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L'émergence d ela notion de sécurité humaine dans la protection internationale des droits de l'homme

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par Sabine Nicole Jiekak Mougoué
Université Catholique D'afrique Centrale, Yaoundé, Cameroun - Master en droits de l'homme et action humanitaire 2005
  

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SECTION I : LES FAIBLESSES DE LA NOTION DE SECURITE HUMAINE

La première insuffisance que l'on rencontre face à la notion de sécurité humaine est d'ordre conceptuelle : elle englobe trop de choses et le risque est grand qu'elle ne veuille rien dire à la fin (paragraphe I). La seconde tient du fait qu'elle n'est consacrée pour elle-même par aucun texte à caractère juridique sur le plan international (paragraphe II).

Paragraphe 1 : Les limites conceptuelles de la sécurité humaine.

La sécurité humaine est conçue comme une liberté négative (freedom for) mais aussi comme une liberté positive (freedom to, freedom for)142(*). Notion « extrêmement large »143(*), concept fourre-tout dans lequel tout ou à peu près peut rentrer144(*), projet ambitieux145(*), les critiques de la notion de sécurité humaine ne manquent pas. Ses précurseurs font de lui une notion « salvatrice », mais sans lui donner exactement les armes nécessaires pour accomplir sa tâche. L'utilisation du terme sécurité humaine pour rallier les appuis politiques et justifier le bien fondé des interventions à l'échelle internationale par différents acteurs a été faite sans s'assurer d'un véritable consensus quant au sens spécifique à lui donner. Quelle que soit la situation, « l'urgence d'agir ou l'action concertée doit se transposer au plan de la réflexion conceptuelle »146(*). La sécurité humaine change le système de références conceptuelles de la sécurité d'un sens exclusivement orienté vers la sécurité des territoires à un sens plus vaste de la sécurité des individus. Et même lorsque cette réflexion conceptuelle est menée, force est de constater que la sécurité humaine n'acquiert de signification ou de substance qu'appréhendée en termes de menaces ou de dangers susceptibles de compromettre la survie et la sécurité des individus et des collectivités ; elle est plus « définie par son absence plutôt que par sa présence et s'avère davantage pour ceux qui s'y réfèrent un concept intuitif »147(*).

Les raisons qui justifient la naissance de la notion sont certes pertinentes, à savoir influencer les politiques des Etats pour une reconceptualisation des liens entre développement et sécurité148(*), avec en toile de fond l'idée que la sécurité est un corollaire du développement. Cependant, à force d'étendre le champ d'application de la notion, elle est devenue un concept creux dont l'impact politique est faible et la portée juridique insuffisante. Or, la sécurité humaine ne peut acquérir un minimum de valeur juridique que si l'on s'accorde à lui donner un contenu si léger soit-il et un domaine d'application si réduit soit-il pour que son insertion dans « l'univers » juridique soit assurée. Or, « si chaque chose entraînant une dégradation du bien être humain est qualifiée de menace à la sécurité, ce terme perd toute son utilité analytique et devient un synonyme au sens large de mauvais »149(*). Elle ne peut ainsi ni être véritablement appliquée dans les rapports sociaux ni dicter un code de conduite aux Etats ou aux individus. De ce fait, aucune sanction ne découlerait de l'atteinte à la sécurité humaine ou du non respect de ses principes directeurs. Un point important est aussi le fait que les Etats et même la communauté internationale n'a pas encore intégré de manière formelle les pratiques impliquées par la notion de la sécurité humaine dans ses us. En effet, bien que reprise sur la scène internationale, sa diffusion est restreinte et elle n'a pas véritablement influencé les pratiques en cours, hormis celle du Canada.

Une autre limite de la notion tient à la difficulté de la démarquer des notions et pratique du droit international comme les droits de l'homme, la sécurité collective, l'ingérence humanitaire et même le développement durable150(*). Cette difficulté découle de l'imprécision des menaces à la sécurité humaine et des questions liées à leur localisation. En effet, c'est une chose de clamer que les individus sont exposés à des menaces beaucoup plus importantes et plus graves que celles prises en charge par les systèmes actuels de sécurité -et de droits de l'homme-, c'en est une autre d'identifier, de mesurer et d'évaluer les fléaux potentiels. Pour ces trois aspects, il convient de trouver une méthode adaptée. Or, avec une définition au sens large, toutes les menaces qui pourraient nuire aux individus devraient être prises en considération. Ce critère ne permet pas une évaluation globale151(*). Il est donc impossible, pour des raisons pratiques, de couvrir toutes les menaces à la sécurité humaine. Taylor OWEN propose une évaluation basée sur le principe fondamental de la sécurité humaine, à savoir l'insécurité152(*) . La liste des menaces potentielles est longue, mais si on l'analyse sous l'angle des fléaux présents dans une région précise ou dans un pays déterminé, elles tendent à être plus précises. Ainsi, faire de la validité régionale le critère permettant de retenir ou non les menaces signifie qu'aucune menace grave ne sera exclue153(*). En outre, il est nettement mieux d'utiliser les données locales plutôt que nationales ou internationales car, il existe des différences considérables entre pays et à l'intérieur d'un même pays. Les menaces à la sécurité humaine doivent donc être retenues en raison de leur gravité et de leur pertinence régionale plutôt que sur la base d'une liste préétablie ou des données disponibles au niveau mondial154(*) pour respecter l'esprit original de la notion. Pour établir si une question donnée mérite d'être énoncée en terme de sécurité humaine, il convient de déterminer dans quelle mesure la sécurité des individus est en danger155(*).

Pour que la sécurité humaine puisse véritablement servir à une protection plus efficace des droits de l'homme, ou des individus dans leur ensemble, il apparaît indispensable d'en affirmer la portée. Or, la sécurité humaine n'est pas assez précise pour qu'on puisse en tirer les effets juridiques. Pour se faire, il faudrait que ses nouvelles idées confèrent ou privent de pouvoir les différents acteurs politiques. Et cela n'est réellement possible que si la notion est insérée ou prise comme référence dans des instruments juridiques.

* 142 Jean DAUDELIN, article précité, reprenant Art WRIGHT, Human development, note 12, p. 307

* 143 Daniel COLARD, «La doctrine de la «sécurité humaine»...p.41

* 144 Ibid.

* 145 Charles-Philippe DAVID et Jean François RIOUX, « Le concept de sécurité humaine», article précité,p.21

* 146 Ibid.

* 147 Ibid.

* 148 De 1970 à 1980, des rapports ont été publiés lors des conférences des Nations Unies sur le thème des relations entre le désarmement et le développement. L'idée étant que le Nord devrait procéder à son désarmement et consacrer les ressources dégagées par la réduction de l'achat et de la fabrication d'armes au développement des pays du tiers monde. C'est ce débat que rouvre le rapport du PNUD de 1994 en liant la sécurité au développement.

* 149 Daniel DEUDNEY, «The Case Against Linking Environmental Degradation an d National security» Millennium 19, 1998, p. 464, cité par Keith KRAUSE, «Une approche critique de la sécurité humaine», op. Cit, p. 76.

* 150 Voir Rapport 1994 du PNUD sur le Développement humain.

* 151 Taylor OWEN, « Des difficultés et de l'intérêt de définir la sécurité humaine », précité, p. 23

* 152 Ibid.

* 153 Ibid.

* 154 Ibid, p. 25

* 155 Lloyd AXWORTHY précité.

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