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La postérité de l'empereur Tibère (XVIIIème- XXIème siècle)


par Thomas Min-Tung
Université du Havre - Master 2 « Cultures, Espaces et Sociétés Urbaines et Portuaires » 2015
  

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II - Les fils de Germanicus, un héritage détruit

a. Les frères oubliés

Puis je fis appeler les trois garçons devant le Sénat : Néron, timide et mal à l'aise, mais affichant une dignité dont je ne l'aurais jamais cru capable, Drusus, arrogant mais en même temps boudeur, comme s'il me soupçonnait des pires intentions, et Caius Caligula, ravagé de tics et incapable de rester immobile...381

Évoquer les fils de Germanicus, c'est renvoyer à la personnalité du plus connu d'entre eux : Caius, plus connu aux yeux de la postérité sous le surnom enfantin « Caligula ». Mais l'on oublie trop souvent l'existence de ses deux aînés qui, durant le règne de Tibère, ont été plusieurs années les successeurs présumés au trône. Ces deux personnalités, si elles n'ont pas eu le temps de marquer l'Histoire de Rome par leurs victoires militaires ou leurs prouesses politiques, jouent un rôle non négligeable dans la postérité du règne de Tibère.

Des fils de Germanicus, Néron était l'aîné, le plus apte à prétendre à l'héritage. Ainsi on le présente parfois comme le plus grand allié d'Agrippine, tant car il sert ses ambitions de mère que par sa farouche opposition à Tibère et Séjan. Toutefois, si l'on reconnaît son intelligence et son éloquence, il reste aux yeux des historiens un jeune homme sans expérience - au contraire de ses ancêtres, il n'a jamais connu la guerre et il n'a pas eu à mériter son hérédité382. Tibère aurait voulu le retirer à l'influence de sa mère, peut-être était-ce son intention quand il proposa de le marier à sa petite-fille Julie - lui donnant une légitimité nouvelle dans la succession383 -, se basant sur un précédent : celui de l'adoption des Princes de la Jeunesse par Auguste, la volonté du prince étant d'empêcher leur mère de les pervertir et de les inciter à adopter ses propres tares morales384.

Du caractère véritable de Néron, on ne sait que peu de chose. Il reste un mystère, au plaisir de la fiction, qui peut l'utiliser comme elle le souhaite. Roger Caratini en fait un personnage arrogant, faisant crier à ses affranchis qu'il était, de droit, le petit-fils adoptif de Tibère et tenant des propos si

381. Massie 1998, p. 232

382. Maranon 1956, p. 112-113

383. Il devenait alors l'héritier de Drusus II et le présumé quatrième prince de Rome

384. Massie 1998, p. 240

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outranciers que les gens se détournaient de lui et que le prince ne l'écoutait jamais parler385. Le Néron du Rêve de Caligula est ainsi un personnage très secondaire, car trop âgé pour partager les jeux du narrateur, mais décrit comme jovial et aimable. Il est le seul membre de la famille de Germanicus que Tibère apprécie dans ses Mémoires : Néron était, dans son enfance, un « délicieux » et « intelligent » petit garçon et, en grandissant, devint une source de honte pour sa mère et un héritier présomptif inoffensif pour le prince. Il est présenté comme un homosexuel travesti, rappelant Julie par sa « moue boudeuse », devenu inverti à la suite de brimades de sa mère qui ne fut jamais satisfaite de lui. Tibère se prend d'affection pour ce jeune homme : il énerve Agrippine, ce qui le met en joie, ne démontre aucune arrogance - il ne le pourrait avec son attitude, et, quelque part, lui rappelle sa propre enfance, lorsqu'il voulait se faire remarquer par sa mère386.

Toujours dans ce roman, les préférences sexuelles de Néron le décrédibilisent aux yeux de Rome. Ainsi Tibère rapporte ses tentatives de séduction envers les sénateurs, durant son adolescence, et même, un jour, il tenta d'aguicher son propre oncle. Son jeune frère, Drusus III, ne lui porte aucune affection et se plaît à se moquer de ce travesti. Ainsi, un jour où il dîne avec sa mère et le prince, Tibère demande à Agrippine si elle l'estime fautif dans le fait de ne pas être reine :

- Reine ? Fit-elle, sans comprendre que je citais Sophocle. Nous n'avons pas de reines à Rome. - Sauf mon cher frère Néron, intervint Drusus.387

Car Drusus n'est pas aussi aimable que son frère. Tibère le décrit comme un « pudibond hypocrite », héritage de son père, dénué du charme de Julie et Antoine388. Rien ne lui est épargné : c'est un adepte de la dissimulation (il parvient même à abuser Tibère - pourtant doué dans ce domaine), est assoiffé de sang (il prend autant de plaisir à voir les gladiateurs tomber que Germanicus en ressentait devant les mutins se faisant justice389) et, comble d'horreur, se fait le délateur de sa mère et de son frère, tant par haine envers Néron que pour entrer dans les faveurs de Tibère. En vain, car il s'est lui-même trahi par ses crimes390. L'image est semblable dans la série The Caesars, quand il tente de corrompre ses geôliers et les menace de les mettre en pièces s'il ne libèrent pas immédiatement « leur empereur » - un motif déjà utilisé pour déprécier Postumus Agrippa. Maria Siliato, quant à elle, présente un Drusus plus sympathique, un grand frère plongé dans ses livres et témoignant d'une intelligence très développée qu'il veut transmettre à Caius.

385. Caratini 2002, p. 240-241

386. Massie 1998, p. 227-228

387. Ibid. p. 241

388. Ibid., p. 228

389. Ibid., p. 249

390. Ibid, p. 272

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"Soit réservé sans ostentation pour éviter de t'attirer l'incompréhension haineuse des ignorants"   Pythagore