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Les océans face au réchauffement climatique.


par Pierrick ROGE
Université de Nantes - M2 Droit et Sécurité des Activités Maritimes et Océaniques 2019
  

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B - Des outils juridiques incomplets pour protéger le milieu marin

Ces diverses organisations ont pour la plupart les moyens de créer du droit et d'organiser la mise en oeuvre de la protection en pratique. En effet, la CNUDM qui établie les zonages et la protection du milieu marin en deça des lignes de la ZEE109 n'implique que les juridictions et les souverainetés des Etats. Ces derniers peuvent avoir à appliquer les directives et conventions dégagées par l'OMI comme il a été vu, mais le principe de la Convention de Montego Bay est celui de la liberté de la haute-mer, il est ancré depuis que Grotius l'a affirmé au XVIIe siècle. Ce principe nuit indéniablement à l'efficacité de la protection et de la préservation du milieu marin. En outre, la CNUDM ne remédie pas à la fragmentation de la gouvernance des océans. Au contraire le problème est accru par la création d'institutions supplémentaires dont les domaines de compétence risquent de se chevaucher à l'instar des organisations gérant les pêches, et d'une AMP. Ce sont trois nouvelles organisations qui sont établies par la Convention : la Commission des limites du plateau continental (la Commission), le Tribunal international du droit de la mer (TIDM) et l'Autorité internationale des fonds marins (l'Autorité). Les deux qui peuvent avoir une influence sur la protection du milieu marin sont l'Autorité et le TIDM. Le champ d'application de l'Autorité reste limité aux grands fonds marins. Le TIDM peut ainsi répondre

109Zone économique exclusive

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des contentieux issus des activités d'exploration ou d'exploitation dans les grands font marins par la voie de la Chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins, Chambre constituée conformément à la section 5 de la partie XI de la CNUDM et à l'article 14 du Statut. Cette Chambre a des compétences concernant les différends relatifs aux activités dans la Zone internationale des fonds marins.

Ainsi le Tribunal ne crée pas de droit à proprement parler. Il le complète, et infirme ou affirme l'application de certains principes comme dans l'avis que ce dernier a pu rendre le 1er février 2011 dans lequel il participe à la mise en oeuvre de la protection de l'environnement des grands fonds marins. Il est ainsi précisé dans le considérant 122 :

« 122. Parmi les plus importantes de ces obligations directes qui incombent à l'Etat qui patronne figurent l'obligation d'aider l'Autorité dans l'exercice de son contrôle sur les activités menées dans la Zone, l'obligation d'adopter une approche de précaution, l'obligation d'appliquer les meilleures pratiques écologiques, l'obligation de prendre des mesures de garantie dans l'éventualité de l'adoption, par l'Autorité, d'ordres en cas d'urgence pour la protection du milieu marin, l'obligation de garantir des voies de recours aux fins de l'indemnisation des dommages causés par la pollution et l'obligation de procéder à des évaluations de l'impact sur le milieu marin »110.

Le Tribunal dégage ainsi sa ligne de conduite pour les contentieux à venir. Il est à noter que le principe de précaution est invoqué et qu'il aura à s'appliquer à tous les niveaux des missions de l'AIFM.

La mission première de l'AIFM n'est pas en effet la protection des grands fonds marins même si cela est regrettable. La mission première est l'exploration et l'exploitation des ressources qui s'y trouvent comme les granulats, les nodules polymétalliques ou encore l'hydrogène naturel. C'est donc une organisation dont les objectifs sont de poser un cadre économique des grands fonds marins pour développer le partage des ressources et des bénéfices de ces dernières entre les pays concernés. Il s'agit ainsi d'éviter le pillage des pays développé, même si cette affirmation est à nuancer aux vues des négociations houleuses

110Avis consultatif de la chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins du Tribunal international du droit de la mer du 1er février 2011, relatif aux responsabilités et obligations des Etats qui patronnent des personnes et entités dans le cadre d'activités menées dans la Zone.

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concernant la partie XI de la CNUDM. C'est dans ce cadre que l'AIFM se voit attribuer des compétences de réglementation dont elle fait bon usage. En effet, cette dernière a établi un ensemble détaillé de règles, réglementations et procédures dénommé « Code minier ». Cette réglementation a pour but de réglementer la prospection, l'exploration et l'exploitation des ressources minérales marines dans la Zone internationale des fonds marins (qui recouvre les fonds marins et leur sous-sol au-delà des limites de la juridiction nationale)111. Ainsi, l'articulation entre la CNUDM qui se fait le cadre originel de l'Autorité, et l'Autorité elle-même établissent que cette dernière doit faire application de la première. C'est la raison pour laquelle au-delà des aspects économiques, l'AIFM doit faire application de la CNUDM et notamment de l'article 145 qui dispose que : « En ce qui concerne les activités menées dans la Zone, les mesures nécessaires doivent être prises [...] pour protéger efficacement le milieu marin des effets nocifs que pourraient causer ces activités ». La responsabilité est alors de prévenir, réduire et maîtriser les pollutions issues des activités d'exploration et d'exploitation. Ainsi, il pourra se poser la question de savoir si l'exploitation des sols et sous-sols entre nécessairement en résonnance avec l'extraction des ressources dans le cadre de l'immersion de CO2 par exemple112. Toutefois le Code minier n'est actuellement pas complet et pourrait envisager une extension des compétences de l'AIFM par analogie à sa mission d'exploitation. L'organisation participerait alors grandement à la réduction du CO2 atmosphérique dans l'enfouissement de ce dernier.

Il faut noter également la possibilité pour l'Autorité de créer des zones concernant un plan de gestion environnementale comme par exemple la zone de Clarion-Clipperton113 dans le Pacifique. Ce plan de gestion permettrait de geler l'exploration et l'exploitation de certains minéraux sur les fonds marins de la zone concernée. Il y a donc une exclusion de la colonne d'eau qui reste tributaire du principe de la liberté de la haute-mer. En revanche114, la mise en oeuvre de ces zones permettrait la protection de la biodiversité même si celle-ci est temporaire115. Il conviendra alors de trouver un équilibre lorsque l'exploitation débutera afin de ne pas perdre « les trésors de cette biodiversité inconnue »116 qui peuvent dans le cadre du

111 https://www.isa.org.jm/fr/mining-code/Regulations.

112Partie 2, Chapitre 2.

113 https://www.isa.org.jm/fr/documents/isba18c22, Décision du Conseil de l'Autorité internationale des fonds

marins au sujet du plan de gestion de l'environnement pour la zone de Clarion-Clipperton

114NATHALIE ROS, « Développement durable et droit de la mer », ADMO 2018, p.147.

115Ici 3 ans.

116Ibid.

maintien de la biodiversité marine, servir à limiter les impacts des changements climatiques en préservant les écosystèmes et le fonctionnement des océans en tant que puits de carbone naturel. Néanmoins, il faudrait que le droit participe davantage à privilégier un choix de protection plutôt que d'exploitation. L'avenir de la planète en dépend.

Il existe d'autres exemples d'organisations capables de créer du droit dans la gestion des zones. Il ne sera pas possible d'établir un parangonnage exhaustif de ces dernières mais il convient néanmoins de citer la Commission OSPAR comme exemple de zone protégeant la biodiversité et les écosystèmes de la colonne d'eau. Ainsi, l'objectif de la Commission est : « [la] mise en application de la convention OSPAR et de ses stratégies se fait par l'adoption de décisions, qui ont force de loi sur les Parties contractantes, de recommandations et d'autres accords. Les décisions et les recommandations abordent les actions à entreprendre par les Parties contractantes »117. Ces stratégies sont adoptées au sein de différents programmes de surveillance de l'environnement qui se succèdent dans le temps et s'adaptent aux enjeux actuels. L'un de ces programmes est le CEMP coordonné de surveillance de l'environnement (CEMP) et dont l'objet est de produire des données comparables provenant de toute la zone maritime OSPAR. Ces dernières peuvent être utilisées dans les évaluations qui permettent de traiter les questions spécifiques posées par le JAMP, lui-même un programme conjoint d'évaluation et de surveillance interdisciplinaire.

Ces programmes sont certes du droit mais répondent à des objectifs pratiques très proches de la réalité. Il s'agit d'un droit très opérationnel fonctionnant de matière thématique. Par exemple, concernant les effets néfastes du réchauffement climatique, il existe un programme de lutte contre l'eutrophisation mais également contre la perte de la biodiversité. Par ailleurs au sein de ce dernier il faut constater qu'il est également évoqué la restauration du milieu marin endommagé, ce qui n'est, pour des questions climatiques, pas encore abordé aujourd'hui. De plus, ces programmes répondent à six principes importants dont certains redondants mais nécessaires au droit de l'environnement. Parmi ces derniers se trouvent le principe de précaution; le principe du pollueur payeur; l'application de meilleures techniques disponibles (BAT) et de la meilleure pratique environnementale (BEP) notamment. Ce programme met aussi en place la technologie propre; le principe du développement durable

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117 https://www.ospar.org/about/how.

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grâce à l'application de l'approche écosystémique; le principe des mesures préventives; et le principe de la correction à la source des atteintes à l'environnement.

L'application de l'approche écosystémique est presque une réussite concernant la mise en oeuvre d'OSPAR. En effet la Commission travaille à devenir une entité interdisciplinaire en abordant plusieurs domaines de la protection du milieu marin. Cette dernière crée également des liens auprès d'autres structures participant ainsi à une coopération internationale bénéfique et nécessaire. Parmi ces dernières il faut compter par exemple le Conseil de l'Arctique qui est devenu un observateur au sein de la Commission OSPAR. Néanmoins, aussi complète que soit la zone OSPAR, cette dernière est limitée à son champ géographique et ne permet pas l'application de la définition d'aires protégées telles que définies par l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature, et qui implique que la conservation de la nature soit le premier objectif de la zone protégée118.

Des interrogations peuvent alors naître quant à l'utilité des AMP en l'état actuel du droit, notamment au regard de l'apparition d'activités nouvelles comme l'enfouissement du CO2 ou la fertilisation des océans.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote