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La marque de l'impermanence dans les expositions du palais de Tokyo

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par Thomas Bizien
Université Paris III - Sorbonne Nouvelle - Master de médiation culturelle 2010
  

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    Thomas Bizien

    Université Paris 3 À Sorbonne Nouvelle UFR Arts et Médias

    Département Médiation culturelle Année universitaire 2010 - 2011

    La marque de l'impermanence
    dans les expositions du Palais de Tokyo

    Mémoire de Master 1 Session de Juin 2011

    Sous la direction de MM la Professeur Cécile Camart

    2

    REMERCIEMENTS

    En tout premier lieu, mes remerciements vont à l'équipe du Palais de Tokyo, dont les conseils judicieux ont aiguillé ce travail. Ma reconnaissance vise particulièrement Frédéric Grossi et Vincent Simon, responsables du service des éditions. L'accès aux archives de l'institution, aux ressources iconographiques ainsi qu'aux documents imprimés m'aurait été impossible sans eux. Je leur suis très reconnaissant d'avoir su m'accompagner et me soutenir tout au long de ce parcours.

    Je tiens également à remercier ma directrice de mémoire, la professeure Cécile Camard pour l'attention portée à ce travail.

    3

    RESUME

    Présenté comme exigence partielle du master 1 de médiation culturelle, ce mémoire revient sur les dix années de programmation du Palais de Tokyo. Il tend à mettre au jour la position curatoriale de l'institution. La notion d'impermanence, entendu ici comme motif pouvant aussi bien désigner le fugitif, l'éphémère, le transitoire, a été choisie comme outil permettant de lire une part représentative de ses expositions. D'oeuvres qui tentent d'intégrer dans leurs matérialités, les flux de la vie, aux oeuvres qui se déploient dans cette vie même, ce mémoire est aussi l'occasion d'analyser la capacité de l'art à pouvoir rendre compte de la temporalité. Enjeu artistique majeur de la création contemporaine, la gestion du temps de l'oeuvre et son esthétisation est le dénominateur commun des oeuvres ici rassemblées. Le rapport de l'oeuvre et de l'impermanence du temps peut être envisagé selon trois modalités :

    Des oeuvres statiques qui proposent dans leur récit un déplacement temporel. Comme des ruines suggèrent en symbolique le transitoire, ces oeuvres déploient, dans les énoncés qu'elles mettent en scènes, des récits qui dévoilent l'inéluctable fuite du temps. À l'image de la vanité, qui par effet de rétroaction, fait prendre conscience de la mort prochaine, ces oeuvres proposent au spectateur, une approche subjectivée de la temporalité.

    Par l'usage de matériaux pauvres qui se décomposent, de mécanismes de destructions qui liment leurs présences, un autre corpus d'oeuvre aborde la notion de processus. Des sculptures organiques, donc périssables de Michel Blazy aux oeuvres autodestructrices de Floriant Pugnaire & David Raffini, ces travaux évolutifs ont en commun de questionner la relation entre l'art et son immutabilité.

    De l'éphémère de l'objet à la fugacité de l'action, les interventions en prise avec le réel n'envisagent la production d'aucune oeuvre arrêtée. Vécu en fonction des aléas du temps, l'art vise ici l'enclenchement d'un processus intégré aux fluctuations de la vie.

    Mots clés : impermanence, maîtrise de la temporalité, processus, art éphémère, sculpture orpheline, vanité, espace-temps, art et vie, site spécifique

    4

    PLAN DU MEMOIRE

    Remerciements II

    Résumé III

    Table des matières IV

    Introduction 8

    (Les oeuvres sont citées en fonction de leur ordre d'apparition dans le texte)

    I. Contre le monument : précarité, fragilité et destruction sculpturale

    ...13

    I.1. Une esthétique du ruiniforme 14

    I.1.a - Un espace d'exposition en friche 14

    Anne Lacatton & Jean-Philippe Vassal, Travaux de réhabilitation du Palais de Tokyo, 20002002 ; 2011-2012

    I.1.b - Des ruines comme expôt 16

    Kay Hassan, Johannesburg by day, 2002 À Loris Cecchini, Breastwork, 2002 ; Empty Walls - Just Doors, 2007 À Michael Elmgreen & Ingar Dragset, Demolished Prison, Powerless Structures, Fig. 272, 2002 À Sandra Lorenzi, L'édifice persistant, 2011

    I.1.c - De la fragilité sculpturale 19

    Vincent Ganivet, Caténaires, 2010 ; Round Up, 2007 À Daniel Firman, Wûrsa (à 18 000 kilomètre de la terre), 2008 À Sébastien Vonier, Névés, 2011 À Karsten Födinger, Cantilever, 2011

    I.2. Des processus de désagrégation 20

    I.2.a - La consommation physique de l'oeuvre 21

    Michel Blazy, Boules de carottes, 1998 ; Champ de pommes de terre, 2002 ; Fontaine de mousse, 2007 ; Patman 2, 2006 ; Sans titre, 2007 ; Sculptcure, 2003 À Lonnie van Brummelen & Siebren de Haan, Fortified Nigerian Sugars, weakened by second rainy season and overseas transportation, 2006

    I.2.b - La destruction de l'oeuvre ..23

    Florian Pugnaire & David Raffini, Expanded Crash, 2008-2009 ; In Fine, 2010 À Jean Marie Blanchet, Adhésif sur mur, 2007 À Laurent Moriceau, Killing me Softly, 2003 À Henrik Plenge Jacobsen, Smoke, 1998-2000

    I.2.c - L'emballement mécanique : le hasard et l'aléatoire 26

    .

    Arcangelo Sassolino, Afasia1, 2008 ; Sans titre, 2008 À Kris Vleeschouwer, Glassworks II, 2006 À Roman Signer, Valise, 2006 ; Banc, 2008 ; Tables, 2009 À Alighiero Boetti, Lampe annuelle, 1966

    5

    I.3. La disparition sculpturale : de la fuite vers l'invisibilité 29

    I.3.a - Se soustraire du réel 29

    Robert Gober, Partially Burried Sink, 1986 À Ryan Gander, Nathaniel Knows, 2003-2009 À Etienne Bossut, Jardinage, 1984 À Werner Reiterer, Entrance to the Center of the World, 2005 À Vincent Lamouroux, Scape, 2006

    I.3.b - Sculptures invisibles 32

    Tom Friedman, Untitled (A Curse), 2009 À Dave Allen, Satie's «Véritables Préludes Flasques (pour un chien)» 1912, rendered at tone frequencies above 18 kHz, 2002 À Christian Andersson, Blind Spot, 2003 À Ceal Floyer, Autofocus, 2002

    II. Le temps manipulé ou comment rendre compte de son instabilité

    ...35

    II.1. Des fluctuations de la pensée 35

    II.1.a - La décomposition du mouvement et la culture cinématographique 35

    Bettina Samson, Warren, 1/4 de seconde en Cinémascope, 2007 À Zilvinas Kempinas, Flying Tape, 2006

    II.1.b - Mécanismes cérébraux dévoilés 37

    Rebecca Horn, Lumière en prison dans le ventre de la baleine, 2002 À Jota Castro, Brains, 2005 À Arthur Barrio, Réflexions...(s)..., 2006 À Mathieu Briand, Le Monde flottant, 2003

    II.1.c - Le temps contrôlé 42

    Loris Gréaud, Forêt de poudre à canon (bulle), 2008 À Tobias Rehberger, Paris Light Bungalow Drawing, 2002 ; Shining, Shining, Shining, 2002 ; Videobibliothek, 2002

    II.2. Variation contemporaine sur le thème de la Vanité classique 43

    II.2.a - Ossements, crânes et squelettes 44

    Adel Abdessemed, Habibi, 2004 À Laurent Le Deunff, Crâne, 2002 À Bruno Peinado, Vanity flight case, 2005 À Nicolas Juillard, The Waiting Room, 2005

    II.2.b - Des fleurs comme motif du temps 47

    Yoshihiro Suda, One Hundred Encounters, 2001 ; Refrain Pain, 2002 ; Rose, 2003 ; Weeds, 2003 À Tony Matelli, Gone, 2000 ; Weeds, 2000-2009

    II.2.c - La mesure du temps : montre et bougie 48

    Gianni Motti, Big Crunch Clock, 1999 À Urs Fischer, Untitled (Branches), 2005 - Jonathan Monk, The Odd Couple (French version), 2008 À Alice Guareschi, 2005 Calendar, 2005

    II.2.d - La vanité performée 51

    Marina Abramovic & Jan Fabre, Guerrier-Vierge/Vierge-Guerrier, 2004 À Ana Mendieta, On Giving Life, 1975

    II.3. De la caducité de l'existence 52

    II.3.a - Une fin de course 53

    Pierre Ardouvin, Nasseville, 2003 À Bertrand Lamarche, Lobby (hyper tore Ø 550), 2010 À Yuhsin U. Chang, Poussière dans le Palais de Tokyo, 2010

    6

    II.3.b - La stratégie du pire 54

    Alain Declercq, Instinct de mort, 2002 À Kendell Geers, The Terrorist's Apprentice, 2002

    III. La critique de l'éternel 57

    III.1. Consumérisme et mass médias 57

    III.1.a - L'impermanence des biens matériels 57

    Chen Zhen, Purification Room, 2003 À Christoph Büchel, Dump, 2008

    III.1.b - Critique de la publicité 62

    Guillaume Paris, We Are the World, 2003 ; Boris Achour, Cosmos, 2001

    III.1.c - Critique des médias 64

    Wang Du, Produit dérivé, 2004

    III.2. L'obsolescence technologique et l'idée de progrès 65

    III.2.a - La caducité de l'ère industrielle ...65

    Daniel Dewar & Grégory Gicquel, Waders, 2010 À Eric Tabuchi, Agrandissement du provisoire, 2010 ; Hyper Trophy, 2010 À Raphael Zarka, La Draisine de l'Aérotrain, 2009

    III.2.b - L'obsolescence technologique 67

    Daniel Dewar & Grégory Gicquel, Granitoïd trans goa rascal koï koï, 2007 À Mark Handforth, Honda, 2002 À Luc Kheradmand, Postvsnow III, 2009-2010 À Yann Gerstberger, Hotel Gogodola Paris Executive Suite, 2010

    III.3. Entropie et dépérissement écologique 69

    Henrik Hâkansson, A travers bois pour trouver la forêt, 2006 À Tetsumi Kudo, Pollution-cultivation-nouvelle écologie, 1971

    IV. De l'éphémère de l'objet à la fugacité de l'action 72

    IV.1. La césure comme modèle d'action : abandon et disparition 73

    IV.1.a - Se dérober du monde 74

    Robert Kusmirowski, Unacabine, 2008 À Gardar Eide Einarsson, Garbage (Class 1-5), 2009 ; Garbage (Class 6-10), 2009

    IV.1.b - L'abandon de l'art 75

    Robert Malaval, Kamikaze, 2005 À Charlotte Posenenske, Vierkantrohre Serie D, 1989

    IV.1.c - L'esthétisation du suicide 78

    Bas Jan Ader, Untitled (Tea Party), 1972 À Gino De Dominicis, Tentativo Di Far Formare Dei Quadrati Invece Che Dei Cerchi Intorno ad un Sasso Che Cade Nell'acqua, 1970 ; Tentativo Di Volo, 1970

    IV.2. 7

    D'un art in situ 80

    IV.2.a - Temporalité de l'oeuvre en site spécifique 80

    Robert Smithson, Rundown (1969), Swanm (1969), Mirror vortex (1964) À Daniel Buren, Quatre fois moins ou quatre fois plus, 2004 À Michael Lin, Spring 2003, 2003

    IV.2.b - L'oeuvre exposition 82

    Katharina Grosse, Construction à cru, 2005

    IV.3. ...à un art in socius 83

    IV.3.a À L'artiste comme créateur de dialogue 85

    Alain Bublex, Tokyorama 6, 2001 ; Awareness box, 2003 À Fabrice Gygi, Tribune, 1996 À Robert Milin, Le Jardin aux habitants, 2002 - Surasi Kusolwong, La la la Minimal Market (Welcome 1 euro) - Quand les objets rêvent (Energie Storage) À Tsuneko Taniuchi, Micro événement n°6 bis - Fast Food, 2001 ; Micro événement n°11, Tsuneko Troc, 2004

    IV.3.b À Agir dans l'espace social 87

    Mathieu Laurette, What Do They Wear At Friez Art Fair ?, 2003 À Renaud Auguste Dormeuil, Tokyorama, 2001

    Conclusion 90

    Bibliographie 94

    Annexes

    I. L'idée d'impermanence dans l'art, aperçu historique 100

    II. Inventaire des expositions du Palais de Tokyo 105

    2001 106

    2002 107

    2003 111

    2004 113

    2005 116

    2006 (Directorat Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans) 119

    2006 (Directorat Marc-Olivier Wahler) 121

    2007 123

    2008 126

    2009 129

    2010 132

    2011 136

    III. Iconographie 137

    8

    « The recurrent theme of art since World War II has been the aesthetics of impermanence. » Harold Rosenberg1

    Alors que le Palais de Tokyo fêtera en 2012 son dixième anniversaire, le mémoire souhaite revenir sur son programme d'exposition. Il escompte mettre au jour la position curatoriale de l'institution, révéler un leitmotiv qui serait apte à relier entre elles les différentes manifestations.

    Au premier abord, la programmation du Palais de Tokyo est marquée par la disparité. Large, des figures de la « fin de l'art » new-yorkais, tel Steven Parrino ou Sarah Lucas, y côtoient des personnalités d'un art contemporain africain. Des chantres de l'esthétique relationnelle y croisent des photographes, peintres et sculpteurs aux supports traditionnels. Ces contradictions semblent d'ailleurs assumées, tant les intentions du site de création contemporaine mettent en exergue une certaine indisposition à forger un nouveau -isme,2 à éviter tout écueil de dogmatisme. En énoncé sa programmation veut en effet refléter l'ensemble de la création. Au travers d'entretiens, les différents directeurs et commissaires insistent d'ailleurs sur la nécessaire diversité des expositions.3

    S'il est possible de rapprocher des travaux d'artistes, les motifs qui président à cette sélection ne peuvent être que transversaux aux médiums, aux supports, aux courants générationnels. Le mémoire a ainsi choisi de partir des oeuvres exposées, afin de révéler via leurs champs sémantiques, les liens pouvant permettre de les rassembler. Comme pour un commissariat d'exposition, ce travail souhaite inscrire

    1 « Thoughts in an Off-Season » in Art on the Edge : Creators and Situations, Secker & Warburg, 1976

    2 Marc-Olivier Wahler in « Dynasty, regard sur une génération », Richard Leydier, Art Press 369, juillet 2010

    3 « La programmation est aussi significative de l'extrême souplesse et de la diversité qu'il m'a semblé nécessaire d'imprimer au lieu ouverture à toutes les tendances comme à toutes les cultures, attentive à la diversité des courants esthétiques et sensible aux multiples questionnements du monde contemporain. » Catherine Tasca, Dossier de presse d'ouverture, Novembre 2001

    « Un espace pour un débat esthétique ouvert. » Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans, Dossier de presse d'ouverture, Novembre 2001

    « Les principes directeurs de la programmation sont (...) susceptibles de se voir contredits par un projet ou un autre... C'est au prix de cette extrême flexibilité que le Palais de Tokyo, joue son rôle de laboratoire vivant de la création contemporaine. » Nicolas Bourriaud, Catalogue de l'exposition Notre Histoire, 2006

    9

    dans un même lieu, des oeuvres qui en se rassemblant, émane plus identifiable un concept général. Il veut articuler des expositions aux approches, idées et thèmes indépendants, montrer, sous un prisme sensible permettant de les englober, leur complémentarité. Et quand bien même l'institution se dit miroir réfléchissant de la création, la sélection qu'impose une programmation sous-entend une vision claire de l'idée de contemporanéité. C'est cette idée que le mémoire vise à éclairer. 4

    « Ce qui pemet d'agréger au sein d'un même lieu des artistes poursuivant des buts et employant des méthodes si hétérogènes, c'est le fait qu'ils travaillent à partir d'une similaire intuition de l'espace mental contemporain.5 »

    Invités à organiser la Biennale de Lyon de 2005, les co-directeurs du Palais de Tokyo, Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans, montaient leur commissariat autour de l'idée de temporalité. Nommée L'expérience de la durée, la Biennale rassemblait des oeuvres ayant en commun, des modes opératoires usant du temps comme matériau de construction. Présentée à Lyon, l'installation de Kader Attia, Flying Rats, incarne ce processus. L'artiste place dans une volière des sculptures anthropomorphes construites à partir de graines. S'en nourrissant, les oiseaux donnent une dynamique à l'installation, qui se désagrége dans le temps. Comme une sorte de banc de montage sur lequel l'artiste recomposait la réalité, l'oeuvre évoluait en fonction des fluctuations inhérentes à la temporalité. Et en l'automatisant, Kader Attia arrivait à figurer l'impermanence. N'étant à aucun moment tout à fait la même, Flying Rats contestait la beauté accomplie et l'ordre éternel.

    Depuis longtemps, la création contemporaine tente de restituer le mouvement, le flux et l'écoulement du temps. Et dans son imprescriptibilité à pouvoir être pèle mêle restituer, elle use de divers stratagèmes plastiques pour exprimer cette fugacité. À la suite d'une réflexion entamée par les artistes conceptuels des années 1960-1975,

    4 « Comment en effet traduire le bouillonnement créatif de notre époque sans prendre des risques, sans affirmer des visions singulières de l'art actuel plutôt que se conformer au commerce et aux conventions ? » Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans, Dossier de presse, 2002

    « Notre principe de départ était de réunir des tendances éparses qui coexistent à l'état gazeux et de les rendre plus visibles. » Nicolas Bourriaud, Notre Histoire, 2006

    5 GNS, catalogue de l'exposition, 2003

    10

    notamment Daniel Buren, « la maîtrise de la durée et des protocoles temporels devient un enjeu esthétique majeur, au même titre que la maîtrise de l'espace.6 » Aborder l'impermanence du temps sera ainsi l'occasion, par la programmation du Palais de Tokyo, de faire un inventaire de la création contemporaine.

    Le caractère continuellement changeant de l'oeuvre d'art, l'incorporation dans celle-ci du facteur temps, la quatrième dimension, traduisent l'abolition des principes artistiques traditionnels. Dans le champ sémantique des oeuvres exposées au Palais de Tokyo, l'idée d'impermanence peut permettre d'aborder une frange importante de son programme d'exposition.7 Transversale aux écoles, aux époques et aux mouvements, cette notion À qui recoupe les recherches sur le temps de l'oeuvre À peut servir d'outil pour lire transversalement son programme d'exposition. Les thèmes-phares de l'institution, l'invisible et le visible, le rapport avec la science À la physique quantique À avec l'occulte, peuvent être traversé par cette notion. Tandis que le problème de l'espace et sa représentation dans l'art a occupé l'attention des critiques d'art, le problème correspondant du temps et de la représentation du mouvement a été étrangement négligé.8 Les deux directorats ont cherché à combler ce déficit :

    Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans (2002-2006) :

    « Si les artistes de ces deux dernières décennies ont autant problématisé le temps, c'est parce qu'il représente un plan sur lequel il est encore possible de tracer des signes. 9 »

    Marc-Olivier Wahler (2006-2011) :

    « L'idée de transformation fait partie de la réflexion globale qui préside depuis Cinq milliards d'années. S'il n'y a pas de point fixes

    6 Nicolas Bourriaud, « Time Specific », op. cit.

    7 Cf annexe 2 pour une vue d'ensemble de la programmation

    8 E.H. Gombrich, Movement and Movement in art, Journal of the Warburg and Courtauld Institute, vol. 27, 1964

    9 Nicolas Bourriaud, « Time Specific » in Expérience de la durée, Paris musées, 2005

    11

    dans l'espace, il n'y a pas de point fixes dans les expositions.10 »

    L'idée d'impermanence ne s'oppose pas diamétralement à celle de permanence. Fonctionnant en relation et non en attribut, ces deux notions ne sont pas monolithiques. Compte tenu de la diversité des formes et des intentions sous lesquelles l'idée d'impermanence s'est présentée au Palais de Tokyo, il apparaît pertinent de parler de motif plutôt que de genre. Ainsi cette notion peut aussi bien désigner le fugitif, le contingent, l'éphémère, le fragile que le déséquilibre. Considéré sous l'angle du transitoire, l'impermanence peut être l'infime, le négligeable, le dérisoire, le disparu, l'abandonné.

    Marc-Olivier Wahler, interrogé sur son programme d'exposition, définit cette impermanence en invoquant la notion de passage :

    « Alors que depuis la renaissance, notre culture, nos cerveaux, notre manière de voir, a été formatée par la notion de point fixe, les artistes s'intéressent aujourd'hui à la dynamique du passage, de la transformation, à toutes les variations possibles des chemins qui peuvent mener d'un point à un autre.11 »

    Dans ses différents essais, Nicolas Bourriaud souligne l'importance de l'idée d'impermanence dans le programme artistique du )()(e siècle12. Dans Esthétique Relationnelle, il réintroduit la notion d' « espace-temps ». Dans le catalogue de la biennale de Lyon, il introduit celle de « Time Specific ». Dans Formes de vie, il dresse un historique de l'idée d'éphémère, mettant en parallèle les penseurs grecs rétifs à la trace, Socrate, Diogène, et les figures marquantes de la modernité.

    Les oeuvres présentées dans ce mémoire auront ainsi toutes en commun, comme défini par les deux directorats de l'institution, d'ouvrir à une compréhension de la matière fluide du temps, non en la figurant, mais en la rendant sensible. Différent

    10 Veronica Da Costa, « Marc-Olivier Wahler. L'art contemporain dans son champ élargi » in Revue Mouvement, Juillet À Septembre 2009

    11 Anni Puolakka & Jenna Sutela « The art and science of the invisible À OK Do met Marc-Olivier Wahler of Palais de Tokyo » in OK Do, décembre 2009

    12 Un aperçu historique de l'idée d'impermanence dans l'art peut être trouvé en annexe 1

    12

    d'un sujet d'histoire de l'art, l'objectif du mémoire n'est pas seulement de montrer la persistance de la marque de son impermanence dans la création contemporaine. Il s'agit aussi de s'interroger sur l'idée d'une programmation, et de mettre à jour les liens qui peuvent la conglomérer.

    Problématique :

    Quelles sont les modalités de représentation des différents aspects de l'impermanence au sein de la programmation du Palais de Tokyo ?

    13

    I. Contre le monument : précarité, fragilité et destruction sculpturale

    Formé à partir du latin moneo, se remémorer, le monument célèbre traditionnellement une personne, un événement. Sa fonction est mémorielle et édifiante. De large dimension À monumental - il appelle le passant dans sa conscience historique, lui rappelle son devoir de révérence. La pensée occidentale s'organise hiérarchiquement autour de ce monument, non seulement en architecture, mais aussi en art, littérature et philosophie. Dans ce système intellectuel, une idée ne peut acquérir une réelle résonance qu'en se matérialisant, qu'en étant transformer en un objet solide capable de la commémorer durablement. Au sommet, le monument est la pierre d'ancrage qui permet au protagoniste de communiquer. À ce titre, il peut être considéré comme une mise en ordre, une mémoire implacable qui incarnerait la figure de l'autorité. Pour George Bataille, le monument est « l'expression de l'être même des sociétés :

    Les grands monuments s'élèvent comme des digues, opposant la logique de la majesté et de l'autorité à tous les éléments troubles : c'est sous la forme des cathédrales et des palais que l'Eglise ou l'Etat s'adressent et imposent silence aux multitudes. Chaque fois que la composition architecturale se retrouve ailleurs que dans les monuments (...) peut on inférer un goût prédominant de l'autorité humaine. 13 »

    Les conceptions normées qu'imposent les canons esthétiques et les règles du voir, incarnées ici par la figure du monument, brident l'expression profonde de l'être. La symétrie des villes et le rationalisme qui la sous-entend sont autant de barrières dressées contre la nature impulsive, le spontané de l'homme. George Bataille lie dès lors la lutte contre le monument et la modernité. Dans tous les domaines des arts, la disparition de la « composition architecturale » que sous-entendait l'académisme est selon l'écrivain, « la voie ouverte à l'expression, par là même à l'exaltation. » Le déclin du monumentale peut être ainsi perçu comme un symptôme de nos sociétés

    13 Georges Bataille, « Architecture » in Dictionnaire critique, L'écarlate, 1993

    14

    modernes, celui du défi lancé à tous ceux qui voudraient affirmer une position d'autorité. Par lassitude et irrévérence devant les grands symboles, des artistes comme Karsten Födinger, Michel Blazy, Florian Pugnaire, Romain Signer, Robert Gober, répugnent à servir la mise en scène de stabilité qui s'extrapole traditionnellement de la figure du monument. Ces artistes refusent de servir de décorateur, de servir un grandiose en quête d'esthétisation. Cette première partie sera l'occasion d'analyser À à partir de la programmation du Palais de Tokyo À le déclin de l'autorité sculpturale, entendu ici comme profondément lié à « l'apparition d'un art prodigue d'anti-monuments.14 » Dans ses choix curatoriaux, l'institution valorisait des pratiques artistiques mettant en valeur le fragile et l'éphémère, le déséquilibre et l'auto destruction. Et si les oeuvres usent de procédés divers pour désacraliser le désir d'éternité, lié à la fonction traditionnelle du monument, un rapprochement peut être ici opéré dans les visées que ces oeuvres sous-entendent. Lorsque Michael Elmgreen et Sébastien Vonier exposent des matériaux de chantiers bruts, ils opèrent la mise en vestige de l'institution. Comme des ruines suggèrent en symbolique le transitoire, leurs installations donnaient surtout à voir la fuite du temps. (chap. 1) Plus en prise avec le réel, les oeuvres de Michel Blazy montrent le processus de dilatement du temps en s'entachant de sa marche. Quant à Florian Pugnaire & David Raffini, ils usent de la mécanique pour montrer ce lent anéantissement. (chap. 2) A ce corpus d'oeuvre peut être rattaché des travaux proposant l'illusion d'espace temps annexe. Etienne Bossut, Ryan Gander, Vincent Lamoureux présentaient des trappes pour se soustraire du réel, pour disparaître dans une temporalité autre. (chap. 3)

    I.1 Une esthétique du ruiniforme

    I.1.a À Un espace d'exposition en friche

    Au sein d'une institution qui a, dès son origine aucune vocation à perdurer15, l'idée d'impermanence se fait sensible dès l'ouverture. Invités à réhabiliter le lieu laissé en

    14 Paul Ardenne, Art le présent, 2009

    15 En 2002, le Palais de Tokyo n'a de certitude de financement que de trois ans. La qualité des expositions et le nombre de visiteur permettront de prolonger l'expérience.

    15

    état de chantier après l'échec du projet de cinémathèque française qui devait s'y implanter dans les années 1990, les architectes Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal vont entretenir l'aspect brut du bâtiment. Derrière une façade monumentale, le Palais de Tokyo prend ainsi la forme d'une friche industrielle. Cette quasi mise en état de chantier permanent du bâtiment fait apparaître l'institution comme non tout à fait structurée, position architecturale qui rejoint les courants architecturaux les plus contemporains.16 Et les deux architectes de préciser :

    « Créer de la porosité : entendre la pluie, voir la lumière et le soleil entrer, voir la ville, multiplier les accès.17 »

    En 2000, Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal imaginent le Palais de Tokyo comme un espace public mobile, en mouvement permanent. En fonction de ses acteurs, ses espaces veulent pouvoir être modifiés. Leurs travaux de réaménagement ne sont donc pas l'occasion de stabiliser l'espace en y imposant découpes rigides et cloisonnements fermés, mais l'occasion de le faire bouger, de multiplier les échanges entre corps et bâtiment, entre conscience et forme architecturée. L'esthétique de distorsion que met en scène le duo d'architecte affiche ainsi cette vocation critique : signifier combien la rigidité, en termes de « composition architecturale » verrouille négativement les jeux d'espaces, les figent dans le monumental. Se définissant eux-mêmes comme les « artisans d'un arte povera de l'architecture18 », les architectes mettent en valeur des matériaux comme le plastique et les cornières en aluminium, donnant à l'ensemble de l'édifice un aspect non-fini, en permanent devenir. Ces choix architecturaux font le culte du changement permanent. L'allègement systématique de l'architecture confine presque à sa disparition, à son élimination en tant que force rétrograde créatrice d'inertie. La position architecturale du Palais de Tokyo rappelle à ce titre les appels futuristes. Pour un renouvellement des idéaux de beauté, Antonio Sant'Elia préconisait dans son Manifeste de l'architecture futuriste de créer des maisons ayant une durée de

    16 Le « déconstructivisme » notamment

    17 Cité par Jean-Louis Pradel, in « Palais de Tokyo - L'art en chantier », Beaux Arts magazine, Janvier 2002

    18 Entretien avec Philippe Tretiack, Beaux Arts magazine, février 2001

    16

    vide moindre que les architectes.19 A son tour, le Palais de Tokyo favorise l'anti-monumental. Ayant mis en place une architecture légère, dynamique, capable d'adaptation quotidienne, les principes directeurs de la réhabilitation ont été reconduits en 2011. Actuellement en travaux en vue d'un agrandissement conséquent de ses espaces À ouverture de l'espace du parvis de la fontaine À le Palais de Tokyo a demandé à Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal de poursuivre leurs épurations architecturales. Prévu pour 2012, la réouverture de l'institution sera l'occasion de constater la persistance de la marque de l'impermanence À entendu comme une adaptabilité progressive qui ne bribe aucun avenir À au sein d'un bâtiment qui au premier abord, reste figé dans la monumentalité des années 1930.

    I.1.b. Des ruines comme expôt

    C'est dans cette atmosphère de friche industrielle où l'on ne sait tout à fait si le chantier a bien été terminé que le site de création contemporaine ouvre ses portes en 2002. Liée à la mélancolie qui tombe sur l'être dès lors qu'il prend conscience du temps qui inéluctablement passe, une poétique des ruines prend vite forme dans son programme d'exposition. Dès l'ouverture, le Palais de Tokyo montrait une pièce de Kay Hassan. Pour son installation, Johannesburg by day20, l'artiste sud-africain présentait dans un couloir des débris, les restes d'une fugue, d'une migration qui se serait subitement interrompu. Des sacs de voyage parsemaient l'espace d'une situation cacophonique, personne ne sachant tout à fait si le départ restait imminent ou s'il s'agissait d'un ancrage arrêté. En présentant cette pièce, les co-directeurs de l'institution, Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans, faisait une analogie entre la situation de l'institution - qui en 2002 n'a pas encore vocation à perdurer - et l'installation de Kay Hassan qui suggère que rien ne puisse être totalement arrêté.

    Dans la même exposition, Loris Cecchini présentait Breastwork21, des gaines de combustibles vieillis par le temps. Comme si elles appartenaient à une époque

    19 Antonio Sant'Elia : « Les caractères fondamentaux de l'architecture futuriste seront la caducité et le fait d'être provisoire. Les choses dureront moins que nous. Chaque génération devra fabriquer sa propre ville. » Manifeste de l'architecture futuriste, 1914

    20 Fig. # 1

    21 Fig. # 2

    17

    révolue, cette installation plaçait le spectateur dans un futur suggéré, des disjoncteurs s'affichant comme des reliques d'une énergie électrique dépassée. La mise en scène de ces vestiges, bien qu'il s'agisse ici d'une reconstitution, séduisait pour ses qualités évocatrices. Car les ruines renvoient toujours l'image de celui qui les regarde. En suscitant le souvenir de ce qui fut, le spectateur contemple dans les ruines l'image familière de l'écoulement du temps. En cela les ruines « ne représentent pas l'espace extérieur mais l'expérience intérieure22 », puisque l'impermanence touche l'intériorité de tous les êtres. Et représentant l'histoire comme un processus irréversible, les ruines agissent comme une allégorie de la dissolution, de la déchéance certaine. Plus précisément, Walter Benjamin parle des ruines comme d'un symbole qui permet au « présent d'ouvrir sur une vision du futur qui rappelle le passé.23 » Par la perte de l'unité et de la complétude dont elles sont le symptôme, les ruines ne signifient pas seulement notre condition de mortels. En montrant l'échec de toute persistance, les gaines électriques vieillies de Loris Cecchini figuraient implicitement l'effacement du point vers lequel converge notre marche. Et en usant d'un motif banal, l'artiste parvenait à désigner la société entière, de telle sorte que son installation ne témoignait pas du passé, mais de l'impermanence du maintenant.

    Toujours dans l'exposition d'ouverture, les plaques de ciment répandus par Michael Elmgreen & Ingar Dragset24 rappelaient les vestiges détruits, abîmés et dépassés de formes monumentales qui se seraient effondrées. Des fragments architecturaux, comme détruits par le délitement du polissage du temps, se plaçaient frêle au centre de l'espace d'exposition. Pouvant être considéré comme le passage de la représentation à la présentation, l'art contemporain met en scène plus qu'il n'use de signe. Ainsi, le travail de Michael Elmgreen & Ingar Dragset pouvait faire penser à la reconstitution dans le réel d'une peinture romantique aux motifs ruiniformes.25 Mais à l'opposé de l'image du romantique pris de mélancolie devant les ruines, ce travail n'offrait pas l'occasion d'exprimer un passéisme distant devant la fuite du temps. Rapprochée des oeuvres de Kay Hassan et de Lorris Cecchini, l'exposition

    22 Fabrice Hergott, « Un aspect de l'art des artistes allemands nés sous le nazisme », in L'art devenu histoire, Hazan, 2006

    23 Walter Benjamin, Charles Baudelaire. Un poète lyrique à l'apogée du capitalisme, Petite Bibliothèque Payot, 1979

    24 Fig. # 3

    25 Notamment Hubert Rober, Caspar Friedrich

    18

    d'ouverture du Palais de Tokyo peut être considérée comme un appel à la reconnaissance de la friabilité des choses. En montrant la fugitivité, ces travaux utilisaient l'expression de l'éphémère comme vecteur esthétique, dénonçait abjectement toute forme de stabilité, de monumentalité. En exposant des vestiges, l'exposition valorisait ce qui n'est donné à voir qu'une seule fois.

    Appelé à venir réexposer lors du directorat de Marc-Olivier Wahler, Lorris Cecchini proposait en 2007, une installation de grande ampleur. Intitulé Empty Walls - Just Doors26, l'artiste assemblait un labyrinthe de porte presque flasque, marquées par la décrépitude. Faisant penser aux collages architecturaux de Kurt Schwitters, les portes de Loris Cecchini montraient l'usure et la dégradation, soulignaient les qualités poétiques de ces matériaux usés et platinés. Dans un dédale d'interstice où les voies de sorties étaient difficilement identifiable, son installation prenait racine dans l'iconographie traditionnelle de la mélancolie, « un champ de ruines parsemé de vestiges monumentaux27 ». Comme ce qu'il serait resté après le passage d'un accident, ces portes étaient autant de trace d'une habitation disparue, l'esthétiquement intéressant de ces ruines prenant appui sur la tentative de spectateur de reconstruire l'histoire, les circonstances de cet accident :

    « Le présent se donne comme ruine tandis que la catastrophe devient le paradigme de l'événement.28 »

    À ce corpus d'oeuvre, peut être rapproché l'exposition personnelle de Sandra Lorenzi, La Nébuleuse de l'homoncule29. Présenté en 2011 dans l'espace d'un des modules, le spectateur apercevait d'abord une cabane de bois qui se dressait frêle au centre de la pièce. Entourée de fortins miniaturisés, c'était comme si cette bâtisse venait de survivre à une attaque. Proposant une narration qui jonglait sur différents espaces temporels, l'artiste nommait judicieusement cette pièce, L'édifice persistant.

    26 Fig. #4

    27 Jean Starobinski, La mélancolie au miroir, Julliard, 1989

    28 Françoise Proust, L'histoire à contretemps. Le temps historique chez Walter Benjamin, Le Livre de Poche, 1994

    29 Fig. #5

    19

    I.1.c À De la fragilité sculpturale

    Ayant l'ambition d'accompagner les artistes dans la durée, le Palais de Tokyo présentait quatre fois le travail de l'artiste Vincent Ganivet.30 En étudiant les techniques de l'architecture, les forces de tractions et de compression, l'artiste réalise des structures impressionnantes : des arcs sans voûte, sans édifice, à la fois flottant dans l'espace et violemment plantés dans le sol. Ses structures tiennent par des cales de bois, qui en soutenant l'édifice, le mettent aussi dans un précaire équilibre. Proche du point de rupture, la chute semble immanente, mais à jamais repoussé. Pour Dynasty, l'artiste présentait Caténaires31 : des arches autoportantes en parpaings qui évoquent à la fois le chantier de construction et le squelette architectural des cathédrales romanes.

    « Au Palais de Tokyo, j'ai complexifié les formes en faisant une seule arche sur trois pieds différents, ce qui donne un ensemble plus déséquilibré. Ce sont des pièces massives mais fragiles. Des sangles, des cales et des étais de sécurité matérialisent cette fragilité. (...) L'apparente fragilité de mes sculptures laisse imaginer au spectateur un danger imminent.32 »

    Dans la même optique, Daniel Firman présentait à l'occasion de la session (un ensemble d'expositions) Superdome, un éléphant taxidermisé qui tenait en équilibre sur la trompe, les pattes vers les airs comme pour provoquer le ciel. Se jouant des contraintes terrestres, l'équilibre fragile de l'éléphant semblait irrémédiablement tendre vers la chute. Donnant à voir l'instant qui précède le désastre, ces installations jouent avec l'impermanence du temps, le spectateur étant amené à se figurer mentalement le point de rupture, l'inconstance de l'édifice.

    Alors que le Palais de Tokyo se prépare actuellement à des travaux de réaménagements, un cycle d'exposition s'y greffait comme en écho. Laissées en

    30 Présenté en décembre 2007 dans un des modules, on retrouve l'artiste dans un projet hors les murs (vitrines de la galerie Lafayette, 2009), dans un chalet de Tokyo à Séoul (2009). À l'occasion de Dynasty (2010), l'artiste expose une pièce maîtresse, Caténaires.

    31 Fig. #6

    32 Elisa Hervelin, Interview sur paris-art, 14 juillet 2010

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    l'état d'un processus encore non abouti, ces installations troublaient le spectateur mal averti. Beaucoup passèrent leur chemin, comme étonné d'avoir par mégarde pénétré dans ce qu'il considérait comme un chantier. Sébastien Vonier présentait par exemple Névés,33 des plaques de béton brutes auxquelles étaient rattachées des fibres de fer. En équilibre, ces plaques voguaient au grand jour alors que d'ordinaire, elles supportent ancrées les fondations des édifices. Outils et matériaux de constructions laissés apparents, l'installation dévoilait les ossatures qui permettent de faire tenir nos villes. Dans l'espace d'exposition concomitant, Karsten Födinger présentait Cantilever,34 une énorme plaque de ciment portée en éloge par des échafaudages bruts. Dans ses autres travaux, l'artiste insère des cales entre les immeubles, comme pour souligner le déséquilibre, leur donner cette béquille qui leur permettrait de perdurer. Révélant la fragilité des structures, ces deux artistes mettent en valeur l'instabilité des fondations sur lesquelles reposent nos édifices. Et en dévoilant ces césures, c'est une fébrile sensation qui en mouvement vient contredire l'architecture comme édifice stable, faisant de l'impermanence de leurs fondations, le motif esthétique vecteur de leur attrait.

    I.2. Des processus de désagrégation

    De la vapeur d'eau qui s'estampille dans l'air, de la mousse de savon qui vient envahir la salle d'un musée : la création contemporaine sculpte une matérialité vagabonde. Par l'usage de matériaux pauvres qui se décomposent, de mécanismes de destructions qui liment leurs présences, ces oeuvres évolutives, statique mais d'essence ambulatoire, questionnent la relation entre l'art et son immutabilité.

    « Le retrait esthétique fraie la voie au process art - dans lequel les forces chimiques, biologiques, physiques ou encore le cycle des saisons, exercent leurs effets sur les matériaux d'origine, en modifiant leur forme ou en les détruisant, comme c'est le cas dans les oeuvres comportant des herbes qui poussent, des bactéries qui

    33 Fig. #7

    34 Fig. #8

    21

    prolifèrent ou qui attirent la rouille - ainsi qu'à l'art aléatoire, dans lequel c'est le hasard qui détermine la forme et le contenu.35 »

    L'impermanence du temps, bien qu'il n'en soit pas le thème unique, joue un rôle capital dans le corpus ici présenté. Ces artistes montrent des processus simples, lents et monotones, aptes à insérer les flux de la vie dans l'oeuvre. Et comme bon nombre de ces oeuvres demandent des jours, des semaines pour se mutiler, l'expérience du temps vise souvent moins à mettre en scène du temps vécu que du temps représenté.

    I.2.a À La consommation physique de l'oeuvre

    Au tournant des années 1960, les artistes du Land Art et de l'Arte Povera interrogent la pérennité de l'oeuvre. Ces mouvements tendent à sa disparition et participent au développement d'un courant plus large qui intégrera son devenir ruine. Lorsque Robert Smithson coule de l'asphalte depuis la benne d'un camion, il intègre l'impermanence du temps, la destruction programmée de l'oeuvre comme motif esthétique principal. En utilisant des matériaux périssables comme médium artistique, Giuseppe Penone active les mêmes processus. Les préoccupations d'un art anti-monumental36, où l'oeuvre aurait une existence propre et périssable, trouvent leurs aboutissants contemporains dans certaines expositions du Palais de Tokyo. Invité à présenter cinq fois ses travaux37, présent dans les deux directorats de l'institution, Michel Blazy peut être considéré comme l'un des artistes au centre de sa programmation. Ses travaux correspondent bien à l'idée de sculpture orpheline : une existence propre, un devenir unique, incertain dans ses fluctuations quoique évidentes dans ses fins. Michel Blazy rejoint en cela les positions des courants artistiques de l'après-guerre : il ne conçoit pas l'oeuvre d'art comme un objet statique. Privilégiant les matières pauvres, voire comestibles, l'artiste laisse libre champ au

    35 Harold Rosenberg, La Dé-définition de l'art (1972), Chambon, 1992

    36 « La principale occupation du monument est de rester immobile, d'être enraciné en permanence dans le sol, de s'abstenir de tout mouvement visible. » in Krzysztof Wodiczko, Projection publique, 1983

    37 Exposition : Face à Face #1 : Michel Blazy/Tetsumi Kudo (2004) ; Cinq milliards d'années (2006) ; Post Patman (2007) ; Château de Tokyo (expo hors les murs, 2007)

    Programmation vidéo (2004) : Voyage au centre ; Green Peeper Gate ; Multivers

    22

    hasard et à la beauté de l'éphémère. Ayant comme vertu principale de pouvoir se décomposer, l'artiste sculpte de la matière organique, du liquide vaisselle, du papier hygiénique... Paradoxalement, c'est cette décomposition anticipée qui fait vivre la sculpture.

    « Le hasard est accepté et l'indétermination prise en compte, puisqu'une nouvelle mise en place entraînera une autre configuration. (...) Cela fait partie du refus de continuer à esthétiser la forme d'une oeuvre en concevant cette forme comme une fin prescrite.38 »

    Dégénérescence des formes, germination souhaitée ou accidentelle, dégradation des surfaces, le temps qui supporte ces évolutions devient un acteur de premier plan. Car dans la lignée des sculptures de glace d'Andy Goldsworthy ou d'Allan Kaprow, les oeuvres de Michel Blazy adoptent une temporalité qui correspond à la durée d'existence propre aux médiums employés. Grâce aux techniques qui permettent de le documenter, les oeuvres de Michel Blazy offre ainsi la vision d'un processus en acte. Et en usant de la décomposition organique, l'éphémère se saisit du médium lui-même, dans un déplacement interne aux surfaces.

    Dans l'exposition Post Patman39, Michel Blazy modifie et nourri régulièrement les oeuvres, intervenant ainsi dans le processus même de l'exposition. La purée de carotte qui habille les murs du Palais de Tokyo pour l'exposition M, Nouvelle du monde renversé40 se dessèche, pèle puis pourrit. Avec sa pièce, Mur qui pèle, Blazy calque sur un mur de la farine qui au contact de l'eau se corrompt, éclot par éclat, fait décrépir l'institution. Aussi, les vidéos qu'il présente en 2004 partent à la découverte d'un monde ignoré, celui de la dégradation, du pourrissement comme phénomène créatif. Dans Voyage au centre, une caméra observe pendant plusieurs semaines les transformations de végétaux sous l'action de l'oxydation de l'air et divers liquide. En accéléré, ce processus fait hésiter le spectateur entre l'attirance pour un univers de forme inconnue et le dégoût par la connaissance anticipée d'une fin inévitable. Car

    38 Robert Morris, « Anti-Form » in Artforum, avril 1968

    39 Fig. #9

    40 Fig. #10

    23

    implicitement, le spectateur est invité à attendre l'événement qui sera la décomposition totale de l'oeuvre. Événement à venir mais dont le temps d'attente n'est pas précisé, le spectateur est invité à vivre le temps en conscience, donc à se le représenter. En exhibant les processus de dégradation, Michel Blazy met ainsi en acte l'éphémère, désignant le temps et la mort sans plus de distance métaphorique. Cette mise en forme du processus lui permet d'ailleurs de jouer sur deux registres, celui, esthétique de la métamorphose, de la transsubstantiation continuelle, celui philosophique de l'existentiel. Et par l'éloge de la fragilité, le caractère éphémère de l'oeuvre agit comme un révélateur de l'impermanence des choses terrestres. L'art rompt avec sa tentation d'éternité, pour redevenir ce qu'il lui a permis d'être, la violente conscience d'entrevoir le vide sur ce qui le remplit. En reconnaissant le friable et le temporel, les oeuvres de Michel Blazy délivre ainsi l'homme du secret de sa peur, la mort, en mettant à l'honneur l'impermanence.

    Intitulé Monument en sucre (2007), l'exposition du duo d'artiste Lonnie van Brummelen & Siebren de Haan jouait aussi sur le registre de la décomposition organique. Des blocs de sucres imposants étaient symétriquement alignés dans l'espace d'exposition des modules. Comme pour Michel Blazy, le pouvoir de fascination de cette installation résidait dans cette disparition d'abord annoncée. Rappelant Le plus gros savon du monde de Fabrice Hyber, un savon de 27 tonnes laissé pèle mêle sur la plage de manière à ce que sa matérialité soit amenée à fluctuer en fonction des aléas de la météo, l'exposition Monuments en sucre frappait par cette fragilité. D'une constance brève, la friabilité du sucre donnait aux sculptures l'aura de l'éphémère.

    I.2.b À La destruction de l'oeuvre

    Au contact de Robert Rauschenberg lors de son voyage au Etats-unis, Jean Tinguely va avoir l'idée d'une « machine autodestructrice41 ». Hommage à New-York en est la grandiose réalisation. Comme les machines de Tinguely, les travaux ici présentés

    41 Pontus Hulten, Tinguely, Centre George Pompidou, 1988

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    sont autant d'exemple du process art, autant d'oeuvres évolutives qui mettent en avant « le processus de déréalisation et ses évolutions possibles dans le temps.42 »

    Le Palais de Tokyo va en effet présenter des machines aux comportements incongrus, comme celles du duo d'artiste Florian Pugnaire & David Raffini. Leurs deux expositions, Expanded Crash43 et In Fine étaient pour l'institution l'occasion d'affirmer l'art en temps que processus de transformation, de porter l'anéantissement comme élément constitutif de l'oeuvre. Ces deux travaux étaient respectivement engagés dans une destruction progressive, destruction qui constituait du même coup le motif esthétique et l'unique finalité. Le duo d'artiste installait en elles-mêmes l'inéluctable déroulement du processus destructeur qui allait les mener à leurs pertes. Dans un état de changement continu, ces oeuvres retournaient l'usage de la technologie, car pour permettre aux machines de s'autodétruire il avait précisément fallu le savoir technologique qui leur avait permis d'être construites.

    « Au modernisme qui dissimulait le chaos à l'intérieur de l'art, il convient d'opposer un art qui fait du chaos sa matière et son ordre.44 »

    À l'occasion d'une exposition dans l'espace des modules en mars 2009, Florian Pugnaire & David Raffini présentait Expanded Crash, une voiture 2cv dont la matière était amenée à se contracter progressivement. Transformation irréversible actionnée par un mécanisme interne à la machine, la tôle se déformait, se compressait au fur et à mesure de la durée de l'exposition. Pour In Fine, le duo d'artiste installait une tractopelle dans les espaces inférieurs du Palais du Tokyo À la friche À En quatre phases opératoires, l'engin se repliait progressivement sur lui-même, causant à la dernière étape, sa propre destruction. Ne restait ainsi à la fin de l'exposition que le « cadavre » de ce tractopelle, un tas de bouts de ferraille imposant qui s'était servi de sa force pour se mutiler. Dans un chapitre du Nouveau réalisme, « Quand la machine devient démiurge », Pierre Restany commente les travaux de Jean Tinguely en parlant de « modalité dynamique d'appropriation et de présentation. » Les oeuvres de

    42 Mathilde Ferrer (dir.), « Process Art » in Groupes, mouvements, tendances de l'art contemporain depuis 1945, ENSB, 2001

    43 Fig. #12

    44 Christine Buci-Glucksmann, L'OEil cartographique de l'art, Galilée, 1996

    25

    Florian Pugnaire & David Raffini usent aussi de la sculpture comme un événement, comme un processus mouvant. L'oeuvre tente de libérer l'art de sa dimension matérielle en s'auto détruisant, s'accordant pour se faire une vie propre, se rendant éphémère. Cet instinct destructeur est d'ailleurs le garant négatif mais fondamental de la qualité esthétique de l'oeuvre. C'est ainsi qu'elle se libère de son rôle de monument, de son fétichisme paralysant. En donnant une existence autonome à l'objet, le spectateur peut percevoir le destin propre de l'oeuvre qui l'amènera après l'usure, à son anéantissement.

    En parallèle de cette exposition, peut être rapproché le travail de Jean-Marie Blanchet, Adhésif sur mur45. Son oeuvre vidéo montre une grille noire se décoller jusqu'à laisser l'écran complètement vide. Lentement, la composition picturale s'annule, signifiant symboliquement l'impossible adhérence du médium, un adhésif noir, sur le support. Comme rentrées en jeu avec les nerfs des spectateurs, ces oeuvres suggéraient chacune à leur manière l'inéluctable de notre condition dont le devenir est avant tout un compte à rebours, une disparition annoncée auquel personne ne sait s'astreindre.

    Dans la même logique de destruction sculpturale mais usant d'autre procédé, peut être rapproché la performance proposée par Laurent Moriceau, Killing me Softly46, qui prit place en 2003 dans une des alcôves du Palais de Tokyo. En usant d'un moule à échelle un, l'artiste faisait une sculpture de chocolat de son propre corps. Posée sur une table au milieu d'une foule mise en appétit, des marteaux étaient mis à disposition afin que chacun dans le public puisse briser cette sculpture pour venir y récolter un morceau de cacao. Expérience collective de la destruction d'une oeuvre, la disparition de celle ci était l'objectif et le motif esthétique du processus, éphémère de par nature. Ecrasé sous la multitude qui le martèle de coup, l'oeuvre disparut vite. Et en allégorie de cette destruction sculpturale, ce spectacle rappelait aux regardants la lente destruction qui abîme aussi leurs corps. Être de finitudes voués à ne pouvoir durer, corps monuments égarés dans l'éternité du temps dont les vies prennent tout au mieux le rang de brèves gesticulations rythmiques, la performance de Laurent Moriceau était une belle métaphore de l'impermanence du temps. Et si le spectateur

    45 Fig. #11

    46 Fig. #13 - #14

    26

    amusé pouvait au premier abord user de ses forces pour détruire cette sculpture de chocolat, la culpabilité le ramenait sur le chemin de son retour à sa propre condition d'être mortel.

    D'autres installations encore mettaient en scène la destruction, usant d'illusions pour susciter l'impression de chaos. Déjà présenté par Jérôme Sans lors de l'exposition Hardcore, vers un nouvel activisme, Marc-Olivier Wahler réexposait à l'occasion du programme hors les murs à Fontainebleau le travail de l'artiste danois Henrik Plenge Jacobsen. Un filet de fumée opaque prenait par intermittence forme au-dessus de l'entrée du château. Rappelant le désastre, la catastrophe, sa pièce Smoke dissimulait le portique d'entrée en laissant une machine à fumée distiller ses vapeurs à l'imitation de cendre. Instiguant le doute et interpellant le spectateur, la fumée rendait caustique la pierre du château cinq fois centenaire. Et si ici le processus de destruction n'était que suggéré, comme par un tour de prestidigitateur, Smoke répondait aux mêmes ambitions que les pièces précédemment évoquées : susciter le doute sur l'immutabilité de la matière, montrer en esthétisant la décrépitude, l'impermanence du temps et les possibles bouleversements à venir.

    I.2.c À L'emballement mécanique : le hasard et l'aléatoire

    En pleine première guerre mondiale, les dadaïstes prennent soudain conscience que la rationalité, sous le couvert d'apporter des réponses à même de faire évoluer la société, n'a pu au final apporter que guerres et désespoir. Réinsuffler du hasard et de la spontanéité dans les interstices de la société, tels étaient leurs ambitions, étant sûr que le naturel de l'être serait plus à même d'engendrer la paix, le bonheur et la sérénité. À notre époque, la critique de la raison se déplace de l'humain aux machines, les gages d'infaillibilités offertes par cette dernière étant remis en cause par les artistes contemporains. Alors que ces machines sont censées offrir la stabilité industrielle à même de soulager les efforts de l'humanité, les oeuvres présentées ici critiquent cette posture. En y insérant de l'imprévisibilité, il retourne la technologie en y dévoilant intrinsèque à la machine, son irrationalité.

    27

    Présenté lors de la session Superdome et pour l'exposition hors les murs à Fontainebleau, le travail d'Arcangelo Sassolino, se concentre sur les procédés techniques et utilise le plus souvent des matériaux industriels. Sa série la plus célèbre, Rimozione, est une plaque de béton simplement scalpé du sol, en lévitation au-dessus du trou béat laissé par cette incision. Ses créations montrent simultanément l'accomplissement humain et technologique, mettant en même temps à nu leur potentiel de destruction. Pour la session Superdome l'artiste présentait Afasia 1, une installation qui explore les comportements mécaniques d'une machinerie robuste. Grâce à de l'azote comprimé, un lanceur propulsait des bouteilles de verres à plus de 600 Km/heure. Le canon chargé plaçait le visiteur dans une attente angoissante. Sans décompte affiché, rien ne préciser le moment de la détente, si fugace, que seul le bruit lourd dégagé permettait de certifier que le tir avait bien eu lieu. En face du canon, un écran de métal servait de bouclier tandis qu'à ses pieds, des résidus de bouteilles vides formaient un tapis de verre, tapis devenu montagne au moment du démontage. À Fontainebleau, Arcangelo Sassolino présentait Sans titre47 un mécanisme destructeur doté de détecteur de mouvement qui rompait en deux des bûches de bois. En mettant au jour un processus de destruction, ces deux oeuvres semblent vouloir affirmer un profond pessimisme face à la capacité fonctionnelle des machines. Evolutives et destructrices, elles incorporaient dans leur structure, les fluctuations qui disent impermanence au temps.

    Présenté lors de l'exposition d'ouverture du mandat de Marc-Olivier Wahler, le travail de Kris Vleeschouwer, Glassworks II se présentait sous la forme d'une étagère de métal sur laquelle reposait dans un précaire équilibre, des dizaines de bouteilles de verre. S'activant par intermittences non programmées, un moteur venait ébranler la structure et faisait tomber dans un fracas sonore les bouteilles qui reposaient en son bord. Du fait de son déclenchement aléatoire, cette proposition insérait une dimension temporelle qui fait penser à l'installation de Jean Tinguely aux grands magasins Victor Loeb de Berne. Intitulé Rotozaza III, cette machine longue de huit mètres détruisait douze mille assiettes en quelques jours. Ces deux travaux offrent à voir le processus artistique incontrôlable. Des mutations entre l'idée originale et sa transmission sur le médium peuvent en effet faire penser à une automatisation forcée

    47 Fig. #15

    28

    que l'artiste ne pourra jamais entièrement contrôler. Insérer ces processus dans le temps de l'oeuvre est gage d'authenticité, car rendant compte de cet aspect insaisissable, elles en permettent la lecture.

    Définissant lui-même ses oeuvres comme autant d' « Actions Sculpturales », Roman Signer a été exposé cinq fois au Palais de Tokyo.48 Pour l'exposition Une seconde, une année, l'artiste installait une valise close au milieu des espaces de l'institution. Et si de l'extérieur rien ne transparaît, un feu de détresse en attente d'animation somnolait à l'intérieur. Lorsqu'il s'activa, la valise s'ouvrit, annulant ainsi l'oeuvre qui apparaissait dès lors comme le vestige d'un processus passé. Ouverte et grillée, la valise avait muté. On retrouve aussi ces continuités brusquement rompues dans d'autres travaux de Roman Signer. En 2009, à l'occasion d'une exposition personnelle au sein de la session Gakona, l'artiste suisse présentait Tables, une sculpture temps qui s'activait de manière fugitive. Dansant en suspension au gré d'une poussée d'air irrégulière, ce travail reprenait à son compte l'impermanence du temps. Comme pour Valise, il n'y a dans ses oeuvres rien qui ne tient vraiment mais c'est précisément dans ce vide que tout se joue.

    Marquées par la notion d'activation, ces installations semblaient en berne. Subitement en mouvement, elles annulaient l'instant d'après leurs présences. C'est en activant des processus que les travaux d'Arcangelo Sassolino, de Kris Vleeschouwer et de Roman Signer rejoignent la notion d'impermanence. Non statique, une essence ambulatoire les fait s'actionner, dans une temporalité brève, furtive comme fugitive. Comme la Lampe annuelle d'Alighiero Boetti49, présentée éteinte mais programmée par l'artiste italien pour ne s'allumer qu'une fois l'an, de surcroît très brièvement, ces oeuvres exacerbent l'attente du spectateur, l'oblige à supporter une dilatation du temps. Utilisant le suspense et filtrant avec la frustration ces oeuvres se construisent selon des systèmes aléatoires et fonctionnent de manières imprévisibles. Jouant de continuité et de ruptures rythmiques, elles mètrent

    48 En 2006 : présentation de Valise au sein de l'exposition Une seconde, une année

    En 2009 : exposition personnelle de Roman Signer au sein de la session Gakona, ainsi qu'une projection de ses vidéos.

    En 2010 : une vidéo, Helikopter auf Brett au sein de l'exposition Fresh Hell

    49 OEuvre présentée lors de l'exposition, Une seconde, une année, 2006

    29

    le temps conformément à ce qu'il est une fois envisagé en termes de perception humaine : un flux, un intervalle, un rythme.

    I.3. La disparition sculpturale : de la fuite vers l'invisibilité

    Sonnant la fin du monumental puisque la simple présence sculptural n'est plus même supportée, les oeuvres présentées dans cette partie émanent principalement des cycles d'expositions de l'année 2009. Consacrant la « dissolution de l'apparence50 », vers un au-delà du visible, au derrière du tangible, le Palais de Tokyo expérimentait ici « des formes d'art qui échappent à toutes velléités d'interprétations figées.51 »

    I.3.a À Se soustraire du réel

    Du latin fugare, la racine étymologique du verbe fuir permet de faire un rapprochement sémantique avec l'idée de brièveté, d'impermanence. Est fugace ce qui dure peu, disparaît promptement. Des coupures temporelles se font ainsi jour, resituant ce flux et ses fractures. Largement présente dans l'exposition Chasing Napoleon, l'idée de fuite conglomérait les oeuvres présentées. En proposant des voies de sorties, cette exposition appelait le spectateur à sortir de sa condition. Créant l'illusion d'espaces annexes, ces installations agissaient comme en trompe l'oeil. Pris dans le trouble, le spectateur en venait à considérer l'espace palpable comme l'antichambre d'un parterre plus réel. Et Marc-Olivier Wahler de préciser :

    « [L'exposition] réunit des oeuvres agissant comme autant d'instructions pour se soustraire au regard et se réfugier dans les marges du visible.52 »

    Présenté au sein de cette exposition, également présente sous une de ces adaptations lors de la session The Third Mind, Drain53, installation minimale de

     
     

    2009

    50 Marc-Oliver Wahler, Palais /

    08,

    51 Marc-Oliver Wahler, Palais /

    09,

    2009

    52 Marc-Oliver Wahler, Palais /

    10,

    2009

    30

    l'artiste américain Robert Gober, activait ce genre de processus. Produisant à la main la réplique exacte de minuscules réservoirs d'éviers, l'artiste les mettait en place sur le mur de la travée principale. Si simples et si petits, ces apparents ready made entretenaient l'illusion d'un monde clandestin qui serait à conquérir derrière le mur. Se présentant comme une sortie de secours, la bonde créait chez le spectateur l'impression d'un espace autre, suscitant chez lui la tentation de se dérober du visible, de rentrer dans l'invisible. Drain jouait sur les motifs du passage, donc du fugitif et du transitoire.

    Dans un espace concomitant de l'exposition, l'artiste anglais Ryan Gander construisait une chambre noire. Dans une pièce plongée dans l'obscurité, il creusait un trou de souris au ras du sol. Laissant filtrer la lumière du jour, cette ouverture apparaissait comme un lien vers un monde extérieur. Car de cette fêlure du mur, se dégageait derrière la cloison un extérieur fleuri, un jardin clandestin. Intitulé Nathaniel Knows54, la pièce jouait sur les processus d'apparition et de disparition, extrapolant un récit au-delà de l'espace d'exposition. Elle laissait le visiteur inventer son histoire et résoudre l'énigme posée par l'artiste : que se cache t'il derrière ce mur qui confine les apparences ? En proposant des voies de sortie au réel, ces trappes interrogeaient dans des processus auto réfléchie la présence du spectateur dans ce qui semble dès lors, qu'une parodie du réel. Et toujours lors de la session Chasing Napoleon, deux « Jeudis » - événement hebdomadaire en lien avec la programmation À étaient proposé sur le thème de la disparition, de la fuite volontaire. Judicieusement nommé « Instructions pour disparaître », une séance de projection était consacré aux films expérimentaux interrogeant notre propre présence au monde. Un autre soir, Erik Bullot proposait une conférence intitulée « Éloge du camouflage ». Donnant à voir des stratégies de fuite, cette session était l'occasion de fournir des modes d'emplois, d'incitation à la soustraction du monde, à éliminer la permanence de sa présence.

    À la fois trompe l'oeil et réplique parfaite d'un trou, l'oeuvre que présentait Etienne Bossut dans le cadre de l'exposition au Château de Fontainebleau perturbait la perfection géométrique des jardins à la française. Creusé à même la pelouse, le

    53 Fig. #16

    54 Fig. #17

    31

    spectateur pouvait apercevoir l'idée d'une échappatoire, mais n'avait pas suffisamment de recul pour vérifier le subterfuge. Comme une entrée ou sortie inaboutie Jardinage réinterprétait les passages secrets des châteaux royaux. Une pelle accompagnait la mégarde, comme si des ouvriers étaient toujours attelés à creuser cette voie de sortie vers un autre monde. Proposant une issue, l'oeuvre reléguait la fable au rang de construction théorique pour insérer dans l'espace la possibilité de fuite. Connu pour ses sculptures de gaz, immatériels voire invisibles, l'artiste autrichien Werner Reiterer présentait également au Château de Fontainebleau Entrance to the Center of the World. Une entrée parallèle, une connexion utopique avec l'univers romanesque de Jules Verne, la pièce proposait une voie pour pénétrer au centre du monde. Une mise en chantier qui interrogeait la consistance du réel, cette pièce était aussi l'occasion de proposer l'illusion d'espace parallèle, rendant quasi contingent le normal qui est donné à voir. Proposant une narration, ces deux oeuvres utilisaient le récit en tant que rôle médiateur dans l'expérience de la temporalité.

    Présentée lors de l'exposition Cinq milliards d'années, la pièce de l'artiste français Vincent Lamouroux est une gigantesque sculpture en acier inoxydable qui traversait la verrière et les alcôves du Palais de Tokyo. Intitulé Scape55, jeu de mot entre le verbe s'enfuir, escape et l'espace space, la pièce ouvrait des brèches sur les fondations de l'institution, amputant des fragments de murs pour donner l'illusion d'espaces autres. Comme les rails d'un train fantôme qui emmènerait vers un ailleurs, cette installation in situ perturbait les points de référence du visiteur. La forme de l'installation, reflétant de manière sinueuse le symbole de l'infini, suscitait en réaction chez le regardant, le sentiment d'un espace clos où une temporalité figée régnerait. Malgré la taille imposante de l'installation, émanait de ce travail, une constante chez cet artiste, une fragilité, une relation au déséquilibre. Marqué par la mobilité, le regard glissait sur cette structure dynamique, évoquant la fluidité et la vitesse par le biais d'une installation fixe.

    Tous ces exemples d'espaces annexes peuvent être rapprochés de ce que Michel Foucault nomme hétérotopie. Pour le philosophe, cette notion correspond à un

    55 Fig. #18, Fig #48

    32

    espace autre, à un contre emplacement qui conteste tous les autres lieux du monde, les efface, les compense, les neutralise. Dans ces lieux parallèles suscités par les artistes précédemment cités s'inscrit toujours un devenir incertain, rejoignant en cela l'idée d'impermanence.

    I.3.b À Sculptures invisibles

    La dématérialisation de l'oeuvre d'art est un enjeu fondamental du )()(e siècle : on fait disparaître toutes les marques de « grand art56 », à commencer par le monument. Carré blanc sur fond blanc de Kasimir Malevich est une tentative pour révéler le rien, le vide, la sensation pure. Marcel Duchamp développe au milieu des années 1930 le concept esthétique de l'infra-mince qui caractérise une différence infime entre deux choses, une distance qui ne peut tout à fait être perçu, seulement imaginée. Lié à la notion de temps, l'infra-mince ouvre la voie à l'imperceptible. Trente ans plus tard, la fameuse exposition d'Yves Klein à la galerie Iris Clert exprime ce propos. Sur le carton d'invitation de l'exposition Pierre Restany peut écrire : « voici l'avènement lucide et positif d'un certain règne du sensible (...) une émotion extatique immédiatement communicable.57 » Dans sa conférence donnée en Sorbonne en juin 1959, « L'évolution vers l'immatériel », l'artiste construit les prémisses d'une architecture de l'air. Enfin en 1962, il réalise une « Vente cession d'une zone de sensibilité picturale immatérielle ». En d'autres termes il vend du vide, du spirituel, une simple croyance. La programmation du Palais de Tokyo a repris ces problématiques pour proposer lors de ses expositions, l'aboutissement contemporain de ces recherches.

    Lors de l'exposition Chasing Napoleon dont la thématique était la disparition du visible, l'artiste américain Tom Friedman présentait Untitled (A Curse)58. L'oeuvre ne donnait à voir qu'un socle solitaire, un piédestal qui soutenait le vide. Comme un objet sensible, l'artiste s'était adjoint les services d'une sorcière qui y avait jeté un sort. Prenant sa hauteur sur 28 cm, ce sort avait la largeur exacte du socle.

    56 Anne Cauquelin, « L'art dématérialisé » in Fréquenter les incorporels, PUF, 2006

    57 Pierre Restany, Le nouveau réalisme, Decitre, 1960

    58 Fig. #51

    33

    Confronté à une oeuvre qui n'offre rien à voir, le spectateur était contraint de dépasser les limites communément admises de la représentation. Non physiquement observable, l'oeuvre se basait sur la capacité du spectateur à croire au tour ésotérique.59 La dématérialisation de l'objet qui se concrétise dans l'invisible donne accès à l'univers de la sensibilité pure. Car invisible ne signifie pas nécessairement l'absence de présence. Les capacités de réception des sens étant limitées, certaines formes peuvent échapper à l'humain mais exister entièrement par ailleurs. C'est sur cette idée qui reposait l'oeuvre de l'artiste suédois Dave Allen, également présentée lors de Chasing Napoleon. For the Dogs. Satie's «Véritables Préludes Flasques (pour un chien)» 1912, rendered at tone frequencies above 18 kHz, son titre, montrait une chaîne Hi Fi qui ne provoquait en apparence aucun bruit. Jouant un morceau d'Eric Satie, le son restait cependant audible pour les chiens. Rappelant les morceaux silence de John Cage, seuls les signaux visibles sur l'écran de l'appareil hi fi permettaient de témoigner de la présence d'un son, même si celui-ci échappait précisément à notre perception. Ici l'important n'était pas le plein mais le vide, le son mais le silence, la présence mais l'absence. Donnant à voir l'imperceptible, cette oeuvre réussissait à rendre sensible l'invisible en montrant les liens que celui-ci entretient avec les modalités de l'intelligible.

    Les sens mentent donc sur la réelle nature de l'apparence. Intéressé par cette idée, le Palais de Tokyo donnait dès 2006 - avec l'exposition d'ouverture du mandat de Marc-Olivier Wahler, Cinq milliards d'années - à voir des oeuvres inspirés par cet état de fait. Proposant un espace révélateur d'invisible, l'installation de Christian Andersson jouait sur les apparences. Blind Spot60 fonctionnait comme un « piège à perception61 » : Un projecteur de lumière illuminait d'un cercle le mur qui lui faisait face. Le spectateur qui venait à se placer devant ce rayon lumineux avait la surprise de constater que son ombre n'apparaissait pas sur le cercle de lumière. Lui donnant l'impression subite d'être fait d'une matière translucide, comme un cache-cache avec son propre corps l'installation faisait disparaître sa présence, conduisait le visiteur à reconsidérer sa propre existence.

    59 Thomas Huff, Daily Impermanence, Visiting with the Conceptual Artist Tom Friedman, ArtsEditor, 2003

    60 Fig. #17

    61 Cinq milliards d'années, Dossier de presse, 2006

    « Dans l'esthétique de la disparition, les choses sont d'autant plus présentes qu'elles nous échappent.62 »

    Dans la même exposition, Marc-Olivier Wahler continuait d'explorer l'idée de disparition en y insérant une pièce de Ceal Floyer. Jouant sur le processus de transition du focus à l'out of focus, de l'apparition à l'évanescence, Autofocus est aussi un projecteur de lumière, qui se réglait puis se déréglait de manière aléatoire dans la travée centrale du Palais de Tokyo. L'image du spectateur passait d'une qualité nette à un flou total, intrigant par intermittente saccadée, les lois du voir. Et si le monumentale peut être conçu comme une structure fixe, incarnant pour l'éternité une figure forte, exaltante, ces deux installations répondaient d'objectifs inverses. Elles menaient au doute de la présence, interrogant par les rapports d'ombres et de lumières qu'elles instauraient l'ancrage de l'homme sur cette Terre. En cela, elles visaient plus à instaurer le doute, la relativité, développant des discours à l'opposé des figures d'autorité, de la sculpture comme monument.

    34

    62 Paul Virilio, Esthétique de la disparition, Galilée, 1989

    35

    II. Le temps manipulé ou comment rendre compte de son instabilité

    Tentant de restituer les dynamiques inhérentes aux fluctuations du vivant, les oeuvres présentées ici racontent le chancellement du monde, l'inconstance de la réalité. Pour se rendre intelligibles, elles appuient leurs rhétoriques sur la durée, qu'elles incarnent ou qu'elles représentent. Pour ces oeuvres, faire du temps et de son impermanence un objet d'art en marche fonctionne comme une obsession : incorporer la sensation du temps, la vivre, la communiquer au spectateur. Mais comment signifier ce flux ininterrompu de la temporalité ? Alors que dans le chapitre précédent, les artistes parvenaient à incorporer dans l'objet, le flux inhérent à la marche du temps, le corpus ici présenté montre des oeuvres à la matérialité statique, mais qui parvienne dans leur contenu, à signifier un déplacement temporel. Mettant en place des environnements dans lesquels le spectateur peut pénétrer, certains artistes usent de ce relatif isolement pour lui faire passer la succession de momentanée. (chap.1) Résurgence de la peinture classique, des artistes utilisent le thème de la vanité, dont ils sculptent les motifs. Posées dans l'espace, ces pièces rendent compte de la fuite inéluctable du temps. (chap.2) Et si la fin est certaine, certains travaux entrevoient la mort pour ce qu'elle invalide, la vie entière. (chap.3)

    II.1 Des fluctuations de la pensée

    II.1.a - La décomposition du mouvement et la culture cinématographique

    À la fin du XIXe siècle, les avancées techniques de la photographie permettent la restitution objective du mouvement, notamment par les chronophotographies d'Etienne Jules Marey. En shootant rapprochées, des actions en train d'être réalisées, son fusil photographique permet à l'image d'émaner saccadé, les différentes phases constituantes de son mouvement. Le présentant sous les différents aspects qui forme son unité vagabonde, il restituait quasi scientifiquement le migratoire. Exposée à l'occasion de l'exposition collective Dynasty, l'oeuvre de Bettina Samson rappelle cette conquête scientifique du visible. Avec Warren, 1/4 de

    36

    seconde en Cinémascope63, l'artiste présentait sept bustes alignés sur une rampe. Rappelant les photogrammes d'une scène de film, elle présentait décomposé, un mouvement qui rappelait du même coup, l'idée d'une action furtive.

    La chronophotographie influence la peinture du XIXe siècle. Mais alors que la photographie reste emprunte d'un certain académisme, notamment dans la composition, les peintres redoublent de stratagème pour tenter de représenter le mouvement que la machine a rendu perceptible. C'est la raison d'être de l'impressionnisme. Synthétisant cette représentation du fugitif, les mouvements d'avant-gardes du début du XXe siècle incorporeront ensuite dans leurs travaux, le cinéma naissant. En tant que nouveau langage, le cinéma offre à la modernité la capacité d'enregistrer le mouvement. La première oeuvre d'art qui en tire les conséquences, c'est la Roue de bicyclette de Marcel Duchamp, « la première oeuvre cinématographique en son principe64 », c'est à dire la première qui, sans en imiter les formes, tire parti de ce nouveau langage. En faisant tourner la roue posée sur un tabouret, le spectateur instaure, par le biais de la réalité elle-même, le mouvement. La culture cinématographique ouvre ainsi la voie à une approche processuelle du déplacement dans l'art. Et l'influence de l'art cinématographique sur l'art contemporain reste aujourd'hui un point capital. Les oeuvres présentées dans cette partie ont en effet toutes en commun d'exprimer leur contenu dans le temps. Présentée pour l'exposition Une seconde, une année, l'oeuvre de Zilvinas Kempinas est un ensemble de ventilateur qui propulse en apesanteur le négatif d'un film. Intitulé Flying Tape,65 cette bande magnétique de plusieurs mètres flottent dans les airs, ses ondoiements comme autant d'actes furtifs qui dansent sur le vide. Chacune de ses oscillations rappelle le « matérialisme aérien » dont parlait Gaston Bachelard, la restitution du mouvement, de ces chutes et de ces hauts, en étant une partie prenante.

    63 Fig. #19

    64 Nicolas Bourriaud, Formes de vie, Denoël, 1999

    65 Fig. #20

    37

    II.1.b - Mécanismes cérébraux dévoilés

    L'être est constitué par des flux incessants de processus physiques et mentaux qui changent continuellement. Toutes les choses sont transitoires, il n'existe aucune entité stable, d'édifice mental durable. Comment rendre plastiquement compte de ces flots d'états d'âmes, de l'impermanence des fluctuations qui nous constitue ? La réalisation à partir des années 1960 d'« environnements66 », des sculptures tridimensionnelles où le spectateur peut entrer, est l'occasion pour les artistes de mettre au jour des oeuvres qui proposent des atmosphères. L'inscription de ces environnements dans un volume important leur permet de susciter plus que de ne signifier, de rester ouvert à une multitude d'interactions et d'interprétations possible. Le premier directorat du Palais de Tokyo67 a proposé quatre installations qui proposaient chacune à leurs façons une cartographie instable et évolutive du mentale de l'être. Ses oeuvres avaient toutes en commun de ne pas essayer de toucher à la perfection, mais de rendre intelligible les fluctuations de la pensée.

    Les oeuvres de Rebecca Horn sont marquées par la culture cinématographique que nous évoquions précédemment. Son oeuvre est en effet fortement marquée par l'idée de processus, la plupart de ces pièces étant des machines à actionner :

    « Mes travaux ont plus à voir avec la littérature et le cinéma qu'avec les autres arts, plus avec des séquences d'images et de mouvements qu'avec la peinture.68 »

    Rebecca Horn installait en 2003 dans l'espace d'une des alcôves du Palais de Tokyo une installation gigantesque, Lumière en prison dans le ventre de la baleine.69 Cloisonné depuis l'extérieur, le spectateur qui venait à y rentrer découvrait une pièce sombre. En son centre, il pouvait voir à une trentaine de centimètres du sol Pendulum with Black Bath (Pendule avec bain noir), une cuve en aluminium contenant de l'eau noire. Accrochée au plafond, une perche électrique oscillait dans

    66 Le premier à utiliser cette expression est Edward Kienholz

    67 Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans, 2002-2006

    68 Entretien de Germano Celant avec Rebecca Horn, in Rebecca Horn, publié à l'occasion de l'exposition Rebecca Horn, musée de Grenoble, 1995

    69 Fig. #21

    38

    le liquide, laissant la trace d'un cercle, la représentation d'une pendule à son extrémité. Sur les murs, des projecteurs vidéos faisaient danser des extraits de poèmes de Jacques Roubaud, tel que « éphémère, sans épaisseur mais sphérique70 », ainsi que d'autres poèmes, écrits par l'artiste elle-même. Entre ces halos lumineux d'encre nocturne et le bac de résine au sol survenait un champ de tension dont les visiteurs devenaient l'axe mouvant. Ils accomplissaient ainsi une ronde, danse qui a de tout temps symbolisé le renouveau. En tournant la tête vers les auréoles, un mouvement d'ellipse recréait l'instabilité de la marche de la pensée, mesurée par le pendulier.

    Pour son exposition personnelle au Palais de Tokyo, Exposition universelle 1, Jota Castro présentait Brains71 (2005). L'artiste assemblait bout à bout des tourniquets, similaires à ceux du métro, auxquels avait été adjoint, comme une cage de sécurité, un enclos de barreaux où le spectateur allait prisonnier. Une fois inséré, il devait enclencher ses portes pour se permettre d'avancer. L'installation mettait dans le monde sensible les formes d'allégorie des processus du raisonnement. Comme une idée, chaque sas permettait d'accéder à un autre, mais la progression se faisant, empêcher de retourner au point de départ. L'artiste tentait ici de faire un parallèle avec les processus de la pensée, bâtissait l'oeuvre sur les étapes de la créativité. Symbolisant « toutes les limites, frontières et obstacles qu'il faut dépasser pour créer » l'installation souhaitait être « la métaphore du cerveau au cours d'une psychanalyse.72 »

    La perpétuelle transformation de la marche de la pensée trouve aussi dans l'installation d'Arthur Barrio un honnête écho. En 2005, à l'occasion de l'année du Brésil en France, le Palais de Tokyo présentait le travail de cet artiste brésilien. Intitulé Réflexion...(s)...73 l'exposition prenait place dans l'espace d'une alcôve. Coupé de l'extérieur par un rideau noir opaque, le spectateur devait franchir ce perron pour littéralement rentrer dans l'installation. Calfeutré, l'espace d'exposition émanait sombre, une atmosphère de chaos. Jamais en pleine lumière, l'artiste avait

    70 Rebecca Horn : Lumière en prison dans le ventre de la baleine, Hatje Cantz, 2003

    71 Fig. #22

    72 Jota Castro, Catalogue publié à l'occasion de l'exposition Exposition universelle 1, Palais de Tokyo, Paris Musée, 2005

    73 Fig. #23

    39

    aménagé une pénombre ponctuée de sources lumineuses, une manière pour lui d'inciter à une concentration de la perception, de rendre perceptible « la réalité dans sa totalité74 ». L'artiste disposait dans l'espace des matériaux pauvres, éphémères et précaires, issus de la vie quotidienne : des déchets, des rebuts, ainsi que des matériaux organiques comme le pain, le café, le sang et de la laque des Indes. Un vieux sofa éreinté rythmait aussi l'espace. En désordre, ces éléments jonchaient le sol qui apparaissait dès lors comme abandonné. Envisageant l'art comme un processus dynamique, Arthur Barrio récuse en effet « le sens d'objet fini, statique et immuable de l'oeuvre d'art pour l'envisager comme action.75 » Son refus de l'oeuvre d'art comme matérialité fixe profite en ce sens à la mise en place d'ambiance en lien direct et immédiat avec la vie. La durée de l'installation était ainsi calquée de l'ordre de la durée du vivant, de ses différents états jusqu'à l'abandon, la disparition, puisque rien n'est récupérable. L'esthétique de non-forme de « Réflexion...(s)... » usait donc du perpétuel développement. Évolutive, l'oeuvre incorporait les flux de vie, rompait le calme du matériel monolithique stable. Il concrétisait en cela son ambition, « réveiller le sensoriel de son sommeil rationnel.76 » Détournant l'art de la domination de l'image, son installation amenait le spectateur vers le royaume de l'expérience. Et ce désordre suscitait chez lui le vacillement de ces perceptions.

    « C'est une immense jouissance que d'élire domicile dans le nombre, dans l'ondoyant, dans le mouvement, dans le fugitif et l'infini.77 »

    Instabilité des formes du monde, l'installation d'Arthur Barrio disait tout le monde en état de chancellement, la réalité en état d'inconstance, la relativité de toute permanence. L'impression de chaos qui en ressortait était la tentative d'exprimer cette finitude qui serait non une fin mais une impossibilité de conclure, l'inachèvement laissant ouvert le champ de l'interprétation. Souhaitant « éviter toute pensée architecturale78 », Arthur Barrio restituait au Palais de Tokyo le momentané. Comme les idées qui se développent jusqu'à l'épuisement de leurs propres logiques et dynamiques, son installation avait aussi un caractère indéterminé, imprévisible et

    74 Cité dans Ligia Canongia , " Barrio Dynamite ", Artur Barrio, Modo Ediçoes, 2002

    75 Léa Gauthier, Arthur Barrio, impropre à la consommation humaine, Frac Provence-Alpes-Côte d'Azur, 2005

    76 Joao Fernandes, Arthur Barrio : Records, Fundaçao de Serralves, 2000

    77 Charles Baudelaire, Curiosités esthétiques, 1868

    78 Léa Gauthier, Op. cit.

    40

    éphémère. En constante évolution et transformation, l'artiste construisait un univers peuplé de signes et de symboles qui rendait compte de la psyché, capturait le spectateur pour l'immerger dans une perception sensorielle, rendant ainsi compte des fluctuations de temps, de son impermanence. Marinetti exprime d'ailleurs bien cette incapacité à pouvoir explicitement rendre compte de l'expérience intérieure, en cela que la réalité envahit l'être de fragments déconnectés, de discordances embrouillées :

    « Dans la vie quotidienne, nous ne sommes en général confrontés qu'à des éclairs d'argumentation, rendus momentanés par notre expérience moderne (...) et qui restent dans nos esprits comme une symphonie fragmentaire et dynamique de gestes, de mots, de lumières et de sons.79 »

    Tenant d'un art qui fait du corps le centre de la production artistique, Arthur Barrio mettait en avant l'expérience sur l'image et l'objet. L'oeuvre se situait ainsi plus dans la réception, dans l'espace mental suscité que dans la disposition cacophonique de son installation.

    En 2003, Mathieu Briand créait un environnement80 dans l'espace d'une alcôve du Palais de Tokyo. Rendu hermétique par l'adjonction d'une porte étanche, le spectateur était invité à se déchausser avant d'y pénétrer. Guidé par une fréquence continue d'onde sonore, il pénétrait dans une atmosphère moite. Quatre tonnes de talc, déversées par l'artiste, constituait un sol fait de particules si fines que le tapis de poudre blanche devenait nuage au moindre pas. De plus, la pièce était plongée dans une atmosphère sombre, seulement éclairée par un laser vert qui offrait à dix centimètres du sol, une source de lumière vacillante. Un bassin d'eau salée rythmait l'espace en son centre, au fond duquel l'eau était si sombre que le spectateur pouvait croire nager dans le néant. Marchant pied nu sur ce sol instable, l'immersion dans cette plastique virtuelle donnait forme à un moment suspendu. Provoqué par les pas, le voile blanchâtre du talc redéfinissait les enveloppes corporelles et estompait les contours de l'espace, faisait voler en éclats l'illusion des contours

    79 Filippo Tommaso Marinetti, Le théâtre futuriste synthétique, 1915

    80 Fig. #24

    41

    définis de notre corps. Comme un ensemble d'atome qui s'assemblerait avant de se séparait, l'installation illustrait bien le principe cher à Merleau-Ponty de l'appartenance du corps à l'espace et de la notion de corps comme composant sensible de l'espace.81 Car l'artiste parvenait à mettre au point une unité éclectique fait d'images fugaces et de stabilité éphémère. Et utilisant l'image mouvante des projections pour représenter le fugitif, Mathieu Briand faisait un lien entre le tangible et l'insaisissable, le mental et les sens.

    Le titre de son exposition, Le Monde flottant, est d'ailleurs la traduction française du concept japonais d'ukiyo-e, littéralement le « royaume de l'éphémère ». À ce propos, l'éphémère À ou l'idée d'impermanence - est au coté des notions d'impersonnalité et d'insatisfaction, un concept central du bouddhisme. Cette religion considère en effet l'éphémère comme un aspect immuable de la réalité, parce que la vie est précisément bâtie sur « une concomitance de causes et d'états transitoires voués à disparaître en même temps que les effets produits.82 » Mettant l'accent sur « les mécanismes et les processus du changement83 », l'oeuvre instaurait un rapport ambivalent entre le sujet, le spectateur et l'environnement qu'il pénétrait entièrement. Sans direction univoque, l'installation s'articulait autour de la multiplicité des positions, semblait vouloir susciter le sentiment d'errance, montrait l'individu comme un être décomposé. Et le spectateur retrouvait bien dans l'installation du Palais de Tokyo tout le lexique de l'impermanence bouddhique, dans toute l'ampleur de son champ sémantique : glisser, échapper, voguer, inconstance. Intégrant la structure, le visiteur devait supporter la donnée temporelle qu'elle lui imposait. Induit intuitivement dans l'installation, le spectateur retrouvait la quatrième dimension de l'art, le temps. Provoquant chez lui des « images-flux84 », « ce temps non pulsé, ce temps flottant, ce temps libéré de la mesure régulière ou irrégulière85 ».

    81 Maurice Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception, Gallimard, 1990

    82 Nicoletta Celli, Le Bouddhisme, fondements, pratiques, civilisations, Hazan, 2007

    83 Isabelle Caparros & Fabienne Vernet, « Les atomes qui constituent la peinture ne sont pas rouges » in Mathieu Briand, Op. cit.

    84 Christine Buci-Glucksmann, Esthétique de l'éphémère, Galilée, 2003

    85 Gilles Deleuze, Conférence sur le temps, IRCAM, 1978

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    II.1.c À Le temps contrôlé

    Lors de la session Cellard Door (févr.-avr. 2008), l'ensemble des espaces d'expositions du Palais de Tokyo était confiés à l'artiste français Loris Gréaud. Il y incorporait une temporalité propre. De midi à quatorze heures, puis de vingt heures à minuit, l'exposition était éteinte, même si elle restait libre d'accès pour les visiteurs. L'éclairage était réduit au minimum, les vidéos étaient en bernes. L'exposition n'était réellement fonctionnelle que de quatorze à vingt heures. Allumée par un technicien, l'activation de l'exposition faisait partie du temps de la visite. À la cime d'une forêt d'arbre calcinés éparpillée sous la verrière, Loris Gréaud accrochait une sphère gigantesque, aux couleurs changeantes comme translucides. Intitulé Forêt de poudre à canon (bulle)86, cette pièce divisait cet espace d'exposition en une seconde temporalité, rythmant l'espace dans la durée. En fonction du moment où le spectateur la regardait, la sphère se dilatait jusqu'à sa disparition lumineuse, avant de commencer le cycle d'un nouveau départ. Dans l'obscurité, cette sphère était en perpétuelle fluctuation, métamorphosant l'endroit à chaque pas, de l'ombre à la lumière. Son cartel était lui-même présenté sur un petit pupitre qui s'allumait et s'éteignait en intermittence. Semblable à une respiration lente et tranquille, cet éclairage en mouvement obligeait le spectateur à patienter afin de pouvoir lire correctement les indications qu'il contenait. Ainsi l'exposition produisait « non pas un temps différent, mais des différentiels temporels modulables selon l'emploi qu'en fera le visiteur.87 » Elle rappelait en cela l'installation d'Olafur Eliasson à la Tate Moderne. En 2003, l'artiste danois présentait à Londres The Weather Project, une énorme forme sphérique qui rappelaient les variations du soleil, du jaune brûlant à l'orange crépusculaire. Ces deux installations rendaient compte des instabilités lumineuses, des variations perpétuelles qui agissent dans la nature.

    Visible uniquement de nuit, l'exposition de Tobias Rehberger, sous le premier directorat du Palais de Tokyo, adoptait aussi une temporalité propre. Intitulé Night Shift, elle ouvrait au coucher de soleil pour ensuite fermer à minuit. Normalement définie comme une entité stable, l'exposition adoptait une dynamique en calque sur l'écoulement du temps. Ces horaires d'ouverture spécifiques la liaient au cycle

    86 Fig. #25

    87 Marc-Olivier Wahler, « Interview avec Loris Gréaud » in Palais 05, 2008

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    naturel du jour et de la nuit. Les variations de lumière formaient ici aussi l'élément fondamental de cette exposition nocturne. Constamment changeantes, les installations, présentées sous l'espace de la verrière, étaient équipées de dispositifs phosphorescents qui proposaient une autre perception du temps et de l'espace. S'inspirant du crépuscule avec lequel s'ouvrait chaque jour l'exposition, les installations gagnaient en intensité lumineuse à mesure que la nuit se faisait plus sombre. Elles rendaient compte d'une forte oscillation perceptible, en usant de ce temps cinématographique que nous évoquions plus haut. Tobias Rehberger présentait aussi une vidéo représentant le ciel parisien et ces variations en accéléré. Filmée en point fixe depuis le parvis du Trocadéro, cette vidéo montrait le demi-cercle de la fuite infinie du soleil.

    II.2. Variation contemporaine sur le thème de la Vanité classique

    Les oeuvres présentées dans cette partie peuvent toutes être reliées, au moins dans leurs champs sémantiques, aux thématiques des vanités classiques. Le terme - vanité - vient du latin vanitas, littéralement l'« état de vide ». Ce thème apparaît dans la peinture occidentale au XVIIe siècle, en Flandre particulièrement. Liée historiquement avec la traduction et la divulgation en langues européennes des textes védiques, dont l'idée d'impermanence est l'une des idées clefs, la peinture des vanités offre généralement une méditation sur la mort et sur le caractère éphémère des biens terrestres. Et s'il revient à des objets statiques de signifier la fuite du temps, d'avertir de la fin inexorable, ces oeuvres proposent dans les énoncés qu'elles mettent en scène, des récits qui dévoilent son inéluctable déroulement.

    « Représenter l'inexorabilité du mouvement qui entraîne vers la mort par un procédé pictural qui joue essentiellement sur la mise en valeur de l'objet relève d'une gageure au sens où c'est l'accent porté sur la pérennité de l'objet que revient le rôle de témoigner de la fuite du temps et de la fugacité des choses.88 »

    88 Marie-Claude Lambotte, « La destinée en miroir » in Alain Tapié (dir.), Les Vanités dans la peinture au XVIIe siècle, Albin Michel, 1990

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    Si le temps du contenu reste statique, celui de l'énoncé est empreint d'un dynamisme instable, qui rejoint l'idée du temps et de son impermanence. Ces sculptures statiques offrent ainsi par leurs dynamismes réfléchis, une mobilité temporelle. Reprenant à leur compte l'adage latin du Memento mori À souvient toi que tu es mortel À ces oeuvres jouent le rôle d'un miroir. Le spectateur s'y reflète pour y découvrir la révélation de ce qui le définit, la mort et de la fuite du temps qui l'y acheminera. Marie-Claude Lambotte distingue d'ailleurs trois temps dans le processus de déplacement temporel suscité par la vanité, étapes qui « constituent intrinsèquement la psychologie du temps89 ». En montrant la fin de toute chose, la vanité incite le spectateur à considérer la fin de son existence. Cette prise de conscience l'amène tout d'abord dans un état de « suspension », un choc qui le laisse presque patois. Ensuite, par un phénomène d'« anticipation », la finitude de sa condition existentielle s'abat sur lui, prenant subitement en compte la périssabilité de son propre corps. Enfin, la vanité suscite par un processus de « rétroaction », la prise en compte de ce qui est déjà révolu, comme pour les ruines, de ce qui a déjà disparu. Et en se situant dans l'ordre de la présentation plutôt que de la représentation, l'art contemporain parvient à susciter des émotions encore plus directes. À la différence des peintures de vanité, qui usaient du signe pour se permettre de communiquer, la portée des vanités contemporaines présentées au Palais de Tokyo accable le spectateur, développe un discours en lien direct avec son pathos. Poignante, les oeuvres présentées ici sont autant de manifeste à la prise de considération de l'impermanence comme élément fondamental du vivre. Pour ce faire, elles adaptent en sculpture les motifs classiques du thème de la vanité : squelette pour signifier la fragilité des choses humaines, instrument de mesure du temps pour rendre compte de son inéluctable déroulement, fleurs pour la périssabilité des choses...

    II.2.a À Ossements, crânes et squelette

    Pour l'exposition de leur fin de mandat, Notre histoire..., Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans présentait vingt-neuf artistes « représentatifs » de la scène émergente

    89 Marie-Claude Lambotte, « Les vanités dans l'art contemporain, une introduction » in Anne-Marie Charbonneaux (dir.), Les vanités dans l'art contemporain, Flammarion, 2005

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    française. Dans l'espace de la verrière était installé le squelette monumental d'Adel Abdessemed. Intitulé Habibi90 (2004), l'oeuvre était squelette géant suspendu dans les airs, comme propulsé par le moteur d'avion à réaction qui lui faisait dos. Monumentale mais flottante, la sculpture « préparait à notre propre envol91 ». Face à ce squelette géant, le spectateur était partagé entre trouble et rire. Se développant sur 17 mètres, cette oeuvre était empreinte, pour reprendre la terminologie de Freud, d'une « inquiétante étrangeté ». S'inspirant du Schleletro de Gino De Dominicis, un squelette allongé de 22 mètres de long auquel était adjoint un nez en forme de bec d'oiseau, Habibi rappelait l'insignifiance de l'homme face à la mort. Par son gigantisme, l'oeuvre ramenait les fantasmes de puissance à leur nature infantile, les ravalaient au rang de farce. Ce qui était ici moqué, c'est l'homme et ses rêves de dépassement. Invitant à la modestie et la lucidité, l'oeuvre mettait au jour ce que tout le monde sait mais qui semble impalpable, la fin inévitable.

    Présenté dans l'exposition collective Dynasty - une exposition du mandat de Marc-Olivier Wahler qui avait aussi pour ambition de faire le point sur la scène émergente française À l'oeuvre de Laurent Le Deunff reprenait les allégories des vanités de la peinture classique. À l'opposé de l'extrême dimensionnalité du squelette d'Adel Abdessemed, Laurent Le Deunff présentait Crâne92 (2002). Posé à une cinquantaine de centimètres du sol sur un socle anormalement bas, ce qui accentuait sa petite taille, l'artiste montrait la sculpture réduite d'un crâne humain. Fait en pâte à modeler, l'artiste y avait adjoint une année de la production de ses propres ongles. Ces rognures accentuaient le côté morbide de l'oeuvre, comme si un malheureux avait gratté pour mettre à jour la substance friable qui le constitue. Mais l'aspect quelque peu repoussant de cette vanité trouve aussi une autre explication. Si elle succombe aux tentations esthétiques, la vanité se retourne contre elle-même. Pour inciter à la réflexion sur l'impermanence des choses, il importe donc que le spectateur ne se contente pas de l'observer, n'en jouisse pas comme d'un spectacle. Crâne répondait à ce retrait esthétique comme révélateur méditatif.

    90 Fig. #26

    91 Sven-Olov Wallenstein, « Vivre parmis les choses » in Notre Histoire, Paris Musées, 2006

    92 Fig. #27

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    Toujours sur le motif du crâne, deux pièces À présentées chacune dans l'un des deux directorats - peuvent être ici regroupé. Lorsqu'il était encore directeur du Swiss Institute de New-York, Marc-Olivier Wahler commandait à l'artiste français Bruno Peinado Vanity flight case93 (2005). En poste au Palais de Tokyo, le directeur représentait cette pièce au sein d'une exposition hors les murs en Argentine, intitulé Medio Dìa - Media Noche (2007). Comme les crânes qui ont rendu célèbre Damien Hirst, Vanity flight case était une tête humaine à laquelle était adjointe des morceaux de miroirs réfléchissants. Plongé dans l'obscurité, un flash de lumière venait éclairer ce crâne, comme une boule à facette. Le temps du plaisir, insinué par l'ustensile de la fête, était calqué sur celui de la dégradation. Par ce tour, Bruno Peinado moralisait l'anatomie, tant ce crâne semblait vouloir dire qu'il est si assommant de s'amuser lorsqu'on en ressent à aucun degré l'utilité. À cette pièce peut être accolé le travail de Nicolas Juillard, The Waiting Room94 (2005). Présentée lors de l'exposition de groupe de la session 2005 du Pavillon À la résidence artistique du Palais de Tokyo À la pièce prenait depuis l'extérieur la forme d'un réservoir industriel. Invité à y pénétrer, le spectateur était confronté à un crâne grandeur nature qui tournait presque en lévitation sur lui-même. En évoquant une sorte de purgatoire, le petit espace de cet austère silo d'acier insinuait plus directement des relations avec l'intime. Le crâne de Nicolas Juillard était aussi paré d'une mosaïque d'éclats de miroirs, comme celles qui sont sur les boules discos des boîtes de nuit. Naguère habitées par des yeux, les orbites du crâne accueillaient désormais des hauts parleurs diffusant une bande-son dérangeante comme irrévérencieuse. Ces samples étaient extraits de films pornographiques et de chansons rock. Intitulé The Waiting Room, l'installation invitait le spectateur à danser sur sa mort prochaine, mettant à jour les stratégies artificielle qui lui permette d'accepter sa peine. Les oscillations lumineuses provoquées par le crâne venaient lui rappelait la mort, comme à tous les autres danseurs qui tenteraient de l'oublier. Mais le dispositif n'était pas seulement morbide. Affichant le volage comme partie constituante de la vie, le dispositif affirmait l'existence comme belle car précaire, au sens où Nietzsche parle d'un « éphémère de l'impermanence acceptée.95 » L'installation invitait à affirmer l'éphémère comme entité constituante du vivant, comme processus nécessaire de la vie, tel le danseur

    93 Fig. #28

    94 Fig. #29

    95 Cité dans Christine Buci-Glucksmann, Op. cit.

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    de la fin de Zarathoustra. Dansant devant ce crâne, le spectateur prenait conscience de la fuite du temps, et accélérait de fait ses pas, dansait comme d'une intensité davantage puisqu'il venait d'apprendre qu'il était mortel.

    II.2.b À Des fleurs comme motif du temps

    Au côté des crânes et des squelettes, d'autres motifs prennent appui sur le modèle rhétorique de la vanité. Par le cycle qui les mène de la graine à la fanaison, les fleurs reconstituent la psychologie intrinsèque du temps. Comme symbole, la fleur montre la décrépitude à venir, interpelle le spectateur au plus sensible de son intime. En usant de la fleur comme médiation, deux expositions du Palais de Tokyo levaient le voile de l'illusion et présentaient, en un face à face entre l'oeuvre et son regardeur, la vérité de l'impermanence du temps.

    À l'échelle un, hyper réaliste, Yoshihiro Suda produit à la main des fleurs de vase, des camélias, des roses, des magnolias... Sous le premier directorat, l'artiste était invité à installer ses sculptures dans les recoins de l'institution96. Il choisissait des lieux spacieux, presque vides, pour placer ses fleurs à des endroits inattendus. Sans socle protecteur, sans cartels pour avertir de leur présence, les oeuvres étaient presque invisibles. Mais quoique minuscules, les sculptures de Yoshihiro Suda plaçaient l'espace sous tension. Comme pour révéler des fissures cachées, ses interventions délicates offraient aux spectateurs l'occasion de méditer sur « le cycle des saisons, c'est-à-dire sur le passage du temps, la vie, la mort.97 » L'insertion de ces fleurs montrait une nature infiltrant l'environnement urbain en tant que chose non désirée. Comme un bouton sur un visage, les fleurs perturbaient le glacis architectural de l'espace, venaient symboliquement entacher la perfection neutre des murs blancs du Palais de Tokyo. En célébrant la faille, elles proposaient un déplacement temporel qui faisait apparaître les espaces d'exposition, comme le vestige d'un passé révolu. Comme s'il voulait faire confidence de notre vulnérabilité, Yoshihiro Suda mettait à jour l'inévitable césure qui nous perdra tous.

    96 Fig. #30

    97 Akiko Miki, « Germination aléatoire » in Yoshihiro Suda, Palais de Tokyo, 2004

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    Intitulé Abandon98, l'exposition de l'artiste américain Tony Matelli prenait place dans les deux espaces des modules. L'artiste y insérait des mauvaises herbes en bronze sculptées à la main. Hyper réalistes, ces statuettes miniatures reproduisaient à la perfection ces plantes indésirables et envahissantes. Plus présent que dans le travail de Yoshihiro Suda, les mauvaises herbes de Tony Matelli avaient un aspect foncièrement engagé. Dans ces autres travaux, l'artiste américain critique avec virulence la société marchande et les gages d'éternité qu'elle se propose d'offrir. Dans Cinq milliards d'années, il montrait un singe empaillé dans la posture de somnambule, yeux fermés et mains tendues. Rêvant de notre monde, le songe du primate plaçait le spectateur dans un cauchemar : celui de l'évolution lente mais destructrice. S'arrogeant le titre d'un recueil de poème de T.S. Eliot, il intitulait une autre de ses expositions Europe is a Vast and Desolate Wasteland. Dans Chasing Napoleon, il présentait Fuck it ! Free yourself, deux billets de 500 euros qui brûlaient continuellement sans jamais se consumaient. Les mauvaises herbes qu'il présentait dans l'exposition Abandon étaient aussi de ces objets prosaïques qui signifient à la fois le vide et la vie99. Ces herbes folles proposaient un déplacement temporel qui disait précisément « abandon » à la pièce. Comme Robert Gober et ses éviers100, les oeuvres de Yoshihiro Suda et de Tony Matelli jouaient une fois insérées dans l'espace, un pouvoir de simulation imparable. Hyperréalistes, elles indexaient la notion de durée et tendaient à donner l'impression de caducité. Les deux artistes parvenaient à transformer les mauvaises herbes et les fleurs en un concept, un processus qui escortait le spectateur dans l'indétermination. Leurs oeuvres rendaient compte de l'écoulement prévisible du temps, qui viendra insérer du végétal dans les fondations hermétiques de l'architecture de nos villes.

    II.2.c À La mesure du temps : montre et bougie

    Installée depuis 2006 à la cime du perron de la porte d'entrée du Palais de Tokyo l'oeuvre de Gianni Motti définit par sa présence, la position esthétique du lieu. Elle est le symbole de la position curatoriale de Marc-Olivier Wahler, qui l'installait dès sa

    98 Fig. #31

    99 « The Waste and life at the same time » Lisa Fischman, « Transformer » in Tony Matelli, Leo Koenig Inc., 2003

    100 cf. I.3.a

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    prise de fonction. Big Crunch Clock101 se présente sous la forme d'une horloge numérique qui décompte au millième de seconde près, le temps qu'il nous reste avant la phase de décélération de l'univers. Combinée avec une baisse des réserves d'hydrogène disponible, cette phase de décélération annoncera le déclin inéluctable de notre étoile. Dans ses derniers instants, le soleil gesticulera avant de s'éteindre éternellement, combinant dans son déclin, notre système solaire. Le laps de temps qu'il nous est donné à vivre, cinq milliards d'années, donnait d'ailleurs son nom à la première exposition du mandat de Marc-Olivier Wahler, où l'idée d'impermanence imposait sa marque, comme vue dans la première partie du mémoire. Accompagnant cette exposition, Big Crunch Clock était la transcription plastique contemporaine des discours eschatologique, marquait l'avènement de la chute prochaine, de la fin irrémédiable. Lorsque le critique d'art Timothée Chaillou demande à Gianni Motti :

    « Serait-ce la vanité absolue, celle qui indique la réelle fin des temps, non plus sur un mode métaphorique ? »

    L'artiste de répondre :

    « Oui la vanité ultime.102 »

    L'idée qu'une vanité ait besoin d'une matérialité figée pour continuer à exprimer l'impermanence du temps a été prise en compte dans l'élaboration de cette oeuvre. Ironie du sort, Big Crunch Clock fonctionne à l'énergie solaire, cessera théoriquement de battre la mesure à l'extinction des rayons du ciel. Se présentant comme le détonateur qui annulera le temps, l'oeuvre installe une tension, induit du stress pour le spectateur. Celui-ci voit les derniers chiffres défiler très rapidement. Il lui rappelle l'écoulement du temps présent. Les autres chiffres, à la gauche du compteur restent figés. Destinés aux générations futures, ils rappellent que si le spectateur est hors d'affaire, tout n'est qu'une question de temps. Une horloge en milliards d'années qui nous situe face à un temps immensément long, tandis que ces secondes nous rappellent l'urgence de ce décompte, de cette fin prévue, de cet

    101 Fig. #32

    102 Timothée Chaillou, « Gianni Motti, Big Crunch Clock » in Catalogue de collection du FRAC Franche-Comté, 2011

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    inéluctable craquèlement. Interpellant chaque spectateur non pas parce qu'elle mesure une échéance proche, mais parce qu'elle rend compte d'une échéance certaine, Big Crunch Clock inquiète puisqu'elle insinue l'inexorable fin de toute chose, tant matérielle qu'immatérielle.

    Le spectateur pouvait aussi voir dans Cinq milliards d'années, l'oeuvre d'Urs Fischer, Untitled (Branches)103. En l'accrochant à un moteur suspendu, l'artiste faisait léviter une branche dans les airs. Dessus, il installait deux bougies qui en se consumant, dessinait des cercles de cires sur le sol. Les circonvolutions de la branche dressaient comme une ronde, symbole de l'éternel recommencement. Le spectateur pouvait aussi y voir l'image d'une pendule, le rythme du temps. Saisir le temps, le représenter dans ses différentes considérations, tel est aussi l'enjeu de la pièce de Jonathan Monk The Odd Couple (French version). Présentée au sein de l'exposition hors les murs au Château de Fontainebleau, la pièce consiste en deux horloges à balancier, posées l'une en face de l'autre. Ne parvenant pas s'accorder sur l'heure exacte, elles semblent se disputer la mesure du temps. Dans une conférence donnée à l'occasion de l'exposition Le temps vite en 2000 au Centre Pompidou, Anthony J. Turner rappelle qu'Henri Bergson, après Saint Augustin, distingua le temps mécanique de la durée intérieure, subjective, liée à la mémoire, en mettant en évidence deux temporalités, l'une imposée par la nature (l'horloge solaire) et l'autre personnelle. La pièce de Jonathan Monk montrait cette ambivalence qui ne peut réellement s'accorder. Si chaque minute est en principe exactement pareille à toute autre minute, les expériences intérieures contredisent cette mesure homogène. La superposition de ces deux temporalités est aussi le propos de l'oeuvre d'Alice Guareschi, 2005 Calendar. Cette pièce était présentée à côté du crâne de Nicolas Juillard à l'occasion de l'exposition du Pavillon, The Final Cut. Alice Guareschi disséquait un agenda et le présentait enroulé autour d'une bobine. L'écoulement des jours mis sur papier rappelait à la fois « un mètre ruban, notre manière de quantifier le temps, et une bobine de film, notre manière de qualifier le temps.104 » Ici aussi, l'artiste interrogeait la relation entre le temps et l'expérience. Et s'il s'étire dans l'ennuyeuse attente, se contracte dans l'activité fébrile, les oeuvres d'Urs Fischer, de

    103 Fig. #18

    104 Candice Breitz « The Final Cut : un mode d'emploi » in Le Pavillon, session 2004-2005, Palais de Tokyo, 2005

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    Jonathan Monk et d'Alice Guareschi ont en commun de montrer son écoulement permanent, l'impossible prise à laquelle il se démet constamment.

    II.2.d À La vanité performée

    Les représentations de danse macabre se multiplient dans l'Europe du Bas Moyen Âge. On y voit des hommes de chairs communier avec des squelettes. En cela proche des vanités, les danses macabres révèlent la relativité des plaisirs et des biens, montre la mort qui emportera chacun. Si le style s'estompe à la renaissance, il refait jour à l'avènement des Temps Modernes. Dans son poème, Danse macabre, Baudelaire chante le « charme d'un néant follement attifé. » L'art contemporain étant le passage de la représentation à la présentation, les artistes d'aujourd'hui ne figurent plus seulement les motifs de la danse macabre, mais danse pour de vrai. À deux occasions, le Palais de Tokyo en apportait la preuve.

    En 2004, Nicolas Bourriaud invitait Marina Abramovic à réaliser une performance dans l'enceinte de l'institution. En compagnie de Jan Favre À célèbre pour ses crânes faits en insecte éphémère À les deux performeurs installaient une cage de verre dans une des alcôves du Palais de Tokyo. Intitulé Guerrier-Vierge/Vierge-Guerrier105 la performance s'attachait à décrire, l'envers organique de l'apparence humaine. Marina Abramovic insérait son corps dans la cage de verre avec des morceaux de viandes qui lui pendaient autour du cou. Elle ouvrait ensuite par incisions franches, les canaux de Jan Favre, lui faisant couler le long de son corps des vives coulées de sangs. Ce protocole exprimait d'une façon provocante, à la fois répugnante et séduisante, l'inscription du périssable en tant que matière constituante du corps. Les morceaux de viandes utilisés pour la performance étaient ensuite exposés. Dans un lent processus, ils séchaient, se dégradaient, jusqu'à devenir la relique mémoire d'une vie disparue. Cette performance pourrait être rapprochée des oeuvres de Jana Sterbak. Vanitas: Flesh Dress for an Albino Anorexic prend la forme d'une robe faite en tranches de beefsteak. C'est la matière du corps qui vient l'habiller. En rapprochement, la performance de Marina Abramovic et de Jan Favre

    105 Fig. #33

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    peut être perçue comme une ontologie. Les deux artistes insinuaient dans le Palais de Tokyo, l'être comme apparence perméable et impermanente.

    Le spectateur pouvait aussi retrouver l'idée d'une vanité performée au sein de l'exposition Fresh Hell. Commissaire invité, Adam McEwen plaçait sous la travée centrale, On Giving Life (1975), quatre photographies documentant une performance d'Ana Mendieta. Le spectateur pouvait y voir l'artiste se dénuder et s'allonger dans l'herbe pour simuler un acte d'amour avec un cadavre. Cette série rappelle la performance de Marina Abramovich, Cleaning Bones, où l'artiste nettoie avec une éponge, des ossements ensanglantés. Ici Ana Mendieta imprimait la marque de l'éphémère. Dans ses autres travaux, notamment la série Silueta, on retrouve cette expression de l'impermanence. Mendieta imprime sa présence sur le paysage laisse dans la neige ou des marécages, son empreinte corporelle, des dessins éphémères qu'elle documente ensuite par la photographie. Lorsque Mendieta tente de faire l'amour avec un squelette, elle remet en cause la frontière qui sépare les morts des vivants, tente par ses caresses de le ressusciter. Et si elle fait appel au fantôme qui habite encore le squelette, le spectateur peut sentir par effet de rétroaction, le squelette qui repose pour un temps dans le vivant.

    II.3. De la caducité de l'existence

    Cette partie propose des oeuvres qui, sans être réellement des vanités, prolongent les idées de caducité exprimées dans le chapitre précédent. Entendu comme le jaillissement premier de la vie et le refus instinctif de tout ce qui peut l'entraver, le lyrisme est pour Annie Lebrun une violente conscience de la disparition, une manière d'entrevoir la beauté en transparence sur ce qui la menace. Expression subjective qui concerne en particulier les sentiments privés, le lyrisme perçoit la mort non plus pour ce qu'elle sanctionne mais pour ce qu'elle invalide, la vie. En ce sens, les oeuvres qui seront ici présentées peuvent être entendues comme la métamorphose plastique respective du rapport qu'entretient chaque artiste avec la finitude des choses. En induisant leur échéance, ces oeuvres proposent un déplacement temporel qui rejoint la thématique du mémoire, l'impermanence du temps.

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    II.3.a À Une fin de course

    Invité par Jérôme Sans à venir exposer au Palais de Tokyo, l'artiste belge Pierre Ardouvin présentait Nasseville106 (2003). Sur l'espace de la mezzanine, l'artiste installait au sortir des escaliers un chapiteau de filets. Faisant suffoquer l'espace, les lourdes mailles du filet encerclaient le visiteur. Seul un périmètre strict lui permettait une déambulation serrée autour de l'escalier. Car en contraignant le lieu, l'oeuvre n'agissait pas comme un signe, comme une figure exotique extérieure au spectateur. Au contraire, le filet créait une dynamique à laquelle il ne pouvait pas se soustraire. Le regardant était également ébloui par des puissants spots de lumières blanches, qui suivaient un cercle les cimes du filet. Cette lumière, difficilement soutenable, aveuglait tant le visiteur qu'elle l'empêchait de distinguer l'envers du décor. Un podium qui emprisonne l'être et qui lui voile son regard, un espace clos dans lequel évoluer, Pierre Ardouvin proposait une mise en forme de la fatigue mentale, de l'éreintement psychique. Comme un cul-de-sac, son installation constituait la fin d'une visite, le filet obligeant le spectateur à rebrousser chemin pour sortir. Aussi, l'artiste introduisait à différents points de l'espace des enceintes, si bien que le spectateur ne pouvait exactement savoir d'où émanait la source sonore. Par intermittence, des résonances métalliques et des sons abstraits renforçaient l'effet de cercle et d'enfermement. Industriel, le son rebondissait en écho sur les matériaux bruts et sans affect de l'architecture du bâtiment. Combinée à cette lumière qui aveugle, l'installation en son entière faisait penser à une descente après l'euphorie. Elle montrait le moment de la désillusion, de la fatigue, de l'incertitude. Faces aux ressorts et aux effets du spectaculaire - les spots, le son et le chapiteau en filet - le spectateur se sentait comme dans une arène, devenant acteur malgré lui. Il ne savait cependant pas s'il était à l'intérieur ou à l'extérieur du dispositif, s'il était le point focal du spectacle ou s'il était exclu d'événements qu'il ne pouvait voir. Et lorsque Hans-Hulrich Obrist précise que les travaux de Pierre Ardouvin fonctionnent « en grande partie sur la notion d'éphémère, d'impermanence107 », le processus se fait plus claire.

    106 Fig. #34

    107 Entretien entre Pierre Ardouvin et Hans Ulrich Obrist, Déjà vu, Chez Valentin, 2004

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    Cette mise en scène visait surtout à se désamorçait d'elle-même. Sèche, brûlante et assourdissante, l'installation dessinait la fin de perspective, la fin d'une course, la perte des repères.

    Présentée en décembre 2010 dans l'espace d'un des modules, l'oeuvre de Bertrand Lamarche parlait aussi de courbure harassante, de déprime fourbe. L'artiste présentait un tore, une forme cylindrique qui, comme une vis sans fin, tournait sur elle-même en circuit fermé. En mouvement vers le bas, l'oeuvre semblait mimer le déclin inéluctable, plaçait l'humain au seuil du transitoire. Intitulé Lobby (hyper tore Ø 550)108, le titre proposait d'assembler deux images mentales, celle du vestibule, de l'antichambre, lobby, et celle de la forme géométrique du tore. En action, il semblait creuser un couloir vers l'enfer, annonçant dans ses oscillations hypnotiques, une chute inéluctable.

    Sur le même registre, peut être rapproché du travail de Bertrand Lamarche, les sculptures de poussière que l'artiste Yuhsin U. Chang présentait à l'occasion de l'exposition collective Dynasty. L'artiste s'était fait remarquée par les commissaires avec ses photographies de paysages montrant des espaces désertiques, sans traces ni présences humaines. Nommée Poussière dans le Palais de Tokyo109, sa sculpture partait aussi à la recherche de l'inerte, de l'inorganique résiduel. Comme un corps en fin de course, l'oeuvre intimait à l'espace un vieillissement radical, l'essoufflait en le mettant à la hauteur d'un vestige. Informe et précaire, elle symbolisait les processus de désagrégation, l'impuissance radicale. Des sculptures comme ontologie du vide, Yushin U. Chang présentait l'être comme vacuité, comme une matière éphémère qui contiendrait sa propre finitude.

    II.3.b À La stratégie du pire

    Les oeuvres précédemment évoquées montrent l'érosion du souffle vital, l'impuissance de l'art à nous extraire de notre condition existentielle. Prenant en compte cette incapacité, deux expositions du Palais de Tokyo tentaient de dépasser

    108 Fig. #35

    109 Fig. #36

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    la figuration des limites, d'inciter au changement. Visible depuis le sas d'entrée au premier jour de l'ouverture du site de création contemporaine, l'oeuvre d'Alain Declercq, Instinct de mort110, exprime ce propos. L'artiste demandait à un officier de police de tirer deux milles balles sur une palissade de bois, ce dernier inscrivant par les tirs, le titre dans la palissade. En forme d'hommage à Mesrinne, l'artiste convoquait la mémoire du criminel pour lui rendre À l'oeuvre date de 2002 À une partie de la reconnaissance sociale qu'il desserve. Agissant par effet de réflexion, l'installation incitait le spectateur à l'irrévérence, puisque celle-ci devenait institutionnalisée.

    Également marqué par le défaitisme, le travail militant de l'artiste sud-africain Kendell Geers peut être rapproché de celui d'Alain Declercq. Les travaux de l'artiste reprennent l'iconographie des vanités. Dans une de ses séries photographiques, l'artiste part en quête du motif du crâne. En shootant de l'angle approprié, balcons, bancs ou portes d'immeubles, Kendell Geers cherchent les allusions crâniennes qui se dessinent dans l'architecture de nos villes. Sa pièce Memento Mori est une série de sculptures hyper réalistes représentant des corps transpercés de balles. Dans sa performance Bloody hell l'artiste s'étalait du sang sur le visage, criait au désespoir sous cette rivière rouge vermeil. Pour le Palais de Tokyo, l'artiste faisait poser, en réaction aux espaces bruts et décloisonnés de l'institution, de lourds rideaux noirs dans une de ses alcôves. Le spectateur devait écarter cet épais velours pour découvrir une installation intitulée The Terrorist's Apprentice111. Plongée dans l'obscurité, la pièce ne laissait découvrir qu'un socle en son centre, éclairé par une seule source de lumière. Sous une cloche, le spectateur pouvait y découvrir une allumette anodine.

    Kendell Geers figurait ici « la pulsion où s'affronte la volonté de vivre et le désir de mourir.112 » S'il ne montrait pas l'horreur, il exposait la pulsion qui pourrait amenait à cette horreur, comme un stimulant de l'instinct destructeur. Cette allumette provoquait le visiteur, questionnait la capacité de son psychisme à pouvoir résister aux pulsions dévastatrices. Entre pulsion de vie et pulsion de mort, l'artiste montrait

    110 Fig. #37

    111 Fig. #38

    112 Christine Macel, Dangereux de se pencher au-dedans in « Kendell Geers, my tongue in your cheek, Les presses du réel, 2002

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    le morcellement à venir. Son installation mettait au jour la vulnérabilité de notre société, menaçait presque sa stabilité. Intitulé « l'apprenti terroriste », l'allumette se déployait entre la simplicité du dispositif et dans la violence du contenu. Dixit Marx, les individus ont d'abord besoin de se rendre compte qu'ils ont des intérêts mutuels, qu'il faut s'unir pour les défendre. Dans une seconde phase, ne restera plus à trouver que l'élément déclencheur. Invitant à l'immolation, à la destruction, Kendell Geers semblait ici offrir l'allumette pour faire partir cette révolution. The Terrorist's Apprentice visait à libérer ce qui est en chacun de nous, d'impulser ce mouvement de décharge. Selon la stratégie du pire, seule une crise peut produire des

    changements. En proposant l'allumette subversive, l'artiste appelait à
    l'impermanence, au bouleversement des logiques éternelles dans laquelle la société s'est formolée. Faisant partie intégrante de l'exposition, une affiche, distribuée à l'occasion de l'ouverture de l'exposition, réunissait tous les numéros d'urgence de la ville de Paris. Intitulée Emergency Series (Paris), l'affiche visait aussi à alerter la population d'un danger latent, d'avertir du bouleversement à venir.

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    III. La critique de l'éternel

    Les recherches artistiques de l'après-guerre mènent à une prise en compte de la notion d'éphémère dans les processus de création. Installations, art in situ, land art sont autant de tentatives pour substituer l'objet à l'oeuvre. Ces travaux défient par leurs structures l'institution muséale, le marché de l'art. L'idée d'une vanité politique, entendue comme objet stable signifiant la fuite du temps comme enjeux de modification sociétale, trouve son origine dans cette prise de position.

    La troisième partie du mémoire est l'occasion d'analyser un corpus d'oeuvre qui exprime l'impermanence du temps non plus pour extrapoler un lyrisme douloureux, un passéisme distant vis-à-vis de la fuite du temps, mais pour mettre en valeur un discours critique faisant référence aux modalités socio-économiques contemporaines. Le corpus d'oeuvres ici présentées met en doute les discours gageurs d'éternité que la société se permet d'énoncer. Quand tout est changeant, relatif, l'art qui use de la notion d'éphémère suggère implicitement la méfiance en mettant à mal le principe de permanence sur lequel repose nombres de fondements. Les oeuvres de ce chapitre interrogent ainsi le consumérisme en tant que vecteur de satisfaction matérielle (chap. 1), questionnent l'idée de progrès technologique (chap. 2), montrent la dégénérescence écologique (chap.3).

    III.1 Consumérisme et mass média

    III.1.a - L'impermanence des biens matériels

    Sans passer par le signe, l'art contemporain signifie par la réalité même. En accumulant des objets, les artistes Chen Zhen et Christoph Büchel montrent la relativité de toute possession. Dans leurs amoncellements d'emblèmes et d'objets dont la possession semble dès lors vaine, ces artistes critiquent âprement le consumérisme. En vieillissants les objets rassemblés, ils proposent comme une archéologie du quotidien, une anticipation dystopique de notre présent. Un lien peut

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    ici être tracé avec la représentation traditionnelle de la vanité du savoir. Sur ces tableaux113, on peut voir des savants, philosophes, scientifiques, entourés de tous les instruments de savoirs. Entremêlés, des globes terrestres et des livres disputent l'équilibre aux cartes et aux lunettes. Un crâne rappelle souvent que le génie qui aurait épuisé tous les domaines du savoir n'approchera que plus davantage le néant. Et si ces tableaux critiquent les objets comme gage de connaissance donc comme moyen de dépassement, les accumulations contemporaines à caractère de vanité place plus leur discours sur la société de consommation et ses avatars. En accumulant des vestiges d'objets, Chen Zhen critique par exemple la survalorisation des objets et des biens matériels.

    En hommage à l'artiste décédé en 2000, le Palais de Tokyo réactivait une de ses installations dans une de ses alcôves. Intitulé Purification Room114, la pièce stigmatisait le règne des objets. Il était rassemblé des télévisions, des amas de câbles, sièges et cartons, recouverts d'une épaisse couche de terre battue qui leur insufflait l'impression de périssabilité. Camouflés en vestige, ces objets libéraient leurs forces latentes, appelaient intrinsèquement à une réflexion sur le présent, sur ce système de production qui enfante des objets avec des cycles de vie de plus en plus court. Se sachant atteint d'une maladie incurable, Chen Zhen vieillissait souvent les objets de ses installations, défiant ainsi l'offre de stabilité que le matériel incarne théoriquement. En montrant l'histoire fatale, l'évolution inéluctable du matériau, c'est comme si ces objets avaient été abandonnés, avaient déjà vécu leurs vies d'objet, des « après-objets115 », selon le terme de Chen Zhen :

    « Un vieil appareil de téléphone n'est pas qu'une enveloppe devenue vide ou simplement le témoignage matériel d'un produit abandonné, d'un moment donné de la société, mais plutôt un contenu qui porte tout le potentiel, toute la conscience d'un monde de communication, de vitesse et de consommation.116 »

    113 Notamment : Hans Holbein, Les ambassadeurs, 1533 ; Harmen Steenwyck, Allégorie aux vanités de la vie humaine, 1640

    114 Fig. #39

    115 Entretien entre Chen Zhen et Jérôme Sans, « Confusion immunitaire » in Chen Zhen, les entretiens, Les presses du réel, 2003

    116 Chen Zhen, « Question du ciel », Op. cit.

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    Critiquant l'objet et l'information, les deux piliers de nos sociétés, cette accumulation ne renvoyait pas à l'idée de richesse mais à celle d'un système de production d'objets en série. Le spectateur était confronté à l'image du luxe dans les sociétés occidentales, un luxe qui n'est fonction de la qualité des objets, mais de la quantité d'objets que l'on peut réunir. Comme les déchets laissés sur place une fois terminé, le temps du plaisir semblait être passé, Purification Room laissant les marques de sa désagrégation. Putréfiés, ils semblaient tout droit sortir de la gigantesque boulimie matérialiste et exprimaient, comme le précisait le sinologue François Jullien dans une critique sur le travail de Chen Zhen, « L'éphémère et la mouvance ininterrompue des choses, la fugacité et l'in substantialité des existences.117 »

    La pièce de Chen Zhen pourrait être rapprochée du travail de l'artiste suisse Christoph Büchel, qui présentait lors de la session Superdome (2008), Dump118, dans toute la longueur de la travée principale. Ses autres installations investissent le plus souvent des espaces conséquents, font confronter le visiteur à des hypothèses fictionnelles savamment ficelées, sordides comme inquiétantes, parfois traumatisante. Ses oeuvres se conçoivent comme des reconstitutions hyperréalistes, des expositions récits, où des détails précis viennent augmenter le trouble de l'observateur. Subversif, son travail propose d'expérimenter l'art plutôt que de la contempler, poussant le visiteur dans des environnements. En reconstituant les dédales d'un hôpital psychiatrique, d'une réserve de musée dévasté, ou encore la cachette de guerre de Saddam Hussein119, Christoph Büchel aime proposer une temporalité renversée, comme si un archéologue mettait à jour une réalité proche de notre visible, déterrait les restes de notre monde contemporain et de son inquiétante étrangeté. Politiquement engagées, confrontant mémoire collective, mémoire personnelle et leur possible reconstruction, ses installations dénoncent les excès du capitalisme, de la mondialisation, de la surconsommation. Obligeant le visiteur à s'insérer dans ses installations, celui-ci est convié à participer à une expérience, physique et intellectuelle. Par sa dimension, la nécessaire durée de sa visite, l'oeuvre vient au spectateur, l'empêche de rester dans une posture de spectateur passif.

    117 Chen Zhen, « Thérapie et méditation », Op. cit.

    118 Fig. #40 - #41

    119 Installation également présentée au Palais de Tokyo à l'occasion de la session Chasing Napoleon

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    Ambitionnant « de faire venir le plus grand nombre à l'art contemporain en ouvrant ses portes à toutes les influences qui les constituent120 » le Palais de Tokyo a toujours souhaitait proposer des expériences déstabilisantes, encourageant les expositions qui dérogent aux repères muséaux habituels. Il devait trouver dans le travail de Christoph Büchel, une occasion de présenter un travail en tout point novateur, témoin d'une nouvelle manière d'appréhender l'art.

    Rien ne laissait entrevoir la puissance de l'oeuvre : Dump, décharge en anglais, se présentait comme une montagne de détritus culminant à plus de six mètres. Un tuyau métallique évoquait un possible entré, comme une porte vers l'oeuvre recherchée. Obligeant le visiteur à ramper vers sa découverte, c'est casque sur la tête qu'intrigué, il avançait sans savoir avec précision où il se dirigeait. Il s'enfonçait alors dans un dédale de salles bas de plafond, d'un mètre soixante-dix environ. Saturée de signes et d'objets, l'installation ressemblait à un labyrinthe inquiétant, où des zones de pénombres recelaient des dangers certains, suggérés comme imaginés. Au fur et à mesure de la visite, le visiteur était confronté à un enchaînement d'espaces de vie et d'espaces de travail, basé principalement sur la transformation de matériaux. Ainsi un espace « téléphone » rassemblait une quarantaine d'appareils hors d'usage, un espace de recyclage de composants informatiques présentait des débris d'ordinateurs, avec au centre mais presque caché, un micro processeur flambant neuf doté d'une connexion internet surpuissante. Des ateliers de transformation de métaux laissaient entrevoir un travail pénible, fait de labeur douloureux, de crasse inaltérable. Un espace de recyclage du papier laissait voir des piles de feuilles, soigneusement archivées, comme si les habitants tentaient de remettre sur pied un vestige littéraire passé. Un espace de culte présentait un autel, portant en crucifix un squelette d'hirondelle, laissant présager comme une forme païenne de spiritualité. Un simulacre d'école, avec tableau noir et chaises d'enfants, laissait penser à une scolarisation précaire, mais aussi à la reproduction inaltérable de la vie. Plus poétique encore, un espace était réservé au recyclage et à la réparation de globe terrestre, qui s'accumulaient et s'entremêlaient, comme si la notion de territoire, d'horizon lointain, de planète appartenait déjà au passé. Un espace de recyclage de mégot de cigarette laissait

    120 Note de présentation de la programmation 2008

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    aussi voir une récupération organisée des restes de tabacs, ensuite stockés dans des bocaux de verres, comme si une autre espèce était réduite à éplucher les poussières de nos miettes.

    Une échelle permettait, après une escalade habile, d'accéder à un niveau plus élevé. Décalage frappant de richesse, le premier étage donnait à voire un garage automobile : une Citroën DS éclatante était placée sur un pont de voiture. En avançant, la dernière pièce de l'exposition donnait à voir un large espace dégagé, en tout point similaire à une salle des fêtes de communauté rurale. Des tables de brasseries, des bancs, une tireuse à bière, un barbecue, une rôtissoire à poulet, s'exposaient comme signe d'une festivité passé. Des coupes et des trophées remémoraient des gloires oubliées. Sur les tables, des carcasses de poulets, des canettes des bières à moitiés pleines laissaient présager un départ subit, une fuite vivace. Restés sur place, ses aliments pourrissaient, laissant sentir leur fumet avarié

    En envahissant le visiteur d'objets familiers, simplement contextualisés121, la force de l'exposition Dump se situait dans son habilité à saisir et à reformuler notre quotidien. Par l'accumulation de produit de consommation courante, Christoph Büchel se contentait de montrer des objets tirés de l'ordinaire, comme s'il voulait laisser à l'anodin le soin de par lui-même témoigner. En ce sens, son travail peut être perçu comme une tentative d'architecturer le monde en dehors de toute sentimentalité, comme si l'accumulation de ces objets pouvait jouer le rôle de documentaire, de témoin neutre, presque malgré eux dotée de « l'autonomie expressive du réel » dont parlait Pierre Restany. Car de ce capharnaüm ressortait une présence humaine, tant les matériaux rassemblés rappelaient nos activités. La figure de l'homme était suggérée par des objets permettant d'identifier des profils. Dans cette reconstitution à l'échelle un, des survivants semblaient se débattre dans un univers hostile, saturé de rebus de la société de consommation. Ici aussi, des vivants étaient contraints de collecter, de classer, de rationaliser leurs activités. Mais qui étaient ces hommes, si miséreux, obligés à construire un abri au coeur des déchets ? Comment le visiteur, placé dès lors en spectateur, ose t'il pénétrer davantage dans cette détresse, à la manière d'un touriste en vacance en guise de sensation forte ? Comme ces

    121 Paul Ardenne, Un art contextuel, op. cit.

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    « villages indigènes », reconstitués au début du )()(e siècle à l'occasion d'expositions universelles, Dump reproduisait un lieu chaotique, destiné à être traversé. Et c'est cet étalage de misère qui assaillait, comme si chacune des pièces de l'installation visait à exprimer les traumatismes cachés de notre civilisation.

    Reproduisant des conditions de vie difficiles, l'installation de Christoph Bûche interrogeait le sens de notre confort moderne, les limites de son système, les conséquences que nous sommes prêt à accepter pour pouvoir continuer à y vivre. Prévenant d'un déclin inéluctable, l'exposition Dump remettait en question notre satisfaction à s'illusionner d'une croissance, d'un développement. L'installation questionnait notre rapport à la sécurité matérielle, notre quiétude face à notre avenir. Dump montrait les fissures du progrès, l'instable qui entoure notre contemporanéité, l'éphémère nécessairement révocable sur lequel il repose.

    III.1.b - Critique de la publicité

    Conçu dans l'intention de représenter le genre humain à l'échelle mondiale, le projet de Guillaume Paris, We are the world122, présenté en 2003 au Palais de Tokyo, s'apparentait à une galerie numérique de portrait. Composée de sept moniteurs vidéo présentant des « produits portraits » de chaque pays du G7, l'installation développait une réflexion critique autour des enjeux des systèmes de représentations qui structurent les sociétés occidentales. Sur les écrans, les « produits-portraits » étaient autant de produits de consommation courante sur l'emballage desquels figurait la représentation réaliste d'un être humain. Afin de fournir de plus précises explications, revenons plus en détail sur la genèse du projet.

    L'exposition We are the world montrait une partie d'un projet plus général de Guillaume Paris, H.U.M.A.N.W.O.R.L.D., acronyme pour Holistic and Utopian Multinational Alliance for New World Order and Research in Living and Dying. Depuis quinze ans, l'artiste accumule et répertorie des produits de consommation courante de l'ère occidentale sur lesquels figurent des portraits d'être humains. Il les insère

    122 Fig. #42

    63

    dans une collection, sous leur forme matérielle donc périssables. L'artiste intègre ensuite ces portraits dans une banque de donnée virtuelle. Un logiciel, qui permet à partir d'une simple photographie de prévoir l'évolution la plus probable d'un visage en fonction du temps écoulé, les vieilli virtuellement. En fonction du temps passé dans H.U.M.A.N.W.O.R.L.D., le nom de cette base de données, le portrait s'altère. À côté de cela, Guillaume Paris établit une banque d'information sur l'identité des êtres humains ayant servi de modèle aux produits de consommation courante collectionnés. L'artiste y rassemble des données d'ordre biographique, contribuant à la nature sociologique du projet. Cette dimension humaine permet de comparer le temps biographique de la vie d'un individu au temps artificielle de la publicité. Car sur les écrans, le vieillissement a lieu en temps réel. Cette évolution permanente a lieu en parallèle de l'altération physique des contenus périssables et au vieillissement réel des figurants d'origine. Dans We are the world, les vidéos exprimaient chacune leurs tours les biographies respectives des personnages. Les vidéos étaient animées par la voix des modèles eux-mêmes, filmés et interviewés par l'artiste. Une femme, dix ans après son portrait publicitaire, parlait par exemple de son enfance. Sur le même écran, le spectateur pouvait voir l'image de l'emballage du yaourt sur lequel elle figurait. Celui-ci avait pourri, des champignons de moisissure étant apparus, détériorant l'image et son portrait.

    L'exposition du Palais de Tokyo interrogeait ainsi la représentation véhiculée par les objets de consommation et les processus de réifications, la fonction de la publicité dans les processus de mythification de la société. Par extension, l'exposition We are the world questionnait « le rôle de l'image et du stéréotype dans la construction sociale de l'individu et de l'altérité.123 » La représentation des emballages fonctionnait visuellement comme la « composition architecturale » d'une permanence. Au contraire, l'exposition de leur vieillissement fonctionnait mentalement comme l'espace de transformation d'une nature transitoire, périssable. En accordant une vie propre aux produits, Guillaume Paris liait ainsi la nécessité de la mort à la possibilité de la vie, « réinjectait de l'humain dans l'objet usiné en reprenant la chaîne de production à l'envers124 ». Et en réinsérant certains produits jusqu'à les faire parler au sein d'un cycle humanisé, dès lors caractérisé par

    123 Guillaume Paris, H.U.M.A.N.W.O.R.L.D. expliqué aux enfants, Palais de Tokyo, 2005

    124 Charles Barachon, « Guillaume Paris » in Technickart 37, 2003

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    l'évolution du vieillissement, il jouait sur la disparition à venir et c'est par cette disparition que le propos se faisait le plus éloquent. En sorte, l'artiste montrait le triomphe de la nature sur les rêves d'éternels jouvence que sous entend le discours publicitaire. Comme un assaut contre les théories normatives, We are the world critiquait la posture d'un éternel, encouragée par le discours commercial.

    À côté de cette exposition pourrait être rapproché celle de Borris Achour, Cosmos125, présenté au Palais de Tokyo en 2002. Sur une étagère toute en longueur, l'artiste alignait plus de deux cents boîtiers ordinaires de cassettes vidéo. Portant toutes le titre « cosmos », inspiré du roman éponyme de Witold Gombrowicz, l'artiste réalisait lui-même les jaquettes. Cette succession d'adaptation posait le relativisme de la représentation publicitaire. Les deux cents jaquettes étaient autant de boîtes à la fois closes et ouvertes, constituées de plusieurs sources et orientées sur d'autres. Replacée dans un ensemble, la jaquette individuelle perdait de son autonomie. Chaque film entretenait une relation à la fois de succession et d'emboîtement avec ses semblables. Comme si l'emballage avait une existence en soi, dans un monde où rien n'existe sans représentation, l'installation montrait la publicité comme information de l'objet et la production comme l'objet de la publicité. Ces jaquettes « aux sens vides comme interchangeables126 » critiquaient l'impermanence de la représentation commerciale, malléable en fonction des caprices de la norme du voir. Elles montraient la flexibilité de la mise en image d'une idée, flexibilité régit par l'opportunisme du discours commercial.

    III.1.c À Critique des médias

    En arrivant en France, l'artiste chinois Wang Du est choqué par l'omniprésence des images : affiches publicitaires, kiosques débordant de journaux, flux télévisuel ininterrompu, saturation sonore... Ses oeuvres prennent appuient sur ce larsen continue, entre réalité et représentation. Pour son exposition personnelle, Wang Du parade #4, l'artiste suspendait entre les colonnes du Palais de Tokyo trois gros

    125 Fig. #43

    126 Emilie Renard, « De nombreuses poules colorées placées côte à côte » in Borris Achour, Cosmos, Palais de Tokyo, 2002

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    cubes de journaux compressés. Telles des balises qui bordaient l'exposition, Produit dérivé127 était autant de produits rappelant « la post-réalité médiatique dont veut rendre compte l'artiste.128 » Se définissant lui même comme un « artiste média », Wang Du interrogeait ici la posture de la presse qui par ses gros titres se pose comme sosie de la réalité, comme capteur figé des flux de la réalité. Plutôt que d'ajouter d'autres images à ce trop plein, il réutilisait ces images médiatiques pour en montrer la caducité. Les médias accordent aux images et aux informations une durée de vie éphémère. En les restituant dans une matérialité statique, Wang Du montrait l'impermanence de la réalité.

    III.2 L'obsolescence technologique et l'idée de progrès

    III.2.a À La caducité de l'ère industrielle

    Au sein de l'exposition collective Dynasty, Daniel Dewar & Grégory Gicquel présentait Waders, une salopette de marbre portée en éloge sur un socle. Faisant penser à un bleu de travail devenu sculpture, l'oeuvre appelait sur le registre du monument, à considérer historiquement l'ère industrielle comme une période révolue. Telle une relique, ce bleu de travail venait signifier une réalité révolue.

    Suites aux mutations économiques des années 1960, l'Europe abandonne de nombreux sites et bâtiments industriels. Comme un naturaliste, Eric Tabuchi parcourt les paysages vernaculaires français à la recherche de ces constructions abandonnées. Dans l'espace d'un module, le Palais de Tokyo présentait en 2010 sa série Hyper Trophy, une archéologie industrielle de friches délaissées. Intitulé Réserve naturelle129, l'exposition présentait une série de photographies de la campagne désindustrialisée, des mutations fonctionnelles dont ces espaces font parfois l'objet. Sur Agrandissement du provisoire, le spectateur pouvait par exemple voir une station essence devenu un centre d'observation astronomique, un bâtiment industriel transformée en restaurant exotique. L'exposition présentait aussi une

    127 Fig. #44

    128 « Wang Du Parade #4 » in Le_Journal 5, Palais de Tokyo, 2005

    129 Fig. #45

    66

    maquette réduite de la station-service photographiée, comme une relique industrielle d'un temps dépassé. Ces formes collectées étaient autant de manifestations de l'itinérant, de l'instable, de l'éphémère. Des formes architecturales oubliées qui rappellent le célèbre récit de Robert Smithson, « A Tour of the Monuments of Passaic ». En 1967, l'artiste fait en bus le tour de cette petite ville du New Jersey. Mais ne rencontrant que des chantiers abandonnés, des machines au repos, la ville lui apparaît déserte. Robert Smithson conclut que l'espace vernaculaire contient les traces d'un passé si codifié que son avenir archéologique est déjà standardisé :

    « Ce panorama zéro paraissait contenir des ruines à l'envers, c'est à dire toutes les constructions qui finiraient par y être édifiées. C'est le contraire de la ruine romantique, parce que les édifices ne tombent pas en ruine après qu'ils ont été construits, mais qu'ils s'élèvent en ruine avant même de l'être.130 »

    Exposé à l'occasion de la session Pergola, Raphaël Zarka présentait sur le même registre La Draisine de l'aérotrain131 (2009). Comme Eric Tabuchi, l'artiste part en quête de paysages industriels passés, de vestiges révolus qu'il nomme « forme de repos ». Zarka photographie ces objets créés par l'homme puis abandonné. Lorsqu'il découvre près d'Orléans, le viaduc abandonné de l'aérotrain de Jean Bertin - véhicule glissant sur un coussin d'air -, il prolonge sa démarche photographique en réalisant une réplique hypothétique d'une draisine conçue pour cette voie d'essai en forme de T inversé. Il s'agit d'un véhicule composé de deux motos disposées tête-bêche. S'attachant à repérer les isomorphismes entre art et industrie, Raphael Zarka proposait une oeuvre se conjuguant dans un temps incompatible avec le réel. Le caractère absurde de cet engin, mis en regard des usages communs, le constituait en un objet hétérotopique, faisant signe vers le réel tout en bouleversant ses règles132. Ce véhicule apparaissait comme l'image d'une vision révolue du futur, une apparition d'un vestige de notre passé proche qui corrobore d'ailleurs bien l'idée du critique d'art britannique Lawrence Alloway selon laquelle le demain d'hier ne

    130 « L'entropie et les nouveaux monuments » in Robert Smithson, une rétrospective, Marseille, RMN, 1994

    131 Fig. #46

    132 Vincent Pecoil, « La pergola comme hétérotopie » in ZéroDeux, 39, 2009

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    correspond pas à notre présent : « yesterday's tomorrow is not today133 » C'est ce décalage temporel qui créait l'hétérotopie, un espace qui, tout en renvoyant à des espaces concrets, réalise leur conjonction, leur réversion impossibles dans le réel. Comme pour les séries d'Eric Tabuchi et le bleu de travail de Daniel Dewar & Grégory Gicquel, ces oeuvres accentuent l'idée d'un temps perçu comme un ressort ou une visse sans fin, alliant la linéarité de devenir et l'impermanence de la technologie. Ces travaux réussissaient ainsi à susciter des doutes sur l'idée de progrès, forcément révocable.

    III.2.b - L'obsolescence technologique

    Daniel Dewar & Grégory Gicquel présentait à deux reprises À pour l'exposition Granitoïd trans goa rascal koï koï (2007) et l'exposition hors les murs Château de Tokyo, Palais de Fontainebleau (2008) À la reproduction réaliste d'une voiture de sport. Taillé de leurs mains dans le granit, ce véhicule préhistorique imposait une forte présence aux espaces. Relique d'un passé révolu, cet élément perturbateur contaminait et accélérait la marche de l'histoire. En s'approchant, le spectateur pouvait voir des cisailles, des césures qui rendaient l'édifice en ruine. Monument dédié à la technologie industrielle des années 80, Mason Massacre134 proposait un basculement du réel entre des polarités temporelles différentes. La pointe technologique d'hier fait aujourd'hui passer ces engins, selon le mot de Robert Smithson, pour « des créatures préhistoriques enlisées dans la boue, ou mieux encore à des machines disparues, des dinosaures mécaniques écorchés135 ». Le Palais de Tokyo accompagnait d'ailleurs une de ces expositions par une citation de Marcel Duchamp : « Le rapport a/b est tout entier non pas dans un nombre c tel que a/b=c mais dans le signe (/) qui sépare a et b ». La voiture de granit de Daniel Dewar & Grégory Gicquel était cette barre de fraction, le signe d'une transformation, l'opérateur de renversement. Elle représentait ce point de rupture, cette scission temporelle entre un passé révolu et un avenir déjà ruiniforme.

    133 Lawrence Alloway, The Independent Group, MIT Press, 1955

    134 Fig. #47

    135 « Une visite aux monuments de Passaic » in Robert Smithson, une rétrospective, RMN, 1994

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    Pour l'exposition d'ouverture du mandat de Marc-Olivier Wahler, Cinq milliards d'années, Marc Handfort était invité à présenter Honda136 (2002). Au centre de la grande verrière, une moto était couchée sur le coté. Dessus, l'artiste disséminait d'innombrables bougies de couleurs qui se consommaient sur son flanc. La bougie, symbole de la fuite du temps, immolait progressivement dans sa cire l'appareil, de tel sorte que ses capacités motrices se trouvèrent vite annulées. Immobilisée, la moto annonçait comme l'inéluctable déclin technologique, un temps anticipé qui verrait la fin des flux motorisés. Ces bougies pouvaient aussi faire penser à un autel improvisé. Comme si des hommes du futur avaient retrouvé ce vestige contemporain, ils le plaçaient en éloge, en relique de notre temps dépassé. Le Palais de Tokyo proposait un récit similaire lorsqu'il invitait en 2010 le collectif d'artiste KIT à organiser une exposition dans l'espace de ces modules. À cette occasion était présenté un travail de Yann Gerstberger, Hotel Gogodola Paris Executive Suite. Comme un totem amérindien, l'artiste créait une forme anthropomorphe avec des objets de récupérations. Des tuyaux d'arrosages formaient des bras, une plaque de carton un nez. Le tout était assemblé avec du grossier adhésif gris. Invitant à la révérence, cette oeuvre semblait aussi bâtie par des êtres du futur, comme en gloire à un passé industriel révolu. Elle évoquait le souvenir d'une puissance aux reliques dissimulées.

    La discordance technologique était aussi le sujet de l'exposition de Luc

    Kheradmand. Dans l'espace d'un module, l'artiste présentait sa vidéo Postvsnow III137 (2009-2010), un écran plasma ne présentant apparemment d'autre image que celle d'une neige cathodique sur fond noir. L'artiste donnait simplement à voir des nuages vidéo, une poussière électronique où s'évanouissaient les formes. Phénomène visuel propre à l'absence de signal vidéo À précisément révolu depuis l'apparition des écrans plasma À l'oeuvre se présentait comme un anachronisme technologique. L'artiste reconstituait en image de synthèse l'image archaïque d'un irréel présent, puis le faisait lire sur cet écran « nouvelle génération ». Par la confrontation d'hier et d'aujourd'hui, par l'évocation de l'après et d'un maintenant - post versus now À cet écran s'installait dans une faille temporelle et démontrait par l'impermanence technologique, son obsolescence.

    136 Fig. #48

    137 Fig. #49

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    III.3 Entropie et dépérissement écologique

    En 2004, Nicolas Bourriaud provoquait en un face à face percutant une oeuvre de Michel Blazy, une autre de Tetsumi Kudo. Comme vu précédemment, Michel Blazy use de l'éphémère de la matière organique pour mettre au point des sculptures évolutives, qui incluent dans leurs développements, les fluctuations du temps. Mais si ici le processus d'altération physique des oeuvres constitue un effet lyrique de disparition, l'oeuvre de Tetsumi Kudo use de l'impermanence dans un but plus politisé. Marqué par les bombardements atomiques de la seconde guerre mondiale, l'artiste japonais place sous fioles de verres des plantes, fioles auxquelles l'artiste adjoint le pot d'échappement d'une voiture qui tourne moteur allumé. La plante se courbe sous l'effet du gaz, avant que la fiole ne devienne toute noire. Ses travaux les plus connus, comme Pollution-cultivation-nouvelle écologie (1971) présenté au Palais de Tokyo, sont autant de cage d'oiseaux à l'intérieur desquelles l'artiste place des matériaux périssables. Ses environnements reconstitués patientent comme l'oiseau lacéré dans sa cage, attendant un futur salvateur qui ne viendra jamais. Cette installation est le symbole du souci d'accumulation, de préservation malhabile que l'homme exerce sur la nature. Pour la conserver, l'homme en extrait des parties qu'il place dans des parcs naturels, dans des zones préservées qui, en étant coupé de tout, dépérissent comme isolé mortellement dans une cage.

    Pour leur fin de mandat, Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans présentaient en 2006 cinq expositions personnelles, regroupées sous le titre Programme Tropico-végétale. Parmi-elles, l'exposition d'Henrik Hakansson, À travers bois pour trouver forêt138, prolonge le propos de Tetsumy Kudo. Henrik Hakansson insérait dans les espaces des parties vivantes de forêt : arbre, mousse, fleurs. Un écosystème de taille réduite était inversé à la verticale pour matérialiser les conditions de vie absurdes de la forêt. Comme dans un zoo où des cages prennent la parjure de reconstituer le « cadre naturel » de l'animal, l'artiste introduisait les conditions de survie d'une végétation tropicale. À travers bois pour trouver forêt se présentait comme un ensemble de végétations luxuriantes maintenues artificiellement en vie par un système d'arrosage, d'humidificateurs, de chauffage et de lampes solaires. Tous ces éléments étaient

    138 Fig. #50

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    régulés par un ordinateur accessible aux visiteurs, rendus ainsi responsables de la survie de l'écosystème reconstitué. L'artiste réussissait à matérialiser visuellement la destruction d'un équilibre que provoque l'intervention de l'être humain. Des affiches représentant une forêt tropicale dans son élément naturel étaient empilées. Le visiteur était invité à en ramener une chez lui, réduisant à chaque fois la hauteur de la pile. Cette participation menait à la disparition de l'oeuvre comme l'emprise de l'homme sur la forêt représentée.

    À travers bois pour trouver était une métaphore de l'emprise de l'humain sur la nature, du désordre irréversible qu'entraîne la quête de découverte. La prise de responsabilité que l'homme souhaite prendre sur l'environnement et les détériorations inéluctables que cette emprise amène pose un paradoxe que le travail d'Henrik Hakansson restituait habilement. L'homme cherche à augmenter ses connaissances, ici botanique, biologique, mais c'est précisément ces dynamiques qui imposent une altération du sujet étudié. L'installation d'Henrik Hakansson dévoilait ainsi en conscience la part de responsabilité de l'entreprise scientifique dans l'inexorable destruction du sujet de son étude, montrait les dommages causés par l'homme par la simple observation d'écosystème ou espèce jusque là préservée139. Sur ce propos Claude Lévi-Strauss propose paradoxalement de renommer l'anthropologie en « entropologie » telle une science qui en augmentant le degré de désordre au coeur d'un écosystème précédemment isolé, accélèrerait sa disparition.140

    Au travers de biosphères reconstituées, cette installation évolutive évoquait l'emprise de l'homme sur la nature, son effritement progressif, la conséquence inévitable de la curiosité humaine, même lorsque celle ci est motivée par les meilleures intentions. Elle indiquait la disparition programmée de l'écosystème, non seulement celui de la

    139 Francesco Manacorda, « Histoire courte de la destruction naturelle » in Henrik Hakansson, Throught the Woods to Find the Forest », Palais de Tokyo, 2006

    140 « Si bien que la civilisation prise dans son ensemble peut être décrite comme un mécanisme prodigieusement complexe où nous serions tentés de voir la chance qu'à notre univers de survivre, si sa fonction n'était de fabriquer ce que les physiciens appellent entropie, c'est-à-dire de l'inertie. Chaque parole échangée, chaque ligne imprimée, établissent une communication entre deux interlocuteurs, rendant étale un niveau qui se caractérisait avant par un écart d'information plus grande. Plutôt qu'anthropologie, il faudrait écrire « entropologie », le nom d'une discipline vouée à étudier dans ses manifestations les plus hautes ce processus de désintégration » Claude Lévi-Strauss, Tristes tropiques, Plon, 1995

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    forêt tropicale mais de n'importe quel écosystème plus large souffrant de déséquilibre.

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    IV. De l'éphémère de l'objet à la fugacité de l'action

    Lorsqu'un spectateur est amené à considérer une oeuvre, l'événement qui l'engendrait est le plus souvent passé. L'oeuvre dresse de l'acte créatif qu'un constat plus ou moins fidèle, fait paradoxal dans la mesure où une oeuvre n'abrite précisément de valeurs qu'en fonction des comportements spécifiques qui lui ont permis de voir le jour. Surpasser ce paradoxe fut l'un des enjeux des mouvements artistiques de l'après-guerre. En tentant de rompre les distinctions entre art et vie, l'art de la performance et les happenings du groupe Fluxus intégraient ce paradigme. Puisque l'existence de l'artiste précède toujours son oeuvre, ils opéraient un déplacement radical de la valeur artistique de l'objet au geste qui avait permis de le créer, puis par extension, au comportement lui-même. Ainsi à partir des années 60, certaines oeuvres d'art ne sont plus créées pour aboutir à un produit matériel fini, mais vécues, en fonction des aléas du temps. La forme n'est plus une fin en soi. Dorénavant, elle vise l'enclenchement d'un processus intégré aux fluctuations de la vie.

    « L'idée qu'une oeuvre est un processus irréversible trouvant son aboutissement dans un objet iconique statique n'est plus guère d'actualité.141 »

    Le temps de l'artiste, le temps biographique, ne se distingue plus du temps de la réalisation de l'oeuvre. La vie est transformée en art, le temps de l'art devient le temps de vie. Sans tenter d'expliquer les oeuvres en fonction des circonstances d'une vie privée, le Palais de Tokyo donnait à voir des artistes qui imbriquaient leurs oeuvres et leurs existences dans le même processus de production. Les travaux de Bas Jan Ader, Robert Malaval, Alain Bublex et Mathieu Laurette ont en commun d'entrevoir l'art comme l'exposition de l'existence. L'impermanence du temps, temporalité sérielle faite de moment entrecoupé, est intégrée puisque la vie de l'artiste devient son oeuvre. Dans l'espace d'exposition de l'institution, des indices documentaires laissaient entendre l'oeuvre dans ses différentes phases temporelles,

    141 Donald Karshan, « Conceptual art and conceptual aspects », Cultural Center, 1970

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    dans une succession de moments éphémères que le spectateur ne pouvait qu'à posteriori imaginer.

    Se masquer pour apparaître, disparaître pour devenir visible, les artistes contemporains jouent de leurs propres présences au monde. Dans les années 1960 et 1970, des artistes quittent la sphère de l'art pour des motifs différents. Ces gestes sont en eux-mêmes pourvoyeur de valeur et de sens et l'impermanence de leur carrière devient partie de leur oeuvre. (chap. 1) S'inscrivant dans un lieu spécifique, les oeuvres in situ sont par nature éphémères. Elles prennent place dans un lieux et pour un temps déterminé. De ses installations ne subsistent que vestiges et documentations qui témoignent pour l'histoire d'événements révolus. Le Palais de Tokyo mettait à l'honneur des artistes qui relèvent de cette pratique. (chap. 2) Ces parties permettront d'aborder la troisième : la marque du vécu dans l'oeuvre, combinée à l'idée d'art créé en fonction de sites spécifiques, permettent l'émergence de travaux qui prennent pour matériau d'élaboration l'interactivité qu'elles instaurent entre des individus, dans un espace-temps définis. Théorisé par Nicolas Bourriaud dans l'Esthétique Relationnelle, ces oeuvres aboutissent la réflexion sur l'impermanence. L'éphémère n'est plus seulement montré, c'est dans celui-ci que l'oeuvre prend forme.

    IV.1. La césure comme modèle d'action : abandon et disparition

    Rester en place, c'est en filigrane se résoudre à ne vivre qu'à moitié, immolé dans « l'espace convivialité » que l'on a bien consenti à s'octroyer. Dans des fuites en avant pour anesthésier leurs hémorragies d'ennui, certains ont tenté de se soustraire à ce sédentarisme forcené. Délaissant Charleville-Mézières à 16 ans, les fugues de Rimbaud le conduisent vers le port d'Aden. Arthur Cravan, poète-boxeur dadaïste, se laisse perdre jusqu'au golf du Mexique. Et réputation faite, Marcel Duchamp quitte la sphère de l'art pour se consacrer aux échecs. Sans rien produire, il décrit le silence comme sa pièce maîtresse142, part à la recherche d'idée dans la structure même de l'expérience. Il opère ainsi un déplacement À déjà opéré avec ses

    142 See Ana Dimkle, Duchamp's Künstlertheorie, Hann-Münden, 2001

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    ready made À de l'objet à l'artiste. Le retrait du monde de l'art ou plus généralement, de la société, est dès lors doté de sens, que le Palais de Tokyo mettait en exergue dans son programme d'exposition. L'institution montrait l`abandon de l'art comme un acte paradoxale, un silence susceptible de signification artistique, capable chez certain de prendre le sens de geste artistique ultime. Cette partie permettra d'aborder les différentes interprétations de ce geste en fonction du degré de valeur artistique que l'on lui attribue.

    IV.1.a À Se dérober du monde

    En 2009, l'exposition Chasing Napoleon venait combler le silence quasi général qui accompagna en 1996 la publication française du manifeste de Théodore Kaczinsky L'Avenir de la société industrielle. Surnommé Unabomber, cet homme fut pendant dix-sept ans, l'ennemi public numéro un des Etats-Unis. Brillant élève issu d'une famille modeste, il devient à l'université de Berkeley, un professeur de mathématique distingué. À vingt-six ans cependant il quitte les honneurs pour partir se réfugier solitaire dans une cabane du Montana. Sensible aux théories anarcho-primitivisme, Kaczynski se fait chasseur-cueilleur dans le pays le plus industrialisé au monde. À l'image de William Thorreau et ses récits sur les forets du Maine, Théodore Kaczinsky vit en autarcie, reclus, sans eau courante ni électricité. Défendant farouchement la nature, il développe des positions extrémistes sur les systèmes économiques contemporains. Après s'être coupé du monde, il envoie pendant plus de quinze ans des colis piégés à des dirigeants de compagnies d'aviation, à des chercheurs en informatique et biologie, tous les responsables à ses yeux des altérations écologiques dont il est témoin.143 En 1995, il propose à la police de cesser l'envoi de ses colis piégés, à la condition que soit publié dans le Washington Post, le manifeste qu'il avait écrit L'avenir de la société industrielle, une impitoyable critique du monde technologique.

    À l'occasion de l'exposition Chasing Napoleon, c'est au centre de la travée centrale du Palais de Tokyo que l'artiste Robert Kusmirowski installait à l'identique la

    143 D'où le surnom, trouvé par le FBI, de Unabomber, Un pour université, a, pour airlines

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    reproduction de la cabane de Theodor Kaczynski144. Comme la relique profane d'un monde alternatif, la reconstitution de sa maison du Montana venait apporter la marque empirique de l'engagement de la pratique dans la théorie. Souhaitant non seulement se débarrasser des gouvernements mais voulant - comme il l'écrit dans L'avenir de la société industrielle - la chute de « la base techno-économique de la société actuelle », Unabomber tirait les conséquences de ce qu'il disait. Et c'est cette intrépidité devant les certitudes scientifiques que le Palais de Tokyo souhaitait mettre à l'honneur. Intriguant le spectateur, la réplique de Robert Kusmirowski proposait de faire ressurgir l'histoire de cette digression. À côté de la cabane d'Unabomber, Gardar Eide Einarsson la compléter. Reproduisant dix notes laissées par Theodor Kaczynski, l'artiste proposait un diptyque intitulé Instruction pour disparaître. Mis sur tableaux, les spectateurs étaient invités à lire ces instructions, écrites par Unabomber pour permettre aux citoyens de fuir l'emprise des sociétés techno industrielles, de fuir en toute circonstance sans laisser de trace. C'est parce qu'il avait fait disparaître le fossé entre la théorie et la pratique, qu'il avait avec une cohérence implacable qui vient contredire la classe intellectuelle, - qui trouve dans l'écart entre ce qui se dit et ce qui se fait, son critère d'excellence145 - que des artistes illustraient sa pensée, que le Palais de Tokyo lui rendait hommage. Et c'est pour insuffler la remise en question, susciter l'impermanence devant les certitudes qui courbent l'homme que les travaux de Robert Kusmirowski et de Gardar Eide Einarsson étaient mis en exergue au sein de l'institution.

    IV.1.b - L'abandon de l'art

    Si l'art peut être envisagé comme une tentative d'opposition au fonctionnalisme de la vie, et si au premier abord il permet de s'écarter de tout système préétabli, il devient avec l'expérience, la matière contre laquelle il s'agit de lutter. Car la recherche de singularité peut embrigader l'artiste dans des logiques productivistes. Trop heureux d'avoir pu faire reconnaître leur originalité, beaucoup finissent par se cantonner dans leur technique, répétant leur principe jusqu'à épuisement de l'expression. En l'absence de rigueur, ils font perdre toute teneur à leurs créations à mesure qu'ils se

    144 Fig. #51

    145 Annie Lebrun, Du trop de réalité, Stock, 2001

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    plient devant elles. Esclaves de leur propre travail, ils subordonnent leurs travaux à des enjeux ordinaires comme celui de faire perdurer le motif qui leur a permis de rencontrer le succès.146 Contre la routine, des artistes ont au contraire refusé de rentrer dans toute logique de style. Alliant l'art et leur vie, Robert Malaval fait par exemple carrière dans l'impermanence, préférant abandonner l'art plutôt que de se retrouver dans une Artwork Class, de se retrouver dans les allées d'un marché de l'art saturé d'insignifiances grossières.

    À 25 ans, sa série de l'Aliment blanc, matière blanchâtre avec laquelle il recouvre des fauteuils, des chaises roulantes et des tableaux, Robert Malaval rencontre du succès. Il se forge un personnage et pour un temps ne porte que du blanc. Lorsque Dali l'invite à diner, il commande un oeuf dur, une sole et un yaourt nature. Il expose à New York, chez Yvon Lambert et Daniel Gervis. Le milieu de l'art achète et lui en redemande. Mais ne concevant son activité ni comme un sacerdoce, ni comme une obligation Robert Malaval arrête l'Aliment blanc. Comme s'il refusait de faire semblant de jouer avec les systèmes de reconnaissance de la société, l'artiste combat sa soif de créativité. En abandonnant l'art, il se libère lui-même de la posture d'esclave servile qu'il venait d'endosser. Une attitude qui se retrouve au fil du temps tant les changements de période et l'impermanence de sa production déjouent tous les styles. Malaval s'arrêtera par intermittence de travailler, ponctuant son oeuvre de longues césures, afin de ne jamais se répéter.

    « J'aime le changement, c'est ma ligne. La seule ligne que je puisse avoir. Disons que ma ligne est de ne pas en avoir.147 »

    L'exposition Kamikaze (2005) mettait en valeur les aspects très hétérogènes du travail de Robert Malaval. La scénographie rendait compte de cette inconstance, du renouvellement continu de son langage. Dans son organisation, elle faisait explicitement référence à ces césures :

    146 Ian Burn, The artist as victim, 1974

    147 Entretien avec Sylvain Lecombre in Robert Malaval : attention à la peinture - Exposition pirate, Maison des arts et de la culture, Créteil, 1980

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    « Toute son oeuvre est faite de rupture et cette exposition souhaite en rendre compte (...), en rendant compte de son désir constant de se surprendre lui-même et de se réinventer.148 »

    La rétrospective du Palais de Tokyo mettait ainsi en valeur le travail d'un artiste qui avait refusé d'être un bureaucrate de sa propre oeuvre. Sur ce point, Robert Malaval a en commun avec Charlotte Posenenske d'envisager l`art comme une manière d'être consciemment pensée contre l'aspect fonctionnel d'un système construit sur des rapports de domination et de logique productiviste. Marc-Olivier Wahler proposait en 2010 une rétrospective de cette artiste allemande, accentuant le discours sur son retrait de la scène artistique. En 1968, Charlotte Posenenske abandonne en effet toute production artistique et commence des études de sociologie portant sur l'étude des processus de travail standardisés. Cette décision de mettre fin à une carrière artistique prometteuse s'inscrit dans le contexte de développement des attitudes performatives et conceptuelles de l'art de l'après-guerre. En abandonnant toute production, Charlotte Posenenske adoptait une attitude porteuse d'une critique de la marchandisation de l'art, faisait un pas pour mieux intégrer pratique et théorie, comme le projet avant-gardiste d'unifier l'art et la vie. En mai 1968, l'artiste publie un texte dans Art International qui conclut :

    « Je ne peux me résigner à l'idée que l'art ne saurait contribuer à résoudre des problèmes sociaux pressants. »

    Avant de se retirer de la sphère artistique, Charlotte Posenenske produit des formes modulables fabriquées en série illimitée et dont le matériau reste brut : acier, carton. Ses dernières oeuvres ne sont pas signées, sont éditées en série illimité et vendue sans marge de bénéfice. Exposées au Palais de Tokyo, ces sculptures ressemblent à s'y méprendre à des conduits d'aérations. Dans l'espace d'exposition, ces oeuvres créaient un double écho : à la fois trappe de sortie de l'espace d'exposition, et par sa vie personnelle, un exemple de sortie du monde de l'art. Pour Charlotte Posenenske, quitter l'art peut être envisagé comme une conséquence des recherches de l'artiste sur la production et la consommation. L'abandon de l'art peut ici être perçu comme la

    148 Marc Alizart, Robert Malaval, kamikaze, Palais de Tokyo, 2005

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    conclusion de sa quête d'un art objectif et coopératif. L'art est impuissant à résoudre les problèmes sociaux. Il ne produit que des simulacres de relation libres et doit être abandonné au profil d'activité ayant réellement prise avec le réel. Ayant constaté que l'art ne lui permettait d'intervenir qu'au niveau de la consommation, l'artiste fait le choix de la sociologie et du syndicalisme pour pouvoir agir au niveau de la production. Elle tire les conséquences pratiques et abandonne toute activité artistique pour s'engager pleinement dans des activités en prise avec le social. Et pour Posenenske et Malaval, les coupures de leur oeuvre et l'immolation dans le silence ne dénie pas leur travail. Au contraire, leur retrait de la scène artistique rajoute de la valeur ajoutée à leur oeuvre. Désavouer un travail devient une nouvelle source de sa légitimité, un certificat de bonne foi, un gageur de sens.149

    IV.1.c - L'esthétisation du suicide

    Il faut admettre l'impossibilité profonde de faire métier tout ce qui est ouverture sur l'être. Et l'art devient l'ennemi de l'artiste lorsqu'il l'enchaîne dans des attentes, et si c'est une logique qu'il a lui-même amenée, il doit comme pour se purifier de lui-même, se distancier vis-à-vis des systèmes qu'il vient d'établir. C'est dans la fuite qu'il faut poursuivre ses explorations, et c'est dans le silence de la disparition que l'artiste se libère de ses aliénations, l'appétit pour l'insoupçonné ne pouvant s'apaiser que dans des expériences franches et insensées. Dans ce sens, l'exposition collective du Palais de Tokyo, Fresh Hell, présentait des artistes au courage indéniable, dont certains avaient préféré se perdre plutôt que de se répéter. Parmi eux, c'est une belle image de ce mythe de la fuite que l'artiste néerlandais Bas Jan Ader. Déjà aux Beaux Arts, il n'utilisait que trois feuilles canson à l'année, laissant pour oeuvre l'effilochement de ses bribes de papiers, des pages blanches où ne subsistent que des traces d'une expressivité camouflée. Adepte de l'esthétique de la chute, ses vidéos le montre se jeter de l'air, questionnant le corps et son équilibre, mettant en jeu les difficultés d'adhérences qui incombent à tout être faisant effort pour exister. Dans Untitled (Tea Party), une série de photographies présentées dans Fresh Hell, Bas Jan Ader est surpris de la chute d'un piège qu'il a lui-même mis en

    149 « Disavowal of the work becoming a new source of its validity, a certificate of unchallengeable seriousness » Susan Sontag, « The Aesthetics of Silence » in Stills of Radical Will, Picador, 2002

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    place. Et dans une dernière tentative pour défier les lois de la rationalité, à la manière de l'implacabilité d'un dandy qui s'impose des règles sociales strictes pour questionner la rigueur, il défie d'insolence l'océan. Embarquant sur un croiseur de poche, il nomme In Search of the Miraculous cette performance qui vise la traversée de l'Atlantique. Ne subsistera de cette tentative de dépassement que son petit bateau, retrouvé abîmé près des côtes irlandaises.

    L'exposition Fresh Hell convoquait face à face l'oeuvre de Bas Jan Ader à deux vidéos de Gino De Dominicis. Faisant aussi référence au thème de la disparition de l'artiste, ces vidéos permettaient au spectateur d'envisager sa pratique. Sur Tentativo di far formare dei quadrati invece che dei cerchi attorno ad un sasso che cade nell'acqua» e «Tentativo di volo, De Dominicis tente de former un cercle en jetant une pierre dans l'eau. Sur Tentativo Di Volo, il défie les lois de la gravité. Ces deux canulars augurent l'adéquation entre l'oeuvre et la vie de cet homme. Obsédé par la contemplation de la mort, De Dominicis annonce à mainte reprise sa propre disparition, met en oeuvre sa propre mort en publiant des fausses nécrologies. L'artiste publie dans des revues d'art ou des journaux d'informations de multiples communiqués, l'occasion de fonder une biographie chaque fois différente de lui-même. Il use de la réceptivité de sa mort pour forger son identité. Ainsi c'est dans la fuite, dans l'esthétisation de leur suicide qu'Ader et De Dominicis posent après Lautréamont, Rimbaud et Cravan la disparition comme l'ultime geste de l'artiste accompli. Relevant de l'esthétique de soi le choix du silence ne réduit paradoxalement pas la portée de l'oeuvre. Au contraire elle lui confère du pouvoir, de l'autorité. En fuyant la sphère de l'art, l'artiste continue de parler, mais d'une manière que l'audience ne peut pas entendre. Il prend en compte la faculté expressive de la renonciation. Car pratiqué dans un monde de réaction normée, spolié par le mensonge du langage, l'art devient l'ennemi de l'artiste puisque l'objet créé l'empêche de réaliser la transcendance qu'il désire. L'art commence à être perçu comme ce qui doit être dépassé. L'artiste détruit son oeuvre, appel à l'abolition de l'art lui même. C'est dans le suicide esthétisé que Bas Jan Ader et De Dominicis ont trouvé l'espace pour survivre entre le spirituel de l'art et la matérialité de l'oeuvre.

    La disparition dans le silence laisse les états de fait ouverts, portant la confusion à son apogée. Et s'il est possible d'envisager un art de la disparition, il faudrait voir ici

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    une résurgence singulière de l'expression lyrique. Avec une violente conscience de la fuite, ces destins de vies envisagent la beauté en transparence sur ce qui la menace, quitte à embrasser le danger. Car l'art doit venir contredire les logiques dans lesquelles nous nous sommes immiscées. Il doit offrir des illusions cinglantes, aptes au renversement, à la perte des modèles comme aux voies préétablies. L'art permet à l'artiste de se sentir en vie. Et c'est la disparition, cet absolu qui seul par le silence, peut répondre à toutes les questions.

    IV.2. D'un art in situ...

    Les pratiques in situ se développent à partir des années 1960. Continuant les voies ouvertes par la dématérialisation de l'art, des artistes remettent en cause l'objet et de sa présence. Victor Burgin parle alors d'esthétique situationnelle. Prenant acte de la généralisation des moyens de reproduction technique qui enlève désormais à l'oeuvre son « aura », les pratiques in situ prennent forme dans l'ici et maintenant. Éphémère l'oeuvre in situ ne pourra se produire qu'une seule fois, n'existe qu'à l'endroit où elle se montre. Sans autonomie spatiale ni permanence temporelle, les pratiques in situ ne sont rendus accessibles que par l'archive, support à visée documentaire qui permet le référencement de l'oeuvre.

    IV.2.a - Temporalité de l'oeuvre en site spécifique

    En 2007, le Palais de Tokyo présentait deux oeuvres de Robert Smithson. Sous la verrière était montré Mirror vortex (1964), une sculpture en miroir aux perspectives kaléidoscopiques. Utilisé comme matériau, le miroir impliquait l'intégration dans l'oeuvre de l'image du regardant, ainsi que des parties de l'espace de la travée où elle se situait. De cette façon, l'oeuvre renvoyait toujours à autre chose, intégrait en son sein le réel environnant. Le miroir agissait comme un révélateur d'image à jamais actif, à la différence d'une peinture, d'une sculpture, à jamais figé dans un ensemble immuable. À côté était projeté Rundown (1969). Sur cette célèbre vidéo, une benne déverse une coulée d'asphalte le long d'une colline des hauteurs de Rome. L'oeuvre

    81

    est cette coulure fugitive, capté avant de disparaître. Rundown rappelait les processus d'érosion déjà exploité dans Spiral Jetty. Pour cette pièce Robert Smithson déplaçait six milles tonnes de terres pour former une spirale dans un lac isolé de l'Utah. Fasciné par les processus d'échange, de mobilité, et de transformation, l'artiste choisissait le site pour sa forte concentration en sel, étant sûr que la dégradation viendrait faire patiner d'une couche blanchâtre la terre déplacée. Dans le de descriptif de l'oeuvre, il inscrivait d'ailleurs le sel - à côté de la terre, de l'eau et de la pierre À comme l'un de ses composants. Aujourd'hui c'est lorsque le niveau du lac est bas qu'émerge de l'eau Spiral Jetty. Comme l'envisager Smithson, les blocs ont blanchi. Le sel s'y est enraciné et sert d'indice à la marque du passage du temps. Partant autonome à « l'exploration de la structure cristalline du temps150 », comme une immense fluidité réfléchissante, le sel incorpore dans l'oeuvre les marques du ressac incessant. Comme du miroir, l'artiste use avec le sel de matériaux de transparence afin de créer des lieus réflexifs du temps et de son impermanence.

    En formalisant l'oeuvre en fonction du site où elle viendra prendre place, les pratiques in situ jouent sur la temporalité. Anti-monuments de la précarité et de la fragilité, ces installations poussent à accepter les limites, à reconnaître que la durée n'est pas synonyme de qualité. Invité à intervenir dans les espaces du Palais de Tokyo, Daniel Buren présentait Quatre fois moins ou quatre fois plus151. Première exposition « historique » dans un lieu consacré à la création émergente, Nicolas Bourriaud insistait pour rendre hommage à l'investigateur du terme in situ à l'un des premiers artistes français à avoir consacré de l'importance au contexte de l'oeuvre. Tout au long de son activité artistique, Daniel Buren intervient en espace public, le plus souvent au moyen d'installation éphémère. La durée des oeuvres qu'il conçoit est toujours fonction d'adéquation avec le site et de son usage. Prenant en compte la dimension active du lieu - dimension qui imprimera sa temporalité sur l'oeuvre - Buren remplit de sens cette désagrégation progressive :

    150 Robert Smithson, « Towards the Development of an Air Terminale Site » in Writings, 1953

    151 Fig. #52

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    « L'éphémérité de l'art, c'est sa grandeur et sa dignité. Toutes les oeuvres devraient avoir l'ambition d'être éphémères.152 »

    En créant des environnements qui ne vivent que le temps de l'exposition, les oeuvres de Michael Lin sont aussi conditionnées par les lieux dans lesquelles elles s'insèrent. Créés pour un lieu et pour un temps spécifique, ces travaux dépendent des contraintes propres à leur élaboration. En 2003, l'artiste présentait Spring, une composition florale peinte à la main sur le sol du Palais de Tokyo. Mettant le visiteur dans une position d'iconoclaste, il invitait le public à marcher sur l'oeuvre sans précaution particulière. Au fur et à mesure, les piétinements détérioraient inéluctablement les surfaces peintes.

    « Quand on considère la durée de l'exposition comme un élément à part entière de l'oeuvre, on envisage déjà l'exposition comme un événement, et non comme une collection d'objet exposé.153 »

    En changeant notre rapport à l'oeuvre, Michael Lin interrogeait l'attitude du spectateur, renversait les dispositifs de création et d'exposition. Plus que de la contemplation, il attendait que son travail fournisse un cadre à d'autre scénario. Par la mise en contexte de l'oeuvre, Michael Lin montre bien que la signification de tout lieu tient aux activités qui s'y déroulent, que l'oeuvre n'est rien de plus que le théâtre de l'échange social, bref de par nature.

    IV.2.b - L'oeuvre exposition

    Au Palais de Tokyo, Katharina Grosse occupait tout l'espace lumineux de la grande nef. D'importantes quantités de terre y étaient rassemblées, alliant du sombre, du humus, du claire, de l'argile. Ces formes géoglyphes étaient ensuite recouvertes par l'artiste par de la peinture acrylique en utilisant un pistolet vaporisateur. Débordant sur le mur, l'espace d'exposition principal était transformé en un paysage total, en une immense peinture qui englobait le spectateur en son sein. Intitulé Construction à

    152 Daniel Buren, « Entretien avec Suzanne Pagé » in Daniel Buren, les écrits, CAPC, 1991

    153 Entretien avec Jérôme Sans, Michael Lin, Palais de Tokyo, 2003

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    cru154, construction sans fondation, l'oeuvre se liée à l'exposition et l'exposition devenait l'oeuvre.

    Le programme moderniste, tel que définit par Clément Greenberg, tente de donner une indépendance à l'oeuvre. Autoréférentielle, celle-ci doit pouvoir exister pour elle-même, en dehors de tous contexte. À partir des années 1960, en réponse à la doxa moderniste de l'autonomie de l'art, les artistes cherchent à dépasser l'enveloppe du tableau, sa surface englobante. Le tableau n'est plus perçu comme la frontière ontologique de la peinture, comme la « limite du corps enveloppant.155 » L'autonomisation de l'oeuvre perd ainsi de son actualité156. Le travail de Katharina Grosse au Palais de Tokyo montrait ce processus. Installation in situ, la peinture occupait tout l'espace de la verrière, l'oeuvre devenant l'espace d'exposition, l'exposition devenant l'oeuvre. Conçue pour le temps de l'exposition, l'oeuvre était de par nature éphémère. En lien avec son environnement, la peinture perdait de son automatisation. L'oeuvre n'existait pas en dehors de l'exposition. Et si l'exposition est l'oeuvre et l'oeuvre l'exposition, on peut d'une certaine manière y voir une certaine forme de résistance à l'objet. Construction à cru était une oeuvre d'art totale qui ne pouvait laisser échapper des objets, au risque de voir leur « aura » s'annuler. Comme lorsqu'Yves Klein réalise L'exposition du vide, il n'expose pas une oeuvre intitulée Le Vide, mais une exposition présentant le vide, Katharina Grosse produisait une exposition dont les objets ne pouvaient être isolés. Le caractère éphémère de l'oeuvre instituait une tension, donnait à l'ensemble un gage d'authenticité.

    IV.3 ... à un art in socius

    Au tournant des années 60, l'art commence à s'étendre, d'abord hors des sculptures, hors du tableau, puis occupe l'espace d'exposition en son entier. L'art va même jusqu'à se retrouver au-dehors de ces espaces, notamment dans la pratique du land art. En s'externalisant, les oeuvres accordent une importance grandissante au

    154 Fig. #53

    155 Aristote, Physique IV

    156 « La forme exposition prime désormais sur la forme-tableau ou la forme-sculpture. » Nicolas Bourriaud, Formes de vie, Op. cit.

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    contexte où elles prennent place, aux caractéristiques physiques, culturelles et politiques du lieu. Pensée en fonction de l'ensemble des circonstances mises en jeu par l'actualité du site, l'oeuvre s'en inspire et dès lors les reflète. Mais alors que l'art in situ se passionnait pour le lieu de l'oeuvre, les pratiques artistiques contemporaines orientent désormais leur réflexion vers l'idée de réseau, de communauté. Un phénomène que Nicolas Bourriaud identifie en parlant du « passage de l'in situ à l'in socius157 ».

    En continuité idéologique avec l'art de la performance, où l'artiste considérait son corps comme un matériau, son ossature comme sculpture, les pratiques in socius prolongent le dédain pour l'objet d'art. Dans ce contexte de la dématérialisation de l'oeuvre, les artistes expérimentent des pratiques qualifiées de relationnelles en raison de leur inscription dans la « sphère des interactions humaines et son contexte social.158 » Bien que visible, comme l'happening, l'acte créatif est ici intangible. Explorant les relations entre art et vie, il ne laisse aucune trace et ne peut être ni acheté ni vendu. Ces événements sont déplaçables. Interagissant dans le milieu où elle prend place, l'oeuvre est incompatible avec l'immobilité pérenne habituellement observée dans la tradition du monument. L'art in socius consacre ainsi l'émergence d'un nouveau rapport aux lieux de l'art dans des oeuvres mettant en formes des ambiances. Comme pour le land art, l'ambition n'est plus de fonder une totalité plus ou moins autonome mais de s'insérer dans un monde éclaté et de tenter d'y faire lien :

    « L'artiste des années 80 défie les qualités de permanence, d'immobilité et de non-répétition qui étaient intrinsèquement liées à la sculpture, notamment en la recréant en tant que pratique nomade.159 »

    157 Nicolas Bourriaud, Esthétique relationnelle, Op. cit.

    158 Nicolas Bourriaud, Op. cit.

    159 Hélène Doyon, Hétérotopie : de l'in situ à l'in socius, Université du Quebec, 2007

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    IV.3.a - L'artiste comme créateur de dialogue

    Au début des années 90, une frange d'artistes réunis sous la bannière de l'Esthétique relationnelle, telle que la théorise Nicolas Bourriaud, entreprennent de restaurer le dialogue. Alors qu'apparaît en France le terme de « fracture sociale », ces artistes tentent de restaurer le dialogue face à un certain repli sur soi et à « un retour proclamé de l'intime160 ». Ces artistes veulent entretenir avec le lieu et le contexte un échange passager, moins soucieux de pérennité mais préoccupé davantage de proximité et de quotidien. L'oeuvre se situe au niveau des interactions qu'elle produit, interactions entendues comme les expériences subjectives des participants, de par nature impermanente.

    Dans le programme d'événement préalable à l'ouverture du Palais de Tokyo, les directeurs de l'institution invitaient Alain Bublex à proposer une pièce161. L'artiste proposait une marche dans le 16e arrondissement, aux environs de l'institution et demandait aux participants de venir chargé de bagage. Chacun portait deux ou trois sacs, à bout de bras, en bandoulières... L'idée était d'introduire l'image du voyage, du transit, de la mobilité. Alors que ces sacs étaient vides, les participants rentraient aussi dans un jeux d'intersubjectivité sociale, se faisant de fait passer pour des touristes, des immigrants. L'oeuvre se situait au niveau des dialogues que cette situation était amenée à créer, au niveau de la subjectivité des participants et de leurs ressentis propre. L'artiste offrait les conditions d'un lien social innovant, le travail prenant place dans un nomadisme aléatoire. Dans la même optique, à l'occasion d'une exposition hors les murs en Argentine, le Palais de Tokyo installait dans les espaces Tribune162, un travail de Fabrice Gygi. Ce banc, recouvert d'un abri contre la pluie, comme ceux des entraîneurs sur un terrain de football, plaçait les spectateurs qui étaient amenés à s'y asseoir dans une position qui engendrait de l'échange social. Dans ces deux cas, l'oeuvre est volatile, prend place une fois et ne peut pas se répéter, rejoignant en cela l'idée d'impermanence.

    160 Claire Moulène, « Scénariser le réel : les utopies de proximité » in Art contemporain et lien social, Editions cercle d'art, 2007

    161 Fig. #54

    162 Fig. #55

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    À l'ouverture du Palais de Tokyo, Nicolas Bourriaud et Jérôme Sans demandaient à l'artiste Robert Milin de penser l'espace laissé vacant à l'ouest de l'institution, la fine bande de terre de la rue de la Manutention. L'artiste pense son oeuvre en fonction du lieu et souhaite réagir face à l'aspect un brin glacial du quartier. Peu chaleureux, le 16e arrondissement de Paris exhibent en effet ses symboles de pouvoirs. Ses rues sont larges et déshumanisées. Tout y est extrêmement onéreux. Pour réinsuffler du dialogue et de la convivialité, Robert Milin décidait d'installer un jardin collectif, intitulé Le Jardin aux habitants163. Il divisait la fine bande de terre en seize parcelles et les proposait à des volontaires pour les cultiver. Il mettait ainsi en place, les conditions suffisantes pour faire germer des relations, qui n'auraient sinon pu prendre place. Son travail s'inscrit dans la durée de la vie sociale plutôt que dans celle d'un objet relativement pérenne, dans des processus et expériences vécues plutôt que dans la contemplation passive d'un objet. Et l'artiste de dire :

    « De Fluxus j'ai retiré cette idée qu'il était possible de sortir de sortir de la peinture. (...) Par l'idée d'environnement, d'un art plus synthétique, incluant des performances, des processus, des expériences vécues, Kaprow a pensé que de nouvelles formes pouvaient intervenir en dehors du cadre contemplatif du musée. Je crois moi aussi qu'il y a un certain conservatisme à rester dans la contemplation des objets.164 »

    Décloisonner l'art et la vie, donner la possibilité aux gens de se rencontrer, autant d'enjeux que l'on retrouve aussi chez l'artiste thaïlandaise Surazi Kusolwong. Pour l'exposition d'ouverture du Palais de Tokyo, l'artiste installait un marché proposant au rabais des centaines d'articles sans grande utilité, bradés dans les rues de Bangkok. En 2004, à l'occasion de son exposition Quand les objets rêvent (Energie Storage) elle plaçait dans l'une des alcôves un jukebox, un distributeur de boisson, des canapés. Pour Surazi Kusolwong l'art est une fête, un moment de partage et de rencontres. Elle invite le public à participer à ces installations et privilégie un art relationnel tourné vers les dispositifs de communication. Dans ce contexte, l'art devient plus un lieu à vivre qu'un espace de contemplation. L'oeuvre se situe au

    163 Fig. #56

    164 Entretien entre Robert Milin et Jérôme Sans, Robert Milin, Palais de Tokyo, 2004

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    rapport interhumain qu'elle déploie. Comme un work in progress, elle prend différentes formes selon les situations. La flexibilité, le nomadisme sont les deux moteurs du processus de l'oeuvre. Processus que l'on retrouve aussi chez Tsuneko Taniuchi, présentée deux fois dans l'institution. Un jour d'été, l'artiste installe un stand à l'entrée de l'institution. Baptisé Tsuneko Troc165, cette installation précaire invite le passant à un échange. Sous la bannière « prends ce qui te plaît et laisse ce que tu veux », l'installation s'active dans avec l'interaction d'un public. À la frontière de l'étrange À dans une autre installation, l'artiste cuisinait des sushi à la merguez dans les espaces d'expositions du Palais de Tokyo À ses performances happent le spectateur dans des processus qu'ils n'ont pas choisis, toujours différents. Un événement, dit-elle, qui comporte « une part de naturel, une part d'improvisation sur un thème, et aussi une part de scénario, sans que la limite entre ces domaines soit absolument distincte166 ». Dans la lignée du théâtre d'intervention, les performances de Tsuneko Taniuchi et de Surazi Kusolwong sont connectée à la réalité la plus immédiate, figure le conditionnement social dans des apparitions fugitives, pour le temps de l'action.

    IV.3.c À Agir dans l'espace social

    Exit l'atelier, l'art pénètre la place publique pour mieux la questionner. Dans les escalators d'un centre commercial, un programme télé ou une boucherie hallal, les artistes interviennent au plus près des normes qui organisent notre société. En faisant l'éloge du paradoxal, ils y insufflent de l'anormalité, et soulagent l'ambiante morosité.

    Car à quoi bon produire des objets, les placer dans un musée pour ensuite demander au public de venir les contempler ? Et dans quelle mesure, si quand bien même quelqu'un daigne les regarder, peuvent-ils être vecteurs de ce que l'artiste a voulu signifier ? Puisqu'ils appellent une révérence sotte, faite de stupeur et de réflexes conditionnés, certains artistes ont dépassé l'idée de l'oeuvre en tant que matérialité. Ils ont délaissé le signe, l'intermédiaire d'une représentation, afin de

    165 Fig. #57

    166 Paul Ardenne, Art, le présent, op. cit.

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    pouvoir composer à partir de la réalité même. Et en forgeant leurs pratiques dans le champ social, ils anéantissaient la barrière qui séparait encore la vie de l'art.

    Alors que les pratiques in situ consistaient à produire une oeuvre en fonction du site où elle viendrait prendre place, l'art in socius peut être perçu comme la version plus aboutie et contemporaine, d'une prise en compte totale par l'artiste du réel. Ces artistes l'infiltrent, l'incorporent plus qu'ils ne le figurent. Ils transforment en expériences esthétiques les phénomènes les plus ordinaires de la vie quotidienne, abordent l'art comme un événement plutôt que comme un monument. Leurs actions prennent place à l'intérieur du corps social où ils utilisent tels des matériaux, les jeux d'intersubjectivités qui formalisent nos rapports aux autres. Présentées au Palais de Tokyo, voici quelques exemples de ces pratiques.

    Mathieu Laurette s'incruste sur les plateaux de jeux télés, participe à Tourner manège pour en montrer toute l'incongruité. Dans sa série des Apparitions, on le voit dans le public de toutes les émissions de variétés. À l'occasion de l'exposition collective Notre Histoire... Mathieu Laurette présentait la documentation d'un travail intitulé Les Produits remboursés167. Sans dépenser un sou, l'artiste se nourrit pendant trois mois uniquement avec des produits « satisfait ou remboursé ». Par la simple À mais systématique À mise en fonctionnement d'un dispositif publicitaire, Mathieu Laurette remet symboliquement en cause le système capitaliste. Ces actions dévoilent par un effet de miroir, l'image de la propre présence du spectateur. En les surlignant, l'artiste interroge ainsi les normes relationnelles, les usages comportementaux, les postures sociales. Invité à présenter ses travaux trois fois au Palais de Tokyo, Renaud Auguste Dormeuil vit quatre mois dans une tour-bureau de la Défense. Dans le monde des affaires, il crée au contact des consultants, performe au milieu de leurs réunions power point. Actes vifs et transitifs ces projets sont temporaires, impossible à représenter nulle part ailleurs sans en altérer le sens, précisément parce que le travail s'inscrit dans des circonstances qui tant sir le plan géographique que temporel impliquent des relations imprévisibles, donc non programmable.

    167 Fig. #58

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    Se basant sur l'anticipation des réactions, ces actions happent les spectateurs dans des processus artistiques qu'ils n'ont pas choisis. Comme composant central, s'extrait la volonté de lutter contre la standardisation des comportements. Car il ne s'agit plus de critiquer, c'est la société qui se disloque. Les artistes in socius, sans complexe vis-à-vis des aspects les plus dérisoires de la culture populaire, en agrandissent les détails pour leurs laisser le soin, par eux même de s'exprimer. Ils rejoignent en cela l'idée d'une « autonomie expressive du réel », théorisé par Pierre Restany. Achèvement du réalisme puisque leurs interventions interagissent avec la vie, ces artistes interviennent sur le vif, mettent en scène le présent même. Et quitte à focaliser l'événement en un temps et un espace circonscrit, non reproductible et par nature éphémère, ces actions ont le mérite d'établir une connexion franche entre l'oeuvre et son spectateur. L'art in socius renoue ainsi avec l'essence d'un art engagé. Il perturbe les relations humaines pour briser le formalisme dans lequel nous nous sommes installés. Et comme l'étonnement est propice à insuffler une nouvelle hygiène d'esprit, ces actions laissent aux spectateurs surpris, le terreau pour remettre en germe leurs pensées.

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    CONCLUSION

    Pour répondre d'une manière synthétique à la problématique qui anime le mémoire À Quelles sont les modalités de représentation des différents aspects de l'impermanence au sein de la programmation du Palais de Tokyo ? À rassemblons en guise de conclusion les trois aspects principaux que recouvre cette notion au sein de l'institution.

    Première modalité, des oeuvres statiques qui proposent dans le récit qu'elles mettent en place, un déplacement temporel, une incarnation du transitoire. Pour plus de précision, scindons en deux parties cette catégorie, division prenant compte des visées sur lesquelles la rhétorique de ces oeuvres repose.

    Pourrait être considéré comme lyrique la capacité d'entrevoir la vie sur ce qui la menace et en rétrécie la portée, la mort. Regrettant de ne pouvoir « jamais sur l'océan des âges, jeter l'ancre un seul jour168 », ces artistes usent de leur sensibilité devant l'impermanence du temps. Comme vu dans la première partie, les ruines de Michael Elmgreen & Ingar Draset, de Kay Kassan, les sculptures fragiles de Vincent Ganivet, Karsten Födinger, Sébastien Vonier, Yuhsin U. Chang, sont autant d'oeuvres qui anticipent l'usure à venir. Dans la même logique les vanités contemporaines d'Adel Abdessemed, Laurent Le Deunff, Bruno Peinado, Nicolas Juillard, Yoshihiro Suda, Tony Matelli, Gianni Motti, Urs Fischer, font prendre conscience au spectateur, par effet de rétroaction, de la fuite du temps, de la fin certaine.

    À côté de cette contemplation lyrique de l'impermanence du temps, d'autres oeuvres usent de l'expression de l'éphémère comme critique des gages d'éternelles jouvences qu'accompagnent souvent les discours commerciaux, politiques et sociétaux. Ces oeuvres, certes statiques dans leurs présences, incarnent aussi le passage d'un état à un autre, montrent l'éreintement de la matière pour signifier le caractère transitoire des possessions matérielles. Analysés dans le troisième chapitre À la critique de l'éternel À les travaux de

    168 Alphonse de Lamartine, « Le lac » in Méditation poétique, 1820

    91

    Christoph Büchel, Chen Zhen, Guillaume Paris, Wang Du, rappellent l'impermanence des biens, les mensonges des discours publicitaires et médiatiques. Mettant en doute l'idée de progrès technologique, son obsolescence à venir, les oeuvres de Daniel Dewar & Grégory Gicquel, Raphael Zarka, Eric Tabuchi, Luc Kheradmand, montrent comme des ruines, les restes hypothétiques qu'un archéologue du futur pourrait trouver en dépoussiérant les vestiges de notre temps. Et en rendant perceptible l'emprise de l'homme sur la nature, son dérèglement programmé et sa fragilité, Henrik Hâkansson et Tetsumi Kudo rendaient compte au Palais de Tokyo de l'impermanence dangereuse résultante du déséquilibre écologique.

    Seconde modalité de l'expression de l'impermanence du temps, la première partie du mémoire revenait sur l'idée de processus. En usant de matériaux pauvres, flexibles et périssables, les sculptures organiques de Michel Blazy proposent d'indexer à la matière, les fluctuations vitales correspondantes à la durée d'existence des médiums employés. Jamais tout à fait pareilles, ses oeuvres évoluent dans un déplacement interne aux surfaces. Pour montrer le transitoire, le fugitif, les environnements d'Arthur Barrio et de Mathieu Briand utilisent des matériaux légers et éphémères : poussière, sang, talc, café... Autant de matières qui rendent compte de l'impermanence, font perdre la conscience des référents temporels. L'imminence de la perte semble tout à côté, sa menace constante. Alors que Loris Gréaud, Tobias Rehberger figurent la marche du temps par des procédés lumineux, les travaux de Roman Signer, Arcangelo Sassolino, Zelvinas Kempinas usent de la mécanique pour figurer le mouvement. Donnant le sentiment que tout est transitoire, leurs oeuvres se meuvent dans l'espace par intermittences programmées, par succession de phases de réalité fragmentée, quitte comme chez Floriant Pugnaire & David Raffini, Kris Vleeschouwer, à s'autodétruire, ne laissant à terme que des résidus inertes de matière. Présentés au sein du mémoire, ces travaux évolutifs ont en commun de questionner la relation entre l'art et son immutabilité.

    La troisième et dernière modalité de l'expression de l'impermanence dans la programmation du Palais de Tokyo correspond au passage historique À au tournant des années 1970 À de la question « Qu'est ce que l'art ? » à la question « Quand y a-t-il art ? ». Ainsi, la quatrième partie du mémoire présentait l'imbrication

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    progressive dans l'oeuvre du temps de la vie de l'artiste, notamment avec l'exemple de Robert Malaval, de Bas Jan Ader et celui de Charlotte Posenenske, dont le retrait de la scène artistique est paradoxalement reconnu comme acte créatif. Reliés avec les performances de Marina Abramovich et d'Ana Mendieta, ces travaux prennent place dans une temporalité brève, donnée comme non-reproductible. Seule une documentation photographique, sonore ou filmique peut en rendre compte. Au côté d'un « art de l'attitude » - pour reprendre l'expression de Nicolas Bourriaud À d'un art de la performance, le temps de l'oeuvre joue aussi un rôle crucial dans l'art in situ. Présentant des vidéos de Robert Smithson, accordant une rétrospective au travail de Daniel Buren, le Palais de Tokyo mettait à l'honneur ces pratiques. Il en montrait aussi l'intégration muséale, notamment avec le travail de Katharina Grosse. Dans ce cas, l'exposition devient l'oeuvre et l'oeuvre l'exposition, brève de par nature. La quatrième partie du mémoire À de l'éphémère de l'objet à la fugacité de l'action À montrait aussi les aboutissants contemporains des pratiques juste énoncées. Présentant l'art in socius (esthétique relationnelle), notamment par les travaux de Matthieu Laurette, Alain Bublex, Robert Milin, Surasi Kusolwong, Tsuneko Taniuchi les interventions en prise avec le réel n'envisagent la production d'aucune oeuvre arrêtée. Vécu en fonction des aléas du temps, l'art vise ici l'enclenchement d'un processus intégré aux fluctuations de la vie.

    Phases sérielles séquencées qui impriment sur l'art la marque de l'impermanence, le temps est une matière qui offre de multiples prises, de nombreuses déclinaisons plastiques sur lesquelles l'artiste d'aujourd'hui greffe la rhétorique de son travail. Au travers du corpus d'oeuvre présenté, le mémoire a montré À par le prisme de la programmation du Palais de Tokyo À les enjeux et aboutissants contemporains des recherches portant sur la temporalité de l'oeuvre. Répondant à des visées différentes, ces recherches trouvent leur unité dans leur capacité à interroger le devenir de l'oeuvre, l'avenir de l'homme. Et en traitant du temps, ces travaux permettent un déplacement du rapport traditionnel que l'on peut entretenir avec lui, dans le but, bien souvent, de créer une complication, une gêne dans la manière dont nous le vivons d'ordinaire. En dépréciant l'idée de permanence statique À si ancrée dans l'esprit occidental À la figuration de la limite temporelle revient à contrecarrer les conceptions sur lesquelles reposent les leurs qui font fonctionner la société. Montrant toujours le passage d'un état à un autre, les oeuvres présentées démontrent le

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    mouvement permanent, le leur de stabilité. Et incitant à la prise de conscience du changeant comme donnée fondamentale du vivre, ces oeuvres montrent la friabilité de ce qui peut sembler si ancrer, donner l'occasion de constater la malléabilité de ce qui apparaît figé. En cela, le pessimisme qui au premier abord, a pu transparaître du corpus d'oeuvre présentée, reste à être relativisé.

    Notre époque voit chaque société humaine, qui avait confié aux religieux la tâche de construire la représentation de l'au-delà, peu à peu réfracter son discours sur la mort. Cachée, cette donnée fondamentale de la vie reste absente des débats, comme si elle était trop évidente pour devoir être exprimé. Affichant le transitoire comme partie constituante de la vie, le corpus présenté comblait le déficit de discours sur ce thème et affirmait l'existence comme belle car précaire, au sens où Nietzsche parle d'un « éphémère de l'impermanence acceptée.169 » Tel le danseur de la fin de Zarathoustra qui accélère ses pas après s'être rendu compte de l'inconsistance de l'existence, les oeuvres présentées tendent à prouver l'inadéquation des discours qui prennent appui sur la permanence, afin peut être, de montrer le chemin d'accès à un bonheur plus véritable. En montrant la fragilité, la caducité, la fin certaine, ces oeuvres nous réapprennent à parler de la mort, non pas dans une rengaine accablante mais dans une finitude acceptée qui pousse à vivre chaque instant plus intensément. Les installations de Christoph Büchel peuvent par exemple être perçues comme vecteurs d'idéaux au sens où elles appellent à un renversement des pratiques consuméristes, à une remise en question des gages de satisfactions colportés par le matérialisme. En montrant pêle-mêle le vieillissement à venir, son travail montre que le point d'ancrage de l'humain dans la vie doit nécessairement se trouver dans une autre optique.

    Comme le dégoût profond du langage incite le poète à hausser la qualité de son verbe, user de l'impermanence du temps est pour l'artiste, l'occasion de mettre en exergue son dédain pour l'oeuvre gageuse d'éternité. C'est une beauté toute éphémère qui s'y affirme, un gage d'honnêteté calqué sur les données du vivre.

    169 Cité dans Christine Buci-Glucksmann, Esthétique de l'éphémère, Op. cit.

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    100

    ANNEXE 1

    L'IDEE D'IMPERMANENCE DANS L'ART
    APPERCU HISTORIQUE

    Dans l'art, l'expression du fugitif, de l'éphémère, exprime la métamorphose plastique du rapport qu'entretient l'artiste à sa propre impermanence. Puisque la sensation d'impermanence présuppose la prise de conscience par l'artiste de la nature mortelle des êtres et des choses, l'idée d'éphémère traverse l'histoire de l'art. Il s'agit ici d'en donner un bref aperçu, afin de démontrer l'importance de cette idée, afin aussi de poser les bases théoriques sur lesquelles repose ce mémoire. Ce retour historique veut aussi tendre à prouver, alors que Marc-Olivier Wahler affirme vouloir « tourner le dos à l'histoire de l'art170 », qu'une analyse de la programmation permet, au niveau du champ sémantique des oeuvres exposées, de montrer une filiation entre création contemporaine et programme esthétique moderne.

    Comme toutes les choses sensibles, les belles choses ne durent pas. Lorsque Socrate discute avec le sophiste Hippias d'Elis, le premier lui demande ce qu'est la beauté, et Hippias de répondre, « Tu sauras donc, puisqu'il faut te dire la vérité, que le beau, c'est une belle jeune fille.171» La notion du beau est ici reliée à une apparition fugitive, à une image convenant à un lieu et à un moment déterminé, qui disparaîtra inéluctablement l'instant suivant. Il est aussi intéressant de noter la réticence de certains philosophes antiques à laisser une trace matérielle. Socrate, Diogène, Antisthène n'ont jamais formulé leurs pensés par écrit. Dans l'intellect, elles sont en permanence réactualisées par les expériences sensibles. La mise en pratique de ces idées prend place à un moment et dans un lieu déterminé.

    A l'opposé, la notion du beau classique repose sur une série de principes esthétiques immuables qui recouvrent des idées normatives que l'art aurait pour tache de décliner. En ce sens, la toile représente un lieu fermé où la beauté peut régner car figée, elle n'a plus prises aux circonstances du temps. Dans cette optique,

    170 « Marc-Olivier Wahler. L'art contemporain dans son champ élargi », Veronica Da Costa. Revue Mouvement, Juillet À Septembre 2009

    171 Platon, Hippias majeur

    101

    il ne saurait y avoir de sens, que par l'entremise d'une trace matérielle durable, sa pérennité étant le gage de sa viabilité.

    À partir du XVIIe siècle, notamment grâce aux efforts technologiques qui permettent sa mesure, « s'accentue la perception d'un temps réellement instantané.172 » Ces dires sont confirmés par Jean Starobinski, qui remarque qu'à la même époque, une césure s'opère au niveau des relations qui lient le beau à l'éternel.

    « On s'éloigne au XVIIe siècle de la conception d'un temps circulaire ou immobile, pour commencer à imaginer un temps irréversible.173 »

    Devant la prise de conscience de la fuite du temps, les artistes commencent à représenter l'éphémère. Une esthétique prend progressivement forme sur ce thème. Goethe, sans pour autant dire que la marque de l'éphémère fasse la beauté, eu l'idée que seul l'éphémère soit porteur du beau :

    « Pourquoi suis-je éphémère, ô Zeus ? dit la Beauté Je n'ai fait beau, dit Zeus, que le seul éphémère174 »

    Avec l'industrialisation croissante, le chemin de fer qui s'instaure, les mentalités du XIXe siècle commencent à percevoir le temps non plus dans sa linéarité homogène, mais comme une discontinuité fragmentée, comme une succession d'instants à intervalles irréguliers. Un parmi d'autres, le tableau Pluie, vapeur, vitesse (1844) de Turner illustre à merveille la mise en figure mobile du monde. Le temps passe d'une dimension de l'histoire à celle de l'instantané.

    En contact avec l'art et les philosophies de l'Extrême-Orient, les artistes européens se retrouvent puis s'inspirent du concept de l'impermanence, présent pour exemple dans le bouddhisme, dont il est l'une des idées clefs. Van Gogh collectionnera des estampes japonaises inspirées par le thème du ukiyo-e, dont la conscience du mouvement ininterrompu forme le clair de son concept spirituel. Magnifiées dans la

    172 Heinrich Wölfflin, Réflexions sur l'histoire de l'art, 1940

    173 Jean Starobinski, La Mélancolie au miroir, Julliard, 1989

    174 Goethe, « L'Amour, la rosée, les fleurs et la jeunesse » in Les Saisons, 1790

    102

    représentation du ressac de vague, ces images offrent une allégorie du temps insaisissable.

    À son tour, Baudelaire définit la modernité comme le passage d'un idéal du beau, extérieur à la prise du temps, à un beau impulsif, évolutif et changeant. Est moderne le culte du présent plus que de l'immuable, le culte du transitoire plus que de l'éternel. Le présent rentre dans le champ d'action, l'expression de l'impermanence venant la valoriser. En quête d'honnêteté vis-à-vis du réel, sa restitution s'impose dès lors comme l'un des enjeux de l'esthétique moderniste. Contre le beau normé, Baudelaire célèbre le fugitif et le transitoire. Dans Le peintre de la vie moderne, il loue les esquisses de Constantin Guy, car elles mettent en valeur l'éphémère de l'apparence. Cet article de L'Art romantique permet de faire un rapprochement entre l'expression de l'impermanence et les enjeux modernistes. Le poète écrit :

    « La modernité, c'est le transitoire, le fugitif, la moitié de l'art dont l'autre moitié est l'éternel et l'immuable. [...] Cet élément transitoire, fugitif, dont les métamorphoses sont si fréquentes, vous n'avez pas le droit de le mépriser ou de vous en passer. En le supprimant, vous tomberez forcément dans le vide d'une beauté abstraite et indéfinie.175 »

    Les peintres de la seconde moitié du XIXe siècle tentent de capter les changements fugitifs du ciel, les variations lumineuses qu'offrent les différentes heures du jour. Leurs peintures montrent la fugacité de l'instant, l'impermanence du temps. Ainsi, les études de Monet sur la cathédrale de Rouen, comme sa série sur les Nymphéas, révèlent la métamorphose incessante de la réalité, le caractère éphémère et relatif de l'apparence, de sa perception et des certitudes qui y prennent racine.

    Les mouvements artistiques du XXe affirment à leur tour la volonté de transfigurer le transitoire, de montrer le mouvement. « Le monde s'est enrichi d'une beauté nouvelle, la beauté de la vitesse » écrit Marinetti en 1909. Le poète promet d'abolir le temps et l'espace et de les remplacer par la vitesse perpétuelle et universelle,

    175 Charles Baudelaire, Le Peintre de la vie moderne, 1863

    103

    comme Hippias, d'aimer « la beauté d'une sensation ou d'une émotion en tant qu'elle est unique et destinée à s'évanouir immédiatement.176 »

    Marcel Duchamp aborde le problème de la représentation du mouvement, et se sert du cubisme et du futurisme pour créer un art dynamique. Dans son Nu descendant un escalier, il fait fusionner le concept de simultanéité futuriste, la restitution successive d'une action, saccadée comme sortant d'un objectif photographique, et le concept de simultanéité cubiste, qui représente latéralement le sujet, au même moment, des faces et du côté. Picabia proposera d'ailleurs le concept d'« instantanéisme ». Ces recherches trouveront un aboutissement dans la Roue de bicyclette de Duchamp, roue mobile, animée, « qui concrétise son message par le mouvement physique.177 »

    Les recherches sur le mouvement, le temps et les changements se font encore plus explicites au tournant des années 1960. La mondialisation entrainant une « culture des flux et des instabilités mondialisées178», ces pratiques accompagnent les bouleversements de la société. L'histoire de l'art du vingtième siècle opérerait ainsi le passage d'une évocation du mouvement à l'utilisation de cette impermanence comme espace d'élaboration de l'oeuvre. En d'autre terme, à l'évocation du temps que privilégie le classicisme, les artistes du )()(e siècle institue un rapport plus concret entre art et temps, y substituant plus volontiers une relation d'expérience. Ces pratiques peuvent êtres regroupés comme suit :

    D'un côté, des oeuvres dont la matérialité est empreinte d'instabilité. L'Arte Povera utilise des matériaux pauvres. Le Land Art, les pratiques in situ, inscrivent par le contexte où elles prennent place, les oeuvres dans des exigences de périssabilité. Déplaçant des énormes monticules de terre, Robert Smithson modèlent une spirale dans une crique. À la merci de l'eau, ce symbole de la fuite du temps s'érode inéluctablement.

    176 F.T. Marinetto, Manifeste futuriste, Le Figaro, 20 février 1909

    177 Pontus Hulten, La liberté substituve ou le mouvement en art, 1955

    178 Christine Buci-Glucksmann, Esthétique de l'éphémère, Galilée, 2003

    104

    De l'autre, dans la ligne sensible des performances dadaïstes d'Hugo Ball au Cabaret Voltaire, Nicolas Bourriaud nomme « art de l'attitude179 » ces interventions en prises directes avec le réel. Les performances interagissent dans le temps, prenant acte dans l'instant. Les happenings des actionnistes viennois, le mouvement Fluxus, le Body Art, inscrivent leurs pratiques dans l'éphémère, pour annuler les barrières qui séparent l'art de la vie. En exemple, John Cage s'accapare de la philosophie Zen. Lui rendant hommage, l'exposition Rolywholyover, organisée en 1995 au Gugghenheim Museum montrait les aboutissants de cette pratique. Pour rendre l'insaisissable, l'exposition changeait d'apparence chaque nouvelles journées.

    Il ne faut cependant pas perdre de vue, qu'un art de l'éphémère À un art où les oeuvres déploient dans leur autonomie, une action, un mouvement À n'a pu être rendu possible que par le développement des techniques permettant de le documenter. L'essor de la photographie, de la vidéo et des captations sonores ont permis, en enregistrant ses différentes phases de mutations, de rendre perceptible l'ensemble du cycle de vie de l'oeuvre. À la manière du tableau, objet fixe nécessaire aux impressionnistes pour exprimer le furtif, ces pratiques ont besoin d'archive pour exister.

    « La prise en compte du caractère éphémère des choses, ainsi que le souci de les sauvegarder pour l'éternité, est un des principaux moteurs de l'allégorie.180 »

    Puisque des moyens techniques cherchent à conserver dans des formes durables ses formes impermanentes, les oeuvres qui jouent sur l'éphémère sont remplies de paradoxe. En soi, cette documentation a permis d'accepter progressivement l'idée et la réalisation d'une oeuvre éphémère. Ne sont plus liées, la valeur et la persistance dans le temps, de sorte que le caractère éphémère de l'oeuvre d'art n'a plus la plus centrale importance.

    179 Nicolas Bourriaud, Formes de vie, op. cit.

    180 Walter Benjamin, Origine du drame baroque allemand, Flammarion, Paris, 1985

    105

    ANNEXE 2

    INVENTAIRE DES EXPOSITIONS
    DU PALAIS DE TOKYO

    A été ici rassemblé l'ensemble du programme d'exposition et certaines manifestations du Palais de Tokyo. Les événements complémentaires (conférence, privatisation, partenariat...) non directement reliés aux expositions, ont été volontairement retirés, afin de faciliter la lecture des tableaux.

    A été mis en gras les expositions qui font l'objet d'un développement dans le texte du mémoire.

    Liste des abréviations utilisées :

    DC : débat, conférence, table ronde PJ : projection

    PC : performance, concert

    MD : mode, design

    106

    2001

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    Type

    Commande public

    Projet Tokyorama 1

    Titre

    Drapeaux Pirates

    In Memory of the

    Unknowable Space

    Artistes

    Henrik Plenge

    Jakobsen

    Mark Themann

    Début

    01/06/2001

    01/05/2001

    Fin

    20/09/2002

    31/05/2001

    Evénements

    Chaque visiteur emporte onze fleurs étiquetées. En onze différents points déterminés

    par l'artiste (places et squares du quartier), chacun pose une fleur à l'endroit qu'il désire.

     
     
     
     
     

    La fleur qui n'est pas étiquetée est jetée dans la Seine depuis la passerelle Debilly en

    récitant un poème d'Octavio Paz.

    Projet Tokyorama 2

    Bernard Leprince

    Bernard Leprince

    06/06/2001

     

    Futur chef du restaurant du Palais de Tokyo, Bernard Leprince nous fait découvrir dans

    le quartier (Chaillot - George V - Montaigne) le dessous des cartes et des menus des

    Projet Tokyorama 3

    Je suis disponible

    Nadine Norman

    04/07/2001

     

    grands et moins grands restaurants.

    Suscitant des rencontres, Nadine Norman explore les relations intimes qui naissent

    Projet Tokyorama 4

    Renaud Auguste

    Renaud Auguste

    01/08/2001

    31/08/2001

    entre deux inconnus au cours de leur première entrevue.

    Projet Tokyorama 5

    Projet Tokyorama 6

    Dormeuil

    Tsuneko Troc

    Alain Bublex

    Dormeuil

    Tsuneko Taniuchi

    Alain Bublex

    01/09/2001

    01/10/2001

    30/09/2001

    31/10/2001

    Tsuneko installe un stand qui propose aux touristes de passage de laisser

    quelque chose en échange d'autre chose.

    Alain Bublex demande aux personnes

    Projet Tokyorama 8

    Alberto Baraya

    Alberto Baraya

    01/12/2001

    31/12/2001

    l'accompagnant de se charger de bagages. L'idée est d'introduire l'image du

    voyage, du transit dont on ne sait véritablement s'il s'agit de

    tourisme ou d'exode...

    Alberto Baraya distribue au musée de la Marine des petits documents réalisés par lui

     
     
     
     
     

    comprenant des textes et des images ayant une apparence trompeuse, faisant planer le

    107

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    2002

    Type

    Titre

    Artistes

    Début

    Fin

    Evénements

    Projet Tokyorama 9

    Eléonore de Montesquiou

    Eléonore de Montesquiou

    01/01/2002

    31/01/2002

    Buvez un café dans le quartier avec Eléonore de Montesquiou et parlez-lui d'un objet qui vous est cher...

    Elle en confiera ensuite votre description à un dessinateur de rue qui, à son tour, en produira une image.

    Commande Publique

    Les fenêtres de Beat Streuli

    Beat Streuli

    21/01/2002

    27/08/2006

     

    Exposition

    Personnelle

    Expo personnelle

    Le salon de Michael Lin/

    Le sol de Michael Lin

    Super(M)art

    Michael Lin

    Navin Rawanchaikul

    21/01/2002

    22/01/2002

    21/12/2002

    09/06/2002

    DC 02/02 Super curator et super artist ? Avec Eric Troncy, Hou Hanru, Stephen Nikolaev et Jérôme

    Sans DC 09/02 "La question du chef d'oeuvre à travers les âges" Avec Mathias Washek

    DC 16/02 Nouvelle institution ? Nouveau concept ? Avec Paul Ardenne, Isabelle Ballu, Ami Barak,

    Commande Publique

    Le programme Audiolab

    Laetitia Bénat, Curd Duca, Dorine Muraille (Julien

    22/01/2002

    21/04/2002

    Suzanne Crotter, Karim Ech-Choayby, Emmanuelle Huynh, Akiko Miki, Amiel Grumberg.

    DC 02/03 Voyager dans le temps Avec Norman Spinrad et Navin Rawanchaikul.

    DC 09/03 Entresort de l'art / Entresort dollar ?

    PC 06/04 Intervention sonore de Rupert Huber, puis de Alejandra & Aeron.

     
     

    Locquet), To Rococo Rot (Ronald Lippok, Robert

    Lippock et Stephan Schneider), Xavier Veilhan, David

    Artaud.

     
     

    PC 13/04 Concert électronique de Dorine Muraille, Performance visuelle et sonore de Rebecca

    Bournigault.

    Expo personnelle:

    Projet Tokyo Games

    Opniyama

    Le jeu d'arcade de Team cHmAn

    22/01/2002

    13/03/2002

    PC 20/04 Collectif Radio Mentale : Performance et Concert + To Rococo Rot

    PC 23/04 Monolake musique expérimentale de Robert Henke

    Commande Publique

    Le Jardin aux habitants de

    Robert Milin

    Robert Milin

    22/01/2002

     
     

    Commande Publique

    Expo personnelle

    Le Jardin sauvage de

    l'Atelier Le Balto

    Island of an Island

    Atelier Le Balto (Marc Pouzol, Laurent Dugua)

    Mélik Ohanian

    22/01/2002

    29/01/2002

    17/03/2002

    DC 22/01 Living Momento 1 Mélik Ohanian

    DC/PC 01/02 Living Momento 002 Présentation de l' association Segbolissa, qui collecte des livres

    pour le Senegal. Open Mic par Nadine Hounkpatin, organisatrice des Evenings of Poetry. intervenant :

    Dokhandeme Sound System, Jacques Yéchiazarian, Villy Kudsen.

    DC 15/02 Living Momento 003 Jacques Yéchiazarian interroge la place de la parole dans le quotidien et

     
     
     
     
     

    l'imaginaire.

    Expo personnelle

    Expo collective

    Loris Cecchini

    Exposition collective

    d'ouverture

    Loris Cecchini

    Virginie Barré, Christophe Berdaguer et Marie Péjus,

    Alain Declercq, Wang Du, Michael Elmgreen et Ingar

    Dragset, Naomi Fisher, Gelatin, Subodh Gupta, Kay

    29/01/2002

    29/01/2002

    31/03/2002

    21/04/2002

    PJ 10/02 Living Momento 004 Films de Villy Kudsen Erruption de Surtsey Island et Erruption de

    Vesbmann Island (extraits).

     
     

    Hassan, Alexander Györfi, Gunilla Klingberg, Surasi

    Kusolwong, Michel Majerus, Paola Pivi,Matthew

     
     
     

    108

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    2002 (Suite)

    Type

    Expo personnelle

    Exposition

    Personnelle

    Titre

    Monica Bonvicini

    Musée d'art contemporain

    africain : le Salon

    Artistes

    Monica Bonvicini

    Meshac Gaba

    Début

    29/01/2002

    29/01/2002

    Fin

    10/03/2002

    29/09/2002

    Evénements

    Tokyo Games à partir du 29/01 : Le jeu en ligne de

    PJ 07/03 Projection d' "Urgent", de Ghazel suivi d'un entretien entre l'artiste et

    Alexandre Pollazzon

    PJ 26/03 Projection de "My Parent's Garden" et "Perfect Day" de John Lovett et

    Alessandro Codagnone

     
     
     
     
     

    PJ 23/04 Projection de "Krystufekova", performance d'Elke Krystufek et

    Expo collective

    Projet Tokyorama

    10

    Aura

    Jacques Villeglé

    Thibault Montamat, Christophe Renard

    Jacques Villeglé

    03/02/2002

    16/02/2002

    28/02/2002

    présentation de "A territory to be mastered in the same as patagonia".

    PC Dès 17h, musique avec Chrysalide en guest live

    Jacques Villeglé, le fameux piéton de Paris, vous emmène faire le tour du

    quartier pour découvrir les richesses des affiches lacérées.

    DC 07/02 Rencontre avec Jacques Villeglé

    DC 16/02 Rencontre avec Jacques Villeglé

    DC 23/02 Rencontre avec Jacques Villeglé

    Projet Tokyorama

    Attention à la marche

    Eric Chevillard

    01/03/2002

    31/03/2002

    DC 28/02 Rencontre avec Jacques Villeglé

    Eric Chevilllard, écrivain, propose pendant tout le mois de mars une promenade

    11

     
     
     
     

    autour du Palais de Tokyo. A vous de retrouver les messages disséminés dans

    l'espace urbain et signalés sur le plan disponible à l'accueil du Palais de Tokyo.

    Expo personnelle

    Projet Tokyorama

    Celluloïd

    La méthode B

    Franck David

    Natasha Nisic

    30/03/2002

    01/04/2002

    28/04/2002

    30/04/2002

    Expo 18/04-25/04 A l'invitation de Franck David, la jeune artiste ng propose une

    installation intitulée "Waiting for the future"

    Promenade suivant le protocole du regard mis en place par le photographe

    12

     
     
     
     

    Bertillon, inventeur de l'anthropophotographie. Le promeneur disposera d'un

    minicasque qui, comme dans une visite commentée de musée, diffusera une

    Expo personnelle

    Qui perd gagne

    Pascale Marthine Tayou

    13/04/2002

     

    bande sonore où se mêleront instructions, archives sonores et commentaires.

    Expo personnelle/

    Sam

    Palle Torsson

    13/04/2002

     
     

    109

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    2002 (Suite)

     
     
     
     
     

    Type

    Projet Tokyorama 13

    Expo personnelle

    Titre

    Out-Sight / In-Sight

    Polders

    Artistes

    Helga Griffiths

    Tatiana Trouvé

    Début

    02/05/2002

    07/05/2002

    Fin

    31/05/2002

    16/06/2002

    Evénements

    CF http://www.palaisdetokyo.com/fr/prog/tokrama.htm#

    DC17/05/2002 Rencontre avec l'artiste. Présentation du catalogue.

     
     
     
     
     

    DC/PJ 29/05/2002Rencontre avec l'artiste. Projection du film réalisé sur Tatiana Prouvé

    dans le cadre de son exposition par ArtFilms. Nouvelle installation de l'exposition

     
     
     
     
     

    "Polders", modifiée par l'artiste.

    Expo personnelle

    Fat Car et Jakob-Jakob Fat

    Erwin Wurm

    28/05/2002

    08/09/2002

    DC 29/05 Rencontre avec l'artiste

    Expo personnelle

    Expo personnelle

    Projet Tokyorama 14

    Vue d'en haut

    Sympathy for the Devil

    Et si c'était à refaire

    Wolfgang Tillmans

    Kendell Geers

    Jota Castro

    01/06/2002

    01/06/2002

    01/06/2002

    15/09/2002

    08/09/2002

    Sondage : "les questions que j'aimerais que l'on me pose en tant que citoyen"

    PC 12/06 Première intervention aux Buttes-Chaumont

    PC 19/06 Seconde intervention

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    Expo personnelle

    Expo personnelle

    Le projet des Perméables

    Prix Picto 2002

    Laurent Moriceau

    Sofia Sanchez et Mauro

    27/06/2002

    29/06/2002

    25/08/2002

    14/07/2002

     
     
     

    Mongiello

     
     
     

    Projet Tokyorama 15

    Expo personnelle

    Expo collective

    Variations 1.0

    Hanayo

    Squats d'artistes : documents

    Alexandra Sa

    Hanayo

    09/07/2002

    18/07/2002

    10/09/2002

    31/07/2009

    15/09/2002

    02/10/2002

    PC 18/07 Concert par Hanayo & Paincake

    DC 14/09 "20 ans de squats d'artistes" Avec Mohamed benmerah, Harry Bellet, Jean

    Starck, Luis Pasina, Frédéric Dorlin-Oberland, Yabon Paname, Jean-Luc D'Asciano,

    Pierre Cornette de Saint-Cyr, Nicolas Bourriaud.

    DC 21/09 "Vivre en squat" Avec Emmanuelle Maunaye, Yann Renaud, Eric Doidy,

    Alexandre Archenoult, Luis Pasina, Marc Sanchez.

    DC 27/09 "Quel avenir pour les squats d'artistes?" Avec Fabrice Raffin, Pierre Manguin,

    Gaspard Delanoé, Florence Diffre, Rémy Beauvis, Chantal Cusin-Berche, Marc Sanchez.

    PJ 27/09 "Nous, Arzonautes" de Marie Decraene, "L'Usine Palikao" de René Licata", "Sur

     
     
     
     
     

    les pavés" de Jean-Robert Viallet

    Expo personnelle

    Cosmos

    Boris Achour

    10/09/2002

    13/10/2002

    DC 02/10 Discussion entre Jean-Yves Jouannais, Emilie Renard, Jean-Baptiste

     
     
     
     
     

    Thoret,Nicolas Bourriaud

    Expo personnelle

    Expo personnelle

    Collective Wishdream for Upper

    Class Possibilities

    The Essential Disturbance

    Plamen Dejanoff (expo

    Ed Templeton

    28/09/2002

    03/10/2002

     
     

    110

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    Expo

     
     
     
     
     

    Expo

     
     
     
     
     

    2002 (Suite)

     
     
     
     
     

    Type

    Expo

    Titre

    le jour la nuit le jour

    Artistes

    Louise Bourgeois

    Début

    08/10/2002

    Fin

    24/11/2002

    Evénements

    PJ 12/10 - 24/11 Projection de "C'est le murmure de l'eau qui chante" de Brigitte Cornand

    personnelle

    personnelle

    Expo

    Playground

    Maria Marshall

    22/10/2002

    17/11/2002

     

    Expo Collective

    Expo

    Topokosm, compte

    rendu

    Nicolas Moulin avec Christian Francelet,

    Olivier Gendre, Hervé Gio, Albane du

    23/10/2002

     
     

    personnelle

    Night Shift

    Lumière en prison

    dans le ventre de la

    Tobias Rehberger

    Rebecca Horn, avec Jacques

    Roubaud et Hayden Danyl Chisholm

    24/10/2002

    28/11/2002

    26/01/2003

    PJ 21/12 Projection films de Rebecca Horn "Berlin Exercises" (1975), "Buster's Bedroom"

    111

    2003

    Type

    Titre

    Artistes

    Début

    Fin

    Evénements

    Expo

    personnelle

    Les circonstances ne sontAgnès

    pas atténuantes

    Thurnauer

    11/01/2003

    28/02/2003

    DC 19/01 Visite d'atelier à Ivry en compagnie de Michaël Batalla.

    PJ Films experimentaux choisis par Philippe Alain-Michaud

    PC 05/02 "Laine sur Parquet", performance de Éric Martin / "Il n'y a qu'un pas d'Ivry à Tokyo", improvisation de Annabelle Pulcini et Myriam Lebreton, autour des Objets à danser conçus par Fabienne Denoual / "Opéra Isotherme", lecture de son texte par Véronique Pittolo accompagnée de Agnès Thurnauer et Jacques Sivan

    Expo

    personnelle

    Beauty Cabinet Prototype

    Ana Laura Alaez

    14/02/2003

    06/04/2003

    DC 01/03 Rencontre, "Art et Beauté : un corps recréé", débat autour de l'idée de beauté avec

    David Lebreton, sociologue, Orlan, Sylvie Mokhtari, historienne de l'art

    DC 15/03 Rencontre, "Comment s'élabore une beauté ?" Autour de professionnels de

    l'industrie cosmétique avec Yutaka Goto de Sisheido, Annie Ziliani de Novale Next

    DC 29/03 Rencontre, "Une histoire de la beauté" avec Dominique Paquet, philosophe

    Expo

    collective

    Hardcore - Vers un nouvel

    activisme

    A.A.A. CORP., Jota Castro, Shu Lea Cheang, Minerva Cuevas, Alain Declercq,Michel Dector Michel Dupuy, etoy.CORPORATION, Kendell Geers, Guerrilla Girls On Tour, Johan Grimonprez, Clarisse Hahn, Ocean Earth, Gianni Motti, Henrik Plenge Jakobsen, Anri Sala,

    27/02/2003

    18/05/2003

    PC 27/02 Performance de Henrik Plenge Jakobsen, thématique du feu, réalisée quatre fois.

    Performance de Minerva Cuevas "Ronald McDonald"

    Quentin Armand, artiste du Pavillon habille le personnel du Palais pour créer des "agents

    vecteurs du souci de l'Etat du bien être de tous et de la béatitude de chacun".

    Lucas Mancione, "Harmonies dissonantes" : Réalisation d'un cd à partir des commentaires de

    Jérôme Sans

    Nicolas Milhé, artiste du Pavillon, "Clairvoyance" : Transmission live des réactions des

    Expo

     

    Santiago Sierra, Sislej Xhafa

     
     

    habitants du 16° suite à l'ouverture factice d'un centre d'hébergement pour réfugiés.

    personnelle

    Superficial Resemblance

    Rivane Neuenschwander

    27/02/2003

    20/04/2003

     

    Expo

    personnelle

    Nasseville

    Pierre Ardouvin

    14/03/2003

    27/04/2003

     

    Expo

    collective

    The Wide Show

    Kyupi Kyupi (collectif) Yoshimasa Ishibashi

    19/03/2003

    11/05/2003

    18/03/2003 PC Cabaret : "Kyupi Kyupi Grand Kayo Show Super Mega Hits", projection,

    performance, musique, lumière.

    Expo

    personnelle

    We are the World

    Guillaume Paris

    17/04/2003

    25/05/2003

     

    Expo

    personnelle

    Waiting for God

    Tricky

    29/04/2003

    18/05/2003

     

    personnelle

    Expo

    PC

    Game is Over

    the rock electro clash party

    Lars Nilsson

    06/05/2003

    29/06/2003

    21/05/2003

    112

    2003 (Suite)

     

    Type

    Titre

    Artistes

    Début

    Fin

    Evénements

    Expo collective

    GNS (Global Navigation System)

    Franz Ackermann, Nathan Carter, Wim Delvoye, Dominique Gonzalez-Foerster, Thomas Hirschhorn, Laura Horelli, Pierre Huyghe, Pierre Joseph, Jakob Kolding, Matthieu Laurette, Mark Lombardi, Julie Mehretu, John Menick, Aleksandra Mir, Ocean Earth, Henrik Olesen, Kirsten Pieroth, Marjetica Potrc, Matthew Ritchie, Pia Rönicke, Sean Snyder, Stalker, Simon Starling + Le Pavillon

    05/06/2003

    07/09/2003

    DC 05/06 Conférence : "Voyage sur la via Egnatia" à propos des migrations est/ouest, avec Francesco

    Careri, Lorenzo Romito, Alex Valentino, Ana Janewski, Florian

    Aggalliu, Constantin Petcou, Doina Petrescu, Alain Guez, Francesco Sylos Labini, membre des

    collectifs "Stalker" et "ON/Observatoire Nomade"

    DC 06/06 Conférence : Pierre Huyghe, "Quelle type d'exploration peut-on mener aujourd'hui ?" DC 07/06 Rencontre : "L'art contemporain et la cartographie" avec Bernard Marcadé, commissaire et critique d'art indépendant, Judicaël Lavrador, journaliste, Pierre Joseph, artiste, Thomas Hirschhorn, artiste. Discussion animée par Nicolas Bourriaud.

    Expo collective

    Raccourcis (au Pavillon)

    Quentin Armand, Angela Detanico, Rafael Lain,

    Adriana Lara, Lucas Mancione, Emilie Renard, Jiri

    Skala, Johann van Aerden et Gabriela Vanga, Quentin

    Armand, Angela Detanico, Rafael Lain, Andreas

    Fogarasi, Adrian Lara, Lucas Mancione et Nicolas

    Milhé.

    0510612003

    1310712003

     

    Expo personnelle

    A Novel for life

    Fabien Verschaere

    08/07/2003

    07/09/2003

     

    Expo personnelle

    Silence Sonore

    Chen Zhen

    01/10/2003

    18/01/2004

    Divers 26/09 - 01/11 l'Espace Topographie de l'Art présente sept installations

    PC 01/10 - 05/10 performances en écho à l'oeuvre "Jue Chang (The Last Song) - Dancing

    Body/Drumming", avec le compositeur Tan Dun, le danseur et chorégraphe Huang Dou-Dou et les

    percussionnistes Haruka Fujii et David Cossin.

    DC 02/10 Table ronde "Chen Zhen, artiste guérisseur" autour du rôle de la médecine dans

    l'oeuvre de Chen Zhen, avec Chen Zhu, Thierry Davila et Mathias Haby

    Expo personnelle

    Action Restreinte

    Pierre Joseph

    01/10/2003

    23/11/2003

     

    (Salon du PdT)

    Spring 2003

    Michael Lin

    01/10/2003

    20/11/2003

     

    Expo personnelle

    Expo personnelle

    Le monde flottant

    Mathieu Briand

    04/12/2003

    18/01/2004

    DC 12/10 Présentation du catalogue monographique consacré à Mathieu Briand. Projection de

    "In process with Mathieu Briand" qui propose de découvrir "Le Monde Flottant" et "Derrière le

    Monde Flottant".

    Expo collective

    Transimages 2 : Mobilités

    ("Radio Shack #2")

    04/12/2003

    20/12/2003

     

    PC

    Laurent les Magnifiques

    Alain Bublex ("Awareness box"), Vincent Epplay

    Laurent Friquet et Laurent Moriceau

    19/12/2003 PC "Just the way you said goodnight to me" Laurent Friquet propose son anthologie personnelle de la

    musique du crépuscule... Avec la participation de Françoise Klein et sur des textes inédits de Patrick

    Bouvet. PC

    "Killing me softly" Laurent Moriceau aime créer des situations ambiguës... Invitation à déguster

    l'artiste. Projet réalisé avec la complicité de Michel Chaudun, chocolatier

    "Histoire du vidéo clip", une sélection historique proposé par Fabrice Brovelli et David Bois

    113

    2004

     
     
     
     
     
     

    Type

    Expo Collective/

    Le Pavillon

    Titre

    Code Unknown

    Artistes

    Ziad Antar, Pascal Beausse, Louidgi Beltrame, Davide Bertocchi, Sophie Dubosc, Johannes Fricke-Waldthausen, Shiho Fukuhara, Agnieszka Kurant, Ange Leccia, Christian Merlhiot, Gérald Petit et Jean-Luc Vilmouth + Guests : Saâdane Afif, Heike Baranowsky,

    Début

    12/02/2004

    Fin

    22/02/2004

    Evénements

    DC 12/02 Rencontre "N'Kisi Project" de Rupert Sheldrake biologiste et philosophe auteur de

    recherche sur la communication et la télépathie entre les espèces.

    Expo Collective

    Playlist

    Charles Lopez, Aimée Morgana, Rupert Sheldrake, Georg Tremmel

    Saâdane Afif, Jacques André, John Armleder, Carol Bove, Angela Bulloch, Cercle Ramo Nash, Clegg & Guttmann, Sam Durant, Pauline Fondevila, Bertrand Lavier, Rémy Markowitsch, Bjarne Melgaard, Jonathan Monk, Dave Muller, Bruno Peinado, Richard

    13/02/2004

    25/04/2004

    PJ 12/02 Projection de " 'This Pity She's a Fluxus Whore" de Catherine Sullivan

    PJ 17/02 Projection de "Phantom Release" de Slater Bradley

    PJ 20/02 Projection de "The Screensaver, the Hard-disk, the Disk" de Stefan Nikolaev

    PJ 24/02 Projection de "Baldessari Sings LeWitt" de John Baldessari

     
     

    Prince, Allen Ruppersberg, Samon Takahashi

     
     

    PJ 27/02 Projection de "Script" de John Baldessari

    Expo Personnelle

    Expo collective

    Daniel Pflumm

    Face à Face #1

    Daniel Pflumm

    Michel Blazy, Tetsumi Kudo

    13/02/2004

    03/03/2004

    28/03/2004

    11/04/2004

    PC 12/02 Présentation live de Furious, album de The Customers, groupe de Daniel Pflumm

     

    : Michel

    Blazy/Tetsumi

    Kudo

     
     
     
     

    Expo Collective

    Ninja Tune

    Jonathan More, Matt Black, Coldcut, Amon Tobin, Funki Porcini, DJ

    Vadim

    03/03/2004

    14/03/2004

     

    Expo

    Personnelle

    Yoshihiro Suda

    Yoshihiro Suda

    09/04/2004

    20/04/2004

     

    Le Pavillon

    Expo Collective

    Soirée "Loin du

    Mékong"

    Live (Exposition/perf ormances musicales/clips vidéo/DJ sets/Installation)

    Ange Leccia, Christian Merlhiot, Jean-Luc Vilmouth et Christelle

    Lheureux,

    AÏ, Tobias Bernstrup, Hsia-Fei Chang, Chicks on Speed, Carles Congost, Martin Creed, EchoparK, Vincent Epplay, erikm, Exchpoptrue, FMdD, Janine Gordon aka Jah Jah, Alexander Györfi, Hanayo, Richard D. James (aka Aphex Twin), Kyupi Kyupi, Arnaud Maguet, Daniel Pflumm, Prototypes, Gerwald Rockenschaub, DJ Spooky, Stereo Total, Annika Ström

    24/04/2004

    14/05/2004

    27/06/2004

    PJ Projection de trois films réalisés par l'équipe pédagogique du Pavillon, à l'occasion d'un

    workshop au Vietnam en janvier 2003.

    PC 13/05 LiveStep 01 Exposition : Chicks on Speed, Vincent Epplay, Alexander Györfi,

    Arnaud Maguet, Gerwald Rockenshaub, Daniel Pflumm et Sidney Stucki

    Performance : Chicks on Speed avec Kevin Blechdom

    Musique au TWINS : Sidney Stucki

    PJ 13/05 LiveClips 01 : "Clips Live", Projection des clips de Hsia-Fei Chang, Chicks on

    Speed, Carles Congost, Martin Creed, EchoparK, erikm, Exchpoptrue, Janine Gordon aka

    Jah Jah, Alexander Györfi, Hanayo, Arnaud Maguet, Prototypes, Stereo Total et Sidney

    Stucki. PJ 14/05 LiveClips

    (BETC Euro RSCG)

    10h : Christophe Fiat, La vérité est hallucinante 11h : Judith Revel, Biopolitique et puissance

    114

    2004 (Suite)

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    Type

    Expo Personnelle

    Titre

    Perpetuum Mobile

    Artistes

    Bruno Peinado

    Début

    14/05/2004

    Fin

    22/06/2004

    Evénements

    Expo Personnelle

    Expo Personnelle

    Quatre fois moins ou

    quatre fois plus ?

    Richard Kern

    Daniel Buren

    Richard Kern

    14/05/2004

    08/07/2004

    22/08/2004

    22/08/2004

    PJ 10/07 Films : Richard Kern, "The Hardcore Collection". Les films présentés : Right Side of

    My Brain (1984), You Killed Me First (1985), Manhattan Love Suicides (1985), Death Valley

    (1986), Fingered (1986), Submit To Me (1986), The Evil Cameraman (1986), Submit To Me

     
     
     
     
     

    Now (1987), X is Y (1990), Horoscope (1991), The Bitches (1992), My Nightmare (1993).

    Expo Personnelle

    Expo personnelle

    Energy Storage (Quand

    les objets rêvent)

    Wang Du Parade #4

    Surasi Kusolwong

    Wang Du

    09/07/2004

    17/09/2004

    19/07/2004

    02/01/2005

    DC 30/11 Table ronde : "Quelles critiques des médias?" Wang Du , Ignacio Ramonet (Le

    Monde diplomatique), Bruno Serralongue, artiste et Nicolas Bourriaud, modérateur.

    Expo Personnelle

    24h Foucault

    Thomas Hirschhorn (projet nuit

    blanche)

    02/10/2004

    03/10/2004

    DC 11/12 Visite à thème, "L'image en jeu", un voyage autour de notre rapport à l'image

    DC 12h : Marcus Steinweg, Sujet du dépassement de soi 13h : Philippe Artières, "Entrevoix" avec Jean-Claude Zancarini, Pascal Michon, Pierre Lascoumes...14h : Alessandro Fontana 15h : Peter Gente, Exposé pour un festival (2000) 16h : Jacob Rogozinski, "Je suis, moi, cette force sombre" Foucault et sa (non)lecture d'Artaud 17h : Alain Brossat, Plèbe, politique et événement 18h : Christina von Braun, L'hystérie des signes dans l'écriture, la religion, l'économie 19h : Alenka Zupancic, Jouissance Ex Machina 20h : Alexandre Constanzo, La part

    Expo Personnelle

    24h Foucault (suite)

     

    02/10/2004

    03/10/2004

    de la plèbe

    21h : Joseph Vogl, Le Social e(s)t l'Irrationnel 22h : Chantal Mouffe, Politique et Agon 23h :

    Wilfried Dickhoff, L'art de parer

    24h Foucault (Suite) 0h : Simon Critchley, Humiliation (Words with Music) / (Quelques Mots en musique) 1h : Sebastian Egenhofer, Forme et Subjectivité dans l'Art Moderne 2h : Bogdan Ghiu, Dead Zone ou de l'intolérable inutilité de l'être (un regard à distance de Foucault) 3h : Claudia Blümle, La vérité et les formes juridiques dans la peinture 4h : Manuel Joseph/Marc Touitou, Un Foucal, des Foucaux 5h : Meike Schmidt-Gleim, Du hasard de la rencontre avec le pouvoir 6h : Stephanie Wenner, Liberté inconsciente 7h : Mark von Schlegell, Poe ou la folie de la raison 8h : Frédéric Gros, Creuser de soi à soi la distance, non plus d'un secret impossible, mais d'une oeuvre de vie à accomplir 9h : Béchir Koudhai, la violence de l'inhumai

    115

    2004 (Suite)

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    Bottinelli

    Type

    Expo Personnelle

    Titre

    The Sick Opera

    Artistes

    Barthélémy Toguo

    Début

    13/10/2004

    Fin

    23/01/2005

    Evénements

    PC 12/10 Performance crée par Barthélémy Toguo et interprétée par le chorégraphe Romano

    Salon! Projet

    Special

    Expo Collective

    Salon Loris

    Cecchini

    Prix Altadis Arts

    Plastiques 2004-

    2005

    Loris Cecchini

    Artistes sélectionnés par François Piron : Juan Perez Agirregoikoa, Ibon Aranberri, Rafel G. Bianchi, Jordi Colomer, Carles Congost, Cristina

    13!10!2004

    20/10/2004

    02!01!2005

    31/10/2004

    DC 25/11 Rencontre : Philippe Dagen et Barthélémy Toguo

    PC 08/12 Performance : Caroline Chassany, plasticienne et chanteuse lyrique

    DC 19/12 Table ronde "Le voyage" avec Sébastien Pecques, Gérald et Jeanne Susplugas

    Lauréats français : François Curlet, Marie Péjus & Christophe Berdaguer, Hugues Reip Lauréats espagnols : Ibon Aranberri, Cristina Lucas, Jordi Ribes

     
     

    Lucas, Itziar Okariz, Antonio Ortega,

    Jordi Ribes, Pepo Salazar.

    Artistes sélectionnés par David G.

    Torres : Boris Achour, Stéphane

    Bérard, Delphine Coindet, François

     
     
     

    116

    2005

     
     
     
     
     
     

    Type

    Expo Personnelle

    Titre

    Texte court sur la possibilité

    de créer une économie de

    l'équivalence

    Artistes

    Liam Gillick

    Début

    26/01/2005

    Fin

    27/03/2005

    Evénements

    Programme d'événements "L'art au travail"

    PJ 29/01 Projection de "Classe de lutte" (Groupe Medvedkine de Besançon) et de "Lettre à

    mon ami Pol Cèbe" (Michel Desrois)

    PJ 05/02 Projection de "Nouvelle société 5, 6, 7" (Groupe Medvedkine de Sochaux) et de

    "Week-end à Sochaux" (Groupe Medvedkine de Besançon) DC
    12/02 Rencontre : "L'autogestion expliquée et l'autogestion appliquée" Nathalie Ferreira, économiste spécialiste de l'autogestion et de l'économie sociale, dialogue avec Pierre Manguin, artiste engagé dans le mouvement des squats d'artistes, autour d'une définition

    précise de ce type d'économie. DC

    Expo

    Exposition Universelle 1

    Jota Castro

    04/02/2005

    27/03/2005

    19/02 Table ronde "Ma petite entreprise" Réflexion autour du statut de l'artiste en temps

    qu'entrepreneur, avec Yann Toma, Nicolas Pinier et Guillaume Désanges.

    PC 03/02 Vernissage-Performance "Discrimination Day" sur les excès du délit de faciès

    monde politique actuel et des enjeux de l'art dans ce contexte

    Personnelle

     
     
     
     

    DC 09/02 Visite-Rencontre de Jota Castro sur les thèmes de la discrimination, de l'état du

    Expo Personnelle

    Pièce lumineuse

    Orlan, en collaboration

    avec Philippe

    Chiambaretta

    17/02/2005

    20/03/2005

     

    DC

    Expo personnelle

    Rencontre graphisme :

    Dimitri Bruni et Manuel

    Krebs de Norm

    "Jurassic Pork II"

    Alain Séchas

    17/02/2005

    31/03/2005

    05/06/2005

    DC Rencontre avec le duo de graphistes

    zurichois Norm, animée par Catherine de Smet

    DC 06/04 Rencontre avec Alain Séchas

    PJ 13/05 Film : "Les Chasses du Comte Zaroff"

    dans le cadre de 'La Lignée oubliée', une autre histoire de l'art (2/4)

    et l'écrivain et Frédéric Roux

     
     
     
     
     

    DC 18/05 Table ronde : "Rires et caricatures" avec Frédéric Valabrègue, historien de l'art PC 02/06 Performance : "Les jeux sont faits" par Sentimental Bourreau

    PC

    Nuits Sonores

     

    31/03/2005

     

    PC Programmation : Blue Baboon, Duracell, Harry and the nimrods, Chewbacca

    Chewbacca, Dj Aï.

    Expo personnelle

    All Cut Up

    Candice Breitz

    14/04/2005

    12/06/2005

    PJ 28/04 Projection : Soirée pointligneplan Candice Breitz. Présentation d'un ensemble de films de l'artiste : Aiwa to Zen (2003) ; Soliloquy Trilogy (2000) ; Becoming (2003). Suivie

    117

    2005 (Suite)

    Type

    Titre

    Artistes

    Début

    Fin

    Evénements

     

    The Final Cut

     

    25/05/2005

    05/06/2005

    PC 24/05 Elshopo, show sérigraphique avec dermes sensibles (Jérémie Cortial) /

    Expo Collective/

    Le Pavillon

     

    Nicolas Juillard, Anne-Laure Maison, Alice

    Guareschi, André Guedes, Benjamin Lee Martin,

     
     

    Thomas B. Kauk presents The Final Cut Party Mix

     
     

    Marcelline Delbecq, Mathieu Simon, Corentin

     
     

    PC 27/05 Performance musicale : "Last chance for a slow dance" Avec MADMACS-

     
     

    Hamel

     
     

    Benoit Delbecq, Chevreuil et Vincent Madame.

     
     
     
     
     
     

    Expo Collective

    WA - Surface

    Stéphane Dafflon et Olivier Millagou

    25/05/2005

    20/11/2005

     
     

    d'Autonomie

    Temporaire

     
     
     
     

    Expo Collective

    Translation

    Vanessa Beecroft, Ashley Bickerton, Cai Guo-

    23/06/2005

    18/09/2005

     
     
     

    Qiang, Maurizio Cattelan, Matt Greene, Mike

     
     
     
     
     

    Kelley, Jeff Koons, Liza Lou, Ningura Napurrula, Shirin Neshat, Takashi Murakami, Cady Noland, Chris Ofili, Gabriel Orozco, Yinka Shonibare, Shahzia Sikander, Fred Tomaselli, Joseph Kosuth, Kara Walker, Nari Ward, Christopher

     
     
     

    Expo personnelle

     

    Wool. Et la collaboration de M/M (Paris)

    Valéry Grancher

     

    13/11/2005

    DC 04/11 Rencontre : Autour des indiens Shiwiars. Avec Valéry Grancher, artiste ;

     

    Project

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    The Shiwiars

     

    01/09/2005

     
     
     
     
     

    (Phase 1 -

    hors murs)

    26/10/2005

     

    Pascal Kunchicuy, chef de la confédération shiwiar, Pascal

    Languillon, président de l'Association "Vers un autre tourisme" ; Jean-Claude Monod,

    philosophe, Jean-Patrick Razon, Survival International-France, Marc Sanchez, Anne-

    Expo personnelle

    Keep your distance

    Nadav Kander

    21/09/2005

    25/09/2005

    Christine Taylor du musée du Quai Branly.

    Exposition dans les espaces en cours d'installation.

     
     

    Robert Malaval

    08/10/2005

    08/01/2005

     

    Expo

    Robert Malaval,

     
     
     

    DC 19/10 NUITS MALAVAL : Table ronde, "La redécouverte d'artistes" Autour du

    personnelle

    kamikaze

     
     
     

    phénomène de la redécouverte d'artistes dans l'histoire de l'art. Avec Denys Riout,

    historien d'art, et Christophe Domino, critique d'art. + Performance d' Olivier Babin

     
     
     
     
     

    PC 28/10 Musique : Soirée vibrö avec Goran Vejvoda, Jopo Stereo, Dinahbird, OttoannA

     
     
     
     
     

    DC 16/11 Table ronde : "Transat-Marine-Campagne-Rock'n'Roll" ou les prémices de l'art

    Hubaut

     
     
     
     
     

    des années 90. Rencontre avec Gilles de Bure, Jean-Marc Poinsot, Joël Hubaut et

    Nicolas Bourriaud + Performance : "Toast pour Robert Malaval", performance de Joël

    PJ 07/12 NUITS MALAVAL 4 : Film "La brune et moi" de Philippe Puicouyoul. + Table ronde "Robert Malaval, peintre rock" Alin Avila, Claude Lévèque, Jean-Louis Pradel ,

    Dominique Tarlé, et Jérôme Sans.

    118

    2005 (Suite)

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    Type

    Titre

    Artistes

    Début

    Fin

     

    Expo personnelle

    Lyrics

    Saâdane Afif

    08/10/2005

     
     
     
     
     
     
     
     

    119

    2006

     
     
     
     
     
     

    Type

    Expo collective

    Titre

    Notre histoire...

    Artistes

    Adel Abdessemed, Boris Achour, Saâdane Afif, Kader Attia, Olivier Babin, Jules de Balincourt, Virginie Barré, Rebecca Bournigault, Mircea Cantor, Alain Declercq, Leandro Erlich, Laurent Grasso, Loris Gréaud, Kolkoz, Arnaud Labelle-Rojoux, Matthieu Laurette, Michael Lin, Mathieu Mercier, Jean- François Moriceau et Petra Mrzyk, Nicolas Moulin, Valérie Mréjen, Bruno Peinado, Bruno Serralongue,

    Début

    21/01/2006

    Fin

    07/05/2006

    Evénements

    20/01 - 12/02 le Pavillon installe "La Cabane" dans l'entrée du PdT. Programmation chaque jour différent : performances, interventions, présentation d'une oeuvre PC 21/01 - 22/01 Programmation d'artiste : séance d'hypnose, concert de couteaux, anniversaire d'artiste, conférence sur le Big-Bang, émissions musicales en direct, concerts, rencontres avec les artistes, danse du ventre. DC 23/01 Table Ronde "Emergence artistique et émergence économique" avec Jacques Attali, Christian de Portzamparc, Michel Pébereau, Daniel Sibony.DC/PC 24/01 Dialogue avec Jota Castro, Alain Declercq, Maroussia Rebecq et Agnès Thurnauer, performance surprise et Revue Tricatel proposée

    PJ

    La Cabane

    Nathalie Talec, Agnès Thurnauer, Barthélémy Toguo,

    Tatiana Trouvé, Fabien Verschaere, Wang Du

    Christelle Lheureux & Apichatpong Weerasethakul, Hsia-Fei Chang, Davide Bertocchi, Marie Maillard, Julien Loustau, Louidgi Beltrame, Seulgi Lee, Gerald Petit, Ziad Antar, Adriana Garcia Galan, Emilie Pitoiset, Fanny Adler, Adam Vackar, Angela Detanico & Rafael Lain, Koki Tanaka, Liliana Basarab, Isabelle

    21/01/2006

    12/02/2006

    par Bertrand Burgalat.

    PJ 20/01 #1: Christelle Lheureux et Apichatpong Weerasethakul, Ghost of Asia (2005) PJ

    21/01 #2 : Hsia-Fei Chang PJ 22/01 #3 : Davide Bertocchi PJ 24/01 #4 : Marie Maillard PJ 25/01 #5 : Julien Loustau PJ 26/01 #6 : Louidgi Beltrame PC 27/01 #7 : Seulgi Lee

    PC 28/01 #8 : Gerald Petit PC 29/01 #9 : Ziad Antar PC 31/01
    #10 : Adriana Garcia PJ 31/01 #11 : Emilie Pitoiset PJ 02/02 #12 : Fanny Adler PJ 03/02 #13 : Adam Vackar PC 03/02 #14 : Angela Detanico & Rafael Lain

     

    Hurloir/Montevideo-

    Cornaro, Benoît Maire, Wagner Morales, Gérald Petit,

    Mihnea Mircan.

     
     
     

    Expo Collective

    Le

    Paris

    Thierry Fontaine, André Lozano aka Loz, Elli Medeiros

    23/02/2006

    12/04/2006

    07/04-27/04 Session 1

    Expo Collective

    Faux Semblants

    Jean-François Chermann, Régine Cirotteau, Eric

    Maillet et Stani Michiels

    07/04/2006

    25/05/2006

    28/04-25/05 Session 2 Copacabana Cybercafé par Stani Michiels

    Expo Collective

    Expo

    Collective/ Le

    Pavillon

    Land Mark

    (Programme

    Tropico-Végétal)

    La Cabane Vidéo

    Jennifer Allora & Guillermo Calzadilla

    Mathilde Rosier, François-Xavier Courrèges, Fabiano Marques, Louidgi Beltrame, Christian Merlhiot, Melvin Moti, Angela Detanico et Raphaël Lain, Caecilia Tripp, Wagner Morales

    08/06/2006

    08/06/2006

    27/08/2006

    23/07/2006

    PJ 08/06-18/06 La Cabane Vidéo : Mathilde Rosier. Projection de "La Centrifuge" et de

    "Ballet pour une limace".

    PJ 20/06 - 25/06 La Cabane Vidéo : François-Xavier Courrèges. Projection de "Another

    Paradise"

    120

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    2006 (Suite

    Type

    Titre

    Artistes

    Début

    Fin

     

    Expo Personnelle

    A travers bois pour trouver la forêt

    Henrik Håkansson

    08/06/2006

     
     

    Expo Collective

    Grottes sauvages sur forêt cérébrale

    Gerda Steiner & Jörg Lenzlinger

    08/06/2006

     
     

    121

    2006 MOW

     
     
     
     
     
     

    Type

    Session

    Titre

    Artistes

    Début

    Fin

    Evénements

    Expo collective

    Cinq milliards

    d'années

    5'000'000'000

    d'années

    CHRISTIAN ANDERSSON / ARTISTS UNKNOWN / MICHEL BLAZY / MIKE BOUCHET / LORIS CECCHINI / PHILIPPE DECRAUZAT / MARCEL DUCHAMP / CEAL FLOYER / URS FISCHER / MARK HANDFORTH / JOACHIM KOESTER / VINCENT LAMOUROUX / LANG-

    14/09/2006

    14/09/2006

    31/12/2006

    31/12/2006

    PC 14/09 Ballet de mini-motos et concours

    international de sculpture à la tronçonneuse.

    (Présentation des oeuvres primées le 05/10)

     
     

    BAUMANN / TONY MATELLI / JONATHAN MONK / FRANÇOIS MORELLET / GIANNI MOTTI / CHARLES RAY

     
     
     

    Expo collective

    Une Seconde une

    année

    ALIGHIERO E BOETTI / FRANÇOIS CURLET / LARA FAVARETTO / GRAHAM GUSSIN / LEOPOLD KESSLER / KRISTOF KINTERA / JONATHAN MONK / FERNANDO ORTEGA / WERNER REITERER /

    14/09/2006

    31/12/2006

     

    Expo personnelle

    The Day Before -

    ROMAN SIGNER / KRIS VLEESCHOUWER Renaud Auguste - Dormeuil

    14/09/2006

    29/10/2006

     
     

    Star System

     
     
     
     

    Expo

    personnelle

    Expo personnelle

    Flying Tape

    Sans Titre (Rodage)

    Zilvinas Kempinas

    Fabien Giraud

    14/09/2006

    14/09/2006

    29/10/2006

    29/10/2006

     

    Expo personnelle

    A Day in Paris

    (Ghost Rider Goes

    Ghost Rider

    14/09/2006

    01/10/2006

     
     

    Crazy in Europe)

     
     
     
     

    Projet Permanent

    Les Fenêtres

    Olivier Mosset

    14/09/2006

     
     

    Expo personnelle

    Around

    Ulla Von Brandenburg

    05/10/2006

     
     

    Expo personnelle

    Kant Tuning Club

    Raphaël Siboni

    02/11/2006

     
     

    122

     
     
     
     
     
     
     
     

    2006 MOW

     
     
     
     
     

    Type

    Expo

    Titre

    Mécanique populaire

    Artistes

    Stéphane Vigny

    Début

    07/12/2006

    Fin

     

    123

    2007

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    Type

    Projet Special

    Titre

    Empty Walls - Just Doors

    Artistes

    Loris Cecchini

    Début

    11/01/2007

    Fin

    21/01/2007

    Evénements

    Expo Collective

    L'ICEBERG (XPLOITATION,

    LOVE, etc./volet I)

    &nbsp (collectif) : Rada Boukova, Aymeric Ebrard, Thomas

    Fontaine, Elodie Huet

    11/01/2007

    21/01/2007

     

    Expo Collective

    10 artistes, 10 jours, 10 vidéos

     

    11/01/2007

    21/01/2007

    Une sélection de vidéos réalisées par les étudiants des Beaux

    Arts et des Arts Décoratifs de Paris.

    Session

    M Nouvelles du monde renversé

     

    01/02/2007

    06/05/2007

     

    Expo Personnelle

    Post Patman

    Michel Blazy

    01/02/2007

    06/05/2007

     
     
     
     
     
     
     

    Expo Personnelle

    Joe Coleman (Exposition)

    Joe Coleman

    01/02/2007

    11/03/2007

     

    Expo Personnelle

    Double Bind

    Tatiana Trouvé

    01/02/2007

    11/03/2007

     

    Projet Special

    Etats (faites-le vous-même)

    Peter Coffin

    01/02/2007

    06/05/2007

     

    Projet Special

    Musique pour plantes vertes

    Peter Coffin

    01/02/2007

    11/03/2007

     

    Expo personnelle

    Avis de grand frais

    David Ancelin

    01/02/2007

    25/02/2007

     

    Expo Personnelle

    King Kong Addition

    Camille Henrot

    01/02/2007

    25/02/2007

     

    Expo Personnelle

    Expo Collective

    Expo Collective

    Setting Up and Taking Down

    From Beyond

    Granitoïd trans goa rascal Koï

    Koï,

    Shimenawa Mamba, Original

    peruvian carpet and digital

    Koki Tanaka

    Lucas et Jason Ajemian

    Daniel Dewar & Grégory Gicquel

    01/03/2007

    01/03/2007

    22/03/2007

    01/04/2007

    01/04/2007

    06/05/2007

    PC (Jeudis de M) 01/03 Into the void de Black Sabbath

     

    projects for musicians

     
     
     
     

    Expo Personnelle

    David Noonan

    David Noonan (exposition)

    22/03/2007

    06/05/2007

     

    Expo collective

    Unités élémentaires

    Bernadette Genée et Alain Le Borgne

    05/04/2007

    29/04/2007

    PC 05/04 Un groupe de légionnaires chantent a capella des

     
     
     
     
     

    chants de marche.

    Expo Personnelle

    Programme de gouvernement

    Adriana Garcia Galan

    03/05/2007

    03/06/2007

     

    Expo Collective

    Session

    Monument en sucre

    La Marque noire

    Lonnie Van Brummelen & Siebren De Haan

    03/05/2007

    24/05/2007

     
     

    124

    2007 (Suite)

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    Type

    Expo

    Collective

    Expo Collective

    Titre

    Before (Plus ou

    moins)

    Bastard Creature

    Artistes

    Vito Acconci, Kenneth Anger, Nancy Holt, Robert

    Smithson, Jane Crawford, Robert Fiore, Donald Judd,

    Frank Stella, Sturtevant, Andy Warhol.

    Richard Aldrich, Cinema Zero, Gardar Eide Einarsson,

    Début

    24/05/2007

    24/05/2007

    Fin

    25/07/2007

    25/05/2007

    Evénements

     
     

    Amy Granat, Richard Kern, Jutta Koether, Michael Lavine, Chuck Nanney, Amy O'Neill, Mai-Thu Perret, Blair Thurman, Banks Violette, Elizabeth Valdez, Andy Warhol

     
     
     

    Expo Collective

    Versus (Session

    1)

    Promotion 2006-2007 du Pavillon : Alex Cecchetti, Duvier Del Dago Fernandez, Mati Diop, Manu Laskar, Jaime Lutzo, Cova Macias, Denis Savary, Jean Luc Vincent. Sous la dir. D'Alain Declercq.

    07/06/2007

    17/06/2007

     

    Expo Collective

    Versus (Session

    2)

    Promotion 2006-2007 du Pavillon : Alex Cecchetti,

    Duvier Del Dago Fernandez, Mati Diop, Manu Laskar,

    Jaime Lutzo, Cova Macias, Denis Savary, Jean Luc

    21/06/2007

    01/07/2007

     
     
     
     

    Vincent. Sous la dir. d'Alain Declercq.

     
     
     

    Expo

    Personnelle

    Expo Collective

    Expo hors

    murs

    Inaccessibilité et

    connecteurs

    hiérarchiques

    Get Lost

    Château de

    Tokyo

    Lucas Lenglet

    Claire Fontaine (duo)

    Michel Blazy, Philippe Decrauzat, Daniel Dewar &

    Grégory Gicquel, Renaud Auguste-Dormeuil, Fabien

    05/07/2007

    05/07/2007

    03/08/2007

    26/08/2007

    26/08/2007

     
     
     

    Giraud & Raphaël Siboni, Amy Granat, Mark

     
     
     

    125

    2007 (Suite)

     
     
     
     
     
     

    Type

    Expo

    Collective

    Titre

    The Third Mind

    Artistes

    RONALD BLADEN · LEE BONTECOU · MARTIN BOYCE · JOE BRAINARD · VALENTIN CARRON · VIJA CELMINS · BRUCE CONNER · VERNE DAWSON · JAY DEFEO · TRISHA DONNELLY

    · URS FISCHER · BRUNO GIRONCOLI · ROBERT GOBER · NANCY GROSSMAN · BRION GYSIN AND WILLIAM S.

    Début

    27/09/2007

    Fin

    01/03/2008

    Evénements

    PC 27/09 Cut-Ups : Sélection de musique par Vincent Epplay

    et Samon Takahashi toute la soirée du vernissage.

     
     

    BURROUGHS · HANS JOSEPHSOHN · TOBA KHEDOORI · KAREN KILIMNIK · EMMA KUNZ · ANDREW LORD · SARAH

     
     
     
     
     

    LUCAS · HUGO MARKL · CADY NOLAND · LAURIE PARSONS · JEAN-FRÉDÉRIC SCHNYDER · JOSH SMITH · PAUL THEK · ANDY WARHOL · REBECCA WARREN · SUE WILLIAMS

     
     
     

    Expo

    Expo

    Personnelle

    Local technique

    Where I lived, and

    Frédéric Pradeau

    Oscar Tuazon

    05/10/2007

    09/11/2007

     
     

    Expo

    Medio Dìa - Media

    John Armleder, Renaud Auguste-Dormeuil, Philippe Decrauzat,

    10/11/2007

    30/12/2007

    DC 07/12 "Recoleta", Séance consacrée à l'exposition, au

    126

    2008

     
     
     
     
     
     

    Type

    Expo Collective

    Titre

    Medio Dìa - Media

    Artistes

    John Armleder, Renaud Auguste-Dormeuil, Philippe Decrauzat,

    Début

    10/01/2008

    Fin

    02/03/2008

    Evénements

     

    Noche (Chalet de

    Tokyo)

    Fischli & Weiss, Lucio Fontana, Douglas Gordon, Fabrice Gygi,

    Carlos Herrera, Jorge Macchi, Mathieu Mercier, Philippe Parreno,

     
     
     
     
     

    Bruno Peinado, Tatiana Trouvé.

     
     
     

    Expo personnelle

    Cairn

    Gyan Panchal

    08/02/2008

    02/03/2008

     

    Exposition

    personnelle

    Expo personnelle

    Expo Collective

    Cellar Door

    Polka dot

    Pavillon 7

    Loris Gréaud

    Marc Geffriaud

    Avec : aiPotu (Andreas Siqueland / Anders Kjellesvik), Meris Angioletti,

    Jose Arnaud, Gaëlle Boucand, k.g. Guttman, Niklas Goldbach, Romain

    14/02/2008

    06/03/2008

    12/03/2008

    27/04/2008

    16/03/2008

     

    Le Pavillon

     

    Kronenberg, Charlotte Moth, Jorge Satorre, Stéphane Vigny, et Ange

    Leccia. Commissaire : Judicaël Lavrador.

     
     
     

    Expo personnelle

    Expo Collective

    Goldfingia

    Medio Dìa - Media

    Emmanuelle Lainé

    John Armleder, Renaud Auguste-Dormeuil, Philippe Decrauzat,

    03/04/2008

    13/04/2008

    27/04/2008

    27/04/2008

    DC 07/12 "Recoleta", Séance consacrée à l'exposition, au

     

    Noche (Chalet de

    Tokyo)

    Fischli & Weiss, Lucio Fontana, Douglas Gordon, Fabrice Gygi,

    Carlos Herrera, Jorge Macchi, Mathieu Mercier, Philippe Parreno,

     
     

    Bureau des médiateurs.

     
     

    Bruno Peinado, Tatiana Trouvé.

     
     
     

    Expo

    personnelle

    Dump

    Christoph Büchel

    29/05/2008

    24/08/2008

     

    Expo

    personnelle

    Würsa (à 18 000 km

    de la Terre)

    Daniel Firman

    29/05/2008

    24/08/2008

     

    Expo personnelle

    Last Manoeuvres in

    the Dark

    Fabien Giraud & Raphaël Siboni

    29/05/2008

    24/08/2008

     

    Expo

    personnelle

    Time Between

    Jonathan Monk

    29/05/2008

    24/08/2008

     

    Expo

    Afasia

    La ligne dure

    Arcangelo Sassolino

    29/05/2008

     
     

    127

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    2008 (Suite

     
     
     
     
     

    Type

    Expo

    personnelle

    Expo Collective

    Titre

    Inside the White Cube

    (Expanded Editions)

    You talking to me

    Artistes

    Yann Serandour

    Lina Jabbour, Carole Manaranche

    Début

    03/07/2008

    03/07/2008

    Fin

    24/08/2008

    24/08/2008

    Evénements

    Expo Collective

    Expo collective

    Medio Dìa - Media Noche

    (Chalet de Tokyo)

    Château de Tokyo, Palais

    John Armleder, Renaud Auguste-Dormeuil, Philippe Decrauzat, Fischli & Weiss, Lucio Fontana, Douglas Gordon, Fabrice Gygi, Carlos Herrera, Jorge Macchi, Mathieu Mercier, Philippe Parreno, Bruno Peinado, Tatiana Trouvé.

    Etienne Bossut, Jeremy Deller, Dewar et Gicquel, Daniel Firman, Urs

    07/08/2008

    07/09/2008

    31/08/2008

    17/11/2008

     
     

    de Fontainebleau

    Fischer, Luca Francesconi, Roman Signer et Ceal Floyer, Fabrice Gygi,

     
     
     
     
     

    Henrik Plenge Jacobsen, Jonathan Monk, Gianni Motti, Werner

     
     
     
     
     

    Reiterer, Arcangelo Sassolino, Unabomber...

     
     
     

    Expo collective

    Banderoles

    Jeremy Deller, Ed Hall

    25/09/2008

    18/01/2009

     

    Expo collective

    Expo collective

    Folk Archive

    Les débuts du rock en

    France

    Jeremy Deller, Alan Kane

    Jeremy Deller, Marc Touché

    25/09/2008

    25/09/2008

    18/01/2009

    18/01/2009

     

    Expo collective

    Expo collective

    Son Z

    "Tout ce qui avait solidité et

    Andreï Smirnov, Matt Price, avec l'aide de Christina Steinbrecher

    Jeremy Deller, Scott King

    25/09/2008

    25/09/2008

    18/01/2009

    18/01/2009

     
     

    permanence s'en va en

    fumée"

     
     
     
     

    Expo personnelle Expo personnelle Expo collective

    No Show

    La géométrie (toucher

    Cordélia)

    Carte blanche à

    l'association DCA "Fiac

    Cinéma"

    Melvin Moti

    Benoît Maire

    « IV » par Andrea Bruciati: Mounir Fatmi, Arnaud Maguet, Alice Anderson,

    Antoinette Ohannessian, Emre Hüner, Gail Pickering, Markus Schinwald,

    Bettina Hutschek.

    « Peur et désir » par Bettina Steinbrügge : Mounir Fatmi, Arnaud Maguet,

    Alice Anderson, Antoinette Ohannessian, Emre Hüner, Gail Pickering,

    Markus Schinwald, Bettina Hutschek.

    « De A à Y » par d.c.a : A Constructed World, Neal Beggs, Simon

    26/09/2008

    26/09/2008

    06/11/2008

    26/10/2008

    29/10/2008

    30/11/2008

     

    128

     
     
     
     
     
     

    2008 (Suite

    Type

    Expo collective

    Titre

    Carte blanche à

    Artistes

    Grace Ndiritu, Marion Boquet-Appel, Marie Preston, Giasco Bertoli, Ilanit Illouz,

    Début

    06/11/2008

    Fin

    30/11/2008

    Evénements

     

    l'association TRAM

    "Hospitalités"

    STATION

    Seulgi Lee, A Constructed World, Jan Kopp, Régis Perray, Lydie Jean-Dit-

    Pannel, Stéphane Pichard, Dominique Petitgand, Marie-Jeanne Hoffner, Lionel

    Monier, Eva Keil, Denis Savary, Daniela Franco, Diego Sarramon, Edouard

     
     
     
     
     

    Sautai, Bertille Bak, Vincent Meessen & Adam Leech, Kimsooja, Kolkoz, Delphine Kreuter, Anne Deguelle, Charlotte Moth, Nicolas Boone & Johann Van

    Aerden, Katinka Bock.

     
     
     

    129

    2009

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    Type

    Titre

    Artistes

    Début

    Fin

    Evénements

    Expo Personnelle

    Abandon

    Tony Matelli

    09/01/2009

    01/02/2009

     

    Expo Personnelle

    Sans titre

    (Melancholia)

    Dominique Blais

    06/02/2009

    01/03/2009

     

    Expo Personnelle

    Expo Personnelle

    Color Suite

    Chizhevsky

    Etienne Chambaud

    Micol Assaël

    06/02/2009

    12/02/2009

    01/03/2009

    03/05/2009

     
     

    Lessons

     
     
     
     

    Expo Personnelle

    Expo Personnelle

    Ceal Floyer

    Exposition

    Haarp

    Ceal Floyer

    Laurent Grasso

    12/02/2009

    12/02/2009

    03/05/2009

    03/05/2009

     

    Expo Personnelle

    Exposition

    Roman Signer

    12/02/2009

    03/05/2009

     
     

    Roman Signer

     
     
     
     

    Expo Personnelle

    Expo collective

    Un ensemble

    Expanded

    Mathilde Du Sorbet

    Florian Pugnaire et David Raffini

    06/03/2009

    06/03/2009

    29/03/2009

     

    Expo Personnelle

    Expo Personnelle

    Replica

    Une haine sans

    Bettina Samson

    Clément Rodzielski

    02/04/2009

    02/04/2009

     
     

    Projection

    Carte blanche à

     

    16/04/2009

     

    PJ d'une sélection de films et de vidéos réalisés et

    130

    2009 (Suite)

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    Type

    Projet Special

    Titre

    Nomiya

    Artistes

    Début

    01/07/2009

    Fin

    01/03/2011

    Evénements

    Une oeuvre de Laurent Grasso sur le toit du Palais de

    Tokyo soutenue par Electrolux

    Expo Collective/

    Le Pavillon

    Le plan

    méthodique de F.

    Le Play

    Pedro Barateiro, Emma Dusong, Isa Griese,

    Louise Hervé et Chloé Maillet, Matteo Rubbi,

    Axel Straschnoy, Iris Touliatou, Gilles

    02/07/2009

    16/08/2009

    PC 16/07 Le jeu de l'exposition universelle, performance

    de Louise Hervé et Chloé Maillet. Les artistes ont édité

    un scénario de semi-réel sous la forme d'un livre de

    Expo Collective

    A man on the

    moon

    Toutevoix. Avec la participation de Thomas

    Lannette

    Les astronautes des missions Mercury,

    Gemini, Apollo.

    05/07/2009

    20/09/2009

    poche.

    Expo

    Rivières/ Vitrinne

    Vincent Ganivet

    07/07/2009

    25/07/2009

     

    Personnelle

    des Galeries

    Lafayette

     
     
     
     

    Réondeur

    Music For

    Nicolas Juillard

    01/09/2009

    30/09/2009

     

    Expo

    Masses #2

    Châlets de Tokyo

    Vincent Ganivet

    03/09/2009

    25/09/2009

     

    personnelle

    Expo Personnelle

    Same time

    Julien Dubuisson

    03/09/2009

    20/09/2009

     

    Expo Personnelle

    Incomplete

    Hugo Pernet

    03/09/2009

    20/09/2009

     

    Expo Personnelle

    Basse Def

    Julien Dubuisson

    14/09/2009

     
     

    Expo Personnelle

    Postface

    Hugo Pernet

    14/09/2009

     
     

    131

    2009 (Suite)

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    Type

    Session/

    Exposition

    collective

    Expo Collective

    Titre

    Chasing

    Napoleon

    Naoshima :

    Artistes

    Dave Allen, Micol Assaël, Christoph Büchel, Dora Winter, Gardar Eide Einarsson, David Fincher, Tom Friedman, Ryan Gander, Robert Gober, Robert Kusmirowski, Paul Laffoley, Tony Matelli, Ola Pehrson, Charlotte Posenenske, Hannah Rickards, Dieter Roth, Tony Smith, John Tremblay

    Les architectes Tadao Ando, Kazuyo Sejima, Ryue Nishizawa et les artistes

    Début

    15/09/2009

    23/09/2009

    Fin

    17/01/2009

    08/10/2009

    Evénements

    DC 23/09 Conférence avec les

     

    Archipel d'art

    et

    Shinro Ohtake, Hiroshi Sugimot.

     
     

    architectes Kazuyo Sejima, Ryue

    Nishizawa, Hiroshi Sambuichi, Patrick

     

    d'architecture

     
     
     

    Bouchain et Soichiro Fukutake, président de la Fondation Naoshima Fukutake Art Museum, Francis Rambert, directeur de l'Institut français

    Expo

    A la playa

    Antoine Dorotte

    03/12/2009

     
     

    132

    2010

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    Type

    Titre

    Artistes

    Début

    Fin

    Evénements

    Exposition

    personnelle

    Exposition

    Dead End

    Le Corso

    Marion Tampon-Lajarette

    Bertrand Dezoteux

    07/01/2010

    07/01/2010

    31/O1/2010

    31/O1/2010

     

    personnelle

    PJ/ Jeudis de

    pointligneplan

    Erik Bullot, Volkeir Schreiner, Michael Snow, Dominique Gonzalez

    07/01/2010

     

    PJ Films expérimentaux et films d'artistes croisant

    Chasing

    Napoleon

     

    Foerster, Isabelle Prim et Ludovic Burel, Marine Hugonnier.

     
     

    géographie, technique et disparition. Présenté par Eric

    Bullot.

    Répondeur

    Chasing Pergola

    Jens Brand

    01/02/2010

    28/02/2010

     

    Exposition

    personnelle

    Perspective cavalière

    Isabelle Frémin

    04/02/2010

    28/02/2010

     

    Exposition

    personnelle

    Fertilité du Diable

    Benjamin Swaim

    04/02/2010

    28/02/2010

     

    Exposition personnelle Exposition personnelle Exposition

    Monsieur

    Retrospective

    (A list of which I

    Valentin Carron

    Charlotte Posenenske

    Raphaël Zarka

    19/02/2010

    19/02/2010

    19/02/2010

    23/05/2010

    23/05/2010

    23/05/2010

     

    personnelle

    Exposition

    personnelle

    could tediously

    extend ad infinitum)

    Re/Search: Bread and Butter with the ever present Question of How to define the difference between a Baguette

    Serge Spitzer

    19/02/2010

    16/01/2010

     
     
     
     
     
     
     

    133

    2010 (Suite)

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    Type

    Titre

    Artistes

    Début

    Fin

    Evénements

    Exposition

    personnelle

    Comme on fait disparaître

    les miroirs

    Emilie Pitoiset

    04/03/2010

    28/03/2010

     

    Exposition

    Mes plans sur la comète /

    Emmanuel Régent

    04/03/2010

    28/03/2010

     

    personnelle

    Drifting away

     
     
     
     

    Exposition

    personnelle

    Postvsnow

    Luc Kheradmand

    04/03/2010

    28/03/2010

     

    Exposition

    personnelle

    Exposition

    Squall Lines

    Constellation basse

    Franziska Furter

    Florian Fouché

    01/04/2010

    01/04/2010

    02/05/2010

    02/05/2010

     

    personnelle

    Exposition

    Reworks

    Alexis Guiller

    01/04/2010

    02/05/2010

     

    personnelle

    PC (Jeudis de

    Pergola)

    Exposition

    Autour de Charlotte

    Posenenske

    Off

    Jean-Marie Blanchet

    15/04/2010

    06/05/2010

     

    DC Rencontre avec Paul Maenz, collectionneur

    berlinois et Renate Wiehager, historienne de

    l'art et directrice de la Daimler Collection

    Expo Collective

    Coulis de framboises

    Collectif Kit : Julie Béna, Laurence De Leersnyder, Daphné Navarre. Avec :

    Miriam Cahn, Julia Cottin, Noël Dolla, Julien Dutertre, Yann Gerstberger,

    13/05/2010

     
     

    134

    2010 (Suite)

    Type

    Titre

    Artistes

    Début

    Fin

    Evénements

    Session/ Expo

    Collective

    Dynasty

    Gabriel Abrantes et Benjamin Crotty, Farah Atassi, Laëtitia Badaut Haussmann, Gaëlle Boucand, Mohamed Bourouissa, Guillaume Bresson, Pierre-Laurent Cassière, Yuhsin U. Chang, Stéphanie Cherpin, Pauline Curnier Jardin, Mélanie Delattre-Vogt, Alain Della Negra et Kaori Kinoshita, Dewar et Gicquel, Bertrand Dezoteux, Rebecca Digne, Antoine Dorotte, Julien Dubuisson, Vincent Ganivet, Fabien Giraud et Raphaël Siboni, Camille Henrot, Louise Hervé et Chloé Maillet, Armand Jalut, Laurent Le Deunff, Benoît Maire, Vincent Mauger,

    11/06/2010

    05/09/2010

    PC 10/06 After-party avec un DJ set de

    KRIKOR et JOAKIM sur la terrasse.

     
     

    Robin Meier et Ali Momeni, Théo Mercier, Nicolas Milhé, Benoît-Marie Moriceau, Jorge Pedro

    Núñez, Masahide Otani, Florian Pugnaire et David Raffini, Jean-Xavier Renaud, Raphaëlle

     
     
     
     
     

    Ricol, Bettina Samson, Alexandre Singh, Oscar Tuazon et Eli Hansen, Cyril Verde + Mathis

    Collins, Duncan Wylie, Chen Yang

     
     
     

    Expo Collective

    La leçon de l'histoire

    Curator : Joseph Backstein

    12/06/2010

    27/06/2010

    Présentation des travaux d'une trentaine

    d'artistes russes contemporains.

    Expo Collective/ Le

    Ce monde

    Andrea Acosta, Haizea Barcenilla Garcia, Patrick Bock, Davide Cascio, Ramiro Guerreiro,

    27/06/2010

    19/09/2010

    PC 01/07 Les sept artistes et les deux

    Pavillon

    impitoyable

    Anthony Lanzenberg , Jorge Pedro Nùñez, Florence Ostende et Samir Ramdani

     
     

    curatrices réinstallent leur module dans

    les murs du Palais de Tokyo et

    è ( )

    Expo Collective

    Expo personnelle

    In Fine

    Les Jeunes Filles

    Horribles

    Florian Pugnaire et David Raffini

    Giuliana Zefferi

    01/07/2010

    12/07/2010

    05/09/2010

    05/08/2010

     

    Expo personnelle

    Expo personnelle

    Apollo goes on

    Holiday

    Que nul n'entre ici qui

    ne soit géomètre

    LE PAVILLON, La

    Cabane-le Monde

    Iris Touliatou

    Benjamin Valenza

    Niklas Goldbach, Louise Hervé & Chloé Maillet, Romain Kronenberg, Cova Macias, Ariane Michel, David Raffini & Florian Pugnaire, Koki Tanaka, Adam Vackar.

    09/09/2010

    09/09/2010

    03/10/2010

    03/10/2010

    03/10/2010

     

    PJ/ Nuit Blanche

    Expo personnelle

    Apichatpong

    Weerasethakul The

    Réserve naturelle

    De Ziad Antar, Louidgi Beltrame, Isabelle Cornaro, Angela Detanico & Rafael Lain, Mati Diop,

    Eric Tabuchi

    02/10/2010

    07/10/2010

    31/10/2010

     

    Expo personnelle

    Palace (Red Dog) /

    La traversée difficile

    Carol Bove

    07/10/2010

    31/10/2010

     

    135

    2010 (Suite)

     
     
     
     
     
     

    Type

    Session/ Expo

    Titre

    Fresh Hell, Carte blanche à

    Artistes

    Bas Jan Ader, Barbara Bloom, Jonathan Borofsky, Angela Bulloch, Maurizio Cattelan,

    Début

    19/10/2010

    Fin

    16/01/2010

    Evénements

    Collective

    Adam McEwen

    Anne Collier, Martin Creed, Gino De Dominicis, Walter De Maria, Jessica Diamond,

    Matias Faldbakken, Isa Genzken, Geert Goiris, Dan Graham, Philip Guston, Raymond

     
     
     
     
     

    Hains, David Hammons, Georg Herold, Martin Kippenberger, Michael Landy, Hanna &

    Klara Liden, Nate Lowman, Sarah Lucas, Ana Mendieta, Henri Michaux, Reinhard

     
     
     
     
     

    Mucha, Bruce Nauman & Frank Owen, Michelangelo Pistoletto, Rob Pruitt, Steven

    Shearer, Roman Signer, Agathe Snow, Rudolf Stingel, Rosemarie Trockel, Valie

    Export, H. C. Westermann

     
     
     
     
     
     
     
     
     

    Expo personnelle

    Rachelle, Monique

    Sophie Calle

    20/10/2010

     
     

    Expo personnelle

    Chalet de Tokyo à Coimbra :

    João Onofre

    30/10/2010

     
     

    Expo personnelle

    Grand Radical Country Mix

    Fabien Souche (dit Souche)

    05/11/2010

     
     

    136

    2011

     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     
     

    Type

    Exposition

    Titre

    Un film abécédaire

    Artistes

    Eléonore Saintagnan

    Début

    01/01/2011

    Fin

    30/01/2011

    Evénements

    personnelle

    Exposition

    Bring us to ourselves,

    Emmanuel Van Der Auwera

    01/01/2011

    30/01/2011

     

    personnelle

    Mikhaïl

     
     
     
     

    Répondeur

    Exposition

    Bell Study

    Assis sur l'obstacle

    Stephen Vitiello

    John Cornu

    01/01/2011

    04/02/2011

    31/01/2011

    27/02/2011

     

    personnelle

    Exposition

    Névés

    Sébastien Vonier

    04/02/2011

    27/02/2011

     

    personnelle

    Exposition

    personnelle

    Quand la ville dort

    Hakima El Djoudi

    04/02/2011

    27/02/2011

     

    Exposition

    personnelle

    João Onofre

    Box sized Die featuring No Return

    18/02/2011

    03/04/2011

    Les performances ont lieu à 19h30 les jeudis 24 février,

    3 mars, 10 mars, 17 mars, 24 mars

    Exposition

    Karsten Födinger

    Cantilever

    18/02/2011

     
     

    Exposition

    personnelle -

    Sandra Lorenzi

    La nébuleuse de l'homoncule

    04/03/2011

     
     

    137

    ANNEXE 3

    ICONOGRAPHIE

    Fig. #1 : Kay Hassan, Johannesburg by day, 2002 Fig. #2 : Loris Cecchini, Breastwork, 2002

    Vue de l'exposition d'ouverture, 2002 Vue de l'exposition d'ouverture, 2002

    Fig. #3 : Michael Elmgreen & Ingar Dragset, Demolished Prison, Powerless Structures, Fig. 272, 2002

    Vue de l'exposition d'ouverture, 2002

    Crédit photo : Marc Domage

    Fig. #4 : Loris Cecchini, Empty Walls - Just Doors, 2006 Courtesy Gallerie Continua Vue de l'exposition Empty Walls - Just Doors, 2007 Crédit photo : Didier Barrosso

    Crédit photo : Marc Domage Crédit photo : Marc Domage

    138

    Fig. # 5 : Sandra Lorenzi, L'édifice persistant, 2011 Fig. # 6 : Vincent Ganivet, Caténaire, 2010

    Jizo gisants, 2010 ; Shell, 2011 ; Courtesy de l'artiste Courtesy de l'artiste

    Vue de l'exposition La nébuleuse de l'homoncule Vue de l'exposition Dynasty, 2010

    Crédit photo : Fabrice Gousset Crédit photo : André Morin

    Fig. # 7 : Sébastien Vonier, Névés, 2011 Fig. #8 : Karsten Fodïnger, Cantilever, 2011

    Courtesy de l'artiste Courtesy RaebervonStenglin, Zürich

    Vue de l'exposition Névés, 2011 Vue de l'exposition Cantilever, 2011

    Crédit photo : F. Gousset Crédit photo : F. Gousset

    Fig. #9 : Michel Blazy, Sculptucre, 2003-2007 Fig. #10 : Michel Blazy, Peau de bête, 2007 ; Fontaine de

    Courtesy Galerie Art Concept mousse, 2007 ; Sans titre, 2007

    Vue de l'exposition Post Patman, 2007 Vue de l'exposition Post Patman, 2007

    Crédit photo : André Morin Crédit photo : André Morin

    139

    Fig. #11 : Jean Michel Blanchet, Adhésif sur mur, 2007 Fig. #12 : Florian Pugnaire & David Raffini, Expanded Crash

    Vue de l'exposition Off, 2010 2008-2009 ; Production du Fresnoy

    Crédit photo : André Morin Vue de l'exposition Expanded Crash, 2009

    Crédit photo : André Morin

    Fig. #13 : Laurent Moriceau, Killing Me Softly, 2003 Fig. #14 : Laurent Moriceau, Killing Me Softly, 2003

    Capture d'écran de la vidéo de la performance Capture d'écran de la vidéo de la performance

    Fig. #15 : Arcangelino Sassolino, Sans titre, 2008

    Vue de l'exposition Château de Tokyo / Palais de Fontainebleau, 2008 Courtesy de l'artiste & galerie Feinkost

    Crédit photo : André Morin

    140

    Fig. #16 : Robert Gober, Drain, 2009 Fig. #17 : Ryan Gander, Nathaniel Knows, 2009

    Collection S.M.A.K. Courtesy Flowerman Collection

    Vue de l'exposition Chasing Napoleon, 2009 Vue de l'exposition Chasing Napoleon, 2009

    Photo : André Morin Photo : André Morin

    Fig. #18 : Urs Fischer, Untitled (Branches), 2005 ; Courtesy de l'artiste & Galerie Eva Presenhuber

    Christian Andersson, The Blind Spot, 2003-2006 ; Courtesy Galerie Nordenhake

    Vincent Lamouroux, Scape, 2006 ; Courtesy de l'artiste

    Vue de l'exposition Cinq milliards d'années, 2006

    Photo : Marc Domage

    Fig. #19 : Bettina Samson, Warren, 1/4 de seconde en Fig. #20 : Flying Tape, 2006

    Cinémascope, 2007 ; Courtesy de l'artiste Courtesy Spencer-Brownstone

    Vue de l'exposition Dynasty, 2010 Vue de l'exposition Une seconde, une année, 2006

    Photo : André Morin Photo : Marc Domage

    Fig. #21 : Rebecca Horn, Lumière en prison dans le ventre de la baleine, 2002

    Vue de l'exposition Lumière en prison dans le ventre de la baleine, 2002

    Photo : Marc Domage

    141

    Fig. #22 : Jota Castro, Brains, 2005 Fig. #23 : Arthur Barrio, Réflexion...(s)..., 2005

    Vue de l'exposition Exposition Vue de l'exposition Réflexion...(s)..., 2005

    Universelle 1, 2005 Photo : Cristina B. Motta

    Photo : Guillaume Loiret

    142

    Fig. #24 : Mathieu Briand, Le Monde flottant, 2003 Fig. #25 : Loris Gréaud, Forêt de poudre à canon (bulle), 2008

    Vue de l'exposition Le Monde flottant, 2003 Vue de l'exposition Cellar Door, 2008

    Photo : Marc Domage Courtesy Yvon Lambert Paris

    Photo : Olivier Pasqual

    Fig. #26 : Adel Abdessemed, Habibi, 2004 Collection MAMCO

    Vue de l'exposition Notre histoire..., 2006 Photo : Florian Kleinefen

    143

    Fig. #27 : Laurent Le Deunff, Crâne, 2002 Fig. #29 : Nicolas Juillard, The Waiting Room, 2005

    Vue de l'exposition Dynasty, 2010 Vue de l'exposition The Final Cut, 2005

    Photo : Pierre Antoine Photo : Marc Domage

    Fig. #28 : Bruno Peinado, Vanity Flight Case, 2005 Vue de l'exposition Medio Dia - Media Noche, 2007 Photo : Santos Suetta

    Fig. #30 : Yoshihiro Suda, One Hundred Encounters, 2001 Fig. #31: Tony Matelli, Weeds, 2006

    Vue de l'exposition Yoshihiro Suda, 2004 Courtesy Galerie Loevenbruck

    Courtesy Gallery Koyanagi Vue de l'exposition Abandon, 2009

    Photo : Daniel Moulinet Photo : André Morin

     

    Fig. #33 : Marina Abramovic & Jan Favre, Guerrier-Vierge/Vierge - Guerrier, 2004

    Vue de la performance

     

    144

    Fig. #32 : Gianni Motti, Big Crunch Clock, 1999-2005 Fig. #35 : Bertrand Lamarche, Lobby (Hyper tore

    Commande publique O 550) Courtesy Galerie Poggi & Bertoux

    Photo : Marc Domage Photo : André Morin

    Fig. #34 : Pierre Ardouvin, Nasseville, 2003 Photo : Marc Domage

    145

    Fig. #39 Chen Zhen, Purification Room, 19912003

    Courtesy Galleria Continua

    Vue de l'exposition Silence Sonore, 2003 Photo : Daniel Moulinet

    Fig. #37 : Alain Declercq, Instinct de mort, 2002 Vue de l'exposition d'ouverture,

    2002

    Photo : Marc Domage

    Fig. #36 : Yuhsin U. Chang, Poussière dans le Palais de Tokyo,

    2010 ; Courtesy de l'artiste & Galerie Yvan Roubin Vue de l'exposition Dynasty, 2010

    Photo : Hervé Morin

    Fig. #38 : Kendell Geers, The Terrorist's Apprentice, 2002 Vue de l'exposition Sympathy for the Devil, 2002

    Photo : Marc Domage

    Fig. #40 Christoph Büchel, Dump, 2008

    Courtesy Cristophe Büchel, Hauser & Wirth Vue de l'exposition Dump, 2008

    Photo : Didier Barroso

    Fig. #41 Christoph Büchel, Dump, 2008 Courtesy Cristophe Büchel, Hauser & Wirth

    Vue de l'exposition Dump, 2008 Photo : Didier Barroso

    Fig. #42 : Guillaume Paris, We are the world, 2003

    Vue de l'exposition H.U.M.A.N.W.O.R.L.D, 2003

    Photo : Marc Domage

    146

    Fig. #43 Boris Achour, Cosmos, 2003 - Vue de l'exposition Cosmos, 2003 - Photo : Marc Domage

    Fig. #45 Eric Tabuchi, Hyper Trophy 008, 142, 2010 ; Peinture

    d'angles, 2010 ; Sunrise, 2010 ; Agrandissement du provisoire, Photo : Daniel Moulinet
    2010 - Vue de l'exposition Réserve naturelle, 2010 - Photo :

    André Morin

    Fig. #46 Raphaël Zarka, La draisine de l'Aérotrain, 2009 - Vue de l'exposition (A List Of Which I Could Tediously Extend Ad Infinitum), 2010 À Photo : André Morin

    Fig. #48 : Marc Handforth, Honda, 2002 À Vincent Lamouroux, Scape, 2006 À Vue de l'exposition Cinq milliards d'années, 2006 À Photo : Marc Domage

    Fig. #47 : Daniel Dewar et Grégory Gicquel, Mason Massacre, 2008 À Courtesy Chez Valentin À Vue de l'exposition, Château de Tokyo, Palais de Fontainebleau, 2008

    147

    Fig. #44 Wang Du, Produit dérivé, 2004

    Vue de l'exposition Wand Du Paradade #4, 2004

    148

    Fig. #49 Luc Kheradmand, Postvsnow III, 2009-2010 Courtesy de l'artiste

    Vue de l'exposition Postvsnow, 2010 Photo : André Morin

    Fig. #50 Henrik Hakansson, Broken Forest, 2006

    Vue de l'exposition A travers bois pour trouver forêt, 2006

    Photo : Florian Kleinefenn

    Fig. #51 Tom Friedman, Untitled (A Curse), 2009 -- Courtesy Gagosian Gallery - Robert Kusmirowski, Unacabine, 2008 -- Courtesy Foksal Gallery -- Vue de l'exposition Chasing Napoleon, 2010 -- Photo : André Morin

    Fig. #52 Daniel Buren, Quatre fois moins ou quatre fois plus?, 2004 -- Vue de l'exposition in situ, Quatre fois moins ou quatre fois plus?, 2004 -- Photo : Marc Domage

    149

    Fig. #53 Katharina Grosse, Constructions à cru, 2004 Fig. #54 Alain Bublex, Projet Tokyorama 6, 2001

    Photo : Florian Kleinefenn Photo : Alain Bublex

    Fig. #55 Fabrice Gygi, Tribune, 1996 - Vue de l'exposition Medio Dia - Media Noche, 2007 - Photo : Santos Suetta

    Fig. #57 Tsuneko Taniuchi, Tsuneko Troc, 2001 À Vue de la performance Projet Tokyorama 5, 2001 À Photo : Marc Domage

    Fig. #56 Robert Milin, Le Jardin aux habitants, 2002 Commande publique À Photo : Marc Domage

    Fig. #58 Matthieu Laurette, Les Produits remboursés, 2001 - Courtesy Yvon Lambert - Vue de l'exposition Notre histoire..., 2006 - Photo : Fotostudio Eshof






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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry