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Les mécanismes internationaux de protection et l'effectivité des droits de l'homme


par Kiliya Dominique KAMWANGA
Université D'ABOMEY-CALAVI (Bénin) - DEA Droit de la personne et de la démocratie 2005
  

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Paragraphe 2 : Un Comité des droits de l'homme officiellement

non-juridictionnel

Organe de supervision des droits civils et politiques, le Comité des droits de l'homme, tel qu'il existe aujourd'hui n'est pas une juridiction, c'est-à-dire un tribunal ou une cour constitués de juges dont la mission est d'assurer le respect du droit dans l'interprétation et l'application des conventions ou des traités internationaux relatifs aux droits de l'homme.186(*) En effet, le Pacte n'a pas défini sa nature et il ne s'agit pas, sans nul doute, d'un organe juridictionnel tel que les Cours européenne interaméricaine des droits de l'homme.187(*) Le Comité des droits de l'homme, comme tous les autres organes conventionnels de contrôle, n'a pas reçu le mandat de juger les Etats. En effet, même ses membres estimaient, de l'avis du professeur Alfred DE ZAYAS, que « cet organe de traité n'était qu'un organe consultatif, sans aucun pouvoir judiciaire et que l'application de ses constatations était laissée à la bonne volonté des Etats concernés ».188(*) Ceci joint l'idée du professeur Gérard COHEN-JONATHAN qui affirmait : « Formellement, les constatations du Comité des droits de l'homme n'ont pas une force obligatoire ».189(*) Et, au demeurant, le mutisme du Protocole facultatif ne fait que conforter les positions des gouvernements répressifs qui estiment que « la surveillance de l'application des constatations en l'absence de mandat légal bien défini à cet effet, pourrait être contraire au paragraphe 7 de l'article 2 de la Charte des Nations Unies ».190(*)

Néanmoins, bien que le Comité soit présenté comme un organe purement technique, indépendant et non-juridictionnel, ses fonctions peuvent être qualifiées de quasi-juridictionnelles. Il parvient dans son comportement à dépasser le cadre purement textuel. Sa démarche est, en effet, souvent proche de celle d'un organe judiciaire. Dans ce sens, même si formellement les constatations qu'il émet sur le fond n'ont pas de force obligatoire, leur autorité ne doit pas être négligée par le simple fait de sa volonté de leur imprimer une nature « quasi-juridictionnelle » par leur rédaction et de les rendre ainsi juridiquement obligatoires à l'image de la Communication « N° 884/1999 du 31 juillet 2001 ».191(*) Un des caractères permettant de cerner cette nature a trait à la question de la signification et du contenu des articles 5(2)(a) du Protocole facultatif du Pacte, 35(2)(b) de la Convention européenne des droits de l'homme et 45 de la Convention américaine des droits de l'homme, qui toutes se déclarent incompétentes si la requête est déjà soumise (has already been submitted) à une autre instance d'enquête et de règlement pour dire que Comité est aussi considéré comme une instance internationale de règlement.192(*) Certes, si les rédacteurs du Pacte n'ont pas explicitement baptisé le Comité de juridiction par prudence ou sagesse pour ne pas effaroucher les Etats, ils ont entendu lui conférer les compétences d'une juridiction internationale car ils lui ont donné un large pouvoir d'interprétation qui fait de lui un législateur secondaire en matière des droits de l'homme sur le plan international.193(*)

Le caractère quasi-judiciaire des constatations du Comité se marque par deux traits d'importance inégale. D'une part, on remarque que le Comité a progressivement étoffé la motivation de ses décisions et surtout celles des constatations sur le fond. Cet effort est sensible même s'il ne peut être comparé aux arguments développés dans les rapports et les arrêts de la Cour de Strasbourg. C'est pourquoi certaines constatations sont éclairées par des opinions individuelles des membres du Comité qui savent très bien utiliser cette technique, y compris à l'égard des questions de recevabilité. D'autre part, en statuant sur une communication, le Comité peut toujours se référer à une observation générale. Cette dernière technique lui permet alors d'attirer l'attention des Etats sur les insuffisances et les ambiguïtés que font apparaître un grand nombre de rapports, voire de communications. Il s'agit d'une explicitation des droits énoncés dans le Pacte qui est conçu comme un instrument vivant, qui devrait permettre une conformité du droit interne par rapport aux obligations internationales dûment souscrites. Toutes ces observations, générales et individualisées, contribuent à une bonne observance du Pacte et au renforcement, par ce fait même, du caractère judiciaire du contrôle sans officiellement le dire.194(*)

A ce titre, le Comité estime qu'il ne fait que rappeler les obligations primaires en s'appuyant précisément sur l'article 2 du Pacte. Dans une telle situation, bien que les Etats pensent demeurer formellement libres de donner suite aux constatations et observations générales du Comité à cause du mutisme du Pacte à ce sujet, il semble que ceux-ci doivent prendre les mesures d'adaptation de leurs droits internes pour éviter des violations comparables. En effet, le maintien d'une réglementation jugée lacunaire ou incompatible avec le Pacte pour quelque raison que ce soit est non seulement contraire au devoir général des Etats contractants d'assurer de bonne foi la protection effective des droits garantis, mais semble aussi tout à fait illogique dans la mesure où, restant inchangée, ladite réglementation est susceptible de servir de fondement à d'autres communications qui aboutiraient à la même condamnation.195(*)

Cependant, malgré cet effort prétorien du Comité des droits de l'homme de rendre contraignantes ses constatations en faveur de la protection effective de ces droits, celui-ci se heurte à une manifestation claire de la volonté des Etats parties à ne pas se plier aux décisions de cet organe de garantie. Les Etats semblent, en effet, se méfier de la compétence générale de développement et d'interprétation que le Comité exerce car la pratique montre que les constations faites à l'issue de l'analyse des communications ne reçoivent pas de suite favorable de leur part et, ce, nonobstant la désignation d'un rapporteur spécial chargé de vérifier les suites réservées par les Etats avec possibilité de signaler les éventuelles défaillances à l'Assemblée Générale des Nations Unies dans les rapports annuels.

De ce fait, les rapports annuels du Comité contiennent un inventaire des réponses reçues ou attendues qui sont ventilées par pays. Ainsi dans son rapport couvrant la période allant du 1er août 2003 au 31 juillet 2004, tout en se félicitant des réponses qui lui sont parvenues et accueillant avec satisfaction toutes les mesures prises par 17 gouvernements pour près de 23 constatations, le Comité a exprimé son inquiétude en ce qui concerne l'application de ces dernières et l'effectivité du suivi. Il s'est, en effet, dit être préoccupé par le nombre croissant de cas où les Etats parties ne donnent pas de suite à ses constatations ou même ne l'informent pas des mesures prises dans le délai prescrit de 90 jours. Dans ce rapport, le Comité a inventorié près de 190 constatations n'ayant pas reçu de réponses attendues au 30 juin 2003 de la part de 54 Etats concernés. La mise à jour de cette liste lors de sa 81e session a montré que la situation est demeurée quasi identique, c'est-à-dire inchangée.196(*)

Cet état des choses démontre que l'exécution des décisions du Comité des droits de l'homme est fonction de l'attitude des Etats, de l'acceptation du rôle qu'ils jouent au sein de l'organe et de l'ambiance qui y prévaut, le dialogue qui s'y établit avec les Etats incriminés ainsi que de la bonne foi de leurs gouvernements. A ce titre, les mécanismes demeurent dans le domaine mal défini des préceptes moraux avec pour effet la difficulté de l'emporter sur les principes reconnus en droit international197(*). Il est donc claire ces mécanismes du Comité des droits de l'homme ne sont pas particulièrement efficaces.

Les développements qui précèdent ont révélé le rôle sans cesse croissant réservé aux droits de l'homme dans l'action des Nations Unies. Le bilan est incontestablement positif en ce qui concerne l'élaboration des normes universelles protectrices des droits de l'homme dont le corpus conventionnel est abondamment riche. Les déclarations ou résolutions relatives aux droits fondamentaux ont une valeur hautement symbolique mais qu'ils n'expriment pas moins l'attachement croissant de la communauté internationale à la cause des droits de l'homme.

En fait, les Nations Unies sont loin du schéma idéal de protection reposant sur une Cour mondiale des droits de l'homme à juridiction obligatoire. A cet égard, l'idée de la réforme est toujours d'actualité car tous les jours les droits sont violés en Afrique, en Amérique Latine, dans certains Etats européens et même dans de véritables démocraties pluralistes. Et les systèmes régionaux, loin d'être interprétés comme la reconnaissance d'un relativisme des droits de l'homme, sont plutôt les mécanismes plus intégrés que ne le sont ceux universels dans la mise en oeuvre des droits fondamentaux. A ce titre, ils peuvent bien servir de référence et de modèle dans la réinstitutionnalisation des mécanismes onusiens pour une garantie efficace et effective des droits humains.

* 186 GUINCHARD (Serge) et MONTAGNIER (Gabriel), Op. Cit., pp 341 et 577

* 187 DHOMMEAUX (Jean), « Le Comité des droits de l'homme... », Op.Cit., p 657.

* 188 DE ZAYAS (Alfred), « Le droit constitutionnel et l'internationalisation des droits de l'homme » ( http://www.alfreddezayas.com/lectures/tunis3_fr.html)

* 189 COHEN-JONATHAN (Gérard), « Quelques observations sur le Comité des droits de l'homme des Nations Unies », Op. Cit., p 95.

* 190 DE ZAYAS (Alfred), Op. Cit.

* 191 Conformément à l'alinéa a) du paragraphe 3 de l'article 2 du Pacte, l'Etat partie à l'obligation d'assurer à Madame Ignatane une réparation utile. Il est également tenu de veiller à ce que des violations analogues ne se produisent pas à l'avenir. Etant donné qu'en adhérant au Protocole Facultatif l'Etat partie a reconnu que le Comité avait la compétence pour déterminer s'il y avait ou non violation du Pacte et que, conformément à l'article 2 du Pacte, il s'est engagé à tous les individus se trouvant sur son territoire... », Selon un dispositif de ladite constatation.

* 192 DHOMMEAUX (Jean), « Le Comité des droits de l'homme... », Op.Cit., p 657.

* 193 GLELE-AHANHANZO (Maurice), Op.Cit., pp 61 et 69.

* 194 COHEN-JONATHAN (Gérard), « Quelques observations sur le Comité des droits de l'homme des Nations Unies », Op. Cit., pp 86-87 et 91-92.

* 195 COHEN-JONATHAN (Gérard), « Considération sur l'autorité des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme » In Liber Amicorum Marc-André Eissen, Op. Cit., pp 49 et 51.

* 196 Nations Unies, Rapport du Comité des droits de l'homme, Op. Cit., pp 145-172.

* 197 HUARAKA (Tunguru), Op.Cit., p 1144

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille