4.3.1. Intégration des réfugiés
à travers le lien de solidarités locales et parentales
Cette section vise à analyser l'apport du lien social
existant entre les autochtones et les réfugiés comme un facteur
d'intégration de ces derniers dans la ville d'Ayorou. La présence
de la famille, d'amis et des connaissances dans la zone d'accueil constitue un
facteur important d'intégration pour les réfugiés. En
d'autres termes les liens sociaux qui existent entre les réfugiés
et les sociétés d'accueil sont des facteurs importants à
l'intégration des réfugiés. Cela est soutenu par LASSAILLY
JACOB V (2003) qui pense que les réfugiés
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installés clandestinement dans les zones d'accueil en
utilisant les liens ethniques ou les liens de parenté s'intègrent
rapidement. Ainsi, l'insertion se dessine progressivement par l'implication des
réfugiés à la vie sociale de la zone d'accueil. A l'instar
des réfugiés Erythrée au Congo (BAZENGUISSO GANGO
cité par COLEMAN L, ibid), des réfugiés soudaniens au
Tchad (LAGRANGE MARC A, 2006) et des réfugiés libériens en
Guinée (AGIER M. (2008) qui s'intègrent à travers les
liens sociaux, les réfugiés maliens aussi utilisent le lien de
parenté pour s'intégrer dans la vie sociale et économique
de la ville d'Ayorou.
Plus de 56% de nos enquêtés ont répondu
avoir été accueillis par des parents dans la ville d'Ayorou.
Selon COLEMAN L(ibid), «Le lien social renvoyait alors à une
vision historique à la fois du rapport entre l'individu et ses groupes
d'appartenance, d'un côté et de ses conditions du changement
social de longue durée de l'autre». Selon DURKHEIM E. (1893),
le lien social est « l'ensemble des croyances et des sentiments communs
à la moyenne des membres d'une même société»
Ces liens ont permis aux réfugiés maliens
d'être en harmonie avec la population, de se sentir comme chez eux. Comme
le notifie le chef du comité des réfugiés « Niger
et Mali c'est la même chose, c'est les mêmes populations,
même pratiques, même coutume et tradition. Nous maitrisons plus le
Niger que notre pays parce que avant même la crise nous
développons nos activités commerciales au Niger et nous nous
sommes mariés avec les nigériens, nous avons des liens de
parenté qui datent pas d'aujourd'hui » (Entretien,
14/08/2021). Les relations entre les deux pays sont historiques. Elles
remontent de l'époque coloniale, et reposent sur les contrastes
territoriaux fixés par les colonisateurs marquant ainsi les limites des
pays. La frontière est selon ADAMOU MOUSSA I (ibid) « une
rupture, et en même temps une interface propice aux échanges.
En effet plusieurs réfugiés sont hébergés dans la
ville, d'autres accèdent à des lopins de terres agricoles
grâce aux liens de parenté.
4.3.2. Mariage entre les réfugiés et les
autochtones, comme facteur d'intégration
La `'bonne» cohabitation entre les réfugiés
et la population de la ville d'Ayorou se manifeste par des mariages entre ces
deux populations. Nombreux sont des habitants de la ville d'Ayorou qui se sont
mariés avec des réfugiés. Cela a été
également montré dans d'autres études notamment BELLO
AMADOU M (ibid) pour le cas des réfugiés nigérians dans la
ville de Diffa. En effet, comme le souligne le chef de canton d'Ayorou,
plusieurs habitants se sont mariés avec les réfugiés et
vice versa. MALKKI cité par WALI WALI C (ibid) sur les
réfugiés Burundais à Kigama montre comment les
réfugiés parviennent à s'intégrer autour du mariage
mixte entre eux et la population hôte.
Selon COLEMAN L (ibid) ces mariages mixtes sont sources d'une
bonne cohabitation entre les réfugiés et les locaux et renforcent
le lien social entre les deux communautés. En plus, le mariage constitue
une protection sociale, voire une stratégie de construction sociale pour
les réfugiés qui se marient avec des autochtones. C'est en ce
sens que WALI WALI C cité par BELLO AMADOU M (ibid) souligne que «
le mariage, au-delà de sa valeur sentimentale, peut être
utilisé comme levier d'insertion par les réfugiés au sein
de leur espace d'accueil».
Dans la ville d'Ayorou, plusieurs réfugiés ont
donné leurs filles en mariage à la population et vice versa. Ce
dernier favorise la cohabitation et l'intégration des
réfugiés dans la ville. Ce
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mariage mixte n'a pas commencé avec l'arrivée
des réfugiés dans ville, cela date de plusieurs
siècles.
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