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Analyse critique de la crise de l'éducation scolaire chez Ivan Illich.


par Emmanuel De Marie MUSA MBWISHA
Institut Supérieur de Philosophie/KANSEBULA - Graduat en philosophie 2020
  

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1.2. Inventaire des manifestations de la crise de l'éducation scolaire

Nous abordons quelques points importants comme manifestations de la crise scolaire, nous analysons plus concrètement la mission et les finalités de l'école, le dysfonctionnement du système éducatif de notre pays et de la baisse de la qualité d'enseignement.

1.2.1. La problématique de la mission et de finalités de l'école

Le mot « crise » est certes galvaudé, mais il n'en demeure pas moins riche en connotations d'une rare pertinence pour qui se soucie d'éducation. Car il vient du grec krisis, qui signifie, jugement, décision, choix. Il implique une prise de conscience qui peut être salutaire et conduire au meilleur plutôt qu'au pire, pourvu que nous agissions en conséquence.22(*)

Christian Laval distingue deux formes de la crise de l'éducation qui sont imbriquées l'une dans l'autre. La première crise est celle de la scolarisation de masse qui concerne le rapport entre les classes sociales et qui pose essentiellement une question d'égalité. La seconde est la crise de l'institution scolaire, qui concerne le rapport entre les générations et qui pose, elle, une question de réciprocité. La traduction pratique de cette analyse est que l'on ne réussira à réduire la crise d'égalité qu'en répondant à la crise de la réciprocité, et inversement.23(*) Et l'école même, ce lieu où les enfants se rendent quotidiennement pour apprendre, est désignée par un mot au destin bien étrange en fait :

« Le grec scholè comme le latin schola ont pour sens premier le temps de loisir. Se souvenir que l'école est née du loisir est sans doute un moyen d'y retrouver la trace du plaisir et du privilège d'apprendre. Partant de loisir la schola devient le temps donné aux travaux d'esprit avant d'être le lieu réservé à l'étude. Au sens strict du terme elle est d'abord maternelle, puis primaire ou élémentaire, mais au-delà, elle devient collège puis lycée puis université. L'école désigne l'ensemble des institutions vouées à l'enseignement, quel qu'en soit le niveau ».24(*)

Les finalités de l'éducation répondent à la question quel type d'homme voulons-nous former, elles sont définies par le pouvoir politique aidé par un comité d'éthique et un comité scientifique. Elles véhiculent des valeurs et justifient les objectifs de l'éducation. Le problème posé par les finalités de l'éducation, c'est qu'elles servent généralement d'alibi et non de directionnel à la formation. Les finalités de l'éducation fournissent les directionnels autour desquels devraient s'organiser tous les autres objectifs, mais trop souvent les enseignants oublient ces finalités pour s'attacher à l'atteinte d'objectifs spécifiques.25(*)

D'aucuns estiment que nous devons éduquer l'enfant pour la société et d'autres voudraient que l'enfant soit éduqué pour lui-même, afin de lui permettre de s'épanouir. La première doctrine tend à être autoritaire, estimant qu'il faut forcer et presser l'enfant à acquérir l'éducation proposée. L'autre répond par contre, qu'il est injuste et dangereux de plier l'enfant à des normes qui ne sont pas les siennes, ce n'est pas former, mais déformer, former c'est respecter cette forme immanente à chaque enfant. Une société est en droit d'exiger de l'éducation qu'elle transmette à l'enfant ces valeurs sans lesquelles la vie sociale serait impossible. La force de cette conception est de montrer qu'en adaptant l'enfant et l'intégrant à la société, nous travaillons en même temps pour son bien. Pour la société ou pour l'enfant, il s'agit là d'une faute alternative. Entre l'individu et la société, il existe un troisième terme qui est l'humanité. L'enfant ne sera pas élevé pour qu'il demeure enfant, non plus pour en faire un travailleur et un citoyen, plutôt pour en faire un homme i.e. un être capable de communiquer et de communier avec tout ce qui est humain.26(*)

Le Père Bernard ILUNGA distingue quatre raisons principales de la pratique éducative, la première est l'incomplétude fondamentale de l'homme visant à rapprocher l'homme de lui-même et en lui-même, i.e. le rendre un peu plus humain, sans devoir jamais réussir à le rendre totalement humain, car le totalement humain est d'ordre de l'espérance et de la grâce. La deuxième raison est que la plasticité de la nature humaine, la qualité humaine de l'homme n'est jamais préfabriquée en l'homme, elle est au contraire post-fabriquée et cela grâce aussi et en grande partie à l'activité éducative. La troisième raison est la conquête du bonheur en vue d'éclairer la liberté de l'homme et lui donner des raisons de choisir la route qui mène au bonheur social. La quatrième raison est l'existence du penchant au mal en l'homme, le penchant au mal peut faire échouer l'homme à s'élancer vers son humanité, vers le bonheur. L'éducation, se pose donc comme l'auxiliaire de la vocation à l'humanité, dans l'homme.27(*)

Cette éducation est aujourd'hui systématisée par ce que nous appelons école. À ses débuts, l'école se présentait comme une simple maison d'accueil qui préparait les enfants des nobles à leur mission future de gouverner le monde. Mais en évoluant, l'école est devenue le creuset du savoir et de l'érudition pour la préparation de tous les futurs cadres à leur mission sociale orientée vers la promotion sociale intégrale. De la sorte, la société a considéré l'école comme la clé du progrès communautaire.28(*) Ainsi la société a trop attendu les fruits florissants de cette institution dans la mesure où, elle a cru que l'école était une institution puissante, capable de générer la promotion intégrale de l'homme et de traîner derrière elle toute la société pour la tirer de cette crise dont elle est victime. La société a tellement mystifié l'école qu'elle a même oublié que cette dernière était une émanation de cette même société et que, la vie de l'école non seulement dépendait de la société, mais elle partageait aussi les insuffisances de la société qui l'avait engendrée. Nous devons arriver à corriger cette idéalisation de l'école et du rôle qu'elle joue dans la société. La thérapie nouvelle consisterait à replacer l'école dans son contexte et à comprendre que nous ne pouvons avantageusement agir sur elle sans modifier avant tout, son contexte.29(*) Pourtant comme le dit Illich :

« Le but de l'éducation publique devrait aboutir à créer une situation dans laquelle la société oblige chaque individu à faire l'inventaire et de soi-même et de sa pauvreté. L'éducation implique l'éveil d'une conscience vivante, à la fois de l'indépendance individuelle et d'une fraternité entre les hommes qui va de pair avec une découverte approfondie et une utilisation des connaissances accumulées dans la communauté humaine. Cela suppose au départ une place à l'intérieur de la société où chacun de nous s'éveille par surprise, qui doit être un lieu de rencontre où les autres nous surprennent par leur propre liberté qui nous rend conscients de la nôtre ».30(*)

Pour Jacques Maritain, la tâche de l'éducation est de former un enfant déterminé appartenant à une nation donnée, à un milieu social donné, à un moment historique donné. L'éducation doit donc aider avant tout au développement dynamique par lequel l'homme se forme lui-même à être un homme, autrement dit de préparer l'enfant et l'adolescent à s'instruire pendant toute sa vie.31(*)

* 22 Cf. T. DE KONINCK, Philosophie de l'éducation pour l'avenir, Québec, Éditions Presses de l'Université Laval, 2010,117.

* 23Cf. C.LAVAL , « Les deux crises de l'éducation », in Revue du MAUSS, n°28,(Février 2006), 97.

* 24 Cf. A.-M. DROUIN, Pédagogie, Mots, Paris, Éditions Desclée de Brouwer, 1993, 44-45.

* 25 Cf. F. RAYNAL - A. RIEUNIER,Pédagogie, dictionnaire des concepts clés, Paris, Éditions ESF éditeur, 2009, 195-196.

* 26Cf. O. REBOUL, La philosophie de l'éducation, Paris, Éditions PUF, 1981, 46-47.

* 27 Cf. B. ILUNGA KAYOMBO, « Les raisons ultimes de la pratique éducative », in Quelle philosophie pour l'éducation de l'homme et la transformation de notre société, Actes de la journée d'études philosophiques, kansebula (mars 2010), 61-67.

* 28 Cf. E. J.-P.MWENZE WA KYUNGU, Philosophie de l'éducation, l'idéal pour l'école et le développement social du Congo démocratique, Lubumbashi, Éditions universitaires UNILU, 2016, 237.

* 29 Cf. Ibid., 233-234.

* 30I. ILLICH, Libérer l'avenir, 132.

* 31 Cf. J. MARITAIN,Pour une philosophie de l'éducation, Paris, Éditions Fayard, 1969, 17.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius