WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Analyse critique de la crise de l'éducation scolaire chez Ivan Illich.


par Emmanuel De Marie MUSA MBWISHA
Institut Supérieur de Philosophie/KANSEBULA - Graduat en philosophie 2020
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

2.1.3. La problématique du rapport entre l'école et la société

En examinant la problématique du rapport entre école et société, nous voulons savoir en quoi la société contribue à la crise de l'éducation scolaire. En nous appuyant sur John Dewey à ce propos, nous pouvons lui prêter ces paroles qui s'annoncent comme suite : « l'école est essentiellement une institution créée par la communauté pour maintenir la vie et favoriser la prospérité sociale »82(*), Or l'école ne peut être qu'en crise quand toute la société dans laquelle elle émerge est en pleine crise. Jacques Julliard n'a-t-il pas dit que : « l'affaissement continu de l'école n'est que le signe le plus visible, le plus scandaleux, d'un effondrement spirituel de notre société ».83(*) C'est cette société qu'Illich conçoit comme immature et qui doit parvenir à la maturité, pour dépasser sa propre enfance, c'est seulement dans cette condition qu'elle deviendra vivable pour les jeunes. Nous ne pouvons plus conserver longtemps cette séparation tranchée entre une société adulte qui se prétend humaine et un milieu scolaire qui tourne la réalité en dérision. Que l'institution scolaire disparaisse, et il sera possible de ne plus favoriser un âge aux dépens des autres.84(*)

En classe, les enfants sont tenus à l'écart de la réalité quotidienne de la culture, Ils vivent dans un milieu beaucoup plus primitif, magique et d'un sérieux mortel. L'école ne saurait créer une telle enclave, où les règles de la vie ordinaire n'ont plus cours, si elle n'avait pas le pouvoir d'incarcérer les jeunes plusieurs années de suite sur son territoire sacré. À ce sujet, l'apôtre de Cuernavaca affirme que :

« Cette obligation de la présence change la salle de classe en une sorte de matrice magique, dont l'enfant renaît périodiquement chaque fois que s'achève le jour de classe ou l'année scolaire, jusqu'à ce qu'il soit enfin rejeté dans le monde des adultes. Ni cette enfance interminable ni l'atmosphère étouffante de la salle de classe ne pourraient exister sans les écoles. Cependant, ces dernières, en tant que seuls organes de transmission du savoir, pourraient exister tout aussi bien sans leurs salles de classe ou sans soumettre les enfants aussi longtemps à leur loi, et devenir plus répressives et plus destructrices que toutes les institutions que nous avons connues jusqu'alors. »85(*)

Il faut avouer sans ambages que l'instituteur scolaire, au moins en certains coins du monde, en Afrique tout particulièrement, a failli à sa vocation qui est de suppléer le milieu familial pour aider et préparer l'enfant, pour le rôle qu'il va jouer dans la société. L'école a failli à sa vocation, quand les examens sont considérés tout à fait abusifs et déplacés par lesquels elle déclare certains élèves dignes d'étudier davantage ou d'apprendre un métier, dignes de vivre et déclare d'autres indignes et par conséquent bons pour la rue et la misère. Yves-Emmanuel Dogbé illustre cet échec scolaire tant décrié par rapport à son rôle dans la société, l'éducateur scolaire continue à exiger à l'ensemble des élèves, par un enseignement trop dogmatique et encyclopédique, d'égales qualités intellectuelles, en masquant son impuissance pour sa mission et qualifie de toutes les épithètes diffamatoires et démoralisantes possibles les élèves qui n'arrivent pas à le satisfaire et dont il ne sait développer ce qu'ils ont de grandeur virtuelle, de talent.86(*)

Comme les éducateurs ne conçoivent pas l'enseignement sans le certificat de garantie, il s'ensuit que le système scolaire ne conduit pas à l'éducation et ne sert pas la justice sociale ; au cours de la scolarité, on confond l'instruction et le rôle que l'on jouera dans la société. Pourtant, apprendre doit signifier acquérir quelque compétence ou quelque savoir nouveau, mais la promotion sociale se fonde sur des opinions que d'autres se font de vous. Ainsi, s'instruire dépend souvent d'une certaine instruction reçue, mais la sélection pour un rôle social, pour un emploi sur le marché du travail, dépend de plus en plus de la seule durée des études. Illich remarque que le futur rôle social est fixé par un programme d'enseignement, au cours duquel le candidat doit satisfaire à un certain nombre de conditions s'il veut parvenir à l'acquisition du brevet.87(*) Au sein de l'école, l'enseignement est donné en fonction de ces rôles futurs et non pas du savoir à acquérir. La raison n'y trouve pas son compte, pas plus que la vertu libératrice qui devrait être le propre de l'éducation, « parce que l'école ne choisit d'enseigner que ceux qui satisfont, à chaque étape, aux mesures approuvées et définies au préalable par le contrôle social. Nous pourrions constater que le rang dans la société fut de tout temps assigné par une sorte de programme dont la société reconnaissait les mérites ».88(*)

L'éducation implique l'éveil d'une conscience vivante, à la fois de l'indépendance individuelle et d'une fraternité entre les hommes qui va de pair avec une découverte approfondie et une utilisation des connaissances accumulées dans la communauté humaine.89(*) Nous n'avons aucune raison de perpétuer la tradition médiévale, selon laquelle les hommes doivent être d'abord préparés au monde séculier en les enfermant dans une enceinte sacrée, serait-elle le monastère, la synagogue ou l'école.90(*)

* 82 J. DEWEY, Démocratie et éducation, traduit de l'anglais par Gérard DELEDALLE, Paris, Éditions Armand Colin, 1975, 94.

* 83 D. HAMELINE,Courants et contre-courants dans la pédagogie contemporaine, Paris, Éditions ESF éditeur, 2000, 120.

* 84 Cf. I. ILLICH, Une société sans école, 55-56.

* 85Ibid., 62.

* 86 Cf. Y.-E. DOGBE, La crise de l'éducation, Paris, Éditions AKPAGNON, 1979, 51.

* 87 Cf. I. ILLICH, Une société sans école, 28.

* 88Ibid., 29.

* 89Cf. ID., Libérer l'avenir, 132.

* 90Cf. Ibid., 116.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius