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L'existence d'une conception des droits de l'homme propre aux états musulmans


par Peggy Hermann
Faculté de Droit de Montpellier 1 - DEA de Droit International 1999
  

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Titre : l'existence d'une conception des droits de l'homme propre aux états musulmans

DEA de droit international Faculté de droit de Montpellier I

Directeur de mémoire : Mr Michel Levinet

Introduction

Les droits de l'Homme définissent et consacrent, en termes juridiques, la liberté de l'individu. Ils sont le fruit d'un long cheminement historique de plusieurs siècles. Mais l'historique diffère selon qu'il est présenté par un Européen ou par un non Européen. Sami A.Aldeeb Abu-Sahlieh explique que, dans le chapitre "Fondements historiques et développement des droits de l'Homme", écrit par Imre Szabo, nous lisons que " Pour certains auteurs, l'origine des droits de l'Homme remonte à l'Antiquité grecque". Du côté musulman, il cite Muhammad Hamad Hader qui écrit : " les principes actuels des droits de l'Homme mentionnés dans l'Islam proviennent forcément de l'Islam. En fait, personne ne peut nier l'influence exercée par l'Islam sur l'Occident par la voie de l'Andalousie et les Croisés. Par contre, les principes qui ne figurent pas dans l'Islam ne sont que des slogans vains et futiles ne présentant aucun intérêt pour la dignité de l'homme"1(*). Un premier malentendu apparaît quant aux origines historiques des droits de l'Homme. Sans doute que chaque époque et chaque civilisation doivent quelque chose à celles qui les précèdent, sans doute que les plus grands courants religieux et idéologiques ont contribué au développement du respect de ces droits.

L'homme a toujours cherché à réglementer ses rapports avec l'autre et les fondements de ces règles sont toujours sujets à discussion. Certains croient que se sont des règles établies par l'homme, d'autres prétendent que se sont des règles établies par la volonté divine. "Il est vrai que les droits de l'Homme ont pour fondement des valeurs essentielles, intrinsèquement inhérents à tous les hommes et à toutes les cultures, il n'en demeure pas moins qu'elles se déclinent différemment et relèvent de civilisations qui ont des conceptions forts différentes"2(*). Un deuxième malentendu apparaît quant aux fondements des droits de l'Homme.

Les droits de l'Homme, qui ont prétendu dès le départ à une portée universelle, sans frontières, mobilisatrice, ont vu apparaître des définitions régionales, qui en principe devaient s'inscrire dans le cadre universel et être compatibles avec lui. Nombreux sont les problèmes posés aux Etats musulmans par les droits de l'Homme conçus par les Nations-Unies. Sami Abu Sahlieh rappelle que " les droits de l'Homme, dans la déclaration universelle des droits de l'Homme n'ont pas leur raison d'être dans un commandement divin, mais dans ma volonté de l'Assemblée générale des Nations-Unies basée sur des considérations d'intérêt général. Il s'agit de créer des conditions de vie sociale à l'échelle internationale, le respect des droits de l'Homme ayant été jugé comme nécessaire pour que l'homme ne soit contraint, en suprême recours, à la révolte contre la tyrannie et l'oppression."3(*). L'universalité des droits de l'Homme est encore fragile et elle ne tend pas à la diffusion d'un modèle unique mais à l'émergence en divers points, d'une même volonté de reconnaître ces droits. C'est un enrichissement par le partage des cultures, c'est ne pas une unification mais une harmonisation des systèmes de droit dans la mesure où les différences sont admises4(*).

Vu ce qui précède, on ne peut reprocher aux Etats musulmans de vouloir représenter la réalité d'une conception des droits de l'Homme, en proclamant que ces droits se fondent sur la volonté divine. Ce n'est pas un débat essentiellement juridique car il y a beaucoup de considérations sociaux-culturelles. Néanmoins il peut y avoir des risques d'éclatement car il n'existe pas de mémoire collective des droits de l'Homme. A travers les particularismes, il peut y avoir fragmentation des droits de l'Homme; elle marque la réticence à l'acceptation de l'universalité des droits de l'Homme. Mais il ne faut pas négliger ce caractère évolutif du processus5(*). Les droits de l'Homme se sont toujours définis par le manque car il existe un compromis entre l'existence des plusieurs conceptions. Plutôt que d'essayer de défendre et de prouver l'universalité des droits de l'Homme comme postulat, il faut analyser les obstacles et les défis qui ont jalonné cette marche afin de pouvoir mieux les surmonter.

Force est de constater que dans une bonne partie de la doctrine occidentale, l'Islam est considéré comme une menace pour les droits de l'Homme. Témoignent-ils d'une telle hostilité à cause de vieux complexes, tels ceux de la décolonisation ou d'une phobie que suscite le renouveau de l'Islam ?

Ce travail peut parfois sembler critique à l'égard des Etats musulmans ; ce ne sont pas des critiques de l'Islam en tant que religion, mais elles sont orientées contre les régimes oppressants et corrompus contre lesquels, l'Islam lui-même s'insurge. Le cadrage de la connaissance que l'on peut avoir de la religion islamique peut paraître relativement aisé, pour peu que l'on prenne la peine d'un minimum de rigueur analytique et d'objectivité propres à éloigner les idées reçues, ou carrément fausses. Même si quelques considérations méthodologiques, somme toute assez simples, suffisent "l'Islam est une religion, une spiritualité et un culte"6(*), le terme, Islam, recouvre également "une identité sociale et communautaire vécue au sein d'une multitude de sociétés et de groupes culturels"7(*). Ce sont des facteurs qui alimentent les confusions ; l'imaginaire collectif des Occidentaux est imprégné de préjugés et d'images stéréotypées sur l'Islam, dont il est difficile de se défèrent car leur développement est souvent bien trop sommaire. Mais l'intérêt de ce travail n'est pas de porter un jugement sur l'Islam en tant que religion, mais d'analyser ses répercussions sur l'organisation politique et législative des Etats musulmans en matière de droits de l'Homme.

Ce travail ne peut prétendre d'éclairer totalement le lecteur sur le rapport entre la religion et le droit dans les Etats musulmans. Une différence doit être établie entre les références à l'Islam et l'application du droit musulman. Ce travail s'est heurté aux difficultés d'accès aux sources écrites dans d'autres langues que le français et l'anglais. Mais cela n'a pas empêcher la référence à quelques auteurs musulmans.

De plus l'ampleur et la complexité du sujet, l'étendue du champ historique couvert, et le nombre d'écrits nouveaux touchant à la problématique en question ont obligé à des choix qui peuvent parfois paraître arbitraires: on pourra légitimement reprocher la négligence de telle ou telle référence, de tel ou tel auteur, de telle ou telle expérience socio-politique et historique qui auraient été plus intéressants que ceux qui ont été retenus dans ce développement. Il faut donc prendre conscience que ce travail est loin de pouvoir rendre compte de la complexité du débat sur l'existence d'une conception des droits de l'Homme propre aux Etats musulmans. Malgré ces limites, cette recherche a pour objectif la compréhension de la logique générale qui a commandé les différents discours des auteurs occidentaux et musulmans sur le sujet en question.

Ce travail se veut plus une approche conceptuelle et problématique, qu'une étude historique des droits de l'Homme dans les Etats musulmans. Une telle approche risque de confronter deux séries de normes, celles des Etats musulmans d'un côté et celle des Nations-Unies de l'autre. "La pensée juridique s'accommode mal de la pluralité des normes imprécises."8(*). Il a fallu adopter une position intermédiaire entre l'opposition et la compatibilité de ces deux séries de normes, qui tente d'éviter un discours destructeur d'une impossible conception des droits de l'Homme propre aux Etats musulmans. Néanmoins, on constate que les Etats musulmans garantissent certains droits et libertés, en contredisent d'autres et en ignorent certains.

De grandes avancées ont été visibles ces trente dernières années dans le domaine des droits de l'Homme. Les Etats savent qu'ils ne peuvent bafouer indéfiniment et impunément les droits de l'Homme, car ils sont devenus l'affaire de tous et de chacun. C'est sur la notion d'universalité que se sont reposés et élaborés l'ensemble des textes, procédures et mécanismes qui, aujourd'hui fondent la protection internationale des droits de l'Homme.

Mais ce système de protection est fragile ; il est bien trop discuter pour être réellement effectif. On ne peut reprocher aux seuls Etats musulmans de débattre sur une conception des droits de l'Homme qui leur est propre. "L'Occident est le premier à fausser compagnie à cette conception universaliste"9(*), par la création d'instruments régionaux comme l'Europe occidentale avec la Convention européenne des droits de l'Homme et des libertés fondamentales signée en 1950, ainsi que la Charte sociale européenne signée en 1961. L'Amérique agit de même avec sa Convention interaméricaine des droits de l'Homme signée en 1969.

Les Etats musulmans ont " le sentiment que l'Occident leur impose une déclaration universelle programmée par ses juristes."10(*). Ce qui se passe, c'est l'expression systématique d'une stratégie défensive, qui refuse ce qu'on lui impose. Aussi longtemps que les Etats musulmans n'accepteront pas la conception universelle des droits de l'Homme, il est nécessaire de faire exister une conception des droits de l'Homme qui leur est propre. L'essentiel est d'établir des règles communes, légitimes et de parvenir au respect effectif des droits de l'Homme ; ceci ne peut-être que le fruit d'un changement social, culturel et politique en profondeur. En identifiant les valeurs qui leur sont propres, les Etats musulmans doivent adopter une toute autre conception des droits de l'Homme. Ils prennent comme objectif la revendication de leur particularisme en matière de droits de l'Homme (Titre I). Il s'agit ici de justifier ce particularisme et de s'interroger sur la conception des droits de l'Homme qu'expriment les Etats musulmans.

Mais il subsiste un malaise. En adhérant à la conception universelle des droits de l'Homme, les Etats musulmans sont liés par ces normes. Ils sont bien trop impliquer de tout côté pour pouvoir y renoncer. Néanmoins, les Etats musulmans dynamiques, s'adaptent à des environnements très différents et à des circonstances historiques changeantes. Ils se sont révélés compatibles avec les principaux types d'Etat et les formes diverses d'organisation sociale que l'histoire a produit. Une nouvelle fois, comme souvent au cours de l'histoire, les Etats musulmans sont appelés à s'adapter à une situation inédite en limitant la portée de la conception universelle des droits de l'Homme ( Titre II). Les résultats (du respect des droits de l'Homme) devraient être meilleurs puisque les Etats musulmans prennent comme objectif leur problème majeur: la lutte contre la laïcité, invention religieuse, qui se trouve au coeur de l'histoire politique et culturelle des Etats musulmans. C'est pour la contrer que les Etats musulmans débattent de l'existence d'une conception des droits de l'Homme qui leur est propre.

Sommaire:

Titre I :

La revendication d'un particularisme en matière des droits de l'Homme par les Etats musulmans

Chapitre I / La justification du particularisme

Section I - Le fondement

Section II - Le contenu

Section III - La place de la Loi islamique dans la législation des Etats musulmans

Chapitre II / L'expression du particularisme

Section I - L'altération inévitable de la conception universelle des droits de l'Homme

Section II - Les contradictions dans les documents

Titre II :

La limitation de la portée universelle des droits de l'Homme par les Etats musulmans

Chapitre I / Une hostilité de principe

Section I - L'élaboration du corpus juridique de l'universalité des droits de l'Homme

Section II - La relativisation du corpus juridique de l'universalité des droits de l'Homme

Chapitre II / Une acceptation problématique

Section I - L'acceptation progressive de la conception universelle des droits de l'Homme

Section II - Les incidences de cette acceptation

* 1 S.A Abu-Sahlieh, La définition internationale des droits de l'Homme et l'Islam, R.G.D.I.P 19985, n°3, p. 627

* 2 Yacoub (J.), Réécirire la déclaration Universelle des Droits de l'Homme, Provocation, Desclée de Brouwer, 1998, p.11

* 3 Ibid, p. 629

* 4 Delmas-Marty (Mireille), Trois défis pour un droit mondial, Ed. du Seuil, 1998

* 5 Ibid

* 6 Lamchichi (A.), maître de conférence à l'Université de Picardie Jules Verne, " Islam-Occident, Islam-Europe: choc des civilisations ou coexistence des cultures?", La coexistence, enjeu européen, CRUCE (Centre de Recherche Universitaire sur la Construction européenne Amiens), Cao-Huy (T.), Fenet (A.) ( sous la dir.), Puf, p.263

* 7 Ibid

* 8 Delmas-Marty ( M.), Pour un droit commun, La librairie du XXe Siècle, Seuil, p.8

* 9 Abu-Sahlieh ( S.A.A), les musulmans face aux droits de l'Homme, religion § droit § politique. Etude et documents, Bochum, Winkler, 1994, p.17

* 10 Ibid, p. 18

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand