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Le défi du désendettement soutenable en Afrique Subsaharienne: Au-delà de l'Initiative PPTE.

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par Claire Barraud
Université Pierre Mendès France, Grenoble II - M2 recherche Politiques économiques et sociales 2006
  

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Chapitre 4

L'enjeu à moyen terme, la nécessité d'un engagement moral plus que financier.

Il semble nécessaire de rappeler, notamment pour ceux qui pensent sincèrement que «les choses sont plus compliquées que ça », que le monde dispose de suffisamment de ressources pour éradiquer toute forme de besoin primaire. Il ne s'agit donc pas de quantités de fonds nécessaires au désendettement, mais bien d'un partage des richesses. Il s'agit donc d'un problème économique qui ne peut être solutionné que politiquement, et de fait malheureusement peu susceptible d'intéresser les experts orthodoxes. Pourtant faire oeuvre d'un tel partage permettrait sans aucun doute d'alléger le terrible fardeau de la dette extérieure publique en Afrique subsaharienne en dépassant les limites de l'initiative PPTE, et de reconstruire sur de bonnes bases les économies africaines pour enfin apaiser les relations Nord-Sud.

I - Un simple « désenrichissement » partiel des créanciers...

Ce transfert doit nécessairement passer par la volonté politique de s'engager financièrement à long terme pour commencer enfin à négocier correctement. Il s'agirait en fin de compte, pour les pays industrialisés et leurs populations, de prendre leurs responsabilités.

A/ Le respect indispensable de toutes les modalités d'engagement

Tous les auteurs s'accordent à dire que le caractère additionnel des aides est une condition nécessaire à l'émergence économique de l'Afrique. Une telle additionnalité implique des engagements à long terme pour les créanciers déjà mêlés à l'affaire, certes, mais aussi de ceux qui ne le sont pas encore.

1 L 'enjeu crucial de l 'additionnalité des aides.

Avant tout, la valeur de marché devrait remplacer la valeur actuelle net (VAN) dans la mesure où elle possède l'avantage de prendre en compte les arriérés, les rééchelonnements et les refinancements «contraints» de différentes natures. D. Cohen a alors procédé à une étude économétrique pour évaluer la valeur de marché de la dette de tous les PPTE et conclue que ce prix correspond à 28 cents pour un

dollar de dette nette. La traduction est que seul le quart des montants d'allègement représente un apport réel de ressources pour le financement des PPTE. C'est peu.

Merckaert J. [2006] pose trois conditions à l'additionnalité. Une aide est alors additionnelle aux mécanismes traditionnels si l'accord apporte des fonds strictement supplémentaires aux récipiendaires, si l'accord vient s'ajouter aux promesses d'augmentations de l'APD des pays riches et s'il maintient intacte la capacité des IFI à fournir de l' aide.

Au niveau des pays pauvres, les données statistiques sont délicates à recueillir. Mais il est quand même possible d'affirmer que les allègements ne dégagent pas des ressources strictement supérieures, notamment ceux de la Banque mondiale et de la BAD (cf. supra).

Du côté des pays riches, ce sont déjà eux, et plus particulièrement les pays du G8, qui financent l'IPPTE et l'IADM à travers leurs contributions «normales» aux IFI, qui renflouent les comptes d'une Banque mondiale déficitaire quant à l'IADM (lors d'une réunion triennale) et qui ont promis d'arriver à une APD correspondant à 0,7% de leur RNB d'ici 2015, ainsi que de la doubler pour 2010, notamment en direction de l'Afrique. C'est beaucoup et le doute est donc permis quant à la soutenabilité de leurs engagements à long terme. Par ailleurs, ils ne contribuent pas tous (cf. partie suivante) et l'APD demeure insuffisante, sauf pour la Norvège, le Danemark, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Suède... qui ne font pas partie du G8, mais qui se nomment eux-mêmes les pays du « G0,7 »1.

Pour les cinq Premiers ministres, la baisse de l'APD dans les années 1990 a en outre contribué au retard de l'Afrique sur le chemin de la croissance et du désendettement. Car s'il est vrai que le total des engagements d'APD de l'ensemble des donateurs pour l'Afrique a doublé entre 1990 et 2004, il est tout de même resté quasiment inchangé de 1990 à 2001 compte tenu des fortes variations entre temps. Un effort a été effectué en 1991 (puisque qu'il est passé de 17,35 milliards de dollars en 1990 à 21,98 en 1991) et en 2000 (de 16,5 milliards de dollars en 1999 à 19,6 en 2000) avant d'être relâché en 2001 (plus que 17,96 milliards). Une croissance soutenue de l'APD a donc repris à partir de 2002. En effet de 2002 à 2004, le total des engagements a doublé (voir tableau 22 en annexe p.161).

1 Jan Pieter Balkenende, Premier ministre des Pays-Bas, Kjell Magne Bondevik, Premier ministre de Norvège, Göran Persson, Premier ministre de Suède, Jean-Claude Juncker, Premier ministre du Luxembourg etAnders Fogh Rasmussen, Premier ministre du Danemark, 2005, in «La Norvège demande au G8 une augmentation de l'aide au développement ».

Néanmoins, hormis certains pays (cf. supra), les Etats ne respectent globalement pas le taux de 0,7% du RNB de l'APD décidé en 1970. La part de l'APD dans le RNB français atteignait modestement 0,47% en 2005 et 2006. Or, même si les pourcentages sont rassurants par rapport à ceux de 2000 et 2001 (0,32%), la France doit progresser sur la voie du respect des 0,7% (voir tableau 14 en annexe p.176). Et, de manière générale, le G8 doit montrer l'exemple. S'il avait promis au sommet de Gleneagles en 2005 de doubler le montant de l'APD, soit 50 milliards de dollars, il a confirmé sa volonté en annonçant un montant de 60 milliards enjuin 2007. Néanmoins, encore faut-il rappeler « qu'il y a 35 ans, les pays riches s'étaient engagés à porter leur APD à 0,7 % de leur revenu national brut (RNB), promesse renouvelée plusieurs fois depuis ».

Aujourd'hui, l'APD des pays riches s'élève à seulement 0,25 % de leur RNB, nécessitant donc un triplement pour que l'engagement de 1970 soit enfin tenu. L'annonce de Gleneagles est donc un recul face à cet engagement précédent. »2. Car la Banque africaine de développement (BAD) affirme que pour atteindre les Objectifs du millénaire pour le développement, le montant de l'APD doit grimper jusqu'à environ 140 milliards de dollars en 2006 et jusqu'à quasiment 200 pour 2015 (voir graphique 15 en annexe p.1 77).

De plus, un tel montant doit être additionnel aux allègements consentis au titre de l'initiative PPTE, sans quoi le coût pour le créancier est considérablement réduit, aussi bien que le bénéfice pour le débiteur. Il est en outre difficile de savoir si les remises de dettes sont comptabilisées en APD, il s'agit souvent d'une question d'écritures comptables. La France par exemple a mis en place des Contrats de désendettement et de développement (C2D) additionnels à l'allègement survenant au point d'achèvement de l'initiative. Ces contrats annulent les créances d'APD dues à la France. Cette allègement bilatéral était le bienvenu certes, mais il comptabilise en APD le coût des annulations des intérêts (mais pas le principal). Les C2D ne sont donc que partiellement additionnels à l'initiative PPTE. Bien que très critiqués, les C2D représentent tout de même une avancée additionnelle dans l'annulation de dettes. S'il n'est pas entièrement légitime de leur reprocher leur liaison avec l'initiative PPTE et un programme économique décidé (soit

2 Millet D. et Toussaint E., 2005, in « G8 : Le CADTM demande la fin des engagements non tenus sur l'aide au développement », http://www.alterpresse.org/spip.php?article2796.

disant toutefois) conjointement entre le récipiendaire et la France, il est tout de même dommage que la signature de tels contrats enregistre un tel retard3. De plus, même si un chiffre exact ne peut être fourni, il est notoire que les remises de dette sont souvent comptabilisées en APD. Ainsi, l'augmentation de l'APD en 2005 (de 15 milliards de dollars) est simplement due à l'annulation de la dette irakienne par le Club de Paris. Aucune somme supplémentaire à ce titre n'est donc réellement déboursée. Ce cas peut malheureusement faire légion.

En dernier lieu, après la nécessité de l'augmentation de l'APD des Etats du Nord, leur caractère additionnel aux remises de dett e au titre de l'IPPTE, il conviendrait de délier l'aide telle qu'elle l'est actuellement (achat de biens et services au pays créancier comme contrepartie des fonds versés) pour la relier à une obligation de résultat. En effet, les bénéficiaires peinent souvent à absorber sainement les montants décaissés (surtout que l'essentiel des fonds entre 1998 et 2003 a été alloué à des pays sortant de conflits). Par conséquent, il serait judicieux de décaisser les fonds en fonction de la capacité d'absorption du pays. En outre, cette capacité serait jugée en premier lieu eu égard aux dépenses de lutte contre la pauvreté dans le cadre de la réalisation des OMD et, en second lieu par rapport aux remboursements de la dette qui continue de courir.

Concernant les institutions multilatérales, l'IADM de la Banque et de la BAD n'est pas additionnel à leurs prestations, tandis qu'elle l'est pour le FMI (cf. supra).

Par conséquent, ce qui importe le plus, c'est toujours une réelle volonté d'engagement mutuel des Etats à long terme. Il est sûr que si les créanciers avaient davantage confiance en une bonne foi des débiteurs devenue effective, le problème de la dette serait résolu à moyen terme. Mais un tel engagement doit être ancré dans les actes à l'échelle spatiale et temporelle, et non plus seulement dans les discours.

3 «Au 1 er mars 2006, huit pays sur la vingtaine concernés ont effectivement signé un C2D: le Mozambique (nov. 2001), l'Ouganda (juin 2002), la Bolivie (mai 2003), la Tanzanie (juin 2003), la Mauritanie (juillet 2003), le Ghana (nov. 2004), Madagascar (février 2005) et le Nicaragua (mars 2005). Ces huit pays représentent seulement 8% de l'encours total des créances françaises d'APD sur les pays potentiellement éligibles, soit un peu plus de 300 millions d'€. On peut ainsi estimer que, sur les 558 millions d'€ de «refinancement pardon» initialement prévus sur la période 2001-2005, seuls 81 millions (14,5 %) ont effectivement été reversés », Blamangin O. et Goirand P., «L'enlisement des C2D Annulations bilatérales françaises additionnelles à l'initiative PPTE », chapitre 5 du rapport 2005/2006 de la plate-forme Dette & Développement.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard