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Les aspects juridiques de la protection de l'environnement dans les forets communautaires au Cameroun

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par Henry NKOTO EDJO
Université de Limoges - Master2 Droit International et Comparé de l'environnement 2007
  

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Section2 : Les obstacles juridiques à l'exploitation des forêts communautaires.

La prise en charge de l'objectif de protection de l'environnement se trouve obstruée dans la phase d'exploitation des forêts communautaires, du fait de certains facteurs qui sont relatifs tout d'abord au coût élevé des conditions d'exploitation imposées par la loi (P2), auxquelles s'ajoutent une pluralité avérée de lacunes juridiques (P1).

P1- La pluralité de lacunes juridiques.

Plusieurs insuffisances de nature juridique se présentant finalement comme notoires, sont ici constitutives de véritables sources de faiblesses du dispositif de droit voué à la protection de la nature. Tout part de l'amalgame crée par l'usage simultané des termes forêt communautaire et foresterie communautaire ; en effet, le concept de foresterie communautaire bien qu'utilisé régulièrement n'est malheureusement défini dans aucun texte de l'ordre juridique interne du pays, ce qui a occasionné un flou d'interprétation chez ses utilisateurs. C'est ainsi que certains confondent forêt communautaire à foresterie communautaire. Les deux termes se substituent mutuellement et sont souvent utilisés comme renvoyant à la même réalité. D'un autre point de vue, il convient de relever toujours dans le registre des faiblesses juridiques, l'insuffisance de précisions faites sur le mode d'exploitation des forêts communautaires (A) à laquelle vient s'ajouter la souveraine ignorance d'une méthode caractéristique de la gestion participative des forêts à savoir le reboisement (B).

A- La définition lacunaire du mode d'exploitation des forêts communautaires.

Contrairement aux dispositions de l'article 54 de la loi forestière du 20 janvier 1994 qui prévoit la possibilité d'exploitation de la forêt communautaire en régie, par vente de coupe, par autorisation personnelle de coupe ou par permis conformément au plan de gestion approuvé par l'administration en charge des forêts ; une circulaire du ministère en charge des forêts à savoir la lettre circulaire N° 0677/LC/MINEF/DF/CFC du 23 février 2001 a eu pour effet de suspendre l'exploitation des forêts communautaires par vente de coupe, ceci à cause des dégâts écologiques que cette forme d'exploitation causait. Tout en reconnaissant l'importance d'une telle mesure dans la gestion durable des ressources forestières, on peut tout de même déplorer que la lettre circulaire dans ce cadre soit d'une légalité douteuse, conformément au principe du parallélisme des formes juridiques67(*). Entre la loi et la lettre circulaire subsiste quand même une contradiction notable qui pose nécessairement un problème de hiérarchie des normes juridiques68(*).

En effet, il n'est pas possible qu'une lettre circulaire qui est une mesure interne du ministère compétent en matière de contrôle et de suivi des forêts communautaires, et dont la durée est extrêmement limitée dans le temps puisse déboucher sur l'arrêt total d'activités règlementées par la loi. La démarche qui consiste à remplacer une disposition de la loi par une lettre circulaire, est contraire au principe de la hiérarchie des normes juridiques, par le fait qu'il y a modification et dénaturation de la loi par un acte règlementaire qui lui est subordonné ceci en l'absence de toute habilitation législative. L'on aurait pu valablement s'attendre à une validation législative de cette circulaire, hélas, le législateur ne s'est toujours pas prononcé sur la suspension de l'exploitation industrielle des forêts communautaires, d'où l'on peut donc conclure sans risque de se tromper que la situation est contraire au principe du parallélisme des formes, puisque la mesure de suspension a excédé deux (2) années et est donc devenu par ce fait une décision non plus provisoire mais définitive.

Cette situation est suffisante pour expliquer les nombreuses hésitations dont font preuve les acteurs du processus, lorsqu'elles de retrouvent à cette importante étape qu'est le choix du mode d'exploitation à appliquer dans la forêt communautaire. Somme toute, si la suspension de l'exploitation par vente de coupe est à n'en point douter une mesure favorable de gestion durable des forêts, il convient de reconnaitre l'impératif de normalisation de sa juridicité.

La suspension de l'exploitation par vente de coupe n'est pas la seule incohérence juridique de protection de l'environnement, il convient tout aussi de déplorer l'oubli dont a été victime le reboisement communautaire.

B- La non prise en compte du reboisement.

La législation et la règlementation forestière n'abordent pas de manière spécifique la question du reboisement communautaire. Cette une situation assez grave au regard de la question de l'inadéquation du régime juridique en vigueur aux différentes zones écologiques du pays. Le reboisement aurait été d'une utilité notoire surtout dans les régions aux tendances du grand nord où les quelques forêts existantes se densifient de moins en moins.

Sur ce point particulièrement crucial pour les régions septentrionales, il serait donc salutaire d'insérer dans la loi forestière des règles spécifiques au reboisement communautaire, qui s'inspireraient de la règlementation des forêts communautaires. Il pourrait s'agir par exemple de maintenir la propriété de l'Etat sur le terrain objet du reboisement, et reconnaitre à la communauté un droit de propriété sur les arbres plantés et autres ressources naturelles se trouvant sur ledit terrain.

A l'origine, la FAO69(*) a défini la foresterie communautaire comme s'intéressant à toutes les situations dans lesquelles les populations locales sont étroitement associées à une activité forestière. Ces situations très diverses vont de l'établissement de parcelles boisées dans les régions déficitaires en bois et autres produits forestiers pour les besoins locaux, aux activités traditionnelles de communautés forestières. Ne serait il pas utile de se demander pourquoi ce nécessaire intérêt pour le reboisement communautaire aujourd'hui.

C'est en réalité parce que dans la plupart des pays du monde, la foresterie et l'agriculture étaient devenues à une époque donnée des activités presque totalement séparées. Par tradition, la plupart des services forestiers s'occupaient essentiellement des arbres dans des aires définies comme forêts, alors que la plupart des services agricoles ne se chargeaient que des essences qui avaient été domestiquées et adoptées comme productions agricoles. Entre ces deux extrêmes, la majeure partie de la végétation forestière conservée par les populations rurales était effectivement ignorée et passait même inaperçue. Malgré le fait que la fourniture des produits forestiers aux populations locales occupait une place importante dans les activités des services forestiers, les interventions de l'Etat visant à inciter les ruraux à planter des arbres avaient été fréquemment soupçonnées d'être une aliénation déguisée des terres et, en raison de la coercition exercée, elles avaient trop souvent servi de moyen d'exécuter des projets étatiques. Cette situation qui a motivé que l'on tourne le dos au reboisement s'avère aujourd'hui caduque ; c'est pourquoi plusieurs auteurs soutiennent que, les pouvoirs publics doivent montrer la voie par des actions de démonstration qui respecteraient la vocation des sols ainsi mis en valeur par l'usage des essences les plus intéressantes70(*). cette solution aurait fait ses preuves en Afrique de l'ouest, au Rwanda et au Burundi. De plus, le nouveau contexte économique et politique international qui est orienté vers le développement durable, a poussé de nombreux Etats à se tourner vers une foresterie communautaire véritablement axée non seulement vers la capitalisation des intérêts des communautés, mais aussi vers la promotion du reboisement en tant que garantie de pérennité de la ressource forestière.

A cette multitude de lacunes juridiques s'ajoute la cherté instituée des conditions d'exploitation des forêts communautaires, qui constitue à n'en point douter, une limite dans le processus d'institutionnalisation du développement durable.

* 67 René CHAPUS, Droit Administratif Général, tome1, Montchrestien 12è édition. Page 1010.

* 68 Jean SALMON, Dictionnaire de droit international public, Bruylant 2001, page 546 :  la hiérarchie des normes est la modalité des rapports existant entre les normes à l'intérieur d'un système juridique, telle que toutes les normes du système peuvent être classées selon un ordre hiérarchique, les normes inférieures devant être conformes aux normes supérieures.

* 69 Foresterie communautaire : un examen de dix ans d'activité in Archives de la FAO produit par le département des forêts. Le document est consultable en ligne.

* 70 J. COUDRAY&M L BOUGUERRA, Environnement en milieu tropical, ESTEM. Page 134.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand