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Dispositif de renforcement du système scolaire conventionnel en Côte d’Ivoire. Influence des classes passerelles en zone centre nord et ouest (c.n.o.) de 2006 à  2014.


par Moussa KONE
Université Alassane Ouattara - Doctorat en sciences de l'éducation 2019
  

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4. Renforcement des classes passerelles après 2014

4.1. Extension des classes passerelles Save The Children

Selon l'ONG Save The Children (2016), « dans les régions du centre, du nord et du sud-Ouest de la Côte d'Ivoire, 1.171 enfants dont 625 filles, précédemment en rupture scolaire, ont intégré le système scolaire formel et bénéficient de leur droit à l'éducation grâce à l'approche des classes passerelles mise en oeuvre.287 » Quand les familles ne pouvaient pas satisfaire à la scolarisation de leurs enfants, Save the Children leur est venu en appui à travers 33 projets écoles. Cela a permis le maintien dans le système scolaire, de 1.000 Orphelins et autres enfants vulnérables du fait du VIH (OAEV) venant des régions d'Agboville, Tias-salé, Bouaké 1 et 2, Dimbokro, M'bahikro, Daoukro, Bongouanou, Bocanda, Abengourou, Abidjan 1,2 et 4, Yamoussoukro, Adzopé -Akoupé.

De 2013 à 2016, l'innovante approche Literacy Boost, expérimentée dans l'IEP d'Akoupé, a permis de booster les performances des groupes scolaires Ahéoua et Yadio. Les filles et les garçons à Ahéoua et Yadio ont un accès égal à l'école primaire. Plus de la moitié des enfants sont en moyenne inscrits au CP1

287 Save The Children, 2016, Rapport annuel 2016, p. 16

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dans chacune des 2 écoles de Yadio. La parité filles /garçons est de 0,98 à Ahéoua et 1,19 à Yadio. Ces chiffres sont au-dessus de la moyenne nationale de cette période (0,9) et montrent une bonne proportion de la scolarisation des enfants et surtout des filles dans les écoles primaires soutenues par le projet. En ce qui concerne le niveau de lecture, les évaluations montrent une progression nette des enfants dans l'école expérimentale.

En effet, dans chacune des 5 compétences (la connaissance des lettres, la conscience phonologique, la fluidité de la langue, le vocabulaire et la compréhension), on constate que les enfants des écoles cibles connaissent une amélioration des acquis. Le taux de réussite en lecture au CE1 et au CE2 connait un accroissement remarquable dans les deux groupes scolaires Yadio et Ahéoua. Il est passé de 6% à 86% pour la lecture des lettres, de 0% à 79% pour la lecture des mots et de 13 % à 52% pour la lecture des phrases. On constate que les classes passerelles contribuent à établir la parité entre fille et garçons à l'école, à améliorer les taux de réussite tout en donnant de l'espoir aux couches sociales les plus vulnérables.

4.2. Atelier de revue et d'harmonisation de l'approche « classes passerelles » en Côte d'Ivoire en 2017

Selon le rapport de la Direction de l'Alphabétisation et de l'Éducation Non Formelle (2017),288 un atelier de revue et d'harmonisation de l'approche « classes passerelles » en Côte d'Ivoire a été organisé du 8 au 9 juin 2017 à Abidjan. Cet atelier a bénéficié de l'appui financier du programme Transformer l'Education dans les communautés de cacao (TRECC) de la Fondation Jacobs. Cette approche constitue un programme d'éducation basé sur l'apprentissage accéléré, permettant aux enfants hors du système scolaire de s'insérer dans l'école formelle. Cet atelier a réuni des participants issus de divers horizons, à savoir :

- les directions du MEN ayant un rôle dans le pilotage et la supervision des classes passerelles sur les plans pédagogique et organisationnel ;

288 DAENF, 2017, Atelier de revue et d'harmonisation de l'approche classes passerelles, Rapport final, Abidjan, DAENF, pp. 1-7

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- les ONG nationales et internationales impliquées dans la mise en oeuvre des classes passerelles en Côte d'Ivoire ;

- les partenaires techniques et financiers qui soutiennent la politique du gouvernement dans le développement d'offres éducatives alternatives ;

- la Fondation Stromme, une organisation qui met en oeuvre la stratégie de scolarisation accélérée au Niger, au Mali et au Burkina Faso ;

- et River Tide, une organisation qui a développé dans les zones rurales et défavorisées d'Inde, un programme unique pour l'enseignement élémentaire composé d'un programme à base communautaire.

Cette panoplie de participants a permis d'enrichir le débat sur la base des expériences vécues. Faisant un diagnostic de la situation, le MENET affirme qu'en 2016, 432.268 enfants sur 3.569.000 enfants âgés de six à onze ans n'étaient pas inscrits à l'école primaire. Pour la même année, seuls 811.844 enfants étaient effectivement inscrits au collège, tandis que 1.186.838 enfants âgés de douze à quinze ans n'y étaient pas. Pour relever le défi de la scolarisation de ces enfants hors du système scolaire, le Plan Sectoriel Education/Formation pour la période 2016-2025 préconise le recours aux classes passerelles. Ledit plan vise l'intégration à l'école primaire, des enfants âgés de dix à treize ans déscolarisés ou n'ayant jamais été scolarisés.

Faisant le bilan de la mise en oeuvre des classes passerelles, la DAENF affirme que celles-ci ont permis la réinsertion dans l'enseignement formel de plus de vingt mille enfants non scolarisés ou déscolarisés. Puis, la DAENF indique que depuis leur introduction en Côte d'Ivoire, plusieurs ateliers de réflexion se sont tenus avec l'ensemble des parties prenantes afin de formaliser cette offre d'éducation alternative, et d'harmoniser les pratiques. Ledit atelier s'inscrit dans le contexte de la scolarisation obligatoire tout en visant le renforcement des mécanismes existants des classes passerelles, afin de garantir le respect des normes de qualité requises et d'assurer une transition réussie vers l'enseignement formel. Il s'agit notamment :

228

- de passer en revue les différentes approches de classes passerelles mises en oeuvre en Côte d'Ivoire ;

- d'informer et former les participants sur la Stratégie de Scolarisation Accé-lérée/Passerelle (SSA/P) initiée par la Fondation Stromme au Mali, Burkina Faso et Niger;

- de définir les rôles et les responsabilités des acteurs et partenaires intervenant dans la mise en oeuvre des classes passerelles ;

- et d'adopter un dispositif pertinent de suivi et d'évaluation de la mise en oeuvre des classes passerelles.

La Fondation Jacobs a réaffirmé son engagement ainsi que celui de ses partenaires de l'industrie du cacao et du chocolat en faveur du financement des projets de classes passerelles à travers le programme TRECC. Cela devrait permettre, à terme, de renforcer ce dispositif en vue d'atteindre les objectifs du plan sectoriel. Pour contribuer à la réflexion, la Fondation Stromme a été invitée pour illustrer la Stratégie de Scolarisation Accélérée/Passerelle (SSA/P), dont le dispositif se caractérise par une forte implication des gouvernements concernés (Mali, Burkina Faso, Niger) dans le pilotage et la supervision de la mise en oeuvre. La Fondation Stromme a donné un aperçu des termes du partenariat autour de la SSA/P, de l'implication des gouvernements des pays précurseurs dans sa mise en oeuvre, et des accords qui balisent ce partenariat au niveau sous régional, national et local. Dans ce contexte, la création du Secrétariat sous-régional de la SSA/P est un instrument de concrétisation du partenariat avec, notamment, son Conseil d'Orientation regroupant les Ministres en charge de l'Éducation des pays, le Secrétaire Général de la Fondation Stromme et les O.N.G. partenaires des trois pays.

Procédant à la présentation de son programme, la Fondation Stromme a indiqué que la SSA/P est une formule accélérée d'éducation bilingue visant à offrir une seconde chance à des enfants qui n'ont jamais été à l'école, ou à des déscolarisés précoces dont l'âge ne permet plus une scolarisation dans le système classique. Ces derniers peuvent intégrer ou réintégrer le système scolaire classique à

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partir de la quatrième année (CE2) du primaire. La stratégie ne prévoyant pas de redoublement, tous les enfants, selon leur niveau, sont insérés dans les classes du formel (CP, CE1 ou CE2). Pour le respect du continuum « élémentaire-moyen », même les enfants âgés peuvent être orientés en classe de sixième. En principe, l'année scolaire dans les centres SSA/P dure 8 mois (Novembre - Juillet). La taille des classes ne doit pas excéder trente élèves.

Les acteurs de la société civile impliqués dans la mise en oeuvre de classes passerelles en Côte d'Ivoire que sont les ONG Ecole pour Tous (EPT), la Mission Evangélique Luthérienne de Côte d'Ivoire (MELCI) et le Bureau National de la Fondation International Cocoa Initiative (ICI) ont mis en exergue les points forts et les points faibles du dispositif actuel des classes passerelles. Concernant les points forts, elles indiquent que :

- les classes passerelles ont répondu à une demande d'éducation durant la crise et jusqu'à présent, en offrant des opportunités de réussite a des enfants qui, pour des raisons diverses étaient en dehors du système éducatif ;

- le pilotage par les ONG internationales et nationales a permis la mise en place d'un dispositif opérationnel efficace et plus proche des bénéficiaires ;

- les contenus des formations et les formations ont été élaborés en partenariat avec les services techniques du MEN ;

- les évaluations des enfants et leurs orientations dans les écoles formelles ont été réalisées par les inspecteurs d'école primaire.

En outre, l'atelier a permis de montrer que les points faibles concernent :

- le « Guide de mise en oeuvre des classes passerelles en Côte d'Ivoire », fruit de la collaboration entre les services du MEN et les partenaires techniques et financiers, est très peu utilisé par les promoteurs des classes passerelles et peu connu des services déconcentrés du MEN ;

- la transition des enfants issus des classes passerelles vers les écoles formelles présente souvent des difficultés liées, notamment à la mauvaise perception des classes passerelles par les enseignants, à l'insertion tardive

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des élèves des classes passerelles ou encore au manque d'extraits de naissances ;

- l'inexistence de données statistiques sur les classes passerelles en termes d'offre, d'infrastructure, d'effectifs et de performance empêche un pilotage effectif de cette offre d'éducation alternative par le MEN ;

- la faible implication des collectivités locales et l'insuffisance de l'internalisation des expériences par le MEN n'oeuvrent pas en faveur de la pérennisation de la stratégie et de l'appropriation du modèle par l'État ;

- l'on constate l'absence de ressources gouvernementales dans le financement des classes passerelles ;

- la modicité des indemnités, le retard dans leur paiement et l'absence de plan de carrière incitent à la mobilité des animateurs des classes passerelles ;

- le taux d'abandon est élevé pour les enfants de niveau CMU car ils sont plutôt intéressés par la formation professionnelle ;

- le taux de fréquentation baisse là où il n'y a pas de cantine scolaire ou d'appui alimentaire.

- les classes passerelles ne sont pas inscrites dans un cadre institutionnel et réglementaire suffisamment structuré.

- le Guide énumère toutes les parties prenantes en attribuant à chacune des rôles et responsabilités, mais ne désigne pas clairement quelle structure est la principale responsable. Ce flou engendre des dysfonctionnements, notamment au plan de la supervision pédagogique avec un chevauchement des fonctions entre conseiller à l'alphabétisation et conseiller pédagogique secteur.

- l'inexistence de données statistiques sur la situation de référence des enfants déscolarisés et l'absence d'une cartographie des initiatives locales rendent difficile toute planification et programmation d'actions ciblées par les acteurs non étatiques.

- et au niveau du suivi et l'évaluation, il y a un vide juridique dans le Guide.

231

Au regard des acquis et des faiblesses, l'atelier a fait des propositions en vue d'améliorer le dispositif des classes passerelles. Au titre des animateurs, Il s'agit de :

- renforcer le dispositif de formation initiale et continue des animateurs, notamment en impliquant le MEN et en consacrant trente jours à la formation initiale, pour qu'ils puissent maîtriser les contenus et la méthodologie d'enseignement ;

- renforcer le suivi pédagogique par les services compétents du MEN, ainsi que la collaboration entre les animateurs des classes passerelles et les enseignants des écoles conventionnelles ;

- développer des outils pédagogiques harmonisés pour les classes passerelles, tels qu'un guide des animateurs, un manuel des élèves, etc ;

- motiver les animateurs en offrant des perspectives d'engagement au-delà des huit mois d'exercice, notamment en mettant à contribution les animateurs pour des cours de remédiation ou pour d'autres projets. A cet effet, une base de données a été constituée, de concert avec tous les animateurs formés depuis 2007.

Au titre des sites d'implantation des classes passerelles, il s'agit de :

- s'assurer que le choix du site devant abriter la classe passerelle, est principalement basé sur l'existence de besoin en matière d'éducation et la planification de la carte scolaire;

- s'assurer que le choix du site découle d'un processus inclusif et participatif qui implique la communauté et les autorités éducatives.

Concernant les rôles, les responsabilités des parties prenantes et les indicateurs de performance, il faut :

- pour toutes les parties prenantes, se doter d'indicateurs de performance pour assurer le contrôle de qualité des classes passerelles ;

- mettre en place un comité de pilotage de l'initiative classe passerelle sous la présidence du MEN comme cadre de concertation et organe officiel d'orientation, de supervision et de décision concernant la mise en oeuvre des classes passerelles ;

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- designer au sein du MEN la structure de coordination opérationnelle de la mise en oeuvre des classes passerelles ;

- élaborer, valider et vulgariser auprès des promoteurs des classes passerelles et des autorités éducatives décentralisées, un cahier de charges (signature du Ministre/officialisation par un arrêté ministériel) pour la création, la mise en oeuvre, le suivi et évaluation des classes passerelles en précisant toutes les modalités. Ce cahier de charges s'imposerait à tous les promoteurs de la classe passerelle et aux autorités éducatives au plan local ;

- créer au sein du ministère, des compétences sur le curriculum des classes passerelles qui puissent constituer une référence pour le suivi et l'assurance qualité des initiatives ;

- investir des ressources gouvernementales dans le financement des classes passerelles pour marquer l'intérêt du gouvernement pour l'initiative et encourager les partenaires qui y interviennent déjà ainsi que ceux qui pourraient y être intéressés.

Au titre de la rétention des apprenants dans les classes passerelles, il a été proposé de :

- renforcer la sensibilisation des communautés à travers l'implication du gouvernement, des élus et des autorités éducatives, pour que les parents adhèrent à la politique d'école obligatoire et à la stratégie des classes passerelles ;

- prendre en compte des élèves des classes passerelles dans la dotation des cantines scolaires ou solliciter la contribution de la communauté pour un appui alimentaire ;

- renforcer la formation des animateurs pour qu'ils puissent assurer le suivi des élèves ;

- prévoir le transfert vers des structures de formation professionnelle, pour les enfants les plus âgés.

En somme, pour la DENF, l'atelier de revue et d'harmonisation de l'approche des classes passerelles en Côte d'Ivoire a permis aux participants de

faire un bilan du dispositif actuel, à la lumière des directives du Guide et de la pratique. Des lacunes et des dysfonctionnements ont été identifiés tant au niveau stratégique qu'opérationnel, et les participants ont fait des propositions pour y remédier. Au-delà des recommandations spécifiques, les participants étaient unanimes pour souligner la nécessité de voir l'Etat, à travers le MEN, assumer un rôle plus actif, que ce soit au niveau des orientations, de la supervision, de la coordination ou au niveau du financement des classes passerelles. Dans le présent contexte de la scolarisation obligatoire en Côte d'Ivoire, les classes passerelles se présentent comme un atout dont la consolidation exige davantage d'engagement de la part de l'Etat.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand