspiration considérable dans des oeuvres modernes tel que la saga Star Wars de Georges Lucas , Stargate de Roland Emereich ou bien encore Le seigneur des Anneaux de J.R Tolkien pour ne citer que les plus célèbres56.

Ce qui différencie Kaamelott des versions antérieures de la Légende, c'est la vision et la gestion de l'échec, l'incapacité face à la mission confié par les dieux à Arthur et le doute permanent qui finit par détruire l'ensemble. La désacralisation de la légende Arthurienne. Là où toutes les versions de la légende (excepté Sacré Graal des Monty Pythons qui est dans le registre de la parodie pure et dure) s'évertuent à montrer les qualités et les valeurs des protagonistes. La magie représente un quart des épisodes et est omniprésente dans Kaamelott et la Légende Arthurienne. Il semble logique que des héros dépassé par la réalité le soient également par les phénomènes surnaturels.

La légende Arthurienne est constitué d'un ensemble de texte écrit par des auteurs tels que Geoffroy de Monmouth ou encore Chrétien de Troyes mais également d'auteurs anonymes tout au long du moyen âge principalement. Cependant certains écrivains, Philippe Sollers par exemple, continuent d'être inspirés par ce sujet inépuisable.

A noter l'ambiguïté entre la croyance dans le Dieu unique imposé par la récente chrétienté du Royaume et malgré tout la présence des Dieux celtes qui guident Arthur par l'intermédiaire de la Dame du lac.

AA a une particularité dans sa manière de travailler qui est très intéressante. Il pense a un acteur puis écrit en fonction de ce dernier, alors que la plupart des auteurs pensent d'abord à

56

http://www.lequotidienducinema.com/index.php?option=com_content&task=view&id=327&Itemi d=109

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 39

un rôle et l'attribue ensuite à un comédien dont le profil correspond. Par exemple AA a envie de travailler avec un acteur qu'il admire, François Rollin pour ne citer que lui. Et ensuite, une fois que l'acteur accepte de travailler avec lui, il écrit un rôle adapté à ce dernier. Rollin est célèbre pour son personnage du Professeur Rollin qui est très cultivé et aime étaler sa culture aux yeux de tous. Le Professeur Rollin est réputé pour avoir « toujours quelque chose à dire » quelque soit le sujet. AA écrit alors un roi Loth finissant toutes ses phrases par une citation latine, rabaissant constamment ses collaborateurs et ayant toujours le dernier mot. D'autres auteurs écrivent d'abord leur personnage avec ses particularités et réfléchissent ensuite à qui pourrait bien l'incarner.

AA choisit donc des acteurs avec qui il souhaite travailler et ,selon leur jeu, leur parcours, il compose un personnage « sur-mesure ». L'intérêt de cette méthode est de pouvoir jouer avec la transtextualité. En effet, AA peut faire référence à travers un personnage à un autre texte Voici quelques exemples qui vont nous permettre de démontrer cette particularité et son efficacité comique, principalement tirés des épisodes La Table de Breccan et Le Maitre d'armes.

La Table de Breccan est le seul épisode de Kaamelott avec Yvan le Bolloch. Cet acteur a acquis une grande notoriété en incarnant Jean Claude Convenant dans la série télévisée humoristique Caméra Café sur M6.

Astier a décidé (ou a été contraint) pour les débuts de Kaamelott d'adresser un clin d'oeil à Caméra Café.

Dans CC Yvan Le Bolloch incarne donc Jean Claude Convenant, surnommé JC, représentant de commerce (VRP) pour une entreprise qui fabrique des appareils de Fitness. Jean Claude est un très bon vendeur mais il est aussi dragueur, bien que marié et père de trois enfants, alcoolique et particulièrement inculte.

Le personnage de Breccan, artisan ayant fabriqué la table ronde, dans Kaamelott à de nombreux points communs avec le personnage de JC. Les deux ont une profession commerciale et savent parler de leur produit. Breccan nous démontre ici tout son talent de camelot :

Attendez, le cuir, ça restera toujours le cuir ! D'autant que je vous ai pas mis de la vache moisie ! Là, c'est de la tannerie de luxe assemblée au crochet de six... Attendez, il y a du boulot derrière, là.

On voit dans cet extrait la verve habituelle de Jean Claude Convenant. Il semble vraiment s'y connaitre en expliquant la fabrication de sa table avec de nombreux détails techniques (notamment le crochet de six et la vache moisie, gage de bonne qualité).

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 40

Yvan Le Bolloch est l'auteur de Caméra Café avec Bruno Solo qui incarne Hervé Dumont. Or, comme AA, Le Bolloch et Solo sont de fins connaisseurs de Michel Audiard. Ses dialogues regorgent de métaphores, d'argot et sont marqués par un rythme rapide. Nous retrouvons un lexique propre aux truands, aux classes populaires et certaines professions.

Ici, le procédé est le même. Le rythme est soutenu, très accentué et le lexique ne parle qu'à un artisan spécialiste en tannerie. « Assemblé au crochet de 6 », ici, le personnage utilise le jargon propre à sa profession, jargon dont il est le seul à détenir la clé dans cette scène, ce qui lui confère l'autorité sur les autres

En employant des termes techniques, il s'impose et veut faire reconnaitre son savoir-faire, il démontre son autorité dans son domaine.

Cet extrait des tontons flingueurs, dialogué par Audiard, l'illustre parfaitement.

Raoul Volfoni :Mais moi les dingues, j'les soigne, j'm'en vais lui faire une ordonnance, et une sévère, j'vais lui montrer qui c'est Raoul. Aux quatre coins d'Paris qu'on va l'retrouver, éparpillé par petits bouts façon puzzle... Moi quand on m'en fait trop j'correctionne plus, j'dynamite... j'disperse... et j'ventile...

B.BLIER, Les tontons flingueurs

Ici, nous comprenons que le locuteur veut tuer quelqu'un et qu'il s'y connait en assassinat. A l'image nous le voyons préparer une bombe mais ses paroles nous suffisent pour comprendre ce qu'il fait. Il emploie ici des expressions populaires « je vais lui montrer qui c'est Raoul » et de nombreuses métaphores « on va l'retrouver, éparpillé par petits bouts façon puzzle. »

Dans l'épisode « La tête est les jambes » de Caméra Café Hervé à parié avec sa fiancée sur JC pour battre leur collègue Nancy, à une épreuve de triathlon, alors que sa fiancée à parié sur Nancy. Le perdant doit venir en short au bureau. Hervé dit à JC :

Hervé Dumont : Dis donc Jean Claude, c'est pas que j'sois complexé par mes mollets mais j'ai une image ici alors pas de galanterie hein. La Nancy tu l'écrabouilles, tu la pulvérises, tu la disperses.

B.SOLO, Caméra café

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 41

On retrouve la même idée que chez Audiard pour éliminer l'adversaire. « Disperser » figure même dans les deux répliques.

L'emploi de la métaphore est fréquent dans les trois oeuvres que sont Caméra Café, Kaamelott, et les dialogues d'Audiard.

Marina Yaguello dans l'ouvrage Alice au pays du langage parle de « substitution dans l'axe vertical d'un terme figuré à un terme propre ». 57« Disperser » ici signifie la battre à la course. Chez Audiard c'est aussi une métaphore, mais l'emploi d'une bombe donnerait un résultat plus proche de la dispersion qu'une simple victoire sportive. Dans Caméra Café c'est un hommage à Audiard, le terme « disperser » étant peu approprié à la situation.

Parlant du fait que le cuir de la table tache Breccan dit ! « Par contre, il faut essayer de pas trop manger comme des porcs ». Les porcs mangent salement, les chevaliers doivent éviter d'en faire autant pour ne pas abimer la table.

Toujours selon Yaguello, « la métaphore est un défi à la redondance, comme l'est toujours le langage poétique. La valeur expressive en est donc plus forte »

Caméra Café se situant au XXIème siècle, les auteurs peuvent se permettre de citer ouvertement un auteur passé. Dans Kaamelott l'exercice serait plus périlleux étant donné que l'intrigue se situe plusieurs siècles avant la naissance de Michel Audiard !

Michel. Riffaterre définit l'intertextualité comme « la perception, par le lecteur, de rapports entre une oeuvre et d'autres qui l'ont précédée ou suivie »

La frontière est mince entre la citation, clairement identifiée, le plagiat ou l'on cite quasiment mot pour mot mais sans laisser d'indice, de trace du texte cité et enfin l'allusion, ce qui est ici le cas.

Il est évident ici que la filiation entre Caméra Café et Kaamelott est bien au-delà d'un interprète commun mais d'une écriture et d'une référence commune, Audiard

Nous le voyons également énumérer les qualités de la table et devancer le client sur ses différentes utilisations possibles :

BRECCAN --Ah et puis là, je vous ai mis du costaud, vous pouvez

y aller ! Mettons pendant un banquet, s'il faut faire danser cinq ou six dames dessus, ça bougera pas !

ARTHUR -- C'est pas tellement l'ambiance.

BRECCAN -- Ah bah après, moi, je connais pas le détail, hein !

57 YAGUELLO, Marina, Alice au pays du langage, Seuil (1 mars 1981)

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 42

Nous voyons donc une référence supplémentaire à JC et là encore un rythme « à la Audiard ». Mais ceci est tout à fait normal vu que le style Astier, sans être un plagiat, utilise les mêmes codes à savoir le rythme, l'emploi de métaphore et une certaine forme d'argot.

AA dans le Livre II fera un deuxième clin d'oeil à Caméra Café en faisant jouer Bruno Solo dans l'épisode « Les Drapeaux ». Bruno Solo joue Hervé Dumont, dit Vèvère, le collègue syndicalise de JC.

Dans Kaamelott son personnage s'appelle Herveig et est le responsable des drapeaux pour faire des signaux à l'ennemi. Son rôle est de parlementer, négocier, il est le lien entre Arthur et le camp d'en face. Sa fonction est donc très proche de son rôle de syndicaliste dans Caméra Café et les conclusions les mêmes que pour JC /Breccan.

Notre deuxième exemple concerne donc le personnage du Maitre d'Armes. Nous le découvrons dans l'épisode éponyme, s'évertuant à pousser Arthur dans ses derniers retranchements en le provoquant pour que celui-ci s'entraine au combat efficacement. C'est un personnage récurrent que nous retrouvons dans les six saisons.Le rôle du Maître d'armes est interprété par Christian Bujeau. Ce dernier s'est fait connaitre du grand public pour son rôle de jean Pierre dans Les Visiteurs de Jean Marie Poiré.

Les Visiteurs est l'un des grands succès du cinéma comique français sorti en 1993. L'action se déroule en l'an de grâce 1123 . Godefroy de Montmirail et Jacquouille la Fripouille se retrouve propulsé en 1992. Les deux héros font alors la connaissance de leur descendance dont Beatrice de Montmirail, la descendante de Godefroy.et son mari Jean Pierre.

Le début de l'action se passe au Moyen Age et la suite du film au XXème siècle mais les deux héros parlent dans un français supposé être du XIIème siècle. En réalité la plupart des termes médiévaux ont été inventés par les scénaristes du film, Jean marie Poiré et Christian Clavier. Le premier point commun entre Kaamelott et Les Visiteurs est donc la période historique servant de trame à l'histoire.

Le second est donc la présence de Christian Bujeau. Si ce dernier a été choisi par AA ce n'est pas uniquement pour ses qualités d'acteur mais pour ses talents à l'épée. Christian Bujeau étant lui-même expert en combat médiéval.et chorégraphe sur Kaamelott. L'emploi de l'acteur pour ses spécificités est donc ici totalement justifié. AA voulait Bujeau et écrit donc un rôle taillé pour lui. Le Maitre d'Armes étant un personnage créé pour Kaamelott tout comme Breccan et Herveig.

Nous trouvons de nombreuses similitudes entre le langage du Maitre d'Armes et celui des héros des Visiteurs.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 43

JACQUOUILLE :Ne buvez pas messire , c'est une folie , vous aller vous transformer en boue , en chauve souris ou en cul de nonne ! GODEFROY : Bois , je verrai bien si tu te transformes en cul de nonne !

JACQUOUILLE : Pouah ! Ca puire !

JACQUOUILLE : (effrayé) Aahh ! Messire ! Un Sarrasin . Messire , un Sarrasin dans une chariotte du diable. C'est tout ferré , y a point de boeuf pour tirer

Le procédé consiste a légèrement transformé des mots contemporain telle que chariot en cha-riotte et lui attribuer un objet de notre temps. Dans cet exemple il s'agit d'une Renault 4L de La Poste.

Ici un extrait de l'épisode Le Maitre d'armes :

LE MAITRE D'ARMES -- « Gonzesse », c'est une formule ! Je ne le pensais pas ! Si j'avais voulu taper dans les potins, j'aurais très bien pu parler du vôtre, de père !

ARTHUR -- Quoi ?

LE MAITRE D'ARMES -- Au hasard, l'épisode de la grange de Brigit.

ARTHUR -- Quelle grange ?

LE MAITRE D'ARMES -- Celle où il s'était endormi dans le foin et où il s'est fait chier dessus par un bouc !

Nous voyons ici une méthode souvent employé dans Les Visiteurs, l'anecdote. Ici celle du père d'Arthur.

Nous remarquons également la présence de termes contemporains tels que « potins » ou « gonzesse ». AA n'invente pas de mot contrairement à Poiré et Clavier. Au néologisme il préfère l'anachronisme. Cependant ce sont deux termes argotiques.

Dans Les Visiteurs, Béa reproche souvent à son mari d'être « atrocement vulgaire ». Or nous avons déjà décrit le Maitre d'armes comme étant le personnage le plus grossier de la série. Même si dans Kaamelott la vulgarité est un une méthode pour énerver le Roi et le stimuler au combat.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 44

LE MAITRE D'ARMES (off) -- Ha, ha. Sire ! Je vous attends ! À moins que vous ne préfériez qu'on dise partout que le Roi est une petite pédale qui pisse dans son froc à l'idée de se battre ?

LE MAITRE D'ARMES --Il y a pas de « doucement » qui tienne ! Vous allez me faire le plaisir de vous remuer un peu les miches. Sire ! J'ai l'impression de me battre contre une vieille !

La vulgarité, le contexte historique, la fonction du personnage sont autant d'éléments qui appuient l'hypothèse d'un auteur choisissant d'abord ses acteurs et écrivant ensuite leur rôle. Mais là encore une fois le vrai lien entre Les Visiteurs et Kaamelott, c'est Audiard.

En effet, Jean Marie Poiré le réalisateur et co-auteur avec Christian Clavier des Visiteurs a débuté sa carrière de scénariste avec Michel Audiard. En 1968, Audiard réalise Faut pas prendre les enfants du bon dieu pour des canards sauvages sur une idée du jeune Jean Marie Poiré. Deux ans plus tard, Poiré est le scénariste du film d'Audiard Le cri du cormoran le soir au dessus des jonques. Il n'est donc pas étonnant de retrouver chez Poiré des similitudes d'écriture avec son maitre tout en ayant son propre style. Poiré est plus moderne dans son écriture ce qui le met moins à l'abri d'être passé de mode. Poiré et Clavier écriront plusieurs films ensemble et Clavier, aussi acteur, sera un des invités principaux de la saison 5 de Kaamelott.

Nous voyons donc avec le décryptage de ces deux épisodes que l'auteur à ses références, dont une très forte, Michel Audiard, et qu'ils s'inspirent des personnages de ses références pour en écrire d'autres et les proposer aux acteurs ayant incarné ses personnages. C'est le cas du Maitre d'armes, de Breccan ou encore d'Herveig, tous né de l'imagination d'AA auxquels on pourrait ajouter notamment Christian Clavier , héros des Visiteurs, en juriste hystérique et hautain, traits de caractère communs à nombres de ses personnages les plus célèbres ou encore François Rollin et son roi Loth que personne d'autres ne pourrait incarner.

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Les traces de

contemporanéité

dans Kaamelott, une

astuce scénaristique

pour évoquer le

siècle du

téléspectateur.

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1. Présentation du corpus

Pour appuyer l'hypothèse que Kaamelott se démarque singulièrement des autres productions françaises, et ce, tout formats confondus par son intertextualité et ses anachronismes nous allons nous appuyer sur quelques épisodes issus de la saison 1 choisi sur un critère bien défini. Pour rappel les saisons sont aussi appelés livres, elles sont au nombre de six dont quatre aux formats shortcom.

Nous allons donc nous pencher sur l'analyse des épisodes ayant pour intrigues des sujets toujours d'actualité, nous appellerons cela des traces de contemporanéité.

Cependant, ce n'est pas cette période qui nous intéresse pour constituer le corpus mais plutôt la corrélation entre le contexte médiéval (au sens large du terme comme nous venons de l'expliquer) et le XXIème siècle.

Comme nous l'avons vu précédemment les fictions françaises sont généralement assez frileuses, même si ce constat a considérablement évolué depuis Kaamelott, et reste bien souvent dans des intrigues classiques (histoire de couple, de famille, de travail) et toutes ancrées à notre époque. Nous pouvons donc déjà affirmer que le fait de proposer une série se situant à une période historique remontant à plus de deux siècles est un gage d'originalité. En effet certaines productions comme Un Village français se déroulent pendant la Seconde Guerre Mondiale et que la majorité des fictions de France 2 se déroule au XIXème siècle ou dans la première partie du XXème siècle. Et l'on peut également souligner que ces séries sont généralement vraisemblables et dramatiques alors que Kaamelott adopte un ton humoristique.

Mais ce qui marque une réelle différence avec toutes ces productions est la liberté totale prise sur la chronologie et cette manière d'assumer l'anachronisme. Ici l'anachronisme est un ressort humoristique, un prétexte scénaristique pour déclencher le rire chez le téléspectateur. Nous pouvons peut être invoquer un désir chez l'auteur de choisir ces sujets contemporains pour dénoncer ou simplement mettre en lumière certaines questions d'actualité encore brûlantes aujourd'hui.

Toutefois, Astier a souvent répondu dans différentes interviews ne pas vouloir utiliser Kaamelott comme un pamphlet politique et donc qu'il n'y pas à voir d'engagement idéologique dans son écriture58.

58 Chabbert, (Christophe), Aux sources de Kaamelott, acte III : l'art de la guerre, Livre IV, 26 septembre 2007, M6 Vidéo

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2. Contextualisation des thèmes analysés.

Dans le Livre 1 il est question de la torture, de l'adolescence et la gestion de l'âge bête, de la peine de mort, de la sexualité chez les prêtres, du code du travail, de la retraite et enfin des sondages d'opinion.

Tous ces thèmes sont des questions de société revenant plus ou moins régulièrement dans l'actualité.

Systématiquement, chaque nouvelle guerre nous amène son lot de torture toutes plus ignobles les unes que les autres (évoquons la gégène durant la guerre d'Algérie de 1954 à 1962 par l'armée française59 ou encore les différents humiliations dont sont coupables les GI américains lors des guerres d'Irak et d'Afghanistan)

L'adolescence est une notion récente à l'échelle de l'humanité. Nous pouvons estimer l'essor de ce terme juste après la seconde guerre mondiale. Avant cette date « les jeunes » n'existaient pas, n'étaient pas considérés. Il n'y avait pas réellement de stade intermédiaire entre l'enfance et l'âge adulte. L'émancipation de la jeunesse se développera dans la culture occidentale à travers la culture (le rock, les yéyés) ou encore la forte politisation d'une génération qui ne veut pas vivre la même jeunesse que leurs parents et grands parents éduqués dans l'atrocité des conflits mondiaux et se révoltera. Nous pouvons citer les événements de mai 68 en France ou encore les manifestations pacifistes aux USA contre la guerre au Vietnam.

L'adolescence est donc une période difficile à gérer aussi bien pour le jeune que pour ses parents. Synonyme de rébellion, il est aussi appelé l'âge bête.

La peine de mort est un sujet extrêmement récurrent dans l'actualité. Si elle fut abolie en 1981 en France par François Mitterrand, ce n'est pas encore le cas dans de nombreux pays, les USA en tête. A chaque nouveau fait divers, notamment les actes pédophiles, nous pouvons entendre, particulièrement venant de l'extrême droite, s'élever des voix réclamant sa réhabilitation. C'est également un sujet polémique concernant La Chine60.

60 http://www.lexpress.fr/actualite/monde/polemique-faut-il-boycotter-les-jo-de-pekin-2008_470183.html

En 2008 de nombreuses associations ont appelé au boycott des jeux Olympiques de Pékin pour protester contre les nombreuses violations des droits de l'homme en Chine.

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La sexualité des prêtres est également un sujet très souvent liés aux très nombreuses affaires de pédophilie au sein de l'Eglise catholique. Il s'agit plus précisément de la question du mariage des prêtres afin d'éviter les frustrations et ainsi les empêcher de commettre l'irréparable. Nous savons que la question de la sexualité est un sujet tabou pour les différentes religions et que sa pratique est dans de très nombreux cas considérés comme pêché. L'Eglise catholique est encore aujourd'hui réticente à l'homosexualité61 ou encore au port du préservatif.

S'il y a bien un sujet que l'actualité traite quotidiennement c'est bien celui du monde du travail et par extension du code qui le régit. Le code du travail français est un recueil organisé de la plupart des textes législatifs et réglementaires applicables en matière de droit du travail, et qui concerne essentiellement les salariés sous contrat de travail de droit privé, les salariés du secteur public étant généralement soumis à des statuts particuliers. Chaque jour de nouveaux conflits éclatent en France et partout dans le monde dans des entreprises et il ne passe plus une journée, surtout dans cette période de crise, sans que nous n'entendions parler d'un plan social entraînant des licenciements ou la fermeture pure et simple de sites de production. C'est également quotidiennement que des propositions de lois sont soumises à l'Assemblée nationale modifiant le Code du travail. Sa première mouture date de 1910 bien qu'elle ne fût achevée qu'en 1922.

La retraite est un autre des thèmes contemporains abordé par la série à se trouver souvent sous les feux de l'actualité sociale. Encore une fois le contexte de la crise encourage les gouvernements à se pencher sur le problème épineux de la répartition et de la cotisation des retraites. La retraite correspond à l`âge légal à partir duquel un salarié peut arrêter de travailler. Les victoires sociales combinées à l'allongement de la durée de vie est à l'origine de ce droit pour les salariés. Cette notion contemporaine du mot retraite date du XXème siècle. La retraite désigne aussi l'arrêt d'un combat militaire, battre en retraite.

Enfin le dernier sujet abordé est celui des sondages d'opinions. Il faut remonter à 1936 pour trouver la trace du premier institut de sondage aux USA. L'objectif était de recueillir les attentes et les souhaits des citoyens américains en vue des élections présidentielles. Désormais nous sommes sondées tous les jours sur tous les sujets qu'ils soient d'ordre sociaux, politiques ou encore culturels. Les instituts français les plus célèbres sont Ifop, Tns Soffres, Opinion Way. La méthode est toujours la même, un panel représentatif de la population est interrogé

61 Dans son ouvrage-confession Lumière du monde le pape Benoit XI écrit que « L'homosexualité est injuste, s'oppose à la volonté de Dieu et est inconciliable avec la vocation de prêtre ».

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sur une ou plusieurs questions. Par exemple, pour quel candidat voterez vous en 2012 à l'élection présidentielle, « Etes vous pour la réouverture des maisons closes », « Pensez vous que le sélectionneur de l'équipe de France de football devrait démissionner ». Désormais avec les nouvelles technologies (Internet et SMS) tout le monde peut répondre à ces sondages sans faire partie d'un panel.

3. Analyse des épisodes.

Dans cette partie nous allons donc observer de plus près les épisodes présentés dans le chapitre précédent, afin de trouver des traces de contemporanéité dans la langue, le sujet abordé ou les références présentes. Astier a une écriture très riche et utilise de nombreux procédé pour nourrir ses scénarios et ses dialogues. C'est pourquoi il est difficile, voire douloureux, de choisir d'étudier un aspect plutôt qu'un autre même si ici l'objectif est clairement de montrer que le vingtième siècle est très présent dans les aventures de Kaamelott. La méthode est sensiblement la même pour chaque épisode puisqu'il s'agit de mettre en exergue le sujet traité et de la transposer à notre époque. Une fois ce travail effectué, nous nous penchons sur la situation et les dialogues et les différents procédés pour rendre l'épisode amusant même lorsque celui-ci évoque la torture par exemple.

a) Arthur et la Question

Le premier sujet contemporain abordé dans la série est la torture. Ce thème sert d'intrigue à l'épisode 13 intitulé Arthur et la Question. Le titre est une référence au livre autobiographique La Question d' Henri Alleg sorti en 1958 et traitant de la torture des civils durant la guerre d'Algérie.

Mais c'est également le nom du processus d'interrogation des sorcières et des hérétiques par les inquisiteurs au XIIIème siècle. Dans un premier temps les bourreaux expliquaient à leurs victimes la façon dont ils allaient les torturer espérant que celles- ci soient suffisamment terrifiées pour passer aux aveux. Soit les victimes cédaient soit le bourreau commençait son office. Dans la majorité des cas, aveux ou non la victime était torturée.

Michèle Janin-Thivos dans son article intitulé « Torture inquisitoriale et nudité : la pudeur en question » paru dans la revue Rives méditerranéennes 2008/2 (n° 30) nous brosse le tableau de ces pratiques que l'on pense, à tort, d'un autre temps :

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« Le XVIIIe siècle a popularisé une image violente et sanguinaire du tribunal de l'Inquisition. Mais la torture est un moyen de pression intégré à un processus juridique précis. Pratiquée par la justice séculière comme ecclésiastique, elle est destinée à la production de la preuve suprême : l'aveu. Elle vise à l'obtenir par des moyens autant psychologiques que physiques : les inquisiteurs encadrent cette pratique et confient à la justice séculière le soin de faire couler le sang. »

Alberto Bondolfi de l'Université de Lausanne évoque le lien entre religion et torture dans l'extrait de son article « La pensée et la pratique chrétiennes face à la torture : éléments pour un bilan critique » paru dans la Revue d'éthique et de théologie morale 2008/1 (n°248)

« Celle-ci faisait partie des pratiques auxquelles les premiers chrétiens ont été exposés. Des citoyens romains ont été torturés pendant l'Empire. Saint Augustin, dans la Cité de Dieu, s'est opposé à la torture qui ne peut être, selon lui, un moyen d'enquête judiciaire ou une preuve de culpabilité. Malgré cela, la torture fut encore utilisée au Moyen Âge. Incmar de Reims continuait à la légitimer. Le pape Nicolas Ier la condamna en 866, mais il ne fut pas plus écouté que saint Augustin en son temps. Malheureusement, la torture fut approuvée comme lutte contre les hérétiques : en 1244, Innocent IV confirme la loi pénale de l'empereur Frédéric II. La torture appartient même au système juridique à l'époque prémoderne et, parfois encore jusqu'aux constitutions du XXe siècle ».

Lors d'une réunion de la table ronde est évoquée le cas d'un voleur de bétail qui ne veut pas avouer son méfait et dénoncer son complice qui court toujours. Léodagan et Calogrenant souhaitent le torture pour le faire avouer mais Arthur, soutenu par Bohort est farouchement opposé à la torture.

Léodagan (à Arthur) - C'est vrai que c'est curieux, cette manie de pas vouloir torturer. Ca vient de quoi ça ?

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 51

Arthur - Ca vient que chez moi, il y a pas de torture, voilà. Bohort - Et c'est très bien comme ça.

Le seigneur Galessin appuie également son Roi :

Galessin - Ah oui, c'est très bien ! C'est moderne !

Arthur, comme souvent, est très évasif et n'explique pas les raison de son refus. Nous pouvons donc supposer qu'il s'agit d'une question d'éthique. Léodagan et Calogrenant essaye alors de le convaincre

Léodagan (à Arthur) - La torture, c'est pas ce que vous croyez ! Quand c'est fait par un pro, il y a pas une goutte de sang.

Calogrenant - Le simple fait de déballer les outils, le gars, il craque !

Cependant Arthur est sceptique :

Arthur - Et s'il craque pas ?

Léodagan - Ah bah là, c'est la boucherie...

Cet extrait est révélateur des caractères et des méthodes d'Arthur, Bohort, Léodagan et Calogrenant.

Arthur est un souverain « moderne », civilisé qui souhaitent se démarquer des chefs barbares d'un monde révolu. Son objectif est avant tout l'unification réelle et la pacification de la Bretagne. Une fois la nation unie il souhaite la développer dans le bien de la population (éducation notamment, développement de l'agriculture pour éviter les famines, protection de la population, etc). Il est également opposé à l'esclavage ou la peine de mort comme nous le verrons plus tard.

Léodagan est plus vieux qu'Arthur et d'une autre tradition. Arthur a été éduqué au sein de l'armée romaine ou il a reçu des cours de stratégie militaire mais également un enseignement plus classique (mathématiques, latin, grec, Histoire, etc.).Léodagan est surnommé le

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sanguinaire et son père Gustan, le cruel. Arthur ne fut pas élevé par son père Uther Pendragon, réputé pour sa cruauté. Il cherche plutôt à s'en démarquer. Léodagan considère son gendre comme un mou, lui qui est obsédé par le renforcement de la défense.

Bohort est un être raffiné, sensible, détestant la violence1 et refusant souvent le combat au détriment et au péril des autres chevaliers. Il règne une certaine ambiguïté quant à son orientation sexuelle auprès des autres membres de Kaamelott mais le téléspectateur découvre son épouse lors de la saison 32. Il se situe donc naturellement dans le camp opposé à la torture par son pacifisme.. Il se laisse également guidé par sa couardise comme en témoigne ce dialogue de l'épisode de la saison 3, Le fléau de Dieu II dans lequel Arthur négocie avec Attila, chef des Huns :

Bohort : Sir, donnons lui les femmes, je vous en conjure !

Arthur : Les femmes lesquelles ?

Bohort (en colère) : Toutes ! Les duchesses, les rombières, les boniches et qu'est-ce qu'on en a foutre ? (tout le monde le regarde d'un air étonné) Parfaitement, s'il faut que je donne ma femme, je la donne et les vôtres avec !

Maître d'armes : Mais juste une question, on a pas encore évoqué l'éventualité de combattre. J'ai dis une bêtise là .

Bohort : Combattre Attila ? Vous êtes des dingos !

:

Calogrenant est également issu de traditions ancestrales et est roi de Calédonie. Sans être aussi rude que Léodagan, il prône toutefois un pragmatisme permettant de justifier l'emploi de la torture et autres méthodes peu orthodoxes. La fin justifie les moyens pourrait être son leitmotiv.

La suite de l'épisode est conçu pour confirmer l'aspect barbare, voire ludique de la torture.

Arthur - Mais le gars qui se fait broyer le pied, qu'est ce que ça peut lui foutre qu'on lui brûle, en plus ?

Léodagan : Non mais c'est pour la mise en scène un peu.

Léodagan : Mais sinon vous avez rien d'plus festif, là, de...

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 53

Ce qui est souvent reproché à la torture, au delà de son existence en soi, c'est le plaisir que prennent les tortionnaires, ou au minimum leur absence de scrupules. Il y a une déshumanisation qui provoque le transfert de moyen d'action inhumain mais utile à un divertissement populaire.

Les généraux français de la guerre d'Algérie se justifient en évoquant un mal nécessaire inhérent à la guerre. Mais au delà de l'aspect pratique il y a une cruauté inqualifiable et sans doute évitable. Que dire alors des G I posant en photo avec des prisonniers de guerre empilés les uns sur les autres3 ou bien encore en train d'uriner sur des morts62.

Astier pose donc ici à la fois le problème de la torture comme mal nécessaire mais également comme spectacle. Au Moyen Age les jeux sanguinaires divertissaient la foule (combat de joute, duel) les pendaisons et autres exécutions étaient publiques et ce jusqu'en 193963.

b) Compagnons de Chambrée.

L'homosexualité n'est pas évoquée qu'à travers le personnage de Bohort mais également dans l'épisode Compagnons de chambrée.

Arthur de retour de combat trouve dans son lit un homme de foi. Après un léger malentendu ce dernier se rend compte qu'il se trouve dans la chambre du Roi et qu'il n'y pas de chambre disponible et qu'il doit donc partager le lit avec le Roi. Arthur, bien que peu rassuré, souhaite dormir mais l'Archevêque engage la conversation.

Evèque : Ah je... j'voulais vous demander, et c'est un petit peu l'objet de ma visite ici, que pense le peuple breton du concept du Dieu unique, ça les inquiète ça ou...

Arthur : Le Dieu unique je sais pas mais moi qui couche avec un Evèque ça peut les inquiéter oui.

Evèque : Nan parce que bon, la chrétienté tout ça, c'est bon, c'est assez jeune faut que l'idée fasse son chemin... Mais je m'demandais justement si on pouvait pas faire dans un premier temps cohabiter l'idée du Dieu unique avec l'idée de vos Dieux anciens à vous.

Arthur : Voilà, et d'ailleurs éventuellement c'qu'on pourrait faire, c'est parler de tout ça demain !

62 http://www.sudouest.fr/2012/01/12/une-video-montre-des-soldats-americains-uriner-sur-des-cadavres-en-afghanistan-602909-4803.php

63 http://www.lepoint.fr/c-est-arrive-aujourd-hui/17-juin-1939-video-le-guillotine-weidmann-est-le-dernier-condamne-a-perdre-la-tete-en-public-17-06-2012-1474256_494.php

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Le prêtre fait semblant d'écouter Arthur mais poursuit en précisant son propos :

Evèque : Bien sur. Mais je prends un exemple tout a fait au hasard, est-ce que... est-ce que l'idée de l'homosexualité c'est quelque chose de répandu chez vous c'est heu..

Arthur : J'sais pas, pas plus qu'ailleurs j'suppose.

Evèque : Ah nan parce que nous figurez vous, nous on s'tâte hein, pour savoir si on doit l'autoriser ou l'interdire...

Arthur : L'interdire ? Pourquoi faire ?

Evèque : (criant) Eh ben voilà ! Eh ben c'est exactement c'que j'leur dit ! Voilà ! Moi je fais partie de ceux qui se battent pour qu'on l'autorise, et même qu'on l'encourage ! Voilà !!

Dans cet extrait, il est clairement sous entendu que l'évêque est homosexuel ce qui produit ici l'effet comique. Mais au delà de cet effet, nous voyons ici de quelle façon Astier évoque l'hypocrisie de l'Église sur les questions se rapportant à la sexualité

C'est cet implicite qui est intéressant. L'évêque ne dit pas « moi je suis homosexuel donc je suis évidemment pour l'homosexualité » mais il dit qu'il est pour et même pour l'encourager. C'est évidemment excessif, il n'y a pas plus à l'encourager qu'à l'interdire mais en disant cela il n'avoue pas ouvertement son homosexualité tout en la faisant comprendre.

Les autorités chrétiennes souhaitent interdire l'homosexualité, seule l'union d'un homme et d'une femme est tolérée. Et c'est encore mieux si cette union n'est consommée qu'après le mariage et si l'épouse garde sa virginité jusqu'à ce jour. Aujourd'hui encore le Pape et l'ensemble de la communauté Chrétienne (politique compris) relaient une parole hostile à l'union de deux hommes ou de deux femmes assimilant cela à la zoophilie par exemple64.

«Si les forêts tropicales méritent notre protection, l'homme (...) ne la mérite pas moins», a résumé Le Pape Benoit XVI avant de plaider une fois de plus pour le mariage, «lien de toute la vie entre un homme et une femme».

64 Le député UMP Jacques Myard a déclaré à l'antenne de la radio le Mouv' " Vous me dites qu'il faut prendre en compte l'homosexualité car elle existe, moi je dis oui, mais, la zoophilie, elle existe aussi, on fait quoi alors?". Ce n'est malheureusement pas un cas isolé au sein de ce parti

Astier tourne le sujet à l'absurde en faisant dire à l'évêque qu'il souhaite encourager l'homosexualité. Nous pouvons percevoir de la provocation dans ce sketch, une de plus dans Kaamelott à l'encontre de la religion souvent perçue comme soporifique voire dangereuse. Le meilleur exemple est le personnage du répurgateur chassant les hérétiques et demandant qu'on les envoie au bûcher. Nous pouvons le voir dans l'épisode Monogame5 :

Demetra (souriante) : Bonjour.

Répurgateur (effrayé) : Ah m'adresse pas la parole ! Hérétique ! Démon !

Il lui crache dessus. Sous le regard effaré du roi et de sa maîtresse. Répurgateur (au roi) : Excusez-moi. Pour moi les femmes, j'aime pas ça, c'est d'la saloperie. (rit doucement) Vous me suivez là ? J'vous attends...

Arthur a du mal à en croire ses yeux.

Dans cet épisode le répurgateur veut faire signer à Arthur une loi sur la monogamie. Mais celui-ci ne veut pas alors le répurgateur essaye de le convaincre :

Répurgateur : Bon attendez. Heu.... Vous signez la loi et puis de temps en temps vous pouvez allez voir toutes les jeunes femmes que vous vouliez comme avant.

Arthur : Allez y, ouais, continuez.

Répurgateur : Et puis heu... Vous v'nez m'voir en confession. Arthur : En confession ?

Répurgateur (voix off) : Oui, j'vous expliquerez. Ça prend 5 minutes et après on est tranquille on peut faire c'qu'on veut.

Une nouvelle fois, nous pouvons constater que c'est l'hypocrisie de l'Eglise qui est pointée du doigt. Le repentir se fait encore de nos jours mais davantage par les médias. Dominique Strauss Kahn par exemple vient se confesser pour être pardonné au journal de 20h de TF1 après ses écarts conjugaux et les accusations de viol contre lui en avril 2011.

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c) Le cas Yvain.

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L'adolescence, ses difficultés et la pédagogie à employer, et un terme récurrent dans Kaamelott.

Yvain, frère de Guenièvre, est l'archétype de l'adolescent des XX et XIème siècle. Pour illustrer nos propos nous allons nous pencher sur deux épisodes en particulier, Le Cas Yvain6 et Le Pédagogue.

Yvain apparaît pour la deuxième fois dans la série après l'épisode Dîner dansant7. Au cours duquel nous apprenons que Guenièvre a un frère un peu plus jeune qu'elle. Ce sont les deux seuls enfants de Léodagan et Dame Séli. Nous pouvons déjà voir dans cet épisode de vives tensions familiales et l'immaturité d'Yvain.

Léodagan : Un p'tit différent familial vous pouvez supporter ça une fois d'temps en temps, non ?

Arthur : Une fois d'temps en temps ??? Ben vous manquez pas d'air !

Séli : Tout dépend de ce que vous appelez un « différent »

Arthur : A partir du moment où on commence à péter la vaisselle j'estime que le terme est pas excessif !

Il est difficile de déterminer l'âge d'Yvain mais il semble qu'il s'agisse plutôt d'un jeune adulte que d'un adolescent. L'adolescence est une conception extrêmement récente et donc il s'agit ici d'un anachronisme. L'adolescent comme nous le décrivons dans l'introduction du corpus est avant tout une nouvelle cible pour la consommation, qu'elle soit culturelle ou non, est apparue à la fin des années 50 et correspond à l'étape de la vie où l'enfant s'émancipe mais n'est pas encore concerné par les préoccupations de la vie d'adulte.

Cependant les traits caractéristiques de l'adolescent, du à son évolution physiologique ont toujours existé.comme en témoigne Jean Jacques Rousseau, dans ce passage de .Émile (1762)

:

« [L.]homme en général n.est pas fait pour rester toujours dans l.enfance. Il en sort au tems prescrit par la nature, et ce moment de crise, bien qu.assés court, a de longues influences. Comme le mugissement de la mer précède de loin la tempête, cette orageuse révolution s.annonce par le murmure des passions naissantes (...) [L.enfant] devient sourd à la voix qui le rendoit docile : c.est un lion dans sa fiévre ; il méconnoit son guide, il ne veut plus être

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gouverné. (...) C.est ici la seconde naissance dont j.ai parlé ; c.est ici que l.homme nait véritablement à la vie (...). »65

L'enfant peut alors entrer dans une période de rébellion, un refus de toute autorité, à commencer par celle de ses parents. Il peut également se renfermer sur lui -même et le contact avec les adultes peut s'avérer délicat. C'est aussi la période de la vie où la sexualité apparaît et où l'on commence généralement à se questionner sur son orientation sexuelle.

Le refus de communication est l'un des signes nous présentant Yvain comme un adolescent. Nous pouvons le constater dans cet extrait du cas Yvain :

Arthur : (...)J'ai jamais entendu le ton de sa voix !

Yvain se racle la gorge.

Arthur : Si là, voilà.

Ou encore dans cet extrait :

Arthur : Mais comment voulez-vous qu'j'le sache il parle pas il bouge pas. Fait la gueule tout l'temps ! Dès qu'on lui fait une remarque il lève les yeux au ciel ! (Yvain lève effectivement les yeux) Tiens voilà !

Sa mère le défend, mettant en avant des prétendues qualités artistiques et évoquant sa nature sensible. Léodagan le préférerait plus viril et plus intéressé à la vie militaire :

Séli : Mais il est sensible ! Vous préféreriez peut être qu'il passe son temps à faire des concours de pets !

Arthur (énervé) : Parce que c'est là seule alternative que vous m'proposez, rien glander d'la journée où faire des concours de pets ??!

Léodagan : Entre parenthèse avec vos lubies d'vouloir lui faire faire du luth où je sais quelle connerie...

Séli : J'y peux rien si c'est un artiste, il écrit des poèmes magnifiques !

65 Rousseau (Jean Jacques), Emile, Flamarion, 1972

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Yvain est contre la violence, encore un cliché sur les adolescents depuis le mouvement hippie et les différentes manifestations de la jeunesse s'opposant à la guerre (celle d'Algérie ou encore celle du Vietnam).

Lorsque Léodagan rassure Arthur en évoquant la bravoure de son fils au combat, ce dernier prend la parole :

Léodagan (souriant) : Mais vous allez voir à la prochaine campagne hein, quand il y aura du combat, alors là il va s'réveiller ! Yvain : M'en fous j'irais pas.

Léodagan et Arthur : Quoi ?

Yvain : Je refuse d'aller me battre pour soutenir une politique d'expansion territoriale dont je ne reconnais pas la légitimité.

Yvain s'exprime à la manière du milieu estudiantin des événements de mai 68 et de la jeunesse politisée refusant de combattre contre la décolonisation notamment en Algérie66. Ce langage propre à cette jeunesse déclarait également qu' « il est interdit d'interdire » comme nous l'avons vu avec Astérix et défiait la police et la les forces répressives en proclamant « CRS SS » ou encore « Mort aux vaches »67

Suite à cela Léodagan s'en prend d'abord à sa femme lui reprochant son éducation :

Léodagan : C'est vous qui lui avez mis ces conneries dans le crâne, mais j'vous préviens hein, la prochaine fois que j'le vois avec un luth, je lui casse sur la tête !

Séli lui répond qu'il devrait « être fier d'avoir un fils un peu moins bourrin qu'la moyenne ! »

Séli est d'ordinaire un personnage dur laissant peu de place aux sentiments mais laisse apparaître quelques failles lorsqu'il s'agit de ses enfants et ses futurs petits enfants. Par exemple dans l'épisode La tarte aux myrtille8, elle se projette en grand mère faisant des tartes.

66 http://www.unef100ans.fr/spip/spip.php?article22

67 http://www.evene.fr/citations/theme/mai-1968-slogan.php

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 59

Il n'est donc pas si surprenant de la voir prendre la défense de son fils même si l'on peut douter de la sincérité de ses propos.

Léodagan menace alors son fils. Et la réponse de son fils est surprenante :

Yvain (blasé) : Super. Bonjour la pédagogie...

Arthur est gêné et leur propose de se réunir pour « régler cette petite crise » (sous entendu la crise d'adolescence) mais Léodagan ne tient compte des remarques ni de l'un ni de l'autre :

Léodagan : Tu vas aller t'battre où j't'en mets une ! Yvain : J'réponds pas à la violence.

Sa mère intervient en l'encourageant à défendre ses opinions ce qui a le don d'énerver Léodagan :

Léodagan : Ah et vous si vous voulez pas vous en prendre une par

ricochet j'vous conseille de pas la ramener hein, il ira au combat !

S'en suit alors un dialogue de sourd entre le père et le fils :

Yvain : Non j'irais pas.

Léodagan : Si tu iras !

Yvain : Non.

Léodagan : Si !

Yvain (soupirant) : Okay j'y vais.

Léodagan (se calmant) : Tout d'même.

Yvain : Mais j'm'en fous. Je refuse de porter les armes.

Yvain sait qu'il ne sortira pas gagnant et accepte donc à cette condition ce qui est évidemment absurde.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 60

Pour terminer avec cet épisode, nous pouvons également souligner le premier dialogue entre Séli et Yvain :

Séli entre dans la chambre d'Yvain, celui-ci est au fond de son lit.

Séli : Bon allez ça fait 5 fois qu'je viens maintenant vous vous levez.

Yvain : J'peux pas y aller j'ai une otite.

Séli : Dépêchez vous, le cuissot de chevreuil c'est pas bon réchauffé !

Elle s'en va, Yvain soupire sur son oreiller.

Encore une fois nous sommes ici en présence de la caricature de l'adolescent qui se sent persécuté par ses parents et qui est prêt à toutes les excuses, notamment celle de la maladie, pour échapper à des obligations. Bien souvent il s'agit de l'école, ici c'est le fait de passer à table.

d) Le Pédagogue.

Dans l'épisode Le Pédagogue, Léodagan a conscience du fait que son fils est en crise :

Léodagan : Il traverse une mauvaise passe. C'est l'âge. Une petite crise, quoi...

Cependant Léodagan ne fait preuve d'aucune pédagogie :

Léodagan : Ah mais je m'en occupe ! Je viens de le coller trois jours sans bouffer. Si ça suffit pas, je l'enferme dans une cage sans lumière. Mais j'attends lundi, pour aviser.

Léodagan désespéré décide de consulter Merlin. Généralement Merlin est le tout dernier recours pour les chevaliers.

Après avoir constaté la brutalité de Léodagan (privation d'eau, de nourriture, coups) Merlin lui conseille d'écouter son fils. Léodagan trouve cette idée farfelue mais finit par s'y résoudre.

Léodagan : Ecoutez son môme... Merlin : Eh ben ?

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 61

Léodagan : Non mais pourquoi pas... De toute façon, dans la vie, faut tout connaître...

Le dialogue suivant entre Yvain et ses parents illustre bien le fossé entre les les deux parties. Le fils s'attend à être frappé s'il s'exprime et Séli est perturbé par le comportement de son mari. Yvain finit pas prendre la parole :

Yvain : J'estime ne pas avoir à subir les fantasmes carriéristes d'une entité générationnelle réactionnaire et oppressive.

Là encore, Yvain emploie le lexique de 1968 et de cette jeunesse se rebellant contre toutes formes d'autorité, notamment celle du père ou du professeur.

Les parents ne comprennent évidement pas ce « cri du coeur ». Cependant Léodagan se satisfait de cette réponse :

Yvain : Je peux partir maintenant ?

Léodagan : Tout à fait. Merci mon grand..

Ces marques d'affection sont inhabituelles de la part de Léodagan et cela crée un effet comique.

Léodagan pense pouvoir appliquer ce concept avec quiconque discutera avec lui. Il décide d'appliquer cette méthode sur Arthur au sujet de la construction de tourelle :

Léodagan : J'écoute ce que vous avez à me dire au sujet des tourelles et je ne vous coupe pas.

Arthur : Et après ?

Léodagan : Et après j'aurai entendu ce que vous avez à me dire et on pourra recommencer la discussion sur des bases saines.

Seulement la méthode ne porte pas ses fruits et les deux hommes s'emportent. Léodagan se rend donc dans le laboratoire de Merlin pour lui reprocher l'échec de sa méthode.

Merlin lui apprend alors que l écoute mène à la réflexion.

Léodagan : Quelle réflexion ? Vous avez dit « l'écoute », vous avez pas parlé d'autres choses !

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 62

Dans cet épisode il entremêle donc l'évolution médiévale et la deuxième moitié du XXème siècle, celle de « l'enfant roi ». Il est d'ailleurs amusant de faire le lien entre cette expression et sa signification.

Selon la définition de Jean-Marie Ledain, psychologue scolaire, « l'enfant-roi est égocentrique, revendique et se plaint constamment, refuse d'aider, a besoin de capter l'attention et de se faire remarquer, est intolérant aux frustrations, est agressif et manque de socialisation »68

Bernard Petre complète cette définition en précisant encore que l'enfant-roi est le nombril de la famille, sans limite et sans devoir, amoral, égoïste, seul, manipulateur, considéré trop tôt comme adulte, à qui on passe tout et dont on réalise tous les désirs. S'il est tyran, et nous rejoignons ce point de vue, il est aussi victime de ses parents comme de la société69.

Le ressort comique de cet épisode repose sur le personnage de Léodagan qui est dépassé par ce monde en mutation. Astier joue constamment de cette transition entre le Moyen Age barbare et un monde médiéval plus raffiné.

e) Le code de chevalerie.

Dans cet épisode, le code de chevalerie a été largement modifié par Léodagan et le Père Blaise sur ordre d'Arthur. Mais celui ci s'attendait à une traduction et non à un tel bouleversement.

Arthur : Bon allez, au boulot, ça évitera d'penser au reste ! Père

Blaise, l'ordre du jour.

Blaise : Ah bah aujourd'hui j'ai rien moi.

Arthur : Rien comment ça rien ?!

Blaise : Ben on est une veille de pleine lune, et normalement une

veille de pleine lune, c'est relâche.

Tous les chevaliers se lèvent.

Arthur : Oh là oh là oh là popopop on se calme !

Ils se rassoient.

Arthur : Qu'est-ce que c'est qu'cette histoire d'relâche ?

Blaise : Bah c'est écrit noir sur blanc dans l'nouveau code de

chevalerie !

68 Intervention sur L'enfant roi de Jean-Marie Ledain, le 27 janvier 2005, organisé par l'association de parents de l'école Emanuel à Sprimont et l'UFAPEC

69 Colloque Enfant-roi ? Op. cit.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 63

Arthur : Le nouveau code ??

Blaise : Vous nous avez d'mandé de dépoussiérer l'ancien, donc on a vu ça avec messire Léodagan...

Léodagan : Ah ouais 'puis c'était tout en ancien Celte hein, on en a chié.

Arthur : Non mais j'vous ai rien d'mandé d'dépoussiérer du tout j'vous ai demandé de le traduire c'est tout !

Blaise : Eh ben justement, quand on a traduit, ça a donné relâche.

La suite de l'épisode relate les négociations entre Arthur et les chevaliers. Pour Arthur cette nouvelle version est bien trop laxiste, trop souple, Léodagan est plus partagé.

Léodagan : Oui parce qu'avec le nouveau code, ils font plus de pause, mais du coup ben ils sont plus reposés. Et moi j'pense au combat.

Arthur : Moi j'pense que si on met pas le ohla tout de suite il vont finir par nous les demander pendant les combats les pauses.

Blaise et Léodagan échangent un regard.

Arthur : Ils les ont déjà demandé c'est ça ?

Blaise (cherche dans les papiers) : Heu paragraphe 16 alinéa 4.... Léodagan : Ouais c'est ça c'est ça sur les temps de pause....

Arthur : Bon, maintenant qu'on a terminé avec les bons côtés d'la nouvelle traduction, on peut p'tet la foutre en l'air et reprendre l'ancienne ?

Arthur emploie des arguments que l'on a pu entendre lors de la mise en place des 35 heures qui consiste à penser que moins l'on travaille, moins on a envie de travailler. Étonnamment Léodagan fait preuve de plus de souplesse et rétorque que les pauses leur permettront de se reposer. Là encore c'est l'argument en faveur de la réduction du temps de travail et qui a fait ses preuves depuis. En effet la France est l'un des pays où l'on travaille le moins mais ou la productivité est la plus importante.

On peut également souligner le gag de Léodagan recherchant cette loi dans ces papiers. C'est une critique de la lourdeur administrative en général et pour le monde du travail en particulier.

Léodagan tient également des propos illustrant parfaitement la néc éssité d'un code du travail clair et connu de tous, ce qui n'est malheureusement pas le cas. Dans bien des situations les salariés ne le connaissent pas et se retrouvent floués par leur employeur du fait de leur méconnaissance de leurs droits.

Léodagan : Ah mais m'regardez pas comme ça hein, si vous êtes pas content fallait vous les farcir les négociations avec ces loustics là !

Arthur : Les négociations, mais quelles négociations ?

Léodagan : Bah tant qu'ils comprenaient rien à l'ancien code, on pouvait leur raconter c'qu'on voulait seulement depuis qu'il a été traduit alors là pardon hein ! Une pause par-ci une relâche par-là...Et puis 'c'est intolérable' et puis 'un acquis est un acquis' ah nan mais alors...

Ici le parallèle avec la société actuelle est évident, notamment avec l'évocation des acquis sociaux. Les acquis sociaux étant des droits majoritairement obtenus après de grandes luttes sociales comme les congés payés en 1936 ou la retraite qui a été accordée par Le Conseil national de la Résistance au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale.

Comme nous l'avons vu dans la présentation des thèmes au chapitre précédent le code du travail date du début du XXème siècle et n'a cessé d'évoluer depuis. Ce code a pour but de fixer des règles, aussi bien pour les salariés que pour l'employeur afin d'appliquer un cadre légal. Des inspecteurs du travail sont chargés de surveiller que ce code est bien respecté. Ce code est donc remis en question et modifié très régulièrement par diverses réformes ou chaque partie essaye d'y trouver son intérêt. Régulièrement gouvernement patronat et syndicat se réunissent pour « ouvrir des négociations », suite aux prérogatives rendues par un « groupe de travail », afin de satisfaire dans la mesure du possible l'ensemble des acteurs.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 64

Encore une fois Arthur réagit violemment :

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 65

Arthur : Nan nan nan mais y a rien à négocier ! Moi les traines-

patins j'les remets au travail vite fait !!

Tous les chevaliers se lèvent.

Arthur (crie) : Asseyez-vous !!

Ils se rassoient.

Arthur : Mais qu'est-ce que c'est qu'ce cirque aujourd'hui ?!

Blaise : Ben ça c'est la traduction de l'article 13... "si l'honneur du

chevalier est bafouée pendant une assemblée, ce dernier pourra

recourir à son droit de vidage".

Arthur : Son droit d'vidage ??

Blaise : Oui oui, j'suis d'accord avec vous c'est pas la meilleure

traduction qu'on ai

Ce droit de « vidage » pourrait correspondre au droit de retrait, c'est-à-dire le droit de se défendre pour le salarié, en se syndiquant ou en portant une affaire au conseil des Prud'hommes.

Nous pouvons aussi l'interpréter comme une obligation pour les parties de se respecter et qu'aucune ne prévaut sur l'autre. Cela peut se résumer par de grands principes tels que « les hommes naissent libres et égaux en droit » ou encore « nul n'est censé ignorer la loi. ».

A noter qu'une fois encore cet épisode comporte également des éléments réels du Moyen Age et que le code de chevalerie n'est pas une invention d'Astier. Voici le code par Saint Jean de Terre Sainte (Jérusalem):

1-Tu croiras à l'enseignement de la Sainte Eglise du Christ et tu lui

seras obéissant.

2-Tu défendras l'Eglise Chrétienne.

3-Tu respecteras les faibles et seras leur protecteur.

4-Tu aimeras ta Patrie.

5-Tu ne reculeras jamais devant l'ennemi.

6-Tu combattras pour la Foi Chrétienne.

7-Tu ne diras que la Vérité et tu resteras Fidèle à ta Parole.

8-Tu seras Généreux et Charitable envers ton Prochain. Toujours

et en tout lieu tu agiras en Défenseur du Bien et de la Justice

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 66

contre le Mal etl'Iniquité70.

Arthur a la décision finale, ce qui implique un rapport de force en sa faveur. Il en est de même actuellement : c'est au gouvernement de décider s'il applique ou non les accords convenus avec les représentants des différentes parties.

Arthur : Dites moi je pensais à une chose, il faut bien qu'elle soit

ratifiée par moi cette nouvelle traduction ?

Léodagan : Ratifiée ?

Arthur : Enfin j'veux dire, validée quoi.

Léodagan : Ah oui oui.

Arthur : Parce que si j'refuse de la signer...

Blaise : Ah ben là c'est l'ancienne traduction qui s'applique.

Le dernier dialogue nous permet de constater la difficulté de se défendre quand on ne connaît pas la loi.

Perceval : Mais j'croyais qu'on y avait droit à ça, article 7 de j'sais

pas quoi là...

Arthur : Ah, alors attention, père Blaise s'il vous plait, l'article 7.

Blaise lit en ancien Celte.

Arthur : Voilà, ça répond à votre question ?

Perceval : Du coup on y a plus droit ?

Arthur : Vous voulez qu'on vous relise l'article ?

Perceval (Voix Off ): Non non, j'vous fais confiance.

Si dans ce cas le code était traduit, Perceval pourrait argumenter et faire appliquer ce fameux article 7. Mais dans cette situation il y a un flou juridique et il n'a d'autre choix que de croire en l'honnêteté de sa hiérarchie.

70 Massian (Michel), La Chevalerie, , coll. « Terre entière », Dupuis, 1967

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 67

f) Létal.

La peine de mort est un des autres sujets contemporains évoqués dans Kaamelott. L'épisode Létal traite de ce thème. Létal signifie ce qui concerne ou qui entraîne la mort. On parle également de dose létale pour une injection.

Deux questions essentielles sont soulevées dans cet épisode, l'aspect festif de la mise à mort et son existence propre.

Au début de l'épisode, Arthur annonce à Guenièvre que les pendaisons sont désormais privées.

Arthur : Y a plus d'peuple aux exécutions. C'est fini ça, maintenant c'est privé. Léodagan, Lancelot, père Blaise.

Guenièvre est déçue, la mise à mort étant une des distractions favorites de la Reine et de ses contemporains. Il serait même bon d'ajouter que c'est l'une de ses rares activités.

Guenièvre : Oh ben non... j'avais choisis ma toilette tout, j'me faisais une joie d'sortir !

Léodagan est très clair, c'est avant tout un spectacle.

Léodagan : Moi j'ai l'impression que c'qui vous échappe, c'est la notion de spectacle.

Arthur fait alors part de ses réticences pour la peine de mort.

Arthur : J'vais vous dire, j'ai jamais aimé qu'il y ai du public aux exécutions. Toute façon j'aime pas ça les exécutions.

Lancelot : Ah bon ?

Léodagan : Mais pourquoi qu'est-ce qui vous gêne ?

Arthur : J'sais pas. J'aime pas ça, j'saurais pas vous dire pourquoi...

Léodagan pense que ce n'est pas la peine de mort en soi qui gène Arthur mais la méthode d'exécution, la pendaison. Pour Lancelot c'est avant tout l'idée de justice qui prime. Léodagan considère la justice comme un prétexte et souhaiterait qu'Arthur mette en place un nouveau mode d'exécution plus spectaculaire.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 68

Léodagan : Mais la justice me faites pas marrer, ça dure des plombes le type remue à peine les doigts d'pieds à quoi ça r'ssemble j'vous l'demande !

Arthur : Bah ça r'ssemble à une pendaison à quoi voulez vous qu'ça r'ssemble on va pas faire venir les danseuses et les montreurs d'ours.

Lancelot : La pendaison c'est sobre et solennel, moi j'trouve ça parfait.

Léodagan : Prenez la roue, par exemple, ça c'est festif. Le condamné est attaché et on commence par lui casser les bras et les jambes, bon ben tout l'monde peut venir avec son p'tit bâton, les gens participent, c'est convivial !

Actuellement, la peine de mort est encore en vigueur dans de très nombreux pays. On peut citer pêle-mêle Les Etats Unis

En France elle est abolie depuis 1981 à l'arrivée au pouvoir de François Mitterrand et fut imposée par ce pouvoir face à l'hostilité majoritaire de la population française. Malgré tout à chaque fait divers sordide, et particulièrement les infanticides (citons par exemple la tuerie dans l'école juive de Toulouse) des voix, généralement réactionnaires s'élèvent contre cette abolition. Régulièrement le Front National met en avant cet argument dans son programme électoral71.

Cependant, la visée du rétablissement de la peine de mort serait, à en croire ses partisans, uniquement dissuasive. Toutefois il est légitime de craindre une dérive de sa pratique surtout s'il est mis en place dans le cadre d'un régime non-démocratique voire totalitaire. Même dans un régime démocratique la peine de mort peut être ordonnée sans que l'on ait toutes les preuves de la culpabilité du condamné. Combien de prévenus se retrouvent dans le couloir de la mort aux USA alors que de sérieux doutes subsistent. Et il s'agit généralement d'individus appartenant à des minorités ethniques (afro-américain, latino-américains ou encore d'origine arabes)72.

71 http://www.europe1.fr/Politique/Peine-de-mort-Le-Pen-veut-un-referendum-824557/

Marine Le Pen, Présidente du Front national, déclarait le jeudi 15 septembre 2011au cours de l'émission Parole directe sur «Je ferai sur ce sujet un référendum. Je n'imagine pas d'imposer une décision telle que celle-là sans demander son avis au peuple français. Ils choisiraient alors entre la peine de mort et la perpétuité réelle, mais réelle». Interrogée plusieurs fois sur sa position personnelle, la présidente frontiste a répondu: «Moi je suis avocat, je suis pour l'échelle des peines et je pense que la peine de mort participe de cette échelle des peines».

72 http://www.lemonde.fr/ameriques/article/2011/10/10/aux-etats-unis-la-peine-de-mort-est-une-continuation-de-la-segregation-raciale_1584856_3222.html

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 69

Arthur émet alors une idée qui pour le moins va surprendre ses comparses de supprimer purement et simplement la peine de mort.

Arthur : Bah j'vais vous l'dire, moi j'ai pensé à un truc alors vous allez p'tet trouver ça con, imaginez qu'on soit le seul pays, au monde, où on ne condamne plus... à mort.

Lancelot et Léodagan le fixent.

Léodagan : Bon, écoutez Sire j'suis désolé mais moi j'ai une diligence dans une heure, puis faut qu'on ait bouclé hein. Puis j'ai pas trop le temps d'raconter des conneries non plus.

Le lendemain Léodagan revient à la charge proposant à Arthur un voyage afin de découvrir d'autres méthodes d'exécution plus « festive ».

Léodagan : Mais vous avez tort de pas vouloir régler l'problème hein si on veut rester le pays le plus puissant il faut qu'on aie des exécutions spectaculaires ! Vous passerez pas à côté !!

Arthur : Eh ben si figurez vous ! Parce que j'vais décréter que l'île de Bretagne est la première nation où la peine de mort n'existe plus voilà !!

Léodagan a les yeux ronds comme des soucoupes.

L'argument avancé par Léodagan est assez similaire à celui du Front national, à savoir la démonstration de force rendant la peine de mort dissuasive. Cet argument tend à démontrer que plus la répression est impressionnante, plus elle est efficace.

L'argument principal en faveur de l'abolition est la lutte contre la barbarie. En effet si l'on estime que le meurtre est un acte barbare alors on ne peut pas faire subir à un assassin ce pourquoi on le condamne. L'homme civilisé ne peut pas s'abaisser à la barbarie. Arthur conclut l'épisode par une réflexion allant dans ce sens.

Arthur Voix Off : Dans 5 où 10 ans, y a plus qu'les barbares qui le feront.

Cet épisode est un très bon exemple de la volonté d'Astier de nous présenter Arthur comme un souverain progressiste, ayant la volonté de rompre avec les pratiques barbares de son époque même si évidemment le trait est fortement grossi dans le cas de la peine capitale. Astier à travers d'Arthur donne également son avis sur ce sujet en ne montrant aucune ambiguïté à ce

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 70

sujet. Cela peut paraître désuet de se prononcer en 2012 sur cette question mais les propositions du FN, notamment, et les exemples que nous renvoie d'autres pays nous prouve que ce débat reste hélas d'actualité.

g) La retraite.

Pour conclure, nous allons analyser l'épisode 99 de la saison 1, La retraite73.

Perceval se demande au cours de cet épisode à partir de quel âge il a le droit d'abandonner sa fonction de chevalier et ainsi pouvoir gouter aux joies d'une vie paisible retiré dans sa maison au Pays de Galles.

Perceval : Mais moi ça fait 10 ans qu'j'retape ma cabane au Pays d'Galles, alors maintenant qu'elle tient debout, j'aimerais bien pouvoir en profiter un peu !

Profiter de sa retraite. C'est aujourd'hui encore l'aspiration de millions de travailleurs dans les pays où le droit à la retraite existe. Nous pouvons compter deux éléments fondamentaux pour que la retraite soit un moment agréable de la vie. Le premier est la santé et le deuxième nécessite de bénéficier de conditions matérielles décentes. Actuellement de très nombreux travailleurs n'ont plus une santé digne de ce nom bien avant l'âge de départ en retraite. L'espérance de vie en bonne santé varie entre 59 ans et 74 ans pour les anciens salariés. Bien évidemment les retraites de travaux physiques ont une durée de vie plus réduite que ceux exerçant une activité intellectuelle ou ce que l'on appelle plus communément le travail de bureaux. La moyenne européenne est de 68 ans pour un homme et de 68 ans et 9 mois pour une femme. Or depuis le début de la décennie 2000 la majorité des pays de l'Union Européenne ont établi l'âge de la retraite à 65 ans (hors régimes spéciaux). Perceval en 2012 ne pourrait donc profiter de sa cabane que trois ans ! Les chiffres communiqués par le ministère du travail sont encore plus alarmants74.

Perceval n'obtient pas de réponse précise du Roi puisque ce cas de figure ne s'est encore jamais posé. Arthur pense simplement qu'il s'agit d'un honneur d'être un chevalier et qu'il faudrait mourir les armes à la main. Sans arrivée à de telles extrémités, il est aujourd'hui considé-

73Kaamelott, Livre I, épisode 100, La retraite.

74L'espérance de vie « en bonne santé » rend compte non seulement de l'allongement de la durée de vie mais aussi de cet allongement sans incapacité majeure, liée aux maladies chroniques ou aux séquelles des affections aiguës ou de traumatismes. En France, en 2005, l'espérance de vie « en bonne santé » à la naissance est estimée à 64,3 ans pour les femmes et à 62 ans pour les hommes, des scores comparables à ceux de pays voisins mais un peu inférieurs à ceux observés dans les pays nordiques. Pour les femmes et les hommes âgés de 65 ans, elle est respectivement de 9,4 et 8,2 années. Entre 1995 et 2003, l'espérance de vie en bonne santé à la naissance avait augmenté d'un an et demi pour les femmes et d'une demi-année pour les hommes, soit pour les femmes une amélioration plus rapide que celle de la seule espérance de vie.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 71

ré que la retraite est un privilège et que son âge légal doit être repoussée en fonction de l'espérance de la vie, sans prendre en compte la pénibilité ou des épisodes propres à la vie comme une période de chômage ou de maternité.

Nous pourrions analyser l'intégralité des épisodes tant cette série est riche de procédés anachroniques et ce, dans tous les domaines qu'ils s'agissent des arts, des questions de société, des moeurs, de la politique, de l'art militaire, etc. La série regorge d'anachronismes plus ou moins grossiers mais qui n'ont pas toujours la même utilité. Parfois il s'agit simplement de références à des oeuvres ayant inspirés AA comme la présence du sabre laser de la saga Star Wars. Mais bien souvent il s'agit d'astuces scénaristiques afin d'introduire un personnage, un fait ou un objet n'appartenant pas à la légende arthurienne. L'un des exemples les plus parlants est la présence d'Atttila, Roi des Huns (né vers 395 - mort en 453).

L'anachronisme est toutefois un terme inexacte puisque la LA est elle-même extrêmement floue d'un point de vue chronologique. Elle s'étire sur plusieurs siècles, les différentes versions se contredisent, se complètent et les historiens s'interrogent sur des faits n'ayant pour la grande majorité jamais existé.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 72

Conclusion

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 73

A partir de ce travail sur les références, la stratégie des chaines de télévisions ou encore l'étude de l'anachronisme nous pouvons percevoir plusieurs éléments nous permettant d'affirmer que Kaamelott n'est pas une simple shortcom commandé par une chaine de télévision pour servir de locomotive au prime time mais une oeuvre de fictions beaucoup plus complexe et beaucoup plus riches que les autres productions françaises.

Il nous faudrait évidemment davantage de temps pour pouvoir répondre pleinement à cette question en analysant bien d'autres éléments tels que l'image par exemple, la réception, en réalisant une comparaison avec les autres shortcom et bien d'autres encore. Nous avons pu constater par moment que les shortcom avait la même base (format, genre, moyen, diffuseur) et que la comparaison peut avoir un avoir un réel intérêt.

Si nous nous en tenons au travail réalisé nous pouvons tout de même en tirer quelques conclusions

La première est que bien que l'action se situe au Moyen Age, la série n'oublie pas pour autant d'aborder des problématiques contemporaines. L'auteur s'emploie à traiter de sujets universels et à priori intemporels, tel que l'amour, la séduction, le pouvoir, la mort, l'ivresse, la trahison... mais également la torture, la peine de mort, la retraite ou encore l'adolescence. Nous pourrions décréter un peu promptement que ces questions ont été débattues de tous temps. Il est vrai que la torture n'a pas été conçue par l'armée américaine ou française au cours du 21ème siècle et que la cruauté est sans doute aussi vieille que l'Homme. Mais sa remise en cause est beaucoup plus récente. Désormais il faut la justifier comme un mal nécessaire. Il en est de même pour l'adolescence, étant à la base une transformation physiologique ; nous pouvons donc affirmer qu'il y a toujours eu des adolescents. Cependant Kaamelott ne s'intéresse pas à cet aspect des choses, d'ailleurs Yvain ou Gauvain ne parle jamais de sexualité, mais bien à l'adolescent tel que nous le connaissons depuis environ un demi-siècle. Soit un palier intermédiaire entre l'enfance et l'âge adulte avec ses propres codes, ses propres envie, ses propres aspirations mais également ses angoisses et ses tourments. Nous pourrions refaire cette démonstration pour les autres sujets (le travail a toujours existé alors nous pouvons juger qu'une certaine forme de code ou législation lui a toujours été lié) cependant l'essentiel à retenir est que Kaamelott se place toujours du point de vue contemporain pour traiter de ces sujets.

La visée dAA en introduisant ses sujets contemporains est uniquement artistique. Il n'y a aucun courage en 2006 en tant qu'auteur français à dénoncer la peine de mort, prendre position sur la question de la pédagogie, revendiquer la nécessité du code du travail.

Cependant A.A prétend parfois aller plus loin que la recherche du rire et créer un anticonformisme évident à ses yeux. Dans le dossier de presse de son long métrage David et

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 74

Madame Hansen75 nous pouvons lire ceci : « Ce qui m'anime depuis mes débuts est une colère contre la conformité. Je suis un peu connu grâce à une série très personnelle, sur laquelle je n'ai jamais triché et lorsque l'on regarde Kaamelott dans son intégralité, je m'y livre beaucoup. Arthur arrive toujours dans un pays où il combat des règles comme la torture ou l'esclavage. Il est progressiste dans un monde barbare et c'est pour cela qu'il s'en prend plein la gueule ».

Astier a déclaré dans plusieurs entretiens qu'il ne votait pas et qu'il ne souhaitait pas traiter de sujets politiques. Le Roi Arthur d'Astier n'est donc pas un Tintin du 21ème siècle. En effet, Hergé, le père du célèbre reporter Belge pour les enfants « de 7 à 77 ans » se servait des aventures de son personnage pour diffuser des messages antisémites, colonialistes ou encore anticommunistes76.

Astier se contente d'enfoncer des portes ouvertes à notre époque, de réaffirmer de grands principes, de se placer du bon coté de la barrière mais il serait exagéré de parler d'épisodes engagés. Même un sujet d'actualité comme le mariage homosexuel qui aurait pu être abordé par exemple dans l'épisode Compagnons de chambrée, se contente d'évoquer la position de l'Eglise sur l'homosexualité. Astier aurait pu aussi en profiter par parler du mariage des prêtres mais il n'en fera rien.

L'objectif de ses épisodes est donc uniquement de divertir le téléspectateur en l'associant à des problématiques où il se sentira davantage impliqué que s'il s'agissait d'une question concernant uniquement le Moyen Age.

Le Moyen Age traité de façon contemporaine, par son langage par ses sujets, par ses références est une des raisons qui nous permet d'affirmer que Kaamelott est une série française se démarquant des autres productions. Encore une fois c'est une façon parmi tant d'autres de distinguer la série. Nous avons également évoqué son changement de format. Nous pouvons également citer la tournure dramatique que la série prend à la fin de la saison IV. Des personnages obscurs, apparaissent ; Arthur n'est plus roi ; la dépression, la mort, la mélancolie, la trahison, la vengeance occupent une place prépondérante dans les saisons V et VI. Cependant les personnages gardent le ton qui fait le succès de la série avec un rythme et des répliques que l'on croirait sorties d'un film de Michel Audiard. Ce qui permet ces changements c'est le succès de la série qui a permis à Astier d'obtenir un budget bien supérieur à celui attribué pour les premières saisons. Nous pouvons en conclure que les moyens changent, mais l'esprit reste.

75 http://astierandco.fr/, dossier de presse de David et Madame Hansen 76Maxime Benoit-Jeannin, Les guerres d'Hergé, édition Aden, Bruxelles 2007

Astier n'est pas un homme de télévision. Le théâtre est son terrain de jeu d'origine et Kaamelott est né au cinéma grâce au court métrage Dies Irae. Kaamelott existe également en bande dessinée et connaitra une suite au cinéma d'ici 2015 avec une trilogie, ce qui n'est pas sans rappeler encore une fois les sagas Star Wars et le Seigneur des Anneaux. Cette trilogie apportera encore une dimension supplémentaire à « la saga Kaamelott » et la fera entrer définitivement dans l'ère des films-mondes qui donnent lieu à des formes étendues de consommation de produits dérivés et créent de véritables univers désormais entretenus via Internet »77.

Cette multiplicité de medium et de media utilisés par Astier pour donner vie à sa version de la LA la démarque encore davantage des autres productions télévisées et lui confère donc, en partie, son originalité.

Pour conforter l'hypothèse de l'originalité de Kaamelott il existe de nombreuses pistes mais la plus pertinente semble celle de l'analyse filmique. En effet nous venons de voir sur ce travail de première année et davantage sur celui-ci que Kaamelott ne ressemblait à aucune autre série française par son écriture. Il faudrait donc analyser, et cela peut être l'objet d'un projet futur de recherche, les spécificités de Kaamelott d'un point de vue filmique.

Il peut s'agir de la temporalité, la durée fictive des intrigues (un épisode peut évoquer un fait durant un jour comme une heure) de l'utilisation des plans, du son, etc.

Cette nouvelle approche de la série nous permettrait de l'analyser plus précisément qu'actuellement car bien que pertinente les théories de Genette ne sont pas réellement adaptées au genre télévisuel C'est également pour cette raison que nous sommes ici en présence d'une analyse portant uniquement sur le texte et non sur le son et l'image.

Nous le voyons donc, Kaamelott à un véritable intérêt épistémologique et peut encore faire l'objet de très nombreux travaux de recherches et ce dans plusieurs disciplines.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 75

77 Sadoul (Georges), L'histoire du cinéma mondial, Flammarion, Paris, 1999

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Bibliographies

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 77

Livres

ASTIER, Alexandre, Kaamelott, Livre 1, Texte intégral, Télémaque, 2009

Kaamelott : analyse de la série humoristique

ASTIER, Alexandre, Kaamelott, Livre 2, Texte intégral, Télémaque, 2009

ASTIER, Alexandre, Kaamelott, Livre 3, Texte intégral, Télémaque, 2010

CHRETIEN DE TROYES, Lancelot ou Le chevalier de la charrette, Le livre de poche, 1996

CHRETIEN DE TROYES, Romans de la Table Ronde, Folio classique, 2010

BORON (de), Robert, Merlin. Roman du XIIIe siècle, éd. Alexandre Micha, Genève, Droz,

T.L.F., 1979, rééd. 2000.

BORON (de), Robert, Le Roman de l'Estoire dou Graal, éd. William A. Nitze, Paris, Cham-

pion, C.F.M.A., 1927.

BORON (de), Robert, (cycle attribué à), Le Roman du Graal, éd. Bernard Cerquiglini, Paris,

10/18 « Bibliothèque médiévale », 1981.

FRAPPIER, Jean, Étude sur Yvain ou le Chevalier au Lion de Chrétien de Troyes [1952],

Paris, SEDES, 1969.

AMOSSY, Ruth, L'argumentation dans le discours, Nathan Université, 2000

DE SAINT MAURICE, Thibaud, Philosophie en série saison 2, Ellipses Marketing 2010

FERLAMPIN-ACHER, Christine et HÜE, Denis, Mythes et réalités, Histoire du Roi Arthur,

Edition OUEST-France, 2009

GENETTE, Gérard, Palimpsestes, La littérature au second degré, Éditions du Seuil,

collection Essais, Paris, 1982,

JOST, François, 50 fiches pour comprendre les médias, éd. Bréal, 2012

LE NABOUR, Eric, Kaamelott, Tome 1 : Au coeur du Moyen Âge, Perrin, 2007

LE NABOUR, Eric, Kaamelott, Tome II : À la table du Roi Arthur, Perrin, 2007

MAINGUENEAU, Dominique, Analyser les textes de communication, Armand Colin, 2007

NOGUEZ, Dominique, L'arc-en-ciel des humours, Le Livre de Poche, « biblio/essais»

SADOUL, Georges, L'histoire du cinéma mondial, Flammarion, Paris, 1999

SANGSUE, Daniel, La parodie, coll. Contours Littéraires, p17, Hachette, 1994

YAGUELLO, Marina, Alice au pays du langage, Seuil (1 mars 1981)

DEROIDE , Ioanis , Les séries TV, mondes d'hier et d'aujourd'hui, Ellipses, 2011.

BOURDIEU, Pierre, la distinction, coll. Le sens commun, éd. de Minuit, Paris, 1979

DVD

ASTIER, Alexandre, Kaamelott : Livre I - Coffret 3 DVD, 28 septembre 2005, M6 Vidéo

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 78

ASTIER, Alexandre, Kaamelott : Livre II - Coffret 3 DVD, 14 juin 2006, M6 Vidéo

ASTIER, Alexandre, Kaamelott : Livre III - Coffret 3 DVD, 8 novembre 2006, M6 Vidéo ASTIER, Alexandre, Kaamelott : Livre IV - Coffret 3 DVD, 26 septembre 2007, M6 Vidéo ASTIER, Alexandre, Kaamelott : Livre V - Coffret 4 DVD, 19 novembre 2008, Warner Home Video

ASTIER, Alexandre, Kaamelott : Livre VI - Coffret 4 DVD, 25 novembre 2009, Warner Home Video

CHABBERT, Christophe, Aux sources de Kaamelott, acte 1 : les moeurs et les femmes, Livre II, 28 septembre 2005, M6 Vidéo

CHABBERT, Christophe, Aux sources de Kaamelott, acte II . la Magie et l'Eglise, Livre III, 8 novembre 2006, M6 Vidéo

CHABBERT, Christophe, Aux sources de Kaamelott, acte III . l'art de la guerre,Livre IV, 26 septembre 2007, M6 Vidéo

CHABBERT, Christophe, Aux sources de Kaamelott, acte IV : géopolitique du royaume, 19 novembre 2008, Warner Home Video

ABIKER, A. BESSN et F. PLET-NICOLAS dir., Le Moyen Âge en Jeu, DVD-ROM inclus, S. Pessac, Presses Universitaires de Bordeaux, Eidôlon n°86, décembre 2009 :

WEBOGRAPHIE

http://www.strategies.fr/actualites/medias/147151W/le-marketing-et-l-art-ne-se-melangentpas-bien.html http://www.linternaute.com/video/202457/l-integralite-du-chat-avec-alexandre-astier/ http://lecheminduphilosophe.wordpress.com/2009/05/28/le-genre-le-public-et-le-privecritique-feministe-de-la-dichotomie-public-prive-et-recours-a-la-notion-de-genre/ http://www.fabula.org/atelier.php?Les_relations_transtextuelles_selon_G._Genette

http://medievales.revues.org/6173 Mark Adderley et Alban Gautier, « Les origines de la légende arthurienne : six théories », Médiévales [En ligne], 59 | automne 2010, mis en ligne le 20 mars 2013, Consulté le 23 juillet 2012.

http://www.cairn.info/revue-reseaux-2011-1-page-137.htm#no11

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 79

Table des matières

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 80

Remerciements 2

Bilan de recherche 6

Kaamelott : Du programme court humoristique au format américain dramatique

10

1. Le phénomène des programmes courts humoristiques 11

2. La télévision, objet culturel 13

3. Les séries, un atout majeur pour la télévision du XXIème siècle. 14

4. M6 et les programmes courts. 15

5. Evolution de Kamelott. 17

6. La distribution et ses spécificités. 18

a) Livre I à IV : 18

b) Livre V et VI 19

7. L'intrigue. 20

8. La communauté de fans. 23

a) Son pouvoir d'influence. 24

b) Hypnoweb. 24

Kaamelott : 26

De la Légende Arthurienne à Michel Audiard, une série construite sur plusieurs

niveaux d'intertextualité. 26

1. Les origines 27

2. Le formalisme russe. 29

3. La transtextualité de Genette. 30

4.Le pastiche 31

Les traces de contemporanéité dans Kaamelott, une astuce scénaristique pour

évoquer le siècle du téléspectateur. 45

1. Présentation du corpus 46

2. Contextualisation des thèmes analysés. 47

3. Analyse des épisodes. 49

a) Arthur et la Question 49

b) Compagnons de Chambrée. 53

c) Le cas Yvain. 55

d) Le Pédagogue. 60

e) Le code de chevalerie. 62

f) Létal. 67

g) La retraite. 70

Conclusion 72

Bibliographies 76

Livres 77

DVD 77

WEBOGRAPHIE 78

Annexe 1

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 81

Dans la chambre royale...

Guenièvre (essaie d'engager la conversation alors qu'Arthur lit) : Ah tiens aujourd'hui j'ai fait taillé le rosier de l'arrière cour parce qu'il en avait drôlement b'soin !

Arthur se demande ce qu'elle fait.

Guenièvre : Et vous, vous m'racontez pas votre petite journée ?

Arthur (peu convaincant) : Ah ben ! Faut l'temps d'encaisser la votre déjà ! Pas toutes les émotions d'un coup !

A la table ronde...

Galessin : Sire, moi je cherche juste à comprendre...

Calogrenant : On réussi à mettre la main sur le voleur de bétail, il refuse de donner l'nom d'son complice qu'est c'qu'on attend ? Arthur : Qu'est c'qu'on attend pour quoi ? Il veut toujours pas parler ?

Blaise : Heu... Toujours pas non... Il dit qu'il nous emmerde. Calogrenant : En plus !

Galessin : On passe pour quoi j'vous l'demande ! Bohort : Mais qu'est c'que vous voulez qu'on y fasse ? Calogrenant : C'est pourtant pas les solutions qui manquent ! Léodagan : C'est vrai qu'c'est curieux cette manie de pas vouloir torturer ! Hum... Ca vient d'quoi ça ?

Arthur : Ca vient d'chez moi y a pas d'tortures, voilà. Bohort : C'est très bien comme ça !

Galessin : Ah ben oui c'est très bien ! C'est moderne. Calogrenant : En attendant l'complice il cavale toujours !

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 82

Léodagan : Vous savez la torture c'est pas c'que vous croyez ! Quand c'est fait par un pro y a pas une goutte de sang ! Calogrenant : Le simple fait de déballer les outils, le mec il craque !

Arthur : Et si y craque pas ?

Léodagan : Alors là heu... C'est la boucherie...

Dans une autre salle...

Venec (fait une démonstration de ses produits) : Vous mettez le pied d'votre gars là-dedans, vous fermez bien, vous tournez la vis jusqu'à que vous entendiez l'bruit d'l'os.

Bohort : J'ai chaud... Je me sens pas très bien...

Léodagan : Oh, ça c'est du classique, hein, ça on en trouve à peu près partout.

Venec : Bon. Celui-là c'est l'modèle adulte mais on a toutes les tailles.

Arthur : Mais qui c'est qui invente ces trucs ? Vous les connaissez les mecs vous ?

Léodagan : Ca ça a toujours plus ou moins existé...

Venec : De temps en temps on tombe sur un farfelu qui croit qu'il a inventé l'eau chaude, mais l'plus souvent c'est une adaptation d'un modèle existant ! (prend un autre objet) Ca par exemple c'est simple. Pour rester sur l'thème du pied, vous dites à votre gars de bien marché au milieu d'la pointe (sort un marteau énorme) et tac un coup ferme sur l'dessus.

Léodagan : Pas mal, ça.

Bohort : C'est horrible cette chaleur, j'suis en sudation, là !

Léodagan : Et l'autre là vous avez la trappe là en dessous pou mettre des braises, ou pas ?

Venec : Non ça c'est le modèle au dessus, il est un poil plus cher. Léodagan : Ouais...

Arthur : Mais... Attendez, l'mec qui est en train d'se faire broyez l'pied qu'est c'que ça peut bien lui foutre qu'on lui crame en plus ?

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 83

Léodagan : Non mais c'est pour la mise en scène un peu.

Venec : Tout c'qui est feu ça impressionne bien !

Bohort : J'ai l'impression que j'fais des palpitations...

Léodagan : Mais sinon vous avez rien d'plus festif, là, de...

Venec : Si vous aimez j'ai ça (sort une pince immense) C'est pour

arracher les noix.

Bohort (pas très rassurés) : Les noix ? Les fruits.

Venec : Ah non. Les noix, les noix...

Grand silence...

Plus tard...

Venec : Ca c'est ce que j'appelle la gamme de voyage : vous êtes en déplacement, vous avez pas envie d'vous encombrez avec du barba, vous avez ça !

Léodagan : Et ça c'est pour ?

Venec : Alors là vous sectionnez l'doigt au niveau de la première phalange.

Arthur : Ouais, c'est déjà moins vicelard...

Bohort : Moins vicelard heu...

Arthur : `Fin je veux dire comparé au reste, quoi.

Venec : Ca c'est du progressif. Vous coupez une phalange, vous en coupez une deuxième, si l'gars cause toujours pas revenez sur le premier doigt vous lui bouffez une phalange en plus (sort un papier) non mais d'toute façon y a un fascicule livré avec, c'est tout expliqué.

Léodagan : Ca on peut toujours en prendre quatre ou cinq, heu, ça s'ra jamais perdu ça. Hein ?

Venec : Voilà, j'crois qu'on a fait l'tour (sort un espèce de sécateur) Oh, sinon y a ça aussi, c'est l'bel outil.

Arthur : Qu'est c'qu'on coupe avec ça ?

Venec : Ah c'qu'on veut. Mais enfin... C'est plutôt pour tout ce qui est génital.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 84

Bohort : Ca... Ca vous ennuie si j'vomis ?

Le soir... Arthur parle enfin avec Guenièvre... Il tient une cage entre les doigts.

Arthur : Vous mettez ce bout là dans un orifice.

Guenièvre (choquée) : Un orifice ???

Arthur : Oui, c'est au choix, enfin bon c'est vrai que classiquement c'est plutôt le.... Bref. Vous prenez l'aiguille et vous piquez le cul du rat. Bon là c'est un rat empaillé mais c'est pour vous montrer. Le rat rentre dans l'orifice et il bouffe tout. (Guenièvre est dégoutée et Arthur ravit) Hein ? Oui, oui ça ? Hein ? Pfiou (voix off) Vous avez raison c'est plus sympa quand on s'raconte nos journées !

Annexe 2

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 85

Quelque part... Demetra est en train de finir d'habiller le roi quand le Répurgateur arrive.

Répurgateur : Ah Sire !

Arthur : Tiens Répurgateur qu'est c'que vous faites là ? Répurgateur : Ah ben j'vous cherchais...

Demetra (souriante) : Bonjour.

Répurgateur (effrayé) : Ah m'adresse pas la parole ! Hérétique ! Démon !

Il lui crache dessus. Sous le regard effaré du roi et de sa maitresse.

Répurgateur (au roi) : Excusez-moi. Pour moi les femmes, j'aime pas ça, c'est d'la saloperie. (rit doucement) Vous me suivez là ? J'vous attends...

Arthur a du mal à en croire ses yeux.

GENERIQUE

Dans une salle...

Arthur : Alors vous vouliez m'voir ?

Répurgateur : Oui, tout à fait, heu... D'ailleurs au passage je vous remercie, hein, vous êtes toujours à l'écoute d'autrui, heu... Vraiment quand on... quand veut l'voir on peut l'voir (Père Blaise confirme, l'air légèrement résigné mais ne dit mot) C'est... C'est... C'est extraordinaire vous êtes vraiment un roi très, très à l'écoute et ça c'est extraordinaire, hein !

Arthur n'a écouté qu'à moitié comprenant bien que le Répurgateur ne fait pas tout ces compliments gratuitement.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 86

Arthur : D'accord. Alors qu'est ce que c'est que ce fatras ? Répurgateur : Alors c'est un heu... C'est une loi que je voulais soumettre à votre ratification, une loi toute simple toute bête, voilà, faut juste signer, hein.

Blaise : Et le roi vous avait donné un accord de principe, non ? Arthur : Ah ben non. Justement. J'me souviens pas d'ça. Répurgateur : Ah oui, non, non... Mais c'est bon ça... J'vais pas vous ennuyer avec des réunions, des conférences, des blablas, hein ? D'autant que vous avez autre chose à faire vous travaillez énormément et puis heu... Et puis heu.. Le public apprécie, je crois, cette attitude puisqu'il est vraiment... Le peuple vous acclame !

Arthur (pendant que le Répurgateur parle -dans la partie soulignée) : Oui, oui on avance là. (quand le Répurgateur a enfin fini) Oui, alors par rapport à... La loi.

Répurgateur : Alors c'est heu... Ben c'est heu... Tout à... Tout à était prémâché, hein, c'est bon vous n'avez, j'vous dis que... qu'à signer en bas à droite, voilà, comme ça.

Arthur (s'apprête à signer) : Là ?

Répurgateur : Oui, ici là comme ça. Parfait. Pardon... ici, hein. Arthur (ne signe pas) : Oui à ce... Non, oui d'accord. Simplement remémorez moi un p'tit peu de quoi il s'agit, à peu près. Répurgateur : Pour la loi ?

Arthur : Oui pour la loi.

Répurgateur : C'est une loi heu... Qui interdit le... La polygamie... (essaie de sourire)

Arthur balance sa plume et croise les bras.

Maintes explications plus tard...

Arthur : Donc si j'comprends bien on pourrait plus avoir plusieurs femmes en même temps ?

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 87

Répurgateur : Heu... Non on pourrait plus avoir plusieurs femmes.

Il sourit.

Arthur : C'est ça. Ce s'rait juste une à la fois.

Répurgateur : Ah non. Juste une.

Arthur (réfléchit) : Juste... Comment ça juste une ? J'comprend rien...

Répurgateur : Vous comprenez rien... Bon heu... Vous par exemple...

Arthur (le coupe) : Non pas moi !

Répurgateur : Ah bon ? Bon... Alors votre heu... (montre Lancelot) Vous par exemple.

Lancelot : Ah non ! Non, non. Moi ça n'a rien avoir ! (fier) Moi j'ai juré de n'donner mon âme qu'au véritable amour dont la pureté n'aurait d'égal...

Arthur (le coupe) : Voilà. Ce non lui c'est chiant. C'est heu... C'est spécial lui.

Répurgateur : Bon beh alors vous par exemple...

Arthur : Non pas moi ! (montre Blaise) Ben prenez lui.

Blaise (se redresse, regarde Lancelot puis le roi) : Moi ? Mais pfff...

Arthur : Oui non c'est vrai non... Bon beh moi alors...

Répurgateur : Bon heu vous par exemple heu... Votre femme c'est Guenièvre, notre reine bien aimée ?

Arthur : Oui et alors ?

Répurgateur : Bon. Alors vous êtes d'accord que de temps en temps, hein, vous avez eu des p'tites histoires, HEIN ? Hein vous allez pas l'nier ! Ca, hein, des p'tites histoires avec des p'tites paysannes (Père Blaise parait amusé -comme presque toujours depuis le début- alors que Lancelot a l'air ennuyé) hein, qu'était toujours pas très propres, hein, puis des p'tites jeunes filles qu'étaient dans votre lit pour des raisons, hein, pas bien claires, hein, c'est pas joli joli, hein, c'est moche, hein ? Bon d'accord.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 88

Bon. Alors votre femme c'est Guenièvre notre reine bien aimée donc heu... Vous n'êtes qu'avec Guenièvre un point final et c'est tout. Voilà, vous signez là, pardon.

Arthur (la pilule a du mal à passer) : Je... Je suis qu'avec Guenièvre et... ?

Répurgateur : Et c'est tout. Un point c'est tout. Heu... Point final. Vous ne... Vous n' allez qu'avec heu... Guenièvre notre reine bien aimée qu'est... Qu'est notre reine bien aimée. Vous signez, un point final, c'est tout. Pardon.

Arthur (faiblement) : Je vais.... (s'éclaircit la voix mais ne parle pas d'un ton plus assuré) Je vais réfléchir un peu encore. Répurgateur : Mais Sire....

Arthur : Non, non, non, non, non, non. Non mais pas d'problème par contre c'est très intéressant...

Lancelot (plutôt conquit-de toute façon la loi ne le concerne pas vraiment) : Moi j'avais jamais entendu parler d'ça mais heu... Pourquoi pas.

Blaise : Non c'est... c'est moderne c'est...

Arthur : C'est ça ! C'est intéressant mais faut faire attention à c'que ça soit pas TROP moderne, voilà. (Grand silence- Le roi baisse la main du Répurgateur qui tient la plume pour signer la loi) Ca posez le, ça posez le.

Enorme silence.

Dans la chambre du roi...

Guenièvre : Moi je dis que vous devriez vous débarrassez de c'type avant qu'il ne répande ses idées ridicules dans tout l'pays ! Arthur : Puis de toute façon à force d'gonfler tout l'monde un d'ces quatre on va le retrouver pendu à un arbre et il demandera pas d'où ça vient !

Guenièvre : Une seule femme ! Quelle idée !!

Arthur : Mais qu'est c'qui faut pas entendre comme connerie alors !

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 89

Guenièvre : Et puis vous vous ennuierez avec une seule femme vous, non ?

Arthur : Oh putain ouais !

Grand silence...

Guenièvre : Par contre il y a une chose à laquelle on pourrait réfléchir... C'est à autoriser la polygamie pour les femmes.

Arthur (tout sourire) : Non ! Guenièvre : Pourquoi non ? Arthur (ne s'énerve pas) : Ah non ! Attendez ! Mais vous vous rendez compte ! Après ça...

Guenièvre ne comprend pas très bien. Dans une salle...

Répurgateur : Bon allez vous signez la loi, s'il vous plaît... Arthur (crie un peu) : Non ! J'vous ai dit. J'la signe pas ! Répurgateur : Bon attendez. Heu.... Vous signez la loi et puis de temps en temps vous pouvez allez voir toutes les jeunes femmes que vous vouliez comme avant.

Arthur : Allez y, ouais, continuez.

Répurgateur : Et puis heu... Vous v'nez m'voir en confession. Arthur : En confession ?

Répurgateur (voix off) : Oui, j'vous expliquerez. Ça prend 5 minutes et après on est tranquille on peut faire c'qu'on veut.

Annexe 3

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 90

Guenièvre et Séli sont dans la salle à manger.

Séli : Vous avez fait vos valises pour demain ?

Guenièvre : Oui mère, ça fait trois fois que vous me le demandez !

Séli : Vous avez fait préparer votre chambre pour l'Evèque

Boniface ?

Guenièvre (la bouche pleine) : Ca m'agace un peu de devoir

donner ma chambre à un Evèque...

Séli : Vous vous en foutez vous êtes pas là.

Guenièvre : Et si Arthur revient plus tôt que prévu ? Il va pas

dormir avec l'Evèque quand même !

Séli : Vous vous en foutez vous êtes pas là !

GENERIQUE

Arthur arrive dans sa chambre l'air érinté, et s'assoit sur son lit sans regarder derrière lui.

Arthur : J'ai pris la route juste après le banquet, j'me sentais pas d'passer encore la nuit là-bas j'en avais marre... Vous êtes là vous finalement ? J'croyais qu'vous passiez trois jours en Carmélide ? L'Evèque se redresse dans le lit, avec sa coiffe et ses chapelets. Evèque : Plait-il ??

Arthur (se relevant) : Mais qui êtes-vous ?! Qu'est-ce que vous foutez là ?!

Evèque : Mais je vous rétorque la même question mon p'tit père !! C'est à quel sujet ??

Arthur : Au sujet qu'vous aller vite fait décaniller d'ici où j'appelle la garde !

Evèque : Ne vous donnez pas cette peine, j'allais justement le faire. (criant) A moi !! A l'assassin !!

Arthur : C'est pas possible d'entendre ça ! Mais qui êtes vous ?!

Evèque : Je suis Monseigneur Boniface, voyou ! (tend la main) Evèque de Germanie.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 91

Arthur : Ah... Ah c'est vous l'Evèque... Ben j'suis Arthur, Roi des Bretons.

Evèque : Oh ! Oh Sire... Enchanté... (lui fait le signe de croix) Que Dieu vous... bénisse...

Plus tard...

Arthur : Bon je reconnais que c'était pas très futé d'vous avoir donné ma chambre.

Evèque : C'est une idée originale !

Arthur : C'est une idée d'ma femme surtout. Elle en a dix par jour des comme ça.

Evèque : Oui mais quand vous dites que c'est votre chambre, c'est votre chambre fixe ou bien c'est une chambre... une chambre comme ça quoi...

Arthur : J'sais pas quoi vous dire moi, c'est ma chambre.

Evèque : Ah oui ! Ah oui donc c'est quelque chose qu'est quand même très admis, c'est bien bien... carré quoi...

Arthur : Ben c'est à dire que comme j'suis Roi, j'ai une chambre attitrée, voyez... J'tape pas aux portes tous les soirs pour voir si on peut pas m'débarasser un coin.

Evèque : Mais voui. Mais alors figurez vous j'me demandais justement... parce que vous savez ça m'fait penser à quelque chose qu'on appelle, je sais pas si vous connaissez, qu'on appelle couramment une chambre d'amis, voyez.

Arthur : Oui, nan mais on en a des chambres d'amis nous aussi, mais y'a des amis dedans, voilà.

Evèque : Cela dit, c'est assez innatendu pour moi de m'retrouver dans une chambre d'amis parce que pour une visite protocolaire j'aurais imaginé quelque chose de plus... de... Remarquez celle ci est cossue, hein !

Arthur : Oui, parce que c'est pas une chambre d'amis, celle là. On en a des chambres un peu classes pour le gratin, mais là c'est tout plein.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 92

Evèque : Aah oui ! Ah d'accord, ah oui, oui oui, alors là elle est un peu chic hein... Et... pour les repas on fait comment ?

Arthur : Nan mais alors, comment on fait là, nan parce que nan là j'suis désolé mais j'ai 8 heures de cheval dans les pattes faut un peu qu'je... nan voyez...

Evèque : Oh si j'comprend ! Non mais j'ai toujours l'habitude de prendre tout le lit alors... (lui fait de la place) vous voulez un... (lui tend des chapelets)

Plus tard...

Ils sont tous les deux dans le lits, Arthur semble sur le point de s'endormir.

Evèque : Ah je... j'voulez vous demander, et c'est un petit peu l'objet de ma visite ici, que pense le peuple breton du concept du Dieu unique, ça les inquiètes ça ou...

Arthur : Le Dieu unique je sais pas mais moi qui couche avec un Evèque ça peut les inquiéter oui.

Evèque : Nan parce que bon, la chétienté tout ça, c'est bon, c'est assez jeune faut que l'idée fasse son chemin... Mais je m'demandais justement si on pouvait pas faire dans un premier temps cohabiter l'idée du Dieu unique avec l'idée de vos Dieux anciens à vous. Arthur : Voilà, et d'ailleurs éventuellement c'qu'on pourrait faire, c'est parler de tout ça demain !

Evèque : Bien sur. Mais je prends un exemple tout a fait au hasard, est-ce que... est-ce que l'idée de l'homosexualité c'est quelque chose de répandu chez vous c'est heu...

Arthur : J'sais pas, pas plus qu'ailleurs j'suppose.

Evèque : Ah nan parce que nous figurez vous, nous on s'tate hein, pour savoir si on doit l'autoriser ou l'interdir...

Arthur : L'interdir ? Pourquoi faire ?

Evèque : (criant) Eh ben voilà ! Eh ben c'est exactement c'que j'leur dit ! Voilà ! Moi je fais partie de ceux qui se battent pour qu'on l'autorise, et même qu'on l'encourage ! Voilà !!

GENERIQUE

L'évêque est seul dans le lit.

Evèque : Non mais c'est très génant de de de vous voir dormir par terre, c'est votre chambre tout de même !

La voix d'Arthur se fait entendre.

Arthur : Impeccable, vous inquiétez pas j'vais dormir comme un loir !

Evèque : Mais si quelqu'un entre qu'est-ce qu'il va penser ?!

Arthur : Justement si quelqu'un entre il pensera moins de trucs si j'suis par terre !

Evèque : Bon alors qu'est-ce que j'fais, j'éteins ?

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 93

Arthur voix off : Heu nan, laisser allumé j'préfère.

Annexe 4

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 94

Arthur et Lancelot sont en armure dans un campement, au milieu de la forêt.

Lancelot (regarde une carte) : Moi j'essaie de trouver une solution...

Arthur : Parce que vous appellez ça une solution vous ?

Lancelot : J'suis désolé, j'peux pas en même temps commander à droite et à gauche, il faut que je délègue les lanciers à Perceval ! Arthur : Oh non mais aller j'vais l'faire laissez tomber.

Lancelot : Enfin vous allez pas tout faire ! C'est un d'vos hommes quand même ! (crie) Seigneur Perceval, venez on a besoin de vous !

Voix de Perceval : J'peux pas j'surveille le stock de pain !!

Arthur regarde Lancelot l'air de dire "j'vous l'avais dit".

GENERIQUE

Toujours dans la forêt.

Lancelot : Le Seigneur Calogrenant est parti il y a deux jours pour placer son armée en amon de la rivière.

Perceval : Ah, c'est pour ça qu'il est plus là.

Lancelot : Bah oui, on l'a envoyé se positionner en avance...

Perceval : Ah bon, moi j'croyais qu'il était rentré chez lui alors j'me disais "il s'fait pas chier quand même" !

Arthur : Bref... Alors nous quand on va arriver dans la plaine, le Seigneur Calogrenant pourra lancer une attaque surprise par la droite.

Perceval : Plutôt dans le sens du courant de la rivière alors ? Arthur : Plut... mmoui nan ça... j'sais pas vous dire ça...

Lancelot : Et en dernier recours le Seigneur Léodagan se tient prêt avec 150 cavaliers qui arriveraient par la gauche.

Perceval : Par la gauche ?

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 95

Lancelot : Par la gauche, oui...

Perceval : Nan mais par rapport au courant de la rivière ?

Lancelot : Eh ben... ben j'en sais rien moi...

Arthur : Mais qu'est-ce que vous venez emmerder le monde avec votre rivière, vous ?

Perceval : Nan mais bon la gauche la droite, c'est bien gentil, mais moi il m'faut du concret !

Plus tard...

Arthur : Mais c'est pas compliqué bon Dieu, y'a Calogrenant à

droite Léodagan à gauche et nous on arrive par le milieu !

Lancelot : C'est bon jusque là ?!

Perceval : Attendez moi si j'me souviens bien du coin y'a la rivière

qui passe en travers...

Arthur (s'énerve) : Ah mais merde avec votre rivière !!

Perceval : C'est un point de repère comme un autre...

Lancelot (s'énerve aussi) : Mais bon Dieu y'a pas besoin d'points

d'repère puisque les envahisseurs vont nous attaquer de face !

Perceval : Nan mais de face ça va, c'est le reste qui va pas.

Arthur (crie) : Mais quoi non d'un chien ?!

Perceval : Ben la gauche la droite, moi j'aime pas tous ces trucs !

Lancelot : Mais qu'est-ce que vous aimez pas ?

Perceval : Ces conneries d'gauche et droite, ça veut rien dire ces

machins ! Selon comment on est tournés ça change tout !

Arthur : Mais qu'est-ce que vous nous chantez ?

Perceval : Moi j'estime que quand on parle techniques militaires il

faut employer des termes précis !

Lancelot : Bah heu oui... effectivement, ça peut prêter à

confusion...

Arthur : Nan mais attendez, c'est pour vous qu'on dit gauche et

droite, c'est pour pas vous embrouiller !

Perceval : Si ça m'embrouille !

Lancelot : Ah bon, on peut parler normalement alors ?

Perceval : Professionnel.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 96

Arthur : Bon ben alors okay, on reprend depuis le début. Donc, Calogrenant est posté depuis hier soir au nord-ouest de la zone d'attaque.

Lancelot : Léodagan sud/sud-est un peu plus en retrait avec ses cavaliers.

Perceval : Moi j'aime pas toutes ces conneries de sud-est nord-ouest...

Arthur (s'énerve) : Quoi qu'est-ce qu'y a qui va pas encore ??

Perceval : C'est un coup à s'planter ça ! T'façon on dit l'nord, selon comment on est tourné ça change tout !

Lancelot se retourne brusquement et s'en va, agacé. Arthur tente de se maîtriser.

Plus tard....

Lancelot est revenu, Arthur et lui on l'air blasés.

Perceval : Calogrenant ça va ! Maintenant Léodagan il est où ?

Lancelot : Du côté de la forêt près de la clairière là où y'a une

grosse pierre qui ressemble à une miche de pain.

Perceval : Voiiilààà ! Là c'est pro ! Là j'comprend ! Et quand

Calogrenant va arriver, il va couper par ou ?

Arthur : Du côté de la rivière à gauche du...

Perceval : Ah ah ah attention !!

Arthur : Pardon. Du côté d'la rivière là ou y'a les brebis qui

passent.

Perceval : D'accord ! Allez c'est bon (tire son épée) j'les attends les

envahisseurs ! Ils vont s'prendre mon épée dans les côtelettes ça va

les calmer pour un moment ! Ah j'ai hâte d'y être ! Ils vont s'frotter

à la fausse-patte du Pays d'Galles !

Lancelot : Les fausses-pattes c'est des gauchers.

Perceval : Bah oui !

Arthur : Vous êtes pas gaucher vous.

Perceval : Ben si !

Lancelot : Vous dégainez d'la main droite.

Perceval : Merde, comment on dit l'inverse d'une fausse patte ?

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 97

Arthur : J'sais pas. On dit rien.

Lancelot : La vraie patte ?

Perceval : Attendez la vraie patte du Pays d'Galles ça veut rien dire

! 'Voulez qu'j'passe pour un con ??

Arthur et Lancelot se contentent de le regarder sans rien dire.

GENERIQUE

Plus tard dans le campement, Perceval parle avec un soldat quand

Hervé de Rinnel arrive.

Hervé : Seigneur Perceval ! C'est le chef de rang qui m'envoie, ils

ont discuté de la signalitique.

Perceval : Et alors ?

Hervé : Donc ce sera bras gauche en l'air pour les lancés de flèches

et bras droit en l'air pour envoyer les lanciers.

Perceval soupire et ferme les yeux.

Perceval voix off : Toi un jour je te crame ta famille, toi.

Annexe 5

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 98

Séli entre dans la chambre d'Yvain, celui-ci est au fond de son lit.

Séli : Bon allez ça fait 5 fois qu'je viens maintenant vous vous levez.

Yvain : J'peux pas y aller j'ai une otite.

Séli : Dépéchez vous le cuissot de chevreuil c'est pas bon réchauffé !

Elle s'en va, Yvain soupire sur son oreiller.

GENERIQUE

Arthur, Yvain, Séli et Léodagan sont à la Table Ronde.

Arthur : Quand vous m'avez demandé de faire entrer votre fils à la

Table Ronde, j'me suis montré compréhensif.

Séli : Encore une chance !

Léodagan : C'est quand même bien le moins qu'vous pouviez faire

!

Arthur : Ah j'suis très touchée par votre grattitude ! J'vous rappelle

qu'j'ai viré Agravin pour lui faire une place !

Séli : Excusez-moi mais vous y avez gagné au change !

Léodagan : Agravin, vous allez quand même pas comparer mon

fils à c'débile !

Arthur : Ah mais vaut mieux pas comparer effectivement, parce

qu'Agravin au moins il servait à quelque chose !

Léodagan : Eh ben j'aimerais bien savoir à quoi !

Arthur : Il participait.

Léodagan : Ah bravo, ah vous parlez d'un héros !

Arthur : Ah parce que celui là c'est un héros ? Première nouvelle !

J'ai jamais entendu le ton de sa voix !

Yvain se racle la gorge.

Arthur : Si là, voilà.

Plus tard...

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 99

Séli : Peut-être qu'il parle pas tout simplement parce qu'il à rien à dire.

Léodagan : T'as quelque chose à dire ?

Yvain : Non.

Léodagan : Voilà, quand il a rien à dire il dit rien, il a pas été élevé chez les porcs, excusez-nous hein.

Arthur : Attendez on est à la Table Ronde quand même on fait pas un barbecue ! Il est pas là pour glandouiller il est censé participer activement à la quête du Graal !

Séli : Mais il participe ! C'est pas parce qu'il passe pas son temps à hurler et à taper du point sur la table qu'il participe pas !

Arthur : Mais comment voulez-vous qu'j'le sache il parle pas il bouge pas 'fait la gueule tout l'temps ! Dès qu'on lui fait une remarque il lève les yeux au ciel ! (Yvain lève effectivement les yeux) Tiens voilà !

Séli : Mais il est sensible ! Vous préféreriez peut être qu'il passe son temps à faire des concours de pets !

Arthur (énervé) : Parce que c'est là seule alternative que vous m'proposez, rien glander d'la journée où faire des concours de pets ??!

Léodagan : Entre parenthèse avec vos lubies d'vouloir lui faire faire du luth où je sais quelle connerie...

Séli : J'y peux rien si c'est un artiste, il écrit des poèmes magnifiques !

Arthur : Ah super, bravo formidable !

Léodagan : Mais il est jeune, les jeunes ne sont pas fait pour rester enfermés dans des donjons à tailler l'bout d'gras autour d'une table...

Arthur : Justement s'il veut pas rester autour d'une table il fallait pas m'le coller à la Table Ronde !

Léodagan (souriant) : Mais vous allez voir à la prochaine campagne hein, quand il y aura du combat, alors là il va s'réveiller ! Yvain : M'en fous j'irais pas.

Léodagan et Arthur : Quoi ?

Yvain : Je refuse d'aller me battre pour soutenir une politique d'expansion territoriale dont je ne reconnais pas la légitimité.

Plus tard...

Léodagan : C'est vous qui lui avez mis ces conneries dans le crâne,

mais j'vous préviens hein, la prochaine fois que j'le vois avec un

luth, je lui casse sur la tête !

Séli : Ah mais c'est vous qui m'cassez la tête ! Vous devriez être

fier d'avoir un fils un peu moins bourrin qu'la moyenne !

Léodagan : Fier ?! J'vais l'envoyer trois mois à poil dans la forêt à

bouffer des asticots et des racines, j'vous garantis que quand il

reviendra il fera moins de poêmes hein !

Yvain (blasé) : Super bonjour la pédagogie...

Arthur : Attendez, moi je crois que vous avez besoin d'être un peu

ensemble pour régler cette petite crise, hein, moi je reprends en

attendant Agravin à la Table Ronde...

Léodagan : Tu vas aller t'battre où j't'en mets une !

Yvain : J'réponds pas à la violence.

Séli : T'as raison va ! T'a pas à aller t'faire massacrer si t'en a pas

envie !

Léodagan : Ah et vous si vous voulez pas vous en prendre une par

ricochet j'vous conseil de pas la ramener hein, il ira au combat !

Yvain : Non j'irais pas.

Léodagan : Si tu iras !

Yvain : Non.

Léodagan : Si !

Yvain (soupirant) : Okay j'y vais.

Léodagan (se calmant) : Tout d'même.

Yvain : Mais j'm'en fous je refuse de porter les armes.

Tous le regardent.

GENERIQUE

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 100

Arthur est dans son lit avec Guenièvre, il lit un parchemin.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 101

Guenièvre : Je n'suis pas enceinte.

Arthur : Mmm.

Guenièvre : Je suis désolée mais l'héritier j'ai peur que ce soit pas

encore pour cette fois.

Arthur : Vous savez entre votre frère chevalier qui refuse de

prendre les armes et vous qui faites pas d'héritier...

Guenièvre : Qu'est-ce que mon frère vient faire là dedans ?

Arthur : Rien j'me comprends.

Guenièvre Voix Off : Eh ben vous avez d'la chance.

Annexe 6

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 102

Perceval et Karadoc sont dans un campement militaire en forêt, en train de manger.

Perceval : Vous vous rappelez quand on s'est pris la peignée contre

les Saxons ?

Karadoc : Dans la forêt de Keridon ?

Perceval : Non celle du Printemps.

Karadoc : Ah ouais. Eh ben ?

Perceval : Ben j'ai pris un sacré coup au moral quand même.

Karadoc : Ah c'est sûr c'était un coup dur.

Perceval : Pas moyen d'remettre la main sur cette gourde.

Karadoc : En plus c'était un cadeau non ?

Perceval : Ma grand-mère, pour mes 11 ans.

Karadoc : Ah moche, moche.

GENERIQUE

Réunion un peu tendue de la Table Ronde :

Arthur : Bon, c'est quoi le problème exactement ?

Léodagan : Le problème c'est qu'c'est toujours un peu les mêmes qui s'tapent le salle boulot si vous voyez c'que j'veux dire !

Arthur : Non j'suis désolé j'vois pas non !

Léodagan : Alors dès qu'il s'agit d'aller s'dorer les miches en Armorique pour demander aux filles si elles ont pas vu le cul de Lulu alors là, là oui y a des volontaires !

Lancelot : Non Sire ! J'étais allé transmettre vos voeux à la fille du Roi Hoel !

Léodagan : Voilà ! Par contre pour les accords de paix avec les Wisigoths, qui c'est qu'on envoie ? (se désigne)

Arthur : Mais vous pouvez pas arrêter d'vous bouffer l'nez sans arrêt pour des conneries...

Léodagan : Ah la paix avec les Wisigoths c'est des conneries ?!

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 103

Arthur : Vous êtes autour de la Table Ronde, il s'rait p'tet temps d'penser à être un peu plus solidaires, ces réunions sont sacrées bon sang ! Elles sont là pour souder notre fraternité contre le mal ! Rien ne doit se mettre en travers de notre communauté !

Les portes s'ouvrent avec fracas, Perceval entre sans aucune discrétion.

Perceval : Excusez Sire, c'est juste pour vous dire que j'vais pas pouvoir rester aujourd'hui, faut qu'j'retourne à la ferme de mes vieux, y a ma grand-mère qu'à glissé sur une bouse c'est l'vrai merdier !

Il repart.

Plus tard...

Arthur : Bon allez, au boulot, ça évitera d'penser au reste ! Père

Blaise, l'ordre du jour.

Blaise : Ah bah aujourd'hui j'ai rien moi.

Arthur : Rien comment ça rien ?!

Blaise : Ben on est une veille de pleine lune, et normalement une

veille de pleine lune, c'est relâche.

Tous les chevaliers se lèvent.

Arthur : Oh là oh là oh là popopop on se calme !

Ils se rassoient.

Arthur : Qu'est-ce que c'est qu'cette histoire d'relâche ?

Blaise : Bah c'est écrit noir sur blanc dans l'nouveau code de

chevalerie !

Arthur : Le nouveau code ??

Blaise : Vous nous avez d'mandé de dépoussiérer l'ancien, donc on

a vu ça avec messire Léodagan...

Léodagan : Ah ouais 'puis c'était tout en ancien Celte hein, on en a

chié.

Arthur : Non mais j'vous ai rien d'mandé d'dépoussiérer du tout

j'vous ai demandé de le traduire c'est tout !

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 104

Blaise : Eh ben justement, quand on a traduit, ça a donné relâche. Arthur à les yeux exhorbités.

Léodagan : Ah mais m'regardez pas comme ça hein, si vous êtes pas content fallait vous les farcir les négociations avec ces lousitcs là !

Arthur : Les négociations, mais quelles négociations ?

Léodagan : Bah tant qu'ils comprenaient rien à l'ancien code, on pouvait leur raconter c'qu'on voulait seulement depuis qu'il a été traduit alors là pardon hein ! Une pause par-ci une relâche par-là...Et puis 'c'est intolérable' et puis 'un acquis est un acquis' ah nan mais alors...

Arthur : Nan nan nan mais y a rien à négocier ! Moi les traine-patins j'les remets au travail vite fait !!

Tous les chevaliers se lèvent.

Arthur (crie) : Asseyez-vous !!

Ils se rassoient.

Arthur : Mais qu'est-ce que c'est qu'ce cirque aujourd'hui ?! Blaise : Ben ça c'est la traduction de l'article 13... "Si l'honneur du chevalier est bafouée pendant une assemblée, ce dernier pourra recourir à son droit de vidage".

Arthur : Son droit d'vidage ??

Blaise : Oui oui, j'suis d'accord avec vous c'est pas la meilleure traduction qu'on ai trouvé...

Plus tard...

La réunion est terminée, seul Arthur, le père Blaise et Léodagan

restent dans la salle.

Arthur : Dites moi je pensais à une chose, il faut bien qu'elle soit

ratifiée par moi cette nouvelle traduction ?

Léodagan : Ratifiée ?

Arthur : Enfin j'veux dire, validée quoi.

Léodagan : Ah oui oui.

Arthur : Parce que si j'refuse de la signer...

Blaise : Ah ben là c'est l'ancienne traduction qui s'applique.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 105

Léodagan : Ah oui non mais avant de prendre une décision faut

voir les bons côtés hein...

Arthur : Les bons côtés ?

Léodagan : Oui parce qu'avec le nouveau code, ils font plus de

pause, mais du coup ben ils sont plus reposés. Et moi j'pense au

combat.

Arthur : Moi j'pense que si on met pas le ohla tout de suite il vont

finir par nous les demander pendant les combats les pauses.

Blaise et Léodagan échangent un regard.

Arthur : Ils les ont déjà demandé c'est ça ?

Blaise (cherche dans les papiers) : Heu paragraphe 16 alinéa 4....

Léodagan : Ouais c'est ça c'est ça sur les temps de pause....

Arthur : Bon, maintenant qu'on a terminé avec les bons côtés d'la

nouvelle traduction, on peut p'tet la foutre en l'air et reprendre

l'ancienne ?

GENERIQUE

Nouvelle réunion de la Table Ronde.

Perceval : Mais j'croyais qu'on y avait droit à ça, article 7 de j'sais

pas quoi là...

Arthur : Ah, alors attention, père Blaise s'il vous plait, l'article 7.

Blaise lit en ancien Celte.

Arthur : Voilà, ça répond à votre question ?

Perceval : Du coup on y a plus droit ?

Arthur : Vous voulez qu'on vous relise l'article ?

Perceval Voix Off : Non non, j'vous fais confiance.

Annexe 7

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 106

Arthur et Guenièvre sont dans leur lit.

Guenièvre : Je sais qu'vous aimez pas ça mais c'est qu'un mauvais moment à passer... et puis le peuple vous verra un peu au moins. Arthur : Y a plus d'peuple aux exécutions. C'est fini ça, maintenant c'est privé. Léodagan, Lancelot, père Blaise.

Guenièvre : Oh ben non... j'avais choisis ma toilette tout, j'me faisais une joie d'sortir !

GENERIQUE

Guenièvre déjeune avec sa mère dans la salle à manger.

Séli : Vous f'rez rajuster votre coiffure quand même pour tout à

l'heure !

Guenièvre : Pourquoi qu'est-ce qu'y a tout à l'heure ?

Séli : Ben la pendaison ! Vous allez pas y aller comme ça on dirait

qu'vous vous êtes coiffée toute seule !

Guenièvre : Mère je me suis coiffée toute seule !

Séli : Eh ben voilà, du coup vous ferez rajouter votre coiffure.

Guenièvre : T'façon j'y vais pas à la pendaison.

Séli : Quoi ??

Guenièvre : Non j'y vais pas.

Séli : Vous êtes pas bien ? Si la Reine va pas aux pendaisons

qu'est-ce que vont dire les gens ?!

Guenièvre : Les gens diront c'qui voudrons, d'autant qu'y aura pas

le Roi non plus ni vous ni moi ni personne.

Séli : Mais qu'est-ce qui vous prend ça va pas bien !

Guenièvre : Le Roi a décidé qu'les pendaisons n'étaient plus

ouvertes au public !

Séli : Ah non mais pour qui y s'prend celui là ! Ca fait 500 ans

qu'on fait comme ça et lui toujours plus malin qu'tout l'monde il

change !

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 107

Guenièvre : C'est l'Roi c'est lui qui décide hein.

Séli : Oh non mais c'est dingue cette histoire...Mais s'il a pas envie d'aller aux pendaisons il fait c'qui veut mais qu'il empêche pas les autres de s'amuser !

Plus tard...Dans la salle de la Table Ronde :

Léodagan : Moi j'ai l'impression que c'qui vous échappe, c'est la notion de spectacle.

Arthur : J'vais vous dire, j'ai jamais aimé qu'il y ai du public aux exécutions. Toute façon j'aime pas ça les exécutions.

Lancelot : Ah bon ?

Léodagan : Mais pourquoi qu'est-ce qui vous gêne ?

Arthur : J'sais pas. J'aime pas ça, j'saurais pas vous dire pourquoi... Léodagan : Oh mais moi j'vais vous l'dire, ça vous plait pas parce qu'on doit être le dernier pays à pratiquer la pendaison ! Voilà ! Et à une pendaison j'm'excuse hein mais on s'emmerde.

Lancelot : C'est la justice, c'qui compte c'est le résultat...

Arthur : Bah il m'semble oui...

Léodagan : Mais la justice me faites pas marrer, ça dure des plombes le type remue à peine les doigts d'pieds à quoi ça r'ssemble j'vous l'demande !

Arthur : Bah ça r'ssemble à une pendaison à quoi voulez vous qu'ça r'ssemble on va pas faire venir les danseuses et les montreurs d'ours.

Lancelot : La pendaison c'est sobre et solennel, moi j'trouve ça parfait.

Léodagan : Prenez la roue, par exemple, ça c'est festif. Le condamné est attaché et on commence par lui casser les bras et les jambes, bon ben tout l'monde peut venir avec son p'tit bâton, les gens participent, c'est convivial !

Lancelot : Non c'est atroce.

Léodagan : Mais pas du tout !

Arthur : Oh si ça craint, non ça craint écoutez on passe quand même pour être un pays moderne...

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 108

Léodagan : Un pays bourré d'délinquance, les types ont pas assez peur ! Ca impressionne qui la pendaison aujourd'hui hein, mais personne ! Tandis que vous prenez par exemple l'écartèlement... Lancelot : Ah voilà ! Ca oui, ça c'est super !

Arthur : Ah non alors ça justement ça ça craint !

Lancelot : Oui mais y a du suspens, les gens se d'mandent si c'est les bras où les jambes qui vont lacher en premier.

Léodagan : Eh bah oui et puis ça a un peu d'gueule au moins ! Alors vous on s'demande c'qui vous plairait hein...

Arthur : Bah j'vais vous l'dire, moi j'ai pensé à un truc alors vous allez p'tet trouver ça con, imaginez qu'on soit le seul pays, au monde, où on ne condamne plus... à mort.

Lancelot et Léodagan le fixent.

Léodagan : Bon, écoutez Sire j'suis désolé mais moi j'ai une diligence dans une heure, puis faut qu'on aie bouclé hein. Puis j'ai pas trop le temps d'raconter des conneries non plus.

Plus tard...
Arthur déjeune avec son beau-père.

Léodagan : Moi j'vous propose un truc, un de ces jours, on s'fait une p'tite virée en Gaule vous et moi comme ça on voit un peu c'qui s'fait à côté, mais rien qu'pour piocher des idées !

Arthur : Piocher des idées d'quoi ?

Léodagan : Sur les exécutions !

Arthur (se frappe la tête) : Ah non mais vous êtes comme ça hein ! Léodagan : Mais soyez pas borné !

Arthur : Vous êtes pas borné vous, j'vous dis qu'j'aime pas les exécutions et il faut qu'on aille en Gaule maintenant !

Léodagan : Mais c'est juste pour voir !

Arthur (s'énerve) : Mais c'est tout vu ! Déjà qu'j'aime pas voyager si c'est pour aller voir des mecs se faire dézinguer merci ! Léodagan : Mais vous avez tort de pas vouloir régler l'problème hein si on veut rester le pays le plus puissant il faut qu'on aie des exécutions spectaculaires ! Vous passerez pas à côté !!

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 109

Arthur : Eh ben si figurez vous ! Parce que j'vais décréter que l'île de Bretagne est la première nation où la peine de mort n'existe plus voilà !!

Léodagan a les yeux ronds comme des soucoupes.

Arthur : Non mais je sais je sais attendez... Excusez moi c'est sortit comme ça, j'vais pas l'faire évidemment. C'est l'idée oui l'idée, j'aime bien l'idée.

Léodagan : Sinon c'que j'peux vous proposer, on attache le condamné, et on le balance sur un nid d'frelons. C'est propre c'est sain. C'est rien qu'du naturel.

GENERIQUE

Arthur et Guenièvre sont dans leur lit.

Guenièvre : Alors ?

Arthur : On garde la peine de mort.

Guenièvre : Vous vous êtes résigné ?

Arthur : Ben parce que j'ai pas eu l'choix ! N'empêche que ça

aurait été sacrément classe croyez moi. Soi-disant qu'les gens sont

pas prêts...

Guenièvre : Ben pas de peine de mort, c'est vrai qu'c'est un p'tit

peu déroutant...

Arthur : C'est l'avenir c'est tout, faites moi confiance !

Arthur Voix Off : Dans 5 où 10 ans, y a plus qu'les barbares qui le

feront.

Annexe 8

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 110

Arthur, Léodagan et Karadoc font étape à la Taverne, incognitos (cachés sous des capuchons).

Arthur, inquiet : Ca va, y a pas trop de gens qui vous connaissent ? Karadoc : Celui là derrière j'l'ai jamais vu. Ceux là là bas c'est des habitués.

Arthur : Alors tachez qu'ils vous reconnaissent pas.

Léodagan : J'sais pas comment vous faites pour les reconnaître, ils ont tous la même tête d'alcoolos.

Karadoc : Lui, j'suis pas prêt d'l'oublier. Il m'a vomi dessus. Regards perplexes d'Arthur et Léodagan.

GENERIQUE

Karadoc : Brrr, j'en ai plein les pattes !

Arthur : Chuuut ! Karadoc bon dieu ! J'vous dis que j'veux pas qu'on nous remarque !

Léodagan : Oh mais détendez-vous vous aussi, hein, c'est pas la mort du p'tit ch'val...

Arthur : Non j'me détendrais pas ! Une fois pour toute les chevaliers au bistrot c'est l'déshonneur, voilà !

Léodagan : Oh j'vous signale quand même qu'on marche depuis le lever du soleil !

Arthur : Ah ça va, j'connais le couplet, on est fatigué, on est fatigué, vous me l'cancaner depuis c'midi !

Léodagan : Ecoutez arrêter d'vous agiter, j'vous signale que c'est vous qui nous faites remarquer !

Karadoc : Même si les gens savaient que c'était nous, qu'est-ce que ça peut faire ? Ils s'raient contents de voir que les chevaliers s'mélangent au peuple.

Léodagan : Mais ouais, ça prouve déjà qu'on pète pas plus haut qu'nos culs...

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 111

Arthur : S'ils savaient qui ont est ils penseraient qu'ils sont dirigés

par des rinces-pintes !

Karadoc : Meuuh nan...

Léodagan : On s'rait pétés comme des coings, encore, mais enfin

là...

Karadoc : Allez ! (fort) Patron ! Trois quilles de pif !

Arthur ferme les yeux.

Plus tard...

Ils sont en train de manger.

Léodagan : A quoi ça r'ssemble de becqueter avec les capuchons

hein !

Karadoc : En plus on crève de chaud !

Arthur : Arrêtez d'couiner et magnez-vous ! Dans deux minutes on

décarre !

Léodagan : Puisqu'on est incognito, vous devriez en profiter pour

savoir c'qu'on pense de vous.

Arthur : Que qui pense de moi ?

Léodagan : Ben les grouillots ! Enfin, le peuple quoi. (fort)

Tavernier !

Arthur : Mais qu'est-ce que vous faites ?!

Léodagan : Laissez faire.

Le tavernier arrive.

Tavernier : (siffle) Eh ben ils avaient soif les capuchons ! J'vous

r'mets les p'tites soeurs ?

Arthur : Nan ça va c'est bon merci.

Karadoc : Ah bah si pour finir le fromage !

Léodagan : Dites moi tavernier, qu'est-ce que vous pensez... du

Roi Arthur ?

Tavernier : Du Roi Arthur ?

Léodagan : Ben oui, les chevaliers, la quête du Graal, tout ce

merdier là.

Arthur : Ca va l'influencez pas non plus !

Tavernier : Le Roi Arthur... j'sais pas bien quoi vous dire moi...

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 112

Léodagan : Penez pas qu'on est dirigés par une troupe de mains-dans-les-poches ?

Tavernier : Aaah...

Arthur : Mais laissez-le parler !

Tavernier : Ah nan, j'dirais pas ça, voyez, mais c'est vrai qu'le Graal tout ça... bon ben ça s'rait bien qu'ça décolle un p'tit peu c't'histoire hein...

Karadoc : Mais qu'est-ce qu'il est sec le brignolet ! Il doit pas être d'hier.

Tavernier : Nan il est bien. Nan parce que j'vais vous dire, c'est vrai qu'au début les gens ils soutenaient bien, mais bon ben avec le temps... pas d'Graal pas d'Graal, puis bon bah avec le temps ils se sont essouflés.

Léodagan : Ben ça ça m'étonne pas.

Arthur : Oh ça va hein...

Tavernier : Nan parce que l'plus emmerdant quand on est on est un p'tit peu patriote comme moi hein, c'est de voir que bon, on est même pas foutu de mettre la main sur un Graal, d'accord, mais en Irlande, ils en ont déjà deux ou trois ! Eh !

Plus tard...

Léodagan : Par exemple, si vous aviez le Roi Arthur juste devant vous là, qu'est-ce que vous lui diriez ?

Tavernier : Bon ben déjà, avec deux trois potes tenanciers, on lui parlerait un peu de sa taxe sur les boissons alcoolisées... A grand coup d'bâtons dans les jambes !

Léodagan : Ah oui, c'est vrai qu'on a mis ça en place aussi... enfin quand j'dis nous, c'est les pignoufs du gouvernement quoi ! Tavernier : Ah les fumiers... ils nous piquent 6 pièces de bronze à chaque tonneau de jah-jah.

Karadoc : C'est vrai qu'c'est dégueulasse.

Arthur, menaçant : Eh ! Vous voulez vous la manger celle là ?

Tavernier : Heureusement, on s'est mis à fabriquer nous même en sourdine pour nous même quoi... sinon on s'en sortait pas.

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Léodagan, souriant : Ah... et vous avez pas peur des contrôles nan ?

Tavernier : Ca m'effraie pas plus que ça.

Léodagan : Ah oui... ben je s'rais vous j'me méfierais, surtout dans les jours qui viennent.

Tavernier : J'vais vous dire hein, vu le boulot que j'abats, hein, 3 heures d'sommeil par nuit, et quand j'vois les malheureux trois ronds que j'arrive à peine à mettre à gauche... j'aurais l'Roi Arthur devant moi, j'aurais qu'une envie, c'est d'lui lacher mes chiens au cul.

Karadoc : Sire, comme un con j'ai oublié ma bourse, vous pouvez m'avancer ?

Arthur et Léodagan ouvrent de grands yeux.

Tavernier, surpris : Sire ?

GENERIQUE

Léodagan : Ben moi j'peux vous dire que si j'avais l'Roi Arthur devant moi, j'lui dirais gentilment c'que j'pense de sa façon de baisser son froc devant les Romains !

Arthur: Qui qui baisse son froc ?!

Léodagan : Si j'l'avais d'vant moi !

Karadoc : Moi j'lui dirais d'arrêter de faire son p'tit chef là, toujours à s'la raconter, Karadoc allez faire ci, Karadoc allez faire mi...

Karadoc Voix Off : Il a un p'tit peu tendance à prendre tout l'monde pour des cons !

Annexe 9

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 114

Perceval et Karadoc sont à la taverne.

Perceval : Moi, dès que j'pars en retraite, j'vous laisse tous mes chevaux.

Karadoc : Ah ça c'est drôlement gentil.

Perceval : Voilà, j'en ai deux, ils sont à vous.

Karadoc : Vous en aviez pas trois ?

Perceval : Non, l'autre j'l'ai tué sans faire exprès. Bon et puis sur les deux, y a l'mien, alors j'pars avec. Il vous en reste un. Vous y f'rez gaffe hein, il a au moins 25 ans c'bourrin. Il peut crever d'un jour à l'autre.

GENERIQUE

Perceval déjeune avec le Roi.

Perceval : Ca s'arrête à quel âge la quête du Graal normalement ? Arthur : Hein ?

Perceval : La quête du Graal, à quel âge ça s'arrête ?

Arthur, blasé : Commen à quel âge, mais qu'est-ce que vous m'bavez encore...?

Perceval : C'est pour savoir parce qu'il faut que j'm'organise.

Le Roi sent la colère monter en lui. Il prend une inspiration.

Arthur : Vous devriez déjà commencer par organiser le merdier qu'vous avez là dedans (désigne la tête). Qu'est-ce que vous voulez savoir ? (énervé) Allez, magnez-vous l'tronc mainenant ! Vous m'dites c'que vous voulez et vous faites un effort pour que j'pane au moins le sens de votre phrase ! Je commence à en avoir plein le dos et d'choper des maux de tête à répétition à force de jamais piger un broc de c'que vous racontez ! (criant presque) Alors vous reprenez d'puis l'début, avec une tournure simple et directe ou vous ramassez une tarte c'est clair ça ?!

Perceval : J'voudrais savoir à quel âge on peut arrêter la quête du Graal. Parce que j'voudrais prendre ma retraite.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 115

Il fait un geste pour se protéger.

Perceval : J'm'en ramasse une ou pas ?

Plus tard...

Arthur : Mais qu'est-ce que vous appelez votre retraite exactement ?

Perceval : Bah le jour où j'plie les gaules et qu'j'rentre chez moi. Arthur : Mais, enfin vous allez pas partir comme ça ?

Perceval : Ah non, on va s'faire un p'tit buffet quand même, on va s'boire un canon, on est pas des bêtes.

Arthur : Vous vous rendez compte que vous êtes un chevalier d'la Table Ronde ?

Perceval : Eh ben ?

Arthur : Bah j'sais pas, le code voudrait qu'on meurt au combat pour la gloire du seigneur, par exemple...

Perceval : Mais moi ça fait 10 ans qu'j'retape ma cabane au Pays d'Galles, alors maintenant qu'elle tient debout, j'aimerais bien pouvoir en profiter un peu !

Arthur : Mais enfin j'vais pas vous retenir de force, moi, faites c'que vous voulez...

Perceval : Mais à quel âge on peut ?

Arthur : Mais c'est pas une question d'âge enfin arrêtez d'me bassiner avec ça ! Si vous voulez partir vous partez, qu'est-ce que vous voulez qu'j'vous dise moi...

Perceval : Mais heu... maintenant ?

Arthur : La Table Ronde ça a jamais été une obligation, vous êtes là de votre plein gré j'vous rappelle.

Perceval : Ben quand même, quand vous nous avez annoncé le coup d'la Dame du Lac, la Table le message et tout... ça avait l'air obligé.

Arthur : C'était vivement recommandé disons. C'est vrai que ça m'aurait mis de travers qu'on m'dise non, mais... sur l'principe, la Table Ronde c'est pas obligatoire.

Perceval : Donc on peut partir quand on veut.

Arthur : Sur l'principe oui.

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 116

Perceval : Sur l'principe ?

Arthur : Sur l'principe vous pouvez partir.

Perceval : Non mais en vrai ?

Arthur : En vrai, si vous partez j'vous casse la gueule, déjà. J'trouve ça intôlérable d'avoir une chance pareille et d'vouloir mettre les bouts pour aller bêcher un carré d'potager au Pays d'Galles ! Et puis alors si vous partez maintenant, j'vous raconte pas la réputation d'péteux qu'vous allez vous taper.

Perceval : Pour l'instant j'suis pas encore parti hein, pourtant j'me tape déjà une réputation d'péteux.

Arthur, après un temps : C'est pas faux.

Plus tard...

Karadoc et Perceval sont à la taverne.

Perceval : Non mais j'ai bien senti qu'c'était le coup dur pour lui. Karadoc : Ah mettez vous à sa place, un chevalier qui s'en va... Perceval : Ben ouais c'est l'prestige qui fout l'camp.

Karadoc : Alors qu'est-ce que vous avez décidé ?

Perceval : Ben j'peux rester sur le Graal encore quelques années...

Karadoc : Et si vous lui dites que vous voulez rester qu'la d'mi journée, ça vous libérerait du temps.

Perceval : Ben non mais moi ça m'intéresse pas, j'veux rentrer au pays, alors...

Karadoc : Eh ben, vous négociez des journées d'libre. Trois jours quête du Graal, trois jours chez vous, trois jours quête du Graal, trois jours chez vous, trois jours quête du Graal, trois jours chez vous, trois jours quête du Graal, trois jours chez vous...

Perceval : Ah oui mais y a le voyage aussi, j'mets trois jours pour rentrer au Pays d'Galles.

Karadoc : Eh ben, trois jours quête du Graal, trois jours d'voyage, trois jours chez vous, trois jours d'voyage, trois jours quête du Graal, trois jours d'voyage, trois jours chez vous, trois jours d'voyage, trois jours quête du Graal...

Brossard Sébastien Kaamelott : humour télévisuel et série intertextuelle 117

Perceval : J'négocie avec Arthur d'bosser trois jours tous les 28 jours.

Karadoc compte sur ses doigts.

Perceval : Ah non mais c'est ça hein, pas la peine de compter.

GENERIQUE

Karadoc : Y a aussi une possibilité, c'est qu'vous preniez du travail à faire chez vous.

Perceval : Non, j'préfère bucher bucher pendant qu'j'suis là, et avoir un vrai temps d'repos. Sinon au bout d'un moment le corps il dit non.

Karadoc : Ou alors vous négociez d'partir plus tôt d'la Table Ronde.

Perceval : Vous croyez qu'ça va passer ça ?

Karadoc Voix Off : Sinon c'que vous faites, trois jours mi-journée Table Ronde voyage, trois jours chez vous, mi-journée chez vous voyage, trois jours Table Ronde...






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