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L'émergence d ela notion de sécurité humaine dans la protection internationale des droits de l'homme

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par Sabine Nicole Jiekak Mougoué
Université Catholique D'afrique Centrale, Yaoundé, Cameroun - Master en droits de l'homme et action humanitaire 2005
  

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Cet ensemble de prises de positions du Conseil de sécurité traduit deux choses : primo, il s'opère un véritable changement culturel sur la scène internationale, même si le Conseil ne manque pas de rappeler à tout moment sa responsabilité première en matière de maintien de la paix. Secundo, son action tend à donner un contenu de plus en plus concret à la notion de sécurité humaine, même si l'expression en elle même n'est pas employée. Josiane TERCINET appelle cependant à la mesure et à la prudence à ce propos, car « ne sont visés que les aspects de sécurité humaine liés aux opérations de paix, autrement dit ce que l'on pourrait appeler la sécurité humaine de base »95(*). Les interventions sont censées réparer les dégâts politiques et économiques des situations de crises et de tensions. L'action des institutions financières mondiales reflète le soucis de la communauté internationale d'éviter que ne se produisent des crises politiques ayant pour causes des problèmes économique ou ayant des incidences économiques graves.

B- Les interventions des institutions économiques mondiales pour une sécurité des individus.

La Banque Mondiale, le FMI, l'OCDE, l'OMC intègrent de plus en plus les considérations de sécurité humaine dans leur arsenal normatif et dans leurs actions sans toutefois employer le terme sécurité humaine, mais plutôt celui de « conséquences sociales des politiques économiques » ou de « développement humain »96(*). La lutte contre la pauvreté, les inégalités sociales et le VIH/SIDA, la mise sur pied des actions en vue du développement durable et la participation de la société civile font partie intégrante du discours des institutions de Bretton Woods. Elles font désormais valoir que la lutte efficace contre la pauvreté ne se résume pas simplement à encourager la croissance économique, mais également à aborder la question des inégalités politiques et sociales qui maintiennent les pauvres dans la pauvreté. Dans son Rapport 2005 relatif à l'Objectif de développement pour le millénaire, la Banque Mondiale incite les pays riches à viser plus haut et faire mieux du point de vue de leurs programmes politiques et mesures de gouvernance en ce qui concerne l'aide, les échanges commerciaux et l'allègement de la dette des pays en voie de développement. Entre la lutte contre la pauvreté, la bonne gouvernance et le développement, elle a fait de la santé son domaine prioritaire pour l'année 200597(*).

On peut également voir dans les accords sur les Aspects de la propriété intellectuelle touchant au commerce (ADPIC) et la Déclaration de Doha issus de l'OMC des considérations de sécurité humaine, notamment dans le domaine de la santé publique et de l'accès aux médicaments essentiels. L'OMC fait sienne les préoccupations des pays les moins avancés concernant l'accès aux soins de santé et aux médicaments et prend des mesures pour permettre à leurs populations de ne pas succomber aux pandémies comme le VIH/SIDA ou le paludisme à cause de la règlementation commerciale internationale.

Toutes ces interventions ont une origine et une forte incidence politique qui malheureusement ne contribuent pas à responsabiliser la société internationale sur les questions de sécurité humaine. Pour arriver à cette fin, il faut compter sur les interventions des juridictions répressives.

Paragraphe 2 : L'action des juridictions pénales internationales dans une perspective de protection de l'humanité.

Lorsqu'on évoque la sécurité humaine on n'y voit de prime abord pas de relation avec le droit pénal ; mais la violation massive des droits de l'homme et du DIH installe un climat d'insécurité. Des foyers de conflits ont contribué à faire sauter les barrières de la souveraineté et des immunités pour faire répondre les responsables des crimes odieux. Cet état implique une sécurité juridique, corollaire de la sécurité humaine qui doit permettre de sanctionner les coupables et d'indemniser les victimes dans le respect de certains principes fondamentaux98(*). Des tentatives ont été amorcées avec les tribunaux pénaux spéciaux, mais une véritable protection de la sécurité humaine s'exercera par la Cour Pénale Internationale (CPI) même si elle a circonscrit son domaine aux menaces les plus graves (A). Cette protection s'analyse autour des sanctions des responsables des situations d'insécurité humaine et la prévention des exactions possibles par les gouvernements et les belligérants (B).

A - La prévention et la sanction des crimes contre l'humanité les plus graves

Les violations contre la dignité humaine du fait des conflits armés internes ou internationaux sont sanctionnées par les juridictions pénales internationales. Les atrocités commises pendant les deux grandes conflagrations mondiales ainsi que lors des génocides rwandais et yougoslave ont justifié le titre de compétence attribué à des juridictions, qu'elles soient préexistantes aux faits ou créées spécialement à cet effet. De fait, pour le TPIY les crimes contre l'humanité relèvent de la catégorie de ceux qui attirent l'attention de la communauté internationale : « La raison pour laquelle les crimes contre l'humanité scandalisent tellement la conscience de l'humanité et justifient l'intervention de la communauté internationale tient à ce que les actes résultent d'une tentative délibérée de cibler une population civile »99(*). Ces juridictions précisent le contenu des différents crimes dans un sens qui est favorable aux victimes. C'est ainsi que dans l'affaire Akayesu, le TPIR a condamné l'accusé pour viol entendu comme crime contre l'humanité. Le jugement énonce que : « les violences sexuelles faisaient partie intégrante du processus de destruction particulièrement dirigé contre les femmes tutsies et ayant contribué de manière spécifique à un anéantissement du groupe tutsi considéré comme tel »100(*).

Lorsqu'une juridiction a vocation d'assurer le respect du droit international humanitaire, elle a le devoir de respecter elle-même les principes fondamentaux de la matière pénale101(*). La CPI a un caractère permanent, contrairement aux TPIS. Elle couvre un large éventail des crimes contre l'humanité et de crimes de guerre reconnus, dont certains sont décrit de manière plus détaillée dans son statut, notamment la catégorie des violences sexuelles constitutives de crime contre l'humanité. Elle incrimine de nouveaux faits, par exemple le recrutement d'enfants soldats. L'action de la CPI est cependant limitée aux crimes les plus graves contre l'humanité. Claude GARCIN à ce propos note qu'il ne convient pas « d'asphyxier la CPI avec une compétence trop large... il fallait se concentrer sur les infractions les plus graves »102(*). Le traité de Rome a ainsi distingué quatre crimes : le crime de génocide, les crimes contre l'humanité, les crimes de guerre et le crime d'agression. Ces différents crimes portent une atteinte directe à la sécurité des individus. Un exemple illustratif de la compétence pénale en matière de sécurité humaine est l'action du conseil de sécurité qui défère la situation du Darfour à la CPI le 31 mars 2005 par la résolution 1593.

B- La sanction des responsables de l'insécurité de l'humanité

La menace d'adoption ou d'application effective de sanctions juridiques internationales est devenue ces dernières années un nouvel élément important de la panoplie des outils de prévention internationale et de sécurité des individus. Les tribunaux pénaux spéciaux chargés de connaître des crimes contre l'humanité commis au cours de conflits précis- ceux de l'ex-Yougoslavie, du Rwanda et, plus récemment, de la Sierra Léone amènera les éventuels auteurs de crimes contre l'humanité commis à réfléchir davantage aux risques de sanctions internationales qu'ils courent. La CPI quant à elle, établit un mécanisme qui permet de juger des responsables de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité. En effet, les juridictions pénales internationales sont compétentes à la base pour connaître des crimes commis par des personnes physiques. Elles soulèvent la responsabilité individuelle des personnes physiques ayant participé à des crimes contre l'humanité, à des infractions graves aux Conventions de Genève, à un génocide. La CPI renforce cet aspect car elle a compétence pour mettre en cause la responsabilité des gouvernants et des chefs d'Etats. Ces deux mesures constituent des applications importantes de la sécurité humaine103(*). Ce processus avait déjà été entamé par les TPIS qui ont jugés des responsables publics ayant participé aux exactions. Tel a été la cas du TPIY dans l'affaire Dusko Tadic104(*) dans laquelle le TPIY a reconnu coupable Dusko Tadic, qui a été président du parti démocrate serbe, secrétaire de la communauté locale et représentant de l'assemblée municipale de Priejor de persécution, traitement inhumains et cruels, viol, homicide, atteinte à l'intégrité physique et mentale dans des camps serbes pendant le conflit en ex-Yougoslavie en 1992. Le TPIR a rendu une décision semblable contre l'ancien premier ministre rwandais Jean Kabanda qui a été condamné à vie le 4 septembre 1998. Le TPIR estime avoir établi un précédent en matière de justice internationale en envoyant un message fort aux dirigeants politiques : ils peuvent désormais être appelés à répondre de leurs actes devant une juridiction internationale. La création de la Cour Pénale Internationale est dans ce sens une initiative positive en tant que moyen d'éviter l'instauration de « deux poids, deux mesures » et de « justice des vainqueurs », accusations dont font régulièrement l'objet des tribunaux spéciaux mentionnés plus haut105(*). En tout état de cause, le droit international coutumier reconnaît la compétence universelle en matière de génocide et de crime contre l'humanité, et plusieurs pays ont promulgué des lois conférents à leurs tribunaux la compétence de juger ces affaires. Certes, dans le passé, on parlait plus souvent de ces textes pour déplorer leur violation que pour rendre hommage à ceux qui respectaient leurs dispositions, mais le jugement et la condamnation par un tribunal belge, en 2001, de religieuses rwandaises accusées de complicité dans le génocide rwandais montre bien que la compétence universelle instaurée par les instruments commence à être prise au sérieux. La décision de la Chambre des Lords britannique dans l'affaire de l'extradition du général Pinochet en 1998/1999 a constitué un autre évènement juridique important qui a largement contribué à vider de sa substance la notion d'immunité souveraine des anciens chefs de gouvernement accusés d'avoir commis des crimes contre l'humanité pendant qu'ils étaient au pouvoir106(*). Pour une action plus efficace dans le domaine de la sécurité humaine, la CPI devrait dépasser l'étroite corrélation qui existe entre le système juridique et le système politique. En effet, l'extrême lenteur dont ont fait preuve les tribunaux pénaux spéciaux est symptomatique des liens forts entre le juridique et le politique tant sur le plan international qu'au niveau interne des Etats concernés.

Avec l'action des tribunaux pénaux spéciaux et celle de la CPI, l'impunité ne sera plus la règle, même s'il reste encore des initiatives à améliorer. Le TPIS fonctionnent sans le consentement des Etats tandis que la CPI est créé par traité et s'inscrit dans le cadre de consensualisme même s'il est tempéré par l'institution d'une procédure de coopération assez contraignante pour les Etats. Qu'à cela ne tiennent, la création d'une CPI prouve qu'il sera de plus en plus difficile pour un Etat de protéger les auteurs de crimes contre l'humanité et de génocide. « L'humanité dispose désormais d'un organe qui représente et garantit ses intérêts »107(*). Les Etats semblent s'être mis d'accord pour que la souveraineté n'empêche plus la poursuite des responsables des crimes les plus odieux.

Les juridictions pénales internationales aideront donc à réparer les ravages de l'impunité des coupables et à rehausser la stabilité internationale et la sécurité humaine. « L'homme et l'humanité sont indissociables, l'homme appartient à l'humanité et l'humanité subsume l'homme »108(*). L'un et l'autre forcent ainsi les portes du droit international et les rapports entre gouvernants et gouvernés entrent désormais dans sa compétence

DEUXIEME PARTIE: LA PORTEE POLITIQUE EVENTUELLE DE LA SECURITE HUMAINE.

« Mettre les personnes au centre de toutes nos préoccupations, voilà qui doit désormais guider notre mode de pensée et notre façon d'agir, c'est l'essence même de la sécurité humaine ». Kofi ANNAN, SG des Nations Unies.

La naissance de la notion de sécurité humaine montre l'aspiration à un droit global qui fait peu à peu jour. Ce droit global impliquera la transformation des droits spécifiques -liés à un Etat donné- et des règles de conduites dans les relations entre les Etats qui pourrait aboutir à leur disparition au profit d'un Etat universel. Cependant, avant d'en arriver là, il est nécessaire que les Etats mettent effectivement en application ces principes de sécurité humaine, de façon harmonisée et cohérente pour arriver partout à un résultat plus ou moins semblable. Ils disposent pour cela d'un cadre politique, plus approprié à mener leurs actions. En effet, les politiques internationales sont les moyens par lesquelles les Etats érigent des actions à mener dans leurs relations avec les autres Etats ou avec des groupes d'Etats (les organisations internationales ou interétatiques). C'est dans ce cadre que se joue une partie de la vie des individus et des communautés. Au début du XXème siècle, le sociologue allemand Max WEBER définissait la politique essentiellement par rapport à l'Etat qui était l'unique détenteur de la force légitime. Si l'Etat garde encore aujourd'hui cette autonomie politique, l'évolution des rapports individuels par le biais de la mondialisation amenuise cette autonomie dans les domaines économique et social. Pour défendre certains intérêts propres aux Etats et pour faire face aux menaces à caractère transnational qui instaurent un climat d'insécurité, il doit développer des réseaux et des stratégies de coopération internationale. C'est là que la « sécurité humaine » intervient, car l'entrée de nouveaux paradigmes confère un caractère extrêmement mouvant et évolutif à la notion ; les menaces d'aujourd'hui ne seront pas forcément celles de demain. C'est ainsi qu'elle commence à inspirer les actions politiques de la communauté internationale (chapitre un), en premier celles de l'ONU, même si elle trouve difficilement un écho dans les systèmes politiques africains. Malgré tout le tambourinage fait autour de la notion, elle reste encore entravée par un épais brouillard qu'il faudrait dissiper (chapitre deux)pour lui assurer une entière effectivité.

CHAPITRE 3 : LA SECURITE HUMAINE COMME GUIDE DES POLITIQUES DES ETATS.

Les relations internationales reposent principalement sur les intérêts des Etats, qui peuvent être divergents, voire conflictuels les uns des autres. Cette diversité des projets étatiques entraîne souvent des tensions internationales, même si elles ne tournent plus au conflit comme c'était le cas dans la première cinquantaine du XXème siècle. La recherche de l'accroissement de la sécurité nationale et la poursuite d'intérêts économiques étatiques particuliers peut aboutir à l'insécurité frontalière109(*) et la naissance de menaces. C'est un cercle vicieux qui est défini comme « dilemme de la sécurité »110(*) et qui conduit à la course aux armements, qui lui même constitue un véritable fléau, surtout dans les sous régions africaines où la mobilisation des armes a crée l'effet contraire. Car si les armes ne suffisent pas seules à créer la violence, il n'en reste pas moins que les poudrières explosent plus souvent que les bibliothèques »111(*). C'est la raison pour laquelle il est mis en place des politiques internationales à caractère préventif à des fins de sécurité humaine (section I). En effet, la sécurité humaine prône des valeurs comme le respect des droits de l'homme, la tolérance, la démocratie. Or, ces valeurs se retrouvent bien dans les politiques internes des gouvernements qui ont le souci de libérer leurs citoyens de la peur et de les prémunir contre le besoin. C'est l'un des objectifs des politiques publiques des gouvernements (même si comme nous l'avons vu un peu plus haut, la sécurité humaine n'y est pas mentionnée expressément) , les citoyens étant les principaux bénéficiaires de toutes formes de sécurité(section II).

* 95 Josiane TERCINET, «Le Conseil de sécurité et la sécurité humaine», précité, p.179.

* 96 Fredéric RAMEL, «Les institutions économiques internationales et la sécurité humaine. Vers un nouveau régime de sécurité?», La sécurité humaine, une nouvelle conception..., p. 189

* 97Press release no 2005/424/S, 12 avril 2005, http//web.worldbank.org/WBSITE/EXTERNAL/NEWS.

* 98 Claude GARCIN, « Aspects pénaux de la sécurité humaine » la sécurité humaine, nouvelle conception...op.cit, P.2245.

* 99 TPIY, jugement du 7 mai 1997, affaire Tadic, § 653.

* 100 TPIR, Affaire Akayesu,jugement du 2 septembre 1998,§ 45.

* 101 Ibid, § 253

* 102 Claude GARCIN, « Aspects pénaux de la sécurité humaine », précité.

* 103 Lloyd AXWORTHY, « La sécurité humaine : la sécurité des individus dans un monde en mutation »  précité

* 104 TPIY, jugement du 7 mai 1997

* 105 Rapport de la commission internationale de l'intervention et de la souveraineté des Etats, §3.30.

* 106 Ibid

* 107 Philippe CHRESTIEN, « L'influence des droits de l'homme sur l'évolution du droit international contemporain », Revue trimestrielle droits de l'homme, no 40, 1er octobre. 1999, p.736

* 108 Ibid. p. 738

* 109 Pierre de SENARCLENS, La politique internationale, col. Compact, Armand Colin, 4e éd. 2002, p.27

* 110 Ibid

* 111 Jean Paul HERBERT, «Sécurité humaine et nouvelle course aux armements», La sécurité humaine, une nouvelle conception..., op. Cit, p.144

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