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De la determination de l'intérêt supérieur de l'enfant en matière de filiation: réflexion à  la lumière de la jurisprudence


par Basila PANISSE GABRIELLA
Université Officielle de Bukavu - Graduat 2019
  

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CHAPITRE II. DES REGLES RELATIVES AUX ACTIONS EN JUSTICE ETDE L'ANALYSE DES DECISIONS JUDICIAIRES EN MATIERE DE LA FILIATION

Dans ce chapitre, il sera question d'examiner les règles relatives aux actions en justice (section I), en deuxième lieu interviendra le statut de l'enfant dont la filiation n'a pas pu être établie (section II)et en dernier lieu nous aurons le plaisir d'aborder la question relative aux jugements en matière de filiation (section III).

Section I. Règles relatives aux actions en justice

Avant d'examiner les actions en justice, il est important de faire une mise au point dela déclaration obligatoire de la filiation en droit congolais.

§1.Déclaration obligatoire de paternité ou affiliation

L'enfant né hors mariage doit faire l'objet d'une affiliation dans les douze mois qui suivent sa naissance70(*); si le père refuse d'affilier son enfant né hors mariage, il faut obtenir un jugement valant affiliation et porter la mention de ce jugement dans l'acte de naissance de l'enfant71(*). Mais si l'affiliation se fait en retard, le père devra payer une amende variant entre 50.000 et 100.000 FC Un enfant peut aussi être affilié après son décès72(*); l'affiliation intervient aussi dans le cas où le père est mineur.

a. Comment l'affiliation est-elle réalisée ?

Puisque l'enfant est né hors mariage, son père doit conclure avec la famille maternelle de son enfant une convention d'affiliation pour la présenter devant l'officier de l'état civil ou le père peut déclarer seul son enfant à la commune, ou il peut, avec la mère de l'enfant, faire une déclaration commune d'affiliation à la commune.

Dans la convention entre le père et la famille maternelle de l'enfant, il faut préciser que la validité de cette convention dépend de l'accord de la mère de l'enfant. La convention est enregistrée à la commune devant l'officier de l'état-civil.73(*)

L'affiliation peut aussi être réalisée par déclaration commune des parents de l'enfant devant l'officier de l'état-civil soit le père peut le faire seul.

Il faut néanmoins préciser que la loi a prévu qu'en cas de naissance d'un enfant hors mariage, que la famille de sa mère puisse avoir le droit de demander des indemnités dues par le père de l'enfant en vertu de leur coutume.74(*)

§2.De l'action en justice en matière de la filiation

A. Notions générales

La filiation paternelle peut être établie à la suite d'une action judiciaire de recherche de paternité appelée « action en recherche de paternité ».

Dans cette action, l'enfant réclame son père mais il le fait sous la représentation de sa mère ou d'un membre de sa famille maternelle ou enfin d'un Magistrat du parquet. Cette action est exercée contre le père de l'enfant ou contre les héritiers de son père.

S'agissant du délai, il sied de noter que sondélai de prescription est unifié: 10 ans75(*). L'action est intentée au nom de l'enfant qui peut l'exercer lui-même pendant sa minorité ou bien l'exercer à compter de sa majorité. Seule la possibilité pour la mère d'accoucher sous le secret peut donc bloquer une action en recherche de maternité.

B. Les personnes contre qui l'action doit être dirigée

Devant le silence du Code de la famille sur les personnes contre qui l'action en contestation de maternité doit être dirigée, il est clair que celle-ci ne peut qu'être intentée contre les personnes qui ont déclaré la maternité : la mère elle-même ou son tuteur. Mais, le père doit être appelé lorsque sa paternité est établie parce que son sort reste lié à l'issue de cette action. Nous pensons aussi que si la mère est décédée, l'action peut également être dirigée contre ses héritiers.

C. La fin de non-recevoir de l'action

Lorsque la déclaration de maternité de la femme dont le nom est indiqué dans l'acte de naissance de l'enfant, elle est réputée irrévocable (C. Fam., article 598). Nous nous situons à ce propos, sur la même longueur d'ondes avec la Commission de réforme76(*) lorsqu'elle explique que « comme tout aveu, la déclaration de maternité lie celui dont elle émane ». La mère à laquelle la Commission fait allusion dans ce cas ne peut pas être reçue en justice pour y contester son aveu de maternité, sauf, bien entendu, la mère incapable après la mainlevée de l'interdiction.

En droit français de la famille, la vérité est incarnée par la suppression, par une loi du 16 janvier 200977(*) 287, de la fin de non-recevoir en cas d'accouchement anonyme. L'article 326 du Code civil prévoit dorénavant que « lors de l'accouchement, la mère peut demander que le secret de son admission et de son identité soit préservé ». Néanmoins, cet anonymat pas obstacle ipso facto à l'établissement de la filiation. Si, en droit, l'enfant peut faire établir sa filiation même à l'endroit d'une femme ayant accouché sous X., il se trouve qu'il aura néanmoins de grandes difficultés pratiques pour connaître son identité. Toutefois, s'il est parvenu, notamment du faitde documents fournis par son père, il pourrait intenter l'action en établissement de maternité.

L'importance de la « vérité biologique » est sans conteste grandissante. Cela est au demeurant perceptible au regard des modes de preuves admissibles.

D. Les délais de l'action

Comme toutes les actions relatives à la filiation, celle en contestation de maternité est imprescriptible en vertu de l'article 641 du Code la famille : « sauf si la loi dispose autrement, les actions relatives à la filiation sont imprescriptibles ».Le fait pour l'action d'être imprescriptible rentre dans l'intérêt supérieur de l'enfant voulu par le législateur congolais.

Précisons par ailleurs que, la prescription peut empêcher un enfant d'établir sa filiation, ou de la contester, car un certain laps de temps s'est découlé de sorte qu'il semble préférable juridiquement « de laisser les choses en l'état ». Si la prescription est une fin de non-recevoir au sens du Code de procédure civile, qui trouve pleine application en droit de la filiation, il semble néanmoins que ses effets tendent à être circonscrits ces dernières années.

La Cour Européenne des Droits de l'Homme, tout d'abord, est encline à admettre assez librement que la filiation non conforme à une vérité biologique puisse être contestée78(*) . En outre, le report du point de départ de la prescription à la majorité de l'enfant permet également, bien qu'indirectement, d'étendre le délai de prescription. Dès lors, la remise en cause de filiations non conformes à la vérité biologique s'en trouve facilitée.

Cela étant, nous allons devoir examiner le statut de l'enfant dont la filiation n'a pas été établie.

Section II. Du statut de l'enfant dont la filiation n'a pas pu être établie

Lorsqu'on fait face à une situation où la filiation de l'enfant n'a pas pu être établie, l'enfant a deux statuts : le premier cas est celui du refus du père et le second cas est celui du retard ou de l'oubli.

§1. Du refus du père

Lorsque la filiation paternelle d'un enfant né hors mariage n'a pas été établie, le tribunal, à la demande de l'enfant, de sa mère ou du Magistrat du parquet, désignera un père juridique parmi les membres de la famille maternelle de l'enfant ou parmi les personnes désignées par la mère de l'enfant79(*).

Dans ce cas, le père juridique exerce vis-à-vis de l'enfant toutes les prérogatives résultant de la filiation et en assume les devoirs. Cependant, cette parenté juridique ne crée pas d'autres effets.

L'enfant peut, par un mandataire, intenter une action en recherche de paternité et si cette action est déclarée fondée, le jugement vaut affiliation et mention en est faite dans l'acte de naissance de l'enfant ; le père sera en outre condamné à faire la prison pendant au plus 30 jours et paiera une amende allant de 100.000 FC à 500.000 FC ou l'une de ces peines seulement80(*) .

§2. Du retard ou de l'oubli dans la filiation

La transmission d'informations relatives aux origines de l'enfant connaît un écho non négligeable en matière de la filiation. A cet égard, la Cour européenne des droits de l'Homme dans l'Arrêt Odièvre c/ France du 13 février 200381(*)a, sans pour autant condamner la France, admis que l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme peut impliquer le droit d'obtenir « des informations nécessaires à la découverte de la vérité concernant un aspect important de son identité personnelle ». La Cour a estimé que la législation française relative à l'accouchement sous X ne violait pas ces articles de la Convention Européenne des Droits de l'Homme, car elle tend à atteindre un équilibre et une proportionnalité suffisante entre les intérêts de l'enfant.

En effet, il s'est réalisé que les enfants étaient en mal de connaitre leurs géniteurset le temps encouru pour connaitre les géniteursétaient longs. Cela avait comme conséquence non seulement le retard et parfois même l'oubli en matière de filiation.

En somme, le droit français protège assez bien le secret de l'accouchement ou de l'identité du donneur de gamètes. Pourtant, dans un mouvement contraire, on s'aperçoit que s'agissant de l'établissement ou la contestation, le droit se montrer de plus en plus protecteur d'un « droit à établir sa filiation ».

Le « droit à » l'oubli semble être en contradiction avec la multiplication des règles du droit contemporain de la filiation qui octroient plus aisément la faculté de faire reconnaître une filiation juridique conforme à une vérité biologique, ou à l'inverse de la contester lorsque la filiation juridique n'est pas le reflet d'un lien biologique82(*).

En droit congolais de la famille, l'oubli ou retard dans l'établissement de la filiation est passible d'une amandeallant de 50.000 à 100.000 FCet qui sera payée par père fugitif.

Comment alors on peut prouver la filiation ?

§3. De la preuve en matière de l'établissement de la filiation

Pendant des siècles, la seule question de preuve qui se posait en matière de ?liation était celle de la preuve de la paternité, essentiellement légitime. Elle était résolue au moyen de présomption et trouvait éventuellement son expression dans l'acte de naissance. La preuve de la paternité naturelle n'a commencé à prendre de l'importance qu'à partir d'une époque plus récente. La maternité résultant du fait de l'accouchement ne laissait que peu de place à des doutes, que le législateur contemporain a voulu dissiper.

Il s'avère important d'examiner tour à tour, l'une aprèsl'autre et il sera aussi question de faire une mise au point de ce qui était la preuve de la filiation dans le code civil. Ceux-ci nous permettrontd'avoir une idée globale sur ce qui était pris comme intérêtsupérieur de l'enfant dans cette législation.

A. La preuve de la paternité par présomption

Pour tenter d'élucider l'intervention de la nature dans les difficultés ressenties à apporter la preuve de la filiation légitime en droit français, G. CORNU83(*) se sert de la Bible.84(*)Cet auteur écrit: « la nature paraît avoir marqué de son sceau la preuve différentiée de chaque lien. La nature et la société veulent ensemble que la paternité échappe à toute preuve directe : d'où pour racheter cette impossibilité, la présomption de paternité ».

La paternité, dont la preuve directe n'est plus impossible, mais difficile et onéreuse, le mariage continue à faire surgir la présomption Pater is est, que le non-mariage ne justifie pas puisqu'il n'implique aucun devoir de cohabitation ni de fidélité.

Disons en effet que dans les droits traditionnels congolais cette présomption reposait sur la dot alors qu'en droit colonial son fondement se trouvait dans la durée de la gestation et la fidélité de la femme mariée. Le Code de la famille essaie de combiner les deux à la fois.85(*)

L'enfant né dans le mariage ou dans les 300 jours après la dissolution du mariage a pour père le mari de sa mère. L'enfant issu d'une femme dont le mariage antérieur est dissout depuis moins de 300 jours et qui est né après la célébration du nouveau mariage de sa mère est tenu pour enfant des nouveaux époux sauf contestation de paternité.

Par la nature même des choses, il règne toujours une possibilité d'incertitude sur la paternité. Le recours à des présomptions s'impose, et le mariage est sans doute la meilleure : encore n'est-elle pas absolue. L'histoire de la présomption de paternité légitime est passée par trois phases, le deuxième constituant comme une espèce de parenthèse d'un siècle trois quarts à peine dans le cours des temps86(*).

En droit congolais de la famille tel que révisé en 2016, nous devons retenir que la filiation paternelle se prouve principalement par un acte de l'état civil ; A défaut de cet acte, il peut se prouver par la possession d'état d'enfant venant d'un acte de notoriété ; Il y a possession d'état d'enfant, lorsqu'un enfant est considéré par un père ou une mère comme son enfant ou par leur famille et la société comme l'enfant de ce père ou de cette mère. Ces personnes sont des témoins de cette filiation.

v L'acte de notoriété

A défaut d'acte de l'état-civil constatant la naissance d'un enfant né avant le nouveau code de la famille de 2016, toute personne intéressée peut demander à l'officier de l'état civil du lieu de naissance d'établir un acte de notoriété supplétif.87(*)

Cependant, le défaut d'acte de notoriété peut être supplée par un jugement rendu dans les huit jours à dater de la saisine par le TRIPAIX sur simple requête de la personne intéressée ou du Ministère Public ; Cet acte de notoriété contient les déclarations de celui qui le réclame attesté par deux témoins, de la date de naissance, du lieu de naissance, du nom et sexe du demandeur ainsi que les causes qui empêchent de rapporter l'acte de naissance ;

Cet acte de notoriété est inscrit dans le registre supplétoire du lieu de naissance88(*) ; Cet acte de notoriété doit être homologué par le président du TRIPAIX ou du TPE ; A défaut de l'homologation, cet acte n'est qu'un simple renseignement ; Après l'homologation, l'acte de notoriété est assimilé à l'acte de l'état-civil.

En revanche, si le défaut d'acte de l'état-civil constatant la naissance intervient après la promulgation de cette loi, toute personne intéressée qui est dans l'impossibilité de se procurer l'acte de l'état-civil peut demander au président du TRIPAIX ou TPE du ressort de l'état-civil où l'acte devrait être dressé, l'établissement d'un acte de notoriété supplétif en précisant à quels buts celui-ci est destiné.89(*);

B. La preuve de la maternité

Dans la plupart des cas, la recherche de la maternité ne pose pas de problème. Mater certaest : la mère est celle qui a accouché, et son nom est ordinairement inscrit dans l'acte de naissance90(*). Il y a cependant toujours eu des accouchements clandestins, suivis d'abandons.

L'action en recherche de maternité est réservée à l'enfant qui est tenu de prouver qu'il est celui dont la mère prétendue a accouché91(*). Cette preuve sera difficile.Avec les phonèmes qui se répandent en Europe ces dernières années, nombreux sont des enfants qui perdent les liens familiaux et cela pose un énorme problème dans la filiation. Parlant de ces phénomènes, il faut entendre les accouchements in vitro et les promènes de mère porteuse. Dans pareil circonstance, il est difficile d'établir le lien de filiation et l'intérêt supérieur de l'enfant se voit mis en cause.

La RDC n'avait pas encore légiféré dans ce domaine, d'où, nous n'allons pas focaliser notre attention dans cette question qui parait malgré très intéressante en droit de la personne.

Sur le terrain de la preuve, l'article 310-3 nouveau du Code civil français dispose que « la filiation se prouve et se conteste par tous moyens, sous réserve de la recevabilité de l'action ».

En droit congolais, la preuve de la maternité ne pose pas beaucoup de problèmes dans la mesure où, ce qui se passent en Europe n'a pas encore fait l'objetd'uneéventuellerèglementation.

Il s'avère pertinent d'interroger le passé notamment le code Napoléon pour voir comment est-ce que la filiation était prouvéeà l'époque enfin de voir si l'intérêt supérieur de l'enfant était assuré par le législateur de l'époque.

C. La preuve de la filiation dans le code civil

1. La situation avant le code civil

De l'Antiquité au Code Napoléon, la présomption est double : médicale, sur la durée de la grossesse de la mère, et juridique, consistant à dire que l'enfant conçu pendant le mariage a pour père le mari de sa mère92(*). À son tour, cette présomption juridique pourrait s'analyser en deux : présomption de cohabitation de la mère avec son mari, et présomption de ?délité de la mère.

Pour la présomption médicale, l'illustre médecin Hippocrate, mort vers 375 avant l'ère chrétienne, avait reconnu que la durée de la gestation pouvait aller de 182 à 300 jours. La loi des XII Tables ?xait déjà, avant Hippocrate, cette durée à dix mois au maximum. L'observation faite par Hippocrate a été consacrée par un rescrit de l'empereur Antonin le Pieux.93(*)

Quant à la présomption juridique, elle est formulée par Paul dans un texte fameux : la mère est toujours connue avec certitude, même si elle a conçu dans la débauche ; quant au père, il est celui que désigne le mariage « Mater semper certa est, etiamsi vulgo conceperit. Pater autem is est quem nuptiae demonstrant ».

Bien que la seconde phrase ait été constamment citée comme équivalant à l'article 312 du Code civil, rien ne serait plus faux que de croire que Paul lui avait donné la même valeur que le législateur de 180494(*). Il ne s'agissait pas d'une présomption légale absolue, et d'application générale, mais d'une simple suggestion de juriste, à propos d'un problème limité à celui de l'in ius vocatio.

Après avoir été longtemps prohibée, l'action a été autorisée par la loi de 1972, mais seulement dans cinq cas limités : enlèvement ou viol, séduction dolosive, aveu écrit, concubinage et participation à l'entretien de l'enfant. La loi du 8 janvier 1993 a supprimé ces cas d'ouverture. Le système est désormais celui de la liberté de la preuve.95(*)

2. Le Code civil

L'article 312 du Code Napoléon a profondément changé cette situation assez empirique et fait de la présomption juridique (la présomption médicale est de 180 à 300 jours)96(*), une présomption presque absolue, qui caractérise la deuxième période de l'histoire. Le motif essentiel qui l'a inspiré a été le souci du « repos des familles », qui ne devait être troublé par aucune ou presque aucune contestation. Il a aussi été tenu compte de l'intérêt de l'enfant, pour qui mieux valait, en cas de doute, être légitime que bâtard.97(*)

La présomption de paternité ne peut être combattue qu'en cas d'impossibilité physique de cohabitation de la mère avec son mari, et encore cette impossibilité n'est-elle admise que dans deux hypothèses : éloignement pendant toute la durée minimum de la grossesse, ou impuissance mais uniquement accidentelle. L'impuissance naturelle est écartée en raison des difficultés de preuve, et a?n d'éviter des procès malséants98(*).

Notons en définitive qu'il n'est nullement nécessaire pour le mari de rapporter la preuve par tous moyens qu'il n'est pas le père biologique de l'enfant. 99(*)

Il s'avèrequ'ily a eu l'évolution de la preuve en matière de la filiation si l'ons'en tient àl'évolutionlégislative ayant intervenu dans ce domaine de prédilection. La preuve en matière de la filiation vaut son pesant d'or mais l'on voudrait que les parents affilient leurs enfants sans même arriver au stade de contentieux devant le juge.

Dans l'examen de la jurisprudence, nous prendrons soins de revenir sur certaines notions qui ont convaincu le juge lorsqu'il a été appeléà trancher les questions relatives à la filiation.

Section III. De l'analyse de la jurisprudence en matière de la filiation

Dans cette section, nous allons faire la présentation des jugements qui feront l'objet de ce présent travail(§1), et en deuxième lieu, il sera loisible de faire un commentaire de ces jugements afin de se rendre compte de ce à quoi le juge se fie pour faire prévaloir l'intérêt supérieur de l'enfant en matière de filiation(§2).

§1. De la présentation de la jurisprudence en matière de la filiation

Dans ce présent paragraphe seront présentés trois jugements qui seront l'objet de notre commentaire juste après.

A. Le jugement RC694/I

1. De la brève présentation de ce jugement et de la position du tribunal

Dans cette affaire, il s'agit de monsieur LONGYE MWENYE FIKIRI demandeur qui a introduit son assignation civile en exposant qu'il est le fils aîné de l'assigné RUSHIGWA FIKIRI. Né à Kamituga le 20 mai 1977, de l'union libre entre ce dernier et madame KANAGWA NAWAZO. Nonobstant les efforts entrepris par sa mère pour que son fils soit reconnu par son père, ce dernier au-delà de simples gestes de l'assistancematériels, n'a ménagée aucun effort pour affilier son enfant.

En date du 08 février 2017, le demandeur avait introduit son assignation demandant qu'il soit reconnu comme fils du défendeur. Dans sa requête, il demanda au tribunal de céans de :

Ø Dire la présente action recevable et amplement fondée ;

Ø Ordonner la filiation paternelle du demandeur sur pied de l'application de l'article 630 et suivants du code de la famille sans préjudice de l'application de l'article 614 du même code ;

Ø Dire le jugement à intervenir exécutoire nonobstant tout recours et sans caution et mettre les frais d'instance en charge du défendeur.

Nonobstant l'argument du défendeur arguant que le demandeur n'est pas digne de succéder à ses biens eu égard aux menaces de mort, notamment la sorcellerie, qui profiterait par téléphone à l'égard de ce dernier ; le tribunal a rencontré les arguments du demandeur en précisant « dit que le présent jugement vaut affiliation et en mention en sera faite dans l'acte de naissance du demandeur »100(*).

2. Commentaire de ce jugement

D'entrée de jeu, il importe de souligner qu'ici, il ne sera pas question de faire un commentaire sur la procédure qui a été menée par le juge mais plutôt, notre attention particulière sera focalisée sur le fond de l'affaire.

Dans le jugement ci-haut présenté, le demandeur n'était plus mineur d'âge, au moment de l'introduction de sa requête en justice pour dire que l'action en matière de la filiation n'est pas prescriptible et cela dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Examinant à fond ce jugement, il se remarque ce présentjugement ne comporte pas les éléments saillant qui expliqueraient la détermination de l'intérêtsupérieur de l'enfant en matière de la filiation mais l'on peut quandmême retenir que le demandeur n'avait pas niéêtre le père du demandeur. Et le fait pour le défendeur de poser « les petits gestes d'assistance matériels, verser la dot pour le demandeur »101(*) pourrait d'ores et déjà faire croire qu'il y avait indice de paternité.

En outre, le défendeur était en mal de contester la possession d'état d'enfant car il était considéré par la société ou traité par elle et des parents du défendeur comme étant l'enfant de ce dernier102(*).

B. Le jugement RC/1585 et le jugement E/1643

Nous allons examiner dans les commentaires ces deux jugements de manière cumulée car ils sont presque les même, d'où l'importance estimée par nous de procéder de la sorte.Ainsi, nous allons d'abord présenter ces ceux jugements avant que n'intervienne le commentaire.

1. Le jugement RC/1585

a. De la brève présentation de ce jugement et de la position du tribunal

L'action mue par la demanderesse par voie d'assignation tend às'étendre dire que par le tribunal de céans que les enfants ASSANI SADI pacifique, RAWA SADI Patrice et SAIDI SADI Arnold ont pour père biologique le nommé AMISSI SADI WALA Richard, le défendeur dans la présente cause.

Le défendeur convient et accepte avoir entretenu une liaisonextraconjugale avec la demanderesse de laquelle sont issus les enfants précités. Il affirme avoir même déjà payéeà la famille maternelle des enfants les indemnités de rachat tel que prescrit par la coutume BASHI.

Le juge constate que les enfants n'ont pas été affiliés dans les douze mois qui ont suivi leur naissance tel que prescrit par l'article614 du code de la famille, le Tribunal condamne le défendeur au paiement d'une amande de 50000FC, dit que ce présent jugement vaut affiliation et ordonne par conséquent à l'officier de l'Etat Civil de la Commune de Kadutu, lieu de résidence du père de renseigner les noms des précités dans les son livret de ménage et d'en porter la mention dans les actes de naissance de chaque enfant.103(*)

2. Le jugement E/1643104(*)

a. De la brève présentation de ce jugement et de la position du tribunal

L'action mue par la demanderesse par voie d'assignation tend à s'étendre dire au tribunal de céans que les enfants ADORA AMAR GRADIE et ADILA MUKANDO ont pour père biologique le nommé MUKANDO OLOPWE Elie défendeur dans la présente cause.

Prenant la parole, le défendeur convient et accepte entretenir une liaison extraconjugale avec la demanderesse de laquelle sont issues les enfants précitées. Il affirme même déjà que payée a la famille maternelle des enfants les indemnités de rachat tel que prescrit par la coutume locale.

Dans ce présent jugement, le juge constate qu'il n'y a pas eu contestation de la filiation de la part de père des enfants et dans l'intérêt supérieur dit que les enfants précitées ont pour père biologique le nommé MUKANDO OLOPWE Elie et dit que ce présent jugement vaut affiliation.105(*)

b. Commentaires de ces deux jugements

Comme dans le précédent jugement, le jugen'avait pas suffisammentmotivé sa décision mais cela se traduirait par le fait que les pèresn'ont pas nié que les enfants n'étaient les leurs.

En dépit de tout, il sied quand même de dire que le fait pour le juge de préciser dans sa décision que ces présents jugements sont exécutoires nonobstant les recours, cela prouve à suffisance le souhait pour le juge de protéger l'intérêt supérieur de l'enfant en matière de filiation. D'ailleurs, la notion de l'intérêt supérieur de l'enfant fait à ce que le juge ou tout autre organe viole certaines règles d'ordre public. Dans ces deux décisions, l'effet suspensif de l'appel a été violé au nom de l'intérêt supérieur de l'enfant.

N'ayant pas trouvé les éléments convaincants de la détermination de l'intérêt supérieur par le juge congolais dans les trois premiers jugements examinés, l'on s'est résolu d'examiner une affaire qui était pendante devant la Cour d'appel de Liège en Belgique.

3. Liège, 1 er juin 2016 : pondération des intérêts au fond action fondée sur l'absence de lien biologique et l'intérêt de l'enfant

Dans cet Arrêt de la Cour d'appel de Liège du 1 er juin 2016, la Cour avait déclaré également fondée une contestation de paternité à la demande du père biologique, pour un enfant de 10 ans.

Dans la présente cause, la mère s'est immédiatement mise en ménage avec le futur père légal, qui a reconnu l'enfant pendant la grossesse, avant d'épouser la mère, encore enceinte, si bien que la ?liation résultait in fine de la présomption de paternité. La procédure fut toutefois lancée avant même la reconnaissance par le père biologique qui demanda un test ADN.

Une affaire similaire mais moins harassante a été déférée à la Cour d'appel de Bruxelles pour être tranchée dans un sens proche : le père biologique s'est vu reconnaître sa paternité, malgré l'opposition vaine des parents légaux, principalement la mère106(*).

L'enseignement de la Cour dans cet Arrêt, en contraste avec celui de la Cour de Bruxelles, n'est qu'une appréciation pondérée des intérêts en présence et est la seule manière de se conformer à la jurisprudence constitutionnelle et Européenne. Il est donc logique qu'elle intervienne au fond et non au seuil de la recevabilité107(*) .

La Cour constitutionnelle le con?rme dans le motif de plusieurs Arrêts, malheureusement seulement dans leur version néerlandaise : le juge « susceptible de tenir compte des faits établis et des intérêts en présence » le fera « ten gronde », « au fond »108(*).

* 70 Art 614 de la Loi n0 073/84 du 17 Octobre 1984 portant Code de la famille, in JORDC, n0 spécial tel que révisé en 2016, in http//www.legatnet, cd, CDF,2017, PDF, Consulté le 30 décembre 2020.

* 71 Ibidem, article 614.

* 72 Ibidem, article 615.

* 73 E-L. NDOMBA KABEYA, De l'égalité des enfants en droit civil congolais, thèse de doctorat, UCL, Louvain-la- Neuve, novembre 2005, p. 32.

* 74 Art 628 de la Loi n0 073/84 du 17 Octobre 1984 portant Code de la famille, in JORDC, n0 spécial tel que révisé en 2016, in http//www.legatnet, cd, CDF,2017, PDF, Consulté le 30 décembre 2020.

* 75 Unification du régime des actions. L'ordonnance précise que les actions sont toutes prescrites par un délai de 10 ans sauf dispositions contraires. Il s'agit donc désormais du délai de droit commun en matière de filiation, on peut encore y voir un souci de sécurité pour le lien de filiation. En outre, toutes les actions que pourraient intenter l'enfant sont suspendues pendant sa minorité, le délai de 10 ans court donc à compter de sa majorité.

* 76 ONESIME KANGOMBA, op.cit, p.34.

* 77 Loi n° 2009-61 du 16 janvier 2009 ratifiant l'ordonnance n° 2005-759 du 4 juillet 2005 portant réforme de la filiation et modifiant ou abrogeant diverses dispositions relatives à la filiation.

* 78 CEDH 12 janvier 2006, aff. Mizzi c. Malte, n° 26111/02 ; CEDH 10 octobre 2006, Aff. Paulik c. Slovaquie n°10699/05, mais aussi pour l'impossibilité d'établir sa filiation biologique due à une reconnaissance de paternité du nouveau compagnon de la mère : CEDH 18 mai 2006, aff. n° 55339/00 Rozanski c. Pologne. Mais voir cependant : CEDH 18 février 2014, aff. AL c. Pologne n° 28609/08.

* 79 Ibidem.

* 80 Lire l'article 614 de la Loi n0 073/84 du 17 Octobre 1984 portant Code de la famille, in JORDC, n0 spécial tel que révisé en 2016, in http//www.legatnet, cd, CDF,2017, PDF, Consulté le 30 décembre 2020.

* 81 CEDH, 13 février 2003, aff. Odièvre c. France, n° 42326/98.

* 82 Réserve gardée des hypothèses d'adoption ou d'assistance médicale à la procréation avec tiers donneur.

* 83G. CORNU, Droit civil. La famille, 8 éd., Paris, L.G.D.J.- Monchretien, 2003, p. 350.

* 84 « Il y a trois choses qui sont au-dessus de ma portée - même quatre que je ne puis comprendre : la trace de l'aigle dans les deux, la trace du serpent sur le rocher, la trace du navire au milieu de la mère et la trace de l'homme chez la femme. » Proverbes 30 18-19.

* 85 L'article 602 de ce Code décide que : « nonobstant toute convention contraire, l'enfant né pendant le mariage ou dans les trois cents jours après la dissolution du mariage a pour père le mari de la mère ».

* 86 La Cour de cassation interprète d'ailleurs cette règle de manière très rigoureuse. En effet, par un arrêt du 6 avril 2004, la Première Chambre civile refuse que l'adoption puisse être prononcée à l'égard de l'autre parent. Selon la Cour de cassation, cela constituerait un détournement de l'article 334-10 du Code civil.

* 87 Art 153 du code de la famille in leganet.

* 88 Ibidem, article 154.

* 89 Art 157 de la Loi n0 073/84 du 17 Octobre 1984 portant Code de la famille, in JORDC, n0 spécial tel que révisé en 2016, in http//www.legatnet, cd, CDF,2017, PDF, Consulté le 30 décembre 2020.

* 90 Ibidem, article 596.

* 91 Ibidem, article 600.

* 92 N. GALLUS et A.-Ch. VAN GYSEL, « Les décisions récentes de la Cour constitutionnelle en matière de ?liation : humanisme ou aberrations ? », in rev. Not. Belge, 2013, p. 399.

* 93 G. MATHIEU, Manuel pratique de la filiation, Waterloo, Kluwer, 2016, p. 18, n o 59 (action « non nécessairement jugée irrecevable » si le juge estime la forclusion non protectrice d'un intérêt légitime).

* 94 M. Godelier, Les métamorphoses de la parenté, Paris, Fayard, 2004, p. 43.

* 95 Voire l'article 340 du Code civil français.

* 96 Art. 312 al. 2 du code civil français et l'article 606 de la Loi n0 073/84 du 17 Octobre 1984 portant Code de la famille, in JORDC, n0 spécial tel que révisé en 2016, in http//www.legatnet, cd, CDF,2017, PDF, Consulté le 30 décembre 2020.

* 97 J-P. Lévy et A. Castaldo, Histoire du droit civil, 2eme Ed. Dalloz, 2010, p.167.

* 98 Ibidem

* 99 Civ. 1 re , 28 mars 2000, D. 2000, jur. P. 731, note Garé. 2 Civ. 1 re , 16 février 1977, Bull. civ . I, n° 92.

* 100 Tribunal de paix de Bukavu, jugement RC694. I du 20 septembre 2017, p.3.

* 101 Ibidem.

* 102 KIFWABALA TEKILAZAYA, Droit civil congolais, presse universitaire de Lubumbashi, février 2008, p.359.

* 103 Tribunal pour enfant de BUKAVU, jugement RC/1585 du 16 février 2017, p.6.

* 104 Tribunal pour enfant de BUKAVU, jugement RC/1643 du 30 mai 2017, p.5.

* 105 Ibidem.

* 106 SOSSON, « Actions en contestation de paternité : la Cour constitutionnelle ne sou?e-t-telle pas le chaud et le froid ? », Rev. trim. dr. fam., 2013, p. 556.

* 107 D. PIRE, « Filiation : la Cour constitutionnelle, seul tribunal de la famille du Royaume ? », note sous C. const., 3 février 2016, J.L.M.B., 2016, p. 415.

* 108 Arrêts (seulement version NL) n o 139/2014 du 25 septembre 2014, B.30.6 ; n o 38/2015 du 19 mars 2015, B.7.5 ; n o 126/2015 du 24 septembre 2015, B.7.5 ; n o 168/2015 du 25 novembre 2015,

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