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La regionalisation en Bulgarie : etude des jeux et enjeux d'une politique territoriale en oeuvre dans l'UE

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par François Xavier NOAH EDZIMBI
IEP Toulouse - Master 2 en Conseil et expertise en Action Publique 2017
  

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Mémoire professionnel 1

La régionalisation en Bulgarie : étude des jeux et enjeux d'une politique territoriale

en oeuvre dans l'UE

Sommaire

RESUME 4

ABSTRACT 5

INTRODUCTION 6

PREMIERE PARTIE 8

DEROULEMENT DU STAGE A LA FOUNDATION FOR LOCAL GOVERNMENT

REFORM 8

Chapitre I : 9

La Foundation For Local Government Reform : Organisation Non Gouvernementale Relais

De L'ingénierie Démocratique En Bulgarie 9

Section I: La Foundation for Local Government Reform (FLGR) 9

Section II : Les objectifs de la FLGR et l'apport de la FLGR Consult 13

Chapitre II : Déroulement Du Stage 17

Section I : Les missions confiées durant le stage 17

Section II : Les apports du stage 18

DEUXIEME PARTIE 20

LA REGIONALISATION EN BULGARIE : ETUDE DES JEUX ET ENJEUX D'UNE

POLITIQUE D'INTEGRATION DANS L'UE 20

I- Clarifications conceptuelles 21

II- Délimitation spatio-temporelle 22

III- Problématique de l'étude 23

Chapitre III : La Politique De Décentralisation En Bulgarie 30

Section I : Le contexte juridique : des dispositions constitutionnelles et législatives 30

Section II : Les acteurs et les instruments de la décentralisation 31

Chapitre IV : 36

La Dissociation De La Régionalisation Des Mesures De Décentralisation : Ajustement

Etablie Par Des Entrepreneurs Politiques 36

Section I : La régionalisation en Bulgarie 36

Section II : La diplomatie bulgare et la mise en oeuvre de la régionalisation : un discours

double sur la scène européenne 40

CONCLUSION 53

Mémoire professionnel 2

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Sigles et abréviations

CEAP : Conseil et Expertise en Action Publique

CPLR : Congrès des Pouvoirs Locaux et Régionaux

FLGR: Foundation for Local Government Reform

IDE : Investissements Directs Etrangers

NAMRB : Association Nationale Des Municipalités de la Bulgarie

NUTS : Nomenclature d'Unités Territoriales Statistiques

ONG : Organisations Non Gouvernementale

PECO : Pays d'Europe centrale et orientale

UE : Union Européenne

URSS : Union des Républiques Socialistes et Soviétiques

Mémoire professionnel 3

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Illustrations

Figure 1 : organigramme de l'institution non gouvernementale

Figure 2 : objectifs de l'institution non gouvernementale FLGR Figure 3 : organigramme de la FLGR Consult Figure 4 : Schéma du dispositif institutionnel Tableau 1 : Les acteurs de la décentralisation en Bulgarie Tableau 2 : L'organisation du referendum en Bulgarie

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La régionalisation en Bulgarie : étude des jeux et enjeux d'une politique territoriale

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RESUME

Depuis l'implosion de l'ex-URSS au début des années 1990, le terme de décentralisation est au coeur du débat sur la démocratisation de la gestion administrative dans les pays d'Europe centrale et orientale (PECO), ayant connu un système politique fondé sur la centralisation du pouvoir. Dans le but de susciter des transformations politiques et sociales dans les PECO, afin de promouvoir les collectivités locales qui, ces dernières, donnent la possibilité au citoyen de participer effectivement à la prise des décisions relatives à son environnement quotidien, des ONG spécialisées dans la gouvernance locale sont apparues pour soutenir l'Etat dans cette politique d'organisation territoriale, à l'exemple de la Foundation for Local Government Reform en Bulgarie. Toutefois, malgré la consécration de la décentralisation par la Constitution bulgare de 1991, et son renforcement par l'adoption deux plans stratégiques, l'un en 2006 et l'autre en 2015, la question de la régionalisation, prônée par l'Union Européenne dont l'Etat en est un membre depuis 2007, est sans cesse renvoyée à une date ultérieure. Cette prorogation sine die est l'expression du choix politique fait par les autorités gouvernantes. En effet, celles-ci font preuve de ruse dans la mise en oeuvre de cette politique territoriale tant dans la sphère nationale qu'internationale, ceci dans le but de mieux se positionner et de préserver leurs intérêts en fonction des enjeux, des acteurs en présence et selon différents contextes.

La régionalisation en Bulgarie : étude des jeux et enjeux d'une politique territoriale

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ABSTRACT

Since the implosion of USSR in the early 1990s, decentralization is the heart of the debate on the democratization of administrative management in the countries of Central and Eastern Europe (CEEC). In order to create political and social transformations in the CEECs, to promote local communities, which allow citizens to participate effectively in the decision-making process in their daily environment, NGOs specialized in governance emerged to support State in this policy of territorial organization, following the example of the Foundation for Local Government Reform in Bulgaria. However, despite the consecration of decentralization by the Bulgarian Constitution of 1991 and its strengthening by the adoption of two strategic plans, one in 2006 and the other in 2015, the question of regionalization advocated by the European Union, whose State has been a member since 2007, is constantly being referred to a later date. This prorogation sine die is the expression of the political choice made by the governing authorities. Indeed, they are tricky in the implementation of this territorial policy in both the national and international spheres, in order to better position themselves and preserve their interests according to the stakes, the players involved and in different contexts.

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INTRODUCTION

Depuis le début des années 1990, les réformes de l'Etat, en particulier les processus de décentralisation, se sont généralisées dans le monde1. S'appuyant sur un concept d'Europe des régions, les réformes européennes, qui visent une réorganisation territoriale sous forme de fusions de communes et de régionalisation en général, varient d'un pays à l'autre notamment en raison des cultures politiques diverses et la place des collectivités locales dans les différents modèles étatiques2. En Europe occidentale, le terme de décentralisation est au coeur du débat sur la démocratisation de la gestion administrative et concerne aussi bien l'Ouest que l'Est de l'Europe3. Elle permettrait de dépasser la coupure entre une Europe occidentale, coeur historique de l'Union européenne et prescriptrice de normes, et une Europe centre-orientale de « retour » dans l'Europe et réceptrice de ces normes4. Ayant connu un système politique fondé sur la centralisation du pouvoir, en majorité calqué sur l'ex URSS, les pays d'Europe centrale et orientale (PECO) perçoivent cette européanisation5 comme l'expression d'injonctions européennes pour les faire entrer de plain-pied dans la « modernité politique6 ». Consacrée par la constitution de 1991 et entamé la même année avec les premières élections locales démocratiques, la décentralisation a été renforcé en Bulgarie par l'adoption d'un plan stratégique de décentralisation en 2006, révisé en 2010, et d'un second plan 2016-2025 adopté en 2015 malgré la survivance d'une tendance à la centralisation, qui se présente comme un rempart vis-à-vis des nombreux conflits territoriaux et de velléités centrifuges au regard de l'histoire du pays.

Mais, en plus de grandes divergences constatées dans l'organisation territoriale, cet Etat, privé d'une tradition régionale7, renvoie sans cesse la question de la régionalisation prônée par l'Union Européenne à une date ultérieure depuis son adhésion à ladite communauté en 2007. Les précédents travaux sur la décentralisation dans cet Etat postsocialiste insistent sur la place des autorités locales, le rôle régulateur de l'Etat de même que son nécessaire rapprochement avec le citoyen pour une effectivité de la gouvernance

1 Voir, Centre International d'Etudes pour le Développement Local (CIEDEL), Evaluation thématique de l'appui de la France à la décentralisation et la gouvernance locale, Rapport final, octobre 2014, p. 9.

2 Voir, Le Conseil des Communes et Régions d'Europe (CCRE), La décentralisation à la croisée des chemins : reformes territoriales en Europe en période de crise, octobre 2013, p. 6.

3 Voir, E. Boulineau, M. Suciu, « Décentralisation et régionalisation en Bulgarie et en Roumanie. Les ambiguïtés de l'européanisation », L'Espace géographique 2008/4 (Tome 37), p. 350.

4Ibid.

5 L'européanisation est un champ émergent au sein des études européennes, qui s'intéresse à l'impact de l'Union européenne (UE) sur les politiques (policies), la politique (politics) et le politique (polity) au niveau national et de la gouvernance régionale et urbaine. Voir, L. Boussaguet, S. Jacquot, P. Ravinet, Dictionnaire des politiques publiques, 4e éd., Paris, Presses de Sciences Po (P.F.N.S.P.), 2014, 771 pages.

6 Voir, E. Boulineau, M. Suciu, Op.Cit. 7Ibid.

Mémoire professionnel 7

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locale. L'objectif scientifique de cette étude, qui va à rebours de cette tendance « générale », est de présenter l'usage stratégique de cette politique territoriale, dans son aspect régional, par les autorités publiques bulgares.

En conformité avec les exigences académiques pour une formation intégrale en Master Conseil et Expertise en Action Publique (CEAP), notamment le parcours professionnel qui nécessite l'exécution d'un stage d'une durée minimum de trois (3) mois, ce rapport a été établi dans les locaux de la Foundation for Local Government Reform (FLGR) à Sofia, en Bulgarie, du 15 mai au 15 août 2017. L'objectif professionnel consistait à acquérir aussi bien des compétences dans la conception et la mise en oeuvre des politiques publiques locales que de cerner les enjeux du développement local. Il était amplement question, dans le cadre de notre recherche, de s'inspirer des pratiques d'organisations non gouvernementales bulgares dans la mise en oeuvre et le renforcement de la décentralisation afin de mettre ces compétences acquises au service de l'Afrique en général et du Cameroun en particulier. Disposant d'une expertise en matière de gouvernance locale, la FLGR contribue à la mise en oeuvre de la décentralisation en Bulgarie, en tant qu'acteur non gouvernemental, d'où le choix de l'institution. Le travail se subdivise en deux parties. Il s'agit de présenter, dans un premier temps, le déroulement dudit stage et, dans un second temps, procéder à une restitution des analyses conduites durant ladite période.

Mémoire professionnel 8

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PREMIERE PARTIE

DEROULEMENT DU STAGE

A LA FOUNDATION FOR

LOCAL GOVERNMENT

REFORM

Mémoire professionnel 9

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En vue de rendre compte des analyses effectuées durant le temps passé au sein de la Foundation for Local Government Reform, nous présentons à titre préalable ladite Fondation (chapitre I), et précisons ensuite les différentes missions et tâches réalisées au sein de l'institution (chapitre II).

Chapitre I :

La Foundation For Local Government Reform : Organisation
Non Gouvernementale Relais De L'ingénierie Démocratique En

Bulgarie

Depuis l'implosion de l'URSS en 1989, la question des minorités à l'Est de l'Europe a été construite par une variété d'acteurs internationaux comme secteur prioritaire de l'exportation démocratique, à travers le transfert de normes, de règles et de standards internationaux ; mais aussi comme l'un des lieux où se mesurent les « avancées » réalisées sur la voie de la démocratie et de l'intégration à l'Union européenne (UE)8. Dans cette perspective, les organisations non gouvernementales (ONG), internationales et locales, se sont vues accorder un rôle pivot dans la protection des minorités et la pacification des rapports intercommunautaires dans un premier temps. Ensuite, dans le but de susciter des transformations politiques et sociales dans les PECO, afin de compenser le manque de normes européennes communes pour mesurer et protéger les droits des collectivités locales proches du citoyen, qui lui donnent la possibilité de participer effectivement à la prise des décisions relatives à son environnement quotidien9, des ONG spécialisées dans la gouvernance locale sont apparues, à l'exemple de la Foundation for Local Government Reform en Bulgarie.

Dans le cadre de ce chapitre, ladite institution, dans sa structuration et son fonctionnement, sera présentée (Section I), ainsi que ses objectifs dont la définition et la mise en oeuvre incombent, en grande partie, à la FLGR Consult, société à responsabilité limitée appartenant à la fondation (Section II).

Section I: La Foundation for Local Government Reform (FLGR)

La section s'appesantit sur l'institution dans sa structuration proprement dite (A) et son fonctionnement (B).

8 Dès juin 1993, « le respect des minorités et leur protection » ont été intégrés aux critères politiques définis lors du Conseil européen de Copenhague à l'adresse d'éventuels futurs membres de l'UE. Voir, N. Ragaru, « ONG et enjeux minoritaires en Bulgarie : au-delà de l' « importation/exportation » des modèles internationaux », Critique internationale 2008/3 (no 40), p. 27.

9 Voir, Conseil de l'Europe, Rapport explicatif de la Charte européenne de l'autonomie locale, série des traités européens, no 122, p. 2.

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A- La présentation de la structure

La Fondation trouve son origine dans la transition postcommuniste en cours dans tous les PECO après la chute du mur de Berlin en 1989. Dans l'optique de promouvoir des initiatives et des politiques qui établissent et améliorent la bonne gouvernance au niveau local10, et favorisent la participation des citoyens à la conception des politiques publiques qui s'appliquent à eux, les ONG se distingueront par leur engagement en faveur de la démocratie11 dans lesdits Etats. C'est ainsi qu'en mai 1995, suite aux premières élections locales démocratiques en Bulgarie, un groupe de maires, en vue de protéger et de renforcer l'autonomie locale12 de leur collectivité respective, créeront une organisation non gouvernementale de droit bulgare : la Foundation For Local Government Reform. Elle se définit comme un centre de ressources professionnelles indépendantes, dont la mission est de soutenir la démocratie locale et de promouvoir le développement. La Fondation agit en matière de plaidoyer pour la formulation des politiques, la bonne gouvernance locale et la mise en place de réformes au niveau local. Le siège de l'institution se trouve dans la capitale Sofia.

Figure 1 : organigramme de l'institution non gouvernementale

Conseil d'administration :
Lachezar ROSSENOV
Deni KAMENOV
Ginka KAPITANOVA
Roumen DRAGANOV
Zdravkov SECHKOV

Directeur exécutif :
Zdravkov SECHKOV

 
 
 

Comptable

Equipe d'experts

Source : Archives administratives de la Foundation for Local Government Reform

10 Voir, Conseil de l'Europe, Règlementation pour la promotion de la stratégie pour l'innovation et la bonne gouvernance au niveau local et l'attribution du Label européen d'excellence en matière de gouvernance (EloGE), www.coe.int/local, consulté le 26/05/17, p. 2.

11 Voir, N. Ragaru, Op.Cit., p. 29.

12 Voir, Conseil de l'Europe, Rapport explicatif de la Charte européenne de l'autonomie locale, série des traités européens, no 122, p. 3.

Mémoire professionnel 11

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Le Conseil d'administration est un organe collégial de gestion de la structure. Il se saisit de toute question intéressant la bonne marche de la fondation et règle, par ses délibérations, les affaires la concernant. En exerçant ces prérogatives, le Conseil d'administration définit la stratégie de l'institution ; choisit son mode d'organisation ; élit le Président du Conseil et contrôle la direction générale en s'assurant que ses choix stratégiques sont bien mis en oeuvre. Le Directeur exécutif, quant à lui, est responsable de l'administration et de la gestion globale de la fondation, y compris des programmes de service, de la collecte de fonds, et des opérations techniques. Ses compétences incluent d'aider et de travailler étroitement avec le conseil d'administration sur la planification et l'évaluation, le développement et l'administration des mesures opérationnelles, du personnel, de la gestion institutionnelle et des relations publiques. C'est un poste à temps plein, dont l'occupant est embauché par le Conseil d'administration et directement responsable devant celui-ci par l'intermédiaire de son président élu. Le comptable est responsable de l'administration financière. Il veille à ce que l'institution satisfasse à ses obligations financières, sociales et fiscales. Il effectue des vérifications et fournit des conseils dans le domaine financier.

L'organisation non gouvernementale est spécialisée dans divers domaines d'expertise qui se résument à :

- Des pratiques innovantes et novatrices en démocratie (Depuis 1998, la FLGR a recueille et diffuse des bonnes pratiques des municipalités bulgares et européennes et leurs partenaires socio-économiques ; la base de données en ligne comprend plus de 1200 pratiques. Une compétition est organisée depuis lors entre les municipalités partenaires pour encourager et partager l'implémentation des pratiques innovantes) ;

- La gouvernance locale participative (L'institution a mis en oeuvre le programme du Forum communautaire dans 30 municipalités à travers le pays pendant 6 ans, avec l'objectif de consolider la participation des citoyens et de mobiliser les ressources et les initiatives pour le développement local durable) ;

- La bonne gouvernance et l'intégrité (La structure a travaillé sur la révision et l'amélioration de la performance des administrations locales et des conseils en matière de procédures administratives internes et règlements municipaux sur la base des recommandations des citoyens et des entreprises locales et dans le cadre des principes de bonne gouvernance) ;

- Des services administratifs de qualité (La FLGR a mis en oeuvre un programme d'amélioration des services aux citoyens à travers la création des centres de service à la

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clientèle municipale au niveau local, et des services administratifs intégrés au niveau régional. Elle a fourni une assistance technique aux municipalités pour la mise en place et le fonctionnement des centres de service à la clientèle, la formation du personnel, la préparation des trousses d'information et des consultations informatiques) ;

- Le renforcement des prérogatives et des capacités d'organisations non gouvernementales ;

- La planification stratégique (Elle aide les municipalités bulgares dans le processus de formulation des politiques et leur mise en oeuvre ; la préparation des documents municipaux stratégiques à long terme, de planification économique, du matériel de promotion, la mise en réseau ; fourniture d'une expertise internationale aux municipalités bulgares)13.

La Fondation fait ainsi son apparition durant la transition postsocialiste, et la transformation politique, mais aussi sociale et économique de la Bulgarie, dans le but de servir de référence dans les débats politiques et l'organisation des pouvoirs publics de la société14.

B- Le fonctionnement de l'institution

Depuis le début de la crise financière, économique et sociale en 2008, les ONG bulgares ont vu leurs ressources financières, venant pour la majorité de donateurs locaux et internationaux, être réduites. Ainsi doivent-elles s'adapter à un nouveau contexte politique et économique délétère. La Fondation dispose d'un personnel administratif de sept individus. L'institution est constituée d'un réseau d'experts qui lui apportent un appui dans la conduite des missions et la mise en oeuvre de différents projets15. Selon les missions à réaliser et les services à rendre, les équipes sont constituées en fonction des exigences de l'appel et du domaine de l'action.

La source principale de financement provient des subventions pour la mise en oeuvre des projets, dont une part, (10%-20%), est allouée au fonctionnement16. La Fondation et FLGR Consult sont des structures à budgets distincts. En matière de gestion des activités, ayant le même domaine d'expertise, l'une des deux entités répond aux appels d'offres ou à

13 Consulter à ce propos le site internet www.flgr.bg

14 Voir, A. Todorov, « Le système politique en Bulgarie » in J. M. De Waele, P. Magnette, Les démocraties européennes, Armand Colin, Paris, 2008, p. 69.

15 Voir, H. P. Agbozo, La mise en place des politiques de développement local en Bulgarie, Rapport de stage, juin-août 2016, p. 6.

16Ibid.

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subventions en fonction de spécificités et d'exigences de l'appel. La FLGR Consult paye des taxes sur les activités qu'elle mène, celles-ci étant à caractère lucratif. Les bénéfices qui se dégagent de ses services sont alloués au fonctionnement de la fondation17.

L'institutionnalisation de la démocratie politique et le passage vers une économie de marché, durant la transition postcommuniste après 1989, est ainsi le moment où est créée la Fondation qui a pour volonté d'améliorer le fonctionnement des collectivités locales. Qu'en-est-il de ses objectifs ?

Section II : Les objectifs de la FLGR et l'apport de la FLGR Consult

Il est question de présenter les buts de l'institution (A) et l'équipe d'experts qu'est la FLGR Consult (B).

A- Les buts de la FLGR

Les objectifs de l'institution s'apprécient selon le temps consacrés aux différents buts recherchés. Dès lors, ces buts sont subdivisés en trois termes à savoir le court terme, le moyen et le long terme.

Figure 2 : objectifs de l'institution non gouvernementale FLGR

Les objectifs à court terme :

- Investir dans le capital social tant local que régional ;

- Augmenter les aptitudes démocratiques des citoyens et des ONG pour une participation effective au processus de prise de décision ;

- Renforcer la gouvernance locale sur la base des 12 principes de bonne gouvernance prônés par le Conseil Européen.

L'objectif à moyen terme :

- Appuyer le développement d'un partenariat entre le local et le régional fondé des valeurs démocratiques, l'inclusion sociale et la prospérité.

L'objectif à long terme :

- Construire des communautés dynamiques avec une forte autonomie locale, des

standards de vie élevés, un développement durable et une économie locale compétitive.

Mémoire professionnel 13

Source : Rapport annuel 2016 de la Foundation for Local Government Reform

17Ibid.

Mémoire professionnel 14

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La structure est épaulée par une équipe d'experts, la FLGR Consult, pour la réalisation de ses objectifs.

B- La FLGR Consult

Comme toute organisation qui se conçoit comme un ensemble finalisé à « faire quelque chose », et dont la poursuite d'un objectif constitue la condition de son existence18, la fondation s'est dotée d'une équipe d'experts pour plus de performance19 dans la construction et la mise en oeuvre de ses politiques : la FLGR Consult. Structure à responsabilité limitée, la FLGR Consult, détenue par la fondation, est mise sur pieds dès avril 2003. L'équipe d'experts fournit des services dans différents domaines comme :

- Les enquêtes et analyses ;

- L'expertise dans le domaine du développement local et régional ;

- La gestion de projet ;

- Des consultations et une assistance technique aux entreprises et aux gouvernements

locaux ;

- L'intermédiation dans le recrutement d'investisseurs au niveau municipal ;

- La formation et gestion des événements.

Figure 3 : organigramme de la FLGR Consult

Expert

Directeur exécutif

Expert

Source : Archives administratives de la Foundation for Local Government Reform La FLGR Consult met en oeuvre des projets qui se trouvent tant dans l'espace public que privé. Les réalisations de la structure se regroupent ainsi en 2006 :

- Dans la formation d'agents de l'administration publique, des entreprises et des ONG, menés en coopération avec le Département de philosophie de l'Université de Sofia St. Kliment Ohridski ;

- Des formations effectuées sur demande d'organisations pour acquérir des connaissances et des compétences dans la conception et la gestion de projets ;

18 Voir, A. Sine et B. Lannaud, La mesure de la performance de l'action publique, Rapport du Conseil d'analyse économique 2007.

19Ibid., La performance pourrait être définie comme la capacité qu'a une structure d'agir selon des critères d'optimisation afin d'obtenir de meilleurs résultats.

Mémoire professionnel 15

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- Une enquête sur les États membres de l'UE avec deux niveaux d'autonomie gouvernementale, commandée par le Ministère du développement régional et des travaux publics ;

- Des consultations auprès des municipalités sur l'élaboration et l'introduction de systèmes de gestion de la qualité ISO 9001 : 2001 ;

- La mise en oeuvre d'un projet de gestion durable des terres, financé par le PNUD et le ministère de l'Environnement et des Eaux ;

- La mise en oeuvre d'un projet de planification du développement économique local dans la municipalité de Letnitsa, programme actif de marché du marché du travail ; - Une consultation dans le cadre d'un projet d'établissement d'e-Region Lovetch ;

- L'acquisition d'un contrat dans la mise en oeuvre du projet Pilot Integrated System of e-Region, contracté par le Ministère de l'Administration d'Etat et de la Réforme Administrative20.

C'est ainsi qu'assistée de la FLGR Consult, l'institution non gouvernementale participe à la mise en oeuvre de la démocratie locale21 en Bulgarie. Ceci lui a permis d'acquérir une reconnaissance nationale et internationale. Elle a contribué à l'amélioration des politiques de décentralisation par des recommandations sur les lois liées au développement régional et à l'aménagement territorial, élaborées par le biais d'un processus participatif et proposé au gouvernement22, notamment sur les aspects de gouvernance locale participative23 ; de bonne gouvernance et d'intégrité24 ; de service administratif de qualité25 ; de

20 Voir, Archives administratives de la Foundation for Local Government Reform

21 La démocratie locale est entendue comme le fait pour les citoyens de participer aux prises de décisions qui les concernent localement. Elle se traduit non seulement par le vote mais aussi par une place laissée à l'initiative du citoyen, à sa participation à la décision et à l'action (via les conseils de quartiers, les associations...). Elle se développe dans une échelle adaptée à la prise de décision qui intéresse les habitants (le village, le quartier). Voir, A. Hurand, Enjeux et limites de la démocratie locale. L'exemple du 14è arrondissement (Paris), Essai, Observatoire du Management Alternatif, HEC Paris, 2008, pp. 7-8.

22 Voir, site internet www.flgr.bg

23Ibid., la FLGR a mis en oeuvre le programme du Forum communautaire dans 30 municipalités à travers le pays pendant 6 ans, avec l'objectif de consolider la participation des citoyens et de mobiliser les ressources et les initiatives pour le développement local durable.

24Ibid., la structure a travaillé sur la révision et l'amélioration de la performance des administrations locales et des conseils en matière de procédures administratives internes et règlements municipaux sur la base des recommandations des citoyens et des entreprises locales et dans le cadre des principes de bonne gouvernance. 25Ibid., l'institution a mis en oeuvre un programme d'amélioration des services aux citoyens à travers la création des centres de service à la clientèle municipale au niveau local et des services administratifs intégrés au niveau régional. Elle a fourni une assistance technique aux municipalités pour la mise en place et le fonctionnement des centres de service à la clientèle, la formation du personnel, la préparation des trousses d'information et des consultations informatiques.

Mémoire professionnel 16

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développement local26 et de pratiques novatrices27. Son expertise a ainsi été sollicitée pour de nombreux projets, sur différentes thématiques, commandités par l'Etat bulgare, partenaires nationaux et étrangers28. Elle est membre de plusieurs réseaux d'acteurs, tant nationaux qu'internationaux, qui évoluent dans les thématiques du développement et de la démocratie locale. Elle est en effet:

- Membre fondateur du Donor Fund Bulgaria ;

- Membre de l'European Network of Local Authorities for Exchange of Experiences (1999-2001) ;

- Membre du Local Government Information Network -LOGIN ;

- Membre de Mayors Making the Most of EU Funds for Roma Inclusion Network (MERI) 2013 - 2014 ;

- Membre du réseau des ONG pour l'analyse des risques sociaux ;

- Membre du Citizen Participation Forum.

Ainsi, depuis l'institutionnalisation de la démocratie politique et le passage vers une économie de marché, durant la transition postcommuniste après 1989, la Fondation est un important acteur dans l'amélioration du fonctionnement des collectivités locales. Il est dès lors question de présenter les différentes missions et tâches effectuées au sein de l'institution.

26Ibid., l'ONG aide les municipalités bulgares dans le processus de formulation des politiques et leur mise en oeuvre; la préparation des documents municipaux stratégiques à long terme, de planification économique, du matériel de promotion, la mise en réseau; fourniture d'une expertise internationale aux municipalités bulgares. 27Ibid. Depuis 1998, FLGR a recueilli et diffusé des pratiques démocratiques innovantes des municipalités bulgares et européennes et leurs partenaires socio-économiques; la base de données en ligne comprend plus de 1200 pratiques. Une compétition est organisée depuis lors entre les municipalités partenaires pour encourager et partager l'implémentation des pratiques innovantes.

28L'institution a participé au développement et au soutien de la démocratie locale en Albanie, en Arménie, en Bosnie-Herzégovine, en Serbie-et-Monténégro, en Géorgie, au Kosovo, en Roumanie, dans la région de Kaliningrad, au Kazakhstan, et au Kirghizistan. Voir, site internet www.flgr.bg

Mémoire professionnel 17

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Chapitre II : Déroulement Du Stage

L'interaction entre les membres de l'administration et l'équipe d'experts de la structure a contribué, durant la période de stage, à l'aboutissement d'objectifs professionnels et intellectuels que nous nous sommes donnés. Dès lors, les travaux effectués (Section I) et les apports du stage (Section II) seront développés.

Section I : Les missions confiées durant le stage

L'opportunité de découvrir le métier de consultant en politiques publiques en

général, et en gouvernance locale en particulier, au cours de ce stage, a été l'occasion d'apprécier ladite fonction et de mesurer, de manière globale, les difficultés rencontrées par les Experts-consultants dans l'exercice de leur activité. Pour une meilleure compréhension des tâches effectuées en stage, il appert approprié de traiter en premier lieu des outils mis à notre disposition (A), puis de traiter de manière détaillée les tâches ayant été effectuées (B).

A- Les outils mis à disposition

Sur le plan social, notre apprentissage professionnel au métier de consultant débute le

15 mai 2017 par un accueil de monsieur Alexander Mihaylov, Expert-consultant en gouvernance locale et Directeur professionnel de notre stage. Une visite guidée des locaux de l'institution, avec une présentation des différents membres du personnel, nous sera faite par la suite par ce dernier. Aussi visiterons-nous la salle des archives, la salle de conférence, la salle de restauration, la salle des machines, la bibliothèque et, enfin, nous serons installés dans le bureau préparé pour la circonstance c'est-à-dire la durée du stage. Au niveau opérationnel, assisté pour un début de tout le staff administratif et technique, notre principal tâche consistait à consulter les archives de la Fondation dans le but de disposer du matériau tant normatif (Constitution Bulgare, l'architecture législative sur la décentralisation, l'autonomie locale et l'administration locale, l'organisation administrative et territoriale, le développement régional et la stratégie nationale de décentralisation) que pratique (réalisations de la fondation) pour l'étude de la problématique choisie dans notre travail. C'est partant de cette problématique, et de notre formation de base, que des missions spécifiques nous ont été confiées.

B- Missions du poste occupé

Le métier de consultant en politique publiques a pour objectif, de manière sommaire,

de participer à l'amélioration des conditions de vie et l'épanouissement des populations, sur lesquelles sont appliquées lesdites politiques, en faisant des propositions durant leur processus d'établissement, de conception et de mise en oeuvre. Ainsi, dans le but de disposer de compétences nécessaires à cette fonction, les missions à nous confiées par le directeur de stage ont consisté à :

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- Etudier la mise en oeuvre de la décentralisation en Bulgarie ;

- Définir les différents types d'acteurs ;

- Présenter l'apport de la Foundation for Local Government Reform dans le processus de décentralisation ;

- Observer, identifier, analyser ses outils techniques et son mode opératoire ;

- Présenter les potentiels limites, rechercher et proposer des solutions pour accompagner la mise en oeuvre des recommandations liées à la politique territoriale.

Aussi au cours du stage avons-nous effectué des tâches qui se situent à la périphérie des missions à nous confiées, à l'exemple de l'organisation de la cérémonie de remise des prix des meilleures pratiques en matière de gouvernement autonome local bulgare 2016/2017 en Bulgarie, le 23 mai 2017, à 11h00, à la salle « Serdika » de la Sofia Hotel Balkan, ou encore l'organisation de rencontres entre divers acteurs non gouvernementaux spécialisés dans le processus de démocratisation et la Fondation. Elles nous ont permis d'apprendre l'organisation d'évènements publics et d'acquérir une rigueur dans la gestion de la ressource humaine.

Section II : Les apports du stage

Les apports tirés de cette expérience professionnelle peuvent être regroupés autour de deux idées principales : les compétences acquises (A), les difficultés rencontrées (B).

A- Les compétences acquises

Le stage subi à la fondation nous a permis de nous familiariser au monde professionnel, particulièrement dans le domaine des politiques publiques et leur processus de conception qui se déroule en cinq étapes à savoir : l'identification d'un problème et son inscription dans un agenda politique ; la formulation des solutions préalablement élaborées, examinées et négociées ; la prise de décision par l'autorité légitime ; la mise en oeuvre du programme et enfin, l'évaluation, par les résultats, les effets et les réactions éventuelles29. Il nous a permis d'acquérir des compétences dans la gouvernance locale, ceci dans la conception, la mise en oeuvre et l'évaluation des politiques territoriales. Au niveau subjectif, il a amélioré et enrichi notre relationnel, l'esprit d'écoute, d'initiative et surtout le goût du challenge et de la culture entrepreneuriale. Sur le plan professionnel, il a renforcé la rigueur dans l'esprit d'analyse, de synthèse et créativité, l'organisation et le maintien d'un réseau d'informations, la maîtrise de l'anglais et de qualités d'argumentation écrite et orale, qualités indispensables à l'exercice de la profession de consultant.

29 Voir, F. Dieu, Politiques publiques de sécurité, Paris/Montréal, L'Harmattan, 1999, p. 28.

Mémoire professionnel 19

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B- Difficultés rencontrées

Des difficultés ont été rencontrées durant notre expérience professionnelle au niveau

de la communication et du traitement de documents à nous assignés. En effet, l'entente entre certains membres du personnel était difficultueuse du moment où l'expression anglaise, seul canal d'expression usité entre eux et nous, n'était pas assez maîtrisée. Aussi d'un autre côté, la documentation mise à notre disposition était, pour la majorité des documents techniques, en langue bulgare d'où la nécessite d'une traduction. Toutefois, ces difficultés ont été, pour nous, une occasion d'évaluer notre détermination à les transcender et à atteindre le but de notre apprentissage.

Aussi sera-t-il question dans la seconde partie d'étudier la régionalisation, objet de notre analyse.

Mémoire professionnel 20

La régionalisation en Bulgarie : étude des jeux et enjeux d'une politique territoriale

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DEUXIEME PARTIE

LA REGIONALISATION EN

BULGARIE : ETUDE DES

JEUX ET ENJEUX D'UNE

POLITIQUE

D'INTEGRATION DANS L'UE

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La régionalisation en Bulgarie : étude des jeux et enjeux d'une politique territoriale

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Les processus actuels de transformations économiques, politiques et culturelles de la société bulgare post-communiste posent avec acuité les questions d'intégration européenne et de place de la Bulgarie au sein de la communauté européenne30. Avec son entrée à l'UE en 2007, le pays s'est engagé à adopter les critères de convergence parmi lesquels figurent la gestion décentralisée et l'avènement de collectivités territoriales. Bien que les modalités de décentralisation et de promotion des collectivités territoriales soient l'objet de notre analyse, l'intérêt se porte sur la difficile émergence de la région31. Il est dès lors nécessaire de clarifier les concepts.

I- Clarifications conceptuelles

Comme l'affirme Max Weber, pour engager un travail de recherche, il faut avoir un motif et une idée originale. Toutefois, être animé de curiosité intellectuelle et d'un désir de vérité n'est pas suffisant32. Ainsi, la recherche ne peut être effectuée séparément du travail de clarification des concepts de base utilisés comme catégories de lecture, d'explication, de construction de l'objet, considéré comme domaine de définition, et de vérification des hypothèses33. Clarifier, c'est littéralement tracer les limites de l'étude34. Pour une meilleure compréhension de l'étude, il s'avère indispensable de procéder à la clarification des termes régionalisation, jeux et enjeux.

A- La régionalisation

La régionalisation est un processus par lequel s'opère la construction d'un nouvel espace d'action publique ayant pour objet de promouvoir un territoire, infranational mais supra-local, par la mobilisation de son tissu économique et par le développement de son potentiel (infrastructures, voire par la mobilisation des ressorts identitaires et des solidarités locales ou régionales)35. En bulgare, trois racines linguistiques différentes permettent de traduire la notion très polysémique de région en français. Pour le sens qui nous occupe, le terme de rajon est privilégié ; rajonirane s'applique à la régionalisation en tant que découpage de l'espace de tout ordre (institutionnel, socio-économique, hydrographique). Le

30 Voir, Y. Andonova, « Enjeux et défis de l'intégration européenne de la Bulgarie », Hermès, La Revue, 2008/2 (no 51), p. 113.

31 Voir, E. Boulineau, « La persistance de la centralisation en Bulgarie : héritage du passé ou effet de crise ? » in V., Rey, L., Coudroy de Lille et E., Boulineau, L'élargissement de l'Union européenne : Reformes territoriales en Europe centrale et orientale, Paris, L'Harmattan, 2004, p. 39.

32 Voir, Y., Schemeil, Introduction à la science politique : objets, méthodes, résultats, 2e édition revue et augmentée, Presses de sciences politiques et Dalloz, 2012, p. 221.

33 Voir, L., Sindjoun, L'Etat ailleurs. Entre noyau dur et case vide, Edition Economia, 2002, p. 4.

34 Voir, Y., Schemeil, Op. Cit., p. 218.

35 Voir, G. Marcou, « L'adaptation des structures territoriales face à la politique régionale communautaire ». Revue d'études comparatives Est-Ouest, vol. 32, no 3, 2002, p. 139.

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terme slave oblast se rencontre pour le sens restreint de région administrative ou au contraire pour le sens très large de domaine ou champ scientifique, par exemple. La notion de region, d'origine latine, a été introduite plus récemment pour exprimer tout ce qui touche à la gestion politique (développement régional, conseil régional utilisent ainsi l'adjectif regionalen)36.

B- Jeux

L'expression jeu est conçue en général comme une manière particulière d'agir dans un univers où chaque preneur de décision possède un ensemble d'actions possibles déterminées par les règles du jeu37. Selon le rôle qu'il joue dans la coopération et la lutte, on distingue trois classes de jeu à savoir : les jeux de coopération à l'état pur38 ; les jeux de lutte à l'état pur39 et les jeux de lutte et de coopération40. Cette dernière classe est l'objet d'étude de cette analyse.

C- Enjeux

L'enjeu peut s'étendre comme la chose pour laquelle une entreprise est engagée pour sa possession ou son contrôle. C'est ce que l'on gagne ou l'on perd dans le jeu41.

II- Délimitation spatio-temporelle

Pour être scientifique, souligne Pierre De Senarclens42, les phénomènes dont on cherche à rendre compte doivent être partiels et localement situés43 ceci dans l'espace et dans le temps. Située au sud-est de la péninsule des Balkans, la Bulgarie est bordée par la Roumanie au nord (608 km de frontière), la Serbie (318 km) et l'Ancienne République yougoslave de Macédoine (148 km) à l'ouest, la Grèce (494 km) et la Turquie (240 km) au sud et la mer Noire à l'est (354 km de littoral).

La majeure partie de sa frontière septentrionale avec la Roumanie est délimitée par le Danube. Quadrilatère de 500 km de long sur 300 km de large, le pays couvre une superficie de 110 910 km2, soit environ le cinquième de la péninsule balkanique. Avec une population

36Voir, E. Boulineau, M. Suciu, « Décentralisation et régionalisation en Bulgarie et en Roumanie. Les ambiguïtés de l'européanisation », L'Espace géographique 2008/4 (Tome 37), pp. 351.

37 Voir, S. Tchokonté, « Enjeux et jeux pétroliers en Afrique : étude de l'offensive pétrolière chinoise dans le golfe de Guinée », Master II en science politique, option Relations internationales, Université de Yaoundé II, 2007/2008, p. 4.

38Ibid., les jeux de coopération à l'état pur sont ceux où les joueurs ont des intérêts concordants, formant une coalition et se comportant comme un joueur unique.

39Ibid., les jeux de lutte à l'état pur sont ceux où aucune possibilité de coopération n'existe entre les joueurs qui ont des intérêts strictement opposés s'exprimant en duel.

40Ibid., les jeux de lutte et de coopération regroupent simultanément des intérêts concordants et divergents. 41Ibid.

42 Voir, P., De Senarclens, et A., Yohan, La politique internationale: théories et enjeux contemporains, Paris, Armand Colin, 5e édition, 2006, p. 10.

43 Voir, A., Nzeugang, « Les États-Unis en Afrique après le 11 septembre 2001 : dynamiques locales d'une puissance globale. » Thèse de doctorat/Ph.D en science Politique, Université de Yaoundé II, 2009/2010, p. 33.

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de 7 364 570 en 2011, composée à 84 % de Bulgares, 9,4 % de Turcs, 4,7 % de Tsiganes et de minorités macédonienne, arménienne, grecque et juive44, la Bulgarie est le 16e pays le plus peuplé dans l'Union Européenne. Avec l'implosion de l'ex-URSS en 1989, la Bulgarie présentera une volonté d'intégrer l'UE, ce qui sera fait en 2007. Ainsi, engagée dans une démocratisation de la gestion administrative depuis lors, le travail aura comme borne temporelle inferieure 2007, année d'intégration dudit pays à la communauté européenne.

III- Problématique de l'étude

Pour Raymond Quivy et Luc Van Campenhoudt, une problématique « s'élabore progressivement, en s'appuyant sur la confrontation des points de vue, en repérant les divergences et les convergences, et en procédant à l'analyse de leurs implications45 ». L'objet en sciences sociales ne peut se construire que par rapport à une problématique bien précise. Tout en gardant à l'esprit que la recherche ouvre la voie à la théorisation, et que la théorie mène à la science, les deux permettant d'identifier des connaissances nouvelles et de mettre au point des outils de travail nouveaux46, l'étude prendra en compte les problématiques existantes sur les difficultés de mise en oeuvre de la régionalisation en Bulgarie (Paragraphe

I). Ensuite l'hypothèse de travail sera construite (Paragraphe II) et la grille méthodologique présentée (Paragraphe III).

Paragraphe I : considérations critiques sur les problématiques existantes

La recherche s'inscrit dans une perspective cumulative47. Il existe un nombre limité de travaux sur la question de la régionalisation en Bulgarie.

N. Ragaru48 revient sur la place qu'occupent les organisations non gouvernementales en Bulgarie, et leur rôle depuis la chute du communisme en 1989. Ayant participé à la protection et la valorisation des droits de minorités communautaires, elles ont contribué durant la transition postsocialiste, à la transformation politique, mais aussi sociale et économique de la Bulgarie, en servant de référence dans les débats politiques et l'organisation des pouvoirs publics de la société.

44 Voir, Y. Andonova, « Enjeux et défis de l'intégration européenne de la Bulgarie », Hermès, La Revue, 2008/2 (no 51), p. 114.

45 Voir, Q., Raymond et V., Campenhoudt Luc, Manuel de recherches en sciences sociales, 2e éd. Paris, Dunod, 2013, pp. 85-103.

46Ibid.

47 Voir, R. M., Tchingankon Yanou, « L'Action Publique Internationale à l'épreuve des migrations clandestines d'origine africaine : les prises de position communicationnelles entre logiques de gouvernement et logiques d'intérêt », Université de Yaoundé II, Thèse de Doctorat en Science politique, année académique 2011-2012.

48 Voir, N. Ragaru, « ONG et enjeux minoritaires en Bulgarie : au-delà de l' « importation/exportation » des modèles internationaux », Critique internationale 2008/3 (no 40), pp. 27-50.

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Si l'auteure a le mérite de présenter la participation et le rôle des ONG dans le processus de démocratisation en Bulgarie, il omet de montrer l'impact de la faible participation de l'opinion publique sur les questions de gouvernance. Etant un moyen pour les citoyens de faire entendre leur voix dans la gestion du pouvoir, la conception et la mise en oeuvre des politiques publiques qui leur sont dédiées s'établissant sans eux, celles-ci leur apparaissent contraires à leurs intérêts.

E. Boulineau et M. Suciu49, quant à eux, abordent la difficile mise en oeuvre de la décentralisation mieux, de la régionalisation dans les Etats postcommunistes que sont la Bulgarie et la Roumanie. Selon eux, si pour l'Europe occidentale, l'européanisation permet de dépasser la coupure avec l'Europe centre-orientale, elle se présente comme une injonction venant de l'Ouest pour cette dernière. Les auteurs ont le mérite d'insister sur la différence liée aux modalités de mise en oeuvre de la régionalisation entre les populations de l'Ouest et du centre-oriental de l'Europe.

Toutefois, ils ne s'appesantissent par sur l'usage stratégique50 de la politique de décentralisation fait par les PECO. En effet, la concurrence économique étant l'élément qui structure les relations entre acteurs sur la scène internationale depuis la fin de la guerre froide51, dans le but de servir leurs intérêts tout en donnant des gages d'application de la régionalisation à leurs partenaires européens, les deux Etats usent d'un discours diplomatique qui s'inscrit dans une « tactique de deux discours en poche52 ».

Les articles d'E. Boulineau53 étudient la persistance de la centralisation et Bulgarie et la difficulté de la réforme régionale dans ledit Etat. Pour l'auteure, bien que la décentralisation et la promotion des collectivités territoriales soient prônées par les autorités politiques du pays, dans la pratique de la politique de développement régional, le

49 Voir, E. Boulineau, M. Suciu, « Décentralisation et régionalisation en Bulgarie et en Roumanie. Les ambiguïtés de l'européanisation », L'Espace géographique 2008/4 (Tome 37), pp. 349-363.

50 L'adjectif stratégique, se rapprochant du terme stratagème, se présente comme une ruse militaire, une finesse de guerre pour surprendre ou tromper l'ennemi. Transposé dans un contexte social de non guerre, le terme se présente comme une « dialectique des intelligences, pour mieux marquer que la stratégie constitue le niveau supérieur où la finesse, la ruse, la rapidité de réaction l'emportent sur la force pure, qui se manifeste davantage dans la conduite du combat ». Voir, H., Coutau-Bégarie, Traité de stratégie, 7e édition revue et augmentée, Paris. Economia, 2011, p. 271.

51 Voir, A. Fogue, « Le mythe de la marginalisation stratégique de l'Afrique : analyse de la dynamique américano-chinoise autour du pétrole africain », in M. Kamto (dir.), L'Afrique dans un monde en mutation : dynamiques internes ; marginalisation internationale ? Paris, Afredit, 2010, pp. 265-275.

52 Voir, C. Boisbouvier, Hollande l'Africain, Paris, La découverte, 2015, p. 281.

53 Voir, E. Boulineau, « La persistance de la centralisation en Bulgarie : héritage du passé ou effet de crise ? » in V., Rey, L., Coudroy de Lille et E., Boulineau, L'élargissement de l'Union européenne : Reformes territoriales en Europe centrale et orientale, Paris, L'Harmattan, 2004, pp. 39-49 et « Sur le chemin de l'intégration européenne : les difficultés de la reforme régionale bulgare », consulté sur www.google.com le 02/06/17.

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fonctionnement hiérarchique et la gestion sectorielle perdurent ; ce qui exprime le maintien du statu quo marqué par la centralisation du pouvoir.

Si l'auteure a le mérite de présenter le caractère mitigé du processus de décentralisation en Bulgarie, elle ne présente par la différence dans la conception de ladite politique que l'on soit à l'Ouest, au Centre ou à l'Est. L'idée de décentralisation comme vecteur de démocratisation illustre d'une autre façon l'interrogation sur sa pertinence en Europe centrale et orientale. Si l'on se réfère au cas français, la problématique de la décentralisation n'a émergé qu'au terme d'évolutions historiques ayant préalablement fondé et consolidé l'État démocratique au cours d'un long processus de centralisation. Ainsi la décentralisation appert-elle plutôt comme une conséquence de la démocratisation de l'État qu'une condition de celle-ci. Mais alors qu'à l'Ouest de l'Europe, la décentralisation appert comme un moyen d`approfondir encore la démocratie, à l'Est, il s'agit avant tout de la reconstruire sur le modèle libéral.

Des articles ci-dessus recensés, il ressort que peu de travaux ont abordé la problématique de la régionalisation en Bulgarie sur le plan stratégique. La présente étude repose, entre autres aspects, sur une exigence de démarcation par rapport aux travaux sus-évoqués. Sans vouloir remettre en cause leur pertinence, il convient de rappeler que notre objectif est de faire part de l'usage stratégique de ladite politique par les autorités bulgares.

Partant de cette considération, la question centrale de recherche est formulée de la manière suivante: pourquoi la régionalisation trouve-t-elle une difficulté à être appliquée en Bulgarie ?

Paragraphe II : Hypothèse de sens

L'hypothèse de travail, en tant qu'interprétation anticipée de phénomènes, constitue le point de départ et la boussole de « tout raisonnement expérimental »54. Elle est, en d'autres termes, une proposition provisoire faite par le chercheur à partir de l'observation des faits, dont la démonstration se fera dans le corps du travail55. C'est une tentative de réponse à une ou plusieurs questions théoriques ou observations empiriques, l'explication provisoire d'une réalité. Elle doit être confirmée ou infirmée à la fin, par les résultats de l'étude. Ainsi l'hypothèse de cette analyse est la suivante :

54 Voir, L., Sindjoun, L'Etat ailleurs. Entre noyau dur et case vide, Paris, Edition Economia, 2002, p. 11.

55 Lire à ce propos le document « A la recherche d'une définition de l'Epistémologie » distribué dans le cadre des cours d'Épistémologie des Sciences Sociales, dispensés par le professeur Louis-Paul Ngongo, Université de Yaoundé II, année académique 2011-2012, p. 2.

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- Les autorités politiques bulgares feraient preuve de ruse dans la mise en oeuvre de la politique de régionalisation tant au niveau national qu'international. Localement, elles la limiteraient à l'aspect normatif et adopterait, sur la scène européenne, un « discours double » en ce qui est de sa mise en oeuvre, dans le but de mieux se positionner et préserver leurs intérêts ceci en fonction des enjeux, des acteurs en présence et selon différents contextes.

Paragraphe III : Grille méthodologique de l'étude

Le résultat de la recherche dépend des techniques de collecte de données utilisées, de la méthode qui permet de les interpréter et du paradigme utilisé56.Trois grandes articulations meubleront ce cadre méthodologique : l'étude du rapprochement entre l'objet d'étude et certaines écoles de pensée des relations internationales (A), la présentation des techniques de collecte de données (B) et l'analyse des données collectées sur le terrain (C).

A- Cadre théorique

Le terme théorie vient du grec « theorein » qui signifie observer avec émerveillement ce qui se passe pour le décrire, l'identifier et le comprendre57. C'est un système d'idées qui fonde la pertinence d'observations concrètes, qui leur donne de la cohérence et qui rend leur explication adéquate à la réalité. Il s'agit d'un exercice d'abstraction ou de distanciation par rapport au réel, accompagné ou non d'un effort de conceptualisation et de systématisation. C'est aussi une décision volontaire de discerner les faits observables pour ne retenir que ceux qui sont pertinents, au regard de la théorie et ignorer tous les autres58. Ainsi, en raison de l'approche stratégique choisie, le néoréalisme (1) et la théorie des choix rationnels (2) sont les grilles théoriques de cet exercice scientifique.

1- Le néoréalisme

Le néoréalisme est une approche théorique des Relations Internationales qui estime que c'est la structure du système international qui conditionne le comportement des Etats et les rapports qu'ils entretiennent sur la scène mondiale. Kenneth Waltz conçoit trois éléments caractérisant cette théorie à savoir : l'anarchie de la scène internationale, la survie des Etats et la répartition inégale des ressources entre ces derniers59. L'anarchie conduit

56 Voir, Q., Raymond et V., Campenhoudt Luc, Manuel de recherches en sciences sociales, 2e éd. Paris, Dunod, 1995, p. 180.

57 Voir, D., Battistella, Théories des relations internationales, 2e éd, Paris, Presses de sciences po, 2006, p. 28.

58 Voir, Y., Schemeil, Introduction à la science politique : objets, méthodes, résultats, 2e édition revue et augmentée, Paris, Presses de sciences politiques et Dalloz, 2012, p. 178.

59 Voir, K. Waltz, Theory of International Politics, New York, Mac Graw Hill, 1979, p. 81.

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chaque Etat à adopter une politique qui lui est propre, ceci en raison de l'absence d'une autorité centrale capable d'ordonner les rapports entre les pays composant l'espace mondial. La survie, quant à elle, est une nécessité pour l'Etat de perpétuer son existence et de survivre au sein dudit système. Enfin, bien que tous mus par une fonction identique de survie, il n'en demeure pas moins que les capacités dont dispose chaque Etat, c'est-à-dire les moyens d'y parvenir, ne sont jamais également réparties et cette inégalité participe au façonnement de leur comportement. La taille de la population et du territoire, la dotation en ressources naturelles, la capacité économique, la force militaire, et enfin la compétence et la stabilité politique sont les éléments repérés par Waltz pour définir le concept de capacité60.

C'est ainsi que pour assurer leur survie, les Etats disposent dès lors de deux stratégies : le bandwagoning ou l'équilibre des puissances. Dans le premier cas, les Etats chercheront à s'allier avec le ou les Etats les plus forts ou les plus menaçants, ceci afin de bénéficier soit de leur protection, soit pour augmenter l'assurance de ne pas être attaqué. Dans le second, il s'agira également de s'allier à d'autres unités, mais cette fois-ci dans le but de concurrencer une puissance dominante dont les capacités, notamment militaires, sont menaçantes61. L'attitude adoptée par la Bulgarie est d'intégrer l'UE afin de bénéficier de sa protection et de sa puissance économique.

2- La théorie ou l'école des choix rationnels

L'exemple parfait du choix rationnel vient de la notion utilisée en économie d'un consommateur doté d'une psychologie simplifiée, que l'on suppose parfaitement informé, guidé par la logique et non par les émotions, ayant des préférences et des gouts stables, qu'il peut hiérarchiser, incapable en tant qu'individu égoïste de se lancer dans une action collective pour un bénéfice commun62. Mancur Olson se demande pourquoi des individus égoïstes parviendraient malgré tout à se lancer dans une action collective. Pour deux raisons : personne ne peut s'approprier un profit collectif car il est indivisible, et ceux qui n'ont rien fait ou très peu fait pour l'obtenir en profiteront autant que les autres. Le comportement le plus rationnel consiste donc à « tirer les marrons du feu », tout en laissant les autres payer les coûts de l'action collective et d'en empocher discrètement les gains63.

Partant de cette théorie, le but de la Bulgarie est de profiter de la puissance de l'UE, ceci en valorisant la position de « nation favorisée à la périphérie » qu'elle a occupé durant la

60Ibid.

61Ibid., p. 88.

62 Voir, Y., Schemeil, Introduction à la science politique : objets, méthodes, résultats, 2e édition revue et

augmentée, Presses de sciences politiques et Dalloz, 2012, pp. 261-262.

63Ibid.

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seconde guerre mondiale de 1941 à 194464, tout en conservant une « modernité soviétique65 » qu'elle revendique, exprimée dans la conception et la mise en oeuvre de ses politiques publiques nationales, d'où son choix de ralentir la mise en oeuvre de la régionalisation sur son territoire.

B- Technique de collecte des données

Comme le précise Madeleine Grawitz à propos des techniques de collecte de données, il s'agit « de procédés opératoires rigoureux, bien définis, transmissibles, susceptibles d'être appliqués à nouveau dans les mêmes conditions, adaptés aux genres de problèmes et de phénomènes en cause, toute recherche en sciences sociales doit comporter l'utilisation66 ». Les faits sociaux étant au coeur de la vie politique, ils sont justiciables des méthodes d'investigation qui ont été mises au point et qui sont effectivement appliquées dans le champ des sciences sociales67. Deux techniques de collecte des données ont été retenues dans cette recherche. Il s'agit de la recherche documentaire (1) et de la recherche empirique (2).

1- La recherche documentaire

La réalisation d'un travail scientifique relève de la gageure. L'importance des données à collecter, et la durée de la recherche68, constituent des obstacles majeurs sur la route du chercheur. Il lui est nécessaire d'user de méthode et de détermination pour pouvoir réaliser une recherche efficace et acceptable. Selon Michel Beaud, un bon travail scientifique est le résultat d'un juste équilibre entre théorie et empirisme69. Le travail sur le terrain doit être intimement lié à la réflexion théorique. Dans la conduite de cette recherche, il a été accordé une importance particulière à la recherche documentaire. La fréquentation de la Foundation for Local Government Reform (FLGR) a permis d'acquérir un maximum de connaissances sur le sujet. Il s'est agi également d'user de l'outil internet pour obtenir toutes les informations sur la décentralisation en Europe et dans le monde, de même que d'autres travaux qui traitaient de la Bulgarie.

64 Voir, B. Lory, « Le tour de Bulgarie », in Outre-Terre, 2004/2 (no 7), pp. 312-313.

65Ibid.

66 Voir, M., Grawitz, méthodes des sciences sociales, Paris, 10e éd. Dalloz., 2001, p. 352.

67Ibid., p. 93.

68 De 2 ans et demi à 3 ans, au moins, pour une « bonne thèse », lire à ce sujet M. Beaud, L'art de la thèse, La

découverte, Paris, 2006, 192 p.

69Ibid., p. 9.

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2- La recherche empirique

Le travail sur le terrain a été d'une grande utilité. L'importance de la recherche empirique, pour une bonne analyse, nécessite une présence régulière sur le terrain. Ainsi, la participation à des ateliers sur la démocratie locale à la mairie de Sofia, à des conférences et meetings sur la décentralisation, la régionalisation, de même que des échanges avec des experts de la FLGR Consult, ont contribué à la réalisation de cet exercice intellectuel.

C- Analyse des données

Pour mener à bien notre travail, deux méthodes d'analyse des données seront usitées à savoir l'approche géopolitique et l'approche stratégique. La géopolitique est une méthode qui nous apprend à déchiffrer l'actualité et à rechercher les motivations profondes des acteurs internationaux70. François Thual pense qu'à chaque fois qu'il y a tension, conflit, guerre, négociation ou crise, il faut se poser les questions suivantes : qui veut quoi ? Avec qui ? Comment ? Et pourquoi ? Cette approche permet d'échapper à l'événementiel fourni par les medias, pour accéder à l'explicatif. Elle reconstitue le squelette des enjeux où se déploient ces évènements. Elle arrive à transcender, démystifier les apparences, les discours officiels pour accéder à la réalité ; identifier les démarches, les intentions réelles même si celles-ci sont ensevelies au plus profond des attitudes des États. Elle permettra de décrypter les raisons qui conduisent les autorités bulgares à ralentir le processus de régionalisation.

Quant à l'approche stratégique, elle est une méthode organisée autour d'actions finalisées et calculées. Elle a pour but de permettre aux acteurs engagés, dans une entreprise quelconque, de minimiser les pertes tout en maximisant les profits. Il s'agira alors de voir comment la Bulgarie, dans le souci d'accéder et de profiter des multiples bienfaits de la communauté européenne tout en limitant l'influence de celle-ci dans la mise en oeuvre de la régionalisation, adopte une attitude variable selon les acteurs et les enjeux en présence71.

C'est partant de ce fait que le schéma du travail épousera concomitamment une approche descriptive de la politique territoriale en vigueur en Bulgarie qu'est la décentralisation (chapitre III) et l'ajustement dont elle fait l'objet par les autorités gouvernantes dudit Etat de l'UE (chapitre IV).

70 Voir, F. Thual, Méthodes de la géopolitique : apprendre à déchiffrer l'actualité, Paris, Ellipses, 1996, p. 4.

71 Voir, S. Tchokonté « Enjeux et jeux pétroliers en Afrique : étude de l'offensive chinoise dans le Golfe de Guinée », Master II en Science Politique, option Relations Internationales, Université de Yaoundé II, 2008, p. 13.

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Chapitre III : La Politique De Décentralisation En Bulgarie

Selon la Constitution, la République de Bulgarie est un Etat à régime parlementaire72, où le pouvoir politique émane du peuple et réside au sein de l'assemblée des représentants du peuple. Le régime politique institué reprend les caractéristiques de la démocratie pluraliste avec des garanties pour les droits de l'homme et la séparation des pouvoirs. L'organisation de l'État est unitaire, des unités territoriales autonomes ne sont pas admises73. Il est opportun de présenter le contexte juridique de la décentralisation (section I) de même que les acteurs et les différents instruments existants qui accompagnent sa mise en oeuvre (section II).

Section I : Le contexte juridique : des dispositions constitutionnelles et législatives

La constitution bulgare de 1991 reconnait le principe de l'autonomie locale à travers l'article 2 alinéa 1er de son préambule. Celle-ci dispose que : « La République de Bulgarie est un Etat unitaire qui respecte dans son organisation les principes de l'autonomie locale. Des formations territoriales autonomes ne sont pas admises. L'intégrité territoriale de la République de Bulgarie est inviolable74 ». La Bulgarie est un état unitaire avec une gestion administrative et territoriale à trois échelles à savoir les niveaux central, régional et local. Seules les subdivisions centrale et locale sont des niveaux de gouvernance75. Concernant la démocratie participative, l'article 136 de la Loi Fondamentale dispose que : « Les citoyens participent à la gestion de la commune tant par l'intermédiaire des organes d'autogestion locale qu'ils élisent, que directement, par référendum et assemblée générale de la population. Les limites des communes sont fixées à l'issue d'un référendum local76 ». Aussi son article 42 dispose que « Les citoyens ayant l'âge de 18 ans révolus à l'exception de ceux qui sont mis sous la tutelle et ceux qui purgent une peine privative de liberté ont le droit de participer à des référendums. L'organisation et les modalités suivant lesquelles il est procédé à des élections et à des référendums sont réglementées par une loi77 ».

La structuration constitutionnelle de la décentralisation est complétée d'une architecture législative. Il existe en plus de la Loi Fondamentale, une loi sur l'autonomie

72 Voir, Chapitre premier de la Constitution de la République de Bulgarie du 12 juillet 1991, révisée le 20 septembre 2004, sur les Principes fondamentaux, dans son article premier alinéa 1.

73 Voir, A. Todorov, « Le système politique en Bulgarie » in J. M. De Waele, P. Magnette, Les démocraties européennes, Armand Colin, Paris, 2008, p. 70.

74 Voir, Chapitre premier de la Constitution de la République de Bulgarie du 12 juillet 1991, révisée le 20 septembre 2004, sur les Principes fondamentaux, dans son article 2 alinéa 1.

75 Voir, H. P. Agbozo, La mise en place des politiques de développement local en Bulgarie, Rapport de stage, juin-août 2016, p. 11.

76 Voir, article 136 de la Constitution de la République de Bulgarie du 12 juillet 1991, révisée le 20 septembre 2004.

77Ibid., texte publié dans le Journal Officiel Bulgare No 100/1996, amendé au Journal Officiel Bulgare No 69/99.

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locale et l'administration locale, une loi sur les budgets municipaux, une loi sur l'organisation administrative et territoriale et une loi sur le développement régional ainsi qu'une stratégie nationale de décentralisation78. Aussi ces lois sont accompagnées de règles internationales à l'exemple de la charte européenne de l'autonomie locale, qui fait partie intégrante des politiques de décentralisation de la Bulgarie vu qu'elle a été ratifiée et adoptée par ledit Etat en 199579. Ces lois sur la décentralisation font l'objet d'une mise en oeuvre sur l'étendue du territoire bulgare par des acteurs disposant d'instruments spécifiques à cette fin.

Section II : Les acteurs et les instruments de la décentralisation

La conception et la mise en oeuvre du processus de décentralisation sont effectuées par différents acteurs en Bulgarie. Ils se distinguent entre institutions publiques et organisations non gouvernementales, pouvant être subdivisés en acteurs centraux, régionaux et locaux.

- Le Conseil National de la Décentralisation et le Ministère du Développement régional et des Travaux publics sont des acteurs centraux du processus. Le premier est un organe consultatif dans la conduite de la politique de décentralisation, tandis que le second est en charge de la définition du plan stratégique de décentralisation et de sa mise en oeuvre.

- Les régions et le Conseil de développement du district sont les acteurs régionaux. Les régions (NUTS3), nommées districts, sont sous l'autorité d'un gouverneur qui représente l'Etat au niveau de la région. Chaque circonscription administrative dispose d'un Conseil de développement du district, composé de maires de municipalité, d'un représentant du conseil municipal et d'un représentant délégué de structures d'organisations nationales d'employeurs et d'employés. Enfin, Chaque région (NUTS2) dispose d'un Conseil régional de développement chargé de la mise en oeuvre des politiques de développement.

- Les acteurs locaux se composent de représentants élus pour un mandat de quatre ans. Le conseil municipal et le maire au niveau des municipalités ; le maire d'arrondissement et le conseil d'arrondissement au niveau des arrondissements sont lesdites autorités. Le conseil municipal, qui comprend les conseillers municipaux élus, définit la politique municipale de croissance et du développement dans le cadre prévu par la loi. Le conseil d'arrondissement comprend les conseillers d'arrondissement élus

78 Jl s'agit de la Loi d'Autogestion locale et administration locale (ALAL) du 17 septembre 1991 modifié à de nombreuses reprises (Loi de la Division Locale et Loi des Elections locales de 1995 et 2004), la Loi de Budget local (1998) et la Loi du Développement Régional (1999 et 2004).

79Ibid.

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qui assistent le conseil municipal sur les questions qui ont trait aux besoins fondamentaux de la population locale, la fourniture des services administratifs aux personnes physiques et morales, les travaux publics et l'hygiène dans les limites de l'arrondissement.

- Les multiples organisations non gouvernementales présentent en Bulgarie sont aussi des acteurs qui participent à la formulation et à la mise en oeuvre des politiques de décentralisation. L'Association Nationale Des Municipalités de la Bulgarie, par exemple, est un acteur important tant dans la définition que dans la mise en oeuvre des politiques au niveau national. Créé en 1996 par un tiers (1/3) des municipalités, toutes les 264 municipalités en sont devenues membres dès 1999. Elle représente les municipalités auprès des autorités centrales pour le développement du cadre de l'autonomie locale80. La NAMRB fournit des services pour accroître la compétence et la capacité des autorités locales et agit dans le domaine de la coopération internationale. Au niveau régional, chacune des régions dispose d'une association qui joue un rôle dans la définition et la mise en oeuvre des politiques de développement. Chaque municipalité dispose aussi d'une organisation qui participe à la mise en oeuvre de l'action publique au niveau local. D'autres organisations travaillent sur des thématiques précises et selon dans un champ d'action (écologie, développement durable, inclusion sociale, développement local, etc.). Tel est le cas de la FLGR qui intervient dans la gouvernance locale.

Tableau 1 : Les acteurs de la décentralisation en Bulgarie

Acteurs nationaux Acteurs régionaux Acteurs locaux

Conseil National pour la
Décentralisation

Conseils de développement
régionaux

Conseils municipaux

Ministère du

Développement régional et
des Travaux Publics

Gouverneurs de districts

Maires

Ministères sectoriels

Conseils de développement
de districts

Conseils d'arrondissement

Association des
Municipalités de Bulgarie

Associations de régions

Associations locales

Source: Archives de la Foundation for Local Government Reform

Les instruments de la décentralisation peuvent être définis comme l'ensemble d'institutions, tant physiques que normatives, qui concourent à la mise en place et l'application effective de la démocratie locale en Bulgarie. L'on distingue ainsi le referendum,

80 Voir, H. P. Agbozo, Op.Cit., p. 15.

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les assemblées générales d'habitants, la souscription, les débats publics, le Médiateur de la République bulgare, les conseils de jeunes et l'information des citoyens.

- Regroupement d'habitants pour un dialogue direct avec l'autorité locale, l'assemblée générale d'habitants est un outil de concertation à vocation décisionnelle. Elle peut prendre des décisions à la majorité absolue, considérées comme valables si au moins un tiers des électeurs de la localité y ont participé et donné leur position. Elle donne son avis sur des questions d'urbanisme, d'équipements publics, de sécurité ou encore de sauvegarde des terres agricoles et des forêts de la localité.

- La souscription est un type de pétition qui autorise chaque citoyen d'entreprendre une action pour soumettre des propositions à la collectivité. Aussi faut-il la signature d'au moins 1/4 des électeurs de la localité pour que le Conseil Communal étudie la proposition et prenne une décision.

- Organisé par l'organe d'autogestion locale, le débat public est une consultation de la population sur un projet local à travers un débat, une discussion. Il permet aux habitants de donner leur avis sur un sujet majeur. L'annonce du débat est faite par voie de publicité obligatoire.

- Aussi appelé le protecteur du citoyen, le Médiateur de la République, ou encore l'ombudsman, est prévu à l'article 19 de la loi du 23 mai 2003 portant sur l'autonomie locale. Il a pour rôle de « recevoir et d'examiner les plaintes et les signalements concernant les violations des droits et des libertés par les autorités municipales et gouvernementales et leurs administrations ainsi que par les personnes affectées à la prestation de services publics ». Il règle ainsi le conflit entre l'autorité et le citoyen, propose des réformes au Parlement et informe la population sur les projets de loi et le fonctionnement politique.

- Les conseils de jeunes développent des politiques avec l'Agence d'Etat pour la jeunesse et le sport et le Conseil National de la jeunesse. Les objectifs sont de mettre en place, dans les plus grandes villes de Bulgarie, des centres de jeunesses qui permettront aux jeunes et aux enfants de se réunir et de recevoir des informations liées à la décentralisation et à la démocratie locale.

- L'information des citoyens est un outil indispensable pour le bon fonctionnement de la démocratie participative. Elle se présente comme des réunions des organes de décision ouvertes au public ainsi qu'aux journalistes de presse écrite. Au niveau local, le procès-verbal des réunions du conseil municipal est mis à la disposition des citoyens

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sur demande. Des extraits des décisions prises par l'organe exécutif sont affichés en lieux publics et parfois diffusés par les médias.

- Intégré dans la Constitution bulgare et reconnu comme un principe fondamental de la démocratie, le referendum est un outil permettant au peuple d'exercer directement le pouvoir lorsqu'il lui est demandé son avis sur une loi.

Tableau 2 : L'organisation du referendum en Bulgarie

Referendum national sur la gestion de projets locaux

 

Referendum local

 
 

Cas obligatoire

Pas d'obligation pour le
gouvernement de faire un
referendum. Participation
décisionnelle.

Obligation pour la création,
la modification ou la
suppression ou la
suppression d'une
commune.

Initiative populaire

350000 signatures, 30% de
participation au referendum
pour être suivi.

1/4 des électeurs et
approbation du Conseil
Communal.

Initiative politique

1/10ème des députés, le
Président de la République,
1/10èmedes conseillers
municipaux du pays, ainsi
que des comités d'initiatives
des citoyens avec 150000
signatures citoyennes.

Vote à la majorité qualifiée
du Conseil Communal

Contrôle

La Commission électorale
centrale peut contester le
référendum, 7 jours après sa
publication.

Pas de contrôle.

Source : données personnelles.

Avec la perspective de l'intégration européenne en 2007, la Bulgarie s'était engagée à adopter les critères de convergence parmi lesquels figuraient la gestion décentralisée et l'avènement de collectivités territoriales81. Le gouvernement bulgare avait ainsi adopté une stratégie de décentralisation en juin 2006. Les mesures concernaient la décentralisation des compétences et des moyens vers les communes, l'optimisation des compétences du préfet et le renforcement des pouvoirs des mairies de villages (kmetstvo) au sein des communes82. Aussi la décentralisation est-elle encadrée par des dispositions tant constitutionnelles que législatives, mises en oeuvre par différents acteurs utilisant divers instruments. Toutefois, la

81 Voir, E. Boulineau, « La persistance de la centralisation en Bulgarie : héritage du passé ou effet de crise ? » in V., Rey, L., Coudroy de Lille et E., Boulineau, L'élargissement de l'Union européenne : Reformes territoriales en Europe centrale et orientale, Paris, L'Harmattan, 2004, p. 39.

82 Voir, E. Boulineau, M. Suciu, « Décentralisation et régionalisation en Bulgarie et en Roumanie. Les ambiguïtés de l'européanisation », L'Espace géographique 2008/4 (Tome 37), p. 358.

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La régionalisation en Bulgarie : étude des jeux et enjeux d'une politique territoriale

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difficile émergence d'un niveau régional autonome montre l'existence de blocages dans le processus de décentralisation conduisant à une persistance du fonctionnement centralisé de l'Etat83. Dans une promotion des collectivités territoriales et la nécessaire poursuite de la décentralisation au niveau régional, en vue de faciliter la gestion des fonds européens de tous les pays membres84, la Bulgarie reste pour l'heure un Etat de l'Union ayant la commune pour seul niveau de gouvernance locale, la régionalisation étant dissociée des mesures de décentralisation85. Présentons les raisons de ce ralentissement qui entraine une persistance de la centralisation en Bulgarie.

83 Voir, E. Boulineau, Op.Cit.

84 Voir, E. Boulineau, M. Suciu, Op.Cit., p. 354. 85Ibid., p. 356

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:

Chapitre IV

La Dissociation De La Régionalisation Des Mesures De
Décentralisation : Ajustement Etablie Par Des Entrepreneurs

Politiques

Selon l'économiste Wagner, un entrepreneur politique est « quelqu'un qui reconnaît qu'un groupe d'individus partage une même demande pour un bien collectif, ou un but commun, et qui croît qu'il peut en tirer un profit pour lui-même en supportant les coûts de la mise en place de l'organisation qui atteindra un tel but ou fournira un tel bien86 ». Ce dernier fait usage d'un profit privé pour servir le bien collectif. Cette conception économique de la notion d'entrepreneur politique montre les limites de la définition politique proposée par Olson87 pour qui l'entrepreneur politique, à moins de mesures coercitives ou de quelque autre disposition particulière l'incitant à agir dans l'intérêt commun, s'emploie uniquement à défendre et à satisfaire ses intérêts88. La définition politique est celle adoptée dans le cadre de cette analyse pour comprendre comment les autorités publiques ralentissent la mise en oeuvre de la régionalisation en Bulgarie dans l'objectif de participer au jeu politique, d'avoir une influence dans les politiques publiques territoriales et de préserver leurs intérêts. Aussi est-il question de montrer comment les autorités politiques font usage de la régionalisation dans des stratégies politiciennes tant sur le plan national (Section I) qu'international (Section II).

Section I : La régionalisation en Bulgarie

Dans l'effervescence du renversement des régimes socialistes, le processus de démocratisation s'est inscrit dans l'actualité des réformes administratives et territoriales89 bulgares par la décentralisation. Pour les populations, l'Etat moderne, fondé sur l'idée de formation et de participation de la collectivité nationale, supposait la pratique du débat démocratique et l'existence au moins d'une communauté d'intérêts, au mieux d'un sentiment de cohésion90. Dès lors, l'autonomie régionale fera l'objet de débat politique dès l'année 1998. Portée par l'UE, la décentralisation régionale recouvrira trois caractères principaux : le transfert de compétences du niveau central vers l'échelon régional, l'allègement de la tutelle

86 Voir, P., Jones, « The Appeal of the Political Entrepreneur », British Journal of Political Science, 8, (4), 1978, p. 484-504.

87 Voir, M., Olson, The Logic of collective action : Public goods and the theory of groups, Cambridge, Harvard University Press, 1965, traduction française, Logique de l'action collective, collection sociologie, PUF, Paris, 1978.

88 Voir, F. Facchini, « L'entrepreneur politique et son territoire », Revue d'Économie Régionale & Urbaine 2006/2 (juillet), p. 265-266.

89 Voir, E. Boulineau, M. Suciu, « Décentralisation et régionalisation en Bulgarie et en Roumanie. Les ambiguïtés de l'européanisation », L'Espace géographique 2008/4 (Tome 37), p. 350.

90 Voir, E. Boulineau, « La persistance de la centralisation en Bulgarie : héritage du passé ou effet de crise ? » in V., Rey, L., Coudroy de Lille et E., Boulineau, L'élargissement de l'Union européenne : Reformes territoriales en Europe centrale et orientale, Paris, L'Harmattan, 2004, p. 40.

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administrative centrale désormais réservée au contrôle de la légalité des actes émis par les unités décentralisées, et la détermination d'un cadre territorial de référence comme lieu de définition de projets dans une logique ascendante du bas vers le haut91.

Pour une cohésion économique et sociale des populations de la communauté et une distribution des aides au plus près des besoins du citoyen, l'UE établira une nomenclature d'unités territoriales statistiques (NUTS)92, adoptée par la Bulgarie. Ainsi, la politique régionale de l'Etat en 1999 (révisée début 2003) conçu deux découpages régionaux : le redécoupage NUTS 2 de 2007, qui équilibrait le poids démographique des régions, et le redécoupage NUTS 3 pour comprendre la dynamique temporelle des disparités régionales depuis 198993. Malgré cette organisation territoriale, la miniaturisation de la maille régionale bulgare en 28 unités exprime une contradiction avec le principe européen de vastes régions harmonisées94. Par ailleurs, après examen des compétences régionales, la décentralisation annoncée sur l'ensemble du territoire se déguise sous une déconcentration95. Ces contradictions trouvent explication dans la crainte des autorités politiques d'une perte de leur pouvoir.

91Ibid., p. 42.

92Trois niveaux de découpages ont été établis : le niveau 1 (NUTS 1) qui réunit de 3 à 7 millions d'habitants, le niveau 2 (NUTS 2) de 800 000 à 3 millions d'habitants, le niveau 3 (NUTS 3) de 150 000 à 800 000 habitants. Si cette nomenclature complexifie encore le découpage territorial de l'UE, on constate cependant qu'un certain nombre de niveaux NUTS correspondent aux découpages administratifs des États membres. Voir, S. Moreau, « L'organisation territoriale dans les pays de l'Union Européenne », stage mai-septembre, Conseil régional du Limousin, 2009, p. 4.

93 Voir, E. Boulineau, « À l'Est de l'Europe, quoi de neuf en matière de réformes territoriales ? Réflexions à partir de la régionalisation en Bulgarie », EchoGéo, no 35, 2016, mis en ligne le 19 avril 2016, consulté le 20/06/17 sur www.google.com

94Les 28 régions administratives (NUTS 3) perdurent et 6 régions de planification sont définies à partir du regroupement des précédentes pour correspondre au niveau NUTS 2. La région administrative conserve un rôle en matière de politique régionale avec la rédaction d'un plan régional de développement et l'existence d'un conseil du même nom, espace de concertation régionale entre différents types d'acteurs. Cette même structure se répète au niveau des régions de planification. Chaque niveau territorial est ainsi investi de prérogatives pour proposer des projets de développement dans un processus ascendant de l'échelon local vers le niveau central. Parmi ces nouvelles dispositions régionales, on relève l'ambiguïté de la position du gouverneur. Ce représentant des instances centrales, chargé du respect des intérêts de l'État, possède aussi un rôle dans l'initiative régionale. Or l'initiative régionale peut se trouver en porte-à-faux avec les exigences de l'État : les intérêts de l'État ne sont pas toujours compatibles avec ceux de la région. Les ambiguïtés de la fonction du gouverneur révèlent ainsi un manque de différenciation organique entre l'État et la région dans la législation bulgare. Voir, Voir, E. Boulineau, « La persistance de la centralisation en Bulgarie : héritage du passé ou effet de crise ? » in V., Rey, L., Coudroy de Lille et E., Boulineau, L'élargissement de l'Union européenne : Reformes territoriales en Europe centrale et orientale, Paris, L'Harmattan, 2004, p. 43.

95Ibid. La région ne dispose pas d'un organe élu alors que, sous le système socialiste, des conseils populaires étaient élus à tous les niveaux, régions comprises. En 1991, la suppression de l'organe régional élu au profit de la nomination d'un gouverneur témoigne d'une reprise en main par le niveau central de la gestion administrative et territoriale de la région. La crainte de la proclamation de l'autonomie régionale et la fragilité d'une structure étatique à reconstruire ont conduit au renforcement de l'assise administrative de l'État.

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Pour le gouvernement central, le processus de régionalisation fragilise l'Etat déjà marqué par de nombreux conflits territoriaux96. Dès lors, la centralisation se présente comme un rempart vis-à-vis des velléités centrifuges au regard de l'histoire, mais aussi comme une garantie de statu quo dans l'attente d'une stabilisation politique97. Ainsi, les autorités politiques capitalisent ces enjeux de stabilité territoriale et politique pour limiter le processus de régionalisation et conserver leur influence, de même que leurs intérêts, sur la scène nationale. Par ailleurs, la résistance des administrations centrale et sectorielle, par peur d'une perte de pouvoir et de contrôle de leurs financements et d'une diminution de la qualité du service public98, est une autre raison de la limitation. A partir de leur influence sur un système politique dépendant de ressources naturelles, les autorités gouvernantes des anciennes économies de l'Est, dont fait partie la Bulgarie, agissent de manière décisive sur les avancées institutionnelles engagées99. Pour beaucoup de dirigeants du niveau central, la régionalisation va dans le sens de permettre à certains leaders d'opposition d'accéder au pouvoir politique et à une tribune publique, ce qui leur permet d'exister sur le plan local et national et renforcer leur rôle d'adversaire politique100. Ajuster le processus de régionalisation à leur faveur, pour le vider de son contenu et le réduire à une case vide, afin de gérer ce « tumulte politique », est ainsi l'une des options privilégiées.

Au-delà de la peur des élites dirigeantes, la panne du processus de régionalisation est également l'expression d'une forte corruption qui entraine le désintérêt des populations sur ladite politique territoriale. Considérée comme un « problème endémique101 », la corruption, qui gangrène la société bulgare, a conduit le pays à être classé en 2016 comme l'un des pays les plus corrompus d'Europe102. Depuis le début des années 1990, une dénonciation de la prédation des actifs publics, et les stratégies de captation de rentes de responsables

96Ibid., p. 40. Il s'agit de la guerre de libération contre l'empire ottoman en 1878, les deux guerres mondiales et la fin du communisme.

97Ibid.

98 Entretien avec M. Alexander Mihaylov, Expert-Consultant en gouvernance locale à la Foundation for Local Government Reform, le 16/02/2017.

99 Voir, M.-L. Duboz, « Bulgarie, Roumanie. Interrogations sur leur adhésion à l'Union européenne », Le Courrier des pays de l'Est 2007/5 (n° 1063), p. 37.

100 Tel est l'exemple du parti de l'extrême droite Ataka de Volen Siderov, parvenu à séduire 8,93 % des électeurs bulgares lors des élections parlementaires du 25 juin 2005. Avec 21 députés au Parlement (sur 240), la coalition nationaliste radicale Ataka s'est imposée comme la quatrième force politique du pays en obtenant un score de 9% aux législatives du 26 mars 2016. Voir, N. Ragaru, « Un parti nationaliste radical en Bulgarie : Ataka ou le mal-être du postcommunisme », Critique internationale 2006/1 (no 30), p. 42 et Voir, Le Monde.fr, « La droite bulgare gagne les élections législatives en Bulgarie », article mis en ligne le 27/03/2017, consulté le 22/06/17.

101 Voir, Le Monde.fr, « La corruption en Bulgarie, « un problème endémique », article mis en ligne le 24/09/2012, consulté le 21/06/17.

102 Voir, I. Huysen, « La corruption en Bulgarie, encore et toujours », article publié sur www.google.com, consulté le 21/06/17.

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administratifs, politiques et entrepreneuriaux est faite par la presse103. L'affaire Toplofikacija mettra à jour l'existence de collusions entre mondes politique et économique, et la distraction d'importantes sommes d'argent par d'anciens membres de la nomenklatura bulgare104. Ces révélations conduiront des observateurs à conclurent que l'Etat bulgare fonctionne comme un Etat semi-mafieux105, la corruption étant le plus pratiquée dans les services publics des douanes, de la justice, de la police, de la santé et de l'éducation106.

Cette « politique de la corruption107 » conduit à une crise de légitimité de l'Etat, les citoyens ne se reconnaissant ni dans les institutions républicaines comme la justice, ni dans les politiques publiques définies et mises en oeuvre, d'où une méfiance des citoyens vis-à-vis des autorités locales et nationales108. Les scandales de collusion entre politiques et affairistes étant monnaie courante, les échéances électives sont de fait marquées par des achats de voix massifs109, expression d'une participation passive desdites populations au phénomène et à une absence d'institution judiciaire forte pour condamner et combattre cette pratique déviante. La démocratie locale prenant en compte les citoyens ordinaires comme sujets actifs et comme porteurs d'une expertise et de compétences spécifiques, le processus de régionalisation est,

103 Voir, N. Ragaru, « Usages et force instituante de la lutte anticorruption en Bulgarie : l'affaire Toplofikacija », Droit et société 2009/2 (n° 72), p. 307.

104Ibid., pp. 303-308. C'est précisément pendant cet été 2006 qu'éclate un scandale autour de la société de chauffage de Sofia, Toplofikacija, une entreprise publique dans laquelle la municipalité détient 58 % des parts, et l'État 42 % 2. Son directeur, Valentin Dimitrov, est soupçonné, entre autres, d'avoir surfacturé à la compagnie des livraisons d'équipements par des sous-traitants privés en échange de commissions placées sur des comptes à l'étranger. Plusieurs chefs d'inculpation pèsent sur lui : non-respect des règles de change, fraude fiscale, détournements de fonds et blanchiment d'argent. Les mentions de Rumen Ovèarov, Krasimir Georgiev et Kornelia Ninova, respectivement ministre de l'Économie et de l'Énergie, coactionnaire de Bansko Properties et vice-ministre de l'Économie prouvent l'existence de connivences entre élites politiques et monde de l'entreprise.

105 En effet, selon le général Atanassov, ancien chef du contre-espionnage bulgare : « D'autres Etats ont une mafia. En Bulgarie, c'est la mafia qui a un Etat ». Voir, H. Despic-Popovic, « Bulgarie, la politique de corruption », article mis en ligne le 09/05/2013, consulté le 21/06/17.

106 Au terme d'une enquête conduite par le Centre d'étude de la démocratie (CSD) au sein de la population bulgare en 2012 et publié le 24 septembre de la même année, il ressort que les personnes interrogées considèrent deux fois plus, par rapport à la moyenne européenne, que la corruption est pratiquée dans les services publics des douanes, de la justice, de la police, de la santé et de l'éducation. Aussi, Avec 150 000 pots-de-vin par mois, la corruption en Bulgarie dépasse de deux à trois fois la moyenne européenne. Voir, Le Monde.fr, « La corruption en Bulgarie, « un problème endémique », article mis en ligne le 24/09/2012, consulté le 21/06/17.

107 Voir, H. Despic-Popovic, Op.Cit.

108 83% jugent la plupart des hommes politiques incompétents et 70% sont méfiants à l'égard de l'appareil judiciaire, chiffres recueillis durant l'entretien avec M. Alexander Mihaylov, Expert-Consultant en gouvernance locale à la Foundation for Local Government Reform, le 16/02/2017.

109 Selon le sociologue Antoniy Galabov, professeur de sciences politiques à la nouvelle université de Sofia et expert de l'ONG Transparency International, une stratégie politique d'achat de voix vise « à dégoûter les électeurs et à les détourner des urnes ». « Les partis politiques n'ont pas intérêt à voir les électeurs se mobiliser car à eux tous ils ont acheté 12% des voix du corps électoral. Ces voix compteront davantage si la mobilisation est faible que si elle était élevée, comme on aurait pu s'y attendre après la vague de manifestations de l'hiver », ceci durant le scrutin législatif de mai 2013. Voir, H. Despic-Popovic, Op.Cit.

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dès lors, difficilement mis en oeuvre en raison de l'absence de certaines valeurs démocratiques comme l'éthique citoyenne.

Ainsi, dans le but d'accroitre leur influence et/ou de préserver leurs intérêts, les autorités politiques bulgares mettent à contribution un ensemble de pratiques comme la corruption ou l'usage du dispositif administratif et normatif pour des desseins individuels. Dans cette perspective, ils instrumentalisent le nécessaire arrimage de l'Etat à la modernité démocratique promue par la communauté européenne qu'est la régionalisation, faisant de cette politique territoriale une importante ressource politique concourant à la réalisation de leurs divers projets politiques. De même, l'évaluation de la mise en oeuvre de cette politique territoriale, au niveau européen par lesdites autorités bulgares, est un discours diplomatique instrumental usant des nuances et des ambiguïtés du langage, en fonction des contextes, des enjeux et des acteurs en place.

Section II : La diplomatie bulgare et la mise en oeuvre de la régionalisation : un discours double sur la scène européenne

La manipulation du discours diplomatique est à la fois formelle et nécessaire pour l'équilibre et la stabilité internationale. Le discours diplomatique est une expression dans laquelle les notions d'ambiguïté, de contexte, d'émotions et de valeurs invitent l'analyste à s'approprier un savoir-faire en matière de décodage afin d'éclairer les sens cachés, les enjeux et les stratégies des acteurs qui s'expriment110. L'expression se comprend non seulement au sens de la manifestation d'une pensée et des valeurs, mais aussi des intérêts politiques et stratégiques. Ainsi, le discours diplomatique sur la mise en oeuvre de la régionalisation en Bulgarie est instrumental, car tout en étant dissuasif, amène l'auditoire à déconsidérer ce langage peu conforme à la transparence des mots et à une communication « vraie »111. Le discours diplomatique est alors placé en aval de l'action politique. Il la reflète et est mis au service des gouvernants, de leur vision, des comportements de puissance et des intérêts intrinsèques de l'Etat.

Le discours diplomatique revêt un statut binaire, aussi bien en tant que résultat d'une décision de politique étrangère (output de la boîte noire que représente l'appareil étatique) et ressource d'une politique (input du système international)112. Le discours diplomatique est fonction de la position hégémonique du pays locuteur dans son bloc géopolitique et de son

110 Voir, O. Arifon, « Langue diplomatique et langage formel : un code à double entente », Hermès, n° 58, 2010, pp. 71-78.

111Ibid., p. 74.

112 Voir, C. Villar, Le discours diplomatique, Paris, L'Harmattan, Collection « Pouvoirs comparés », 2008, p. 52.

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rôle circonstanciel dans une crise donnée113. Ainsi, le discours diplomatique bulgare sur la régionalisation est déterminé par un flux d'informations, qui conduisent les responsables politiques à prendre certaines décisions et à les adapter à l'évolution des enjeux et des rapports de force sur la scène internationale. Aussi capitalisent-ils des enjeux internationaux à travers les notions d'autorégulation et de rétroaction114. La question de la réforme des institutions bulgares prônée par la communauté européenne, telle que la justice, ou la mise en oeuvre de la politique de régionalisation, se voient ajuster selon les acteurs internationaux et les enjeux du moment. La position du gouvernement bulgare, sur la mise en oeuvre de la régionalisation, s'inscrit dans une « tactique de deux discours en poche115 » selon les rapports entretenus avec la Russie (A) et l'UE (B), cette prise de position devant nécessairement évoluer pour un épanouissement concret des populations (C).

A- Un accord entre discours bulgare et russe sur la centralisation territoriale...

La politique d'européanisation prescrite pour une modernisation de la société bulgare, qui passe par une réforme d'institutions tant judiciaire que politique, la lutte contre la corruption et la mise en oeuvre d'une politique de régionalisation, nécessaire au « retour » dans l'Europe116, est considérée comme un « diktat » par les autorités gouvernantes bulgares. En effet, vu de Sofia, le discours tenu en « Occident », après la guerre froide, stigmatise tout ce qui est lié à l'ancien régime sans considérer le fait que l'occidentalisation de la Bulgarie est, dans une large mesure, passée par la Russie117. Sur les plans politique et historique, considérée comme « meilleur élève » de la Russie, la Bulgarie a adopté un système communiste durant la bipolarité, et a toujours été russophile, par une culture socioreligieuse majoritairement orthodoxe, ce dès l'époque tsariste118. Aussi existe-t-il une reconnaissance bulgare à l'égard des Russes pour leur soutien durant la guerre de libération de 1878, mettant fin à près de cinq siècles de domination ottomane119. Dans l'aspect économique, ex-province

113Ibid., p. 157.

114 Selon Karl Deutsch, l'autorégulation est la capacité d'un acteur à réduire les éventuelles tensions internes et internationales afin d'éliminer les facteurs de déséquilibre pouvant nuire à ses intérêts, lire à ce sujet D. Batistella, « L'apport de Karl Deutsch à la théorie des relations internationales », Revue internationale de politique comparée, 2003/4 (Vol. 10), pp. 567-585. La rétroaction se comprend dans le discours diplomatique comme la correction permanente de l'impulsion initiale en fonction de l'écho suscité par un programme ou une prise de position, voir, C. Agbobli, « La communication internationale : état des lieux et perspectives de recherches pour le XXIe siècle », Communiquer, no 15, 2005, pp. 65-84.

115 Voir, C. Boisbouvier, Hollande l'Africain, Paris, La découverte, 2015, p. 281.

116 Voir, E. Boulineau, M. Suciu, « Décentralisation et régionalisation en Bulgarie et en Roumanie. Les ambiguïtés de l'européanisation », L'Espace géographique 2008/4 (Tome 37), pp. 350.

117 Voir, B. Lory, « Le tour de Bulgarie », Outre-Terre 2004/2 (no 7), p. 303.

118Du temps de l'Union soviétique, la République populaire bulgare était surnommée la « 16e République » de l'URSS. Voir, A. Salles et B. Vitkine, « Moldavie, Bulgarie : une vague « prorusse » dans l'est de l'Europe ? », article publié le 15/11/2016 sur www.lemonde.fr, consulté le 25/06/17.

119 Voir, B. Lory, Op.Cit.

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ottomane restée longtemps à l'écart des idées et des évolutions économiques, l'accès à la modernité par la « porte russe » a présenté de nombreux avantages120. Mais accélérateur de la modernisation bulgare dès 1950, l'aide soviétique se verra discréditée après 1989 et l'Europe de l'Ouest exigera un effacement de la « modernité soviétique121» bulgare.

C'est ainsi que certaines autorités publiques fustigent la subordination de la Bulgarie à l'UE, qu'elle soit militaire (Otan), économique (FMI, Banque mondiale et Banque Centrale Européenne) ou politique122. Pour elles, l'idée selon laquelle il y aurait un modèle et des valeurs occidentales sur lesquels il conviendrait de s'aligner est dénoncée comme une illusion123. Aussi prônent-elles une reconsidération des relations établies avec la communauté européenne et un rapprochement avec la Russie qui milite pour une non-ingérence étrangère dans les affaires intérieures de l'Etat et le renforcement de la souveraineté nationale, politique diplomatique qui corrobore la volonté gouvernante bulgare de renforcer la centralisation afin d'apporter des réponses étatiques adéquates aux velléités centrifuges et aux nombreux conflits territoriaux fragilisant la souveraineté bulgare.

Ce discours n'est que l'expression de la « diplomatie énergétique » de la Bulgarie. En effet, souffrant d'un fort déficit énergétique et souhaitant passer d'une économie d'insertion par spécialisation régressive à une modernisation de l'appareil de production, via l'importation de technologies et les investissements directs étrangers (IDE)124, la Bulgarie considère son approvisionnement énergétique par la Russie comme vitale125. Durant la période communiste, les choix de politique économique s'appuyant sur des activités intensives en ressources naturelles, ou sur des industries liées au mode de développement antérieur, ont enfermé l'économie bulgare dans des spécialisations régressives fortement contraintes par la compétitivité prix126. Bien avant leur quête en technologies de pointe dès 1980, la coopération avec l'URSS comblait le retard de développement économique, l'insuffisance des ressources énergétiques palliée par des importations de pétrole et de gaz à

120 Voir, B. Lory, Op.Cit. 121Ibid., p. 312.

122N. Ragaru, « Un parti nationaliste radical en Bulgarie : Ataka ou le mal-être du postcommunisme », Critique internationale 2006/1 (no 30), p. 44.

123Ibid.

124 Voir, M.-L. Duboz, « Bulgarie, Roumanie. Interrogations sur leur adhésion à l'Union européenne », Le Courrier des pays de l'Est 2007/5 (n° 1063), p. 36.

125La Bulgarie est très dépendante sur le plan énergétique de la Russie, d'où viennent 92 % du pétrole, 100% du gaz, le combustible nucléaire également puisque les centrales sont de conception russe. Il y a des liens historiques solides entre les Bulgares et les Russes (la guerre russo-turque de 1878 est à l'origine de l'indépendance retrouvée du pays), ce qui rend cette dépendance plus acceptable. Voir, Entretien avec M. E. De Poncis, ancien Ambassadeur de France en Bulgarie, « De la Bulgarie et de quelques grandes questions européennes », article publié sur Diploweb.com, consulté le 25/06/17.

M.-L. Duboz, Op.Cit.

126 Voir,

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bon prix et par la technologie nucléaire127, d'où la nécessité, pour les autorités bulgares, de conserver ce lien et cet héritage soviétique. Aussi, depuis la fin de la guerre froide, la concurrence économique structure les relations entre acteurs sur la scène internationale128. Les rapports commerciaux jouent un rôle déterminant dans les rapports de force, les acteurs économiques étant érigés en véritables décideurs, à tel point que l'on parle de nouvelle diplomatie sur la scène internationale129.

Pays à bas revenus, néanmoins pourvue en ressources naturelles notamment en bois, charbon, terres cultivables et d'un sous-sol qui recèle de la bauxite, du cuivre, du plomb et du zinc130, la Bulgarie compte s'appuyer sur la relation historique entretenue avec la Russie pour limiter son déficit énergétique. Ceci en profitant du pipeline russe « Bourgas-Alexandroupolis » passant par la Bulgarie et la Grèce131, mais aussi de l'oléoduc South Stream traversant la mer Noire, conduit par les Russes et passant par la Turquie qui, géographiquement proche de la Bulgarie132, améliorera la politique énergétique du pays.

Dans un autre aspect, ce discours diplomatique a aussi pour objectif un repositionnement géopolitique sur la scène européenne, dans une concurrence qui oppose Sofia à Athènes. En effet, dans le cadre de la Nouvelle Europe hitlérienne, de 1941 à 1944, arguant de sa frontière commune avec la Turquie, le pays obtenu de ne pas combattre pendant la campagne balkanique et de ne pas participer aux opérations sur le front oriental133. De même, sa position sur le front sud du Pacte de Varsovie au sein du bloc soviétique face à l'Otan, incarnée par la Grèce et la Turquie ses rivaux traditionnels, lui avait valu plusieurs avantages géopolitiques134. Mais elle sera supplantée dans sa position de « nation favorisée à la périphérie » par la Grèce dès 1981. Dès lors, son discours de « chantage » vis-à-vis de la politique d'européanisation prônée par l'UE, de même que le ralentissement du processus de régionalisation, expriment sa volonté de repositionnement en tant que périphérie privilégiée avec l'ouest européen.

127 Voir, B. Lory, Op.Cit., p. 304.

128 Voir, A. Fogue, « Le mythe de la marginalisation stratégique de l'Afrique : analyse de la dynamique américano-chinoise autour du pétrole africain », in M. Kamto (dir.), L'Afrique dans un monde en mutation : dynamiques internes ; marginalisation internationale ? Paris, Afredit, 2010, pp. 265-275.

129 Voir, J. Stopford and S. Strange, « The New Diplomacy » in Cambridge University Press, Rival states, rival firms: competition for world market shares, 1991.

130 Voir, M.-L. Duboz, Op.Cit. p. 35.

131 Voir, D. Teurtrie, « La stratégie de la Russie dans l'exportation de ses hydrocarbures : contrôle et diversification », Flux 2008/1 (n° 71), p. 31.

132Voir, Entretien avec M. E. De Poncis, ancien Ambassadeur de France en Bulgarie, « De la Bulgarie et de quelques grandes questions européennes », article publié sur Diploweb.com, consulté le 25/06/17.

133 Voir, B. Lory, Op.Cit. p. 313.

134Ibid.

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B- A l'antipode d'une volonté gouvernementale bulgare de renforcer des liens économiques et militaires avec l'UE

Le 1er janvier 2007 marquera l'achèvement du 5ème élargissement de l'Union européenne avec l'adhésion de la Bulgarie. La décentralisation servira de matrice d'organisation politique et administrative infra-étatique pour ledit Etat à la suite du bouleversement provoqué par la disparition de l'Union soviétique135. Cette intégration offrira aux pouvoirs publics l'opportunité de démontrer leur engagement à mettre en oeuvre les recommandations faites par la Commission européenne sur l'européanisation de leurs politiques publiques136.

Quoique la décentralisation n'entre pas dans les compétences de l'Union, elle concerne l'organisation interne des États membres en vertu du principe de subsidiarité, Bruxelles préconisera un découpage en régions statistiques, la nomenclature des unités territoriales statistiques (NUTS)137, dans ledit Etat. Le gouvernement bulgare adoptera ladite nomenclature avec une politique régionale établie en 1999, révisée début 2003. Ainsi, sous l'influence du Conseil de l'Europe, l'implémentation d'une politique territoriale de décentralisation et de régionalisation, avec le soutien d'organisations internationales et de fondations relayées localement par des ONG bulgares138, sera mise en oeuvre par Sofia. La décentralisation sera stimulée par la transposition des principes de la charte européenne de l'autonomie locale de 1985139. La ratification de cette charte par la Bulgarie en 1992 guidera les demandes de décentralisation du niveau central vers le local, à travers l'organe consultatif du Congrès des pouvoirs locaux et régionaux (CPLR)140. Le Congrès veille à l'application des principes de bonne gouvernance formulés dans la Charte européenne de l'autonomie locale141.

135 Voir, « La décentralisation en Europe », document rédigé par le comité des régions, consulté sur www.wikiterritorial.cnfpt.fr le 29/06/17.

136 Voir, N. Ragaru, « Usages et force instituante de la lutte anticorruption en Bulgarie : l'affaire Toplofikacija », Droit et société 2009/2 (n° 72), p. 304.

137 Voir, E. Boulineau, M. Suciu, « Décentralisation et régionalisation en Bulgarie et en Roumanie. Les ambiguïtés de l'européanisation », L'Espace géographique 2008/4 (Tome 37), pp. 353.

138 Voir, N. Ragaru, Op.Cit. p. 314.

139La Charte porte sur de multiples aspects liés à la décentralisation et à la démocratie au niveau local et régional : la liberté d'exercice des mandats électifs, les droits de recours contre les décisions de l'autorité de contrôle (l'État, en l'occurrence), les droits d'association entre elles des collectivités, le principe d'auto-organisation, les capacités juridiques, financières, humaines, etc. Elle donne un cadre précis et tout à la fois suffisamment souple auquel l'ensemble des États membres souscrivent. La question de l'autonomie politique administrative est au fond même de la Charte européenne de l'autonomie locale. Voir, « La décentralisation en Europe », document rédigé par le comité des régions, consulté sur www.wikiterritorial.cnfpt.fr le 29/06/17.

140 Voir, E. Boulineau, M. Suciu, Op.Cit.

141 Les principes de bonne gouvernance sont au nombre de 12 : des élections conformes au droit, représentation et participation justes ; la réactivité ; l'efficacité et l'efficience ; l'ouverture et la transparence ; l'Etat de droit ; un comportement éthique ; des compétences et des capacités ; l'innovation et l'ouverture d'esprit face au changement ; la durabilité et l'orientation à long terme ; la gestion financière saine ; les Droits de l'Homme, la diversité culturelle et la cohésion sociale et l'obligation de rendre des comptes.

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Il encourage les processus de décentralisation et de régionalisation ainsi que la coopération transfrontalière entre les villes et les régions. Comme tout membre de la communauté, le pays participe à la vie politique et diplomatique de l'institution. Il a ainsi occupé la présidence du Conseil de l'Europe du 10 novembre 2015 au 18 mai 2016142.

L'engagement d'une mise en oeuvre de la régionalisation par le gouvernement bulgare présente des desseins économiques et sécuritaires. Sur le plan économique, le pays ambitionne lier son économie aux économies mondiale et européenne via les investissements directs étrangers (IDE), afin de participer au projet européen de « faire de l'Union européenne l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d'une croissance économique durable accompagnée d'une amélioration quantitative et qualitative de l'emploi et d'une plus grande cohésion sociale, dans le respect de l'environnement143 ». Ayant connu une décennie de crise, qui a conduit le fonds monétaire international à lui imposer une caisse d'émission en 1997 avec une politique monétaire stricte qui se focalisait sur la bonne tenue des indicateurs macro-économiques144, la Bulgarie adoptera la même année une loi d'incitation aux investissements afin de sortir d'une crise qui l'a conduite au bord de la banqueroute145. Cette loi sera remaniée en 2004, afin de profiter davantage des investissements liés à la croissance économique. L'industrie bulgare étant majoritairement basée à l'époque socialiste sur l'exploitation des ressources naturelles, l'Etat cherchera à diversifier cette dernière pour qu'elle passe à une économie technologique et de connaissance, d'où la nécessité d'une interaction à l'UE.

L'intégration sera suivie par de forts investissements des pays membres de l'Union. La loi d'incitation aux investissements de 2007 stimulera, d'une part, la compétitivité de l'économie bulgare au travers du développement des technologies, des services et produits de haute valeur ajoutée et d'emplois à haute productivité, et, d'autre part, réduira les disparités régionales de développement économique en accord avec les mesures européennes146. Les avantages seront manifestes : les pays de l'UE forment 85% du stock et 78% des flux d'IDE en Bulgarie en 2009, la balance commerciale nationale est tournée vers l'Europe communautaire avec qui elle réalise 64% de ses exportations et 53% de ses importations en

142 Consulter le site conseil-europe.delegfrance.org

143 Voir, E. Boulineau, « La Bulgarie entre compétitivité et cohésion. IDE, fonds structurels et disparités territoriales dans un PECO », L'Espace Politique [En ligne], 15 | 2011-3, mis en ligne le 26 octobre 2011, consulté le 30/06/17. URL : http://espacepolitique.revues.org/2097 ; DOI : 10.4000/espacepolitique.2097

144 Voir, E. Boulineau, M. Suciu, Op.Cit., p. 353.

145 Voir, E. Boulineau, « La Bulgarie entre compétitivité et cohésion. IDE, fonds structurels et disparités territoriales dans un PECO », L'Espace Politique [En ligne], 15 | 2011-3, mis en ligne le 26 octobre 2011, consulté le 30/06/17. URL : http://espacepolitique.revues.org/2097 ; DOI : 10.4000/espacepolitique.2097

146Ibid.

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2009147. Cet afflux d'IDE concerne le tertiaire du commerce, du transport (17%), l'industrie de transformation (18%), l'immobilier (23%) et investit dans le secteur bancaire (20%)148.

Au niveau sécuritaire, l'évolution politique du régime russe, et sa volonté de se servir de l'arme énergétique comme instrument de puissance dans les relations internationales149, conduit les Bulgares à trouver dans la politique étrangère et de sécurité commune un dispositif de défense leur permettant de se prémunir des velléités de la Russie. En effet, dans l'objectif d'une diversification des routes d'exportation de ses ressources gazières et énergétiques, le Kremlin ne ménage aucun effort pour faire pression sur ses anciens Etats satellites d'Europe de l'est pour obtenir des compensations en échange des prix du gaz les plus bas d'Europe150.

De même, le déploiement de l'armée américaine, de blindés et d'équipements lourds en Bulgarie, sur la base de Novo Selo dans le cadre de l'opération « Atlantic Resolve » de l'Otan aux alliés d'Europe de l'Est, se présente comme la réponse à l'annexion de la Crimée par la Russie et le rôle joué par l'armée russe auprès des séparatistes dans l'est de l'Ukraine151. D'un autre côté, disposant de peu de moyens pour répondre efficacement à la vague d'immigration clandestine qui a cours en Europe, la Bulgarie s'appuie sur la technologie et les instruments de l'UE pour y faire face.

Sofia adopte ainsi une diplomatie au « visage de Janus » sur la question de la régionalisation, dont elle fait usage selon l'appréciation qu'elle se fait des enjeux en présence, ceci à l'aune de ses priorités économiques sur la scène européenne et internationale.

C- La nécessaire application de la régionalisation en Bulgarie

Face à la délégitimation de l'action publique et à la crise de citoyenneté, la gouvernance locale favorise la mise en place de mécanismes permettant aux citoyens d'être informés sur la régionalisation, de participer à sa définition, sa mise en oeuvre, son suivi, son évaluation et son contrôle. A la lumière des études faites, il est question de contribuer, à l'aide d'entretiens menés avec des experts en gouvernance locale durant le stage, à l'amélioration de la mise en oeuvre de la régionalisation par un renforcement de sa mise en application par des acteurs non-gouvernementaux jouissant d'une crédibilité auprès des populations locales et des partenaires nationaux et internationaux, comme la FLGR.

147Ibid. 148Ibid.

149 Voir, Fondation R. Schuman, « Apres l'adhésion de la Bulgarie et la Roumanie : en finir avec l'opposition entre élargissement et approfondissement », Question d'Europe no 49, article consulté sur www.google.com le 30/06/17.

150 Voir, D. Teurtrie, « La stratégie de la Russie dans l'exportation de ses hydrocarbures : contrôle et diversification », Flux 2008/1 (n° 71), p. 29.

151 Voir, Le Figaro.fr et Reuters, « Arrivée des troupes américaines de l'Otan en Bulgarie », article consulté sur www.lefigaro.fr le 30/06/17.

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La régionalisation est un processus par lequel s'opère la construction d'un nouvel espace d'action publique ayant pour objet de promouvoir une autonomie locale, par la mobilisation de son tissu économique et par le développement de son potentiel (infrastructures, voire par la mobilisation des ressorts identitaires et des solidarités locales ou régionales)152. Un dialogue interculturel, qui repose sur le respect d'autrui, la reconnaissance de son identité et son insertion dans la société, en est le gage d'une mise en oeuvre efficace. Les droits de chaque communauté ethnique et religieuse et la protection de leur identité culturelle sont garantis par la Constitution bulgare. La population dudit pays est composée à 84 % de Bulgares, les principales minorités étant les Turcs (9,4 %) et les Roms, appelés aussi Tsiganes (4,7 %). Les autres minorités sont les Macédoniens, les Arméniens, les Grecs, les Juifs153.

Toutefois, la gestion par les autorités bulgares des questions de défense, de reconnaissance et de respect des minorités remet en cause le processus de régionalisation en cours, ce qui entraine l'apparition de risques sociaux et sécuritaires. Au niveau social, le risque d'une rupture entre communautés de cultures différentes est perceptible, ce en raison d'une conception distincte du vivre ensemble, d'existence de clichés et d'une coexistence intercommunautaire limitée. Il existe une catégorisation entre communautés, opérée sur fond de déclassement social de la communauté Rom, dont les membres, majoritairement peu qualifiés, sont au premier chef touchés par les restructurations économiques et le chômage154. Dès lors, la notion de « tsiganisation » décrit une double ethnicisation de la pauvreté, les Roms étant présentés comme la figure par excellence du pauvre d'une part ; et, par ailleurs, atteindre un certain degré de marginalité sociale est vécu, en milieu bulgare, comme un franchissement symbolique des lignes de démarcation « ethnique155». Cette humiliation156 ressentie par cette minorité ne favorise pas la mise en place de la régionalisation par des dispositifs institutionnels visant à restituer aux citoyens, malgré leur différence identitaire,

152 Voir, G. Marcou, « L'adaptation des structures territoriales face à la politique régionale communautaire ». Revue d'études comparatives Est-Ouest, vol. 32, no 3, 2002, p. 139.

153 Voir, Y. Andonova, « Enjeux et défis de l'intégration européenne de la Bulgarie », Hermès, La Revue 2008/2 (n° 51), p. 114.

154Voir, N. Ragaru, « ONG et enjeux minoritaires en Bulgarie : au-delà de l' « importation/exportation » des modèles internationaux », Critique internationale, no 40, 2008, p. 14.

155Ibid., p. 37.

156 La notion d'humiliation est introduite dans les relations internationales par Bertrand Badie. Il la définit comme « toute prescription autoritaire d'un statut inférieur à celui escompté et non conforme aux normes construites dans les relations internationales ». Lire à ce sujet B. Badie, Le temps des humiliés : pathologie des relations internationales, Odile Jacob, 2014, p. 13. Transposé au niveau national, elle pourrait être présentée comme toute prescription d'un statut inférieur à celui escompté et non conforme aux normes établies par les membres d'une société.

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leur pouvoir de s'administrer localement (coopératives, associations villageoises, comités de quartier, etc.) dans une collectivité territoriale. En effet, l'application du principe d'égalité entre membre d'une communauté régionale est l'élément principal permettant de mesurer l'efficience d'une politique territoriale ; son non-respect entrainant généralement des replis identitaires.

D'un autre côté, l'assimilation forcée qu'a fait montre l'ancien régime communiste envers la minorité turque à partir de 1984, présente jusqu'ici un risque de déstabilisation sociopolitique. En effet, au sein de cette communauté, le facteur d'appartenance prioritaire est l'appartenance ethnique (Turcs vs Bulgares)157. La minorité turque avait souffert de discriminations lors de la « campagne de bulgarisation » de l'hiver 1984-1985 lorsqu'elle fut forcée d'adopter des patronymes bulgares, et au cours du printemps 1989, quand la répression poussa à l'exode plus de 100 000 Turcs bulgares vers la Turquie158. Cette douloureuse expérience a participé au renferment de cette minorité sur elle-même, une délégitimation de l'action gouvernementale en raison du doute sur la crédibilité de la politique de régionalisation et à une volonté de rattachement à la Turquie.

Au niveau sécuritaire, le processus de régionalisation répond à des demandes d'autonomie, d'équité et d'équilibre territorial dans le cadre de l'Etat nation159 et de la Communauté européenne. La « stagnation » du processus est facteur de radicalisation menant à une montée de frustration, de rejet de l'autre et d'actes de désespoir des populations160 et ceux-ci menacent la stabilité et la sécurité au niveau local, national et international. Le triangle d'or, qui articule développement, gouvernance (locale et nationale) et sécurité161 est dès lors remis en cause. Le développement n'est plus suffisant pour répondre aux attentes des populations. Les citoyens, en particulier les jeunes, exigent de l'Etat une exemplarité et demandent à pouvoir s'exprimer et participer aux décisions politiques qui les concernent directement au niveau régional162. Ce triangle d'or, constitué de la sécurité, le développement

157 Voir, Y. Andonova, Op.Cit. 158Voir, N. Ragaru, Op.Cit.

159 Entretien avec M. Alexander Mihaylov, Expert-Consultant en gouvernance locale à la Foundation for Local Government Reform, le 16/02/2017.

160 En raison de la corruption qui gangrène le conseil municipal de la ville balnéaire de Varna, Plamen Goranov, jeune homme de 26 ans, s'est immolé devant la mairie en février 2013. Voir, I. Huysen, « La corruption en Bulgarie, encore et toujours », article publié le 06/06/2013 sur www.rtbf.be, consulté le 03/07/17.

161 Voir, Centre International d'Etudes pour le Développement Local (CIEDEL), Evaluation thématique de l'appui de la France à la décentralisation et la gouvernance locale, Rapport final, octobre 2014, p. 53.

162Ibid.

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et la gouvernance, a en son coeur la région et pose la question de la gouvernance territoriale qui, en terme sécuritaire, renvoie au rôle du citoyen dans la gestion de la sécurité163.

Partant de l'analyse menée, deux finalités, répondant à des visions opérationnelle et politique de la régionalisation en Bulgarie, se dégagent.

Au niveau opérationnel, la concentration des pouvoirs de décision et des ressources au niveau de l'Etat central ne permet pas d'atteindre un fonctionnement optimum de l'Etat. Il est nécessaire de rapprocher l'administration des citoyens, pour fournir des réponses rapides et adaptées aux besoins de ceux-ci, par une participation des organisations non gouvernementales, spécialisées dans le processus de démocratisation, la société civile à l'éducation citoyenne des populations. Centrée sur l'obtention de résultats sur le terrain, la vision opérationnelle privilégie la recherche de l'efficacité et de l'efficience de la gouvernance publique. Elle est basée sur l'efficacité et l'efficience administrative (privilégier l'organisation de l'Etat qui permet de valoriser au mieux chaque euro investi par la communauté européenne et de s'assurer que les services publics atteignent bien les niveaux prévus au plan national) ; la qualité publique (mettre en oeuvre des services publics avec les meilleurs standards de qualité, en particulier en termes de continuité, d'égalité d'accès et de mutabilité) ; la recherche de l'intérêt général (chercher à répondre aux intérêts des citoyens sans générer de profits sur les services publics). Elle conçoit la régionalisation comme l'organisation optimale de l'Etat pour assurer au meilleur coût, et de manière efficace, les services sociaux de base et contribuer au développement économique régional164. Elle vise à apporter rapidement des avantages tangibles aux habitants en matière d'accès aux services sociaux de base (éducation, santé, eau, assainissement, transport) ; et en matière de réduction des inégalités (filets sociaux) et de développement économique (emploi, commerce, accès aux services financiers, accès au capital).

La vision politique est fondée sur l'état de droit et la démocratie, pour garantir le respect du vote des citoyens et l'égalité de traitement des collectivités territoriales par l'Etat quels que soient les résultats électoraux ; l'autonomie locale qui garantit aux responsables élus la capacité à gouverner le territoire sans ingérence de l'Etat central ou de ses représentants ; le respect de la diversité dans l'unité qui permet, dans le cadre national, à chaque collectivité territoriale d'opter pour le mode de fonctionnement qui lui convient et de définir ses choix de politiques publiques ; la participation, transparence et redevabilité permettant aux citoyens

163Ibid.

164 Entretien avec M. Alexander Mihaylov, Expert-Consultant en gouvernance locale à la Foundation for Local Government Reform, le 16/02/2017.

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organisés de s'impliquer dans la chose publique et de jouer un rôle à la fois de co-production des politiques publiques et de contrôle citoyen sur celles-ci ; la reconnaissance du territoire (reconnaître le territoire comme pierre angulaire de la gouvernance) ; la lutte contre la pauvreté, les inégalités et l'exclusion (mettre en place un système et des politiques d'intérêt général permettant de contribuer à réduire les inégalités et à limiter les phénomènes d'exclusion).

La vision politique répond au double enjeu de conciliation d'exigences d'unité et de diversité auxquelles fait face l'Etat, et de gestion d'une multiplicité de relations qui caractérisent la société bulgare. Il est nécessaire de construire un système de gouvernance multi-niveau basé sur la recherche de la subsidiarité et le respect de l'autonomie locale. La vision privilégie la capacité des régions à s'organiser, à prendre des décisions, à définir leurs orientations politiques dans le cadre de l'autonomie qui leur est confiée par l'Etat et en interaction dynamique avec celui-ci. Elle conçoit la régionalisation comme le moyen de contribuer à la paix sociale et à la sécurité nationale et européenne par le développement et la gouvernance des locale des régions ; relégitimer l'Etat et les institutions publiques à partir du développement d'institutions et de services ; donner une solution politique à des revendications locales actuelles ou à venir en garantissant la capacité des régions à définir et mettre en oeuvre des politiques territoriales adaptées à leurs spécificités territoriales ; concilier au sein du territoire national les attentes, enjeux et particularités des situations locales, en développant l'autonomie des territoires ; permettre une meilleure implication des citoyens dans la gestion de la chose publique, en développant des espaces de participation à la définition, la mise en oeuvre et le contrôle des politiques publiques.

Aussi, les enjeux liés à la régionalisation se posent prioritairement en termes de mise en place d'un dispositif institutionnel qui, en appui à la mise en oeuvre du plan stratégique de décentralisation, par un « comité technique régionalisation et gouvernance territoriale » favorisera l'application de ladite politique territoriale. Ce dernier aura pour objectif de :

- Améliorer et appliquer le plan stratégique de décentralisation pour la période 2016-

2025 (afin de renforcer les collectivités territoriales et leurs associations dans les relations avec l'Etat et la communauté européenne ; construire des collectivités territoriales adaptées aux différents contextes en adaptant la décentralisation à chaque territoire ; développer les capacités politiques, techniques et financières des collectivités pour qu'elles soient en mesure d'assumer leurs rôles ; légitimer au regard

Mémoire professionnel 51

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du citoyen et de l'Etat les collectivités territoriales dans leurs capacités à apporter des services et à impulser le développement de leurs territoires) ;

- Identifier la localisation institutionnelle optimum des experts (la localisation institutionnelle de l'expert demande à être basée sur une analyse fine du processus décisionnel du pays en matière de décentralisation et gouvernance territoriale de manière à identifier la localisation institutionnelle qui permettra de faciliter l'influence sur les politiques de décentralisation et sur un dialogue politique et stratégique avec l'institution d'accueil pour valider la localisation institutionnelle de l'expert) ;

- Développer la localisation des experts auprès des collectivités territoriales et de leurs associations (afin de lever les freins règlementaires pour que les experts puissent être logés, quand cela est pertinent, auprès de collectivités territoriales ou d'associations de pouvoirs locaux, régionaux ou nationaux) ;

- Clarifier les relations hiérarchiques et les modalités de suivi de l'expert (il convient de clarifier les relations hiérarchiques entre acteurs nationaux, régionaux et locaux de la décentralisation d'une part, et experts en d'autre part afin de savoir, plus clairement, quelles sont les responsabilités de chaque partie, définir un réel dispositif de suivi, avec des indicateurs et une périodicité plus rapprochée que des rapports annuels) ;

- Renforcer l'intégration des experts techniques à la stratégie de décentralisation (améliorer l'environnement professionnel des experts suppose : (1) que leur insertion ait été diagnostiquée et négociée, (2) que l'expert soit doté de moyens pour lui permettre de financer des missions d'appui, des requêtes d'informations et d'études, des ateliers, des voyages, des formations, etc. Par ailleurs l'expert a besoin de deux choses : (1) une base arrière pour avoir un interlocuteur relais, soit pour dialoguer sur la conduite de son activité, soit pour solliciter les appuis dont il aurait besoin ; (2) être inséré dans un réseau de compétences pour échanger, soit avec ses pairs dans le même pays soit avec ses collègues dans le dispositif européen voire internationale).

Ce comité vise à renforcer la cohérence et la mise en réseau entre les acteurs dans la

mise en oeuvre de la régionalisation. Ce dispositif technique de mise en réseau et de concertation entre les acteurs, placé sous l'autorité du comité de pilotage qui est le Conseil des ministres, demanderait à être mis en oeuvre prioritairement par l'équipe opérationnelle constituée au sein des services et des organisations non gouvernementales, de manière à avoir une légitimité publique et à alimenter et être alimenté par l'action publique.

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Comité de pilotage : Conseil
de ministres

Comité de coordination

Comité technique
régionalisation et
gouvernance
territoriale

Equipe opérationnelle élargie

Décisions politiques

Pilotage opérationnel

Mise en oeuvre

Mémoire professionnel 52

Appui technique externe

 

Espace de concertation

 

Apport intellectuel Indépendant ; veille

 
 
 
 
 
 

Actions de production
intellectuelle

 

Actions de mise en
réseau

Concertation, consultation et
information des acteurs

 

Figure 4 : Schéma du dispositif institutionnel

Ainsi, au regard des enjeux, et de la faiblesse actuelle des moyens consacrés à cette politique, la participation technique, opérationnelle et politique d'organisations non gouvernementales et d'experts en gouvernance territoriale est une exigence de base pour être en capacité de mettre en oeuvre une stratégie qui permette de contribuer à la régionalisation, à la gouvernance, au développement et à la sécurité, aux niveaux local, national et international.

Mémoire professionnel 53

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CONCLUSION

Ce travail de recherche portait sur « La régionalisation en Bulgarie : étude des jeux et enjeux d'une politique territoriale en oeuvre dans l'UE ». En conformité avec les exigences académiques pour une formation intégrale en Master Conseil et Expertise en Action Publique (CEAP), notamment le parcours professionnel qui nécessite l'exécution d'un stage d'une durée minimum de trois (3) mois, la première partie s'est appesantie sur la description de la Foundation for Local Government Reform (FLGR). Il se dégage que cette dernière est un acteur non gouvernemental qui participe de la mise en oeuvre de la décentralisation à travers son équipe d'experts qui participe à la formation de l'opinion publique sur les processus de démocratisation d'une part, et, d'autre part, propose et assiste le gouvernement sur ladite politique territoriale. La seconde partie consistait à analyser la régionalisation dans son application. L'étude a démontré que celle-ci fait l'objet d'un usage à géométrie variable par les autorités politiques tant au niveau national qu'international. Sur le plan national, ladite politique n'est que théorique car la centralisation est de mise, ce qui conduit à dérives politiques et socioculturelles. A l'international, elle est un instrument géopolitique qui permet de sauvegarder des intérêts selon les acteurs et les enjeux en présence. Dès lors, pour une mise en oeuvre accélérée et concrète de la régionalisation, la mise en place d'un dispositif institutionnel en appui à la mise en oeuvre du plan stratégique de décentralisation, par un « comité technique régionalisation et gouvernance territoriale » est prôné, à partir du moment où les acteurs non-gouvernementaux jouissent d'une crédibilité auprès des populations locales et des partenaires européens et internationaux.

Mémoire professionnel 54

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Bibliographie

Ouvrages méthodologiques

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po, 2006.

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Economia, 2011.

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- Raymond, Q. et Campenhoudt Luc, V., Manuel de recherches en sciences sociales, 2e

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Ouvrages généraux

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- Villar, C., Le discours diplomatique, Paris, L'Harmattan, Collection « Pouvoirs comparés », 2008

Thèses, revues et articles scientifiques

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- Boulineau, E., « La Bulgarie entre compétitivité et cohésion.
IDE, fonds structurels et disparités territoriales dans un PECO », L'Espace Politique

- Duboz, M.-L., « Bulgarie, Roumanie. Interrogations sur leur adhésion à l'Union européenne », Le Courrier des pays de l'Est 2007/5 (n° 1063)

- Facchini, F., « L'entrepreneur politique et son territoire », Revue d'Économie Régionale & Urbaine 2006/2 (juillet)

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- Ragaru, N., « Usages et force instituante de la lutte anticorruption en Bulgarie : l'affaire Toplofikacija », Droit et société 2009/2 (n° 72)

- Tchingankon Yanou, R. M., « L'Action Publique Internationale à l'épreuve des

migrations clandestines d'origine africaine : les prises de position
communicationnelles entre logiques de gouvernement et logiques d'intérêt », Université de Yaoundé II, Thèse de Doctorat en Science politique, année académique 2011-2012

- Tchokonté, S., « Enjeux et jeux pétroliers en Afrique : étude de l'offensive pétrolière chinoise dans le golfe de Guinée », Master II en science politique, option Relations internationales, Université de Yaoundé II, 2007/2008

- Teurtrie, D., « La stratégie de la Russie dans l'exportation de ses hydrocarbures : contrôle et diversification », Flux 2008/1 (n° 71)

- Todorov, A., « Le système politique en Bulgarie » in J. M. De Waele, P. Magnette, Les démocraties européennes, Armand Colin, Paris, 2008

Mémoire professionnel 56

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Textes juridiques, rapports et webographie

- Agbozo, H. P., La mise en place des politiques de développement local en Bulgarie, Rapport de stage, juin-août 2016

- Centre International d'Etudes pour le Développement Local (CIEDEL), Evaluation thématique de l'appui de la France à la décentralisation et la gouvernance locale, Rapport final, octobre 2014

- Conseil de l'Europe, Rapport explicatif de la Charte européenne de l'autonomie locale, série des traités européens, no 122

- Conseil de l'Europe, Règlementation pour la promotion de la stratégie pour l'innovation et la bonne gouvernance au niveau local et l'attribution du Label

européen d'excellence en matière de gouvernance (EloGE), www.coe.int/local

- Constitution de la République de Bulgarie du 12 juillet 1991, révisée le 20 septembre 2004

- Despic-Popovic, H., « Bulgarie, la politique de corruption », www.google.com

- Fondation R. Schuman, « Apres l'adhésion de la Bulgarie et la Roumanie : en finir avec l'opposition entre élargissement et approfondissement », Question d'Europe no 49, www.google.com

- Huysen, I., « La corruption en Bulgarie, encore et toujours », article publié sur www.google.com

- « La décentralisation en Europe », document rédigé par le comité des régions, www.wikiterritorial.cnfpt.fr

- Le Conseil des Communes et Régions d'Europe (CCRE), La décentralisation à la croisée des chemins : reformes territoriales en Europe en période de crise, octobre 2013

- Le Figaro.fr et Reuters, « Arrivée des troupes américaines de l'Otan en Bulgarie », www.lefigaro.fr

- Salles, A., et Vitkine, B., « Moldavie, Bulgarie : une vague « prorusse » dans l'est de l'Europe ? », www.lemonde.fr

- Sine, A., et Lannaud, B., La mesure de la performance de l'action publique, Rapport du Conseil d'analyse économique 2007

Entretiens

- Entretien avec M. Alexander Mihaylov, Expert-Consultant en gouvernance locale à la Foundation for Local Government Reform, le 16/02/2017.

Mémoire professionnel 57

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Table de matières

Sommaire 1

Sigles et abréviations 2

Illustrations 3

RESUME 4

ABSTRACT 5

INTRODUCTION 6

PREMIERE PARTIE 8

DEROULEMENT DU STAGE A LA FOUNDATION FOR LOCAL GOVERNMENT

REFORM 8

Chapitre I : 9

La Foundation For Local Government Reform : Organisation Non Gouvernementale Relais

De L'ingénierie Démocratique En Bulgarie 9

Section I: La Foundation for Local Government Reform (FLGR) 9

A- La présentation de la structure 10

B- Le fonctionnement de l'institution 12

Section II : Les objectifs de la FLGR et l'apport de la FLGR Consult 13

A- Les buts de la FLGR 13

B- La FLGR Consult 14

Chapitre II : Déroulement Du Stage 17

Section I : Les missions confiées durant le stage 17

A- Les outils mis à disposition 17

B- Missions du poste occupé 17

Section II : Les apports du stage 18

A- Les compétences acquises 18

B- Difficultés rencontrées 19

DEUXIEME PARTIE 20

LA REGIONALISATION EN BULGARIE : ETUDE DES JEUX ET ENJEUX D'UNE

POLITIQUE D'INTEGRATION DANS L'UE 20

I- Clarifications conceptuelles 21

II- Délimitation spatio-temporelle 22

III- Problématique de l'étude 23

Chapitre III : La Politique De Décentralisation En Bulgarie 30

Section I : Le contexte juridique : des dispositions constitutionnelles et législatives 30

Section II : Les acteurs et les instruments de la décentralisation 31

Chapitre IV : 36

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La Dissociation De La Régionalisation Des Mesures De Décentralisation : Ajustement

Etablie Par Des Entrepreneurs Politiques 36

Section I : La régionalisation en Bulgarie 36

Section II : La diplomatie bulgare et la mise en oeuvre de la régionalisation : un discours

double sur la scène européenne 40

A- Un accord entre discours bulgare et russe sur la centralisation territoriale... 41

B- A l'antipode d'une volonté gouvernementale bulgare de renforcer des liens

économiques et militaires avec l'UE 44

C- La nécessaire application de la régionalisation en Bulgarie 46

CONCLUSION 53

Bibliographie 54

Ouvrages méthodologiques 54

Ouvrages généraux 54

Thèses, revues et articles scientifiques 54

Textes juridiques, rapports et webographie 56

Entretiens 56

Table de matières 57






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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo